N° 3363 annexe 42 - Rapport de M. Michel Diefenbacher sur le projet de loi de finances pour 2007 (n°3341)



N
° 3363

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2006

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2007 (n° 3341),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 42

PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
AVANCES A DIVERS SERVICES DE L’ÉTAT
OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS

Rapporteur spécial : M. Michel DIEFENBACHER

Député

____

SYNTHÈSE 5

INTRODUCTION 9

CHAPITRE PREMIER : LA MISSION PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT 11

I.– L’ARCHITECTURE DU COMPTE DES PARTICIPATIONS FINANCIÈRES 11

A.– UN COMPTE CONSACRÉ PAR LA LOI ORGANIQUE 11

B.– UNE MISSION, DEUX PROGRAMMES 13

C.– LE PÉRIMÈTRE COMPTABLE ET FINANCIER 14

D.– LE TRAITEMENT BUDGÉTAIRE DES FRAIS DE CESSIONS DE TITRES 16

II.– UNE VALORISATION EXCEPTIONNELLE DU SECTEUR PUBLIC 18

A.– LE REDRESSEMENT DES ENTREPRISES PUBLIQUES 20

1.– Le rétablissement des résultats 20

2.– Une rentabilité opérationnelle toujours solide 24

3.– Un assainissement financier réel mais une situation toujours préoccupante 26

B.– LA PROFESSIONNALISATION DE L’ÉTAT ACTIONNAIRE 28

1.– Le fonctionnement de l’Agence des participations de l’État 32

2.– Les progrès de la gouvernance impulsés par l’État actionnaire 35

C.– UNE GESTION RÉACTIVE, OPTIMISÉE ET PRAGMATIQUE DES PARTICIPATIONS PUBLIQUES, DONNANT AUX ENTREPRISES LES MOYENS DE LEUR CROISSANCE 39

1.– L’État « investisseur et stratège » 42

a) Les dotations et avances d’actionnaire 42

b) Les recapitalisations par ouverture du capital aux capitaux privés 47

2.– L’État « clarificateur et réactif » 50

a) Les prises de participations temporaires de l’État : France Télécom et Alstom 50

b) La priorité donnée au développement des entreprises conciliée avec une valorisation optimale du patrimoine public 52

III.– UNE CONTRIBUTION DÉCISIVE AU DÉSENDETTEMENT PUBLIC 56

A.– LE FINANCEMENT DE POLITIQUES PRIORITAIRES 57

1.– Le financement de la recherche 57

2.– Le financement des investissements dans les infrastructures de transport 61

B.– LES DEUX TIERS DES MOYENS CONSACRÉS AU DÉSENDETTEMENT PUBLIC 62

1.– Le désendettement « passif » au profit des organismes chargés d’apurer les dettes du passé 62

2.– La place désormais prépondérante du désendettement direct de l’État 65

C.– L’HYPOTHÈQUE DES RÉGIMES SPÉCIAUX DE RETRAITE 66

1.– Les régimes spéciaux de retraite, une lourde « dette » pesant sur les entreprises et sur l’État 66

2.– Des progrès dans la réforme des modes de financement mais pas dans celle des droits 70

a) La proche finalisation de la réforme du financement des pensions des fonctionnaires de La Poste 70

b) La réforme des modalités de financement des régimes spéciaux : les IEG et la RATP 71

c) L’inéluctable rapprochement des droits des régimes spéciaux vers le droit commun 75

CHAPITRE SECOND : LA MISSION AVANCES À DIVERS SERVICES DE L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS 77

EXAMEN EN COMMISSION 81

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 83

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 97 % des réponses étaient parvenues à votre Rapporteur spécial.

Synthèse

● Les ressources du compte d'affectation spéciale – mission Participations financières de l’État (le traditionnel compte dit de privatisation) sont exceptionnellement importantes depuis 2005.

Elles ont dépassé 10,0 milliards d'euros en 2005, grâce à la cession pour 2,1 milliards d'euros de titres de GDF au moment de son introduction en bourse au printemps et à celle pour 1,2 milliard d'euros de titres France Télécom à l’automne, auxquelles se sont ajoutés, pour 3,7 milliards d'euros, le remboursement par l’ERAP des avances d’actionnaires accordées par l’État et, pour 0,9 milliard d'euros, des cessions de titres SNECMA au cours de sa fusion avec SAGEM.

En 2006, les recettes de privatisation devraient atteindre le montant historique de 17,8 milliards d'euros (dont 17,1 milliards d'euros encaissés au 10 octobre 2006), dont 13,0 milliards d'euros tirés de la privatisation des sociétés concessionnaires d’autoroutes, 0,7 milliard d'euros de la cession de titres EDF aux salariés du groupe et 2,0 milliards d'euros de la vente des participations de l’État dans Alstom.

Le rythme des privatisations devrait cependant ralentir en 2007, un montant forfaitaire de 5 milliards d'euros, soit moins de 5% de la valeur du portefeuille financier détenu par l’État, étant retenu dans le présent projet de loi de finances. Cela porterait à 50,4 milliards d'euros le total du produit des cessions de participations réalisées entre 2002 et 2007.

● Les années 2005 et 2006 marquent un profond changement dans l’affectation des ressources de privatisation.

En 2005, de manière exceptionnelle, 7,4 milliards d'euros, soit près des trois quarts du produit des privatisations, ont été consacrés au financement de politiques prioritaires : la recherche (1,7 milliard d'euros versés à l’Agence de l’innovation industrielle, 1,3 milliard d'euros à l’Agence nationale de la recherche et 0,1 milliard d'euros aux fondations) et les infrastructures de transport (4 milliards d'euros versés à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France).

En 2006, la priorité est donnée au désendettement de l’État : 13,3 milliards d'euros (dont 8 milliards d'euros versés au 10 octobre 2006) sont directement affectés à la Caisse de la dette publique, ce qui permettra d’atténuer de 0,5 milliard d'euros par an la charge de la dette. C’est la première fois depuis 1994 que les ressources de privatisations sont utilisées d’une manière aussi marquée pour alléger la dette de l’État.

Principales recettes perçues en 2005

Renault (offre réservée aux salariés)

20

Bull (remboursement des avances d’actionnaires et intérêts)

517

SGGP (remboursement de la prime d’émission)

20

France Télécom (offre réservée aux salariés)

335

SNECMA/SAGEM (produit de fusion)

913

ERAP (remboursement d’avances d’actionnaire)

250

Bull (cession)

20

Air France (offre réservée aux salariés)

48

ERAP (intérêts sur avances)

21

SNECMA (offre réservée aux salariés)

63

France Télécom (cession de titres)

1.200

TSA (dividende exceptionnel)

60

GDF (cession de titres)

2.114

SAFRAN (offre réservée aux salariés, deuxième échéance)

29

France Télécom (cession de bons de souscription d’actions, BSA)

38

GDF (offre réservée aux salariés)

303

France Télécom (offre réservée aux salariés)

279

ERAP (remboursement des avances d’actionnaires)

3.700

TOTAL

10.032

Principales recettes perçues en 2006 jusqu’au 2 octobre

France Télécom (échéance de l’offre réservée aux salariés)

43

EDF (échéance de l’offre réservée aux salariés)

690

SANEF (cession par l’État)

2.014

APFR (cession par l’État)

2.421

ASF (cession par l’État)

4.892

Air France – KLM (échéance de l’offre réservée aux salariés)

21

SAFRAN (deuxième échéance de l’offre réservée aux salariés)

35

ERAP (versement de la plus-value réalisée à l’occasion de la cession de titres et BSA France Télécom)

459

Alstom (cession de la participation détenue par l’État)

1.982

Aéroports de Paris (ADP) (greenshoe)

96

Autoroutes de France (ADF) (reversement)

3.730

SAFRAN (troisième échéance de l’offre réservée aux salariés)

39

ADP (première échéance de l’offre réservée aux salariés)

55

TOTAL

17.086

L’AFFECTATION DES RECETTES DE PRIVATISATION DEPUIS 2002 (a)

(en millions d’euros)

   

2002

2003

2004

2005

réalisé et prévu (b) pour 2006

prévision 2007 (c)

Désendettement

Caisse de la dette publique

 


500

 

 

8.000
+ 5.300


3.100

Fonds de réserve pour les retraites

500

         

Charbonnages de France

454

1.408

940

80

1.400

 

EPFR

1.819

 

1.126

230

515

500

ERAP

 

 

2.100

     

EMC

 

42

84

370

 

 

Autres dotations

 

     

1.500 

 

Sous-total (réalisé)
(prévu)

2.773

2.050

4.250

680

9.915
16.715


3.600

Dotations et avances

GIAT

 

287

250

300 

200

100

ADP

65

 

 

 

 

 

Bull

350

 

 

517

 

 

SNPE

80

 

 

 

 

 

Ports autonomes

38

31

 

 

 

 

DCN

 

334

 

120

150 

150

Imprimerie nationale

 

18

65

132

   

CGMF

 

40

 

58

 

 

OSEO-Sofaris

 

 

580

80

   

OSEO

     

208

   

SNCF (fret)

 

 

 

250

450

100

Sonacotra

         

50

SNCM (avance à CGMF)

 

 

 

 

129

 

Sous-total (réalisé)
(prévu
)

533

710

895

1.665

279

929


400

Acquisition de titres

Alstom

 

500

215

 

 

 

Tessenderlo (EMC) (achat de titres)

     

208

   

Dotation de la société chargée de valoriser les biens immobiliers de RFF (SOVAFIM)

 

 

 

 

100

200 ?

Sous-total

– 

500

215

208 

100

200/500

Subventions et autres dotations

RFF

1.362

 

 

 

 

 

Agence nationale de la recherche

 

 

 

1.262

   

Fondations

 

 

 

64

25

 

Établissement public du campus de Jussieu

     

110

   

EMOC et EPV

     

100

   

OSEO-Anvar

     

132

   

Laboratoire biotechnologie

 

 

 

     

ADEM

 

 

 

20

   

AFITF

 

 

 

4.000

   

Agence de l'innovation industrielle

 

 

 

1.700 

   

RATP (soulte retraite)

         

500/800?

Sous-total

1.362

– 

– 

7.388

25

500/800

TOTAL

4.668

3.160

5.360

10.036

10.346
17.769

5.000

(a) Ressources du compte des participations financières de l’État nettes des frais de cession de titres.

(b) Prévisions en italique.

(c) Estimations de votre Rapporteur spécial inférées à partir des documents budgétaires et des réponses fournies par le ministère de l’Économie, des finances et de l’industrie.

INTRODUCTION

La valeur boursière du portefeuille des participations de l’État dépasse aujourd’hui 120 milliards d'euros.

En 2002, la situation financière des entreprises publiques était extrêmement préoccupante : 18 milliards d’euros de pertes, 180 milliards d’euros de dettes, des capitaux propres ramenés à 26 milliards d’euros.

Aujourd’hui, tous les indicateurs économiques et financiers mettent en évidence un net redressement. Les excédents ont été rétablis dès 2003, les bénéfices nets atteignant jusqu’à 12,4 milliards d'euros en 2005. La dette des entreprises publiques a été réduite d’un tiers (– 52 milliards d'euros). Les fonds propres des entreprises publiques ont presque doublé (+ 38 milliards d'euros)

L’État a pleinement bénéficié de ce redressement. Entre 2002 et 2007, les dividendes versés par les entreprises publiques devraient approcher les 22 milliards d'euros. Le produit des privatisations s’établira parallèlement à environ 50 milliards d'euros, grâce en particulier à des années 2005 et 2006 fastes (10 puis 18 milliards d’euros de cessions).

Ces performances remarquables témoignent des progrès accomplis dans l’exercice de la mission de l’État actionnaire, impulsés en particulier par la Commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur la gestion des entreprises publiques qui a rendu ses conclusions à l’été 2003. Il est désormais clairement établi que les entreprises publiques sont d’abord des entreprises et que l’État actionnaire doit prendre en compte ses intérêts patrimoniaux. Dotée de moyens renforcés, l’Agence des participations de l’État, créée en 2004, a joué un rôle déterminant dans cette évolution. Elle est aujourd’hui garante d’une bonne application de la charte des bonnes pratiques qui tire les leçons des errements du passé et définit clairement les nouvelles pratiques de gouvernance.

Autre progrès décisif : les abondantes recettes de privatisations sont de moins en moins consacrées à « apurer » les dettes des entreprises publiques (qu’il s’agisse du cantonnement des actifs du Crédit Lyonnais qui, au total, aura eu un « coût » net pour l’État de l’ordre de 7 milliards d'euros, ou de l’extinction progressive des activités de Charbonnages de France, qui aura mobilisé 4,3 milliards d'euros) et de plus en plus à désendetter directement l’État : en 2006 et 2007, plus de 16 milliards d'euros devraient être affectés à la Caisse de la dette publique.

Si l’État actionnaire a joué un rôle déterminant dans la modernisation de notre secteur public, beaucoup reste à faire pour garantir et renforcer la compétitivité des entreprises publiques, gage du respect des contribuables et de la bonne exécution des services publics.

Le premier défi est celui de la compétitivité. Les entreprises publiques françaises comptent des charges de personnel rapportées à leur chiffre d’affaires sensiblement plus élevées que leurs concurrents européens. D’importants progrès ont été faits. Il faudra les poursuivre activement.

Le deuxième défi est celui du désendettement. Avec une dette financière nette près de deux fois supérieure aux capitaux propres (après cependant que ce ratio ait dépassé huit en 2002 !), les participations financières accusent une évidente fragilité financière. Alourdie du poids des engagements de retraites au titre des régimes spéciaux – ou, dans le cas de La Poste, des modalités particulières de financement de régimes « normaux »  – cette fragilité financière constitue un risque qu’il ne faut pas sous-estimer.

À la croisée des deux enjeux décisifs que constituent les charges sociales et la dette se situe la question difficile des régimes spéciaux de retraite. Votre Rapporteur spécial montrera que leur rapprochement vers le droit commun des salariés et des fonctionnaires sera sans doute la mesure la plus juste et la plus efficace pour assurer la pérennité des entreprises publiques auxquelles les Français sont à juste titre profondément attachés.

CHAPITRE PREMIER : LA MISSION PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT

I.– L’ARCHITECTURE DU COMPTE DES PARTICIPATIONS FINANCIÈRES

La loi organique relative aux lois de finances (n° 2001-692 du 1er août 2001) consacre l’existence du compte d'affectation spéciale dit de privatisation (1). Le deuxième alinéa du I de son article 21 dispose ainsi que « les opérations patrimoniales liées à la gestion des participations financières de l’État, à l’exclusion de toute opération de gestion courante, sont, de droit, retracées sur un unique compte d'affectation spéciale ».

En excluant les opérations de gestion courante, le législateur organique a entendu limiter le champ du compte aux activités proprement patrimoniales de l’État actionnaire, conformément au recentrage d’ensemble des comptes d'affectation spéciale sur leur objet grâce à l’exigence désormais posée d’une relation directe « par nature » entre les ressources affectées dont ils bénéficient et les dépenses qu’ils financent.

Dans cet esprit, l’article 48 (2) de la loi de finances initiale pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005) a ouvert dans les écritures du Trésor un compte d'affectation spéciale Participations financières de l’État reprenant, en les simplifiant, l’essentiel des modalités constitutives du compte de privatisations.

Le compte est ainsi crédité, tout d’abord, du produit des cessions de titres, parts ou droits de sociétés, que ceux-ci soient détenus directement ou « indirectement » par l’État.

Par son caractère très général, cette formule permet d’éviter l’énumération des sociétés détenues indirectement et appelées à verser des produits de cession au compte d'affectation spéciale à laquelle contraignait la formulation restrictive retenue dans la définition du compte n° 902-24. Celui-ci bénéficiait en recettes « du produit des ventes par l’État de titres, de parts ou de droits de sociétés » ; auquel de nombreux textes législatifs avaient par suite ajouté « le reversement, sous toutes ses formes, par les sociétés Thomson SA, Sofivision et Sogepa, du produit résultant de la cession ou du transfert de titres des sociétés Thomson Multimedia, Thalès et EADS, les reversements résultant des investissements réalisés directement ou indirectement par l’État dans des fonds de capital investissement, le reversement, sous toutes ses formes, par l’établissement public Autoroutes de France, du produit résultant de la cession de titres qu’il détient dans toute société concessionnaire d’autoroutes ».

En outre, le compte bénéficie des reversements des dotations en capital, des produits de réduction de capital ou de liquidation, des remboursements des avances d’actionnaires « et créances accumulées », la formulation étant ici identique à celle retenue pour le compte n° 902-24.

La seule différence réside dans la mention, dans le nouveau compte, du « remboursement des créances résultant d’autres interventions financières de nature patrimoniale de l’État », qui vise de manière générale l’ensemble des opérations complexes sur titre de participation et de créance.

En parallèle, les dépenses du compte qui, conformément aux principes constitutifs des comptes d'affectation spéciale, ne peuvent dépasser le montant des ressources effectivement perçues, sont constitutives d’une mission Participations financières de l’État dotée dans la loi de finances initiale pour 2006 d’un seul programme de même nom retraçant les opérations de nature patrimoniale liées à la gestion des participations financières de l’État « à l’exclusion de toute autre ».

Cette dernière condition, posée expressément par la loi organique, impose que les actions de la mission intéressent directement l’État actionnaire et se distinguent par conséquent des interventions que l’État conduit en tant que client ou prescripteur de missions de service public.

Dans ce contexte, les opérations retracées dans le programme sont celles qui conduisent directement à la création et à l’augmentation ou à la restructuration des participations financières de l’État.

Le responsable du programme est le directeur général de l’Agence des participations de l’État (APE), service à compétence nationale créé par le décret n° 2004-964 du 9 septembre 2004 et rattaché à la direction générale du Trésor et de la politique économique. La mission de l’agence est de veiller aux intérêts patrimoniaux de l’État au sein des principales entreprises et principaux organismes contrôlés ou détenus, majoritairement ou non, directement ou indirectement, par l’État.

La précision du texte organique sur le compte des participations financières ne laissait au total qu’une faible marge de manœuvre au créateur du compte. Seules trois principales questions demeuraient, à cet égard, ouvertes.

Le fait qu’une mission ne comporte qu’un seul programme, quelle que soit par ailleurs la nature particulière des opérations retracées et quand bien même la mission n’appartient pas au budget général, ne paraissait pas conforme, aux yeux de votre Rapporteur spécial, à la lettre de l’article 7 de la loi organique relative aux lois de finances qui dispose clairement qu’« une mission comprend un ensemble de programmes concourant à une politique publique définie ».

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision 2005-530 DC du 29 décembre 2005 relative à la loi de finances pour 2006, a confirmé cette analyse et considéré qu’ « en l'état de la législation, les comptes spéciaux ne devraient pas comporter un programme unique », tolérant cependant une exception temporaire pour l’exercice 2006 « dans le cadre de la mise en place d'une nouvelle nomenclature budgétaire [et] afin de laisser aux autorités compétentes le temps de procéder aux adaptations nécessaires et de surmonter les difficultés inhérentes à l'application d'une telle réforme ».

Le présent projet de loi de finances procède à cette adaptation en créant, à côté du programme n° 731 Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État un nouveau programme, n° 732, Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État dont l’objet correspond à l’ancienne action n° 2 de l’ancien programme unique.

La finalité du premier programme de la mission demeure de contribuer à la meilleure valorisation possible des participations financières de l’État grâce :

– à la maximisation de la valeur des participations financières ;

– au succès des opérations de cession des participations financières ;

– à la généralisation des meilleures pratiques de gouvernance, l’Agence des participations de l’État veillant à cet égard à la professionnalisation des conseils d’administration et à la généralisation de la société comme mode juridique d’organisation.

Le programme Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État contribue, pour sa part, et à partir de la meilleure valorisation possible des participations financières de l’État,  au désendettement de l’État et des administrations publiques dans leur ensemble.

Une deuxième question laissée ouverte par la loi organique relative aux lois de finances tenait au périmètre précis des opérations du compte. La loi organique fait référence aux participations financières de l’État – sans autre précision – les modalités précises de détention n’étant pas évoquées.

Le Gouvernement a retenu l’acceptation la plus large : il entend les participations financières de l’État comme les droits que l’État détient sur d’autres entités, qu’ils soient matérialisés ou non par des titres qui créent un lien durable avec ces entités et comportent une contrepartie figurant au bilan de l’État et que ces droits découlent de la détention de parts de capital, du statut juridique de ces entités ou de l’existence d’un contrôle exercé sur elles.

Le tableau ci-après fournit une liste indicative des entités concernées.

LES ENTITÉS RELEVANT DU PÉRIMÈTRE DE
L'AGENCE DES PARTICIPATIONS DE L'ÉTAT (a)

Alstom.

Agence pour la diffusion de l'information technologique (ADIT).

Aéroport de Bâle-Mulhouse.

Aéroports de Paris (ADP).

Aéroports de province demeurant de la responsabilité de l'État.

Air France (KLM).

Arte France.

Autoroutes de France.

Autoroutes Paris-Rhin-Rhône (SAPRR).

Autoroutes du Nord et de l'Est de la France (SANEF).

Autoroutes du Sud de la France (ASF).

Bull.

Caisse nationale des autoroutes.

Casino d'Aix-les-Bains.

Charbonnages de France (CDF).

Civi.pol conseil.

CNP-Assurances.

Compagnie générale maritime et financière (CGMF).

Développement des agro-industries du Sud (DAGRIS).

DCN.

Défense conseil international groupe DCI.

Électricité de France (EDF).

ERAP.

Établissement public de financement et de restructuration (EPFR).

Établissement public de réalisation de défaisance (EPRD).

France Télécom.

France Télévision.

Gaz de France (GDF).

GIAT Industries.

La Française des jeux.

La Poste.

Ports autonomes.

Radio France.

Radio France international (RFI).

(a) Ainsi que leurs filiales et participations.

LES ENTITÉS RELEVANT DU PÉRIMÈTRE DE
L'AGENCE DES PARTICIPATIONS DE L'ÉTAT (SUITE)

Radio France Outre-Mer (RFO).

Régie autonome des transports parisiens (RATP).

Renault SA.

Réseau ferré de France (RFF).

SEMMARIS.

Société concessionnaire française pour la construction et l'exploitation du tunnel routier sous le Mont-blanc (ATMB-Autoroutes et tunnel du Mont-blanc).

Société de gestion de garanties et de participations (SGGP).

Société de gestion et participations aéronautiques (SOGEPA).

Société des chemins de fer luxembourgeois.

Société des participations du CEA (AREVA).

Société financière de radiodiffusion (SOFIRAD).

Société française d'exportation de systèmes avancés (SOFRESA).

Société française d'études et réalisations équipements aéronautiques.

Société française du tunnel routier du Fréjus (SFTRF).

Société Imprimerie nationale.

Société internationale de la Moselle.

Société nationale des chemins de fer français (SNCF).

SNECMA.

Société nationale des poudres et explosifs (SNPE).

Société néo-calédonienne d'énergie ENERCAL.

Thomson SA.

Et, par ailleurs, les participations dans les entreprises dont l'État détient moins de 1 % du capital.

C’est un périmètre légèrement plus restreint qui a été retenu pour l’établissement des comptes combinés des participations de l’État, limités aux cinquante principales entités du secteur public.

Afin que l’État mesure mieux la valeur réelle du patrimoine que constituent ses participations financières et qu’il soit en mesure de cerner avec précision l’exposition aux risques que portent les entreprises publiques, l’article 142 de la loi n° 2001-415 du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques, modifié par l’article 137 de la loi n° 2003-706 du 1er  août 2003 de sécurité financière dispose, en effet, que les participations publiques doivent faire l’objet d’une présentation comptable « unifiée ».

L’agence des participations de l’État établit ainsi, depuis 2003 (3), des comptes combinés des entreprises contrôlées par l’État et des immobilisations financières de l’État.

Votre Rapporteur spécial rappelle que les comptes combinés sont différents des comptes consolidés usuels, principalement pour trois raisons :

– ils ne traitent pas des écarts d’acquisitions résultant pour l’État de la dépréciation de la valeur boursière des entreprises publiques de premier rang (mais ils reprennent bien les écarts d’acquisition constatés par ces dernières pour leurs filiales) ;

– par vocation, ils ne séparent pas, dans le bilan des entreprises, la part qui correspond aux participations de l’État de celle liée aux intérêts minoritaires, l’ensemble des capitaux propres et des dettes des entreprises étant comptabilisé quelle que soit la part détenue par l’État ; cependant, afin de présenter une image plus fidèle du portefeuille financier réel de l’État, sept entités du périmètre (Thalès et EADS depuis 2003, Air France KLM, Alstom, France Télécom, Safran et Renault à partir de 2005) sont désormais incluses dans la combinaison au titre de la quote-part de leur capital détenue par l’État (4) ;

– à des fins de simplification, ils ne consolident pas l’ensemble des flux entre entreprises publiques, qu’il s’agisse, par exemple, des dépenses d’électricité ou de téléphone payées aux grands opérateurs nationaux ou d’opérations supérieures aux seuils de déclaration fixés à 10 millions d'euros.

Reste que les comptes combinés reflètent mieux la particularité des liens entre l’État et les entreprises concernées, liens qui dépassent la relation traditionnelle entre un actionnaire majoritaire et ses filiales, de même qu’ils rendent mieux compte de la nature des liens que nouent entre elles les participations concernées. Dans un ensemble consolidé, les filiales et la société mère sont liées par un lien capitalistique ou par une relation de contrôle cohérente aboutissant à ce qu’elles forment une seule entité. Ce n’est évidemment pas le cas du secteur public, les entités qui le composent ne partageant aucun lien économique ou organisationnel, leur seul point commun étant de partager le même actionnaire ou un actionnaire de référence commun, l’État.

Dès lors, et sous ces réserves, la méthodologie retenue permet d’approcher au mieux de la notion de « comptes d’ensemble » de l’État actionnaire apte à présenter une image fidèle, complète et, c’est l’essentiel, pertinente du patrimoine financier de la puissance publique.

Une dernière question laissée ouverte par la loi organique, bien que d’un enjeu certes moindre, réside dans le traitement budgétaire particulier qu’il faut réserver aux frais de cessions de titres.

En disposant que le compte des participations financières de l’État ne retrace que les opérations de nature patrimoniale, à l’exclusion de toute opération de gestion courante, le législateur organique a-t-il entendu écarter le financement des dépenses courantes afférentes aux ventes de titres, parts ou droits de société (commission aux établissements financiers chargés de la vente et du placement des titres, frais de communication, rémunération des prestations des banques-conseils, frais juridiques, etc.) ?

La Cour des comptes a en effet maintes fois critiqué le peu de transparence et de clarté qui présidait à l’imputation de ces frais entre le budget général et le compte n° 902-24 Compte d'affectation des produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés. À titre d’exemple, elle soulignait dans son rapport sur l’exécution des lois de finances en 2000 que « cette partie des dépenses du compte continue de poser des problèmes de transparence. Les différentes catégories de dépenses n’ont jamais été formalisées : ainsi, la pratique fait que les dépenses sont imputées soit sur ce compte soit le budget général, et peuvent concerner à la fois des commissions, des études, des frais de publicité et aussi des montages financiers. Il y a là un manque de lisibilité regrettable ».

Le Gouvernement, soutenu par votre Rapporteur spécial, a cependant fait le choix de pérenniser, en le clarifiant, le régime antérieur à l’entrée en vigueur de la loi organique. Sont ainsi désormais retenues dans le périmètre des dépenses du compte des participations financières « les commissions bancaires, frais juridiques et autres frais qui sont directement liés aux opérations » de cessions d’actifs, le Conseil constitutionnel, dans sa décision 2005-530 DC précitée, jugeant cette disposition conforme à la loi organique dès lors que sont « seules […] prises en charge par le compte les dépenses inhérentes à ces opérations et intrinsèquement liées à leur produit », leur « insertion parmi les dépenses du compte [étant] justifiée par une exigence de bonne gestion des ressources publiques ».

*

* *

Votre Rapporteur spécial a choisi d’apprécier la performance de la gestion du compte des participations financières de l’État en organisant son rapport à partir des deux finalités du programme :

– la meilleure valorisation possible des participations financières de l’État (servie par deux objectifs, l’augmentation de la valeur des participations et le succès des opérations de cessions) ;

– leur contribution au désendettement de la sphère publique.

Par ailleurs, il a choisi de replacer ses analyses dans la perspective des cinq ans de la législature, pour qu’un bilan puisse en être dressé.

C’est avec satisfaction qu’il constate que des progrès très significatifs ont été constatés et que cette évolution s’est accélérée depuis 2005.

II.– UNE VALORISATION EXCEPTIONNELLE DU SECTEUR PUBLIC

Le contraste entre la situation des participations publiques de l’État constatée en 2002 et celle qui se dessine pour 2007 est saisissant. Quels que soient les indicateurs retenus, le constat est le même : le redressement des comptes est spectaculaire et la valorisation des actifs détenus par l’État est sans précédent.

LES PRINCIPALES DONNÉES FINANCIÈRES RELATIVES AU SECTEUR PUBLIC

(en milliards d'euros)

 

2002

2003

2004

2005

révisé 2006

PLF 2007

TOTAL

Dividendes versés par les entreprises financières (ligne 110 des recettes non fiscales)

1.420

292

948

545

1.149

2.505

7.464

Dividendes des entreprises non financières (ligne 116 des recettes non fiscales)

1.028

937

1.187

1.661

3.170

5.118

14.234

Total dividendes perçus par l’État

2.448

1.229

2.135

2.206

4.319

7.623

21.698

Produit des cessions de titre (compte d'affectation spéciale)

6.126

2.532

5.586

10.032

17.086

5.000

50.362

TOTAL

8.574

3.761

7.721

12.238

21.405

12.623

72.060

Au terme de la législature, l’État devrait avoir retiré 72,1 milliards d'euros de ses participations financières, dont 50,4 milliards d'euros de produit de cessions de titres et 21,7 milliards d'euros de dividendes versés par les entreprises publiques. Les années 2005 à 2007 sont à cet égard exceptionnelles. En 2006, le produit des privatisations devrait en effet atteindre le niveau historique de 17 milliards d'euros. En 2006 et 2007, les dividendes du secteur public dépasseraient respectivement 4,3 et 7,6 milliards d'euros, reflétant la bonne santé du secteur public.

2000

2001

2002

2003

2004

2005

7,3

– 18,7

– 69,9

10,1

15,8
19,7(b)

24,4(b)

(a) Jusqu’en 2003, comptes agrégés, puis, à partir de 2004, comptes combinés.

(b) Aux normes IFRS.

Cet indicateur, le plus traditionnel mais aussi le plus robuste, met en évidence la réelle création de richesse des entreprises en prenant en compte l’ensemble des éléments de leur gestion.

La négligence de ce ratio, auquel les analystes financiers ont un temps préféré la focalisation sur le seul résultat opérationnel, indifférent aux modalités de financement des activités, a été parfois dénoncée comme l’une des sources des déconvenues boursières du tournant des années 2000.

Ce ratio avait connu une dégradation spectaculaire au début des années 2000, pour connaître son étiage à – 69,9% en 2002 (après – 18,7% en 2001), avec une perte nette de l’ensemble agrégé (5) de 18,2 milliards d'euros ramenant les capitaux propres des entreprises publiques à 26,0 milliards d'euros, contre 66,8 milliards d'euros en 2000, soit un effondrement de plus de 60%.

Cette véritable destruction de valeur, attribuable presque intégralement à France Télécom (– 18,3 milliards d'euros de résultat net en 2002), tenait à la nécessité de solder les mécomptes d’une expansion internationale imprudente et précipitée (6), financée presque exclusivement par un endettement incontrôlé (7). De mêmes causes, heureusement d’une ampleur bien plus modeste, avaient produit les mêmes effets pour EDF, dont les filiales étrangères essuyaient en 2001 et 2002 des pertes dépassant 2,7 milliards d'euros. La situation des autres entreprises publiques non financières, pour rester stable, n’en était pas moins décevante, avec une rentabilité financière limitée à 6,4%.

Comme votre Rapporteur spécial le montrera infra, la législature actuelle a su faire face à ses responsabilités en corrigeant les dysfonctionnements rencontrés par l’État dans l’exercice de sa mission d’actionnaire, en clarifiant les relations de l’État avec les entreprises publiques et en leur appliquant des mesures de redressement qui ont fait leurs preuves.

 Dès 2003, cette politique pragmatique a porté ses fruits. Les entreprises publiques dans leur ensemble ont renoué avec les bénéfices, enregistrant un résultat net (8) de 3,9 milliards d'euros et une rentabilité financière de 10,1%.

France Télécom y contribuait pour les trois quarts (+ 3,7 milliards d'euros), tandis que les gains du secteur de l’énergie se repliaient à l’image du résultat de GDF, plus conforme à sa tendance à moyen terme après un bénéfice exceptionnel de 3,6 milliards d'euros en 2002 lié au rachat des réseaux de transport de gaz.

Le secteur des transports (Réseau ferré de France (RFF), a dû faire face à une perte nette de 1,4 milliard d'euros due à un résultat financier durablement déprimé par le portage de la dette ferroviaire (26,5 milliards d'euros en 2003) qui génère des charges financières annuelles de près de 1,3 milliard d'euros, tandis que la SNCF, pour la deuxième année consécutive, ne parvenait à dégager un bénéfice significatif supérieur à 0,1 milliard d'euros) et celui de l’armement (le GIAT a constaté une perte de 0,6 milliard d'euros) accusaient cependant un déséquilibre persistant.

 L’année 2004 a permis de doubler le résultat net, qui a atteint 7,6 milliards d'euros. Tirant parti de la reprise économique, l’ensemble des secteurs dans lesquels l’État détient une participation significative a enregistré des bénéfices.

La moitié de ces bénéfices vient du secteur énergétique.

EDF a dégagé un bénéfice net de 1,3 milliard d'euros (après 0,2 puis 0,9 milliard d'euros en 2002 et 2003) attribuable essentiellement à un reflux important de ses charges financières (– 1,5 milliard d'euros) rendu possible grâce à l’arrêt complet de sa croissance externe. Cette pause dans les investissements a permis au groupe de dégager un flux de trésorerie extrêmement élevé (5 milliards d'euros auxquels se sont ajoutés les produits d’importantes cessions notamment en Espagne (9)) et d’engager un rapide désendettement financier (– 4 milliards d'euros de dette, – 18,1%).

GDF a pour sa part tiré pleinement parti de la compétitivité de son portefeuille d’approvisionnement pour dégager un bénéfice de plus de 1 milliard d'euros. Il n’est jusqu’à Charbonnages de France qui ne soit parvenu à enregistrer un bénéfice de 1 milliard d'euros grâce à l’accélération de ses cessions d’actifs en préalable à sa dissolution.

France Télécom a apporté le tiers des bénéfices d’ensemble, en stabilisant son résultat net (2,8 milliards d'euros contre 3,2 milliards d'euros pro forma un an plus tôt) en dépit d’un reliquat de pertes exceptionnelles soldant les mécomptes de sa stratégie d’expansion immodérée du tournant des années 2000 (– 2,3 milliards d'euros d’amortissement des écarts d’investissement et – 0,5 milliard d'euros de provision pour dépréciation des actifs d’Equant).

Dans ce contexte favorable, la rentabilité financière a progressé de 10,1 à 15,8%, un rythme légèrement plus modeste que celui induit par l’évolution des bénéfices en raison d’un accroissement des capitaux propres (12,1 milliards d'euros par rapport à l’exercice 2003 pro forma) supérieur à celui des résultats nets consécutif aux augmentations de capital réalisées en particulier par France Télécom (pour 6,6 milliards d'euros). Évalué aux normes IFRS (10), le ratio résultat net sur capitaux propres s’est établi à 19,7% en 2004.

 Les résultats de l’exercice 2005 sont plus encourageants encore. Pour la deuxième année consécutive, les bénéfices des entreprises publiques ont doublé, pour atteindre 12,4 milliards d'euros.

L’amélioration du résultat financier a joué un rôle décisif dans cette performance. Dans l’ensemble, il est passé de – 10,4 à – 6 milliards d'euros, porté par le redressement du bilan des entreprises du secteur énergétique.

EDF, poursuivant le spectaculaire reflux de son endettement grâce à la génération d’un cash-flow exceptionnel (7,5 milliards d'euros) et bénéficiant par ailleurs d’une augmentation de capital dont les modalités précises sont décrites infra (6,4 milliards d'euros), est parvenue à stabiliser sa dette. Ce résultat est d’autant plus remarquable qu’il a fallu intégrer dans ses comptes consolidés la dette d’Edison désormais contrôlée à 50% et surtout les engagements au titre des retraites de ses agents. Le résultat financier de l’entreprise s’est ainsi amélioré de 1,8 milliard d'euros.

GDF pour sa part s’est approché de l’équilibre financier (perte financière limitée à 0,2 milliard d'euros contre 1 milliard d'euros un an plus tôt) grâce à une structure financière confortée par, d’une part, l’accélération de la génération de liquidités opérationnelles (+ 4,2 milliards d'euros) et, d’autre part, par l’augmentation de capital de 1,9 milliard d'euros décrite infra.

D’un point de vue plus global, c’est bien EDF qui, une nouvelle fois, contribue de manière décisive à la performance du secteur public en dégageant un résultat net de 2,6 milliards d'euros, avec, comme il sera vu, un résultat opérationnel toujours robuste et les premiers dividendes du recentrage de sa politique d’expansion internationale, les filiales étrangères générant plus de la moitié des bénéfices.

De manière moins attendue, le deuxième contributeur est la SNCF, qui a enregistré un résultat net de 1,2 milliard d'euros, soit la meilleure performance de son histoire imputable pour moitié, il est vrai, à des éléments exceptionnels (0,8 milliard d'euros au titre de la cession de 80% la Société hydroélectrique du midi (SHEM) dont 40% effectivement cédés en 2007 et à celui de la cession de titres résiduels dans Cegetel). L’exploitation confirme son redressement (+ 0,4 milliard d'euros) mais se maintient à un niveau fragile permettant à peine de compenser les pertes financières annuelles (de l’ordre de 0,3 à 0,5 milliard d'euros). L’établissement public reste ainsi exposé au risque de retournement des résultats en cas de durcissement des conditions de financement.

France Télécom, dont les résultats sont demeurés très dynamiques (+ 5,7 milliards d'euros), ne contribue cependant que de manière modérée aux résultats des participations financières de l’État (+ 0,5 milliard d'euros) en raison de l’importante dilution de la part de son capital détenue par la puissance publique (32,5% aujourd’hui) qui réduit d’autant la part des bénéfices de l’État.

Dans ce contexte, la rentabilité financière des capitaux propres, exprimée aux normes IFRS, a dépassé 24,4%. Cette performance remarquable reste cependant difficilement comparable à celle des grandes entreprises du secteur privé en raison de la faiblesse structurelle du niveau des capitaux propres du secteur public (11).

Comme on l’a vu, le secteur public jouit d’une solide rentabilité opérationnelle confirmée par les deux indicateurs retenus pour l’apprécier.

Le premier indicateur de la mission des participations financières, qui approche la valeur ajoutée réellement dégagée par les entreprises par rapport au volume de leurs affaires, est la traditionnelle marge opérationnelle (résultat d’exploitation rapporté au chiffre d’affaires).

Cependant, afin de mesurer la capacité effective des entreprises à créer de la valeur par rapport aux moyens qu’elles engagent – et quelles que soient, par ailleurs, les modalités de financement retenues – intervient un deuxième indicateur, la rentabilité opérationnelle des capitaux employés. Cet indicateur rapproche, d’une part, le résultat net des entités entrant dans le périmètre de combinaison des comptes de l’État, et d’autre part, les capitaux employés, c'est-à-dire les immobilisations et les besoins en fonds de roulement.

LA RENTABILITÉ OPÉRATIONNELLE DES
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT

 

2003

2004

2005

Marge opérationnelle

11,9

12,8

11,9 (a)

12,3 (a)

Rentabilité opérationnelle

12,2

12,8

10,8 (a)

11,6 (a)

(a) Aux normes IFRS.

La marge opérationnelle de l’ensemble des participations financières de l’État reste relativement stable depuis 2003, autour de 12%. Rapporté aux actifs qui ont permis de développer l’activité (les capitaux employés), le résultat d’exploitation connaît cependant un net regain, de 10,2% en 2003 à 11,6% en 2005, confirmant l’intensité industrielle (c'est-à-dire la forte productivité du capital) du secteur public, aujourd’hui assis à 55% sur l’énergie.

Il importe à cet égard de remarquer que le faible dynamisme de la conjoncture n’a pas freiné l’évolution du chiffre d’affaires du secteur public qui, avec une progression de 5,7% en 2005 par rapport à 2004 pro forma, a augmenté de 8 milliards d'euros. Cette performance reste toutefois nettement inférieure à celle réalisée par les entreprises du CAC 40 (+ 8,6%).

Le secteur énergétique, qui représente comme il a été vu 55 % du chiffre d’affaires des participations financières, explique l’essentiel de ce phénomène, en raison, d’une part, de la croissance de l’activité d’EDF hors de France (+ 3,5 milliards d'euros) et, d’autre part, de l’impact de la hausse des prix du gaz sur le chiffre d’affaires de GDF (+ 2,8 milliards d'euros). Cette évolution positive a permis de contrebalancer la baisse du chiffre d’affaires de la SNCF, elle-même exclusivement liée à la cession de la Sernam (– 1,8 milliard d’euros en dépit en particulier d’une hausse de 6,0% du chiffre d’affaires de la branche voyageurs).

Cependant, l’essentiel du rétablissement de la marge opérationnelle tient à une amélioration de la maîtrise des charges de personnel.

Les charges nettes d’exploitation (hors charges de personnel) sont demeurées dynamiques, progressant de 7,1% pro forma en 2005, soit 5,5 milliards d'euros. Ce ressaut s’explique notamment par l’évolution du prix des hydrocarbures, qui a pesé au premier chef sur les comptes de GDF dont les contrats d’approvisionnement sont indexés sur les cours pétroliers et sur ceux d’EDF qui ont subi l’accroissement du prix de ses combustibles fossiles. Le renchérissement de l’énergie se répercute ensuite mécaniquement sur l’ensemble du secteur public, très intensif en énergie (la facture d’électricité de la SNCF a par exemple augmenté de 50 millions d'euros en 2005).

Le dynamisme des charges d’exploitation a en revanche été absorbé par la modération des charges de personnels qui sont restées stables (+ 2 % soit + 0,2 % en volume) entre 2004 et 2005, grevant 30% du chiffre d’affaires. Cette performance est obtenue, en particulier, grâce à un effort important de maîtrise des coûts sociaux par les grands opérateurs historiques. C’est ainsi que La Poste, France Télécom, EDF, GDF et la SNCF ont réduit en 2005 leurs effectifs pro forma de respectivement 5.305, 4.000 (dont 2.000 fonctionnaires), 906, 174 et 1.112 emplois. En outre, l’évolution des salaires a été contenue, ne dépassant pas dans son ensemble + 1,9% (soit + 0,1% seulement en volume).

Il importe de rappeler que ces évolutions s’inscrivent dans une stratégie de rétablissement à moyen terme de la productivité de nos grandes entreprises publiques.

Ainsi, France Télécom table sur une réduction d’effectif de 17.000 personnes dans le monde entre 2006 et 2008, dont 16.000 en France, au moyen principalement de départs en congés de fin de carrière mais aussi de mobilités des fonctionnaires vers les corps de l’État et des collectivités territoriales, 12.000 personnes, soit 14% des effectifs de fonctionnaires actifs de l’entreprise étant inscrites au 31 décembre 2005 sur le site Intranet dédié à cette mobilité (dont 33% de cadres).

Votre Rapporteur spécial remarque que cet effort, difficile, est indispensable. Avec une masse salariale limitée à 18% de son chiffre d’affaires et un chiffre d’affaires de 241.000 euros par salariés, France Télécom se situe encore aujourd’hui au creux de la moyenne européenne (mieux que Telefonica, dont les ratios atteignent respectivement 23% et 183.000, proche de Deutsche Telekom avec 19% et 244.000 moins loin derrière Telecom Italia avec 14% et 346.000).

Ce sont aussi les nécessités de la concurrence européenne qui contraignent EDF et, dans une moindre mesure GDF, à une politique salariale prudente.

Ainsi EDF doit-elle faire face à des charges de personnel plus élevées que ses concurrents : les charges brutes de personnel grèvent son chiffre d’affaires à hauteur de 18,6 %, contre 12,8% pour RWE, 9,5% pour Centrica, 8,5% pour Endesa et 8,1% pour E.On. Il faut cependant nuancer cette appréciation en rappelant tout d’abord que ces ratios s’expliquent par des stratégies divergentes en matière d’externalisation et de sous-traitance. Ainsi, les charges d’exploitation dans leur ensemble en proportion du chiffre d’affaires sont notablement plus faibles pour EDF (75%) que pour Centrica (92%), E.On (82%) ou RWE (80%). Par ailleurs, la charge brute de personnel par salarié d’EDF (58.900 euros) se situe plutôt avantageusement dans la moyenne européenne (certes supérieure aux 56.900 euros par salarié servis par Endesa, mais proche des 60.900 et 62.100 de E.On ou de RWE), mettant en évidence moins l’existence d’une politique salariale généreuse (à cet égard, il faut remarquer que le niveau très élevé des pensions est compensé par une rémunération moyenne des actifs inférieure à la moyenne européenne) que le poids d’effectifs encore excessifs.

Les coûts salariaux de La Poste restent pour leur part très lourds. L’opérateur doit en effet consacrer 60,2% de son chiffre d’affaires au financement de sa masse salariale (contre 33,8% pour TPG ou 32,2% pour DPWN). Ce ratio reflète certes le poids encore prépondérant de ses activités traditionnelles fortes consommatrices de main-d’œuvre mais aussi et surtout la persistance de lourdes charges spécifiques (notamment le poids exorbitant des pensions de ses fonctionnaires qui sera évoqué infra). Votre Rapporteur spécial tient cependant à saluer les progrès accomplis depuis 2002, le ratio masse salariale sur chiffre d’affaires ayant diminué de 4,3 points, soit la meilleure performance européenne (– 0,8 et – 1,8 point pour TPG et DPWN dont les marges de progression étaient, il est vrai, considérablement plus restreintes), obtenue grâce à l’interruption totale des recrutements de fonctionnaires. Il s'ensuit une réduction sensible des effectifs (– 17.000 postes environ avec – 30.000 fonctionnaires) qui compense une évolution salariale dynamique, la faible qualification d’ensemble des personnels de La Poste lui ayant fait subir de plein fouet le coût des mesures de convergence des SMIC.

L’amélioration des résultats, les apports en fonds propres et la génération de liquidités opérationnelles ont permis de réduire de manière très significative l’endettement des entreprises du périmètre des comptes combinés. Leur dette financière nette a été réduite de près d’un tiers tandis que le ratio endettement sur fonds propres passait de 8,3 à 1,9. En ne tenant pas compte de l’année 2002 marquée par les pertes exceptionnelles de France Télécom, la performance, moins spectaculaire, n’en reste pas moins remarquable : le ratio dette nette sur fonds propres s’est réduit d’un point chaque année, passant de 4,1 en 2003 à 3,1 en 2004 puis 1,9 en 2005.

Le désendettement du secteur public s’est poursuivi en 2005. Les passifs financiers nets (12) ont reculé de 3,7 milliards d'euros (par rapport à 2004 pro forma) pour s’établir à 98,1 milliards d'euros.

Cette performance est principalement celle des entreprises du secteur énergétique qui ont su, comme il a été vu, accélérer la génération de cash flow opérationnel (7,5 milliards d'euros pour EDF et 4,2 milliards d'euros pour GDF) sans sacrifier leurs investissements. Ainsi, la dette nette d’EDF (avant intégration de l’endettement d’Edison, contrôlée depuis mai 2005 à parité avec AEM Milan, mais après paiement de la soulte de 3 milliards d'euros au titre de l’adossement des retraites de ses agents aux régimes de droit commun de la sécurité sociale) a été ramenée de 20,3 à 18,6 milliards d'euros. GDF quant à lui est parvenu à faire passer sa dette nette, aux normes IFRS, de 4,6 à 3 milliards d'euros.

Les fonds propres ont pour leur part progressé de 17,2 milliards d'euros, pour atteindre 52,4 milliards d'euros. 12,4 milliards d'euros résultent, comme il a été vu, de la contribution des bénéfices nets réalisés en 2005. Par ailleurs, comme il sera décrit infra, 13,3 milliards d'euros de capitaux « frais » ont été injectés dans le secteur public, au moyen d’importantes augmentations de capital menées en particulier par EDF (6,4 milliards d'euros), France Télécom (3 milliards d'euros afin de financer l’acquisition de 80% de l’opérateur de téléphonie mobile espagnol Amena pour 6,4 milliards d'euros) et GDF (1,9 milliard d'euros) face à l’État qui a consenti 0,8 milliard d'euros de nouvelles dotations en capital (dont 0,3 milliard d'euros à la SNCF, 0,2 à l’EPFR et au GIAT et 0,1 pour DCN et l’Imprimerie nationale). En revanche, la nouvelle réglementation sur les actifs (CRC 2002-10) a imposé de procéder à un ajustement comptable des capitaux propres de RFF de 8,7 milliards d'euros à la baisse.

Afin de mesurer la soutenabilité de l’endettement net, le Gouvernement a retenu comme dernier indicateur de la mission le rapport de la trésorerie dégagée par l’exploitation (EBITDA) aux dettes nettes détenues par les entreprises publiques afin de mesurer la capacité des entreprises à honorer leurs dettes, voire à se désendetter.

Ce ratio, après s’être spectaculairement rétabli entre 2002 et 2004, s’est légèrement dégradé en 2005, passant de 28,5% à 25,6% (contre 32,6% prévus). Cette évolution s’explique surtout par une augmentation notable des dotations aux amortissements et des provisions (13) liée à une reprise des investissements après la pause de rationalisation des années 2003-2004 (27,3 milliards d'euros ont été consacrés aux investissements en 2005).

L’objectif retenu pour 2006 et 2007 est la poursuite du redressement de la trésorerie des entreprises publiques, avec un ratio EBITDA/dette nette supérieur à 30,9%.

L’État avait porté une responsabilité importante dans la dégradation financière de certaines grandes entreprises publiques en 2002 justifiant la création d’une commission d’enquête de l’Assemblée nationale. De la même manière, il joue désormais un rôle décisif dans leur redressement.

On rappellera qu’au terme d’auditions minutieuses de dirigeants d’entreprises publiques, de responsables de la politique de l’État actionnaire et de personnalités qualifiées, la Commission d’enquête sur la gestion des entreprises publiques (14), créée le 12 janvier 2003 par l’Assemblée nationale et rapportée par votre Rapporteur spécial, avait rendu un constat précis et défini des solutions immédiatement exploitables.

Votre Rapporteur spécial pouvait ainsi considérer que « le modèle français des entreprises publiques, hérité de la guerre et de la Libération, ne répondait plus aux exigences de la concurrence, condition du progrès et de la compétitivité de notre économie, mais aussi de la pérennité et de la qualité du service public ».

L’ouverture à la concurrence, pour avoir apporté un encouragement salutaire à la modernisation des entreprises publiques, les engageant à rechercher tous les moyens de la compétitivité et à se lancer à la conquête de marchés extérieurs pour compenser leurs inévitables pertes de marché en France liées à la suppression progressive de leur monopole, a en effet imposé une véritable révolution de la compétitivité.

Or, il apparaissait clairement début 2003 que les entreprises publiques n’avaient pas toujours su se doter des moyens humains, techniques et financiers nécessaires au succès de cette transition, tandis que leur gouvernance restait très perfectible : insuffisante association du conseil d’administration aux décisions stratégiques, suivi lacunaire des risques, contrôles internes perfectibles, règles de prise de décision confuses… furent autant de défaillances que la Commission d’enquête fut contrainte de dénoncer.

Et de toute évidence, dans une économie de marché, ces carences engageaient principalement en dernière analyse la responsabilité de ceux qui assumaient les conséquences financières des risques pris, c'est-à-dire les actionnaires. La Commission avait ainsi montré que l’actionnaire État n’avait pas su s’adapter au nouveau contexte concurrentiel en assumant pleinement son rôle d’actionnaire majoritaire, qui impliquait à la fois que l’entreprise adopte des relations transparentes et confiantes avec lui et que lui-même et ses représentants s’adaptent à cette situation nouvelle en sortant du strict rôle traditionnel de la tutelle technique et financière.

Votre Rapporteur spécial remarquait, dans le rapport de la Commission d’enquête précité, que « le contrôle de l’État n’échappe pas aux maux qui affectent si souvent l’action publique : il est lourd, déresponsabilisant et souvent inefficace ». Cette situation paradoxale faisait ainsi souvent converger le maintien de procédures de tutelle tatillonnes héritées des années 1950 et l’absence de contrôle réel sur les décisions stratégiques. Il s’ensuivrait une dilution de l’autorité de l’État actionnaire empêtré dans un suivi quotidien d’actes de gestion relevant normalement de la direction interne de l’entreprise. Votre Rapporteur spécial en concluait ainsi que « le contrôle de l’État est le plus souvent inadapté car il ne porte pas sur ce qui relève de lui ».

C’est donc avec satisfaction qu’il constate, au terme de la législature, que chacune des pistes dégagées par la Commission d’enquête a été explorée par le Gouvernement, ce qui a indéniablement permis de renforcer le professionnalisme de l’État dans l’exercice de sa mission d’actionnaire.

LES RECOMMANDATIONS DE LA COMMISSION D’ENQUÊTE DE L’ASSEMBLÉE
NATIONALE SUR LA GESTION DES ENTREPRISES PUBLIQUES (JUILLET 2003)

Les présidents

1. Conserver le pouvoir de nomination du gouvernement tout en associant l’Agence des participations de l’État à la définition des compétences requises.

2. Procéder à l’audition des présidents des grandes entreprises publiques, dès leur nomination, puis chaque année, par les commissions compétentes du Parlement.

3. Rapprocher le niveau de rémunération des dirigeants de celui pratiqué dans les entreprises comparables du secteur privé.

4. Assurer, à travers l’Agence, un suivi régulier des performances des entreprises et mettre en place des entretiens périodiques entre les présidents et les ministres de tutelle.

Les conseils d’administration

5. Limiter à 15 au maximum le nombre des administrateurs, en conservant dans l’immédiat le principe du tripartisme, mais envisager à terme un alignement sur le droit commun des sociétés commerciales.

6. Uniformiser le statut des administrateurs, en supprimant le principe de l’atténuation de la responsabilité civile des administrateurs représentant les salariés et prévoir leur rémunération, à l’exception des représentants de l’État, de façon à accroître leur indépendance et leur responsabilité.

7. Doter tous les conseils d’administration d’un règlement intérieur détaillé déterminant les décisions soumises à leur approbation préalable.

8. Généraliser les comités de la stratégie et élargir leurs compétences à l’instruction des projets d’acquisitions.

9. Donner aux comités d’audit la possibilité de recourir de manière autonome à une expertise extérieure et élargir leurs compétences à la gestion des risques de l’entreprise.

10. Charger l’Agence de proposer au Gouvernement une liste de personnalités qualifiées et de favoriser la présence d’administrateurs indépendants au sein des conseils.

11. Instituer des comités de gouvernement d’entreprise et procéder à une évaluation régulière des travaux des conseils.

Les outils de gestion et d’analyse

12. Généraliser le statut de société anonyme pour toutes les entreprises opérant dans le champ concurrentiel.

13. Instituer un contrôle de la qualité des instruments de gestion (comptabilité analytique, engagements hors bilan…) par l’Agence des participations qui en fera état dans le rapport annuel qu’elle soumettra au Parlement.

14. Conditionner l’agrément de l’État à tout projet significatif de croissance externe à l’adoption d’une cartographie détaillée des risques.

15. Aligner les rapports financiers des principaux groupes publics sur les normes imposées aux entreprises cotées.

Les missions de service public

16. Instituer des contrats de service public définissant très précisément le contenu, le coût et la compensation financière des missions de service public.

17. Prévoir des systèmes d’intéressement en fonction des résultats atteints par l’entreprise par rapport à des indicateurs de performance et de qualité de service, fixés dans le contrat de service public.

L’Agence des participations de l’État

18. Confier à l’Agence la responsabilité de définir et codifier les informations que chaque entreprise devra lui fournir de manière régulière, ainsi que des règles précises de délais et de saisine préalable à tout investissement de croissance externe.

19. Confier au représentant de l’Agence le rôle de chef de file au sein des conseils d’administration.

20. Créer un Comité interministériel d’orientation de la stratégie des entreprises publiques dont le secrétariat serait assuré par l’Agence.

21. Prévoir une audition annuelle du directeur de l’Agence par les commissions des finances des assemblées.

La représentation de l’État au sein des conseils

22. Prévoir l’envoi d’une « lettre de mission » signée par le ministre de l’économie et le ministère de tutelle technique à chaque administrateur nouvellement nommé.

23. Limiter à trois le nombre maximum de mandats des administrateurs dans les grandes entreprises publiques.

24. Généraliser les « préconseils » entre les représentants de l’État et leur donner des instructions précises résultant notamment des arbitrages interministériels avant chaque réunion des conseils.

25. Assurer un suivi régulier des représentants de l’État et confier à l’Agence le soin de conduire des actions régulières de formation à leur intention.

Les contrôles

26. Définir un « cadre de mission » entre l’État et le dirigeant de l’entreprise précisant clairement la stratégie économique et financière et fixant notamment des indicateurs de performance et des seuils d’alerte. En confier le suivi régulier à l’Agence.

27. Supprimer la CICS, le CIES et les fonctions de commissaire du gouvernement et de contrôleur d’État.

Afin de rationaliser et de renforcer l’autorité de l’État actionnaire, le Gouvernement a choisi de créer, par le décret n° 2004-963 du 9 septembre 2004, une Agence des participations de l’État (APE), service à compétence nationale, chargée d’« exercer, en veillant aux intérêts patrimoniaux de l’État, la mission de l’État actionnaire ».

Cette approche procède d’une conception enfin clarifiée du rôle des entreprises publiques et de l’État actionnaire. Les entreprises publiques sont d’abord des entreprises : de plus en plus soumises aux exigences d’un marché et aux contraintes de la concurrence, leur mission est non seulement d’assurer des services mais aussi de générer des richesses. Quant à l’État actionnaire, il se doit de veiller à ses intérêts patrimoniaux. Selon cette approche, l’APE se trouve chargée d’une double mission : « professionnaliser » l’intervention de l’État actionnaire et conduire celui-ci à définir des orientations stratégiques plutôt qu’à exercer une tutelle tatillonne.

À cet égard, votre Rapporteur spécial constate que des progrès ont été accomplis.

• S’agissant de l’émergence d’une fonction d’État actionnaire identifiée et efficace, votre Rapporteur spécial rappelle qu’il avait dû regretter l’inadéquation des moyens humains et financiers de l’ancien service des participations de l’État aux défis actuels de la politique patrimoniale de l’État actionnaire, en particulier dans le contexte de l’expansion internationale des grands opérateurs publics : effectifs insuffisants, « turn-over » élevé, et souvent manque d’autorité et d’expérience de personnes contrôlant un périmètre très vaste d’entreprises… nuisaient à la pleine autorité de l’actionnaire majoritaire.

Afin de remédier à ces défaillances, les effectifs et l’expérience de l’ancien service des participations de l’État ont été renforcés dans l’APE.

Ainsi 38 cadres travaillent au 1er octobre 2005 au sein de l’APE, certes 5 de moins qu’un an plus tôt, le périmètre de contrôle de l’APE ayant été réduit avec les cessions des sociétés autoroutières et de Alstom, mais plus que la trentaine de cadres qui composait le service des participations de l’État.

Le recours à l’expertise privée a de même été fortement encouragé puisque parmi ces cadres, 12 sont contractuels (contre seulement 3 en 2003). En outre, une division plus fonctionnelle, et plus proche des pratiques du privé, a présidé à la répartition des tâches au sein de l’APE. En particulier, des expertises transversales (création du pôle audit comptabilité, du pôle finance et du pôle juridique) ont été mises en place.

LES EFFECTIFS DE L’AGENCE DES PARTICIPATIONS

 

Septembre 2003

Septembre 2005

Septembre 2006

Cadres

33

43

38

Non cadres

12

18

19

Effectif total

45

61

57

Recrutements à réaliser

1

Originaires du service des participations

45

20

14

Contractuels

3

12

12

Moyenne d’âge

40 ans

38 ans

39 ans

Effectif masculin

26

35

33

Effectif féminin

19

27

24

LES MOYENS FINANCIERS DE L’AGENCE DES PARTICIPATIONS

(en millions d’euros)

 

2006

Prévisions 2007

Rémunérations
(brut salarié)

3,7

3,3

Crédits d’études

4,3

4,3

Moyens de fonctionnement

0,4

0,4

Total (a)

8,5

8,0

(a) À ces masses s’ajoutent les coûts d’installation et de fonctionnement de l’agence, mutualisés au sein du ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie (0,3 million d'euros par an) ainsi que les commissions perçues par les banques conseils de l’État qui sont prélevées directement sur le produit des opérations financières réalisées.

L’ACTIVITÉ DE L’AGENCE DES PARTICIPATIONS

 

2003

2005

Participation aux conseils d’administration

Nombre de CA de sociétés

51

47

Nombre de comités d’audit de sociétés

28

34

Nombre de séances (CA et comité d’audit) auxquelles a participé un membre de l’APE

380

469

Instruction de dossiers

Notes d’information ou de proposition d’action et demandes d’instruction au ministre

878

833

Nombre de séances du comité de sélection des conseils de l’État

11

4

Nombre de marchés d’études et de contrats de prestation de service en cours

30

35

Dossiers de respiration

39

17

Formation des administrateurs représentant l’État

Nombre de journées de formation spécifique

3

5

Nombre de participants

30

95

Un autre défi pour l’APE était d’acquérir une autorité de nature à conforter la place des préoccupations de rentabilité dans la prise de décision.

À cet égard, le Gouvernement a décidé de placer l’agence auprès du directeur du Trésor et de la politique économique, qui propose au ministre la nomination du directeur général de l’APE. Ce choix, qui a permis d’éviter toute rupture avec les pratiques antérieures, n’était pas celui de la plupart des membres de la commission d’enquête : les uns avaient envisagé de placer l’APE sous la responsabilité directe du Premier ministre, afin d’en garantir la prééminence en matière de gestion des entreprises publiques ; votre Rapporteur spécial avait quant à lui recommandé de rattacher directement l’APE au ministre des finances, tout en prévoyant l’existence d’un comité interministériel dédié spécifiquement à la stratégie des entreprises publiques.

Reste que l’organisation finalement adoptée a permis à l’APE d’imposer et de promouvoir efficacement les intérêts patrimoniaux de l’État.

Ainsi, et toujours conformément aux vœux exprimés par la Commission d’enquête, l’APE tient chaque année avec les plus hauts dirigeants des entreprises une réunion de stratégie au cours de laquelle la stratégie de développement international, en particulier, est discutée, revue et si nécessaire réorientée. Dans le même esprit, elle évalue régulièrement la gestion mise en œuvre par les dirigeants d’entreprises publiques, sans toutefois que votre Rapporteur spécial ait pu obtenir de précision sur les modalités concrètes selon lesquelles elle s’acquitte de cette tâche.

En revanche, il semble que la mission qui lui a été dévolue de s’assurer de la cohérence des positions des représentants de l’État (rôle de « chef de file » de l’administrateur représentant l’agence) ait, dans la pratique, été atténuée. Interrogé sur ce point par votre Rapporteur spécial, le ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie remarque que « la tenue de pré-conseil réunissant les représentants de l’État constitue la modalité la plus efficace de coordination des positions des représentants de l’État. Les modalités d’arbitrage entre les positions exprimées par les ministères « techniques » et le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie dans sa composante représentant l’État actionnaire sont des modalités usuelles (réunion interministérielle …) ».

La formation des administrateurs représentants l’État et leur sensibilisation aux enjeux patrimoniaux de la gestion des entreprises, tâche confiée pour partie à l’APE, s’est elle aussi fortement développée : 95 personnes issues de divers ministères ont participé en 2005 à cinq journées de formation spécifique (contre seulement 30 personnes et trois journées en 2003).

Selon le ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie, « cette formation permet de préciser la responsabilité personnelle et fonctionnelle des représentants de l’État dans l’exercice de leurs mandats, de constituer un référentiel juridique, financier et comptable commun pour tous ces administrateurs et pour ceux qui les assistent dans leur travail, enfin, d’approfondir et maîtriser des thèmes particuliers (analyse stratégique, méthodes d’évaluation, normes IFRS, comptes combinés, aspects sociaux essentiels de la gestion des entreprises, environnement européen, …) ».

• Afin d’assurer la coordination des divers intérêts, parfois contradictoires, de la puissance publique, le Gouvernement avait retenu, de façon cependant partielle, la proposition de la Commission d’enquête de créer un comité interministériel d’orientation de la stratégie des entreprises publiques.

L’article 3 du décret du 9 septembre 2004 précité a en effet institué un « comité de direction de l’État actionnaire », chargé de déterminer « le cadre général d’évolution du secteur public, ses principes de gouvernance et de contrôle dans lesquels s’inscrit l’action de l’agence des participations de l’État ».

Ce comité réunit les ministres dits « techniques » – ou leurs représentants – et le ministre de l’Économie et des finances, et peut être saisi par chacun de ses membres et ceux du comité de direction de l’APE. Deux éléments importants garantissent que ce comité donne toute leur place aux préoccupations de l’État actionnaire : il est présidé par le ministre chargé de l’économie, et son secrétariat est assuré par l’APE.

Votre Rapporteur spécial doit toutefois constater qu’en dépit des importantes opérations mises en œuvre depuis 2004 (ouverture du capital de EDF et de GDF, privatisation des sociétés autoroutières, etc.), l’APE n’a enregistré aucune demande d’examen d’une orientation stratégique concernant une entreprise ou un acte majeur de la vie de l’une d’entre elles. Cela montre clairement que la stratégie des entreprises publiques demeure arbitrée ailleurs que dans les cadres institutionnels prévus à cet effet.

Afin de jeter les bases de relations confiantes et pleinement transparentes entre les entreprises publiques et l’État, l’APE a défini une « charte des relations avec les entreprises publiques », présentée par le ministre d’État chargé de l’Économie, des finances et de l’industrie au Conseil des ministres du 21 juillet 2004, codifiant les règles de bonnes pratiques portant sur le fonctionnement des organes sociaux des entreprises et sur les modalités des relations entre l’État actionnaire et les entreprises publiques.

La Commission d’enquête sur la gestion des entreprises publiques avait montré combien la marge de progrès était importante : l’information des représentants de l’État (et plus généralement des membres des conseils d’administration des entreprises publiques) se réduisait trop souvent à des documents sommaires, envoyés quelques jours voire quelques heures seulement avant l’adoption de décisions d’enjeu pourtant décisif ; les services concernés éprouvaient parfois les plus grandes difficultés à se procurer auprès des entreprises des informations essentielles.

Un audit réalisé par l’agence au printemps 2004 sur les procédures de reporting mises en place avec les 50 entreprises publiques contrôlées par l’APE avait confirmé ces carences, montrant que seulement une entreprise sur deux transmettait à l’État un tableau de bord permettant le suivi régulier de son activité, certaines grandes entreprises ne fournissant toujours pas tous les éléments nécessaires pour permettre un suivi efficace et que seulement trois entreprises transmettaient à l’APE un document assurant un suivi quasi-continu de l’entreprise en dehors de la tenue des conseils d’administration.

 Deux grands objectifs ont structuré la charte : la gouvernance interne des entreprises et les relations qu’elles doivent entretenir avec l’État actionnaire.

S’inspirant des meilleures pratiques du privé, la charte repose en effet sur la conviction, partagée par votre Rapporteur spécial, que les lieux centraux du contrôle stratégique, au sens anglo-saxon de « maîtrise » des risques, des entreprises sont désormais les organes sociaux qui doivent par conséquent disposer d’une autorité incontestable.

L’APE a ainsi pour mission de veiller à ce que le conseil d’administration « valide la stratégie de l’entreprise et veille à sa mise en œuvre », ce qui implique notamment que l’entreprise lui soumette « un plan stratégique pluriannuel, actualisé chaque année, comportant notamment une analyse du positionnement par rapport à ses principaux concurrents, une projection des investissements nets, ainsi qu'un plan d'affaires argumenté, comportant, le cas échéant, un tableau prévisionnel des commandes ».

De façon à assurer la pleine information du conseil, la charte précise que la présentation et le suivi du plan stratégique doivent être menés en trois temps : dans un premier conseil, un débat d'orientation arrête les grands choix stratégiques de l'entreprise sur la base d’éléments précis transmis préalablement au conseil par la direction générale de l’entreprise ; puis, un conseil ultérieur valide le plan stratégique détaillé de l'entreprise ; enfin, l'entreprise présente régulièrement au conseil une analyse de la mise en œuvre de la stratégie, en particulier lors de la présentation du budget annuel.

En outre, conformément aux recommandations de la Commission d’enquête, la charte précise que le fonctionnement du conseil d'administration doit être régi par un règlement intérieur, précisant notamment les caractéristiques des opérations qui doivent recueillir l'approbation préalable du conseil (opérations extérieures d'acquisition et de cession, opérations significatives hors plan stratégique, opérations de croissance interne et de restructuration), les éléments qui doivent faire l'objet d'un reporting régulier au conseil (situation financière, situation de trésorerie, engagements de la société, suivi des opérations stratégiques) et les conditions dans lesquelles le conseil est informé de l’évolution des filiales (stratégie, budget, opérations principales).

La charte traite aussi d’un élément décisif pour la qualité des délibérations et des décisions du conseil : le fonctionnement des comités spécialisés.

Au-delà de la définition de quelques règles de bon sens – dont l’expérience a malheureusement montré que le rappel n’est pas superflu – comme l’obligation de réunir ces comités au moins trois jours avant la réunion du Conseil ou celle faite à la direction de transmettre au moins cinq jours à l’avance les documents préparatoires de façon à assurer une information suffisante des membres de ce dernier, la charte innove en consacrant le rôle décisif du comité d’audit, dont votre Rapporteur spécial a constamment souligné la place centrale dans le contrôle de la direction :

– un comité d’audit doit obligatoirement être institué dans toutes les entreprises à participation publique ;

– sa compétence doit être élargie, au-delà de l’examen des comptes et des rapports de gestion, au contrôle des méthodes d’audit mises en œuvre par la direction, et surtout à l’analyse des risques d'engagement hors bilans significatifs. Il doit par conséquent être le destinataire des rapports d'audit interne.

Conformément aux recommandations de la Commission d’enquête, la charte impose l’institution d’un comité stratégique dans les entreprises à participation publique, afin de préparer la discussion au conseil du plan stratégique pluriannuel de délibérer des modalités de réalisation des opérations stratégiques de l'entreprise et de ses filiales.

S’agissant enfin des relations entre les entreprises et l’agence des participations, la charte prévoit que l’État puisse disposer de la plénitude de ses prérogatives d’actionnaire.

Les entreprises doivent ainsi transmettre mensuellement aux administrateurs issus de l'APE un tableau de bord contenant les principaux indicateurs financiers et le cas échéant des indicateurs qualitatifs représentatifs de l'activité et de la vie de l'entreprise, inspirés du reporting interne destiné au comité exécutif. Par ailleurs, à échéance régulière et au minimum une fois par an, la direction générale de l'entreprise doit rencontrer des membres de l’APE afin de leur présenter les principales évolutions de l'entreprise et ses perspectives stratégiques.

Votre Rapporteur spécial constate avec satisfaction que des dispositions précises et spécifiques ont été introduites dans la charte pour remédier aux principales défaillances constatées dans le passé dans les relations entre l’État et les entreprises :

– les investissements exceptionnels et les opérations de croissance externe devront faire l’objet d’une présentation approfondie « suffisamment en amont » de la procédure de validation ;

– des correspondants chargés d'être les principaux points de contacts réguliers des différents interlocuteurs de l'APE seront désignés par les directions des entreprises, qui devront en outre proposer à ces derniers un programme régulier de rencontres avec les responsables des branches d'activité ;

– il est clairement rappelé que « les opérations sur le capital de l'entreprise relèvent de la responsabilité de l'actionnaire » ce qui suppose le respect de règles particulières de procédure permettant d’éviter à l’avenir tout contournement de l’État ou de ses services dans l’adoption de décisions essentielles à la vie de l’entreprise.

 L’APE procède chaque année à une évaluation de l’application de cette charte.

À cette fin, les administrateurs de l’APE représentant l’État dans les conseils d’administration de plus de quarante entreprises publiques sont régulièrement interrogés sur les deux grands thèmes de la charte : la gouvernance interne et les relations avec l’État. Les scores sont exprimés en pourcentage de la performance optimale. Dans l’ensemble, en 2006, les administrateurs jugent que les pratiques sont conformes à hauteur de 80% aux meilleures pratiques recommandées, contre 72% deux ans plus tôt.

Dans le premier domaine, les progrès sont nets et sans appel. Les meilleures performances concernent les comités d’audit (84% du score cible), établis désormais dans l’ensemble des entreprises de taille significative et dont le champ de compétence et l’indépendance décisionnelle apparaissent très satisfaisants. Les progrès à cet égard ont surtout été réalisés dans les entités non cotées (de 67% à 84% du score cible entre 2004 et 2006), les sociétés cotées ayant plus tôt acclimaté les contraintes d’une gouvernance transparente.

En revanche, les résultats en matière d’amélioration des relations avec l’État actionnaire sont plus nuancés. Si les entreprises non cotées semblent mieux attentives aux contraintes inhérentes au respect de leur actionnaire majoritaire (le score cible est passé de 74 à 78%), les sociétés cotées ne s’acquittent encore que difficilement de leurs obligations (score de 64% à 67%). Les plus grandes marges de progrès concernent, en particulier, la qualité du reporting régulier à l’APE, encore très perfectible.

La politique de gestion des participations financières de l’État menée depuis 2002 répond à une philosophie claire, en quelque sorte « décontaminée » des préventions idéologiques qui ont tant handicapé, durant la précédente législature, nos entreprises publiques engagées dans la compétition européenne.

Le pragmatisme ambitieux mis en œuvre durant la présente législature répond à trois objectifs majeurs.

Le premier objectif est de donner la priorité au développement des entreprises publiques sur les contingences politiques et les exigences toujours contradictoires de l’État. L’État doit dès lors assumer ses responsabilités quotidiennes d’actionnaire, et agir à cet égard, conformément à la réglementation européenne, en actionnaire « avisé » capable de consentir lorsqu’il le peut et avec les moyens qui sont les siens aux dotations nécessaires au développement des entreprises publiques.

Cependant, le réalisme et le bon sens imposent de prendre la mesure de l’immense vague de consolidation européenne à laquelle doivent faire face nos grands opérateurs historiques et qu’il serait absurde de vouloir freiner puisqu’elle tend à renforcer, en particulier en générant des économies d’échelle, la rentabilité de secteurs qui jouent un rôle décisif dans la prospérité de nos sociétés.

Par ailleurs, les principales entreprises publiques interviennent dans des secteurs dont l’intensité capitalistique et technologique est exceptionnellement forte (il suffit, pour s’en convaincre, de songer au coût que représente le renouvellement du parc nucléaire d’EDF), et requiert par conséquent des investissements formidables (40 milliards d'euros prévus par exemple par EDF pour la période 2006-2010).

Les besoins de capitaux qui résultent de ces vagues de consolidation et d’investissement sont considérables et dépassent aujourd’hui la capacité financière de l’État.

Il est en effet évident qu’aujourd’hui, à l’inverse des circonstances qui avaient prévalu à la Libération et imposé la nationalisation de pans importants de l’économie nationale, les capacités de financement ne sont plus dans les mains d’un État que vingt-cinq années de déficits et d’endettements budgétaires ont de surcroît rendu impécunieux. Dès lors, le recours aux marchés financiers paraît inévitable.

Interdire aux entreprises publiques d’augmenter leurs fonds propres en ayant recours aux marchés financiers ou en nouant des alliances, c'est-à-dire refuser d’ouvrir leur capital pour « verrouiller » un seuil de participation public intangible reviendrait à soit les contraindre à passer à côté du développement européen (un risque singulièrement fort auquel La Poste était exposée au début des années 2000), soit, ce qui est pire, les inciter à financer leur expansion par un endettement qui, compte tenu des enjeux financiers, ne peut que prendre des proportions insoutenables (les déconvenues de France Télécom en 2002 sont à cet égard éloquentes).

Le second objectif de la politique de l’État actionnaire conduite durant l’actuelle législature a été de promouvoir une gestion dynamique et « décomplexée » des participations financières dans laquelle l’État ne s’interdit pas de réaliser des cessions « opportunes » (Crédit Lyonnais, Dassault, etc.) pas plus qu’il ne refuse d’intervenir, temporairement, dans le capital d’entreprise en difficulté (France Télécom via l’ERAP ou Alstom plus récemment).

Le troisième objectif, plus étroitement dépendant de nos convictions, est d’affirmer la vocation de l’État à se dégager du secteur concurrentiel lorsqu’aucun de ses intérêts stratégiques n’est en cause.

L’AFFECTATION DES RECETTES DE PRIVATISATION DEPUIS 2002

(en millions d’euros)

   

2002

2003

2004

2005

réalisé et prévu (a) pour 2006

prévision 2007 (b)

Désendettement

Caisse de la dette publique

 

500

 

 

8.000

+5.300

3.100

Fonds de réserve pour les retraites

500

         

Charbonnages de France

454

1.408

940

80

1.400

 

EPFR

1.819

 

1.126

230

515

500

ERAP

 

 

2.100

     

EMC

 

42

84

370

 

 

Autres dotations non encore ventilées

       

1.500

 

Sous-total (réalisé)
(prévu)

2.773

2.050

4.250

680

9.915
16.715


3.600

Dotations et avances

GIAT

 

287

250

300 

200

100

ADP

65

 

 

 

 

 

Bull

350

 

 

517

 

 

SNPE

80

 

 

 

 

 

Ports autonomes

38

31

 

 

 

 

DCN

 

334

 

120

150 

150

Imprimerie nationale

 

18

65

132

   

CGMF

 

40

 

58

 

 

OSEO-Sofaris

 

 

580

80

   

OSEO

     

208

   

SNCF (fret)

 

 

 

250

450

100

Sonacotra

         

50

SNCM (avance à CGMF)

 

 

 

 

129

 

Sous-total (réalisé)
(prévu
)

533

710

895

1.665

279

929


400

L’AFFECTATION DES RECETTES DE PRIVATISATION DEPUIS 2002 (SUITE)

(en millions d’euros)

Acquisition de titres

Alstom

 

500

215

 

 

 

Tessenderlo (EMC) (achat de titres)

     

208

   

Dotation de la société chargée de valoriser les biens immobiliers de RFF (SOVAFIM)

 

 

 

 

100

200?

Sous-total

 

500

215

208 

100

200/500

Subventions et autres dotations

RFF

1.362

 

 

 

 

 

Agence nationale de la recherche

 

 

 

1.262

   

Fondations

 

 

 

64

25

 

Établissement public du campus de Jussieu

     

110

   

EMOC et EPV

     

100

   

OSEO-Anvar

     

132

   

Laboratoire biotechnologie

 

 

 

     

ADEM

 

 

 

20

   

AFITF

 

 

 

4.000

   

Agence de l'innovation industrielle

 

 

 

1.700 

   

RATP (soulte retraite)

         

500/800 ?

Sous-total

1.362

 

 

7.388

25

500/800

TOTAL

4.668

3.160

5.360

10.036

10.346
17.769

5.000

(a) Prévisions en italique.

(b) Estimations de votre Rapporteur spécial inférées à partir des documents budgétaires et des réponses fournies par le ministère de l'Économie.

LE BILAN 2002-2007 DE L’AFFECTATION DES RECETTES DE PRIVATISATION ET DES OUVERTURES DE CAPITAL PAR
DILUTION DE LA PARTICIPATION DE L’ÉTAT

(en millions d'euros et en pourcentage des
dépenses du compte des participations financières)

(A) Dotations, avances et acquisitions de titre

6.405

(B) Augmentation de capital consentie par dilution de la part de l’État au profit des entreprises publiques (a)

12.251

TOTAL A+B : l’État « investisseur et stratège »

18.656 (32,1%)

Désendettement

30.068 (51,7%)

Subventions et autres dotations

9.775 (16,2%)

TOTAL

58.149 (100%)

(a) D’un point de vue analytique, les augmentations de capital consenties par l’État par dilution de sa participation sont ici considérées comme une modalité d’affectation du produit de cession. Le raisonnement est qu’en acceptant qu’une entreprise ouvre son capital sans participer à cette augmentation, l’État concède à l’entreprise le produit correspondant à la dilution de sa participation.

Durant la législature, l’État a pleinement assumé son rôle d’actionnaire en prenant une part décisive dans la recapitalisation de nombreuses entreprises du secteur public. Au total, on l’a vu, 6,4 milliards d'euros tirés du produit des privatisations devraient être consacrés à des dotations en capital, dont 1,9 milliard d'euros en 2005 et 1 milliard d'euros en 2006, soit respectivement 18,8 % puis 5,8 % des recettes de privatisations de chacune de ces années.

● Une part décisive de ce montant a été mobilisée dans le cadre de la mise en œuvre de plans de redressement d’entreprises publiques en difficultés.

– C’est en particulier le cas des 687 millions d'euros de recapitalisation accordés à GIAT dans le cadre du projet stratégique de restructuration industrielle et sociale discuté avec les instances représentatives du personnel de GIAT Industries jusqu’au le 27 février 2004 (15). Il importe de rappeler que l’État intervient dans ce plan non seulement comme actionnaire, mais aussi comme garant des équilibres sociaux (puisqu’il assume les engagements pris à l'égard du

personnel sous statut à reclasser) et comme client (les intentions de commandes de l’État pour la période 2003-2006 s’établissent à 1.350 millions d'euros, dont 85 millions d'euros pour les munitions de moyen calibre).

Une dotation de 150 millions d'euros a été accordée en 2005. Deux dotations, estimées à 200 puis 100 millions d'euros, devraient être versées en 2006 et 2007, portant la participation de l’État au redressement du groupe au milliard d’euros sur lequel il s’était engagé en 2003.

Ces efforts de restructuration très significatifs (l’effectif a été réduit, au 31 décembre 2005, de plus de 30%) commencent à porter leurs premiers fruits : pour la première fois de la décennie, le GIAT a enregistré en 2005 un bénéfice net, de 12 millions d'euros, avec une marge opérationnelle positive (de 9 millions d'euros contre une perte de 81 millions d'euros en 2004) portée en particulier par un fort ressaut du chiffre d’affaires (+ 24%) lié à la livraison de 33 chars de combat Leclerc à l’État, lequel concentre 89% du carnet de commande du groupe (dont il faut remarquer qu’il ressort à 184 millions d'euros fin 2005 pour 731 millions d'euros de chiffre d’affaires).

Votre Rapporteur spécial rappelle qu’entre 1986 et 2007 l’État aura accordé, au total, 4,1 milliards d'euros courants de dotations au GIAT.

– L’Imprimerie nationale a pour sa part bénéficié de 197 millions d'euros de fonds issus du compte des participations financières de l’État depuis 2002, dont 61 millions d'euros d’avances d’actionnaire reconverties par abandon de compte courant d’actionnaires et 71 millions d'euros d’augmentation du capital par apport en numéraire versés en 2005.

Confrontée à un fort déficit de compétitivité par rapport à ses concurrents européens du fait de l’éclatement géographique de sa production et de charges de personnel excessivement lourdes (42% du chiffre d’affaires en 2003), qui s’est notamment traduit par la perte de contrats importants (les annuaires téléphoniques français en particulier), l’entreprise s’est trouvée fin 2004 dans une situation financière dramatique.

Pour éviter une cessation de paiement, l’État avait accordé dès janvier 2004 une avance d’actionnaire de 65 millions d'euros couvrant les besoins de trésorerie de l’entreprise, la Commission européenne exigeant alors que cette aide au sauvetage soit remboursée en août 2005 et qu’elle s’intègre dans un plan de sauvetage.

Le plan de restructuration s’appuie sur une très forte réduction du périmètre et des effectifs de l’entreprise (sortie des activités, d’éditions et d’impression de feuille et de vente par correspondance et suppression de 352 postes pour ramener les effectifs à 780 salariés), sur la limitation du monopole à ses activités fiduciaires, continus et grands comptes, et sur une importante restructuration industrielle, ainsi que sur une recapitalisation par l’État à hauteur de 197 millions d'euros (les avances remboursables étant converties en augmentation de capital, un apport en numéraire complémentaire de 71 millions d'euros étant réalisé à l’été 2005). Ce plan a été approuvé par la Commission européenne le 20 juillet 2005.

– Début 2005, l’avance remboursable de 517 millions d'euros versée en 2002 à Bull a été convertie, avec l’aval de la Commission européenne, en aide à la restructuration, grevant d’autant les dépenses – et les ressources – du compte de privatisations. L’État est par suite définitivement sorti du capital de l’entreprise grâce au placement institutionnel accéléré de sa part résiduelle de 2,9% pour 19 millions d'euros. Au total, depuis 1986, Bull aura bénéficié de 3,6 milliards d'euros de dotations de l’État.

– 66 puis 3 millions d'euros ont été consacrés en 2003 puis en 2005 à la recapitalisation de la SNCM via sa société mère, la CGMF. Cette aide à la restructuration a été autorisée par la Commission européenne le 9 juillet 2003 en contrepartie de la mise en œuvre d’un rigoureux plan de restructuration comportant notamment la recomposition de la flotte, la vente de certains navires, la fermeture de filiales et le redéploiement des dessertes.

Cependant, la décision de la Commission a été annulée, le 15 juin 2005, par le Tribunal de première instance (TPI) de la Communauté européenne dans le cadre d’un recours introduit par le concurrent Corsica Ferries France, les irrégularités portant non sur le principe du versement de l’aide mais sur ses modalités de son calcul, entachées d’une erreur factuelle.

Parallèlement, la situation économique et financière de la SNCM a connu une nouvelle dégradation à l’été 2005, conduisant les autorités françaises à rechercher des partenaires privés susceptibles d’entrer dans le capital de l’entreprise. À la suite d’un processus de sélection décrit par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie comme « transparent, ouvert et non discriminatoire », le Gouvernement a décidé de privatiser la société, l’État conservant néanmoins 25% du capital via la CGMF. Les salariés ont bénéficié d’une offre réservée portant sur 9% du capital, tandis que Veolia Transport et Butler Capital Partners ont acquis respectivement 28% et 38% du capital.

Autorisée par la Commission européenne au titre du contrôle des concentrations le 30 mai 2006 cette opération a été réalisée dès le lendemain. Afin de permettre la survie de l’activité, l’État a participé à l’apurement des pertes en versant une recapitalisation de 143 millions d'euros (dont 69 millions d'euros en remplacement des dotations précédemment versées mais annulées), en apportant 39 millions d'euros placés sur un compte séquestre pour financer le plan social et 9 millions d'euros sous forme d’avances en compte courant. Ces mesures sont encore soumises à l’approbation de la Commission européenne.

L’effort supplémentaire consenti par l’État a ainsi atteint 129 millions d'euros en 2005, portant sa participation d’ensemble au sauvetage de la SNCM à 209 millions d'euros.

– Confrontée à l’ouverture du fret ferroviaire à la concurrence depuis mars 2003 pour les réseaux transeuropéens, la SNCF a présenté un plan de redressement des comptes de l’activité fret fondé sur une profonde restructuration de l’outil de production pour aligner la qualité du service sur les demandes légitimes des clients et mettre en place une politique commerciale plus active.

La Commission européenne a confirmé, le 2 mars 2005, la compatibilité avec la législation européenne relative à la concurrence et aux aides d’État du plan de restructuration. Celui-ci prévoit un apport de la SNCF de 700 millions d'euros et une contribution de l’État d’au plus 800 millions d'euros au financement d’une partie des pertes accumulées du fret et de la remise à niveau le parc de locomotives affectées à cette activité.

La Commission a en effet considéré que l’aide devrait permettre un retour du fret SNCF à la viabilité économique fin 2006, qu’elle est limitée à ses réels besoins de restructuration et qu’elle est accompagnée de contreparties, relatives notamment à la réduction du volume du trafic pendant la restructuration et à l’ouverture anticipée du marché français, de nature à éviter que l’aide ne fasse obstacle au développement d’autres opérateurs européens de transport de marchandise par rail.

L’État a ainsi accordé une première dotation de 250 millions d'euros en 2005. Deux versements devraient intervenir d’ici la fin de l’année 2006.

Le versement de la deuxième tranche de l’aide, de 250 millions d'euros est cependant conditionné à la transposition en droit national du deuxième paquet ferroviaire, qui ne sera effective qu’après la publication d’un décret relatif à la sécurité des circulations ferroviaires et à l’interopérabilité du système ferroviaire. Interviendrait immédiatement après le versement d’une troisième tranche de 200 millions d'euros supplémentaires, tandis qu’une dernière tranche de l’ordre de 100 millions d'euros serait débloquée dès l’approbation des comptes annuels 2006 par le conseil d’administration de la SNCF, à moins que la capacité d’autofinancement dégagée par l’activité fasse apparaître un excès d’aides sur la période 2004-2006.

Votre Rapporteur spécial remarque que l’activité peine à se redresser. Les pertes diminuent faiblement, se repliant de 450 millions en 2003 à 382 millions d'euros en 2004 puis 220 millions en 2005, cette dernière année étant marquée par une forte diminution du chiffre d’affaires (– 10%) liée à des problèmes de qualité de service (manque de fiabilité des acheminements dans certaines régions) et à des conflits sociaux en France et à l’étranger qui ont lourdement pesé sur les volumes transportés et ont été aggravés par une conjoncture peu favorable, notamment dans le secteur de la sidérurgie, premier client de Fret SNCF.

Restent que de nets progrès dans la productivité (+ 10%), d’importants investissements permettant de renouveler l’appareil de production (236 millions d'euros d’investissements en 2005 avec 42 nouvelles locomotives) et la création de nouveaux services aux clients (Centre de Service Clients, mise en place d’une nouvelle facture et d’un dispositif de commande innovant) constituent de réelles avancées.

 De nombreuses dotations et avances s’intègrent par ailleurs dans d’ambitieux plans de modernisation d’entreprises performantes et prometteuses.

– Ainsi, DCN a fait l’objet d’une spectaculaire mutation dont un jalon essentiel a été franchi en 2003 par l’adoption d’un statut de société anonyme (conformément à l’article 78 de la loi de finances rectificative pour 2001). L’État a consenti à participer à la promotion du groupe en acteur majeur du mouvement de consolidation européen de l’industrie navale, en lui consacrant un effort financier qui devrait atteindre 754 millions d'euros d’ici la fin 2007. 120 et 150 millions d'euros ont été versés à ce titre en 2005 et 2006 à partir du compte de privatisation. Une troisième échéance de l’ordre de 150 millions d'euros devrait intervenir en 2007.

– Dans le cadre du soutien des pouvoirs publics au financement des PME et à l’innovation, l’État a créé OSEO en réunissant la Banque du développement des PME (BDPME) et sa filiale Sofaris, l’Agence française de l’innovation (ANVAR) et du GIE Agence des PME (16).

Ce rapprochement a pour objet d’optimiser le dispositif de soutien public aux PME et de favoriser le développement et la diffusion de l’innovation dans les PME en faisant naître des synergies entre les trois grands métiers désormais exercés par le groupe OSEO : le soutien à l’innovation par l’accompagnement et le financement des projets technologiques des PME ayant des perspectives concrètes de commercialisation (OSEO Anvar y a consacré 224 millions d'euros en 2005 dont 156 millions d'euros d’avances remboursables et 68 millions d'euros de subventions) ; la participation au financement des investissements et du cycle d’exploitation aux côtés des établissements de crédit (OSEO Bdpme accordant, en 2005, 1.360 millions d'euros de cofinancement et 770 millions d'euros de financement à court terme) et la garantie des financements bancaires et des interventions des organismes de fonds propres au moyen de OSEO Sofaris (qui garantit 4.550 millions d'euros de concours représentant 2.005 millions d'euros de risques nets couverts, dont notamment 792 millions d'euros dédiés au soutien à la création).

208 millions d'euros d’apports ont ainsi été versés en 2005 à l’EPIC OSEO, auxquels se sont ajoutés 80 millions d'euros de dotations à OSEO Sofaris (et 132 millions d'euros à OSEO Anvar traités infra en subventions).

Les fonds propres des entreprises publiques ont par ailleurs été renforcés en recourant aux marchés financiers. L’État a, depuis 2002, joué avec réalisme son rôle d’actionnaire : il a accepté que d’importantes ouvertures de capital diluent sa participation dès lors qu’elles fournissent à des entreprises qui ont un besoin impérieux de marges financières importantes. Plus de 12 milliards d'euros de fonds propres ont ainsi été apportés aux entreprises publiques.

– Après le succès de l’augmentation de capital du début de l’année 2003 dans lequel l’État, via l’ERAP, avait pris toute sa part, France Télécom a procédé à trois augmentations de capital pour un montant total de 1.150 millions d'euros.

Les premières opérations ont consisté en l’intégration des minoritaires d’Orange et de Wanadoo en 2003 et 2004 par échanges d’actions.

De même, en septembre 2005, afin d’apporter un financement partiel à l’opération d’acquisition de 80% de l’opérateur de téléphonie mobile espagnol Amena pour 6,4 milliards d'euros, le groupe a lancé une augmentation de capital sur le marché d’un montant de 3 milliards d'euros.

Dans le cadre de l’opération, les actionnaires du groupe ont bénéficié d’une attribution gratuite de bons de souscription d’actions, à raison d’un bon par action détenue, 37 bons donnant le droit de souscrire à deux actions nouvelles de France Télécom au prix de 22,6 euros par action de 4 euros de nominal, soit une prime d'émission de 18,6 euros par action nouvelle. L’attribution a lieu le 1er septembre 2005 et la période d’exercice a eu lieu du 1er septembre au 13 septembre inclus.

En ne souscrivant pas à cette recapitalisation, l’État a réduit sa participation directe ou indirecte dans France Télécom de 34,9% à 33,1%.

– L’État s’est de même attaché à assainir le bilan des sociétés autoroutières en organisant l’augmentation de leur capital par l’ouverture aux capitaux privés et ainsi la dilution, sans contrepartie, de la participation publique. Au total, 2.250 millions d'euros ont été levés sur les marchés financiers en 2004 et 2005.

Ce fut le cas en novembre 2004 pour le groupe Autoroutes Paris Rhin Rhône (APRR), qui détient 99,8% de AREA (société des Autoroutes Rhône-Alpes) et 100% de SIRA (Autoroute info 107.7 FM) et construit, entretient et exploite le second réseau autoroutier concédé en France et le troisième en Europe (2.205 km d’autoroutes en service), l’échéance des concessions étant fixée à 2032.

Afin de rééquilibrer un bilan très dégradé (141 millions d'euros de fonds propres pour 6.668 millions d'euros de dettes financières nettes au 31 décembre 2003), augmenter sa capacité à distribuer des dividendes (APRR n’avait distribué que 40% de son résultat 2003 qui n’a pas dépassé 102 millions d'euros) et lui permettre d’assurer son développement stratégique, l’État a en effet décidé de procéder à une augmentation de 1.350 millions d'euros du capital du groupe, sans aucune cession de titres – et donc sans aucune recette à son profit.

La participation de l’État a ainsi été diluée de 99% à 70% du capital, tandis que l’introduction en bourse sur le marché d’Euronext Paris a permis au groupe de lever 1.350 millions d'euros.

Le succès de cette opération a permis à APRR de reconstituer ses fonds propres (1.517 millions d'euros fin 2004, soit un ratio d’endettement financier sur capitaux propres de 3,5 contre 47 un an plus tôt) à un niveau lui permettant de bénéficier d’une structure financière comparable à celle de ses concurrents et d’assurer son développement (Standard & Poor’s a alors relevé la notation financière du groupe à A).

De même, la Sanef (ex. Sociétés des Autoroutes du Nord et de l’Est de la France), troisième réseau autoroutier concédé en France (1.684 km d’autoroutes en service), a ouvert son capital en mars 2005 en procédant à une augmentation de capital de 900 millions d'euros, diluant la part de l’État de 100% à 75,65%.

– Afin de donner aux groupes énergétiques les moyens de leur indispensable développement, l’État a consenti à l’ouverture de leur capital : GDF et EDF ont ainsi procèdé à des augmentations de capital de respectivement 1.869 et 6.351 millions d'euros.

Ainsi, presque la moitié des 20% du capital de GDF introduit en bourse le 8 juillet 2005 a pris la forme d’une augmentation de capital qui a permis de conforter la structure financière du groupe. Cette opération a connu un succès remarquable dont a attesté une forte appétence des marchés : 3,1 millions d’ordres ont été réunis sur l’offre publique à prix ouvert (OPO) destinée aux particuliers (17), portant sur 3,8 milliards d'euros, tandis que le livre d’ordres placement global garanti auprès d’investisseurs institutionnels a couvert plus de 19 fois.

Ainsi, compte tenu par ailleurs de l’abondant apport de cash flow, le ratio dette nette sur fonds propres de GDF (14.803 millions d'euros de fonds propres au 31 décembre 2005) s’est réduit de moitié, passant de 41,8% à 19,4% entre 2004 et 2005, permettant au groupe de reprendre ses investissements (3.061 millions d'euros en 2005 contre 2.133 millions d'euros en 2004 année marquée, il est vrai, par un effort de réduction de 40% des investissements en préalable à l’ouverture du capital).

L’introduction en bourse d’EDF en novembre 2005 s’est pour sa part traduite par une augmentation de capital de 6.351 millions d'euros. C’est à ce jour la plus importante introduction en bourse réalisée en France (à laquelle s’est ajoutée, comme il sera vu, la cession aux salariés de 890 millions d'euros de titres détenus par l’État). L’opération a rencontré elle aussi un remarquable succès. L’offre aux particuliers a été couverte 1,6 fois (4,9 millions d’ordres individuels) et l’offre aux institutionnels 5 fois, le prix d’introduction ayant été fixé au niveau très attractif de 32 euros pour les particuliers et 33 euros pour les investisseurs institutionnels, soit le montant plancher fixé par la Commission des participations et des transferts dans son avis n° 2005-A.-12 du 17 novembre 2005. Au 26 octobre 2006, l’action s’échangeait à 47,7 euros, soit 45% de plus que le cours introductif.

À l’issue de cette opération, la part de l’État dans le capital du groupe a été diluée à 87,3%, le public (investisseurs institutionnels et particuliers) détenant 10,8% et les salariés et anciens salariés 1,9%. L’entreprise a pour sa part pu reconstituer son bilan, son ratio endettement net sur fonds propres (exprimé aux normes IFRS et pro forma) diminuant de près de moitié, de 2,7 en 2004 à 1,4.

– À l’image de l’opération réalisée en 2005 pour GDF, l’introduction en bourse des Aéroports de Paris (ADP) a comporté une augmentation de capital de 600 millions d'euros tandis que l’État cédait pour 769 millions d'euros de titres. Cette opération était rendue indispensable face à l’ampleur des investissements nécessaires dans les cinq prochaines années pour conforter la place de Paris dans la hiérarchie des aéroports internationaux (2,7 milliards d'euros d’investissement pour des capitaux propres ne dépassant pas 2 milliards d'euros en 2005, aux normes IFRS).

Au total, la participation de l’État est passée de 100 à 68,4%. L’offre à prix ouvert (à un prix de 44 euros par action) lancée le 31 mai a été souscrite par 2,6 millions de particuliers, tandis que le placement global garanti (45 euros par actions) s’est déroulé dans de bonnes conditions. L’offre réservée aux salariés (10% de l’offre totale à des conditions préférentielles) a rencontré un vif succès : plus de 70% des salariés y ont souscrit. Au 26 octobre 2006, l’action d’ADP valait 53,0 euros, 17% de plus que lors de l’introduction en bourse.

Les rôles joués par l’État dans le redressement de France Télécom ou d’Alstom témoignent de l’efficacité d’une gestion pragmatique et sans a priori idéologiques, qui a servi non seulement les deux entreprises concernées mais l’État lui-même.

● Confronté en 2002 à une situation financière extrêmement dégradée (pertes de 18,3 milliards d'euros après 10,2 milliards d'euros en 2001) imposant de solder les mécomptes d’une expansion internationale mal maîtrisée (68 milliards d'euros d’endettement fin 2002), France Télécom a dû procéder début 2003 à une recapitalisation de 15 milliards d'euros.

Malgré une situation budgétaire extrêmement tendue, l’État a fait le choix courageux d’assumer pleinement son rôle d’actionnaire majoritaire et a fait porter par l’ERAP le financement de sa contribution à l’augmentation de capital.

L’ERAP s’est endetté à cette fin pour 9,4 milliards d'euros (18), tandis que l’État lui apportait 2,2 milliards d'euros d’actions France Télécom. L’idée directrice était de rembourser le capital des emprunts par les recettes tirées ultérieurement de la cession de titres d’un groupe France Télécom en net redressement, tandis que les intérêts seraient couverts par les dividendes croissants versés par l’opérateur.

Cette stratégie s’est d’ores et déjà révélée payante. En effet, l’ERAP et l’État ont cédé pour 9,2 milliards d'euros de titres de France Télécom :

– la cession conjointe de 10% du capital le 1er septembre 2004 a rapporté 5,1 milliards d'euros, dont 3,2 milliards d'euros au titre des actions détenues par l’ERAP et 1,9 milliard d'euros à celui des participations directes de l’État ;

– une deuxième cession, le 6 juin 2005, d’une tranche supplémentaire de 6 % du capital, toujours au moyen d’un placement institutionnel accéléré au terme d’une mise en concurrence de syndicats bancaires sur un prix garanti, a rapporté 3,4 milliards d'euros dont 1,2 milliard d'euros à l’État et 2,2 milliards d'euros à l’ERAP ;

– les offres réservées aux salariés venues à échéance au cours de l’année 2005 et au début de l’année 2006 ont permis à l’État d’encaisser 0,7 milliard d'euros supplémentaires.

La part de la puissance publique dans son ensemble au capital de l’opérateur historique est au total passée de 56,4% en 2002 à 18,2% en 2005.

Dès lors, les 9,4 milliards d'euros empruntés par l’ERAP pour financer la participation de l’État au redressement de France Télécom ont été couverts par les 9,2 milliards d'euros de produit des cessions de titres d’une entreprise qui a retrouvé son dynamisme et sa rentabilité.

 L’État a de même été conduit à intervenir dans le plan de restructuration financière du groupe Alstom mis en œuvre à partir de l’été 2003. Votre Rapporteur spécial souligne ici que cette intervention s’est dès l’origine inscrite dans une logique de soutien temporaire et à titre minoritaire à une opération menée principalement par des investisseurs privés. Les modalités en ont été approuvées par la Commission européenne le 7 juillet 2004.

L’État a assumé toute sa part du plan de restructuration dans ses deux dimensions : assurer durablement l’émission des cautions bancaires nécessaires au fonctionnement de l’entreprise, et renforcer ses fonds propres. Il a notamment acquis à l’été 2004 une participation de 21% au capital du groupe en prenant l’engagement de sortir du capital 12 mois après que le groupe aurait atteint la notation « investment grade » et en tout état de cause dans un délai maximum de quatre ans.

Dès l’été 2005, il est apparu que le groupe Alstom avait retrouvé la confiance de ses clients et de ses partenaires. Les résultats 2005-2006 confirmaient son redressement (résultat net positif de 178 millions d'euros contre
– 628 millions d'euros en 2004-2005) avec une génération de liquidités opérationnelles de 525 millions d'euros et le rétablissement du ratio endettement sur fonds propres de 104 à 68%.

Conformément à ses engagements vis-à-vis de la Commission européenne, l’État a cédé, le 26 juin 2006, après réalisation des conditions suspensives (19), l’intégralité de sa participation de 21% au capital d’Alstom. Ce prix de l’action porté à 68,21 euros lui a permis d’enregistrer un produit de cession de 2 milliards d'euros.

Les prises de participation dans Alstom en 2003 et 2004 ayant coûté 720 millions d'euros versés à partir du compte de privatisations, l’État a non seulement joué un rôle décisif dans le redressement du groupe, mais il en a en outre tiré un gain en réalisant une plus-value de 1,3 milliard d'euros. C’est un exemple remarquable de réalisme, où se conjuguent d’une manière particulièrement heureuse le soutien de l’activité économique et la prise en compte des intérêts patrimoniaux de l’État.

• L’État a fait preuve depuis 2002 d’un réel sens de l’opportunité dans le choix et le calendrier des cessions de participations minoritaires jugées non prioritaires, afin de maximiser ses gains patrimoniaux en sachant allier une rapidité d’exécution, une réelle maîtrise des processus de mise sur le marché et une attention vigilante portée à l’intérêt économique des entreprises concernées.

Par le biais d’un placement institutionnel accéléré, ou par enchères, l’État a ainsi cédé :

– le 24 novembre 2002, sa participation résiduelle de 10,9% au capital du Crédit lyonnais pour 2,2 milliards d'euros ;

– le 28 juillet 2003 d’une participation de 8,5% dans le capital de Renault pour 1,4 milliard d'euros ;

– le 3 septembre 2003, sa participation résiduelle de 15,7% dans Dassault Systèmes pour 0,6 milliard d'euros de produit ;

• Parallèlement, l’État a su concilier le respect de ses intérêts patrimoniaux avec la définition d’une stratégie de développement cohérente au service des entreprises publiques, en levant les obstacles qui limitaient leur capacité à nouer les alliances nécessaires à leur croissance. Ainsi :

– le 4 novembre 2004, l’État a cédé pour 1,2 milliard d'euros les 18% du capital de Thomson qu’il détenait indirectement via la holding TSA afin d’encourager la création d’une société commune (joint venture) entre Thomson et l’opérateur chinois TCL à laquelle a été apportée l’activité de fabrication de téléviseurs du groupe français ;

– le 9 décembre 2004, l’État a cédé 17,7% du capital d’Air France-KLM dans le cadre de la naissance de la société commune pour 0,7 milliard d'euros ;

– le 29 février 2005, l’État a consenti à la dilution à 31,3% de sa part dans le capital du nouvel ensemble Sagem et SNECMA constitué au terme de la fusion par offre publique d’échange (complétée par une offre publique d’achat à titre subsidiaire) de Sagem sur SNECMA en retirant un produit de 0,9 milliard d'euros ;

– la cession des participations de l’État dans les sociétés concessionnaires d’autoroutes s’inscrit pleinement dans cette logique « gagnant gagnant » donnant la priorité à la valorisation optimale du patrimoine public – l’arbitrage portant ici sur la valorisation comparée des dividendes immédiats d’une cession et de la rentabilité à moyen terme de la participation dont la cession est envisagée– et au développement harmonieux des entreprises concernées.

On rappellera que le Premier ministre avait annoncé, dans son discours de politique générale du 8 juin 2005, son intention de procéder à cette cession : il s’agissait de donner la priorité au désendettement public et d’apporter aux sociétés autoroutières la souplesse et la réactivité nécessaires pour faire face aux défis technologiques et stratégiques de leurs secteurs. Au terme de la privatisation, leur capacité à nouer les alliances permettant de conquérir des marchés à l’étranger et d’acquérir la taille critique nécessaire au niveau européen se trouve désormais renforcée.

Le 18 juillet 2005, le ministre de l'Économie, des finances et de l'industrie et le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer ont lancé le processus de la cession de ces participations, par appel d’offres indicatives encadré par un cahier des charges précisant notamment les objectifs de service public et l’assise financière nécessaire pour conforter le développement des sociétés et garantir la bonne exécution des obligations de service public. La transparence, le caractère ouvert de la procédure et la parfaite égalité de traitement entre les candidats ont été assurés notamment par la surveillance de chacune des étapes du processus par une personnalité indépendante, M. Jean-Louis Fort, ancien secrétaire général de la Commission bancaire.

On rappellera que l’État détenait 50,4% du capital d’ASF (dont 8,8% détenus par l’établissement public Autoroutes de France (ADF), 70,2% du capital de APRR (dont 35,1% via ADF) et 75,7% de SANEF (dont 37,8% via ADF)).

Fin août, 19 offres indicatives ont été transmises à l’État, comportant notamment un prix d’acquisition indicatif, le plan de financement envisagé et la description du projet industriel et social proposé.

Le 7 novembre 2005, après que l’État a adressé aux candidats présélectionnés un cahier des charges complémentaires, neuf offres ont été enregistrées par l’APE, quatre portant sur APRR, quatre sur Sanef et une seule sur les ASF.

Le 14 décembre, à l’issue d’une analyse multicritère opérée en application du cahier des charges, les deux ministres, après approbation du conseil d’administration d’ADF et consultation de la commission des participations et des transferts, ont retenu les acquéreurs les mieux disants : la société Vinci a ainsi acquis la participation de l’État dans les ASF pour 51 euros par action ; le consortium Eiffage et Macquarie celle dans APRR pour 61 euros par action et le consortium composé d’Albertis, d’AXE, de la Caisse des dépôts et consignations, de CNP Assurances, de Prédica et de la Financière et foncière de participations celle dans Sanef pour 58 euros par action.

Les décrets autorisant la privatisation ont été pris, conformément au titre II de la loi (n° 86-912) du 6 août 1986, sur avis conforme de la Commission des participations et des transferts les 3 et 20 février pour la Sanef et APRR et le 9 mars pour les ASF.

Au total, la cession devrait rapporter 14 milliards d'euros à l’État : 2.014 millions d'euros, 2.421 et 4.892 millions d'euros ont été encaissés en 2006 sur le compte des participations financières au titre des participations détenues directement par l’État dans respectivement la Sanef, APFR et les ASF. 3.730 millions d'euros y ont ensuite été reversés par l’établissement public ADF au titre des participations qu’il détenait pour le compte de l’État. Par ailleurs, ADF versera en 2007 au budget général de l’État un dividende exceptionnel de 870 millions d'euros représentatif de la plus-value qu’il a réalisé au cours de la cession des titres des sociétés autoroutières.

Le prix des participations cédées correspond à un taux d’actualisation des bénéfices cumulés des sociétés autoroutières pour l’ensemble de la période de concession (35/40 milliards d'euros sur 28/32 ans selon les sociétés exploitantes) de l’ordre de 6,5/7%. Dans la mesure où le produit des cessions a essentiellement été consacré au désendettement public, ce taux d’actualisation peut être comparé au taux d’intérêt servi par l’État sur les marchés financiers pour financer son endettement, qui gravite autour de 4% à moyen terme.

Votre Rapporteur spécial rappelle cependant que cette comparaison est fallacieuse. D’abord, elle ignore les risques qui pèsent inéluctablement sur les dividendes effectifs versés à moyen terme par les sociétés concessionnaires d’autoroute, risques liés notamment à l’évolution des prix des carburants et au développement des transports concurrents. En outre, ce type de raisonnement néglige l’incidence des modalités concrètes de leur gestion sur la rentabilité des entreprises. Votre Rapporteur spécial considère à cet égard comme préférable la gestion privatisée d’une activité économique, dès lors qu’un cahier des charges précis vient clairement garantir la bonne exécution du service public. Il faut d’ailleurs rappeler que le patrimoine autoroutier reste la propriété de l’État, qui reprendra la jouissance des concessions à leur terme.

– Un raisonnement comparable peut être tenu s’agissant de la privatisation de GDF.

Votre Rapporteur spécial ne revient pas sur les évidentes complémentarités géographiques, industrielles et stratégiques qui justifient la fusion envisagée entre GDF, premier gazier et septième énergéticien européen, et Suez, sixième gazier (et l’un des premiers opérateurs de gaz liquéfié dans le monde avec GDF) et cinquième électricien européen (avec notamment 7 % de la puissance de génération d’électricité en France).

Il se contente de souligner, une nouvelle fois, l’ampleur des besoins en capitaux du secteur de l’énergie, secteur intensif en investissement s’il en est et qui fait l’objet d’un mouvement de consolidation extrêmement puissant au niveau européen afin de faire émerger des acteurs forts, capables de garantir une continuité entre les différents vecteurs de l’offre énergétiques.

Or, l’État n’a pas les moyens financiers de satisfaire ces besoins. Dès lors, le choix n’est pas entre l’immobilisme et l’action, la première solution n’étant pas envisageable sauf à compromettre jusqu’à la survie de nos opérateurs nationaux. Le choix porte sur les modalités concrètes de financement – ou de réalisation, par des alliances – de l’expansion inéluctable.

Au tournant des années 2000, ce sont les mêmes nécessités qui ont imposé à France Télécom de consentir des investissements sans précédent. Ne l’aurait-elle pas fait qu’elle serait aujourd’hui marginalisée dans la compétition européenne. Or, les autorités politiques d’alors, en faisant du seuil de participation de l’État un rempart infranchissable, n’ont laissé d’autre choix à l’opérateur que de s’endetter. On a vu ce qu’il lui en a coûté, et tout le bien que lui a apporté l’expertise d’un État actionnaire presque exclusif.

Ainsi, quelles que soient les modalités concrètes que revêtira l’avenir industriel de GDF, l’essentiel aux yeux de votre Rapporteur spécial est de donner à l’entreprise les moyens de son développement.

III.– UNE CONTRIBUTION DÉCISIVE AU DÉSENDETTEMENT PUBLIC

Comme le montre le tableau ci-après qui décrit l’affectation des recettes de privatisation au cours de la douzième législature, l’essentiel du produit des cessions de participations a été consacré à désendetter le secteur public (30 milliards d'euros, soit 65% des ressources). Dans une moindre mesure, il a permis de participer au financement de politiques ne relevant pas au sens strict de l’exercice de la mission de l’État actionnaire (près de 10 milliards d'euros, soit 21% des ressources).

L’AFFECTATION DES RECETTES DE PRIVATISATION DEPUIS 2002 (a)

(en millions d'euros)

 

2002

2003

2004

2005

2006

2007

TOTAL

Dotations, avances et acquisition de titre (b)

533

1.210

1.110

1.873

1.029

650

6.405

14,0%

Désendettement

Caisse de la dette publique

 

500

   

8.000
5.300

3.100

16.900

 

Fonds de réserve pour les retraites

500

         

500

 

Charbonnages de France

454

1.408

940

80

1.400

 

4.282

 

EPFR

1.819

 

1.126

230

515

500

4.190

 

ERAP

   

2.100

     

2.100

 

EMC

 

42

84

370

   

496

 

Autres dotations au désendettement

       

1.500

 

1.500

 

Sous-total

2.773

1.950

4.250

680

16.715

3.600

29.968

65,3%

Subventions et autres dotations

RFF

1.362

         

1.362

 

Agence nationale de la recherche

     

1.262

   

1.262

 

Fondations

     

64

25

 

89

 

ÉTABLISSEMENT public du campus de Jussieu

     

110

   

110

 

EMOC et EPV

     

100

   

100

 

OSEO-Anvar

     

132

   

132

 

Laboratoire biotechnologie

           

0

 

ADEM

     

20

   

20

 

AFITF

     

4.000

   

4.000

 

Agence de l'innovation industrielle

     

1.700

   

1.700

 

RATP (soulte retraite)

         

500/
800 ?

500/
800 ?

 

Sous-total

1.362

0

0

7.388

25

500/
800

9.525

20,8%

TOTAL

4.668

3.160

5.360

10.036

17.769

5.000

45.898

100,0%

(a) Prévisions en italiques.

(b) Voir le II du présent chapitre.

Le fait saillant de l’exercice 2005 est à la contribution décisive du compte de privatisations au financement de politiques publiques jugées prioritaires. 7,4 milliards d'euros, soit 74 % du produit des cessions de participation de l’État de l’année, ont été dévolus à la recherche et aux infrastructures de transport.

Votre Rapporteur spécial remarque que ces modalités de financement, exceptionnelles, répondent à la nécessité de protéger la capacité de l’État à préparer l’avenir en investissant massivement dans les domaines clefs de la croissance, au moment où la maîtrise de la dépense du budget général de l’État (gel en volume entre 2003 et 2006, puis, pour 2007, réduction de 1% en volume des crédits budgétaires) restreint fortement les marges de manœuvre budgétaires.

Il importe d’ailleurs de remarquer que le versement de nombreuses dotations nouvelles en 2005 a été, en quelque sorte, « anticipé » avant que la loi organique ne réduise à compter du 1er janvier 2006 le périmètre des dépenses pouvant être financées à partir du compte des participations financières en le recentrant, comme il a été vu supra, sur les actions relevant de la politique proprement patrimoniale de l’État. Ainsi, les deux milliards d'euros de dotations accordées à l’agence pour l’innovation industrielle (AII) doivent couvrir les engagements réalisés en 2006 et en 2007, de même que les quatre milliards d'euros versés à l’agence de financement des infrastructures de transports de France (AFITF) ont concrétisé l’engagement du Premier ministre de consacrer à la réalisation du programme d’investissement de l’État une part importante du produit de la cession des sociétés autoroutières, perçu effectivement non en 2005 mais en 2006.

3,4 milliards d'euros de recettes de privatisation ont abondé les moyens consentis par l’État au profit de la recherche, de l’éducation et de la culture.

 Les fondations reconnues d’utilité publique du secteur de la recherche ont bénéficié de 89 millions d'euros de dotations en capital.

L’article 72 de la loi de finances initiale pour 2004 (n° 2003-1311 du 30 décembre 2003) a en effet étendu le champ des dépenses du compte de privatisation à ce type de dotation, afin de renforcer le rôle des organismes à but non lucratif dans le financement de la recherche. Cette disposition s’intégre dans un dispositif d’ensemble constitué, en particulier, de la loi relative au mécénat, aux associations et aux fondations (n° 2003-709 du 1er août 2003) et des nouveaux statuts types validés par le Conseil d’État à partir du printemps 2003, qui ont considérablement assoupli le régime juridique des fondations reconnues d’utilité publique afin d’encourager leur développement grâce à la simplification des modalités de leur création et de leur fonctionnement (20).

LES PRINCIPALES DOTATIONS EN CAPITAL VERSÉES
AUX FONDATIONS DE LA RECHERCHE EN 2005

(en millions d'euros)

Institut Pasteur

16,0

Supelec

5,7

FRDI

1,2

IHES

3,0

Santé et Radiofréquence

2,4

Cœur et Artères

4,3

René Planiol

0,7

FCSI

3,3

Bâtiment Énergie

4,0

Aéronautique Espace

9,0

Fondation Garches

0,7

Institut Curie

10,0

Fondations IHES

0,2

HEC

1,2

Rhône Alpes Futur

1,1

Tuck

1,1

IFRAD

0,4

 L’agence nationale pour la recherche (ANR) a pour sa part bénéficié de 1.262 millions d'euros de dotations versées à partir du compte de privatisation.

L’article 73 de la loi de finances initiale pour 2005 (n° 2004-1484 du 30 décembre 2005) a prévu le versement à partir du compte de privatisation de dotations en capital à l’ANR, agence créée en 2005 d’abord sous la forme d’un groupement d’intérêt public (approbation de la convention constitutive le 7 février 2005) puis sous celle d’un établissement public à compter du 1er janvier 2007 (décret n° 2006-963 du 1er août 2006 portant organisation et fonctionnement de l’ANR) afin de soutenir le développement des recherches fondamentales et appliquées, de l’innovation et des partenariats entre le secteur public et le secteur privé, de contribuer aux transferts technologiques des résultats de la recherche publique vers le monde économique et de faire des dotations en capital à des fondations de recherche reconnues d’utilité publique.

En 2005, l’ANR a engagé 689 millions d'euros de crédits, dont 78% consacrés aux programmes thématiques (102 millions d'euros pour le département « Énergie durable et environnement », 108 pour « Biologie santé », 135 pour « Écosystèmes et développement durable ») au terme d’un processus de sélection conforme aux standards internationaux (35 appels à projet lancés, 1.452 projets retenus sur 5.652 déposés, soit un taux de sélection de 25,7%), le reliquat de 149 millions d'euros finançant les actions annuelles ciblées sur le développement des partenariats public-privé et le soutien aux dynamiques de rapprochement locales. Au titre de ces actions, 346 millions d'euros de crédits de paiement ont été ouverts à partir d’une dotation du compte de privatisation accordée au début de 2005, sur lesquels 277 millions d'euros ont été effectivement consommés, le reliquat étant reportés au budget propre de l’établissement.

Pour 2006, le budget prévisionnel s’appuie sur 800 millions d'euros de crédits d’engagement et sur 590 millions d'euros de crédits de paiement. Ces derniers ont été versés à l’ANR dès le 29 décembre 2005 à partir du compte de privatisation. À cette somme s’est ajoutée une dotation supplémentaire de 326 millions d'euros destinée à financer, via l’ANR, pour 300 millions d'euros, les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) et les fondations de coopération scientifique (« campus ») prévus par la loi de programme (n° 2006-5450 du 18 avril 2006) pour la recherche et pour 26 millions d'euros un reliquat de dotations en capital au profit des fondations de la recherche.

 L’agence pour l’innovation industrielle a pour sa part bénéficié d’une dotation de 1.700 millions d'euros.

Votre Rapporteur spécial rappelle que l’agence a été créée par le décret n° 2005-1021 du 25 août 2005 conformément aux intentions exprimées par le Président de la République le 15 janvier 2005 à la lumière du rapport « Pour une nouvelle politique industrielle » que lui avait remis M. Jean-Louis Beffa, et après que le Parlement a voté les aménagements législatifs nécessaires à sa constitution en adoptant l’article 19 de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l’économie.

En réponse au constat largement partagé d’un décrochage de la France dans le domaine des industries de haute technologie (21) et d’une dispersion des politiques de soutien à la recherche (22), l’AII a pour mission de dynamiser le potentiel technologique français en soutenant, en co-financement avec des industriels, des grands programmes de recherche dont la taille critique et les débouchés commerciaux sont importants.

Les premiers projets de programmes mobilisateurs pour l’innovation industrielle (PMII) ont été sélectionnés le 25 avril 2006, à partir de quatre critères de sélection : un marché européen et mondial de taille importante avec l’objectif d’y prendre une part significative ; une forte innovation technologique impliquant des coûts de recherche et développement de plusieurs dizaines de millions d’euros ; le rôle moteur et l’implication financière d’un industriel chef de file responsable de la mise en œuvre du programme et de sa coordination ; un horizon temporel clairement déterminé.

Il s’agit principalement : du programme de traitement automatique des contenus multimédias (le « Google » européen) dénommé « Quaero », piloté par Thomson, dont le coût global est évalué à 250 millions d'euros pour des concours versés par l’AII de 90 millions d'euros (dont 30 millions d'euros sous la forme d’avances remboursables et 60 millions d'euros sous celle de subventions) ; du programme de conception de bâtiments économes en énergie « Homes », porté par Schneider, et estimé à 88 millions d'euros, dont 38 millions d'euros fournis par l’AII ; du programme de création d’une bio-raffinerie « BioHub » piloté par Roquette, pour 98 millions d'euros dont 43 millions d'euros venant de l’AII ; et du programme de développement de la télévision mobile satellitaire « TVMSL », avec Alcatel comme chef de file et pour un coût de 98 millions d'euros dont 38 millions d'euros pour l’AII.

L’agence, structure légère (EPIC) auquel la Caisse des dépôts et consignations fournit, sous l’autorité du directoire, un support administratif et financier, a ainsi décidé de consacrer à ces programmes environ 236 millions d'euros d’aides soumises à l’agrément de la Commission européenne qui veillera notamment au respect des plafonds fixés par la réglementation européenne, l’intensité de l’aide publique, variable selon la nature et les étapes du projet de recherche et développement, ne devant dépasser une fourchette allant de 25% (pour des activités de développement pré-concurrentiel, très en aval du processus, par exemple concrétisation des recherches dans des plans/schémas/dessins pour les produits) à 50% (recherche industrielle, plus en amont du cycle industriel) du coût total du programme.

Conformément aux engagements pris en 2005 (23) une dotation de 1.700 millions d'euros a été versée le 28 décembre 2005 couvrant l’intégralité des recettes de cessions de titre affectées à l’AII pour la période 2005-2007, et permettant, Compte tenu des revenus anticipés de leurs placements (gérés, on l’a vu, par la Caisse des dépôts et consignations) durant la période de réalisation des programmes (5 à 10 ans), d’engager un montant d’aides publiques de l’ordre de 2 milliards d'euros permettant de financer les 2 millions d’euros d’engagements au titre de 2006 et 2007.

 Enfin, trois autres dotations sont intervenues dans le domaine de la recherche, de l’éducation et de la culture :

Une dotation de 132 millions d'euros a été consentie à OSEO-Anvar, chargée, comme il a été vu supra, de soutenir les efforts quotidiens d’innovation des PME/PMI, dans le cadre de la constitution du groupe OSEO.

L’établissement public du campus de Jussieu, créé par le décret n° 97-356 du 17 avril 1997 modifié afin de conduire les opérations d’aménagement des locaux du campus de Jussieu, d’assurer leur désamiantage et de garantir leur mise en sécurité, a bénéficié d’une dotation de 110 millions d'euros versées à partir du compte de privatisation, portant l’ensemble des crédits accordés par l’État à l’établissement depuis sa création à 624 millions d'euros d’autorisations d’engagement et 496 millions d'euros de crédits de paiement.

Une dotation de 100 millions d'euros a enfin été versée à l’Établissement de maîtrise d’ouvrage des établissements culturels (ÉMOC), issu de la fusion de l’établissement public du Grand Louvre (EPGL) et de la mission interministérielle des grands travaux (MIGT).

Une dotation de 4 milliards d'euros a été consentie le 29 décembre 2005 à l’Agence de financement des infrastructures de transports de France, l’établissement public national à caractère administratif créé par le décret
n° 2004-1317 du 26 novembre 2004 modifié et chargé d’apporter la part de l’État dans le financement du programme d’investissement arrêté par le Comité interministériel à l’aménagement du territoire (CIADT) du 18 décembre 2003 et, à partir de 2006, dans la réalisation des contrats de plan État-régions.

On se souvient que cette dotation, d’un montant historique, a compensé les moins-values subies par l’AFITF à l’occasion de la privatisation des sociétés autoroutières pour l’AFITF. Votre rapporteur spécial rappelle en effet que l’article 60 de la loi de finances initiale pour 2005 (n° 2004-1484 du 30 décembre 2005) avait affecté à l’Agence les dividendes versés à l’État par les sociétés autoroutières à compter de 2005. La dotation permet de garantir à l’agence un socle de financement d’une ampleur suffisante pour honorer les engagements de l’État et satisfaire la montée en puissance des travaux d’infrastructure, l’article 66 de la loi de finances initiale pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005) ayant par ailleurs affecté à l’AFITF le produit de la redevance domaniale due par les sociétés concessionnaires du domaine public autoroutier (160 millions d'euros de produit prévu pour 2006), la taxe d’aménagement du territoire prélevée sur ces mêmes sociétés (510 millions d'euros prévus pour 2006) et 40% du produit des amendes du dispositif de contrôle et de sanction automatisés des infractions au code de la route, dans la limite de 100 millions d'euros.

Au total, compte tenu de ces financements annuels de l’ordre de 800 millions d'euros, la dotation de 4 milliards d'euros porte à près de 9 milliards d'euros les moyens de l’AFITF d’ici 2012. Cela permettra de couvrir l’intégralité des investissements de l’État dans le programme adopté par le CIADT de 2003 (22,5 milliards d'euros dont 7,5 milliards d'euros de subventions publiques) ainsi que de la participation de l’État à la réalisation des contrats de plan, puis des contrats de projet État-régions.

La part prépondérante des recettes de privatisation consacrée au désendettement (30 milliards d'euros entre 2002 et 2007, soit 65,3% de l’ensemble des ressources du compte des participations financières de l’État) renseigne mal sur les objectifs concrets poursuivis par les gestionnaires du programme Désendettement de l’État ou d’établissements publics de l’État.

En effet, si le programme intègre les apports à Caisse de la dette publique (c'est-à-dire le désendettement direct de l’État) ou au Fonds de réserve pour les retraites (dont l’objet est de couvrir une partie des coûts induits par le choc démographique sur les systèmes de retraite), qui recouvrent ce que votre Rapporteur spécial appelle la partie « active » du désendettement, il comprend aussi l’ensemble des dotations versées aux organismes chargés de « solder » le poids du passé (EPFR pour cantonner les actifs compromis du Crédit lyonnais, Charbonnages de France et l’EMC pour accompagner l’interruption des activités d’extraction de charbon et de potasse et l’ERAP pour couvrir progressivement le coût de la participation de l’État au redressement de France Télécom), ce qui constitue la face « passive » du désendettement qui bénéficiait traditionnellement de l’essentiel de l’effort de désendettement.

Or, une véritable rupture a été réalisée puisqu’en 2006 et 2007, pour la première fois depuis la création du compte de privatisation en 1986, l’essentiel des moyens tirés des participations financières a été consacré au désendettement direct de l’État.

Le « désendettement passif » a néanmoins représenté 62,3% des sommes dévolues au désendettement dans son ensemble entre 2002 et 2007.

  Le destinataire des dotations les plus abondantes versées durant la douzième législature est Charbonnages de France (CDF), qui a perçu 4,3 milliards d'euros perçus depuis 2002.

Après l’arrêt complet des activités extractives en avril 2004, l’EPIC doit désormais assumer la mission de liquidation de ses activités, sa dissolution devant intervenir au plus tard en avril 2008, tout en assurant la réhabilitation des sites et en contribuant à la réindustrialisation des bassins.

Dès lors, l’établissement s’attache principalement à réduire son endettement, bénéficiant à cette fin, outre une subvention annuelle couvrant les prestations sociales particulières versées à ses personnels retraités, du versement de dotations annuelles en capital à partir du compte des participations financières de l’État. L’État a ainsi versé début 2006 une dotation de 1.480 millions d'euros permettant de faire réduire l’endettement financier net de CDF à 4,1 milliards d'euros.

Depuis 1986, le groupe a ainsi bénéficié au total de 5,3 milliards d'euros de dotations en capital.

 L’Établissement public de financement et de restructuration (EPFR), qui assume désormais seul le financement du cantonnement des 29 milliards d'euros d’actifs compromis du Crédit Lyonnais, devrait avoir pour sa part bénéficié de 4,2 milliards d'euros de dotations depuis 2002, dont 515 millions d'euros en 2006 et 500 millions d'euros prévus pour 2007, afin de faire face aux échéances du prêt concédé en 1998 par le Crédit Lyonnais pour assurer la couverture du cantonnement. Ces montants portent à 8,5 milliards d'euros le total des dotations versées par l’État à l’EPFR depuis sa constitution.

Compte tenu de l’épuisement du stock d’actifs à réaliser, c’est désormais l’État seul qui devra couvrir annuellement les échéances de l’emprunt de l’EPFR jusqu’en 2014, pour 3,9 millions d'euros supplémentaires, soit environ 550 millions d'euros chaque année. Il est ainsi possible de dresser un premier bilan du coût pour l’État de la défaisance.

Votre Rapporteur spécial rappelle qu’en 1995, confrontés à une deuxième crise du Crédit Lyonnais (24), l’État, incapable d’assumer financièrement le coût d’une recapitalisation se chiffrant en centaine de milliards de francs, avait fait le choix de la mise en place d’une structure de cantonnement purgeant l’intégralité du bilan de la banque.

Le plan, approuvé par la Commission européenne le 26 juillet 1995 et par le Parlement par la loi du 28 novembre 1995, avait prévu le transfert à une société anonyme créée en avril 1995, le Consortium de réalisation, de 190 milliards de francs (29,0 milliards d’euros) d’actifs bruts (25) assortis de 55 milliards de francs
(8,38 milliards d’euros) de passifs soit 135 milliards de francs (20,6 milliards d’euros) d’actifs nets 
(26). Le CDR a alors acquis ses actifs auprès du Crédit Lyonnais, en étant financé par un prêt participatif d’un établissement public administratif national créé à cet effet, 1’Etablissement public de financement et de restructuration (EPFR).

Le recours à un établissement public « écran », outre le fait qu’il assurait, conformément à la loi de 1995, la surveillance du bon déroulement des opérations de défaisance « en veillant notamment à ce que soient respectés les intérêts financiers de l’État » sous le contrôle du Parlement représenté au sein du conseil d’administration, permettait essentiellement d’assortir les actifs compromis de la garantie implicite de l’État.

L’EPFR a pour sa part financé son prêt participatif en contractant auprès du Crédit Lyonnais lui-même un prêt de 145 milliards de francs (22,1 milliards d’euros) à échéance 2014, dont le taux était d’abord bonifié puis, compte tenu du poids financier pour la banque de cette bonification, aligné sur son coût de refinancement par le Crédit Lyonnais puis sur le taux du marché monétaire. Cette neutralisation du prêt, approuvée en septembre 1996 par la Commission européenne, est dans les faits équivalente à une aide d’État de 4 milliards de francs.

La couverture des échéances annuelles du prêt (de l’ordre de 1,5 milliard d’euros par an) devait être assurée, d’une part, par le produit des cessions réalisées par le CDR et, d’autre part, par des dotations en capital versées par l’État.

Le CDR ayant réalisé pour environ 9 milliards d’euros de cession d’actifs, le stock d’actif à liquider est aujourd’hui nul.

L’État a versé à l’EPFR, comme il a été décrit supra, 8,5 milliards d'euros. Votre Rapporteur spécial rappelle qu’il devrait lui apporter 3,9 milliards d'euros supplémentaires d’ici l’extinction en 2014 du prêt contracté par 1’EPFR. Il faut ajouter à ces sommes 1,3 milliard d’euros de dotations en capital accordées au Crédit Lyonnais en 1991, 1992 et 1994 et d’achats de titres du Crédit Lyonnais en 1996 pour obtenir une évaluation de l’effort financier assumé par l’État, qui devrait atteindre 13,7 milliards d'euros au total.

En contrepartie, l’État a retiré 7,2 milliards d'euros du produit des cessions de titre du Crédit Lyonnais réalisées en 1999 (5 milliards d’euros) et à l’automne 2002 (2,2 milliards d’euros).

Au total, l’effort financier net ainsi supporté par l’État au titre du redressement du Crédit Lyonnais peut être évalué à 6,5 milliards d’euros, bien que cette estimation ne tienne pas compte de la perte patrimoniale subie compte tenu de la très forte valorisation de la banque au début des années 1990.

– L’Entreprise minière et chimique (EMC), holding public actionnaire des mines de potasse d’Alsace (MDPA) notamment, engagée dans une politique de désendettement et de cession de ses actifs suite à l’arrêt de l’exploitation potassique en France en 2002, a pour sa part bénéficié de 919 millions d'euros de dotation en capital depuis 1986 dont 496 millions d'euros versés à partir de 2002. Une dotation de 370 millions d'euros a ainsi été versée en 2005 en préalable à la dissolution de l’EMC, intervenue le 1er janvier 2006. Par ailleurs, la dette de l’établissement, de 700 millions d'euros, a été reprise par l’État.

La gestion des participations de l’État a connu une véritable rupture en 2006, année durant laquelle les trois quarts des moyens tirés des cessions de titres et participations ont été consacrés au désendettement « actif » de l’État au moyen d’apports à la Caisse de la dette publique.

Une première dotation de 8 milliards d'euros a été versée le 12 mai 2006.

Une seconde dotation de l’ordre de 5,3 milliards d'euros devrait intervenir avant la fin de 2006, portant à 13,3 milliards d'euros le montant consacré au désendettement direct de l’État en 2006, soit 74,8% des recettes de privatisations encaissées. C’est ainsi l’intégralité du produit de la cession des participations détenues dans les sociétés autoroutières qui a été utilisé à alléger le fardeau de la dette. Les charges d’intérêt supportées par l’État en sont en effet réduites de 479 millions d'euros.

En 2007, il est prévu de consacrer 3,1 milliards d'euros supplémentaires (soit 62,0% des recettes du compte des participations financières) au désendettement de l’État, permettant de générer des économies annuelles de 122 millions d'euros sur le service de la dette.

Votre Rapporteur spécial s’est attaché, dans le rapport spécial qu’il a consacré à la mission Participations financières de l’État pour le projet de loi de finances pour 2006 (27), à dresser un bilan complet et dessiner des pistes de réformes envisageables concernant les régimes spéciaux de retraite des principales entreprises publiques. Les régimes constituent en effet une véritable « dette » des entreprises à l’égard de leurs salariés et dont l’ampleur obère la capacité de ces dernières à faire face à la concurrence.

LES ENJEUX FINANCIERS DES RÉGIMES DE RETRAITE DES PRINCIPALES ENTREPRISES PUBLIQUES

 

Évaluation des engagements actualisés

Contribution des entreprises en 2020
en pourcentage
de la masse salariale
en l’absence de réforme

Charge annuelle pour l’État en 2020 à système de financement inchangé

IEG (avant la réforme de 2004)

90 milliards d'euros

90% des salaires
(hors prime)

néant

La Poste

70 milliards d'euros

55% de la masse salariale en 2015

1,18 milliard d'euros

RATP

20,6 milliards d'euros

environ 15%

0,99 milliard d'euros

SNCF

100 milliards d'euros

environ 35%

2,26 milliards d'euros

Source : Rapport n° 2568, annexe 42, de votre Rapporteur spécial sur le projet de loi de finances pour 2006.

Le financement des régimes spéciaux pose, aux yeux de votre Rapporteur spécial, trois problèmes essentiels.

 Le premier problème, qui a donné une actualité particulière à la question des régimes spéciaux, est le montant énorme des engagements que les entreprises auraient été contraintes, en l’absence de réforme, de provisionner dans leurs comptes au titre de ces régimes.

Parmi les normes comptables internationales (dites normes « IFRS », anciennes « IAS » (28)), dont l’adoption par les sociétés faisant publiquement appel à l’épargne est prescrite par un règlement européen de 2002 (29), la norme IFRS n° 19, « Avantages du personnel », a en effet pour objet de s’assurer que les entreprises disposent des actifs nécessaires à la couverture de l’ensemble des engagements qu’elles prennent à l’égard de leurs salariés, en particulier les avantages spécifiques de retraite. Elle prescrit à cette fin l’obligation d’indiquer chaque année le montant des avantages accordés et impose un provisionnement intégral des charges qui en résultent.

Or, compte tenu du niveau des prestations servies par leurs régimes de retraite et de l’ampleur du déséquilibre démographique qui s’est creusé entre leurs cotisants et leurs pensionnés, les industries électriques et gazières (IEG), la RATP et la SNCF auraient pu être contraintes de provisionner (30) des montants considérables : 90 milliards d'euros pour les IEG dont 70 milliards d'euros à la charge d’EDF et 15 milliards d'euros à celle de GDF ; 21 milliards d'euros pour la RATP ; 70 milliards d'euros pour La Poste et même 100 milliards d'euros (31) pour la SNCF.

De tels engagements menaçaient jusqu’à la pérennité des entreprises dont les fonds propres ne dépassaient pas, fin 2004, 17,5 milliards d'euros pour EDF, 10,4 pour GDF, 2,2 pour La Poste, 0,9 pour la RATP et 3,2 pour la SNCF. À défaut du provisionnement de ces engagements ou de la réforme de leurs modalités de financement, les entreprises se seraient vues fermer l’accès aux marchés des capitaux.

Ces engagements ne sont pas une obligation purement comptable : ils reflètent le coût réel et inéluctable pour les entreprises de régimes coûteux et inéquitablement financés. Votre Rapporteur spécial a ainsi pu montrer, dans son rapport précité, qu’en l’absence de réforme les retraites auraient grevé jusqu’à 90% de la masse salariale des industries électriques et gazières, plus de 55% pour La Poste, 35% pour la SNCF et 15% pour la RATP (32), tandis que les charges de retraite se limitent en moyenne à 20% de la masse salariale des entreprises du secteur privé.

C’est dans cette mesure que les régimes spéciaux peuvent être considérés comme une « dette » des entreprises publiques à l’égard de leurs salariés et la résolution du problème de leur financement comme un « désendettement » décisif.

 Un deuxième problème est le coût considérable que représente pour l’État la participation au financement de ces régimes. L’État y consacre aujourd’hui 3,5 milliards d'euros, dont :

– 0,5 milliard d'euros au titre de la contribution versée par le Syndicat des transports d’Île-de-France (STIF) pour équilibrer le régime de la RATP après versement des cotisations employeur (fixées à 15,3% des salaires hors prime) et salariales ;

– 0,5 milliard d'euros au titre de la contribution versée à La Poste pour supporter la part de la dérive de la charge des pensions servies aux fonctionnaires postiers non imputable à l’inflation ;

– 2,5 milliards d'euros pour la SNCF correspondant à une contribution d’équilibre de son régime de retraite après versement des cotisations employeur (fixées à 28,44% des salaires hors prime) et salariales.

Compte tenu du creusement des déséquilibres démographiques des régimes (à l’exception de celui la SNCF qui a d’ores et déjà atteint un étiage démographique (33)), ces contributions publiques pourraient représenter en 2020, sans réforme, 4,5 milliards d'euros constants.

● Enfin, un dernier problème, fondamental, réside dans l’inéquité entre les différentes catégories de salariés. Votre Rapporteur spécial a, en effet, clairement montré que les bénéficiaires des régimes spéciaux bénéficient :

– d’un taux de cotisation plus faible, 7,85% du salaire hors prime contre 12% d’une même assiette pour les salariés du privé ;

– d’une durée de cotisation plus courte, en moyenne moins de 35 années ;

– d’un âge de départ à la retraite plus précoce, en moyenne, à 54 ans et quelques mois, de 2 (dans le cas des industries électriques et gazières) à 3 ans inférieur à celui des fonctionnaires de l’État ;

– d’un taux de remplacement plus favorable : entre 65 et 70% du dernier salaire contre 55/60% ou 45/50% pour les fonctionnaires et les salariés du privé cotisants pendant une même durée.

ÂGE MOYEN DE DÉPART À LA RETRAITE ET DE LIQUIDATION DES PENSIONS

Régime général

Cessation d’activité : 57 ans et 6 mois
Liquidation des droits : 61 ans et 9 mois

Fonctionnaires civils de l’État

57 ans et 2 mois

IEG

55 ans et 5 mois

La Poste (population des fonctionnaires)

57 ans et 2 mois

RATP

54 ans et 3 mois

SNCF

Cessation d’activité : 54 ans et 4 mois
Liquidation des droits : 55 ans et 1 mois

Source : Rapport n° 2568, annexe 42, de votre Rapporteur spécial sur le projet de loi de finances pour 2006.

TAUX DE REMPLACEMENT MOYENS (SUR SALAIRE COMPLET, Y COMPRIS PRIMES)
POUR UNE DURÉE DE COTISATION COMPARABLE
(a)

(en pourcentage du dernier salaire)

Régime général (CNAV et ARRCO/AGIRC) : pour 35 années de cotisations, à partir de 2008


avant la réforme de 1993

après les réformes de 1993/2003

Salarié jamais cadre à rémunération intermédiaire

Salarié devenu cadre au bout de 10 ans de carrière

63,2

49,6

56,0

44,1

Fonctionnaires civils de l’État : pour 35 années de cotisations, à partir de 2008


avant la réforme de 2003

après la réforme de 2003

personnel de service de catégorie C

professeur certifié

cadre administratif ou technique

73,0

71,9

68,0

61,8

59,7

54,3

IEG

65,6 (agent de maîtrise) à 66,4 (agent d’exécution)

RATP

70,5

SNCF

67,9

(a) Pour le régime général et les fonctionnaires civils, étude par cas type de la génération 1948 in Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), Études et Résultats, n° 331, août 2004.

Source : Rapport n° 2568, annexe 42, de votre Rapporteur spécial sur le projet de loi de finances pour 2006.

Il importe cependant de souligner que le cas de La Poste est d’une nature différente de celui des autres entreprises : il ne s’agit pas d’un régime spécial puisque les agents relèvent pour les salariés du régime général, et pour les fonctionnaires du régime des pensions civiles et militaires de l’État. La particularité de La Poste réside dans l’arrêt du recrutement des fonctionnaires, complet depuis 2002, et leur remplacement progressif par des salariés sous contrat privé. Or, l’entreprise doit depuis 1990 assurer elle-même le financement des pensions de ses fonctionnaires (bien que l’État intervienne, depuis 1998, pour stabiliser leur poids en volume) alors même que le montant total de ses cotisations versées par les fonctionnaires s’effondre au rythme de l’extinction du corps.

Comme il a été vu supra, le problème auquel est confrontée La Poste est de nature purement transitoire. Il lui faut gérer la période d’extinction progressive du groupe des fonctionnaires postaux, c'est-à-dire assurer le financement de pensions versées à des retraités de plus en plus nombreux au moment où les cotisants fonctionnaires sont de plus en plus rares et alors même que les contractuels versent par ailleurs d’abondantes cotisations de droit commun sans réelle contrepartie à ce jour en terme de retraites (34).

Après que l’adossement aux régimes de droit commun de la sécurité sociale a été longtemps envisagé (35), le choix a finalement été fait de s’inspirer de la solution appliquée à France Télécom en 1996, exposée à la même contrainte que celle que subit La Poste aujourd’hui : financer intégralement les pensions de ses agents fonctionnaires au moment où l’entreprise remplace ses fonctionnaires par des salariés de droit privé.

L’objet de la réforme alors mise en œuvre avait été de ramener les cotisations de retraites et les autres charges sociales payées par France Télécom à un niveau comparable à celui supporté par les autres opérateurs de télécommunications présents en France sans pour autant modifier les caractéristiques des retraites de ses fonctionnaires.

À cette fin, la charge du financement des retraites a alors été transférée à l’État (36).

En contrepartie, d’une part, France Télécom verse à l’État depuis le 1er janvier 1997 une contribution « libératoire » mensuelle, égale à un certain pourcentage du montant total du traitement de base versé aux agents fonctionnaires fixé chaque année afin d’égaliser le niveau général des charges sociales entre France Télécom et les opérateurs privés de télécommunications opérant en France (entre 37 et 38% depuis 2000).

Par ailleurs, pour compenser l’effort financier assumé par l’État en raison de la démographie défavorable des agents fonctionnaires, France Télécom lui a versé en 1997 une contribution forfaitaire exceptionnelle (« soulte ») de 5,7 milliards d'euros (37).

Le Parlement serait prochainement saisi d’une proposition de disposition législative organisant pour La Poste une solution comparable axée sur la prise en charge par l’État du financement des retraites des seuls fonctionnaires qui relèvent du code des pensions civiles et militaires de l’État, en contrepartie du versement par l’opérateur à l’État :

– de cotisations libératoires « d’équité concurrentielle » ramenées progressivement vers le niveau des charges équivalentes supportées par les principaux concurrents de La Poste selon des modalités qui devraient être bientôt précisées ;

– d’une « soulte » de compensation du déséquilibre démographique dont le montant est estimé à 2 milliards d'euros.

Ce projet de réforme fait naturellement l’objet d’un examen de la Commission européenne qui veille à ce qu’il ne confère pas à La Poste un avantage concurrentiel injustifié et ne compromette pas l’ouverture du marché postal.

 Une autre voie a été explorée pour assurer la pérennité financière du régime spécial des industries électriques et gazières (IEG) : celle de l’adossement, non à l’État, mais aux régimes de droit commun de l’assurance vieillesse.

La loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières a en effet profondément réformé les modalités de financement du régime de retraite des IEG, selon les règles suivantes.

La partie des droits de retraite des salariés du régime spécial équivalente aux prestations servies par le régime général et les régimes complémentaires obligatoires (« droits de base ») a été transférée à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) et aux régimes complémentaires AGIRC et ARRCO, moyennant le versement, par les entreprises et les salariés, des cotisations de droit commun (respectivement 24% et 12% des rémunérations principales). C’est ce qu’on appelle « l’adossement » au régime général du secteur privé, qui permet aux entreprises de mutualiser leur régime et d’acquitter des cotisations équivalentes à celles versées par les autres entreprises.

Cependant, sans contrepartie, cet adossement aurait dégradé les comptes des régimes de base, le régime spécial accusant un rapport démographique entre les cotisants et les retraités bien moins favorable que celui du secteur privé dans son ensemble (38).

Afin de compenser cette charge, la CNAV et l’AGIRC et l’ARRCO ont bénéficié de « soultes » (39) de respectivement 7,7 milliards d'euros et 0,8 milliard d'euros pour l’AGIRC et l’ARRCO. De ces soultes, 3,6 milliards d'euros ont été versés en 2005 par les entreprises et le reste est financé par une fraction du produit d’une nouvelle taxe, la contribution tarifaire d’acheminement (CTA), assise sur les tarifs de l’électricité et du gaz et par conséquent acquittée par les consommateurs (280 millions d'euros de son produit chaque année pendant 20 ans étant consacrés au financement de cette partie des soultes).

La charge des avantages propres au régime spécial (« droits spécifiques ») a quant à elle été partagée entre la collectivité et les entreprises.

Les droits spécifiques passés, c'est-à-dire acquis jusqu’au 31 décembre 2004, ont été essentiellement mis à la charge des consommateurs d’énergie, via la contribution sur les tarifs de l’énergie précitée (pour 700 millions d'euros par an). Seuls les droits acquis jusqu’à cette date par les agents relevant des activités ouvertes à la concurrence ont dû être provisionnés par les entreprises. EDF et GDF ont ainsi constaté dans leur compte 2004 des engagements de respectivement 13,4 milliards et 1,2 milliard d'euros.

Les droits spécifiques futurs sont en revanche à la charge exclusive des entreprises, ainsi rendues responsables du coût des avantages particuliers de retraite qu’elles accordent, ce qui devrait constituer une puissance incitation à rapprocher les caractéristiques des régimes spéciaux de celles des régimes de droit commun.

 Une réforme d’inspiration voisine est en cours de mise en œuvre pour la RATP.

À la différence des IEG, ce n’est pas l’entreprise, mais l’État qui supporte depuis 1959 l’essentiel du coût des retraites des agents tandis que la cotisation de l’entreprise est limitée à un peu plus de 15% du salaire hors prime. Les décrets nos 2005-1635 à 2005-1639 du 27 février 2005 ont créé une caisse de retraite autonome, la Caisse de retraite du personnel de la RATP, organisme de sécurité sociale chargé d’assurer le versement direct de la totalité des pensions aux agents retraités.

Cette Caisse devrait à brève échéance être adossée aux régimes de droit commun, libérant la RATP de l’obligation de provisionner les engagements de retraite correspondant aux prestations de droit commun en contrepartie de l’acquittement, à l’avenir, de contributions patronales et salariales de droit commun (soit 18% pour l’employeur et 12% pour les salariés).

Cette solution impliquerait cependant le versement de soultes compensant une démographie très défavorable en contrepartie de l’adossement financier des « droits de base » à la CNAV, d’une part, et à l’ARRCO et l’AGIRC, d’autre part.

Ces soultes seraient à la charge de l’État qui assume directement, comme il a été vu, l’équilibre financier du régime depuis la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales précitée, et non à celle de la RATP, laquelle est d’ailleurs incapable d’en supporter le coût, l’entreprise ne maîtrisant pas, il faut le rappeler, les tarifs finaux de ses prestations et répercutant par conséquent intégralement ses charges sur le STIF.

Le montant des soultes qui seraient versées à la CNAV et aux régimes complémentaires fait actuellement l’objet de négociations qui portent notamment sur l’étendue de la couverture des droits par les régimes de base. Les estimations varient, selon les hypothèses retenues, entre 507 et 870 millions d'euros.

Elles seraient intégralement financées par l’État, à partir du compte des participations financières qui prévoit à ce titre une dotation dont le montant n’est cependant pas précisé.

S’agissant de la couverture des « droits spécifiques », qui constituent une part décisive des engagements de retraite en raison de la générosité du régime, votre Rapporteur spécial avait identifié trois exigences à respecter : trouver des modalités de financement « compatibles avec la survie de l’entreprise (ce qui implique incontestablement que l’État joue un rôle central dans le dispositif) » ; « respecter les règles européennes de la concurrence » mais aussi et surtout parvenir à « responsabiliser l’entreprise (ce qui rend nécessaire de laisser à sa charge une partie du coût du régime) ».

À cette occasion, votre Rapporteur spécial avait proposé que l’intervention de l’État, « inéluctable pour couvrir en particulier les droits spécifiques accordés jusqu’à la réforme », soit « limitée à la prise en charge du financement des retraites d’un groupe « fermé » de bénéficiaires (par exemple 40.000 à 45.000), tandis que la RATP devrait supporter le coût des prestations fournies aux retraités au-delà de ce nombre ».

C’est avec satisfaction qu’il constate que cette solution a été retenue par l’État, qui a décidé de prendre en charge l’ensemble des droits spécifiques acquis à cette date et les droits spécifiques futurs dans la limite d’un plafond de 45.000 emplois statutaires.

 Les réflexions relatives au régime spécial de la SNCF sont moins avancées. Il faut en effet remarquer que le règlement des Communautés européennes n° 1192/69 du Conseil du 26 juin 1969 relatif aux règles communes pour la normalisation des comptes des entreprises de chemin de fer, qui a harmonisé les conditions de concurrence des différents modes de transport de manière à ne pas faire supporter aux réseaux de chemin de fer européens la dérive des charges de protection sociale attribuable à leur déséquilibre démographique, limite les incertitudes liées à la nature des engagements de retraite à provisionner selon les normes internationales.

Le système de financement des retraites des cheminots est aujourd’hui clairement balisé (40) :

– l’entreprise finance, par une cotisation patronale dont le taux (41) est fixé par décret, le coût réel que supporterait une entreprise offrant à ses salariés des prestations équivalentes à celles servies par le régime spécial de la SNCF et dont la démographie serait la même que celle du secteur privé ; en outre, elle supporte le coût des avantages supplémentaires de retraite accordés depuis la fixation de sa cotisation patronale ;

– l’incidence du déséquilibre démographique propre à la SNCF (42) est supportée par l’État, qui verse une subvention d’équilibre de 2,5 milliards d'euros par an.

Aux yeux de votre Rapporteur spécial, l’adossement au régime général sans remise en cause des avantages spécifiques présenterait plus d’inconvénients que d’avantages. Il nécessiterait le versement d’une soulte considérable, conduirait à une négociation insoluble sur le partage des charges générées par les droits spécifiques et le coût qui en résulterait pour l’entreprise risquerait de lui être insupportable au moment où se profile l’ouverture du marché.

La voie de l’adossement financier des régimes spéciaux aux régimes de retraite de droit commun du secteur privé, parcourue pour les IEG et la RATP, a indéniablement permis de répondre à l’urgence : éviter de provisionner, à raison de l’application des normes comptables internationales en 2005 et 2008, des engagements de retraite incompatibles avec la compétitivité voire la survie des entreprises. La prise en charge par l’État des retraites des fonctionnaires postaux en échange de cotisations libératoires a joué un rôle similaire.

Votre Rapporteur spécial remarque cependant que le passage aux normes comptables IFRS aurait dû aussi être l’occasion pour les partenaires économiques de s’assurer de la compatibilité des charges très élevées afférentes aux régimes spéciaux avec la capacité financière des entreprises publiques de l’État.

Il n’en a malheureusement rien été, un consensus s’étant établi entre l’État, les entreprises et les syndicats pour chercher le moyen le moins douloureux de partager cette charge entre les différents partenaires, y compris les caisses de retraites, sans toucher aux avantages des salariés.

Pour autant, le réexamen approfondi des régimes spéciaux, dont votre Rapporteur spécial a souligné qu’ils « apparaissent aujourd’hui comme moralement injustes et financièrement prohibitifs », est inéluctable.

• Même libérées de l’obligation de constater des provisions exorbitantes, soulagées d’une partie du coût du régime et « rapprochées », pour les cotisations patronales et salariales, du droit commun applicable aux entreprises privées, les IEG continuent à supporter une charge très lourde au titre des avantages de retraite qu’elles accordent à leurs agents. EDF et GDF, après avoir dû réduire leurs fonds propres ou leurs actifs (43) de respectivement 16,7 et 1,8 milliard d'euros, devront financer chaque année le coût des avantages particuliers accordés à leurs salariés (« droits spécifiques »). Cela représente des charges annuelles de 520 et 120 millions d'euros, soit environ 5% des charges de personnel, très significativement plus lourdes que celles que supportent les grandes sociétés françaises et européennes au titre des avantages particuliers de retraite accordés à leurs salariés.

De même les avantages particuliers du régime spécial de la SNCF, hors incidence de la démographie, restent à la charge de l’entreprise et constituent un surcoût que votre Rapporteur spécial a évalué à environ 7 à 8% des salaires par rapport aux cotisations de droit commun, soit 480 millions d'euros par an, et, là encore, 5% des charges de personnel, qui pèsent chaque année sur les comptes de l’entreprise.

• En outre, et surtout, l’absence totale d’évolution des caractéristiques des régimes spéciaux de retraite, en particulier l’âge de départ à la retraite et le taux de remplacement élevé qui lui est associé, au moment où les réformes de 1993 et 2003 ont exigé des salariés du secteur privé et des fonctionnaires un réel effort d’adaptation aux contraintes de la démographie, va clairement à l’encontre de l’équité qui doit prévaloir entre tous les travailleurs de notre pays.

Cela est d’autant plus inacceptable que la collectivité nationale est déjà sollicitée pour participer à la couverture du coût de ces régimes, que ce soit directement, via des subventions versées par l’État à la SNCF ou à la RATP, ou indirectement, lorsque les tarifs de services faiblement ouverts à la concurrence incorporent le coût du financement de tout (c’est le cas à la SNCF) ou de partie (pour les IEG, à travers une partie de la contribution tarifaire d’acheminement ou à raison de la couverture des droits spécifiques nouveaux accordés chaque année) des avantages spécifiques accordés aux retraités des régimes spéciaux.

• Votre Rapporteur spécial avait même montré (44) l’an dernier que les particularités des régimes spéciaux ne sont pas toutes à l’avantage de leurs bénéficiaires, calculant que l’allongement de la durée des carrières vers les niveaux constatés dans le secteur privé augmenterait les montants moyens de leurs pensions de 19%, 21% et 24% pour les retraités de la RATP, des IEG et de la SNCF, soit respectivement, en moyenne, 355, 442 et 364 euros supplémentaires par mois.

Ici réside indéniablement l’un des enjeux décisifs auxquels seront confrontés les gestionnaires de l’État actionnaire à compter du printemps 2007.

CHAPITRE SECOND : LA MISSION AVANCES À DIVERS SERVICES DE L’ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS

• Le compte d’avances – mission Avances à divers services de l’État ou organisme gérant des services publics a été scindé, conformément à la décision du Conseil constitutionnel 2005-530 DC du 29 décembre 2005 relative à la loi de finances pour 2006 citée supra, en trois programmes distinguant clairement les bénéficiaires des avances concernées.

– Le programme n° 821 regroupe les Avances à l’Agence unique de paiement au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune. Afin d’assurer le financement des dépenses agricoles communautaires, il est en effet nécessaire de recourir à un préfinancement des aides FEOGA compte tenu des délais de remboursement de ce dernier, les paiements européens intervenant le troisième jour ouvré du deuxième mois qui suit le paiement effectif des aides. Les fonds nécessaires au préfinancement sont versés à partir du compte de concours financiers sur le compte à l’ACCT de l’Agence unique de paiement (AUP) créée par le VII de l’article 95 de la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d’orientation agricole afin d'assurer la gestion d'aides publiques communautaires ou nationales en faveur du secteur agricole. L’Agence se substituera au 31 décembre 2006 à l’ACOFA. Cette avance porte intérêts et doit être remboursée en totalité au plus tard à la clôture de chaque exercice.

– Le programme n° 823 concerne les Avances à divers organismes gérants des services publics et le programme n° 824 les Avances à des services de l’État. Ces deux types d’avances ont pour vocation exclusive de répondre à des situations d’urgence, qu’il s’agisse d’assurer la continuité de l’action publique ou de mettre en œuvre de façon accélérée une mesure d’intérêt général particulière ; elles peuvent également autoriser la couverture provisoire d’un besoin de financement qu’une ressource durable viendra ultérieurement assurer. En tout état de cause, le financement par avances ne peut constituer qu’un relais financier temporaire dans l’attente du retour à l’équilibre financier du service public qui en bénéficie. En vertu de l’article 52 de la loi de finances initiale pour 1980 (n° 1980-30 du 18 janvier 1980), les organismes susceptibles de bénéficier des avances du programme n° 823 sont les établissements publics nationaux, les services concédés ou nationalisés, les sociétés d’économie mixte et les organismes à caractère social.

Il importe par ailleurs de remarquer que le programme n° 824 est doté d’une action n° 1 spécifique et nouvelle dénommée Avances au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », le Gouvernement ayant décidé en 2005 de substituer au financement résiduel du budget annexe par emprunt bancaire (45) un financement par avances de l’État, permettant de bénéficier du taux moyen de la dette négociable de l’État qui est très inférieur aux taux bancaires de même maturité.

• Les objectifs et indicateurs retenus pour le programme rendent compte du niveau de recours aux avances et de la conformité du processus de mise en œuvre aux règles d'emploi établies pour recourir aux avances.

En revanche, ils ne décrivent pas la qualité de la gestion des avances du Trésor par la direction générale du Trésor et de la politique économique. Le responsable du programme ne dispose pas, en effet, de moyens pour imposer à un organisme bénéficiaire le remboursement d'une avance : il n’existe pas d’instrument juridique permettant de contraindre un organisme bénéficiaire au paiement.

Le choix de ces objectifs répond à l’objectif stratégique de conserver aux avances leur nature spécifique d’opérations encadrées dans le temps. En effet, l'expérience montre que les avances consenties n’ont pas toujours fait l'objet d’un remboursement complet, dans des délais précisément définis et sans coût pour l’État. Dans ces circonstances, les avances s’apparentent à des subventions ou à des prêts couvrant un besoin de financement durable.

Il est ainsi apparu essentiel d'encadrer la mobilisation des avances du Trésor par des règles d'emploi précises, sans toutefois remettre en cause la pertinence de ce mécanisme qui permet à l’État de mobiliser des ressources financières afin de répondre à un besoin de trésorerie ponctuel et immédiat en vue d'assurer la continuité de l'action publique ou de mettre en œuvre des mesures urgentes.

Selon le ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie, le recours à une avance du Trésor est désormais conditionné :

« – au caractère certain de la ressource financière permettant le remboursement de l’avance qu’il s’agisse de son montant comme de la possibilité juridique et technique de la mobiliser ;

– à la neutralité financière pour l’État de l’avance, celle-ci étant assurée par la facturation d’intérêt sur la base au moins du coût des emprunts à court terme de l’État ;

– à l'information de l’Agence France Trésor sur l’agenda complet de l’opération compte tenu de l’impact pour la trésorerie de l’État du déboursement comme du retour des fonds ».

Identique pour les trois programmes, l’objectif opérationnel retenu, qui se place ainsi du point de vue du contribuable, est d’assurer le respect des conditions de financement et de durée des avances du Trésor.

La mise en œuvre de l'objectif énoncé est analysée à travers deux indicateurs spécifiques :

– le premier indicateur porte sur la neutralité financière pour l'État des avances au moyen de l’application d'un taux d'intérêt pour l'avance, au moins égal au coût de la dette d'État de maturité équivalente ; aucune avance mise en œuvre depuis 2003 n’ayant dérogé à cette règle, l'objectif est de maintenir cet indicateur à zéro en 2006 et en 2007 ;

– le second indicateur évalue le respect des limites en durée des avances du Trésor en mettant en évidence le nombre d’avances qui ont donné lieu, au cours de l’exercice, à renouvellement et celui d’avances qui ont été consolidées en prêt (c'est-à-dire d’une durée supérieure à un an). Une seule avance a donné lieu à renouvellement en 2004 contre deux en 2005 et une en 2006, tandis que deux avances ont en 2006 donné lieu au cours de l’année à rééchelonnement. L’objectif pour 2007 est de respecter strictement les règles de durée.

• En 2006, cinq avances ont été accordées à l’ACOFA aux fins d’assurer le préfinancement national des aides européennes du FEOGA-garantie, pour 4,5 milliards d'euros.

Parallèlement, six avances de 33 millions d'euros au total, dont 16 millions d'euros non encore remboursés sur l’exercice 2006, ont été renouvelées et/ou accordées à l’Office de développement de l’économie agricole des départements d’outre-mer (ODEADOM) dont le stock d’avances non remboursées atteint 18 millions d'euros. Une avance de 22 millions d'euros a été consentie au profit du Centre national pour l’aménagement des structures d’exploitations agricoles (CNASEA) et n’était pas remboursée au 10 octobre 2006.

Une avance de 111 millions d'euros a été accordée le 14 février 2006 au budget annexe Contrôle et exploitation aériens (BACEA) tandis qu’une avance de 2,5 millions d'euros a été consentie le 24 mai 2006 pour permettre la mise en place de l’Établissement public de sécurité ferroviaire.

Le stock d’avances non remboursées au 5 août 2006 atteignait pour sa part 307 millions d'euros, dont 191 millions d'euros au titre des avances accordées au BACEA et 50 millions d'euros dus par l’Office national interprofessionnel des produits de la mer et de l'aquaculture (OFIMER).

• Bien que la difficulté d’anticiper correctement le niveau et le type des avances ait conduit ces dernières années à ne pas évaluer les dépenses du compte en loi de finances initiale, la loi organique relative aux lois de finances impose que le compte soit doté de crédits limitatifs.

Afin de permettre le recours, souvent dans l’urgence et la nécessité, aux avances du compte, le Gouvernement propose de retenir pour 2007 :

– une ouverture de crédit extrêmement haute de 14 milliards d'euros pour le programme n° 821 Avances à l’Agence unique de paiement au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune (soit plus du double des avances traditionnellement accordées) ;

– une ouverture de 50 millions d'euros de crédits pour le programme n° 823 Avances à divers organismes gérants des services publics ;

– et une ouverture de 103,7 millions d'euros de crédits pour le programme n° 824 les Avances à des services de l’État, exclusivement consacrés au financement de l’action n° 1 Avances au budget annexe « Contrôle et exploitation aérienne » (46).

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur (voir compte rendu analytique officiel de la réunion du 2 novembre 2006) lors de la réunion de la commission élargie, votre commission des Finances a examiné les crédits du compte Participations financières de l’État et du compte Avances à divers services de l’État.

Elle a examiné un amendement de M. Jean-Pierre Balligand tendant à créer un nouveau programme intitulé Abondement au fonds de réserve pour les retraites et à le doter de 1 milliard d'euros en réduisant d’un même montant les crédits du programme Désendettement de l’État et des établissements publics de l’État.

Usant de la faculté que l’article 38 du Règlement de l’Assemblée nationale confère aux députés d’assister aux réunions des commissions dont ils ne sont pas membres, M. François Brottes a jugé utile de permettre au Parlement de se prononcer plus en détail sur la répartition des crédits, certes évaluatifs, du compte des participations financières de l’État. À cette fin, il serait opportun de créer un programme spécifique dédié au Fonds de réserve pour les retraites (FRR) créé par le Gouvernement de Lionel Jospin, afin de préparer le choc démographique sur les retraites, et de le doter d’une somme significative, aucun versement n’étant intervenu depuis 2003.

Le Président Pierre Méhaignerie a observé que cet amendement prévoit une nouvelle catégorie de dépenses du compte pour 2007, car il crée un programme au sein du compte d’affectation spéciale. Toutefois, il respecte parfaitement le dispositif de la LOLF, puisqu’il reste dans le montant prévu des crédits de la mission. Conformément à l’article 47 de la LOLF, cet amendement est donc recevable, même s’il élargit le champ d’action du compte. Au surplus, cette extension est conforme au texte qui a créé le compte, c’est-à-dire l’article 48 de la loi de finances pour 2006.

Après que votre Rapporteur spécial a remarqué que la possibilité de tels versements est expressément prévue, sans qu’il soit utile de les isoler du programme Désendettement de l’État et des établissements publics de l’État dans lequel ils sont compris, la finalité étant la même, qu’il s’agisse de désendetter l’État aujourd’hui ou d’éviter son endettement demain en provisionnant à cet effet des dotations au FRR, la Commission a rejeté l’amendement.

Sur la proposition de votre Rapporteur spécial, la Commission a ensuite adopté les crédits de compte spécial « Participations financières de l’État » et vous demande, en conséquence, d’émettre un vote favorable à leur adoption.

Après l’article 40

La Commission a examiné un amendement de M. Jean-Pierre Balligand tendant à intégrer au rapport relatif à l’État actionnaire prévu à l’article 142 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, un projet annuel et un rapport annuel de performances établies par l’Agence des participations de l’État (APE).

Après que votre Rapporteur spécial a remarqué que les performances de l’APE sont précisément mesurées par le projet annuel de performances de la mission Participations financières de l’État, joint en annexe au projet de loi de finances, la Commission a rejeté l’amendement.

Sur la proposition de votre Rapporteur spécial, la Commission a adopté les crédits du compte spécial Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics et vous demande, en conséquence, d’émettre un vote favorable à leur adoption.

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article 36

État D

Mission « Participations financières de l’État »

Amendement présenté par MM. Jean-Pierre Balligand, Augustin Bonrepaux, Didier Migaud, Henri Emmanuelli, Jean-Louis Idiart, Jean-Claude Viollet, Jean-Louis Dumont, Thierry Carcenac, Pascal Terrasse, Alain Claeys, Paul Giacobbi, Pierre Bourguignon, Gérard Bapt, Tony Dreyfus, Eric Besson et les autres commissaires membres du groupe socialiste :

I.– Créer le programme : Abondement du Fonds de réserve pour les retraites.

II.– En conséquence, modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :

(en euros)

Programmes

+

-

Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

0

0

Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

0

1.000.000.000

Abondement du fonds de réserve pour les retraites

1.000.000.000

 

TOTAUX

1.000.000.000

1.000.000.000

SOLDE

0

Après l’article 50

Participations financières de l’État

Amendement présenté par MM. Jean-Pierre Balligand, Augustin Bonrepaux, Didier Migaud, Henri Emmanuelli, Jean-Louis Idiart, Jean-Louis Dumont, Thierry Carcenac, Pascal Terrasse, Alain Claeys, Paul Giacobbi, Pierre Bourguignon, Gérard Bapt, Tony Dreyfus, Eric Besson et les autres commissaires membres du groupe socialiste :

Insérer l’article suivant :

I.– Le 4° du I de l'article 142 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques est ainsi rédigé :

« 4° Dresse le bilan par l'État de sa mission d'actionnaire ou de tuteur des entreprises publiques. Ce bilan contient le rapport d'activité du service des participations de la direction du Trésor. A cette fin, il contient notamment le projet annuel de performance et le rapport annuel de performance de l'Agence des Participations de l'État. Il comprend également des éléments concernant la stratégie commerciale et industrielle et la politique de l'emploi des entreprises publiques. »

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