N° 303 - Proposition de loi de M. Lionnel Luca




N° 303
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 15 octobre 2002.
PROPOSITION DE LOI

visant à rendre l'hommage de la Nation au rôle des harkis dans l'armée française pour la défense des valeurs de la République et pour les drames qu'ils ont connus après le 19 mars 1962.

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)
PRÉSENTÉE
par M. Lionnel LUCA,

Additions de signatures :
MM. Manuel Aeschlimann, Jean-Paul Anciaux, René André, Jean Auclair, Patrick Baudouin, Jean-Claude Beaulieu, Jacques-Alain Bénisti, Jean-Louis Bernard, Marc Bernier, André Berthol, Jean Besson, Marcel Bonnot, Mme Christine Boutin, MM. Loïc Bouvard, Ghislain Bray, Bernard Brochand, Dominique Caillaud, Bernard Carayon, Jean-Marc Chavanne, Louis Cosyns, Alain Cousin, Jean-Yves Cousin, Charles Cova, Marc- Philippe Daubresse, Jean-Pierre Decool, Lucien Degauchy, Richard Dell’Agnola, Patrick Delnatte, Bernard Depierre, Léonce Deprez, Jean-Jacques Descamps, Jacques Domergue, Jean-Pierre Door, Dominique Dord, Philippe Dubourg, Christian Estrosi, Georges Fenech, Mmes Arlette Franco, Cécile Gallez, MM. Guy Geoffroy, Jean-Marie Geveaux, Franck  Gilard, Bruno Gilles, Georges Ginesta, Jean-Pierre Giran, Claude Girard, Maurice Giro, Claude Goasguen, Jean-Pierre Gorges, Jean-Pierre Grand, François Grosdidier, Jean-Claude Guibal, Louis Guédon, François Guillaume, Gérard Hamel, Pierre Hellier, Édouard Jacque, Christian Jeanjean, Mme Maryse Joissains-Masini, MM. Patrick Labaune, Yvan Lachaud, Jean-Pierre Le Ridant, Michel Lejeune, Céleste Lett, Richard Mallié, Mme Muriel Marland- Militello, MM. Alain Marsaud, Jean Marsaudon, Philippe-Armand Martin, Alain Marty, Jean-Claude Mathis, Christian Ménard, Alain Merly, Gilbert Meyer, Jean- Marie Morisset, Jean-Pierre Nicolas, Hervé Novelli, Dominique Paillé, Bernard Perrut, Mme Josette Pons, MM. Christophe Priou, Michel Raison, Jean-Luc Reitzer, Jacques Remiller, Mme Juliana Rimane, MM. Jérôme Rivière, Jean Roatta, Jean-Marc Roubaud, Max Roustan, Daniel Spagnou, Alain Suguenot, Mme Michèle Tabarot, MM. Michel Terrot, André Thien Ah Koon, Jean Tiberi, Léon Vachet, François Vannson, Jean-Sébastien Vialatte, Philippe Vitel et Michel Voisin
MM. Marc Laffineur et Thierry Mariani
MM. Jean-Yves Besselat, Jean-Michel Ferrand, Arnaud Lepercq, Eric Raoult, Bernard Schreiner
et Guy Teissier
Mme Martine Aurillac, MM. Pierre Cardo, Roland Chassain, Georges Colombier, Louis Giscard d’Estaing, François Goulard, Christian Kert
et Dominique Tian                   


Députés.

Rapatriés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Dans l'histoire de la France, l'action des soldats issus de nos territoires des anciennes colonies a été une contribution importante à la défense des valeurs de la République.
Ce fut le cas, tout particulièrement, des Français d'Algérie d'origine arabo-berbères enrôlés, dès la guerre franco-prussienne de 1870, dans l'armée française, puis lors des deux guerres mondiales, des guerres d'Indochine et d'Algérie. Ainsi, on ne peut oublier leur rôle déterminant dans l'ouverture de la route sur Rome, par la prise du Monte Cassino sous les ordres du général Juin, leur participation au débarquement de Provence en août 1944 et à la libération des grandes villes du sud de la France.
Lors de la guerre d'Algérie, les supplétifs musulmans ont payé très cher leur fidélité au drapeau qu'ils avaient toujours servi : arrestations, exécutions, massacres, représailles et exactions sur leurs familles, emprisonnement, exil vers la métropole, mise à l'écart durable, misère pour certains...
Les mesures prises en juillet 1987 par le gouvernement dirigé par Jacques Chirac, puis en juin 1994, par Edouard Balladur, ont amélioré et ont amorcé, sans résoudre totalement les problèmes d'intégration économique et sociale, la réparation des préjudices subis.
Les propos insultants et déplacés du Président de la République algérienne, lors de son séjour en France en juin 2000, les assimilants à des «collabos», et donc l'armée française à l'occupant nazi sur notre territoire national, ont choqué beaucoup de nos compatriotes. Cela avait souligné, s'il était besoin, la nécessité pour la France de rendre enfin un hommage solennel et national à ces combattants dont la fidélité et le dévouement furent exemplaires ; engagement qui fut le prétexte du massacre de plus de 100 000 d'entre eux, en Algérie après le cessez-le-feu du 19 mars 1962.
Leur sacrifice méritait un signe fort de reconnaissance de la Nation. Ce fut fait en 2001 par le Président de la République Jacques Chirac, lors de la première journée d'hommage national aux harkis, en dévoilant dans la galerie d'honneur des Invalides une plaque rappelant leurs sacrifices, en décorant dans ce haut lieu de mémoire militaire une centaine d'anciens combattants et quelques membres de leur famille, en décidant d'apposer cette même plaque dans une trentaine de lieux symboliques ou monuments aux morts à travers toute la France et en prononçant ce même jour, au palais de l'Elysée, lors d'une réception donnée en leur honneur, un discours historique rappelant le devoir moral, la dette d'honneur et la reconnaissance de la Nation envers eux.
« Les massacres commis en 1962 laisseront pour toujours l'empreinte irréparable de la barbarie. Ils doivent être reconnus. La France, en quittant le sol algérien, n'a pas pu les empêcher. Elle n'a pas pu sauver ses enfants », a-t-il déclaré dans ce même discours à l'Elysée.
Cet hommage national, très émouvant pour cette communauté au destin tragique, a marqué, quarante ans après les épreuves subies à la fin de la guerre d'Algérie, une étape essentielle dans le devoir de vérité et de reconnaissance.
Cette journée d'hommage national a été reconduite le 25 septembre 2002. A cette occasion, le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, a honoré à nouveau, aux Invalides, la mémoire de « ceux qui ont servi sans faillir, souvent jusqu'au sacrifice suprême, harkis, moghaznis, tirailleurs, spahis, membres des groupes de sécurité, d'autodéfense et des sections administratives spécialisées »... « leur place dans notre mémoire nationale au sein des armées qui ont illustré notre drapeau. Il était temps de leur rendre leur histoire, partie intégrante de notre histoire nationale ».
Les harkis ont mérité la reconnaissance de la Nation.
Telle est l'objet de la présente loi.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

La France exprime sa gratitude indéfectible envers ses enfants meurtris par l'Histoire, et rend l'hommage de la Nation, à la fidélité, au courage et au dévouement des harkis et anciens membres des formations supplétives, enrôlés dans l'armée française pour la défense de son territoire, et leur témoigne sa reconnaissance pour tous leurs sacrifices.
La journée d'hommage aux harkis sera officiellement célébrée le 25 septembre de chaque année.

Article 2

La France reconnaît la barbarie et l'ampleur des massacres commis après le 19 mars 1962 à l'égard des militaires comme des civils engagés à nos côtés, de leurs femmes et de leurs enfants.
Elle reconnaît le principe d'une juste réparation des préjudices subis et leur accorde tous les droits moraux et matériels pour leur permettre l'intégration définitive dans la société française.

Article 3

Les charge éventuelles qui résulteraient pour l'Etat de l'application de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

N° 0303 - Proposition de loi sur les harkis (M. Lionnel Luca)


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