N° 407 ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 28 novembre 2002. PROPOSITION DE LOI relative au double affichage des prix. (Renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.) PRÉSENTÉE par M. Philippe FOLLIOT,
Additions de signatures : MM. Manuel
Aeschlimann, René André, Mme Sylvia Bassot, MM. Patrick Beaudouin, Jean-
Claude Beaulieu, Roland Blum, Bernard Carayon, Roland Chassain, Dino Cinieri,
Georges Colombier, Mme Geneviève Colot, MM. Louis Cosyns, Olivier Dassault,
Nicolas Dupont-Aignan, Jean-Claude Flory, Gilbert Gantier, Franck Gilard,
Bruno Gilles, Jean- Claude Guibal, Jean-Jacques Guillet, Emmanuel Hamelin,
Joël Hart, Francis Hillmeyer, Olivier Jardé, Mme Maryse Joissains-Masini,
MM. Patrick Labaune, Yvan Lachaud, Jean-Christophe Lagarde, Marc Le Fur,
Jacques Le Nay, Michel Lejeune, Arnaud Lepercq, Mme Geneviève Levy, M.
Lionnel Luca, Mme Muriel Marland-Militello, MM. Jean Marsaudon, Patrice
Martin-Lalande, Christian Ménard, Denis Merville, Jacques Myard, Nicolas
Perruchot, Christophe Priou, Jean-Luc Reitzer, Jacques Remiller, Mme Juliana
Rimane, MM. François Rochebloine, Serge Roques, Bernard Schreiner, Mmes
Michèle Tabarot, Hélène Tanguy, MM. Guy Teissier, André Thien Ah Koon,
Rodolphe Thomas, Léon Vachet, Gérard Vignoble, Philippe Vitel
et
Michel Voisin
Députés.
Consommation. EXPOSÉ DES MOTIFS Mesdames, Messieurs, Le passage à l'euro, le 1er janvier 2002, a été incontestablement une réussite technique. Aucune des catastrophes que les plus pessimistes redoutaient ne s'est produite. Globalement, la sécurité des opérations d'acheminement et de distribution de la nouvelle monnaie a été assurée et le retrait des billets et des pièces en francs s'est déroulé de manière satisfaisante. Les services publics, les banques, les grandes surfaces s'étaient préparés très en amont, notamment dans le domaine de la formation. Au moment du basculement, on a pu constater une très grande mobilisation des personnels, certains d'entre eux ayant même été spécialement recrutés à cet effet. Enfin, l'ensemble du monde commerçant et artisan, placé en première ligne, a déployé de très importants efforts, notamment pour faciliter les opérations de rendu de monnaie, ce qui a permis de limiter l'attente aux caisses. Les pouvoirs publics ont pu se féliciter des mesures mises en _uvre pour faciliter le passage à l'euro, en particulier de la durée de la période de transition - le cours légal du franc n'ayant pris fin que le 17 février, le principe de la cohabitation des deux monnaies paraissait à certains source de difficultés - et des recommandations en faveur du maintien du double affichage des prix jusqu'au 30 juin 2002. La presse n'a pas hésité à parler de période d'euphorie pour qualifier le mois de janvier 2002, les sondages réalisés à l'époque confirmant d'ailleurs le propos. Selon les principaux instituts de sondage, il apparaît que 85 % des chefs d'entreprise ont jugé «facile» le passage à l'euro et que 90 % d'entre eux déclarent n'avoir «aucune inquiétude» avec la nouvelle monnaie. Pour l'ensemble des Français, 93 % d'entre eux estiment que le passage à l'euro «se passe bien» et pour 89 % qu'il «se passe de mieux en mieux». Les Français déclarent ne pas ressentir de difficultés majeures liées à l'arrivée de la nouvelle monnaie ; ils ne sont que 7 % à éprouver une assez grande difficulté «à s'y retrouver entre les différentes pièces et monnaies», 6 % à «vérifier la monnaie rendue» et 12 % à «estimer le prix des produits». Le sentiment d'estimer le prix des produits avec exactitude constitue sans doute l'un des signes les plus révélateurs du degré d'adhésion de la population à sa nouvelle monnaie. La crainte de voir une partie de la population, notamment les personnes âgées et les plus démunies, perdre ses repères dans l'appréciation du prix des produits a souvent été avancée au cours de la phase préparatoire à l'introduction de l'euro. Les premiers résultats des sondages sont donc extrêmement rassurants à cet égard. On soulignera toutefois que ces sondages sont réalisés à un moment où le double affichage des prix est couramment pratiqué, ce qui est de nature à atténuer quelque peu leur valeur sur ce point. Des statistiques fournies par le ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, il ressort que la pratique du double affichage est largement répandue en janvier 2002 : elle frôle 100 % dans les grandes surfaces et atteint près de 90 % dans les autres magasins. La mesure est tellement appréciée des consommateurs que le gouvernement a fait sienne la recommandation du Conseil national de la consommation exprimée dès le 25 octobre 2000 (avis n° 9), reprise par le Comité national de l'euro lors de sa dernière réunion de février 2002 et tendant à ce que la période de double affichage des prix soit prolongée jusqu'à «la fin du premier semestre 2002». On rappellera ici que le double affichage ne constitue pas, à l'heure actuelle, une obligation légale, mais une pratique, dont la mise en _uvre a été encadrée par l'arrêté du 25 novembre 1998 modifiant l'arrêté du 3 décembre 1987 relatif à l'information du consommateur sur les prix. Son introduction dans le dispositif du passage à l'euro a répondu à deux préoccupations essentielles. D'une part, préparer le consommateur aux nouvelles échelles de valeur en lui permettant de s'approprier les nouvelles références de prix; d'autre part, s'assurer contre les éventuels dérapages de prix en donnant à l'opinion publique un moyen de contrôle simple et efficace. Nombreux ont été ceux qui ont alors plaidé pour que la période de double affichage soit la plus courte possible, avec comme argument principal que le maintien d'une échelle en francs serait peu propice à l'intégration des références nouvelles exprimées en euros. Le CNC estimait ainsi que «l'indication des prix en francs ne pourra persister au-delà de la date de retrait du cours légal du franc fiduciaire uniquement comme une mesure d'accompagnement destinée à parachever l'adaptation des consommateurs à la monnaie unique». Ajoutant qu'il importait «d'éviter les phénomènes d'accoutumance au franc», le CNC s'engageait toutefois à dresser un bilan à la fin du premier trimestre 2002, «à l'aide des travaux des observatoires de l'euro, pour apprécier l'état d'adaptation à l'euro des consommateurs et apprécier l'opportunité d'une prolongation de la période du double affichage». Quel bilan peut-on dresser aujourd'hui? En se référant au seul sondage réalisé par l'IFOP les 27 et 28 juin derniers et rendu publie le 30, il semble bien que la période d'euphorie soit terminée et que l'on soit entré dans une période de doute et d'inquiétude. A la question : «Six mois après la mise en place de l'euro, regrettez-vous le franc ?», les Français répondent oui à 58 %, alors qu'ils n'étaient que 39 % en février 2002. A 83 %, ils se déclarent favorables au maintien du double affichage des prix. Surtout, à la question : « Lorsque vous effectuez vos achats, continuez-vous à raisonner en francs, c'est-à-dire à convertir les euros en francs pour mieux évaluer les prix ? », ils sont 79 % à répondre oui. Sans qu'il soit besoin d'attendre les résultats que pourraient fournir d'autres organismes officiels disposant de moyens d'investigations plus approfondis, on peut d'ores et déjà conclure à l'émergence d'un malaise très réel. Cette absence de références en euros qu'avoue une très large majorité des Français est très inquiétante et montre que l'appropriation de la monnaie par les consommateurs est encore bien loin d'être une réalité. La période pendant laquelle le double affichage a été recommandé et pratiqué apparaît donc d'une durée manifestement insuffisante au regard des objectifs à atteindre. Il est donc souhaitable, pour remédier au malaise constaté et éviter qu'il se développe, en particulier chez les personnes les moins bien armées, d'instituer une période légale de double affichage des prix de cinq ans. Six mois avant l'issue de ce délai, le gouvernement remettra un rapport au Parlement faisant le point sur l'état de la question. Telles sont les raisons pour lesquelles il vous est demandé de bien vouloir adopter la proposition de loi suivante. PROPOSITION DE LOI Article 1er A compter de la date de publication de la présente loi et pour une durée de cinq ans, toutes les informations sur les prix de produits et de services exprimés en euros sont également exprimés en francs. Il est fait application, à cet effet, des règles de conversion et d'arrondi prévues par le règlement (CE) n° 1103/97 du 17 juin 1997 du Conseil de l'Union européenne pour déterminer les prix en francs. Une information sur le taux de conversion et sur les règles de conversion et d'arrondi est donnée au consommateur par voie d'affichage dans les lieux ou la vente de produits ou la prestation de services est proposée au public. Ces dispositions s'appliquent dans les mêmes conditions aux relevés bancaires, aux feuilles de paie ainsi qu'aux informations sur les prix particulières à certains produits, services ou pratiques commerciales définies par décret en Conseil d'Etat. Article 2 Six mois avant le terme du délai mentionné à l'article 1er, le gouvernement présente au Parlement un rapport sur les conditions d'application de la présente loi, sur l'état de l'opinion publique au regard du double affichage des prix ainsi que sur l'opportunité de prolonger son application.
_______________ N° 0407 - Proposition de loi
sur le double affichage des prix (M. Philippe Folliot)
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