N° 1072 - Proposition de loi de M. Jacques Masdeu-Arus relative à l'agrément des ouvrages et manuels scolaires par l'Etat




N° 1072

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 septembre 2003.

PROPOSITION DE LOI

relative à l'agrément des ouvrages et manuels scolaires
par l'
Etat.

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par M. Jacques MASDEU-ARUS,

Député.

Éducation - Recherche - Jeunesse - Sport.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames Messieurs,

Cette proposition de loi a pour objet de rendre à l'Etat une attribution essentielle qu'il a abandonnée aux enseignants au mépris du principe d'égalité des chances que la République doit assurer à tous les enfants.

En effet, la situation aujourd'hui est la suivante : à la base du manuel scolaire, il y a le programme national officiel publié par le ministère de l'Education nationale. Selon les articles L. 311-l et suivants du code de l'éducation, « l'organisation et le contenu des formations sont définis respectivement par des décrets et des arrêtés du ministre chargé de l'Éducation. Les programmes définissent, pour chaque cycle, les connaissances essentielles qui doivent être acquises au cours du cycle ainsi que les méthodes qui doivent être assimilées. Ils constituent le cadre national au sein duquel les enseignants organisent leurs enseignements en prenant en compte les rythmes d'apprentissage de chaque élève ».

Mais l'intervention du ministère de l'Éducation nationale s'arrête là. En France, l'Etat n'exerce aucun contrôle sur les ouvrages : ils sont conçus, édités et vendus par des éditeurs libres. Il n'existe pas d'organe officiel d'habilitation des manuels scolaires.

Le ministère de l'Éducation nationale ne peut intervenir que pour interdire les ouvrages contraires à la morale, à la Constitution ou aux lois.

C'est donc la libre concurrence entre éditeurs qui joue. Leur cible sont les enseignants car ce sont eux les prescripteurs des ouvrages.

On se retrouve dans une situation où le contrôle et la maîtrise des ouvrages s'exercent :

- en partie par l'Etat : pour les programmes;

- en partie par les auteurs et éditeurs : pour les contenus;

- en partie par les enseignants pour qui les livres sont écrits (les auteurs se disent d'ailleurs souvent prisonniers des attentes traditionnelles des enseignants).

Ce partage des responsabilités, on le doit à Jules Ferry, qui a permis aux enseignants de choisir librement leurs manuels. La France est d'ailleurs le premier pays à avoir confié cette responsabilité aux instituteurs, par l'arrêté du 16 juin 1880, et aux professeurs du secondaire, par la circulaire du 13 octobre 1881.

Or, aujourd'hui, les deux tiers des pays du monde n'offrent pas une telle liberté. Les enseignants se voient souvent imposer des manuels d'Etat, les éditeurs ne peuvent pas produire en toute indépendance ou les livres sont soumis à des procédures d'agrément validées par le pouvoir politique.

Au Japon, aux États-Unis (21 Etats sur 50), au Luxembourg, en Allemagne (dans la plupart des länder) et au Portugal, les manuels doivent obtenir l'agrément de l'administration. En Islande, l'édition scolaire est placée sous le contrôle de l'Etat.

Pourquoi un tel contrôle est-il souhaitable et légitime ?

Les manuels sont des instruments pédagogiques majeurs. Ils constituent la base de l'enseignement diffusé par les enseignants. Utilisés très tôt par les enfants, ils font partie des premiers contacts des enfants avec la lecture et le monde des livres ; ils sont également le premier accès à la culture par l'écrit.

Revêtus d'une sorte d'autorité, les manuels scolaires, comme les encyclopédies, sont des ouvrages collectifs, donc écrit par personne en particulier. Leurs lecteurs pensent qu'ils ne peuvent pas comporter d'erreurs, qu'ils sont infaillibles. Ils sont considérés comme la référence rassemblant l'état des connaissances, d'une société à un moment donné. Enseignants, parents, et a fortiori élèves, leur font spontanément confiance.

C'est pourquoi les manuels, plus que tous les autres livres, doivent être exempts de toutes représentations erronées et de tous stéréotypes.

Quoi de plus normal et légitime, alors, de redonner au ministère de l'Éducation nationale le soin d'évaluer les ouvrages édités et de leur attribuer ou non un agrément ministériel au vu de leur contenu.

C'est le sens de cette proposition de loi que je vous demande de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L'article L. 311-1 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'enseignement est uniforme dans son contenu. »

Article 2

L'article L. 311-3 du code de l'éducation est ainsi modifié :

I. - Après les mots : « les méthodes », sont insérés les mots : « et les notions ».

II. - Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les ouvrages et manuels scolaires agréés par le Conseil national des programmes en application de l'article L. 311-5 respectent ces programmes. »

Article 3

L'article L. 311-5 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le Conseil national des programmes donne aux ouvrages et manuels scolaires un agrément dans des conditions définies par décret. »

N° 1072 - Proposition de loi M. Jacques Masdeu-Arus relative à l'agrément desouvrages et manuels scolaires par l'Etat


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