N° 2073 - Proposition de loi de M. Georges Hage relative à l'amélioration de la législation pour lutter contre le harcèlement moral au travail




 

N° 2073

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 février 2005.

PROPOSITION DE LOI

relative à l'amélioration de la législation
pour
lutter contre le harcèlement moral au travail,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Georges HAGE, François ASENSI, Gilbert BIESSY, Alain BOCQUET, Patrick BRAOUEZEC, Jean-Pierre BRARD, Jacques BRUNHES, Mme Marie-George BUFFET,
MM. André CHASSAIGNE, Jacques DESALLANGRE, Frédéric DUTOIT, Mme Jacqueline FRAYSSE, MM. André GERIN, Pierre GOLDBERG, Maxime GREMETZ, Mmes Muguette JACQUAINT, Janine JAMBU, MM. Jean-Claude LEFORT, François LIBERTI, Daniel PAUL, Jean-Claude SANDRIER et Michel VAXÈS (1)

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La loi dite « de modernisation sociale » adoptée le 17 janvier 2002 a offert aux salariés les moyens de mieux se défendre contre l'un des fléaux qui les frappe : Le harcèlement moral au travail.

La mise en œuvre de ces dispositions nouvelles a contribué à révéler l'ampleur d'un phénomène qui, jusqu'à présent, était demeuré dans une certaine clandestinité et un pesant silence en France.

La pratique du harcèlement moral est humainement destructrice. Nous savons qu'elle conduit les hommes et les femmes, qui en sont victimes, à des dégradations graves de leur état de santé et, pour certains, au suicide.

Elle a également un coût pour les entreprises privées et les services publics où elle sévit, car elle porte atteinte à leur efficacité, à la productivité du travail et à leur image.

La loi précitée a donc constitué une avancée sociale importante. Il s'agit aujourd'hui de l'améliorer pour la rendre plus efficace encore dans les domaines suivants :

- La loi, dans les articles 169 et 178, a énuméré les mesures discriminatoires, directes ou indirectes, qui sont utilisées pour fonder le harcèlement moral au travail. Il apparaît nécessaire d'y ajouter des éléments importants, qui, aujourd'hui, concernent les salariés du privé et les fonctionnaires : les compléments de rémunération et les avantages en nature.

Ils sont, en effet, l'un des vecteurs très courant du harcèlement et souvent un moyen de représailles contre l'employé qui tente de se défendre.

- La loi de modernisation sociale a malencontreusement introduit une discrimination entre les salariés du secteur privé et ceux de la fonction publique. Elle définit les voies de recours à la disposition du salarié harcelé pour faire valoir ses droits. En revanche, elle n'a pas arrêté de mesures équivalentes pour les fonctionnaires.

La présente proposition s'efforce d'y pourvoir, en tenant compte de la spécificité de la fonction publique.

- Pour mettre un terme aux inégalités entre les secteurs public et privé, il convient également d'accorder aux comités d'hygiène et de sécurité les mêmes droits que les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail œuvrant dans le secteur privé.

- Enfin, il s'agit de prendre des dispositions pour la reconnaissance des maladies professionnelles consécutives au harcèlement moral au travail. Il semble difficile d'élaborer un tableau spécifique figurant dans le code de la Sécurité Sociale. C'est pourquoi nous instaurons un recours auprès du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP).

Eu égard à la gravité et à l'importance du problème que constitue le harcèlement moral au travail, la Représentation Nationale se doit de compléter les dispositions de la loi de modernisation sociale dans les plus brefs délais.

C'est pourquoi, Mesdames, Messieurs, nous vous demandons de bien vouloir adopter la proposition de loi suivante.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Dans le deuxième alinéa de l'article L. 122-49 du code du travail, après le mot : « rémunération », sont insérés les mots : « dans toutes ses composantes ».

Article 2

Dans le deuxième alinéa de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, après le mot : « notation », sont insérés les mots : « , les rémunérations annexes, les avantages en nature ».

Article 3

Dans le troisième alinéa de l'article 11 de la même loi, après le mot : « contre », sont insérés les mots « le harcèlement moral, ».

Article 4

L'article 11 bis de la même loi devient l'article 11 ter.

Article 5

Après l'article 11 de la même loi, il est rétabli un article 11 bis ainsi rédigé :

« Art. 11 bis. - La collectivité publique est tenue de protéger le fonctionnaire des agissements répétés de harcèlement moral tels que définis à l'article 6 quinquies. L'agent considérant qu'il en est victime aura la possibilité de saisir l'autorité administrative, dès lors qu'il établira des faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement.

« L'autorité en informera la commission administrative paritaire et lui fera connaître les suites données à la plainte. Elle saisira également le médecin de prévention et/ou le comité médical. »

Article 6

Dans l'article 23 de la même loi, après le mot : « physique », sont insérés les mots : « et mentale ».

Article 7

Les décrets définissant les missions des comités d'hygiène et de sécurité dans la fonction publique feront l'objet d'une nouvelle rédaction afin de leur donner les mêmes droits et prérogatives que les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail à l'œuvre dans le secteur privé, dont les missions sont définies par le code du travail.

Article 8

Après le premier alinéa de l'article L. 231-9 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : « Peut également constituer un danger grave et imminent pour la vie ou la santé du salarié un harcèlement moral par la dégradation délibérée des conditions de travail. »

Article 9

La reconnaissance en maladie professionnelle des conséquences médicales du harcèlement moral devra être établie par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, s'appuyant à la fois sur les indices matériels, les témoignages et les expertises médico-psychologiques de la victime. Cette commission devra pouvoir décider de la reconnaissance en maladie, même si la victime ne présente pas un taux d'incapacité permanente consécutif à son état, égal ou supérieur à 66 %.

Ce taux est, en effet, difficile à atteindre lorsque la symptomatologie est principalement d'ordre psychopathologique. Il sera donc abaissé afin que la réalité des conséquences du harcèlement moral au travail puisse être prise en compte et la victime légitimement et justement dédommagée.

Les décrets relatifs aux missions des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles et aux taux d'incapacité seront modifiés en conséquence.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118960-X
ISSN : 1240 - 8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

N° 2073 - Proposition de loi de M. Georges Hage relative à l'amélioration de la législation pour lutter contre le harcèlement moral au travail

1 () Constituant le groupe des député-e-s communistes et républicains.


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