N° 3212 - Proposition de loi de M. Charles Cova relative aux homicides involontaires




 

N° 3212

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 28 juin 2006.

PROPOSITION DE LOI

relative aux homicides involontaires,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration
générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Charles COVA, Jean-Claude ABRIOUX, Patrick BEAUDOUIN, Jean-Claude BEAULIEU, Jacques BOBE, Philippe COCHET, Jean-Pierre DECOOL, Nicolas DUPONT-AIGNAN, Marc FRANCINA, Mme Arlette FRANCO, MM. Jean-Jacques GUILLET, Pierre HELLIER, Francis HILLMEYER, Mme Marguerite LAMOUR, MM. Pierre LASBORDES, Marc LE FUR, Hugues MARTIN, Daniel PRÉVOST, Didier QUENTIN, Éric RAOULT, Guy TEISSIER, Léon VACHET, Philippe VITEL et Michel VOISIN

Addition de signature :
M. Jacques Remiller

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

· Aux termes de l'article 221-6 du code pénal, constitue un homicide involontaire le fait de causer sans le vouloir, la mort d'autrui, en commettant une faute ou en manquant à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement. L'article précité, se référant à l'article 121-3 du même code précise que la faute ou le manquement précités doivent être examinés au regard des diligences normales que l'auteur des faits a ou non accomplies, compte tenu (notamment) de ses fonctions et des moyens dont il disposait.

L'application de ces dispositions au domaine médical permet d'engager la responsabilité pénale de l'auteur d'une faute (imprudence, erreur de diagnostic, manquement à une obligation...) ayant entraîné la mort d'un patient ; cette dernière est appréciée par le juge pénal au regard des diligences normales que l'on peut attendre de chacun des membres d'une équipe médicale en tenant compte de ses fonctions (le juge considérera plus sévèrement la faute d'un médecin spécialiste que celle d'une infirmière de garde), des moyens mis à sa disposition et des données acquises de la science.

En outre, comme dans tous les domaines où la responsabilité d'autrui est mise en jeu, le juge saisi apprécie souverainement le lien de causalité direct entre le comportement fautif et le préjudice subi.

· De ce fait, l'état d'extrême vulnérabilité d'un patient ne constitue pas une circonstance aggravante de la faute commise, mais il est une circonstance que le juge (dit « du fait » parce que l'examen de ce dernier relève de son pouvoir souverain d'appréciation) se doit de prendre en compte dans l'évaluation de ladite faute.

De même, le juge pénal se doit d'examiner l'incidence qu'a pu avoir un état d'extrême vulnérabilité, dans le décès du patient. Il serait, en effet injuste, de faire peser sur une personne (ou sur un établissement) la responsabilité d'un tel décès, lorsque ce dernier résulte pour une part réelle mais peu importante, d'une faute et pour une autre part essentielle, « d'une capacité vitale très basse ».

· Si la protection des personnes en situation particulièrement vulnérable devait être plus explicitement mentionnée dans le code pénal, il conviendrait de s'interroger sur les conséquences d'une telle réforme. Cette dernière ne risquerait-elle pas, notamment, de :

- contribuer à une surcharge des juridictions pénales en permettant l'inculpation systématique de tout individu ayant, par sa faute mais involontairement, causé la mort d'une personne vulnérable ;

- créer des problèmes d'augmentation des cotisations d'assurances des professionnels de santé en charge des personnes vulnérables (cancérologues, néo-natologues, psychiatres, gérontologues...) dès lors que la couverture des risques pris par ces derniers augmente ;

- risquer des refus d'hébergement des personnes vulnérables par des établissements qui ne souhaiteraient pas augmenter le champ de leur responsabilité pénale ?

Pour ces raisons, le texte proposé de modification du code pénal renforce la responsabilité de l'auteur d'une imprudence, d'une négligence ou d'un manquement à une obligation de prudence ou de sécurité à l'égard d'une personne vulnérable mais, en ne définissant pas cet état de vulnérabilité et en laissant subsister la notion de « diligences normales », il encadre cette responsabilité, en confiant au juge pénal le soin d'en déterminer l'étendue, pour chaque cas d'espèce.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Le premier alinéa de l'article 221-6 du code pénal, est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Constitue un homicide involontaire, puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende, le fait de causer la mort d'autrui pas maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence, imposée par la loi ou le règlement, s'il est établi que l'auteur des faits :

« - n'a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait ;

« - ou, qu'ayant accompli lesdites diligences, il n'a pas pris en considération l'état spécifique de vulnérabilité de la victime. »

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-121323-3
ISSN : 1240 - 8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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N° 3212 - Proposition de loi relative aux homicides involontaires (M. Charles Cova)


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