N° 3224 - Proposition de loi de Mme Valérie Pecresse instaurant un accouchement dans la discrétion



N° 3224

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 28 juin 2006.

PROPOSITION DE LOI

instaurant un accouchement dans la discrétion,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration
générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais

prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par Mme Valérie PECRESSE, MM. Marc BERNIER, Gabriel BIANCHERI, Étienne BLANC, Bruno BOURG-BROC, Mme Christine BOUTIN, MM. Michel BOUVARD, Loïc BOUVARD, Mmes Josiane BOYCE, Maryvonne BRIOT, M. Yves BUR, Mme Patricia BURCKHART VANDEVELDE, MM. Bernard CARAYON, Antoine CARRÉ, Gilles CARREZ, Roland CHASSAIN, Luc CHATEL, Jean-François CHOSSY, Philippe COCHET, Alain COUSIN, Charles COVA, Hervé DE CHARETTE, Jean DE GAULLE, Xavier DE ROUX, Jean-Pierre DECOOL, Bernard DEFLESSELLES, Richard DELL'AGNOLA, Michel DIEFENBACHER, Jean-Pierre DOOR, Philippe DUBOURG, Jean-Pierre DUPONT, Nicolas DUPONT-AIGNAN, Francis FALALA, Jean-Michel FERRAND, Daniel FIDELIN, Jean-Claude FLORY, Mme Arlette FRANCO, MM. René GALY-DEJEAN, Jean-Jacques GAULTIER, Guy GEOFFROY, Charles-Ange GINESY, Mmes Claude GREFF, Pascale GRUNY, MM. Louis GUÉDON, Michel HEINRICH, Pierre HERIAUD, Jean-Yves HUGON, Édouard JACQUE, Mme Marguerite LAMOUR, MM. Robert LAMY, Pierre LASBORDES, Jean-Pierre LE RIDANT, Lionnel LUCA, Richard MALLIÉ, Alain MARSAUD, Pascal MÉNAGE, Christian MÉNARD, Gérard MENUEL, Gilbert MEYER, Mmes Marie-Anne MONTCHAMP, Nadine MORANO, MM. Denis MERVILLE, Étienne MOURRUT, Jean-Pierre NICOLAS, Dominique PAILLÉ, Mme Bernadette PAÏX, MM. Christian PHILIP, Étienne PINTE, Mmes Bérengère POLETTI, Josette PONS, MM. Daniel PRÉVOST, Christophe PRIOU, Didier QUENTIN, Michel RAISON, Frédéric REISS, Jean-Luc REITZER, Jacques REMILLER, Dominique RICHARD, Jean-Marie ROLLAND, Jean-Marc ROUBAUD, Martial SADDIER, Francis SAINT-LÉGER, François SCELLIER, André SCHNEIDER, Jean-Pierre SOISSON, Daniel SPAGNOU, Michel TERROT, Guy TEISSIER, Léon VACHET, Alain VENOT, Mme Béatrice VERNAUDON et M. Michel VOISIN

Additions de signatures :
M. Emmanuel Hamelin
M. Philippe Vitel

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Bien que l’article 7 de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant reconnaisse à l’enfant « dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents », une naissance sous X peut priver l’enfant qui le souhaiterait de la connaissance de ses origines. Cette situation peut être pour certains enfants, y compris devenus adultes, source de grande souffrance psychologique.

La présente proposition de loi reprend les préconisations formulées par la mission d’information sur la famille et les droits des enfants pour donner à l’enfant davantage de possibilités d’accéder à ses origines personnelles s’il le juge nécessaire pour construire son identité.

En France, l’enfant né sous X ne dispose pas actuellement du droit de connaître ses origines, mais d’une simple faculté si sa mère de naissance a laissé son identité lors de l’accouchement et si, lorsque l’enfant en fait la demande, elle accepte que celle-ci lui soit transmise.

Or, l’accouchement sous X a évolué au cours des dernières années. Nous sommes bien loin des chiffres des années soixante-dix où plus de 10 000 femmes avaient recours à ce dispositif chaque année. La législation a en outre évolué. La loi de 2002 a mis en place un dispositif permettant à la mère de donner son nom ou des informations personnelles à destination de l’enfant. Dès lors, si le secret est toujours utilisé, l’anonymat est moins demandé, la majorité des femmes acceptant de laisser leur identité. Ainsi, en 2004, seuls 40% des 394 femmes ayant accouché sous X n’ont pas décliné leur identité.

Au moment où la Cour de cassation vient de donner au père le droit de se voir restituer un enfant né sous X, il serait paradoxal que l’enfant lui-même ne puisse toujours pas accéder à ses origines.

En outre, le ministère de la justice belge a attiré l’attention de la mission d’information sur la famille sur le fait que l’accouchement sous X peut être détourné de son objet. En cas de recours à la gestation pour autrui à l’étranger, voire de recours à une mère porteuse clandestine en France, il permet à la gestatrice de mettre au monde l’enfant en France sans établir un lien de filiation avec lui, autorisant ainsi au père de le reconnaître et de l’élever – éventuellement avec sa compagne ou son compagnon –, enfreignant la législation bioéthique française qui proscrit les mères porteuses.

Le respect de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant comme l’évolution de la société, qui ne stigmatise plus les mères seules, conduisent à donner aux enfants nés sous X le droit de connaître, à leur majorité, l’identité de leurs parents de naissance. À cette fin, l’article premier remplace l’accouchement sous X par un « accouchement dans la discrétion ». L’anonymat est supprimé, mais le secret est maintenu : la mère décline son nom au moment de l’accouchement, mais peut toujours demander que son identité soit tenue secrète. Pendant la minorité de l’enfant, la communication de l’identité de la mère et, le cas échéant, du père reste soumise à leur accord. En revanche, à la majorité de l’enfant, la communication est de droit. Le principal risque invoqué pour maintenir l’accouchement anonyme est celui de voir les femmes concernées recourir à l’avortement ou accoucher chez elles en dehors de toute structure sanitaire. Ce risque ne doit pas être surévalué : il ressort des chiffres qui viennent d’être cités que l’accouchement sous X n’est plus aujourd’hui une véritable alternative à l’avortement puisqu’il ne concerne que quelques centaines de femmes par an. Les responsables du planning familial interrogés par la mission d’information sur la famille ont témoigné de leurs immenses difficultés à se faire les avocats d’un accouchement sous X. La grande majorité de nos voisins européens ne connaît pas l’accouchement sous X, or on n’y constate pas de drames sanitaires particuliers.

Afin de faire de la recherche des origines une démarche personnelle de l’enfant, l’article 2 réserve, lorsque l’enfant abandonné est mineur, la demande d’accès aux origines au mineur lui-même à condition qu’il ait atteint l’âge de discernement et que ses représentants légaux soient d’accord. Il faut en effet éviter que l’irruption trop précoce de l’identité d’un parent de naissance dans la vie de l’enfant ne vienne remettre en cause les liens qu’il a tissés avec ses parents adoptifs.

PRO

POSITION DE LOI

Article 1er

I. – Dans l'article 341-1 du code civil, après le mot : « peut », sont insérés les mots : « , après avoir donné son identité,  ».

II. – Au début de l’article L. 147-6 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l’enfant est mineur ou décédé avant sa majorité, les renseignements relatifs à ses origines sont communiqués dans les conditions prévues au présent article. »

III. – Après l’article L. 147-6 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 147-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 147-6-1. – Lorsque l’enfant est majeur ou décédé après sa majorité, l’accès des personnes mentionnées au 1° de l’article L. 147-2 à l’identité des père et mère de naissance, ainsi qu’à celle des personnes mentionnées au 3° du même article, est de droit. »

IV. – L’article L. 222-6 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° Dans la deuxième phrase du premier alinéa, après le mot : « laisser », sont insérés les mots : « sous pli fermé », et les mots : « ainsi que, sous pli fermé, son identité » sont supprimés ;

2° Dans la quatrième phrase du premier alinéa, les mots : « donner son identité sous pli fermé ou » sont supprimés ;

3° Dans l’avant-dernier alinéa, les mots : « aucune pièce d’identité n’est exigée et » sont supprimés.

Article 2

Le quatrième alinéa de l’article L. 147-2 du code de l’action sociale et des familles est ainsi rédigé :

« – s’il est mineur et capable de discernement, par lui-même avec l’accord de ses représentants légaux ; ».

Composé et imprimé pour l’Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-121342-X
ISSN : 1240 –8468

En vente à la Boutique de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

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