Document
mis en distribution
le 4 décembre 2006
N° 3412
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 novembre 2006.
PROPOSITION DE LOI
visant à garantir aux personnes placées sous un régime de protection juridique un droit à entretenir des relations personnelles avec tout tiers,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
PRÉSENTÉE
PAR MM. Jérôme BIGNON, Patrick BALKANY, Jacques-Alain BÉNISTI, Émile BLESSIG, Jacques BOBE, Marcel BONNOT, Bruno BOURG-BROC, Michel BOUVARD, Mme Chantal BRUNEL, MM. Bernard CARAYON, Pierre CARDO, Antoine CARRÉ, Philippe COCHET, François CORNUT-GENTILLE, Olivier DASSAULT, Jean-Pierre DECOOL, Francis DELATTRE, Patrick DELNATTE, Jean-Marie DEMANGE, Léonce DEPREZ, Jean-Jacques DESCAMPS, Philippe DUBOURG, Jean-Michel FERRAND, Marc FRANCINA, Claude GATIGNOL, Guy GEOFFROY, Alain GEST, Jean-Pierre GRAND, Mme Arlette GROSSKOST, MM. Louis GUÉDON, Jean-Claude GUIBAL, Emmanuel HAMELIN, Joël HART, Michel HEINRICH, Pierre HELLIER, Marc JOULAUD, Jacques KOSSOWSKI, Marc LE FUR, Jacques LE NAY, Jean-Pierre LE RIDANT, Jean-Marc LEFRANC, Michel LEJEUNE, Arnaud LEPERCQ, Lionnel LUCA, Thierry MARIANI, Mme Muriel MARLAND-MILITELLO, MM. Alain MARSAUD, Philippe-Armand MARTIN, Jean-Claude MATHIS, Gérard MENUEL, Gilbert MEYER, Pierre MOREL-A-L'HUISSIER, Étienne MOURRUT, Jean-Pierre NICOLAS, Pierre-André PÉRISSOL, Michel PIRON, Mme Bérangère POLETTI, Daniel PRÉVOST, Didier QUENTIN, Michel RAISON, Éric RAOULT, Frédéric REISS, Jacques REMILLER, Mme Juliana RIMANE, MM. Serge ROQUES, Michel ROUMEGOUX, Francis SAINT-LÉGER, Mme Hélène TANGUY, M. Michel TERROT, Mme Irène THARIN, MM. Georges TRON, Gérard VOISIN, Éric WOERTH,
députés.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Consécutivement au vieillissement de la population française – aujourd’hui 2,8 millions de personnes ont plus de 80 ans et il devrait y en avoir près de 7 millions en 2040 –, un nombre toujours croissant de personnes sont placées sous un régime de protection juridique : près de 700 000 aujourd’hui, vraisemblablement 1 million dans quelques années. Un tiers des personnes protégées le sont sous le régime de la tutelle, le régime de protection juridique le plus restrictif.
Une réforme du dispositif adopté en 1968 est heureusement envisagée, compte tenu de l’augmentation exponentielle des personnes concernées par le régime de protection, et de l’inadaptation de la législation aux situations et à la société d’aujourd’hui.
Cette protection, et en particulier la tutelle, du fait qu’elle concerne des personnes dont les capacités intellectuelles sont atteintes, a pour conséquence de permettre l’apparition d’abus, pouvant notamment créer un préjudice moral grave pour la personne protégée, voire des atteintes à son intégrité physique. Il peut par exemple arriver qu’un tuteur empêche le majeur incapable dont il a la charge d’être visité par sa famille ou ses proches, ce qui peut provoquer des dégâts psychologiques importants. Il arrive également qu’une personne âgée placée sous tutelle, vivant chez elle avec un enfant majeur, soit empêchée, sous l’influence de celui-ci, de tout contact avec d’autres membres de la fratrie ou de la famille.
Ces cas largement minoritaires sont suffisamment graves pour devoir être envisagés par la loi.
Or, en dehors de la visite institutionnelle des magistrats ou de leurs représentants, prévue à l’article 490-3 du code civil, la législation actuelle n’organise ni ne prévoit aucun droit de visite ou d’hébergement au bénéfice des majeurs placés sous un régime de protection juridique.
Pourtant, la visite de la famille et des proches au majeur incapable permet, d’une part de contrôler la mise en œuvre de la protection juridique, et d’autre part d’établir ou de pérenniser le lien affectif, de contrôler l’équilibre psychologique de l’incapable majeur, et de garantir son intégrité physique.
Avoir et entretenir des relations personnelles choisies constitue par ailleurs une liberté individuelle, qui ne peut être restreinte que pour des raisons d’ordre public, ou si l’état de santé de la personne concernée l’impose. Il est nécessaire, pour des raisons d’efficacité, de garantir expressément dans la loi ce droit et cette liberté.
La présente proposition de loi a donc pour objectif de combler une lacune de notre droit, et d’améliorer la mise en application du régime de protection juridique et le quotidien des personnes qui y sont placées.
Servant directement les intérêts du majeur incapable, cette proposition de loi entend reconnaître un droit subjectif, au bénéfice du majeur incapable, à entretenir des relations personnelles avec ses proches, à être visité et hébergé.
PROPOSITION DE LOI
Article unique
Après l’article 490-3 du code civil, il est inséré un article 490-4 ainsi rédigé :
« Art. 490-4. – L’incapable majeur entretient librement des relations personnelles avec tout tiers, parent ou non. Il a le droit d’être visité et le cas échéant hébergé par ceux-ci.
« En cas de difficultés et si tel est l'intérêt de l’incapable majeur, le juge des tutelles fixe les modalités des relations et le cas échéant les conditions de visite et d’hébergement. »
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