N° 3806 - Proposition de loi de Mme Paulette Guinchard relative au baptême républicain



Document

mis en distribution

le 12 juin 2007


N°  3806

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 mai 2007.

PROPOSITION DE LOI

relative au baptême républicain,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

PAR Mme Paulette GUINCHARD, 

députée.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le parrainage au sens premier du terme trouve ses fondements dans la tradition chrétienne. Le parrain est celui qui accueille le nouveau membre de la communauté des croyants et qui, ensuite, l’accompagne dans sa vie de chrétien.

Dans les temps anciens, et notamment depuis le concile de Mayence de 819, le baptême et le parrainage constituaient une quasi-obligation pour les parents du nouveau-né. Ces derniers devaient confier à Dieu leur enfant en lui attribuant des protecteurs spirituels. Une seconde naissance marquée par l’exigence de distinguer parenté spirituelle et parenté charnelle. Dans l’ancienne représentation chrétienne, le baptême « refait » l’enfant et l’eau bénite le protége des limbes où il se serait évanoui. L’enfant sans parrain est voué à la mauvaise mort.

Nos sociétés occidentales et notamment la société française, dès la IIIe République, ont largement fait œuvre de sécularisation. Certes, le baptême religieux reste encore d’actualité, mais il correspond aujourd’hui plus à une pratique culturelle que cultuelle. Même si dans les faits, en raison de la mobilité des familles et de la dislocation du lien social, il ne trouve guère de traduction dans la réalité.

Reste que la notion même de parrainage garde son attrait mais sous d’autres formes, que ce soit le parrainage d’enfants étrangers, le parrainage culturel, le parrainage scolaire ou professionnel.

Depuis, une dizaine d’années, une nouvelle forme de parrainage est venue s’ajouter à ces pratiques : le parrainage associatif. Contrairement au baptême religieux ou républicain, plus souvent envisagé comme une garantie possible de famille de substitution en cas de malheur, ce parrainage s’inscrit dans une démarche de soutien à la parentalité dans le cadre de développement de réseaux de solidarités.

Progressivement, face à l’augmentation de la précarité familiale, cette initiative a reçu un accueil favorable des pouvoirs publics qui y ont vu une alternative aux prises en charge sociales plus lourdes pour des enfants souffrant d’une carence affective ou éducative légère. Dans les années 1970, plusieurs circulaires ont eu pour objet de promouvoir et développer le parrainage.

Depuis 2002, suite à un rapport rendu à Mme la ministre déléguée à la famille, Ségolène Royal, le parrainage associatif a connu un nouvel essor. Un arrêté du 26 mai 2003 du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre délégué à la famille a installé un comité national du parrainage. Puis, un autre arrêté du 11 août 2005 a officialisé une charte du parrainage des enfants.

Paradoxalement, le parrainage républicain, lui, n’a aujourd’hui aucune reconnaissance légale. Instauré par un décret du 20 prairial an II, le baptême républicain n’a plus de consécration normative depuis la IIIe République. C’est pourquoi certains maires peuvent, sans conséquence, refuser de manière totalement discrétionnaire la célébration d’un baptême républicain, alors que d’autres se prêtent à la cérémonie, ce qui pose nécessairement question par rapport au principe d’égalité des citoyens.

Cet état du droit induit un certain nombre de conséquences. Aucune statistique n’est disponible. Les maires ne sont pas tenus de le célébrer. Aucun cérémonial n’est prévu et ces baptêmes ne font l’objet d’aucun enregistrement.

Alors que le parrainage associatif fait l’objet aujourd’hui d’une reconnaissance institutionnelle, le silence des textes sur le baptême républicain interpelle. C’est pourquoi, il convient aujourd’hui de rompre ce silence en reconnaissant le baptême républicain.

Reste à définir la place que l’on souhaite reconnaître aux parrain et marraine. Doivent-ils devenir de droit le tuteur ou subrogé tuteur de l’enfant qu’ils parrainent quand les circonstances l’exigent ?

Ce n’est pas le choix proposé. En effet, il semble préférable comme le permet le code civil, y compris suite à la loi portant réforme de la protection des majeurs, de laisser aux parents la liberté de désigner s’ils le souhaitent le parrain ou la marraine comme le tuteur de leur enfant à travers un mandat de protection future.

En revanche, il convient naturellement de reconnaître une place aux personnes qui font le choix de s’engager moralement aux côtés du parrainé en cas de nécessité. Au-delà des parents ou alliés de l’enfant, le code civil offre d’ores et déjà au juge la possibilité d’appeler pour faire partie du conseil de famille, « des amis, des voisins ou toutes autres personnes qui lui semblent pouvoir s’intéresser à l’enfant ». Dès lors que le baptême républicain reçoit une consécration législative, il appartient au législateur de permettre au juge d’appeler également les parrain et marraine de l’enfant afin que ceux-ci soient membres du conseil de famille.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Après la section III du chapitre II du titre II du livre Ier du code civil, il est inséré une section IV ainsi rédigée :

« Section IV

« du parrainage républicain

« Art. 62-2. – Le père ou la mère d’un enfant mineur peut demander à l’officier d’état civil de la commune de résidence de l’enfant de célébrer son parrainage républicain.

«  Sauf opposition de l’un des deux parents, l’officier d’état civil est tenu de célébrer publiquement le parrainage en présence du parrain et de la marraine désignés par celui qui en fait la demande.

« Art. 62-3. – Au jour désigné par le ou les parents, en présence de l’enfant, l’officier d’état civil reçoit la déclaration du parrain et de la marraine de s’engager, dans le respect des règles relatives à l’autorité parentale, à concourir à l’éducation et l’apprentissage de la citoyenneté républicaine du parrainé.

« Le parrainage républicain donne lieu à une inscription au registre d’état civil du parrainé.

« Art. 62-4. – Il est tenu dans chaque commune un registre des parrainages républicains.

« L’acte de parrainage républicain énonce :

« 1°) Les noms, prénoms, domiciles, dates et lieux de naissance des père et mère ;

« 2°) Les noms, prénoms, date et lieu de naissance de l’enfant parrainé ;

« 3°) Les noms, prénoms, domiciles, dates et lieux de naissance des parrain et marraine ;

« 4°) La déclaration des père et mère de choisir pour leur enfant les parrain et marraine désignés par l’acte ;

« 5°) La déclaration des parrain et marraine d’accepter ce rôle. »

Article 2

Dans l’article 409 du code civil, après les mots : « conseil de famille », sont insérés les mots : « les parrain et marraine visés à l’article 62-3 ».


© Assemblée nationale