![]() N° 1097 -- ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 30 septembre 2003. RAPPORT D'INFORMATION DÉPOSÉ en application de l'article 145 du Règlement PAR LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES sur le bioterrorisme ET PRÉSENTÉ PAR M. Pierre LANG, Député. -- Défense. S O M M A I R E _____ Pages INTRODUCTION 5 I. - L'ÉTAT DE LA MENACE 7 A. LE SPECTRE D'UNE ARME INVISIBLE HAUTEMENT LÉTALE 7 1. Une arme insidieuse 7 2. Une arme hautement létale et comparativement peu onéreuse 7 3. Un traitement retardé par l'absence de détection en temps réel 8 B. LA DIFFICULTÉ DES ÉTAPES À FRANCHIR LORS DE LA MISE AU POINT ET DE L'UTILISATION DES ARMES BIOLOGIQUES LIMITE LEUR PROBABILITÉ D'EMPLOI PAR DES GROUPES TERRORISTES 9 1. L'acquisition des souches pathogènes ou toxines reste relativement aisée 9 1. Une menace avérée, liée à l'évolution des objectifs du terrorisme 13 2. Terrorisme et programmes biologiques étatiques : « l'équation de tous les dangers » ? 15 3. Le défi majeur de l'agroterrorisme 15 II. - LA MISE EN œUVRE PROGRESSIVE D'UNE RÉPONSE NÉCESSAIREMENT MULTIFORME 17 A. LA PRÉVENTION 17 1. L'impasse diplomatique du désarmement sans vérification : la politique de non-prolifération est-elle encore un préalable à la lutte contre le bioterrorisme ? 17 2. Contrôle des exportations et réglementation des biens à double usage : un instrument indispensable en mal d'universalité 19 a) Régime international de fournisseurs et réglementation européenne 19 b) Une réglementation nationale récente sur la détention et les transferts internes de souches 20 3. Le cas russe 21 4. Sécurisation des sites sensibles et sensibilisation de la communauté scientifique 23 5. La protection des réseaux d'eau 24 6. Le réseau de surveillance épidémiologique, clé de voûte du dispositif 27 7. La formation des professionnels de santé, préalable à la veille sanitaire et à la gestion de crise 29 B. PLANIFICATION ET INTERVENTION 30 1. Une planification complexe 30 a) Le plan Biotox 30 b) Le plan variole : une organisation sans précédent 32 2. Une réponse nécessairement coordonnée 36 3. L'indispensable coopé
align: justify">2. Une capacité en laboratoires de sécurité encore restreinte 44 B. A VIGILANCE CONSTANTE, FINANCEMENT DURABLE 45 C. FORMATION ET ENTRAÎNEMENT OU LE PASSAGE DE LA PLANIFICATION À LA CAPACITÉ OPÉRATIONNELLE 48 D. UNE POLITIQUE DE COMMUNICATION QUI RESTE À REDÉFINIR ET DÉVELOPPER 50 E. LE DÉFI DE LA DÉTECTION ET L'IMPORTANCE DE LA RECHERCHE ET DÉVELOPPEMENT 50 IV. - LA PERTINENCE D'UNE PRISE EN COMPTE DU BIOTERRORISME AU NIVEAU INTERNATIONAL 53 A. ENJEUX ET LIMITES D'UNE RÉPONSE EUROPÉENNE : RENFORCEMENT DE LA COORDINATION DES ETATS MEMBRES OU BALBUTIEMENTS D'UNE RÉPONSE COMMUNE ? 53 1. Le programme d'action visant à renforcer la sécurité sanitaire 54 2. Le mécanisme communautaire de protection civile 56 3. PESD et lutte contre le terrorisme NRBC 57 B. L'INITIATIVE D'OTTAWA POUR LA SÉCURITÉ SANITAIRE MONDIALE 58 C. L'ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTÉ (OMS) 58 CONCLUSION 61 TRAVAUX DE LA COMMISSION 63 ANNEXE 65 Le 5 octobre 2001, le bioterrorisme faisait sa première victime en la personne de Robert Stevens, journaliste décédé des suites de la maladie du charbon (anthrax) en Floride. Si l'arme biologique avait déjà fait l'objet d'utilisations anecdotiques sur des champs de bataille (cadavres de pestiférés catapultés lors du siège de Kaffa en 1346, inoculation du bacille de la morve aux chevaux des troupes alliées pendant la première guerre mondiale, utilisation d'agents infectieux par l'Unité 731 des forces japonaises pendant l'occupation de la Mandchourie entre 1932 et 1942), la boîte de Pandore a été ouverte en matière de terrorisme biologique. L'épisode américai
que dans le nombre de victimes ? Quels facteurs permettent d'expliquer ce changement de mode opératoire des terroristes ? À ces interrogations sur l'étendue du risque et la réalité de la menace, s'ajoutent celles sur notre capacité de réaction et notre degré de vulnérabilité. La préparation au terrorisme biologique constitue un dilemme pour les autorités publiques. Comment, dans l'incertitude, dimensionner la réponse à une menace virtuelle, sans tomber dans le gaspillage de fonds publics ? Quel budget y consacrer ? Comment intégrer la menace bioterroriste dans l'ordre des priorités alors qu'elle est classée à un niveau très bas dans l'échelle des probabilités ? Au prix d'un véritable effort de guerre, les Etats-Unis ont choisi de consacrer depuis plusieurs années des sommes considérables à leur politique de lutte contre le bioterrorisme (5 milliards de dollars entre 1998 et 2001, 3,5 milliards de dollars pour la seule année 2003), qui peuvent paraître décalées au regard de la dégradation actuelle de leur système de santé publique. Après un état des lieux de la menace, le présent rapport d'information s'interrogera sur la pertinence du dispositif français de lutte contre le bioterrorisme et son état d'avancement. Enfin, il évaluera la plus-value d'une coordination internationale dans ce domaine. Tout au long de ce rapport, le bioterrorisme sera pris dans son acception la plus large : utilisation à des fins idéologiques d'agents biologiques (virus, bactéries), mais aussi de toxines (substances toxiques sécrétées par des organismes vivants) afin d'infliger des dommages aux êtres humains, aux animaux ou aux végétaux dans un but d'intimidation et de terreur. A. LE SPECTRE D'UNE ARME INVISIBLE HAUTEMENT LÉTALE Déterminant pour des groupes terroristes à la recherche d'un effet de terreur, l'impact psychologique majeur des armes biologiques renvoie à des peurs ancestrales (grande peste noire du Moyen âge). Il est également lié à leur caractère insidieux et à l'angoisse de l'incertitude pendant la période d'incubation. Contrairement aux armes chimiques, l'arme biologique est indétectable par nos sens : elle est inodore et invisible. De plus, alors que les armes chimiques provoquent une atteinte massive et immédiate, les effets d'un acte de bioterrorisme ne seront pas immédiatement quantifiables et s'étaleront dans le temps, en raison du délai d'incubation, qui peut aller de quelques heures pour les toxines à plusieurs semaines pour certaines bactéries (brucellose). Le temps de latence entre la dissémination et les premiers effets permet en outre aux auteurs de l'attentat de prendre la fuite sans être inquiétés.
Aire de Action incapacitante Fièvre de la Vallée du Rift 1 400 35 000 Encéphalite à tiques 1 9 500 35 000 Typhus 5 19 000 85 000 Brucellose 10 500 100 000 Fièvre Q > 20 150 125 000 Tularémie > 20 30 000 125 000 Charbon >> 20 95 000 125 000 Source : Santé publique et Armes chimiques et biologiques, OMS, 1970. |