N° 1297 ______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 décembre 2003. RAPPORT D'INFORMATION DÉPOSÉ en application de l'article 145 du Règlement PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES en conclusion des travaux d'une mission d'information constituée le 23 octobre 2002 1 sur l'avenir du processus euroméditerranéen, Président M. ROLAND BLUM Rapporteur M. JEAN-CLAUDE GUIBAL Députés -- La mission d'information sur l'avenir du Processus euro-méditerranéen est composée de : M. Roland BLUM, Président, M. Jean-Claude GUIBAL, Rapporteur, Mmes Sylvie ANDRIEUX-BACQUET, Martine AURILLAC, MM. Eric RAOULT, Gilbert GANTIER et Henri SICRE. SOMMAIRE ___ INTRODUCTION 5 I - ENJEUX ET PROBLÉMATIQUES D'UNE POLITIQUE A - LA MÉDITERRANÉE, ESPACE DE CONFLITS 7 1) Des problèmes d'identité mal résolus au Nord comme au Sud 7 a) Un territoire marqué par le cloisonnement et la confrontation 8 b) Une ambivalence à l'égard de l'Europe 9 c) Une ligne de contact entre les mondes chrétien et musulman 11 2) La Méditerranée, zone d'insécurité 12 a) Des conflits qui bloquent les évolutions 12 b) Les conséquences de l'extension du terrorisme 14 c) Une démographie mal maîtrisée 15 d) Des régimes politiques souvent autoritaires 17 3) Des obstacles structurels au développement du Sud 18 a) Des règles de droit mal établies 19 b) Des économies mal libéralisées engendrant des problèmes locaux 20 c) Des politiques d'éducation insuffisantes 21 B - LES RELATIONS AVEC LES VOISINS DU SUD DE LA MÉDITERRANÉE : 1) Un élargissement perçu comme un retrait par le Sud 23 a) Une Union européenne centrée sur son élargissement, b) Un manque d'intérêt et de compréhension 24 2) Une certaine frilosité de l'Union européenne 25 a) Des accords ambitieux et peu appliqués 25 b) Une mise en œuvre décevante de part et d'autre 27 3) Une politique méditerranéenne de l'Union souvent contradictoire 29 a) Le dogme du libre-échange répond-il à la situation ? 29 b) Un déséquilibre croissant des échanges en faveur des pays de l'Est 33 C - RÉPERCUSSIONS POSSIBLES DE L'ÉVOLUTION DES PAYS DE 1) Le scénario de la crise économique et sociale 33 2) Le scénario du développement 34 II - PROMOUVOIR UNE NOUVELLE STRATÉGIE EN MÉDITERRANÉE 36 A - UNE APPROCHE VOLONTARISTE, GLOBALE ET DIFFÉRENCIÉE 36 1) Refonder le Processus de Barcelone 36 a) Faire du Forum le laboratoire d'idées du Processus de Barcelone 38 b) Créer une Banque euro-méditerranéenne de développement 39 c) Créer une fondation culturelle 42 d) Créer une Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne 45 2) Renforcer la structure des sous-ensembles 46 a) Le Processus d'Agadir 46 b) Le dialogue 5 + 5 47 c) Favoriser la coopération décentralisée en particulier entre les régions 50 3) Inventer de nouveaux concepts 52 a) La notion de nouveaux voisins 52 b) La coopération renforcée avec les trois pays du Maghreb 53 c) Le statut spécifique d'association demandé par le Roi du Maroc 55 B - RÉTABLIR L'INFLUENCE FRANÇAISE DANS L'AIRE MÉDITERRANÉENNE 56 1) Un rôle de trait d'union entre les deux rives de la Méditerranée 56 a) Une influence liée à la géographie 56 b) Utiliser la communauté linguistique et culturelle que constitue la francophonie 57 2) Des propositions de relance du Processus de Barcelone innovantes 58 a) Créer un espace euro-méditerranéen d'enseignement supérieur 58 b) Associer plus étroitement les pays partenaires à la définition des programmes 58 c) Renforcer Programme de la mission en Algérie, Tunisie, Maroc 75 ANNEXE 3 : Les programmes MEDA 78 ANNEXE 4 : Propositions de neuf pays de l'Union européenne en vue Mesdames, Messieurs, La Commission des Affaires étrangères a décidé en juillet 2002 de créer une mission d'information sur l'avenir du Processus euro-méditerranéen. Le contexte international très incertain l'y invitait. Le centre de gravité de l'Union européenne s'étant déplacé vers l'Est, il lui a paru nécessaire de souligner l'importance de la coopération de la future Union européenne élargie avec la zone méditerranéenne. L'on sait qu'une coopération ancienne avait été instituée dès les années soixante avec la Turquie, le Maroc et la Tunisie, et qu'elle avait été matérialisée dans les années soixante-dix par des accords commerciaux d'une durée illimitée assortis de protocoles financiers bilatéraux renégociés tous les cinq ans. Dans les années quatre vingt dix, les bouleversements géopolitiques et géostratégiques de la scène internationale ont conduit l'Union européenne à repenser sa politique vis-à-vis de la zone méditerranéenne dans le cadre d'une approche plus globale. La chute du mur de Berlin a permis l'ouverture de l'Union européenne vers l'Est, alors que dans la zone méditerranéenne le processus de paix au Moyen-Orient lui donnait l'occasion de refonder ses relations avec les pays tiers méditerranéens. Un programme de partenariat ambitieux de développement fondé sur un volet politique, un volet financier, un volet social, culturel et humain, fut alors adopté à la Conférence euro-méditerranéenne de Barcelone des 27 et 28 novembre 1995. Ce partenariat original s'appuyait sur des accords d'association entre l'Union européenne et les douze pays tiers : Algérie, Tunisie, Maroc, Egypte, Jordanie, Syrie, Liban, Israël, Autorité palestinienne, Chypre, Malte, Turquie. On tenait ainsi compte de la spécificité de chacun, ce programme global étant financé via le Fonds MEDA. Initialement donc, le Processus de Barcelone prenait en compte les origines méditerranéennes de l'Union européenne et se calquait sur un système inspiré de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) dont le fonctionnement a été très satisfaisant. Actuellement, les relations de l'Union européenne avec ses partenaires de la Méditerranée constituent un enjeu majeur de politique étrangère car, avec l'élargissement, le centre de gravité de l'Union européenne s'est largement déplacé vers l'Est. C'est de ses rapports avec la zone méditerranéenne que dépendra la capacité de l'Union européenne élargie à jouer un rôle politique sur la scène internationale et à devenir une puissance crédible capable de relever les défis de la mondialisation, de l'après 11 septembre, de la guerre en Irak et de la situation au Proche-Orient. A l'heure de tentations hégémoniques qui semblent d'ailleurs vouées à l'échec, le concept de choc des civilisations cher à certains, outre qu'il ne rend en rien compte de la réalité, est un concept inopérant et dangereux. Si choc des civilisations il y a, ce n'est pas entre l'Orient et l'Occident, le Nord et le Sud, mais entre tenants d'un monde fondé sur la pensée unique, l'intégrisme religieux, l'intolérance et le fanatisme, et tenants d'un monde fondé sur la diversité culturelle et religieuse, le dialogue, la tolérance, la multipolarité. L'espace méditerranéen, pour des raisons historiques, est devenu le lieu de ces affrontements et l'épicentre de conflits mondiaux. L'espace euro-méditerranéen, multi-culturel et pourtant homogène, fait partie du patrimoine anthropologique et ethnologique de l'Humanité. Il est la source des énergies qui traversent et orientent le monde d'aujourd'hui. Il doit être préservé dans sa spécificité. C'est pourquoi l'imbrication géographique et historique qui caractérise l'espace euro-méditerranéen pose un défi majeur à l'Union européenne comme à la zone méditerranéenne. Il ne s'agit pas en effet de pratiquer une politique d'aide au développement de type caritatif, mais bien de faire aboutir un processus original dont le degré d'efficacité, la réussite ou l'échec, auront des conséquences directes sur la vie des Européens eux-mêmes. La France qui dispose d'une grande crédibilité auprès des peuples comme des dirigeants de la rive sud de la Méditerranée et de son expérience de membre fondateur de l'Union européenne a un rôle majeur à jouer pour faire progresser le Processus de Barcelone. Par sa position géographique et son histoire, elle connaît l'importance des liens avec ses partenaires de la rive sud de la Méditerranée ; elle est l'un des pays membres de l'Union européenne les mieux à même de plaider la cause d'une avancée du Processus de Barcelone auprès de ses partenaires du nord comme du sud. La mission d'information a tenté de cerner les enjeux d'une politique méditerranéenne de l'Union européenne, dans leur complexité et leur diversité. Pour ce faire, elle a entendu de nombreux experts universitaires, hauts fonctionnaires et responsables politiques. Quatre de ses membres se sont rendus le 25 mars 2003 à Bruxelles. Trois d'entre eux ont effectué un déplacement au Maroc, en Algérie et en Tunisie du 23 au 27 juin 2003. I - ENJEUX ET PROBLÉMATIQUES D'UNE POLITIQUE MÉDITERRANÉENNE DE L'UNION EUROPÉENNE L'évolution actuelle de l'espace méditerranéen est porteuse de défis majeurs que l'Union européenne se doit de relever pour arriver à créer une zone d'échanges et de dialogues privilégiés à tous les niveaux. Les enjeux sont multiples, sécuritaires certes, mais aussi sociologiques, démographiques et culturels. La politique de l'Union doit tenir leur histoire, leur culture et le volume de leurs échanges, ancrés dans l'espace méditerranéen. a) Un territoire marqué par le cloisonnement et la confrontation Les différences frappantes en termes de structures politiques et sociales entre les deux rives de la Méditerranée résonnent comme un écho de la vieille théorie des climats, reprise par Montesquieu : « Il ne faut donc pas être étonné que la lâcheté des peuples des climats chauds les ait presque toujours rendus esclaves et que le courage des peuples des climats froids les ait maintenus libres ». Telle paraît être parfois la position de certains pays d'Europe du Nord, oublieux de ce qu'ils doivent à la civilisation méditerranéenne. Cette théorie visait d'ailleurs autant la rive Sud de la Méditerranée que la rive Nord et stigmatisait aussi les autres continents. Mais qui peut croire à un déterminisme climatique au regard de l'évolution politique, économique et sociale de l'Espagne ou de la Grèce après leur entrée dans l'Union ? Le fort attachement identitaire des partenaires du Sud rendait difficile a priori la mise en œuvre d'un espace d'échanges fondé sur des racines communes euro-méditerranéennes, c'est-à-dire non-confessionnelles, que certains spécialistes qualifient « d'assez mythiques, sauf à remonter à la période romaine ». Ce serait oublier la réalité de ces liens. S'agissant de la France, il faut se souvenir qu'une chaire d'Arabe a existé au Collège royal créé par François 1er et que, depuis Louis XIII, de nombreux textes relatifs à l'Islam ont été écrits en langue française, formant un corpus impressionnant. Il existe des dizaines de milliers de titres d'ouvrages en français sur l'Islam. La France compte actuellement deux ou trois cents chercheurs sur l'Islam. Comment d'ailleurs s'en étonner tant l'héritage d'Averroès ou d'Avicenne a contribué à la formation de l'identité européenne ? Les bases du Processus euro-méditerranéen restent fragiles pour des raisons historiques. En effet, alors qu'un certain réformisme libéral avait prévalu dans le monde musulman depuis la fin du XIXème siècle, le dernier tiers du XXème siècle a consacré la victoire du nationalisme autoritaire et unanimiste. Cette rupture a généré une certaine difficulté à s'ouvrir pour mieux se développer et une culture du ressentiment qui paralyse tout progrès. Ont ainsi été en grande partie bannies de la rive Sud de la Méditerranée les références aux théologiens du XIXème siècle qui voulaient moderniser l'Islam, autour de 1860. Les principes démocratiques ont d'ailleurs été utilisés à cette époque et dans la première moitié du XXème siècle dans le monde arabe pour lutter contre le despotisme. Le courant réformateur des années 1860 a fait appel à ces 1967 ont permis à l'Arabie Saoudite d'occuper le terrain. Le mot d'ordre « moderniser l'Islam » a été remplacé par celui de « islamiser la modernité ». Or le wahhabisme n'est qu'une interprétation de l'Islam. Elle est réductrice mais permet d'autant plus aisément d'utiliser certains passages du Coran qui prônent la violence comme d'autres intégrismes se sont appuyés sur certains passages de l'ancien et du nouveau testament. b) Une ambivalence à l'égard de l'Europe Le tournant de cette « réclusion identitaire » coïncide avec la fin de la période coloniale, qui a « transformé le clanisme traditionnel en un sentiment d'appartenance collective » plus vaste, conçu sur le modèle occidental mais aussi contre lui. La première perception des peuples du Sud à l'égard de l'Union européenne est celle d'une réussite au regard des chances de vie matérielle qu'elle offre. L'idée de l'Union européenne leur apparaît comme économiquement légitime. Du reste, la plupart d'entre eux, et en particulier ceux du Maghreb, sont très attachés à la liberté de circulation et aux perspectives professionnelles qui en découlent. Pour certaines élites, l'Union européenne représente le seul espoir de réussite matérielle. Le désir d'émigration en Europe étant plus fort qu'il y a trente ans, la critique de la « forteresse Europe » est confortée par les difficultés d'obtention de visas d'entrée dans l'espace Schengen. Sur le plan culturel, les opinions publiques sont partagées. La majorité de la population a une vision culturellement positive de l'Europe. Les régimes démocratiques de l'Union européenne sont perçus de la même façon ; les opinions publiques sont souvent très au courant de la vie politique des pays membres avec lesquels elles ont le plus de liens. Ainsi, l'Algérie et la Tunisie s'intéressent à la vie politique française ; le Maroc à la vie politique française et espagnole ; la Turquie à la vie politique allemande. Mais si, culturellement, l'attractivité de l'Europe est forte, une minorité perçoit l'Europe comme le lieu où les Musulmans n'ont pas leur place, sont méprisés. Cette minorité voit l'Europe comme une entité qui la repousse, ravivant ainsi les effets de la colonisation alors que la plupart ne l'ont pas connue, la décolonisation ayant commencé il y a plus de cinquante ans dans certains pays du Sud. On constate actuellement une certaine ambiguïté, dans les relations entre les deux rives de la Méditerranée : les opinions publiques du Sud ont ainsi une vision globalement positive et une bonne connaissance de l'Union européenne, mais pour une large part elles craignent que celle-ci ne s'intéresse pas vraiment au monde musulman, jusqu'à faire preuve de dédain voire d'iniquité à son égard. De son côté, l'Europe en est trop souvent restée à une relation de centre à périphérie, avec la permanence de déséquilibres : produits bruts et ag stabilité s'est-il rapidement heurté à des obstacles restés pour l'heure insurmontables : indépendamment des limitations croissantes à la capacité d'engagement des pays tiers méditerranéens, les débats sur la Charte ont rapidement fait apparaître deux divergences fondamentales dans l'appréhension des questions de sécurité entre l'Union européenne et les pays du Sud. La première portait sur la conception même du projet et sa finalité. Les pays du Sud insistaient pour que la Charte repose sur une approche élargie de la sécurité, incluant les aspects politiques, économiques, humains et culturels. Au départ assez éloignés de cette idée, qui différait beaucoup de leur conception traditionnelle de la sécurité, les Européens ont fini par en admettre la validité. D'ailleurs, cette évolution a été facilitée par les cinq Etats méditerranéens de l'Union européenne, qui ont adopté une déclaration allant dans ce sens dans le cadre informel et plus restreint du Forum Méditerranéen, à Palma de Majorque, en mars 1998. Elle avait été confirmée, au sein du Partenariat euro-méditerranée, lors de la conférence de Barcelone III (Stuttgart en 1999). Ces divergences sont sous-tendues par un autre élément, plus essentiel encore : la défiance des pays du Sud envers toute politique de sécurité de type « politique européenne de sécurité et de défense » (PESD) stricto sensu perçue fondamentalement et avant tout comme une menace potentielle. c) Une ligne de contact entre les mondes chrétien et musulman Depuis quatorze siècles, la Méditerranée constitue la ligne de contact entre les mondes chrétien et musulman, sinon le lieu de leur confrontation. Dès lors, l'Union européenne comme communauté politique y est appréhendée de façon ambivalente. L'ancienne puissance colonisatrice et chrétienne est perçue comme tendanciellement injuste à l'égard du monde musulman. L'idée que cette communauté politique rejette les pays de la rive Sud de la Méditerranée reste forte. Il en va de même du sentiment que l'Europe n'est pas équitable envers le monde musulman. Les attentes politiques, économiques et culturelles sont donc contradictoires. Aujourd'hui encore, à l'exception d'infimes territoires comme la « Turquie d'Europe » ou les enclaves espagnoles sur la côte marocaine, on constate une démarcation stricte entre d'une part les partenaires membres de l'Union européenne à majorité chrétienne, et d'autre part les pays « tiers » à majorité musulmane - Israël étant mis à part. L'Algérie est un exemple intéressant à cet égard, puisqu'après 130 ans de présence française, elle s'est construit une identité en puisant à la source arabo-musulmane. Or, ce dernier terme a pris une importance de plus en plus grande à mesure des désillusions liées à l'&eacu pieuse trouvent dans cette mouvance l'occasion de rassembler par-delà leur groupe social en enrôlant les pauvres, pour se débarrasser des régimes au pouvoir, qu'ils soient militaires, socialistes, monarchiques ou autres. Au Nord comme au Sud chacun reconnaît que l'Arabie Saoudite, par ses moyens financiers, ses écoles, ses médias, et notamment certains prêches diffusés par satellite, a essaimé partout le wahabbisme, l'école juridique et théologique la plus pauvre intellectuellement de toute l'histoire de l'Islam. Les carences diverses mais principalement économiques, ont aggravé le phénomène. L'effet ravageur des prêches diffusés par les télévisions (émis soit de la péninsule soit de Londres) touche l'ensemble de ceux qui disposent de chaînes par satellite, où qu'ils soient, et entraînent par exemple le revoilement des femmes, régression mal vécue dans des familles qui avaient lutté pour leur émancipation. Le dialogue entre les religions et entre les cultures devient d'autant plus urgent à mettre en œuvre que cette question s'est déplacée sur le continent européen lui-même, et qu'elle pèse lourd dans certains conflits aux racines très profondes. Elle entraîne un débat salutaire sur la laïcité. Pour certains experts et de nombreux interlocuteurs rencontrés lors du déplacement de la mission, tant en Tunisie qu'au Maroc et en Algérie, la question de l'Islam doit être traitée de façon approfondie mais sans naïveté en France. 2) La Méditerranée, zone d'insécurité a) Des conflits qui bloquent les évolutions La Méditerranée est l'espace où les civilisations se côtoient depuis longtemps, mais cette cohabitation ne s'est pas faite sans heurts, comme le prouve la longue histoire de tensions, voire de conflits, où le passé pèse lourd. Entre membres de l'Union européenne et pays tiers de la Méditerranée : Les tensions hispano-marocaines liées à des problèmes de fond comme la question de l'immigration clandestine ou la présence de deux enclaves espagnoles en terre maghrébine (Ceuta et Melilla), se manifestent régulièrement par des incidents autour de tel ou tel îlot désertique proche des côtes marocaines. En 2002 le cas de Persil avait défrayé la chronique. Des passes d'armes similaires entre la Grèce et la Turquie surviennent autour de rochers inhabités, renvoyant à des contentieux plus profonds comme la délimitation des eaux territoriales, et surtout la question de Chypre. Les troupes turques occupent le tiers nord-est de l'île depuis près de trente ans, ce qui constitue un abcès de fixation pesant sur le devenir des relations entre l'Union européenne et la Turquie, aggravé par la politique de colonisatio l'ampleur de l'impact de la question du Sahara occidental sur les relations inter-étatiques au sein du Maghreb arabe. Ce conflit, qui empoisonne la relation algéro-marocaine, empêche le développement de relations politiques, économiques ou culturelles entre ces deux pays. Lors de son déplacement en Algérie, en Tunisie et au Maroc, la délégation a pu constater que, sans solution équitable à cette question, il n'y avait aucune intégration régionale possible. Côté marocain comme algérien et tunisien, on reconnaît mezzo voce que ce conflit pèse bien plus lourd sur le développement de la zone que le conflit israélo-palestinien. La frontière entre le Maroc et l'Algérie est quasi close. Il n'y a pas de liaison aérienne entre les deux pays, etc. Le conflit au Proche-Orient est celui qui a le plus de retentissement dans la mesure où il ne se limite pas à la Terre Sainte mais a des répercussions directes sur l'ensemble des pays du Sud méditerranéen. La Déclaration de Barcelone a en effet posé à juste titre le principe de la séparation des deux processus, puisque le processus de paix relève d'un traitement et d'un cadre nettement distincts et qu'il implique, au surplus, des Etats non partenaires du Processus de Barcelone (notamment les Etats-Unis), de sorte que toute interférence entre les deux pourrait comporter de sérieux risques, pour l'un comme pour l'autre. Cette règle, qui était nécessaire, n'a pu empêcher que les vicissitudes du processus de paix, puis sa crise ouverte, n'aient des répercussions, certes indirectes mais à l'évidence très fortes, sur le dialogue euro-méditerranéen. Les Etats arabes étant conscients, de leur côté, de l'importance vitale que représente pour eux l'aide accordée par l'Union grâce aux crédits MEDA et aux accords d'association, la continuité du Processus de Barcelone a ainsi pu être préservée. La mise en œuvre du partenariat de Barcelone, ne peut avoir qu'une influence heureuse sur l'évolution de ce conflit. Le Processus de Barcelone est la seule enceinte régionale au sein de laquelle tous les protagonistes siègent ensemble. En réalité, on doit considérer que, par la globalité de sa démarche et la perspective à long terme qui est la sienne, le Processus de Barcelone s'est situé « au-delà du processus de paix », qu'il a précédé et consolidé en quelque sorte, en créant les conditions d'une stabilité durable dans l'ensemble de la Méditerranée, le Proche-Orient y compris. Cette constatation vaut aussi, bien entendu, pour ce qui concerne les autres conflits qui affectent la région (Chypre, Sahara, etc.), dont le partenariat euro-méditerranéen ne peut que conforter et hâter le règlement, même si, aux termes de la déclaration de Barcelone, il a été aussi décidé d'éviter, dans l'immédiat, toute interférence avec les processus de négociation. En d'autres termes, loin, comme on l'entend parfois, de condamner le Processus de Barcelone, l'existence de ces conflits et les risques qu'ils comportent pour la stabilité et le développement de la zone confirme, au contraire, la nécessité et la à Bruxelles, l'Union européenne a une carte majeure à jouer pour assurer la sécurité et le développement de la région. Après l'élargissement, c'est de la capacité de l'Union européenne à mettre en place des partenariats solides avec les voisins méditerranéens que dépendra la crédibilité de sa future politique étrangère. b) Les conséquences de l'extension du terrorisme La pauvreté et le désespoir social sont considérés par certains comme les meilleurs terreaux du terrorisme. Cette affirmation est loin d'avoir été vérifiée par des études récentes qui ont montré que les actes terroristes les plus meurtriers ont été commis par des individus éduqués, nés dans des milieux aisés et ayant largement accès à la modernité. Quoi qu'il en soit, dans l'immédiat, les actes terroristes appellent des mesures de sécurité, et ont donc tendance à renforcer les mesures policières de bien des régimes. Cet engrenage est d'autant plus dommageable que les terroristes s'attaquent en priorité aux pays, parties au Processus de Barcelone, les plus ouverts socialement et les plus modernes économiquement : la Tunisie, avec l'attentat de Djerba (le 11 avril 2003), le Maroc, frappé à Casablanca le 13 mai 2003, et depuis longtemps l'Algérie, dont la société civile résiste. Ces Etats sont considérés par les islamistes comme « apostats » et compromis avec l'Occident, d'où une stratégie nihiliste visant à anéantir les efforts de ces régimes vers une libéralisation, afin de les conduire dans une impasse où l'intégrisme religieux serait le seul recours d'une population aux abois. c) Une démographie mal maîtrisée On constate avec une certaine surprise rétrospective que les questions de population dans la zone couverte par le Processus de Barcelone n'ont jamais fait l'objet d'études circonstanciées, et ce, jusqu'à une date très récente. Or, elles constituent un enjeu majeur pour le devenir de l'espace méditerranéen, avec la permanence d'un décalage très important entre la rive nord et la rive sud. Les taux de fécondité ont commencé à s'effondrer dès le milieu des années 60 dans certains pays du Sud de l'Europe (France, Yougoslavie). Cette évolution s'est poursuivie dix ans plus tard, au lendemain de la chute des dictatures en Grèce (1973) au Portugal (1974) et en Espagne (1975). Dans ces pays, la chute fut d'autant plus brutale que la fécondité était vécue comme une contrainte. C'est dans ces pays que le taux est aujourd'hui encore le plus faible, aux alentours de 1,2 enfant par femme en âge d'être féconde. Ce taux, partagé par l'Italie et l'Allemagne, est particulièrement alarmant, étant donné que le strict remplacement des générations nécessiterait un taux à 2,1 et que ces populations déc constatent une réelle chute de fécondité dans les pays de la rive sud. En effet, les comportements démographiques sont des comportements d'imitation, et la référence dans les pays du sud est celle des jeunes des pays développés. Tous les pays du Sud de la Méditerranée ont connu une baisse du taux de fécondité : de 4 enfants par femme en 1950 à 2,3 en moyenne en 2000. La tendance est à la baisse. Celle des Territoires palestiniens reste la plus élevée avec six enfants (mais elle était à 8). L'espérance de vie à la naissance s'élève pour les pays du Nord et du Nord-Ouest à 77-78 ans (14 ans de plus qu'en 1950), pour le groupe des pays intermédiaires à 65-70 ans, comme la Tunisie : 69 ans, et pour l'Algérie à 59 ans. D'après les experts, l'évolution démographique des pays de la rive Sud présente de lourdes incertitudes même si on y constate une baisse de la fécondité. Il est probable que la croissance démographique se poursuive au Sud et à l'Est ; or, là où la croissance démographique est trop forte, il y a une volonté de partir. Le différentiel de croissance démographique nord-sud risque de perdurer, et il est considérable. Les pays du Sud seront confrontés à un très grave problème lorsque les populations jeunes et nombreuses actuelles vieilliront. La population jeune de ces Etats, bien que qualifiée, vit massivement dans la pauvreté, ne crée donc pas de richesse et deviendra une population âgée nombreuse (à espérance de vie plus haute) qui n'aura pas accumulé de richesses, dans un pays qui n'aura pas constitué de réserves. Ces pays ne peuvent aujourd'hui encore anticiper ce problème. Les structures familiales ont tendance à éclater, les jeunes adultes brisent les réseaux familiaux pour partir en ville, laissant souvent seuls les parents très âgés des familles rurales. Cette urbanisation n'est pas un accélérateur de développement comme elle l'a été en Europe. Au contraire, elle peut se traduire par une paupérisation dans les bidonvilles. Les élites doivent donc s'efforcer de réduire le chômage en anticipant dès aujourd'hui le problème du vieillissement. Il faut répondre à la question : l'immigration est-elle un leurre ou une réelle solution ? Il s'agit d'un leurre pour les pays d'arrivée, car ces pays n'ont pas de réel problème de main d'œuvre. La France compte 27 millions d'actifs dont 23 seulement sont occupés. La baisse démographique actuelle n'engendre aucune pénurie de main d'œuvre. Cette situation comporte des risques d'instabilité considérables, tenant notamment au fait que ces populations jeunes et nombreuses vivent dans des sociétés à bien des égards bloquées. d) Des régimes politiques souvent autoritaires sont productifs. Des évolutions vers la démocratie sont à l'œuvre. L'Islam a-t-il un lien avec cette situation ? Au départ, l'Islam construit un système de pouvoir très inefficient, puisqu'il considère que le détenteur du pouvoir légitime est celui qui a été révélé et reconnu comme le meilleur des musulmans. Cependant après le Quatrième Calife, celui qui a pris le pouvoir a été celui qui avait la plus grosse armée et qui a imposé une succession dynastique, pas du tout prévue par les textes. Pour légitimer son pouvoir, il était nécessaire d'obtenir la caution des religieux, d'autant que ce pouvoir est toujours en manque de légitimité, laquelle a eu un prix. Il a fallu développer la ferveur religieuse, multiplier les mosquées, imposer l'éducation religieuse obligatoire, éliminer les laïcs de tous les pouvoirs publics. Ce problème se pose de la même façon dans tout le Moyen-Orient. Si l'un de ces gouvernements était issu d'une élection démocratique sans légitimation religieuse, ce serait la sécularisation de la religion, qui passerait dans le domaine privé, comme cela semble être le cas en Turquie où, paradoxalement, le mouvement islamiste a très vite évolué vers un mouvement plus modéré qui entérine le discours démocratique. Indéniablement, c'est donc la démocratisation qui permet la sécularisation du religieux, mais cette démocratisation n'est possible que si les régimes acceptent d'élargir leur base sociale, de mettre en œuvre une rotation des élites. L'immobilisme structurel qui en résulte empêche toute méritocratie et, partant, toute innovation et tout développement véritable de la part des éléments les plus dynamiques, qui sont dès lors poussés à partir. Les membres de la société civile, notamment les responsables économiques rencontrés lors du déplacement de la mission en sont très conscients. 3) Des obstacles structurels au développement du Sud Le premier rapport du programme des Nations unies pour le développement (PNUD) sur le développement dans le monde arabe effectué par des chercheurs arabes en juillet 2002 a dressé un tableau sans concession des obstacles structurels au développement de la zone. Il a constaté que les Etats de cette région avaient enregistré les niveaux de liberté et d'émancipation des femmes les plus bas du monde à la fin des années quatre vingt dix. Il a déploré le taux élevé d'analphabétisme et les déficiences du système éducatif. A partir d'une série d'indicateurs sur les différents aspects du processus politique, des libertés civiles, des droits politiques et de l'indépendance des médias, le PNUD établit que le monde arabe vient en dernière place, derrière toutes les autres régions du monde. Ce bas niveau de liberté est confirmé par un autre indice. La région arabe enregistre aus rapport de 2002, estime que le monde arabe est à un carrefour de son histoire. Le choix fondamental consiste à savoir si son parcours restera dominé par la torpeur, comme le laisse croire le contexte institutionnel actuel, et par des politiques inefficaces ou bien si les perspectives d'une renaissance arabe, liées au développement, seront activement recherchées. Aussi le deuxième et très récent rapport du PNUD établi en collaboration avec le Fonds arabe pour le développement économique et publié le 20 octobre 2003 par les chercheurs arabes propose-t-il une stratégie de développement. La grande diffusion de ce rapport dans le monde arabe pourrait avoir des effets sur les politiques menées. a) Des règles de droit mal établies D'un Etat de droit incertain au vu de ses structures de pouvoir, découle une insécurité juridique qui dissuade les investisseurs, autochtones ou étrangers, de s'engager sur un terrain mouvant ou dans un cadre soumis à l'arbitraire. Fonction publique peu fiable, revirements législatifs ou réglementaires subits, droit à un procès équitable mal garanti, sont des imperfections qui n'épargnent pas l'Union européenne elle-même, ni a fortiori les pays tiers. Des efforts ont certes été accomplis notamment au Maroc et en Tunisie. Il reste que dans une grande partie des pays de la rive Sud, le système bancaire est défaillant, les règles de droit, notamment dans le droit des sociétés ou le droit de propriété, ne sont pas encore très clairement établies ; les procès sont longs, coûteux et aléatoires, conduisant à un découragement des autochtones eux-mêmes. La faiblesse du taux d'investissement des opérateurs locaux est chronique, car ils préfèrent investir leurs capitaux à l'étranger. Ces blocages sont connus de la classe politique et des opérateurs économiques qui s'efforcent de progresser, mais une défiance vis-à-vis de l'Etat est perceptible dans la plupart de ces pays. Ainsi, les institutions ne sont pas au niveau de performance de celles des pays d'Europe centrale et orientale. L'étude réalisée par le PNUD montre les effets de l'inaptitude et de la défaillance des institutions. Il faut par exemple, pour espérer travailler, être au plus près des proches du pouvoir politique tels les parlementaires, les médias, les associations et la société civile. Il existe dans ces pays une crainte viscérale chez les autorités de perdre au change en cas de réformes. Souvent, les réformes ne se font que sous la pression de l'extérieur. Dans certains pays comme l'Algérie, la présence de richesses naturelles comme le pétrole a contribué à différer les choix et les réformes, la rente pétrolière permettant de pallier les carences sociales. Le processus démocratique et réformateur a été arrêté par la lutte contre l'islamisme mais aussi par la volonté d'afficher une résistance nationale et identitaire contre l'impérialisme. A cet égard, les comporteme susceptibles de produire des résultats en termes de croissance. Face à ce blocage structurel, la Banque mondiale ou l'Union européenne s'efforcent d'obtenir des inflexions par la négociation et les conditionnalités imposées à l'aide fournie. Toutefois, le développement de la croissance est différent selon les pays. La Tunisie connaît une croissance qui la place parmi les meilleures mondiales. La Syrie est en dernière position. L'Algérie, comme grand pays pétrolier en proie à la crise, occupe une place à part. Ces pays ont des caractéristiques communes : une trop grande stabilité politique, des systèmes économiques conservateurs qui les ont parfois conduits à des erreurs macro-économiques, le handicap des zones arides, une démographie encore forte. Leur atout est la proximité d'un grand marché. Ils détiennent un fort potentiel de croissance très inégalement réalisé. La Commission européenne comme la Banque mondiale tentent de peser sur les facteurs environnementaux pour débloquer la croissance, laquelle peut être déclenchée par l'amélioration d'un seul facteur. Certains problèmes propres à la région même ne sont pas liés à la conjoncture mondiale. L'un des obstacles est l'absence de commerce intra-régional. Les pays de la Méditerranée ont des échanges avec l'Amérique et avec l'Europe. Certains produits pourraient faire l'objet d'échanges entre eux mais de trop nombreux obstacles, notamment douaniers, s'y opposent encore. Des plans d'action remarquables sont élaborés, mais l'action ne suit pas. La réflexion doit les aider à décider de ce qui peut être profitable à leur développement et de ce qui serait nocif. Il faut favoriser certaines spécialisations (développer les centres de communications à distance). De plus en plus d'interlocuteurs comprennent cependant que les principes de transparence et de participation sont universels et ne doivent pas être rejetés. A défaut, attentisme et paralysie pérennisent les blocages. La question cruciale des subventions agricoles devra évoluer. Déjà ces pays se sont organisés pour défendre leurs intérêts dans les négociations internationales, comme l'a montré l'échec de la récente réunion de Cancun. Par ailleurs, un problème de fond demeure : celui de la mainmise directe ou indirecte, qu'exerce bien souvent l'Etat sur des pans entiers de l'économie, notamment les plus productifs. Certains pays vivent ainsi de rentes durables et faciles, mais sans en profiter pour engager de vraies réformes de leur économie. La rente pétrolière et gazière est un véritable frein à leur développement. La fixité des élites et des milieux proches du pouvoir entraîne un conservatisme structurel des décideurs, qui aboutit fréquemment à des erreurs macro-économiques comme par exemple des taux de change inadaptés qui handicapent durablement le développement de ces pays. Celui-ci passe en effet par une relance des Investissements directs étrangers (IDE) et des investissements locaux. La coopération décentralis&eacut diversifiée. c) Des politiques d'éducation insuffisantes Les pays où l'Etat ne respecte pas le droit sont aussi ceux où la société civile, le secteur privé, les professions libérales et indépendantes du pouvoir sont insuffisamment développées. Or, les spécialistes s'accordent sur le fait qu'il existe une corrélation entre le niveau d'analphabétisme, l'absence de classe moyenne et la faiblesse du tissu de PME-PMI. Ainsi, le Maroc a encore 50% d'analphabétisme alors que le budget d'éducation est important. Une politique d'éducation n'est pas seulement une question de budget, mais nécessite une orientation pertinente des fonds et une surveillance de leur utilisation. Ainsi, bien souvent, la situation est marquée par une insuffisance en termes d'infrastructures de base, mais aussi de gestion des personnels, avec un absentéisme important des enseignants eux-mêmes. Beaucoup reste donc à faire, sur les plans tant quantitatif que qualitatif, mais il est vital de persévérer, dans la mesure où l'éducation détermine tous les autres aspects de la société. Elle commande toutes les problématiques au niveau du développement, notamment sur le plan économique. A cet égard, le PNUD propose une stratégie fondée sur les cinq piliers d'une société arabe du savoir : garantie des libertés fondamentales d'opinion, d'expression et de regroupement, grâce à une bonne gouvernance régie par la loi ; diffusion d'une éducation de qualité, surtout pour l'enseignement de base ; encouragement de la science, généralisation de la recherche et du développement, et accompagnement de la révolution informatique ; passage rapide vers une production à valeur ajoutée fondée sur la connaissance. Enfin, développement d'un modèle arabe du savoir authentique, tolérant et éclairé, ce qui suppose une religion libérée de l'exploitation politique. Le volet politique du Processus de Barcelone s'efforce de traiter cette question. D'après les deux rapports précités du PNUD sur le développement dans le monde arabe, cette évolution s'est plus d'une fois traduite par une forme de censure dans les domaines-clés de l'ouverture au monde. La faiblesse de la presse y est notable : 53 journaux pour 1000 habitants sont publiés chaque jour dans la région contre 285 pour 1000 habitants dans les pays industrialisés. Dans la plupart des pays arabes, la presse évolue dans un climat de fortes restrictions de liberté d'expression : journaux fermés, perquisitionnés, saisis ou suspendus. Les journalistes s'y exposent à des arrestations et sanctions pour délit d'opinion. L'accès à Internet subit quant à lui des restrictions dues au simple fait du manque d'ordinateurs. On compte 18 ordinateurs dans le monde arabe pour 1000 habitants (contre 78 pour 1000 dans les pays industrialisés). Le taux d'utilisation d'Internet est l'un des plus faibles du monde. Le nombre d'utilisateurs a augmenté de 60% entre 2 publient que 1% des livres parmi lesquels de nombreux ouvrages religieux qui représentent 17% de la production littéraire contre 5% dans le reste du monde. Cela ne peut que contribuer à maintenir les femmes dans une position traditionnelle d'infériorité les empêchant de participer au développement de leur pays. Aussi l'arrimage à l'Union européenne constitue-t-il un facteur vital pour les économies et les sociétés des pays du sud. Le Processus de Barcelone y fait souffler un vent de liberté et de dynamisme dont ils ont profondément besoin. Cet arrimage est aussi un impératif pour l'Europe, qui ne saurait se contenter de s'ériger en forteresse pour contenir l'arrivée de populations chassées par la nécessité. Un renforcement de l'alliance entre les deux pôles de la Méditerranée est donc nécessaire, particulièrement en ces temps de mutation profonde de l'Union européenne. Il est ardemment souhaité par les trois pays du Maghreb que la mission a visités. B - Les relations avec les voisins du Sud de la Méditerranée : un enjeu pour l'Europe élargie 1) Un élargissement perçu comme un retrait par le Sud a) Une Union européenne centrée sur son élargissement, ses limites géographiques et ses futures institutions De nombreuses voix s'élèvent, et parmi elles celles d'intellectuels et de personnalités politiques de premier plan, pour s'inquiéter des conséquences qu'auront sur le Processus de Barcelone les nouvelles priorités de l'Union européenne. L'exigence de redéfinition des modalités institutionnelles du « vivre-ensemble » européen est commandée par l'entrée dans l'Union en 2004, de dix nouveaux pays. L'adhésion de ces Etats, en quelque sorte inscrite dans les « gènes » du projet européen, ne se fera pas sans un effort conséquent sur le plan économique. Les nouveaux entrants, se situant pour la plupart très en deçà de la moyenne du niveau de vie communautaire, vont mobiliser une grande partie des systèmes d'aides européens au détriment des pays méditerranéens de l'Union. Par ailleurs, cela constitue autant de temps perdu pour le Processus euro-méditerranéen. Le terme de « deuxième priorité » dont l'affuble la Commission sonne cruellement aux oreilles des partenaires du Sud, tout à fait conscients de l'être. Tous les interlocuteurs de la mission ont déploré le manque d'intérêt pour la rive Sud de la Méditerranée : lorsque l'Union européenne investit neuf euros pour les futurs entrants, voire les pays de l'ex Yougoslavie, elle n'en investit qu'un pour la rive Sud. Certes, ce problème n'est pas nouveau : les ambitions exprimées à Barcelone en 1995 on volonté politique, particulièrement sensible de la part des pays du nord de l'Europe, c'est-à-dire de ceux qui n'ont ni façade méditerranéenne ni d'intérêts dans la région. Or ils sont majoritaires au sein de l'Union et en sont les principaux contributeurs. Il est frappant de constater que malgré l'importance de l'immigration turque et maghrébine, y compris dans certains pays du Nord de l'Union européenne, ceux-ci ne prennent en compte que leurs voisins immédiats, prisonniers qu'ils sont de leur histoire et de la géographie. La Finlande et la Suède sont prêtes à aider les Etats baltes, l'Allemagne à faire un effort particulier à l'égard des nouveaux entrants situés à ses frontières, la Grèce et l'Italie se préoccupent des Balkans autant si ce n'est plus que de la rive Sud. Il ne faut donc pas s'étonner que le constat d'une Union européenne sans politique étrangère et uniquement préoccupée d'elle-même devienne une sorte de credo dans les pays du Sud qui en font la principale cause de leur propre incapacité à répondre au Processus de Barcelone. La mission a constaté lors de son déplacement que les responsables et la société civile des pays du Sud de la Méditerranée attendent dialogue politique et considération avec plus d'impatience que les investissements. b) Un manque d'intérêt et de compréhension Le peu de cas fait des pays du sud de la Méditerranée, traités comme quantité négligeable au regard de leur seul poids économique, ne peut aboutir qu'à une mauvaise appréhension des enjeux qui s'y rattachent. Il faut se méfier en particulier de la tendance la plus courante qui consiste à appliquer à ces Etats une grille de lecture spécifiquement européenne, empreinte d'une rationalité appauvrissante. L'ensemble des spécialistes préconise de ne pas se poser en donneur de leçons, mais au contraire d'être à l'écoute des spécificités propres à chaque culture, ce qui permettrait d'être d'autant plus exigeant sur le respect des valeurs qui doivent être communes. Rien ne sert d'imposer des principes universels par « paquets » de façon trop abrupte. Cela ne peut qu'être contre-productif, dans la mesure où ce serait perçu comme un rappel des anciens rapports de domination et aurait pour seul résultat le rejet en bloc d'un impérialisme culturel trop arrogant. Parce qu'elle est en position de force et qu'elle fixe elle-même les conditions de son aide aux pays méditerranéens, c'est bien à l'Union européenne qu'incombe le devoir de se demander dans quelle mesure les principes qu'elle proclame universels ne sont pas en réalité le fruit d'une expérience historique donnée, non transposables à l'identique. La grille de lecture européenne ne permet pas de comprendre le paradoxe qui voit se juxtaposer, dans certains de ces pays, une grande modernité socio-économique et un manque de vraie liberté politique ou à l'inverse une certaine liberté politique et un manque de modernité économique. œuvre de relations plus larges et plus profondes avec les partenaires méditerranéens. Elaborés sur l'ancienne formule des accords de coopération des années soixante dix, les accords d'association prévoient l'institutionnalisation d'un dialogue politique et économique, la création d'un espace de libre-échange, une coopération sociale et culturelle et une coopération financière, notamment au travers du programme MEDA. Au niveau bilatéral, les accords d'association forment ainsi le cadre stratégique de la coopération. Pour autant, le Processus de Barcelone ne se limite pas au cadre bilatéral, même si celui-ci utilise 90 % des fonds MEDA. L'ambition de l'ensemble est plus vaste et présente deux caractéristiques principales : la première est la complexité du dispositif institué, qui superpose deux cadres de relations et de coopération entre l'Union européenne et ses partenaires du Sud. Le cadre vertical plus ancien est constitué par les accords bilatéraux conclus avec chacun des pays méditerranéens. Ces accords sont désormais renégociés en tant qu'accords d'association et reprennent l'ensemble des éléments de la Déclaration de Barcelone. Le cadre nouveau est, quant à lui, fondé sur la coopération horizontale, régionale ou multilatérale instaurée entre les 27 partenaires. Sa mise en œuvre est essentielle pour donner corps à l'objectif qui vise à faire de la région un espace commun de paix et de prospérité partagée. Cet objectif est possible mais difficile à atteindre du fait de l'éventail des participants et des nombreuses tensions ou conflits qui subsistent dans la zone. Il est essentiel de bien mesurer l'étendue et la diversité des objectifs du Processus de Barcelone, qui couvre pratiquement tous les domaines des relations entre les Etats de l'Union et leurs 12 partenaires méditerranéens. Les trois volets de la Déclaration de Barcelone qui ont été repris du schéma de la CSCE ont représenté à bien des égards une sorte de compromis relativement exhaustif entre les objectifs proposés par l'Union européenne, à savoir la création en Méditerranée d'un « espace commun de paix et de stabilité » et d'une zone de libre échange à l'horizon 2010, et les demandes des pays méditerranéens concernant les engagements en matière d'aide et d'immigration. Une architecture aussi complexe et un contenu aussi vaste ne pouvaient pas ne pas avoir de conséquences sur le mode de fonctionnement et la mise en œuvre du Processus de Barcelone. Ainsi, l'existence de compétences et d'instances différentes du côté de l'Union européenne pour le traitement les divers domaines couverts par le Processus de Barcelone ne facilite pas sa mise en œuvre. Relèvent du 1er pilier de Maastricht les matières économiques et commerciales, du 2ème, le volet politique et de sécurité au titre de la Politique européenne de sécurité commune (PESC) et du 3ème le domaine de la Justice et des Affaires intérieures (JAI), et des secteurs encore peu couverts par le processus com 10pt">b) Une mise en œuvre décevante de part et d'autre Il faut tout d'abord souligner la lenteur du processus de ratification des accords d'association au gré des atermoiements des Etats de la rive Sud de la Méditerranée. Elle a engendré dès l'origine un retard considérable. Les documents transmis par le DREE qui figurent en annexe III en témoignent. Certains accords du reste ne sont toujours pas entrés en vigueur, tandis que la Syrie n'a même pas achevé les négociations préalables à leur signature. Les réticences des partenaires de la rive Sud à s'engager tiennent en partie aux réformes du Fonds MEDA. Celles-ci se sont d'abord traduites par l'abandon des protocoles financiers bilatéraux des anciens accords d'une durée de quatre ans au profit d'une enveloppe globale faisant désormais l'objet d'une répartition indicative annuelle entre les partenaires et décidée par l'Union en fonction de leurs performances. Cette réforme, qui allait à l'encontre d'habitudes solidement établies, a suscité des réticences, voire des blocages de la part des pays concernés, qui expliquent les retards de la renégociation de certains accords. Ultérieurement, cependant, ce sont surtout la complexité des nouvelles procédures adoptées et les lenteurs survenues dans le lancement des nouveaux programmes de coopération qui ont été à l'origine des critiques des pays de la rive Sud. C'est ainsi que, selon le bilan établi par la Commission européenne à la veille de la Conférence de Barcelone IV à Marseille en novembre 2000, sur un total de 3,435 milliards d'euros engagés pour l'ensemble de la période écoulée du programme MEDA I (1995-1999), 890 millions seulement avaient été décaissés, soit à peine 26 %. Ce pourcentage a été plus faible encore, avec une moyenne de l'ordre de 20 %, pour les paiements de la coopération bilatérale, en dépit de quelques exceptions (40 % pour la Tunisie et la Jordanie). On a évoqué la réticence générale des pays du Nord à s'engager au Sud. On pourrait aussi renverser la charge de la preuve et émettre l'hypothèse que ce manque de volonté ne fait que répondre au rythme trop lent des réformes du côté des pays méditerranéens du Sud. En fait, selon toute probabilité, ce mouvement est plus imputable à la prudence européenne envers les marchés émergents en général qu'à une désaffectation envers l'espace méditerranéen. La région peine donc à développer son attractivité même si les flux d'investissement étrangers y ont été encouragés par les progrès politiques des privatisations. Ils restent très concentrés sur la Turquie et Israël. Quant aux progrès globaux réalisés par la Tunisie et le Maroc, ils sont un argument de plus pour souligner que le développement des pays du Sud dépend d'abord d'eux-mêmes. Le poids des intérêts commerciaux et la protection européenne dans certains secteurs laissent à penser que l'Union eur part les Etats membres qui croient en une Europe politique, acteur à part entière des relations internationales, et d'autre part ceux pour qui l'Union européenne doit rester un grand marché inscrit dans une relation transatlantique forte. Les Etats-Unis ont une vision propre de la Méditerranée, caractérisée par un différentialisme opposé à l'universalisme européen, mis au service d'une stratégie de puissance qui vise à écarter tout rival sérieux dans la région. Le Processus de paix israélo-palestinien est le révélateur de perceptions profondément différentes entre Européens et Américains. En contre partie de leur soutien au Processus de paix israélo-palestinien, les Etats-Unis ont laissé carte blanche aux régimes arabes pour lutter contre leurs désordres internes. Le message américain va donc à l'encontre des attentes européennes formulées dans le premier volet de la déclaration de Barcelone. De plus, les Etats-Unis ont vu, dans le partenariat euro-méditerranéen, une concurrence à leur hégémonie tant à l'égard des Européens qu'à l'égard des pays arabes. Washington n'a eu de cesse de mettre en place d'autres programmes concurrents comme le Processus MENA couplant le développement économique et le respect des Accords d'Oslo. L'initiative Stuart E. Eizenstadt en direction du Maghreb, proposée en 1998, définissait la nouvelle vision américaine d'un « Maghreb à trois » (Tunisie, Algérie, Maroc). Elle visait la mise en place d'une concertation politique au plus haut niveau avec les dirigeants maghrébins, l'organisation d'un espace économique unique, intégré et cohérent favorisant les échanges avec le marché commun américain de l'ALENA (Etats-Unis, Canada, Mexique), et la promotion de partenariats commerciaux et financiers entre les entreprises privées des deux ensembles. Enfin, l'incapacité persistante des partenaires de la rive Sud à absorber des crédits demeure inquiétante. Cet euphémisme technocratique renvoie à un manque certain de projets crédibles en provenance de ces pays, par rapport aux fonds disponibles. En effet, le vice-président de la BEI, Francis Meyer, fait état d'un mandat officiel de 7,4 milliards d'euros accordé par l'Union européenne pour la période 2000-2006 sur la région, contre 8,5 milliards pour les pays d'Europe de l'Est. Il estime que les pays partenaires de la Méditerranée ne sont pas si mal traités. Les statistiques fournies par la Commission et figurant en annexe IV corroborent cette analyse. 3) Une politique méditerranéenne de l'Union souvent contradictoire a) Le dogme du libre-échange répond-il à la situation ? L'optique universaliste de l'Union européenne vise à responsabiliser les pays méditerranéens en y introduisant les standards internationaux. Le deuxième volet du processus s'inspire en effet d'une philosophie en rupture avec l'asymétrie qui prévalait jusqu'à présent et qui re domaine économique et social par la disparition des entreprises évincées par la concurrence européenne avec le chômage qui en résulte. Au niveau budgétaire, la réduction progressive des recettes douanières, part souvent essentielle des ressources des Etats, pèsera fortement. La fiscalité directe et l'introduction de la TVA seront probablement un substitut insuffisant au début. En Tunisie, au Maroc et en Algérie, ces problèmes ont été décrits de manière détaillée par les interlocuteurs de la mission. La Tunisie, dont l'économie est la plus performante, s'inquiète des effets pervers du respect scrupuleux, en matière économique, de l'accord d'association. Que gagnera-t-on en échange ? Telle est la question que se posent les responsables Marocains et Tunisiens favorables aux accords. En effet, certains pays méditerranéens connaissent déjà des difficultés budgétaires consécutives aux politiques d'ajustement structurel et à la charge excessive de l'amortissement de leur dette, même si le phénomène est aujourd'hui encore d'une ampleur limitée. Les dispositions des accords ont prévu, dans un premier temps, une asymétrie dans la mise en œuvre de la libéralisation des échanges. Mais il est probable que les difficultés financières pèseront de plus en plus fortement au cours des prochaines années. L'Union européenne devra se montrer particulièrement vigilante pour préserver la capacité de financement des services publics essentiels et les infrastructures des pays méditerranéens afin d'éviter l'effondrement de leurs économies. La mission a mesuré sur place l'impact du démantèlement douanier au niveau économique et social. Il commence déjà à être perceptible en Tunisie et au Maroc d'autant que l'intégration régionale ne se fait pas en raison du conflit sur le Sahara occidental. Le dogme du libre échange qui fonde le Processus de Barcelone ne saurait être conçu comme une fin en soi mais comme un instrument pour faciliter le développement et renforcer la coopération et la stabilité dans la zone. Il ne serait pas acceptable qu'il conduise, au contraire, à une déstabilisation des pays de la région et à un affaiblissement de leurs économies, surtout dans le contexte de l'après 11 septembre. Quoi qu'il en soit et sans que cela remette en cause l'objectif de création de la zone de libre-échange, les retards survenus dans la conclusion des accords conduiront à une modification de l'échéance symbolique de 2010 qui avait été initialement fixée pour sa réalisation. Certains experts européens semblent récuser cette approche défaitiste au profit d'une attitude clairement volontariste. Il faut absolument tenir ce cap et ce calendrier, c'est dans l'intérêt des partenaires de la rive Sud, tel est le langage tenu à la mission lors de son déplacement à Bruxelles. On ne saurait blâmer cet optimisme de façade qui pourtant ne se traduit pas par plus de flexibilité, de compréhension et de dialogue sur le terrain. Aussi le doute s'installe-t-il. La crainte qu'un double langage ne soit utilisé tant du côté de l'Union européenne que de ses partenaires du Sud n'est pas sans fondement. Sur le plan politique, la problématique des droits de l'Homme constitue le corpus des principes de Barcelone. L'insertion d'une cause de conditionnalité dans chacun des Accords d'association lui a conféré un poids supplémentaire. Or, dans ce domaine plus encore que dans les autres, rares ont été les avancées. La principale difficulté à laquelle se sont heurtées les institutions européennes fut de faire la part de ce qui revenait aux traditions et aux spécificités des sociétés méditerranéennes. Elles devaient être respectées dès lors qu'elles n'étaient pas un alibi pour masquer les atteintes aux droits de l'Homme. La seconde fut de ne pas s'ériger en donneur de leçon, d'autant que cela aurait été profondément contraire à la démarche de reconnaissance et de réciprocité culturelle dont le partenariat se réclamait. La pertinence de ces deux postulats fait encore débat. L'objectif du troisième volet de Barcelone était de développer la société civile afin d'en faire le relais des idées démocratiques et du credo européen selon lequel le développement de l'Etat de droit irait de pair avec le développement de la démocratie et de la prospérité. L'Union européenne a souhaité contourner les résistances institutionnelles et sociales en touchant directement les associations, les syndicats, le monde universitaire et les organisations non gouvernementales (ONG). Dans ce domaine, les Quinze se trouvent dans une situation diamétralement opposée à celle qu'ils ont connu pour l'Est de l'Europe. En effet, les deux programmes PHARE et TACIS qui ont accompagné les procédures d'adhésion en même temps que la transition vers la démocratie politique et l'économie de marché, appuyaient une réelle volonté de démocratisation de la part des anciens pays de l'Est en totale rupture avec leur passé communiste. A l'inverse, l'Union européenne doit soutenir, encourager et, dans certains cas même, susciter un mouvement vers la libéralisation dans les pays tiers méditerranéens. Cependant, l'Union européenne ne s'y est pas suffisamment engagée, et cela n'a pas été sans conséquences. Sur ce plan, l'Union n'a pas véritablement réussi. Tel est le diagnostic sans complaisance fait par les membres de la société civile rencontrés par la mission lors de son déplacement en Afrique du Nord. A l'affaiblissement du volontarisme européen a répondu la défiance des pays tiers méditerranéens. Même les régimes les plus ouverts aux propositions européennes (Maroc, Tunisie et Egypte) avaient conscience des conséquences éventuelles de la mise en place des volets un (politique et sécurité) et trois (culture et soci&ea sources principales de légitimité apparaissent dans les pays du Sud méditerranéen. Les dirigeants des pays arabo-musulmans sont légitimes quand ils ont su être les représentants du nationalisme et gagner la confiance de la population. Bourguiba, Boumediene, Nasser, Mohammed V, ont su symboliser cette légitimité. Dans le cas de Mohammed V, on voit se conjuguer la légitimité nationale et la légitimité religieuse, profondément ancrée dans les populations car bien plus ancienne. En ce qui concerne le statut de l'Islam, mis à part la Turquie, le Liban et la Syrie, l'Islam est la religion d'Etat. L'Algérie est une société de musulmans gouvernés par un Etat. Cela ne signifie pas que l'Etat doive mettre en œuvre la charia, au contraire. Pour certains, le fait que l'Islam soit la religion d'Etat permet de s'opposer aux islamistes. Quel est donc ce paradoxe qui veut que, dans ces pays, la liberté économique et sociale ne se fasse qu'au prix d'un verrouillage politique et religieux ? Est-ce d'ailleurs un paradoxe ? Pour les auteurs arabes du rapport du PNUD, la religion musulmane en tout cas ne s'oppose pas en soi au savoir, comme en témoigne la brillante civilisation qui fut celle du Moyen-Age. On peut néanmoins déplorer le fait que l'Histoire ait vu s'imposer des interprétations hostiles au développement et des alliances entre systèmes de gouvernement coercitifs et groupes de savants musulmans conservateurs qui ont produit des interprétations servant les intérêts des gouvernements mais hostiles au développement des individus. Face à ces paradoxes, deux attitudes sont possibles. La première : on incrimine les régimes forts et on rompt nettement avec eux, ce que demandent les opposants et les élites intellectuelles de ces pays, qui ne comprennent pas pourquoi l'Union européenne ne se montre pas plus exigeante avec des dirigeants qu'ils jugent corrompus. La deuxième : on considère, comme le fait la France, que ce serait là une forme idéologique et excessive d'universalisme, ne sachant pas faire la part des choses et aboutissant aux pires résultats c'est-à-dire à l'instabilité, au désordre, voire à l'apparition de mouvements terroristes plus hostiles encore à la démocratisation. Pour la France, il paraît plus opportun d'élaborer une hiérarchie des fins : dans un premier temps, éviter toute déstabilisation politique des pouvoirs forts menant une politique de progrès économique et social (Tunisie, Maroc) et faire le pari d'une dynamique pouvant déboucher, à terme, sur une libéralisation d'ensemble, en gardant toujours à l'esprit les leçons des ouvertures ratées, aux conséquences très graves : l'Iran en 1979, l'Algérie en 1992 et aujourd'hui l'Irak. b) Un déséquilibre croissant des échanges en faveur des pays de l'Est S'il est vrai que les pays européens se montent plus ouverts à l'Est qu'au Sud, cela semble moins être le fruit d'un préjugé défavorable que la conséquence d'une plus grande ouverture aux réformes des pays de l'ancien bloc soviétique, de Chypre et de Malte, dont la vocation commerc 10pt">Comme on l'a vu, si la baisse de la fécondité touche désormais les deux rives de la Méditerranée, le décalage est considérable entre le Nord et le Sud, et le restera longtemps encore. Un maintien dans la pauvreté pourrait induire la persistance d'un taux élevé de fécondité comme le montre le cas extrême des Territoires palestiniens. Le risque serait alors grand de connaître des flux migratoires incontrôlables. Ceux-ci ne résoudraient rien. Bien au contraire, si l'on observe par exemple le cas de la France, les besoins d'immigration ne s'y posent pas en termes quantitatifs mais qualitatifs. Il n'y a déjà pas suffisamment de travail pour les nationaux. Le problème est, plutôt que d'accueillir de nouveaux immigrés, de mettre en adéquation les postes de travail et la population en âge de travailler. Il existe sans doute des pénuries localisées ou sectorielles, comme dans le bâtiment ou le secteur informatique. Les pays de la rive Nord pourraient dans de tels cas faire appel à de la main d'œuvre du Sud, car les pénuries existent au même moment dans les mêmes secteurs. Pour l'instant cependant, les pays membres de l'Union européenne quand ils font appel, comme le Portugal, à de nouveaux immigrés se tournent vers les pays de l'Est comme l'Ukraine par exemple. Un contrôle de l'immigration s'imposera d'une façon ou d'une autre et ceci d'autant que le danger que les personnes les plus qualifiées émigrent, privant leur pays des compétences utiles à son développement, est réel. Une immigration de plus en plus pléthorique réduirait d'autant les chances d'intégration de ces mêmes immigrés, au profit de la constitution de contre-sociétés communautaires, reproduisant les comportements conflictuels des pays dont ils viennent, ou auxquels ils s'identifient. C'est déjà le cas en Allemagne entre des Turcs et des Kurdes, ou même en France à propos du conflit israélo-palestinien. Le pire serait la mainmise des intégristes religieux sur des populations marginalisées car déracinées et sans perspective réelle d'intégration. Pour beaucoup nous en sommes déjà là. En Tunisie, au Maroc et en Algérie, le thème de l'immigration a largement été abordé par les interlocuteurs de la mission. Il inquiète les dirigeants qui se demandent pourquoi leur jeunesse n'a qu'un rêve : partir vivre ailleurs. En même temps ces mêmes dirigeants brandissent l'immigration vers l'Union européenne comme une menace. « Aidez-nous à créer des emplois, investissez chez nous pour fixer les populations qui sinon seront tentées de partir ». 2) Le scénario du développement Au-delà d'une approche purement sécuritaire de l'immigration, le Processus de Barcelone permet de traiter le problème dans sa complexité. Plutôt que des sanctions à l'encontre des pays contrôlant mal leur population, la meilleure solution demeure un développement économique et social de la région. Dès lors, tout paraîtrait différent. Le Sud ne serait plus un monstre démographique menaç graves troubles politico-religieux des deux côtés de la Méditerranée, l'Union européenne doit prendre elle-même l'initiative de relancer le Processus euro-méditerranéen. Elle doit le faire en approfondissant le dialogue avec tous les acteurs et notamment avec ceux qui œuvrent le plus à une réelle ouverture, même si celle-ci n'est que partielle. C'est ainsi que naîtra une classe moyenne attachée aux libertés qui favorisera à terme l'évolution des régimes politiques. L'intérêt bien compris des Européens réside dans une relance du Processus de Barcelone, en favorisant les échanges verticaux et horizontaux. Le commerce Sud-Sud ne représente que 6% des échanges de ces pays alors que 51% de leurs exportations sont destinées à l'Union européenne. Il faut en outre échapper aux discussions purement politiques, souvent conflictuelles et stériles qui servent d'excuse à l'immobilisme de chacun, pour se concentrer sur les enjeux techniques répondant aux besoins de tous les partenaires. Le fonctionnalisme cher aux Pères fondateurs de l'Union européenne : des « réalisations concrètes créant d'abord une solidarité de fait »2, voilà une inspiration salutaire qui relèverait du « partage des meilleures pratiques ». II - PROMOUVOIR UNE NOUVELLE STRATÉGIE EN MÉDITERRANÉE L'Union européenne doit passer à l'égard de la zone méditerranéenne d'une politique velléitaire, technocratique et foisonnante à une stratégie volontariste, globale et différenciée avec pour objectif de créer une zone de paix, de stabilité et de prospérité respectant les souverainetés et les spécificités de chacun de ses partenaires. Il lui faut gérer des conflits plutôt que les nier et dissocier les exigences économiques des exigences politiques. A - Une approche volontariste, globale et différenciée L'Union européenne doit prendre l'initiative. C'est à elle de créer une dynamique qui entraînera les pays de la zone méditerranéenne. L'Union européenne devra prendre en compte l'unité de cette zone ainsi que sa diversité en utilisant des mécanismes qui, telles les poupées russes, s'emboîtent les uns dans les autres. La diversité des Etats partenaires et de leurs besoins propres doit se refléter dans des structures adaptées assurant un traitement différencié des problèmes, tout en maintenant une perspective d'ensemble liée à une certaine cohérence de l'espace méditerranéen. Le volontarisme doit, pour être efficace, se conjuguer avec un certain réalisme. Il faut assumer la région telle qu'elle est pour être en mesure d'influer sur son développement. A cet égard, la conférence ministérielle de Naples des 2-3 décembre, dite Barcelone VI, sous présidence italienne, s'est avérée décevante. Toutefois,
style="text-align: justify">Quelles sont les structures existantes et comment peuvent-elles évoluer ? Le fonctionnement du partenariat euro-méditerranéen repose sur un cadre institutionnel complexe dans lequel cohabitent un dispositif bilatéral, un dispositif multilatéral et une multitude d'enceintes régionales. Le dispositif bilatéral est constitué par les accords passés entre l'Union européenne et chacun de ses partenaires. Ce processus se compose d'un Conseil d'associations qui réunit chaque année les pays membres de l'Union européenne et le Ministre des Affaires étrangères concerné. Ce Conseil détient le pouvoir de décision. Un comité d'associations composé de fonctionnaires est chargé du suivi de l'accord d'association et de la préparation des réunions du conseil d'associations. Onze accords sur douze ont été signés, mais les ratifications sont trop lentes. Il faut en moyenne trois à quatre ans pour ratifier un accord, ce qui décale les calendriers prévus et l'échéance de l'instauration du libre-échange que ces accords prévoient, à savoir 2020 plutôt que 2010, compte tenu des retards pris. Toutefois, les accords « Chypre » et « Malte » sont englobés dans le processus d'adhésion à l'Union européenne ; la Turquie est dans une situation particulière du fait de son statut de candidat à l'Union ; enfin, l'accord avec Israël est très avancé, celui avec l'Autorité palestinienne fonctionne, les accords avec la Jordanie, le Maroc et la Tunisie sont entrés en vigueur. Le dispositif multilatéral, qui implique les 27 partenaires3 comporte trois éléments : - une réunion régulière des ministres des Affaires étrangères se tenant alternativement dans un pays européen ou dans un pays tiers méditerranéen. Après Barcelone en novembre 1995, se sont tenues les conférences de La Valette (mars 1997), Palerme (mars 1998), Stuttgart (mars 1999), Marseille (novembre 2000), - des réunions ministérielles thématiques, organisées à un rythme trimestriel et chargées de la mise en place dans les programmes régionaux correspondant à un champ de compétences précis (énergie, santé, environnement, transport, etc.), - le Comité Euromed, réunissant les 27 pays partenaires, auquel s'ajoutent la Troïka et des représentants de la Commission européenne, qui assure le suivi de la déclaration de Barcelone à l'échelon des hauts fonctionnaires. D'autres structures informelles complètent cette architecture (voir supra). Ce dispositif est trop complexe car il superpose deux cadres de relations et de coopération : celui des accords bilatéraux, conclus entre chacun des partenaires issus de l'Union européenne et désormais renégociés en tant qu'accord d'association, et un élément de coopération régionale ou multilatérale institué entre les 27
seul outil institutionnel ne saurait suffire à atteindre les objectifs formulés en 1995. C'est pourquoi le processus a vu, au fur et à mesure des années, le lancement ou la réactivation d'initiatives pilotes qui lui sont plus ou moins liées, tels le Forum ou le dialogue 5 + 5. Le Processus de Barcelone piétine. Or c'est le cadre le plus large de rencontres et de dialogues de l'ensemble des pays de la zone, y compris de ceux qui sont en conflit. En effet, c'est une des principales innovations du Processus que de faire dialoguer dans un cadre unique des pays qui parfois ne se parlent pas. Ce cadre a tenu bon car les pays sont attachés au réseau que constituent les accords d'association, lequel représente une aide importante. Restent en dehors des réunions, d'une part la Syrie et d'autre part le Liban, qui, même s'il est plus ouvert actuellement à la coopération, demeure encore très lié à la position de Damas. Il faut donner un nouveau souffle ou un nouvel élan au Processus de Barcelone, ce que la Conférence ministérielle de Naples n'a pas été en mesure de réaliser. En effet, ce seul outil institutionnel ne suffit pas pour atteindre les objectifs qu'il s'est donné. Il convient aujourd'hui de rationaliser ses différents instruments, afin d'obtenir une plus grande cohérence. Cette clarification institutionnelle doit déboucher sur une meilleure lisibilité du Processus. Des voix s'élèvent pour recommander un surcroît de communication sur le sujet auprès des opinions publiques, notamment celles des pays tiers qui pour l'instant n'ont aucune perception du phénomène et se sentent abandonnés par l'Union européenne élargie. La relance des structures du dialogue s'impose. a) Faire du Forum le laboratoire d'idées du Processus de Barcelone Le Forum a été créé en 1994, sur une initiative égyptienne reprise par la France, comme un cadre informel de dialogue politique entre Ministres des Affaires étrangères. Il compte onze membres depuis l'origine : les cinq pays de l'Union ayant une façade méditerranéenne ou assimilés (Portugal), un Etat intermédiaire, Malte, qui rejoindra l'Union en mai 2004, les trois pays du Maghreb (Algérie, Maroc, Tunisie), deux puissances proche-orientales, la Turquie et l'Egypte, cette dernière souffrant d'être exclue du dialogue 5 + 5. Ce Forum pourrait être une structure utile d'échanges dans la mesure où il reste informel. Des synergies peuvent s'y créer, car c'est aussi un espace de dialogue Sud-Sud utile au développement des relations politiques et économiques qui font souvent défaut. La mission a pu le constater lors de son déplacement. b) Créer une Banque euro-méditerranéenne de développement L'évolution économique de la région, condition sine qua non de son développement, est intimement liée à l'existence d'un instrument financier adapté. D'ailleurs, afin de donner une nouvelle impulsion à la croissance dans les pays partenaires m&eacut
lancée en octobre 2002. Le volume de financement de la BEI dans les pays MEDA devrait augmenter entre 2003 et 2006, pour atteindre une enveloppe de 7,5 milliards d'euros (contre 5,4 actuellement). Dans le cadre d'une coopération renforcée entre la BEI et la Commission européenne, le plan d'activité de la FEMIP établi par la BEI prévoit : la mise en œuvre des actions et initiatives telle que la poursuite du développement de l'activité de prêt standard dans la région en portant le montant annuel d'engagements à 2 milliards d'euros contre 1,4 milliard par an auparavant, la mise en œuvre d'activités complémentaires, axées sur le développement du secteur privé pour près de 1 milliard d'euros pour la période 2003-2006 et la création d'un Comité de coordination et de dialogue économique regroupant les représentants de tous les pays de la région et des grands organismes de développement, pour examiner les principales orientations de la FEMIP et la coordination de ses activités avec celles d'autres bailleurs de fonds. Le deuxième comité s'est réuni à Istanbul les 2 et 3 avril 2003. Le plan d'action de la Conférence ministérielle de Valence en avril 2002 a prévu qu'au terme de l'évaluation de la FEMIP, fixée à la fin de l'année 2003, la décision serait prise, soit de maintenir cette formule, soit d'opter pour la création d'une banque euro-méditerranéenne, filiale de la BEI. Lors de cette Conférence, la plupart des partenaires méditerranéens se sont montrés très favorables à ce projet qui suscite, en revanche, de fortes réticences de la part de l'Allemagne et des pays du nord. De façon générale, les ministères des finances des pays membres de l'Union et la BEI y sont réticents et font valoir que ce n'est pas l'insuffisance du niveau d'épargne qui explique la faiblesse de l'investissement privé mais un environnement défavorable aux entreprises privées, lié à des politiques macro-économiques restrictives, à des marchés de biens, du travail et des capitaux faiblement concurrentiels, ainsi qu'à une dynamique de la demande insuffisante. L'objection de nombre d'acteurs et de décideurs économiques porte sur le fait que la situation financière des Etats bénéficiaires devant contribuer au capital de la banque ne leur permet pas une participation suffisante. Ils objectent également qu'une telle création conduirait à une multiplicité d'acteurs dans le paysage financier sans que des besoins nouveaux puissent être comblés par les structures déjà existantes comme la Banque mondiale, la BEI ou la Banque Africaine de développement. Un compromis satisfaisant pourrait être trouvé avec la création d'une filiale régionale de la BEI ; ce nouvel instrument financier aurait été doté de 8 à 10 milliards d'euros pour les quatre années à venir, consacrés au soutien aux initiatives du secteur privé, au développement de produits financiers nouveaux et au financement du secteur bancaire local, pour l'octroi de prêts à long terme ou de crédit-bail aux PME. La constitution d'une institution financière régionale, dotée d'une véritable expertise en matière de transition économique et dont le capital serait ouvert exclusivement aux pays de l'Union européenne et de la Méditerranée (les premiers y gardant une majorité), d'une part pourrait répondre aux défaillances qualitatives du financement du secteur privé, d'autre part, constituerait un cadre partenarial et un espace d'apprentissage de la responsabilité partagée autour d'enjeux essentiellement économiques. Une banque serait contrainte de rendre compte de sa rentabilité à ses actionnaires, ce qui introduirait une plus grande rigueur dans l'évaluation alors que le dispositif MEDA n'est évalué qu'à l'aune du rythme de ses décaissements. Il conviendrait également que le nouvel instrument respecte bien le cadre institutionnel du Processus de Barcelone et que son capital ne soit pas ouvert à des pays tiers. Pour la mission d'information, la création d'une banque euro-méditerranéenne lors de la récente conférence ministérielle de Naples aurait constitué un signal fort à l'égard des pays tiers qui auraient eu le sentiment de bénéficier enfin des mêmes avantages et facilités financières que les pays de l'Est. Rien n'obligerait d'ailleurs tous les partenaires du Processus de Barcelone à y adhérer, le système de financement pouvant conserver une certaine souplesse. Ce n'est pas la solution qui a été retenue par cette Conférence qui s'est prononcée pour le renforcement de la FEMIP. Les ministres ont considéré que cette facilité, renforcée, constituerait un soutien adéquat au secteur privé car elle sera dotée de deux éléments complémentaires. Une enveloppe financière spéciale, qui pourra atteindre un milliard d'euros, et que les Quinze ont promis d'abonder jusqu'à 200 millions d'euros prélevés sur les réserves de la BEI, sera affectée aux opérations de partage des risques d'entreprise. Par ailleurs, la mise en place d'un fonds fiduciaire permettra à d'autres donateurs d'apporter des ressources complémentaires sur une base volontaire. Ce fonds pourrait bénéficier d'un budget de 20 à 30 millions d'euros, et interviendrait dans des secteurs prioritaires (eau, électricité, transport, ressources humaines). Les projets dans ces domaines seraient financés par le biais d'une participation au capital-risque. Il a été décidé d'améliorer le dialogue sur le processus de réformes structurelles pour un environnement plus favorable aux activités du secteur privé. Une rencontre annuelle au niveau des ministres des finances, préparée par un groupe d'experts de haut niveau, est envisagée. L'option consistant à créer une banque-filiale de la BEI sera examinée en décembre 2006, sur la base d'une évaluation de la FEMIP renforcée. Les conclusions adoptées par les Ministres à Naples soulignent l'importance d'un cadre macro-écono
ministérielle de Valence, le projet de Fondation euro-méditerranéenne pour le dialogue des cultures doit donner de la substance au volet culturel et humain du Processus de Barcelone, qui paraissait jusqu'alors quelque peu marginalisé. En effet, trois programmes seulement ont été lancés en cinq ans. Euromed Heritage pour la préservation du patrimoine culturel, matériel (monuments) et immatériel (musique et traditions) dotés d'un budget de 57 millions d'euros. Le programme jeunesse dispose d'un budget de 10 millions d'euros en phase I et de 14 millions d'euros en phase II. Ses trois axes sont les échanges de jeunes, la formation de travailleurs socio-éducatifs et les services volontaires. Jusqu'à présent, 500 projets sur 1000 présentés ont été retenus, le nombre de projets originaires de la rive Sud commençant à rattraper ceux de la rive Nord. Cependant, tous les partenaires du Sud se plaignent vivement des problèmes de visas rencontrés malgré le label de projet communautaire. La Commission souhaiterait une réflexion du côté des Etats membres pour y remédier. Le programme audiovisuel bénéficie d'un budget de 20 millions d'euros en phase I. Pendant cette phase, six projets en réseau ont été soutenus, avec un financement à 80 % MEDA. Les deux principaux projets sont « Europa cinéma » et « Medea ». « Europa cinéma » s'élève à 4,5 millions d'euros ; il apporte un soutien à la diffusion et des aides à des festivals au travers d'un réseau de salles au Nord et au Sud. La France en est le chef de file. « Medea » est doté de 4 millions d'euros et soutient le développement de films, avec pour chef de file l'Espagne. Les autres projets concernent la gestion des archives audiovisuelles, la co-production d'une série animée sur les héros de légende de la Méditerranée et l'appui à une série documentaire sur des femmes arabes d'exception. Des programmes régionaux sur le livre et la traduction, sur le spectacle vivant et la musique ont été annoncés voire décidés mais restent bloqués par les procédures communautaires. Dans ce contexte, la Fondation euro-méditerranéenne pour la culture représente un projet d'ensemble. Les questions liées à sa mise en œuvre revêtent de ce fait une importance toute particulière. Ces questions concernent la structure, le financement et l'emplacement de la future Fondation. Sur le fonctionnement de la structure, deux conceptions se sont d'abord affrontées : celle de l'Italie et celle de la Commission. L'Italie, proposait de confier l'essentiel du pouvoir de décision de la Fondation sur le budget et les orientations générales au réseau des institutions auquel incomberait la mise en œuvre des activités dans l'ensemble des pays partenaires. En revanche, le document de la Commission plaçait ce réseau sous l'autorité et le contrôle des Etats partenaires et de la Commission elle-même. Ce document comportait des propositions concernant la désignation du directeur exécutif et suggérait un financement parit
société civile, sur le principe des trois tiers. La question de la structure est étroitement liée à celle du financement de la Fondation. A l'inverse des pays nordiques qui sont les moins enthousiastes car les moins concernés, les Etats méditerranéens sont attachés au principe de la contribution de tous les partenaires, fût-elle symbolique, et demandent également que la dotation prélevée sur MEDA, actuellement de 5 millions d'euros, soit augmentée. La Commission a rappelé qu'une fois son financement assuré, la Fondation devrait tendre à terme vers l'autonomie financière. Des voix s'élèvent, comme celle du Maroc, pour s'étonner d'une telle sophistication dans la forme alors que manque le fond : quel contenu donner à cette Fondation, et quel cap lui fixer pour qu'elle dispose d'une vraie valeur ajoutée par rapport aux projets existants ? La Tunisie met en avant le rôle fondamental des sciences humaines, avec notamment l'histoire du Bassin méditerranéen depuis l'Antiquité, pour aboutir à un dialogue des civilisations, en profondeur, tandis que l'Algérie continue de récuser ce terme. Néanmoins, et c'est heureux, la création de la Fondation euro-méditerranéenne pour le dialogue des cultures et des civilisations a été actée par la Conférence ministérielle de Naples. Les conclusions adoptées par les ministres indiquent que la Fondation devra jouer le rôle de catalyseur d'initiatives visant à développer le dialogue et la compréhension mutuelle. Elle sera organisée sous la forme d'un ensemble de réseaux doté d'une structure administrative légère, afin d'établir un dialogue régulier, notamment entre des cercles culturels différents des forums diplomatiques et culturels officiels. Les Ministres n'ont pas défini les modalités de financement de la Fondation. Il est seulement précisé qu'il s'effectuera sur une base volontaire, mais les partenaires ont confirmé leur volonté de réussir son lancement et de lui consacrer des ressources financières adéquates. L'Union européenne a annoncé un apport de cinq millions d'euros et a souhaité que les Etats membres de l'Union et leurs partenaires apportent un financement similaire pour permettre le lancement de cette institution. Plusieurs Etats membres : la France, l'Italie, l'Espagne, la Grèce et l'Allemagne, ont promis une contribution dont la totalité pourrait s'élever à quatre millions d'euros. Les pays partenaires pourraient apporter un million d'euros. La question du siège de la Fondation est restée ouverte. Quatre villes sont candidates : Alexandrie, Rome, Nicosie et La Valette. La difficulté de mettre en place cette structure en a montré les enjeux comme la nécessité. La mission se félicite de la création de cette Fondation. En effet, il est vain de débattre de l'existence d'un patrimoine culturel commun aux deux rives de la Méditerranée sans se donner les moyens institutionnels et financiers de le faire vivre. Il sera ainsi admis qu'il n'y a pas deux blocs culturels qui se font face. Le Maghreb est pénétré de francophonie, d'influences multiculturelles, de même que
parlementaires du Processus. L'Assemblée parlementaire euro-méditerranéenne disposerait de la faculté d'adresser des avis, voire des recommandations aux organes ministériels. Elle pourrait fonctionner comme l'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). La plupart des pays, préférant rappeler le caractère intergouvernemental du Processus de Barcelone, se montrent prudents face à une telle initiative, notamment les pays du Sud, pour des raisons parfois contradictoires liées au faible développement du volet politique du Processus de Barcelone. Les avancées modestes du volet politique, la lenteur de la démocratisation des pays partenaires rendent problématique la représentativité des membres d'une telle instance. En effet, si l'on en croit les opposants politiques aux régimes en place dans nombre de pays partenaires, la participation, aux côtés de parlementaires issus d'élections libres, de parlementaires élus dans des conditions contestables telles que l'absence de pluralisme politique, les restrictions aux libertés publiques, les violations des droits de l'Homme, conférerait à ces derniers une légitimité dont ils ne disposent pas en réalité. Certains opposants et experts doutent de la valeur pédagogique d'une telle entreprise. En outre, les autorités des pays tiers se montrent réticentes, craignant peut-être une « contagion » de la liberté de ton adoptée par des parlementaires démocratiquement élus et protégés par des immunités dont bénéficieraient leurs propres élus. Lors de la Conférence ministérielle de Naples, la création d'une Assemblée parlementaire a été entérinée à la suite de la décision du Forum parlementaire réuni la veille de la conférence. La future assemblée, qui aura un rôle consultatif et de recommandation, comptera 240 députés, dont 120 proviendront des pays partenaires de la Méditerranée et 120 de l'Union européenne, dont 75 désignés par les Parlements nationaux et 45 par le Parlement européen. L'Assemblée se réunira en session plénière au moins une fois par an. Sa première réunion devrait avoir lieu en Grèce au premier semestre 2004. La recommandation adoptée par le Forum, et approuvée par les ministres, décrit l'organisation des travaux de l'Assemblée. Ils auront lieu au sein de trois commissions parlementaires ayant pour but de suivre les trois volets du partenariat euro-méditerranéen : partenariat politique et de sécurité, droits de l'Homme ; partenariat économique, financier, affaires sociales et éducation, et, enfin, promotion de la qualité de vie, échanges humains et culture. La pratique actuelle du Forum parlementaire visant à adopter des propositions par consensus serait maintenue au sein de la future Assemblée. La ville de Naples a proposé sa candidature pour accueillir le siège permanent de l'Assemblée. La mission, favorable à la création de cette Assemblée parlementaire, se félicite de cette avancée. Elle estime qu
coopérer plus étroitement entre eux sur des projets communs. C'est là le meilleur moyen de développer enfin les échanges Sud-Sud et de réduire la dépendance des pays partenaires vis-à-vis de l'Union européenne. On ne peut que saluer la mise en place, en 2001, du Processus d'Agadir instaurant une zone de libre-échange entre le Maroc, la Tunisie, l'Egypte et la Jordanie. Voulue par la Commission, et plus particulièrement par le Commissaire Chris Patten, cette initiative illustre la croyance dans les bienfaits du libre-échange perçu comme le déclencheur d'un décloisonnement plus large. Pour l'heure cependant, le Processus d'Agadir paraît surtout obéir à la logique inverse. Sa cohérence générale, notamment géographique, semble pâtir d'une mésentente fondamentale entre certains pays qui restreint d'emblée le champ d'un possible libre-échange économique. Les quatre pays associés forment une chaîne discontinue à laquelle manquerait un maillon ou deux, faute d'entente rendant acceptable pour chacun de s'associer à d'autres pays voisins. La Conférence ministérielle de Naples a rappelé la nécessité de renforcer la dimension sous-régionale du Processus de Barcelone : elle a encouragé la signature d'accords de libre échange entre partenaires du sud, conformément au Processus d'Agadir et à l'accord entre la Turquie et le Maroc. Des éléments concrets d'intégration sous régionale ont été définis : des expériences pilotes dans le domaine des transports et de l'énergie seront conduites, le marché maghrébin de l'électricité ayant déjà été lancé en mai 2003. Seul le développement de relations politiques entre tous ces pays pourra créer les conditions d'un développement économique durable. L'importance des considérations politiques au sein même du Processus d'Agadir en est la démonstration. La ratification solennelle et imminente du texte ne se trouve bloquée que par la concurrence entre Tunis et Rabat, chacun voulant être le lieu de cette ratification. Dès lors, on ne peut que réaffirmer la pertinence d'une approche pluridisciplinaire dans un cadre cohérent, sous-régional, seule à même d'engendrer de vraies synergies. Officiellement baptisé « Forum pour le dialogue en Méditerranée occidentale », le dialogue 5 + 5 est une bonne illustration du concept de concertation multi-dimensionnelle développé et formalisé à Barcelone. Le 5 + 5 est cependant antérieur, puisque le principe en a été esquissé dès 1983. L'idée de dialogue et de coopération en Méditerranée occidentale était destinée à être débattue lors de la préparation du projet de Conférence sur la s&eacut
technologie. Les suites de la guerre du Golfe à laquelle la France, l'Italie et l'Espagne avaient participé, les difficultés de l'Algérie et l'embargo décrété contre la Libye ont conduit à interrompre l'exercice aussitôt après. Après que la Tunisie a proposé la réactivation du Dialogue 5 + 5 en marge de la conférence euro-méditerranéenne de Stuttgart en avril 1999, le Portugal a accueilli une rencontre ministérielle de relance du processus à Lisbonne les 25 et 26 janvier 2001. A cette occasion, les dix ministres ont décidé de se réunir une fois par an, alternativement au Maghreb et en Europe afin de mener un dialogue politique informel sur les grands problèmes tels que la sécurité, la stabilité, l'économie, l'intégration maghrébine et les échanges humains, évitant ainsi toute concurrence avec le Processus de Barcelone. En effet, le 5 + 5 traite de questions spécifiques avec des acteurs différents comme la Libye et la Mauritanie. Une deuxième réunion des ministres des Affaires étrangères du dialogue 5 + 5 s'est tenue à Tripoli en Libye les 29 et 30 mai 2002. Lors de cette réunion, les principaux sujets d'actualité internationale ont été débattus : la sécurité et la stabilité de la Méditerranée occidentale, le conflit du Proche-Orient, la lutte contre le terrorisme international après le 11 septembre, l'intégration économique maghrébine, les défis de la globalisation, l'investissement dans les pays du Maghreb, les flux migratoires et le dialogue des cultures. La concertation dans le cadre de la Méditerranée occidentale s'est progressivement développée entre certains ministères techniques, principalement ceux de l'Intérieur, mais aussi ceux chargés des transports et de l'éducation. Ainsi les neuf Ministres de l'Intérieur de la Méditerranée occidentale (France, Espagne, Portugal, Italie, Malte, Maroc Algérie, Tunisie, Libye) se sont réunis chaque année depuis 1995. La dernière réunion s'est déroulée à Tripoli en juillet 2002. Les échanges ont généralement porté sur la lutte contre le terrorisme et l'immigration illégale. Depuis la relance du dialogue en janvier 2001, il y a eu une multiplication d'initiatives originales reprenant ce format du 5 + 5. Tunis a ainsi accueilli, en octobre 2002, les Ministres des affaires sociales des dix pays concernés pour traiter de la question de la migration en Méditerranée occidentale. Tripoli a reçu, en février 2003, les Présidents d'assemblées parlementaires dans le cadre du dialogue 5 + 5. La troisième réunion du dialogue 5 + 5, depuis sa relance en janvier 2001, s'est tenue à Sainte-Maxime les 9 et 10 avril 2003 : neuf Ministres des Affaires étrangères étaient présents ainsi que le Secrétaire Général du ministère maltais des Affaires étrangères. Cette réunion était la première rencontre entre pays européens et arabes depuis le début du conflit en Irak. Elle a permis de définir une position commun
largement informelle, qui, sans se substituer au cadre large du Processus de Barcelone, devrait offrir plus de possibilités de mener des actions de coopération dans un ensemble sous-régional cohérent. Or, lors de ce sommet, les problèmes à caractère bilatéral n'ont guère été abordés : aucun rapprochement n'a eu lieu entre les Parties. En ce qui concerne le conflit du Sahara occidental, le blocage des relations entre l'Algérie et le Maroc rend peu probable la création de la zone maghrébine de libre-échange, qu'encouragent les Européens. Les divisions entre les pays du Maghreb ont dominé le sommet, avec les réticences du roi Mohamed VI, qui a en quelque sorte joué la carte de la chaise vide en n'assistant pas au dîner des Chefs d'Etat, et l'absence du Président Mauritanien Ould Taya représenté par son Premier Ministre. La réponse évasive du colonel Khadafi aux demandes françaises, appuyées par le Président de la Commission Romano Prodi, n'a pas permis de progresser quant au règlement des suites de l'attentat contre le DC-10 d'UTA. De ce fait, les relations entre la France et la Libye n'ont pas progressé et elles se sont même détériorées. La Libye est toujours soumise aux sanctions européennes et elle est le seul pays de la région à n'avoir pas signé d'accord d'association avec l'Union. Les relations des Européens entre eux n'ont pas non plus été harmonieuses, avec le départ prématuré du Président Aznar à qui il était reproché la position de l'Espagne au sein de la Conférence intergouvernementale. Toutefois des points d'accord ont été trouvés, tels la condamnation commune du terrorisme sous toutes ses formes, la réflexion sur le contrôle des migrations et sur la nécessité, en contrepartie, d'un soutien financier accru de l'Union aux pays du sud de la Méditerranée. Un seul projet concret a émergé : la mise en place d'un Forum annuel des investissements, proposé par la Tunisie, et dont l'objectif serait de corriger la disparité entre les pays d'Europe centrale futurs membres de l'Union et les pays du Maghreb en matière d'investissements. En conclusion, l'espoir selon lequel ce sommet donnerait un nouvel élan au processus d'intégration euro-méditerranéen a plutôt été déçu. Pourtant, le 5 + 5 devrait tenir un rôle plus important, car il permet de créer des solidarités entre l'Europe du sud et le Maghreb, avec un rôle indirect de stimulation de l'intégration maghrébine. Favoriser cette intégration économique serait bénéfique pour tous. De fait, les interlocuteurs de la délégation, lors de son déplacement dans les trois pays du Maghreb, se sont montrés favorables à cette enceinte du 5 + 5, cadre peut-être approprié pour un règlement de la question du Sahara occidental. Après l'échec du dialogue 5 + 5 au niveau des Chefs d'Etat, il n'apparaît pas souhaitable d'inscrire dans ce cadre le projet de coopération renforcée que prône la France e
On ne retrouve pas la même homogénéité qu'en Méditerranée occidentale. La sous-région, si elle existe, se décompose à son tour en deux sous-ensembles ayant chacun ses problématiques propres. La mission considère que le caractère informel du dialogue 5 + 5 qui permet de mener une réflexion libre, ainsi que sa spécificité géographique, sont très appropriés pour mener des actions de coopération précises et ciblées, notamment dans le domaine sensible des migrations, selon une approche globale et équilibrée. c) Favoriser la coopération décentralisée en particulier entre les régions La mission a constaté l'importance de la coopération décentralisée entre les collectivités locales des deux rives de la Méditerranée. Cette coopération qui fait appel de part et d'autre aux sociétés civiles et aux élus locaux, crée des liens, génère de bonnes pratiques et permet des échanges économiques et sociaux fondés sur le partenariat. De plus, cette coopération est dégagée des lourdeurs administratives reprochées amèrement à l'Union européenne. Cette coopération n'est pas nouvelle et se développe à travers différents organismes. Les collectivités locales françaises sont très impliquées. En effet, actuellement l'appui institutionnel est nécessaire pour accompagner toutes les décentralisations en raison de la montée en puissance des pouvoirs locaux sur une base partenariale. Les maires échangent leurs expériences sur les problèmes d'administration locale. Ces échanges sont indispensables dans la période de transfert de compétences de l'Etat vers les collectivités locales, évolution souvent demandée par le FMI qui incite les Etats à transférer des pans de compétences sans que soient d'ailleurs transférés les moyens financiers. La nature et la qualité de la coopération décentralisée sont variables d'un pays de la rive Sud de la Méditerranée à l'autre. Cette coopération s'est renouée avec le Liban. Elle est relancée avec la Tunisie. Il en est de même avec l'Algérie. A titre d'exemple, on peut citer pour ce qui est des collectivités locales françaises, la signature d'une convention technique très importante, en janvier 2003, entre Paris et le Whali du Grand Alger (représentant 57 communes), après un an de préparation. De nombreuses collectivités locales de l'Union européenne sont demandeuses d'échanges avec l'Algérie, mais se heurtent à l'administration algérienne, alors que les maires y sont très favorables. S'agissant du Maroc, une association des maires du Maroc s'est créée, ce qui permet d'atteindre un bon degré de partenariat échappant à tous les filtres administratifs traditionnels. De même, des initiatives de coopération décentralisée ont été prises avec succès en Israël et dans les Terr
encouragée par l'Union européenne. Cette coopération dégagée des contraintes administratives répond à des nécessités précises, elle est peu coûteuse et on peut aisément vérifier que les deniers employés le sont à bon escient, sans pour autant poser des règles de conditionnalité complexes ou obscures. 3) Inventer de nouveaux concepts L'inadaptation du Processus de Barcelone à certaines situations régionales conduit à élaborer à l'intérieur même de ce processus de nouvelles formes de relations privilégiées entre l'Union européenne et certains pays tiers méditerranéens. En effet, les niveaux de développement économiques, sociaux et politiques sont différents selon les pays. De ce fait, les besoins varient. Tout en conservant le cadre général du Processus de Barcelone, on pourrait lui appliquer des concepts utilisés au sein même de l'Union européenne, soit vis-à-vis de ses voisins de l'Est, soit vis-à-vis des nouveaux entrants. La mission estime que l'on répondrait ainsi aux critiques souvent fondées des pays tiers méditerranéens qui se plaignent à juste titre d'avoir été délaissés au profit de l'Est. a) La notion de nouveaux voisins Ce concept, qui vise à développer de nouvelles relations de voisinage, a été proposé par la Commission européenne en mars 2003 et approuvé par le Conseil européen le 16 juin 2003. Pour la Commission, cette initiative concerne les voisins de l'Est, c'est-à-dire la Russie, l'Ukraine, la Moldavie et la Biélorussie. Ne sont pas concernés la Bulgarie, la Roumanie et la Turquie, qui se trouvent dans une relation de préadhésion, ni les Balkans occidentaux bénéficiant d'une perspective d'adhésion. Il s'agit également des pays du sud de la Méditerranée : Algérie, Maroc, Tunisie, Libye, Egypte, Syrie, Jordanie, Israël, Autorité palestinienne et Liban. Le Conseil des ministres des Affaires étrangères a même ajouté qu'il examinerait ultérieurement l'opportunité d'englober les trois pays de la Transcaucasie dans ce processus. Le processus d'établissement de ces nouvelles relations comporte des ouvertures dans les trois piliers de l'Union. Dans le pilier communautaire, il sera proposé de participer progressivement au marché intérieur avec un rapprochement des législations, de s'intégrer aux grands réseaux européens, d'obtenir des relations commerciales privilégiées et des coopérations pour de nombreuses politiques communautaires. Des rapprochements sont envisagés dans le domaine de la politique étrangère, et il en est de même dans le troisième pilier de la justice et des affaires intérieures, où la coopération serait intensifiée sur de nombreux thèmes. Ce processus pourrait aller jusqu'à « tout sauf la participation aux institutions de l'Union », ainsi que l'ont écrit le Président de la Commission européenne, M. Romano Prodi et le commissaire compétent, M. Chris Patten. b) La coopération renforcée avec les trois pays du Maghreb La notion européenne de subsidiarité pourrait gagner en efficacité en se couplant avec un autre concept typique de l'Union européenne, fondé sur une approche différenciée, en fonction de la volonté et de la capacité de chaque Etat à s'engager plus avant : la coopération renforcée. Une des voies de relance du Processus de Barcelone pourrait être de le proposer aux trois pays du Maghreb pour renforcer leur intégration, ce qu'a fait la France à Marseille en 2002. Cette formule qui vise à promouvoir l'intégration régionale maghrébine est théoriquement une préoccupation constante de l'Union du Maghreb Arabe (UMA). Elle doit permettre de conforter la stabilité de la région, de conduire à une meilleure entente mutuelle, et de favoriser le développement économique. En effet, pour créer les emplois nécessaires aux nouvelles générations, ces pays devraient, d'après les analystes, avoir une croissance annuelle minimum de 8 %. Cela suppose que ces derniers présentent, de concert, des projets concrets d'intérêt commun sur les infrastructures, les routes, l'électricité, le transport, l'eau. Les Quinze aideraient alors au financement de ces projets, dans le cadre du Processus de Barcelone (soit par des dons MEDA, soit par des prêts de la BEI, ou par un mélange des deux). La France a fait des propositions à ses partenaires européens lors du Conseil européen du 14 avril 2003. Cette coopération renforcée avec l'Union européenne vise, pour l'avenir, à définir ensemble des secteurs d'intérêt commun et à mettre au point, avec l'aide de fonds MEDA et de prêts de la BEI, des projets à forte valeur ajoutée et à forte visibilité qui renforcent la cohérence économique de la région. Il convient donc que les trois pays du Maghreb s'acheminent vers une intégration économique et commerciale réelle. D'ailleurs, la Commission a récemment décidé d'appliquer une stratégie de promotion consistant, sur chaque dossier, à mettre en évidence le coût du non-Maghreb, c'est-à-dire le coût de l'absence d'une intégration régionale en Afrique du Nord. Ceci a permis de constater que le gazoduc Algérie-Maroc-Espagne, qui existe depuis des années, est loin d'atteindre un niveau de développement optimal, non seulement du fait des réticences d'un pays à se rendre dépendant d'un autre et à abandonner certains monopoles fructueux, mais plus généralement à cause de l'inexistence d'un « Maghreb électrique » en termes d'interconnexions. Un début d'amélioration serait la mise en œuvre des financements prévus dans ce domaine par la BEI, la Banque Africaine de Développement et l'AFD, à la suite de la déclaration d'intentions signée le 21 mai 2003 entre les trois pays et l'Union eur
coopération renforcée touche d'autres domaines tels que les technologies de l'information, même si les besoins sont tels qu'ils semblent relever en premier lieu de problématiques nationales. Sur la question de la sécurité maritime, les trois pays du Maghreb semblent avoir progressé dans les discussions engagées depuis trois ans pour la mise au point d'un accord de coopération et d'assistance pour la prévention, la préparation à la lutte et la lutte contre les pollutions marines accidentelles, sous l'égide de l'Organisation maritime internationale, dans le cadre de la Convention de Barcelone de 1976 sur la protection de la mer Méditerranée. Le point ultime de cette coopération renforcée réside dans les échanges qui se développeront directement entre les pays du Sud en termes de partage des bonnes pratiques. Des exemples prometteurs de cette bonne intelligence entre voisins peuvent être décelés dans la volonté du gouvernement algérien de se rapprocher de la Tunisie, afin de bénéficier de l'expertise de cette dernière en matière touristique, dans le plaidoyer de la Tunisie pour une mise en commun avec le Maroc des compétences et des pratiques anti-terroristes, après les attentats qui ont frappé l'un et l'autre de ces pays. Un exemple de cet élargissement de l'intégration Sud-Sud, correspondant à un souhait de la France, serait la réalisation d'une zone euro-méditerranéenne du textile, seule réponse crédible et durable à la redistribution mondiale des cartes qui aura lieu dans l'industrie textile fin 2004 avec la suppression des derniers quotas d'importation. Les objectifs sont clairs : d'une part permettre le cumul des règles d'origine entre les pays du sud de la Méditerranée et, d'autre part, aboutir au libre-échange entre ces pays. C'est une ambition immense. Tout cela doit permettre aux industries des deux rives de la Méditerranée de progresser dans leur coopération et d'assurer leur présence collective dans le marché mondial en pleine réorganisation. On constate donc que les synergies sont fortes entre ces trois pays, qui composent un ensemble pertinent à bien des égards. Aussi, l'Union européenne valide-t-elle cette initiative dans une optique plus large et voit d'abord cette coopération renforcée comme une expérience pilote destinée ensuite à être élargie. Au-delà du resserrement des liens avec le Maghreb, c'est en effet la relance du partenariat avec la Méditerranée dans son ensemble, par effet d'entraînement, qui est recherchée. Parallèlement, il conviendra de trouver une solution au problème du Sahara occidental que tous les interlocuteurs rencontrés lors du déplacement de la mission considèrent comme l'obstacle majeur à l'intégration régionale. Ils attendent des efforts de l'Union européenne et de la communauté internationale rendues parfois indirectement responsables de l'absence de solution satisfaisante. c) Le statut spécifique d'association demandé par le Roi du Maroc B - Rétablir l'influence française dans l'aire méditerranéenne L'ensemble des pays tiers méditerranéens du Processus de Barcelone va connaître des mutations à plus ou moins long terme. Ces changements sont liés au contrecoup de la guerre d'Irak, à la volonté des Américains de remodeler la région et au constat fait par les sociétés civiles des blocages qui nuisent au développement. La volonté de changement est à l'œuvre. Elle s'exprime d'ailleurs à travers le désir des populations d'immigrer, soit dans les pays de l'Union européenne, soit aux Etats-Unis. Le besoin d'Europe est exprimé dans toute la région, y compris au Proche-Orient où le tête-à-tête de certains pays avec les seuls Etats-Unis, puissance hégémonique, se fait pesant. A travers cette demande d'Europe, la demande de France est très forte car elle joue un rôle de pont entre les deux rives de la Méditerranée. Consciente de ses responsabilités, la France, lors du Sommet de Naples, a été à l'origine du document figurant en annexe 4 du rapport que l'Allemagne, Chypre, l'Espagne, le Royaume-Uni, suivis par la Grèce, Malte, la Pologne ont élaboré. Ce document s'intitule « Europe élargie, voisinage, proposition pour la relance de partenariat euro-méditerranéen » (annexe 4). 1) Un rôle de trait d'union entre les deux rives de la Méditerranée a) Une influence liée à la géographie La France, de par sa position géographique intermédiaire et son histoire faite de métissages entre des populations méditerranéennes et celles issues de souches plus septentrionales, apparaît comme le centre de gravité de l'Europe, son point d'équilibre entre les influences du Nord et du Sud. A ce titre, elle est écoutée de part et d'autre, avec une influence particulière et modératrice sur les pays tiers méditerranéens, sachant orienter leurs exigences vers des propositions plus réalistes et acceptables pour ses partenaires européens. Avec l'accroissement prochain du nombre de ces derniers et le déplacement subséquent du centre de gravité de l'Union européenne vers le Nord-Est, la France ne pourra maintenir sa position de pivot qu'en veillant à un rééquilibrage en faveur du Sud méditerranéen. Il est donc de l'intérêt de la France que les pays tiers méditerranéens ne fassent pas les frais de l'élargissement. Pour cela, la France doit leur faire prendre conscience de leur intérêt vital à coopérer efficacement entre eux. Ce ga
l'avocat de ses voisins du Sud auprès de l'Union européenne est à affirmer sans cesse. Le plaidoyer doit se faire sans relâche, et les convergences profondes de vues et d'intérêts, exprimées lors des multiples visites officielles du Président de la République, des Ministres ou des parlementaires, doivent avoir des implications concrètes. Elles ne pourront qu'être bénéfiques pour les deux parties. La mission, lors de son déplacement, a constaté la force des liens qui unissaient la France aux pays du Maghreb qui, chacun à sa manière, lui demandent de l'aide pour se faire mieux comprendre des Etats de l'Union européenne. Lors des différentes visites au Proche-Orient ou en Turquie, des membres de la Commission ont fait un constat identique. b) Utiliser la communauté linguistique et culturelle que constitue la francophonie Le Président de la République l'a souvent rappelé : les pays francophones partagent plus qu'une langue. Celle-ci leur rend en effet commun un patrimoine spirituel et moral qui est porteur de valeurs. Ces valeurs peuvent faire de la France un vecteur de la démocratie par delà les ethnies, les religions et les continents. Dans les pays du Maghreb comme dans ceux du Proche-Orient, une culture commune liée à la langue française est porteuse d'espérance. Elle peut aussi être un tremplin pour la France qui profiterait de cette seconde patrie que constitue pour tout homme sa langue, pour réaffirmer son influence culturelle au travers des politiques communautaires, d'autant qu'actuellement l'ensemble de la zone se plaint de l'influence grandissante des Etats-Unis. Les diverses institutions de la Francophonie ont un rôle important à jouer dans le Processus de Barcelone car la plupart des pays tiers méditerranéens, partenaires de ce Processus, ont une proportion de francophones très importante. Il conviendrait de créer des synergies entre ces institutions et celles créées lors du Sommet de Naples. A ce titre, la mission encourage l'aide culturelle de la France, dans tous les domaines. La Fondation culturelle récemment créée au Sommet de Naples pourrait être utilisée à cette fin. L'aide apportée par la France au cinéma d'auteur dans le Maghreb, en Palestine, au Liban, par exemple, est très positive. Ce cinéma n'existerait pas sans cette aide. L'impact des centres culturels français, des alliances françaises et des écoles françaises dans la région est considérable. La défense de la langue française sur la rive sud de la Méditerranée est un combat important qu'il faut mettre en œuvre sans tarder. 2) Des propositions de relance du Processus de Barcelone innovantes Après le Sommet de Naples, il conviendra de promouvoir une action politique et de sécurité ambitieuse, d'accompagner ces réformes et d'associer plus étroitement les pays partenaires aux décisions. La mission soutiendrait plusieurs initiatives pe
définition des programmes de coopération afin qu'ils puissent être mieux compris et mieux mis en œuvre de part et d'autre de la Méditerranée est nécessaire. A cet égard, les institutions françaises, les collectivités locales ou les administrations centrales, ont un rôle important à jouer. c) Renforcer l'appui au développement institutionnel Les programmes MEDA consacrés au développement institutionnel devraient être renforcés. La méthode des jumelages administratifs par la mise à disposition, pour plusieurs années dans les administrations des pays tiers méditerranéens, de fonctionnaires ou d'experts des Etats membres, qui a été très utile dans le cadre des programmes PHARE des pays candidats, devrait être un cadre important de coopération que la France pourrait promouvoir. d) Créer une institution de gestion de l'eau L'eau pose quant à elle un défi majeur et immédiat aux pays tiers méditerranéens par le simple fait du changement socio-économique qui a affecté le pourtour méditerranéen ces cinquante dernières années, en particulier le Maghreb. De principalement rurale, la population est devenue à plus de 60 % urbaine, et cette arrivée en masse sur les villes du littoral a gravement déséquilibré la gestion des ressources en eau. Le Maghreb est particulièrement mal loti à cet égard, puisqu'à la différence du Proche-Orient (Tigre et Euphrate de la Turquie à l'Irak, Nil) il ne bénéficie pas de très grands fleuves permettant des installations hydrauliques d'envergure telles que celles entreprises dès les années 50, et qui se poursuivent aujourd'hui. C'est pourquoi les pays du Maghreb, malgré la mise en place de quelques barrages, ont eu tendance à puiser toujours plus profond, jusqu'aux eaux fossiles quaternaires. Ce faisant, ils ont pris le risque de dégrader les terroirs les plus riches, situés à proximité du littoral, et la baisse du niveau de l'eau dans ces sous-sols a provoqué une salinisation des nappes phréatiques extrêmement dommageable. Le manque d'entretien des infrastructures elles-mêmes entraîne une déperdition en réseau de 50 %. Les efforts consentis apparaissent donc comme largement insuffisants. Ces pays sont structurellement déficitaires en eau, d'autant plus que leur développement économique est fondé sur une agriculture intensive représentant plus de 80 % des besoins en eau douce et sur l'afflux de touristes qui surconsomment au regard des autochtones. Le résultat en est que le Maghreb se situe au-dessous du seuil de pénurie hydraulique, estimé à 1000 m3/habitant/an. Ainsi par exemple, 6 millions de Marocains n'ont pas un accès suffisant à l'eau potable tandis que de plus en plus de villes vivent au rythme des coupures d'eau. Une institution euro-méditerranéenne chargée de gérer les problèmes récurrents et graves de l'eau aurait tout à fait sa place dans le Processus de Barcelone, voire au sein de coopérations sous-régionales. e) Promouvoir une politique commune de protection de la Méditerranée Carrefour d'échanges variés et intenses, la Méditerranée est un espace fragile, d'une grande vulnérabilité. Mer semi fermée, elle est soumise à un faible brassage des eaux, ce qui la rend spécialement sujette à la pollution, alors qu'elle est en même temps particulièrement affectée par l'intensité des activités humaines. Si l'on ajoute qu'elle est la première région touristique du monde, avec 200 millions de touristes par an - soit le tiers du nombre total de touristes - on comprend à quel point la protection de cet espace naturel doit être une priorité pour les pays de la région. Le Plan des Nations unies pour l'environnement, créé en 1972, a choisi cette mer comme l'un de ses premiers terrains d'intervention. Le PNUE convoque en effet en 1975 à Barcelone une conférence intergouvernementale sur la protection de la Méditerranée qui débouche sur l'adoption du Plan d'actions pour la Méditerranée (PAM). L'adoption de ce plan révèle un début de prise de conscience, par les dix huit Etats signataires, que la Méditerranée est leur bien commun et que sa protection ne peut que passer par l'adoption de règles communes et par une coopération entre les riverains, justifiant la présence dans le PAM d'un volet socio-économique. Cette initiative trouve son prolongement dans la signature de la Convention de Barcelone sur la protection de la Méditerranée. Ce texte très général est accompagné de six protocoles spécialisés (notamment le protocole contre la pollution d'origine tellurique, le protocole relatif à la prévention de la pollution par les opérations d'immersion effectuées par les navires et aéronefs, ou le protocole sur les aires protégées et la diversité biologique). L'intérêt du plan est de prévoir un dispositif permanent qui, grâce à des règles communes et une réelle participation entre riverains, se donne pour objectif de coordonner efficacement la gestion des régions côtières, premières victimes de la pollution d'origine tellurique, c'est-à-dire les rejets venant du littoral. Modifiée en 1995 pour être adaptée aux évolutions du droit international de l'environnement, la Convention de Barcelone étend les obligations des vingt-deux signataires, dans la mesure où elle n'attend plus d'eux une simple réduction de la pollution, mais une réelle élimination. Pour la mise en œuvre de ce nouveau principe, certains protocoles spécialisés ont été renforcés Il en est ainsi du protocole sur la pollution tellurique qui prévoit l'interdicti
La France est le premier contributeur au PAM, dont elle finance annuellement le quart des 4 millions d'euros qui constituent son budget. Elle fournit donc des efforts importants mais ceux-ci perdront beaucoup de leur utilité s'ils ne sont pas relayés par les autres riverains. Or, il apparaît que les processus de ratification sont lents, que certains pays n'ont pas encore ratifié les amendements à la Convention de Barcelone elle-même, et que certains protocoles ne peuvent entrer en vigueur faute de ratifications en nombre suffisant. Ainsi, le protocole rénové sur les situations d'urgence, signé en janvier 2002, n'a encore été ratifié que par quatre pays, ce qui est insuffisant. Quant aux amendements au protocole sur les pollutions dues aux activités terrestres domestiques et industrielles, l'un des plus essentiels, ils ne sont pas non plus entrés en vigueur. Les pays de la rive sud sont d'ores et déjà à l'origine de 30% de la pollution tellurique alors qu'ils ne représentent que 15% de la production industrielle méditerranéenne. Ils sont conscients qu'ils doivent s'engager dans une mise en œuvre dynamique du plan, afin que leur développement industriel ne porte pas tort à la richesse biologique exceptionnelle de la Méditerranée, dont la préservation est de l'intérêt de tous. Les retards regrettables des ratifications n'empêchent heureusement pas la coopération entre de nombreux pays de fonctionner. Les centres d'activités régionales qui ont été créés dans le cadre de la Convention de Barcelone sont le lieu d'un travail collégial fructueux d'évaluation des législations et des équipements nécessaires,de même que les réunions ministérielles de l'ensemble des pays signataires constituent une enceinte utile de concertation. L'amélioration qu'il convient d'apporter à présent consiste en un lien plus systématique entre le PAM et les actions menées dans le cadre du Processus Euromed. Ce lien semble une évidence, mais il pose un problème de méthodologie déjà rencontré sur le plan national ou communautaire : comment intégrer la préoccupation environnementale dans la coopération politique et économique ? Quoi qu'il en soit, la mission propose qu'un plan de lutte contre les navires pollueurs soit mis en place en Méditerranée. En effet, votre Rapporteur rappelle que la Méditerranée subit les déballastages sauvages opérés par des navires voyous difficilement repérables. Ces déballastages représentent chaque année 1 million de tonnes d'hydrocarbures déversés en Méditerranée, soit douze fois l'équivalent de la cargaison du Prestige. Votre Rapporteur a déposé une proposition de loi visant à renforcer le dispositif de lutte contre les navires pollueurs en mer Méditerranée. La protection de la Méditerranée, cependant, ne sera assurée que si elle est intégrée au Processus de Barcelone et plus encore au PAM, de telle sorte que tous les pays riverains adoptent les mêmes mesures et respectent les mêmes règ
désintéresser des évolutions qui adviendront dans cette partie du monde. La plupart des experts et les personnalités rencontrées par la mission d'information lors de ses déplacements espéraient des avancées concrètes lors de la Conférence ministérielle de Naples. Celle-ci a quelque peu déçu leurs attentes, notamment sur le plan économique et social. Les difficultés actuelles de l'Union européenne, la crise des institutions que l'échec de la Conférence intergouvernementale de Bruxelles des 12 et 13 décembre 2003 a soulignées et les problèmes générés par l'élargissement n'incitent pas à l'optimisme. La stratégie de l'Union européenne vis-à-vis de ses voisins du Sud de la Méditerranée risque indirectement d'en faire les frais ce qui serait très dommageable car la rive Sud de la Méditerranée a besoin de l'Union européenne et réciproquement, pour des raisons stratégiques, politiques, économiques et culturelles. Le développement harmonieux de la région en dépend. Quoi qu'il en soit, l'essentiel de la politique étrangère de l'Union européenne sera tourné vers les pays tiers méditerranéens parce qu'ils sont proches, qu'ils sont pour la plupart dans des situations politiques et économiques délicates et parce que leur stabilité est menacée. La France se doit de renforcer ses liens avec l'ensemble des pays membres du Processus de Barcelone, quelle que soit l'ampleur de la tâche. Elle est le partenaire européen de référence pour l'Algérie, le Maroc et la Tunisie. Grâce aux positions qu'elle a défendues lors de la guerre d'Irak, son niveau de crédibilité et de popularité est très élevé dans cette région du monde. Plus que jamais la France devra être le moteur des relations euro-méditerranéennes et l'avocat du concept de nouveaux voisins appliqué aux pays tiers méditerranéens. C'est essentiel pour la France tant au niveau national qu'international. La mission soutient sans réserve les initiatives prises par la France pour favoriser l'élaboration d'une véritable politique de l'Union européenne à l'égard des pays de la rive sud de la Méditerranée. Le rapprochement de l'Occident et de l'Orient a nourri « le rêve le plus long de l'Histoire », d'Alexandre à Lyautey... L'heure est venue de le réaliser dans le respect des identités de chacun. La Commission a examiné le présent rapport d'information au cours de sa réunion du 20 novembre 2003, sur le rapport de M. Jean-Claude Guibal. Le Président Edouard Balladur a souligné l'importance que revêt, avec la réalisation d'une Europe élargie à vingt-cinq membres, l'avenir de nos relations
Berlin et au début du Processus de paix au Moyen-Orient. Un programme de partenariat ambitieux de développement fondé sur un volet politique, un volet financier, un volet social, culturel et humain, fut alors adopté à la Conférence euro-méditerranéenne de Barcelone des 27 et 28 novembre 1995. Ce partenariat original s'appuyait sur des accords d'association entre l'Union européenne et les douze pays tiers, Algérie, Tunisie, Maroc, Egypte, Jordanie, Syrie, Liban, Israël, Autorité palestinienne, Chypre, Malte, Turquie. On tenait ainsi compte de la spécificité de chacun, ce programme global étant financé via le Fonds MEDA. Ce processus, après sept ans de fonctionnement, connaît un essoufflement, alors que ses enjeux dépassent très largement les contraintes technocratiques de l'Union européenne. Le Rapporteur a d'abord évoqué les enjeux et problématiques de la politique méditerranéenne de l'Union, en faisant d'abord observer que la Méditerranée était un espace de conflit pour le Nord comme pour le Sud. Elle le doit à un problème d'identité mal résolu de part et d'autre, au fait qu'il s'agit d'un territoire marqué par le cloisonnement, ce qui détermine la sociologie et la psychologie de ses populations et engendre une forte tendance au clanisme. Le goût du consensus n'est donc pas la caractéristique première des peuples de la Méditerranée, au Nord comme au Sud. Aussi, toute politique méditerranéenne doit-elle s'appliquer à gérer les conflits plutôt qu'à les nier. Les pays tiers méditerranéens connaissent une sorte d'attraction-répulsion à l'égard de l'Europe. Même si l'Union européenne reste un modèle économique et social de référence, elle est soupçonnée de cultiver des relations politiques dont elle serait le centre et les pays tiers méditerranéens la périphérie. Pour ces pays, il est évident que le Sud n'est pas essentiel pour l'Union européenne, plus tournée vers l'Est ou le Nord. De plus, l'espace méditerranéen est une ligne de confrontation entre l'Islam et la chrétienté, qui s'est aggravée par l'échec, à la fin du XXème siècle, de la modernisation de l'Islam : le slogan « moderniser l'Islam » a été remplacé, selon certains experts par « islamiser la modernité ». Ces pays sont confrontés à des choix et des défis difficiles et reprochent bien souvent à l'Union européenne ses pratiques laxistes vis-à-vis de l'intégrisme islamiste qui les menace. La Méditerranée reste une zone d'insécurité, les conflits y perdurent et bloquent les évolutions, conflits à l'intérieur même de l'Union européenne à propos de Chypre, conflits entre pays tiers, paix impossible au Proche-Orient, question non résolue du Sahara occidental qui bloque le développement du Maghreb. Par ailleurs, la démographie mal maîtrisée, dont fait peu de cas le Processus de Barcelone, reste un problème majeur pour ces pays. L'immigration est une fausse solution. De plus, la plupart des pays méditerranéens connaissent à des degrés divers des modes assez opaques de transmission et d'exercice du pouvoir : favoritisme, confi
effectués par les chercheurs arabes du PNUD, qui constatent, statistiques à l'appui, que le monde arabe est plus riche qu'il n'est développé. Le Rapporteur a souligné que les relations avec les voisins du Sud de la Méditerranée sont un enjeu pour l'Europe dont l'élargissement est perçu comme un retrait par le Sud. En effet, l'Union européenne porte un regard septentrional vers le monde méditerranéen. Les nouveaux Etats membres étant peu motivés par la Méditerranée, les pays tiers méditerranéens ont l'impression d'être une seconde priorité alors qu'ils vivent une période sensible de leur histoire. Ces pays ont le sentiment que l'Union européenne s'intéresse davantage à ses limites géographiques, à ses futures institutions, et manque d'intérêt et de compréhension pour la zone méditerranéenne. Ils perçoivent l'Union européenne comme ethnocentrée, incapable de mettre en place des méthodes de développement politique, économique et social en phase avec les pays tiers méditerranéens. Aussi la politique méditerranéenne de l'Union apparaît souvent contradictoire et un déséquilibre croissant des échanges en faveur des pays de l'Est accentue ce fait. Après ce constat, M. Jean-Claude Guibal s'est demandé comment promouvoir une nouvelle stratégie en Méditerranée. Il a préconisé une approche volontariste, globale et différenciée, redonnant une place importante à la France dans la région. En effet, malgré ses imperfections et la multiplication des structures qui constituent son architecture, le Processus de Barcelone garde toute son utilité. Les Etats-Unis ont d'ailleurs tenté de mettre en place un processus concurrent, le Processus MENA qui couple le développement économique au respect des accords d'Oslo sans règle de conditionnalité politique. Aussi faut-il refonder et relancer le Processus de Barcelone en profitant de la conférence de Naples des 2 et 3 décembre prochain, sous présidence italienne, car c'est la dernière occasion de faire progresser ce processus avant longtemps. Selon lui, la relance du Processus de Barcelone doit permettre de le doter des outils nécessaires, en particulier de conférer au Forum, structure informelle, le rôle de laboratoire d'idées du processus où puisse s'exprimer chacun des partenaires. La création d'une Banque euro-méditerranéenne de développement est réclamée par les pays tiers méditerranéens qui souhaitent obtenir les mêmes facilités que ceux de l'Est avec la BERD. La création de cette banque est souhaitable. Pour l'instant, il existe déjà une ligne de crédit à la Banque européenne d'investissement (BEI) et l'on s'orienterait vers une solution intermédiaire qui serait de créer une filiale euro-méditerranéenne de la BEI. De même, il faudrait créer une fondation culturelle permettant un dialogue des cultures comme l'avait demandé l'Espagne. A cet égard, le Rapporteur s'est étonné que le débat sur la création de cette instance ne porte que sur le mode de contrôle par l'Union européenne plutôt que sur son contenu, ce qui explique la lenteur de sa m
implique de renforcer la structure des sous-ensembles. Le dialogue 5 + 5 qui met face à face les cinq pays méditerranéens de l'Union européenne et les cinq pays membres de l'Union du Maghreb arabe, créant ainsi une zone sub-régionale cohérente, doit être favorisé. Il en est de même des initiatives de coopération décentralisée, en particulier entre les régions européennes et les régions des pays tiers. La nécessité d'inventer de nouveaux concepts ou d'appliquer aux pays tiers méditerranéens ceux utilisés pour aider les nouveaux entrants s'impose. Il en est ainsi du concept de « nouveaux voisins » applicable notamment aux pays tiers méditerranéens, que la Commission a proposé et que le Conseil européen a validé. De même, on pourrait imaginer une coopération renforcée de l'Union européenne avec l'Algérie, la Tunisie et le Maroc, qui forment un ensemble cohérent et développé au niveau économique. Le statut spécifique d'association demandé par le Roi du Maroc est aussi une piste. Il consiste à associer étroitement le pays demandeur à l'Union européenne dans tous les domaines qu'ouvrirait l'adhésion, mais sans la participation aux institutions. Le Rapporteur a insisté sur le rôle important que la France doit jouer auprès de ses partenaires européens lors du Sommet de Naples pour faire entendre la voix des pays tiers méditerranéens, qui le demandent avec insistance. La France est traditionnellement, de par sa géographie et son histoire, le trait d'union entre le Nord de l'Europe et les pays méditerranéens. Elle dispose en outre de l'atout capital de la francophonie et se doit d'utiliser au mieux cette communauté linguistique, notamment en créant un espace euro-méditerranéen d'enseignement supérieur et en renforçant l'appui au développement institutionnel des pays tiers. En conclusion, le Rapporteur a estimé que le Sommet de Naples des 2 et 3 décembre 2003 devait être l'occasion d'affirmer la nouvelle politique méditerranéenne de l'Union. L'essentiel de la politique étrangère de l'Union européenne devra à l'avenir se tourner vers les pays tiers méditerranéens, parce qu'ils sont proches, qu'ils sont pour la plupart dans des situations économiques et politiques délicates et que leur stabilité est menacée. Le Président Edouard Balladur a souhaité faire deux observations. La première concerne le sommet de Naples des 2 et 3 décembre prochain consacré à la relance du Processus de Barcelone, dont il conviendrait peut-être d'attendre la fin pour pouvoir compléter le rapport, ce qui implique de surseoir pour l'instant à sa publication. La seconde se rapporte à la francophonie. Une information de ce jour annonce l'arrêt de la diffusion de France 2 en Italie, au moment où s'effondre l'enseignement du français dans ce pays. Ceci est regrettable et mérite que la Commission soit informée des raisons qui ont fondé cette décision. S'exprimant en tant que Président de la Mission sur l'avenir du Processus euro-méditerranéen, M. Roland
du Processus de Barcelone. Aussi, la pérennisation du forum informel, la création d'une banque euro-méditerranéenne, d'une fondation culturelle et d'une assemblée parlementaire chargée de donner des avis et d'engager le dialogue sur le volet politique du Processus qui fait défaut actuellement, sont autant de pistes qu'il faut utiliser. L'application aux pays tiers méditerranéens du concept de « nouveaux voisins » s'impose, car lorsque l'on se déplace dans ces pays, on perçoit une véritable frustration à l'égard de l'Union européenne, qui aurait tout misé sur son développement à l'Est et au Nord en considérant les pays tiers méditerranéens comme des parents pauvres. Le fait que la Commission englobe ces pays dans le concept de nouveaux voisins favorisera un dialogue plus approfondi. Par ailleurs, M. Roland Blum a convenu qu'il était préférable, comme le suggérait le Président Edouard Balladur, de surseoir à la publication du rapport pour pouvoir y intégrer les résultats du Sommet de Naples. M. Jean-Claude Guibal a approuvé cette position et a déploré l'affaiblissement de l'usage du français dans la diplomatie notamment. S'agissant du sentiment de déréliction et d'abandon de la part de l'Europe que ressent le Sud vis-à-vis de l'Est, le Président Edouard Balladur a rappelé les propositions de M. Günther Verheugen, Commissaire européen chargé de l'élargissement, selon lesquelles il appartient maintenant à l'Europe de définir une coopération de voisinage aux frontières de l'Union, y compris avec le Maghreb. En partant de ce principe, l'Iran et l'Irak devraient être dans des relations privilégiées avec l'Union, ce qui ne serait pas sans poser de problème. La Commission a décidé de surseoir à la publication du rapport d'information pour y inclure une analyse des conclusions du Sommet de Naples. * * * Au cours de sa réunion du 18 décembre 2003, la Commission a poursuivi l'examen du rapport d'information sur l'avenir du Processus euro-méditerranéen. Après les conclusions du Sommet de Naples, la Commission des Affaires étrangères a poursuivi l'examen du rapport de la Mission d'information sur l'avenir du Processus euro-méditerranéen, commencé au cours de la réunion du 20 novembre 2003. M. Roland Blum a indiqué que la VIème Conférence euro-méditerranéenne, tenue à Naples les 2 et 3 décembre 2003, avait pris des décisions concernant trois questions importantes. Les ministres ont entériné la création de l'Assemblée parlementaire Euromed, qui avait
méditerranéens (Algérie, Tunisie, Egypte), option qui correspondait aussi à la préférence des membres de la mission constituée au sein de la Commission des Affaires étrangères, mais a été jugée prématurée. Les ministres ont considéré que la Femip renforcée constituerait un bon soutien au secteur privé et l'ont dotée de trois nouveaux éléments favorables : - une enveloppe financière spéciale plus étendue pour les opérations de partage des risques à concurrence d'un milliard d'euros ; les Quinze ont annoncé qu'ils alloueraient jusqu'à 200 millions d'euros prélevés sur les réserves de la BEI ; - la mise en place d'un fonds fiduciaire qui permettra à d'autres donateurs d'apporter des ressources complémentaires. Il pourrait bénéficier d'un budget de 20 à 30 millions d'euros et interviendrait dans des secteurs prioritaires (eau, électricité, transport, ressources humaines) ; - une amélioration du dialogue Euromed sur le processus de réformes structurelles pour créer un environnement plus favorable aux activités du secteur privé. Une rencontre annuelle est envisagée au niveau des ministres des finances, préparée par un groupe d'experts. Enfin, les ministres ont confirmé la création de la Fondation euro-méditerranéenne pour le dialogue des cultures et des civilisations. Celle-ci devra jouer un rôle de « catalyseur » d'initiatives visant à développer le dialogue et la compréhension mutuelle. Elle sera organisée sous la forme d'un ensemble de réseaux doté d'une structure administrative légère, afin d'établir un dialogue régulier entre des cercles culturels différents des forums diplomatiques et culturels officiels. Les ministres n'ont pas défini les modalités de financement de la fondation, ce qui est regrettable - mais l'Union européenne a annoncé un apport de cinq millions d'euros et a souhaité que les Etats membres de l'Union et leurs partenaires apportent un financement similaire pour permettre le lancement de la fondation. Plusieurs Etats membres - France, Italie, Espagne, Grèce et Allemagne - ont promis une contribution dont la totalité pourrait s'élever à quatre millions d'euros. Enfin, les pays partenaires pourraient apporter un million d'euros. La question du siège de la Fondation est ouverte. Quatre villes sont candidates : Alexandrie, Rome, Nicosie et La Valette. En application de l'article 145 du Règlement, la Commission a décidé la publication du rapport de la Mission d'information sur l'avenir du Processus euro-méditerranéen, incluant la présentation des conclusions du Sommet de Naples. - Mettre en œuvre les actions approuvées au Conseil affaires générales / relations extérieures du 21 juillet 2003 en matière de PESD, en recourant à des groupes de format variable (UE et une sous-région, UE et un pays) ; - Adopter de nouvelles mesures de confiance non militaires, en matière de lutte contre la criminalité et les trafics, de sécurité maritime et d'environnement ; valoriser et renforcer les actions en matière de gestion des catastrophes naturelles 3. Relancer le dialogue sur les thèmes prioritaires - Approche multilatérale (Sud-Sud) et subrégionale de la sécurité dans la région ; - Lutte contre le terrorisme ; - Démocratisation et droits de l'Homme ; - Migrations et échanges humains ; - Prévention des conflits et gestion des crises. II. MIEUX AIDER LES PAYS MEDITERRANEENS A AFFRONTER LES DEFIS DU DEVELOPPEMENT S'ils ont généralement su mener à bien l'ajustement de leurs économies, les pays méditerranéens ne sont que très inégalement parvenus à s'insérer dans le marché mondial et leur croissance par habitant a diminué depuis vingt ans. Cette situation s'explique notamment par leur retard en matière de réformes structurelles et l'étroitesse des marchés nationaux que ne vient pas compenser une intégration régionale encore très faible. Or, les pays méditerranéens devront faire face dans les prochaines années à plusieurs défis majeurs et concomitants, dont les conséquences pourraient être gravement déstabilisantes : de fortes tensions sur le marché du travail pendant les dix prochaines années et l'impact du démantèlement tarifaire. Le partenariat euro-méditerranéen doit tendre vers une accélération des réformes. A) Promouvoir et accompagner les réformes dans un esprit de co-responsabilité 1. Relancer durablement le comité de dialogue économique euro-méditerranéen à haut niveau Ce dialogue devrait rassembler des responsables de haut niveau dans le domaine de la politique économique, émanant des Etats et de la Commission, en association avec la BEI sur les sujets de sa compétence, qui se réuniraie
avec les autres bailleurs de fonds. - Symétriquement, inviter la Commission à procéder à l'évaluation systématique de l'impact de ses programmes au regard de conditionnalités qui auraient été elles-mêmes systématiquement communiquées aux Etats membres lors de l'adoption des projets. - En contrepartie, associer beaucoup plus étroitement les pays partenaires à la prise de décision. 3. Il est également proposé de généraliser les jumelages administratifs et d'évaluer l'impact, en termes de développement durable, de la mise en œuvre des accords d'association. B) Favoriser l'intégration régionale et sous-régionale - Mettre en œuvre une politique en faveur de l'intégration sous-régionale, en commençant par les trois pays du Maghreb central (Maroc, Algérie, Tunisie), qui ont déjà posé les premières bases de leur intégration. Il s'agirait de lancer des programmes et projets communs qui favoriseraient l'intégration régionale, en particulier dans le domaine des infrastructures, auxquels l'aide de l'UE (fonds MEDA associés à des prêts de la BEI) pourrait être consacrée. Les secteurs des transports, de l'énergie, des technologies de l'information voire de l'immigration pourraient être envisagés. Cette coopération sous-régionale avec le Maghreb constituerait une « expérience pilote », destinée à être généralisée, dans son principe, à l'ensemble des pays partenaires, à s'appliquer aux deux bassins de la Méditerranée, et à concourir à la réalisation des objectifs de Barcelone. - Offrir une « prime à la coopération sous-régionale » : il pourrait être envisagé de réserver une partie de l'enveloppe régionale de MEDA à des programmes destinés à stimuler l'intégration d'une sous-région. Une prime serait ainsi donnée aux pays partenaires qui prendraient l'initiative de définir ensemble des programmes communs. C) Dynamiser la coopération financière 1. Mieux calibrer l'effort financier et accroître l'effet de levier des différents programmes : Dans les années à venir, l'effort financier européen devra être de nature à accompagner les réformes prioritaires dans les pays méditerranéens. La diversification des instruments de coopération devra être encouragée. A cet égard, les pistes récemment proposées par la Commission pour mobiliser les ressources communautaires au bénéfice des « nouveaux voisins » mériteraient aussi d'être approfondies afin que
sur la base de l'évaluation de la FEMIP (renforcement de cet instrument ou création d'une banque euro-méditerranéenne). Quelle que soit l'issue du débat, il importera que la solution retenue permette de favoriser le développement de l'intégration régionale, de mieux répondre aux défaillances du financement du secteur privé ainsi qu'aux besoins spécifiques des économies méditerranéennes, de façon incitative et sur la base d'une expertise approfondie des problématiques économiques de la région. III. PROMOUVOIR UNE ACTION AMBITIEUSE DANS LE DOMAINE DU DIALOGUE CULTUREL ET DU DEVELOPPEMENT SOCIAL ET HUMAIN A) Instituer le dialogue des cultures La mise en place de la Fondation euro-méditerranéenne pour le dialogue culturel euro-méditerranéen est devenue d'autant plus urgente qu'il constitue un complément indispensable de l'action à mener auprès de nos partenaires méditerranéens dans le domaine du développement social et humain dont les retards sont un obstacle majeur à leur développement. B) Renforcer les actions de coopération dans le domaine éducatif et social - Accélérer et renforcer les actions prévues en faveur de l'évolution du statut de la femme ; - Œuvrer, au plan communautaire, au rapprochement des dispositions nationales dans chaque Etat membre en matière d'immigration, de façon à faciliter le long séjour aux fins d'études et de formation professionnelle ; - Créer un espace euro-méditerranéen de l'enseignement supérieur en prenant appui sur l'expérience de l'espace commun UEALC de l'enseignement supérieur et sur le programme Tempus-Meda (développement de la mobilité des étudiants, des enseignants et des chercheurs ; analyse des pratiques d'évaluation et de contrôle pour garantir la qualité de l'enseignement supérieur, analyse de la compatibilité des systèmes de crédits, analyse des formations techniques supérieures. - Renforcer l'aide consacrée à la réduction de la pauvreté et des inégalités : créer / renforcer les dispositifs d'accompagnement social (formations de reconversion, sécurité sociale, assurance chômage, retraites). C) Promouvoir le respect des droits de l'Homme et la démocratisation Dans la continuité de la récente communication de la Commission sur les droits de l'Homme et la démocratisation en Méditerranée, il est proposé de : 1. Renforcer la promotion des droits de l'Homme dans les programmes de coopération :justify">2. Co-responsabiliser les partenaires : · Evaluer les actions et les progrès réalisés en matière de droits de l'Homme : - Procéder à un bilan pays par pays des résultats des actions régionales et bilatérales financées par le programme MEDA, comme de l'ensemble des initiatives adoptées par ailleurs (ex. Réseau euromed des droits de l'Homme), dans le domaine de l'Etat de droit, de la démocratie et des droits de l'Homme. - Instituer progressivement des sous-comités consacrés aux droits de l'Homme dans le cadre de l'ensemble des accords d'association, avec une souplesse nécessaire dans l'application du dialogue selon la situation particulière de chaque pays. Dans ce cadre, les partenaires examineraient, chaque année et pour chacun des pays partenaires, un rapport sur la situation en matière de droits de l'Homme et les progrès réalisés notamment dans le cadre des plans d'action, dans le cas où ceux-ci auront été adoptés. - Dans le cadre des plans d'action prévus par l'initiative Europe élargie-nouveaux voisins, les progrès réalisés par les partenaires en matière de droits de l'Homme feraient l'objet des "benchmarkings" prévus dans cette initiative. Ils devraient déterminer l'accès des pays partenaires aux coopérations avancées prévues par l'initiative (accès à certains programmes communautaires, accès à terme aux « quatre libertés ». · Instituer un véritable dialogue en matière de droits de l'Homme : - Mettre en place, dans le cadre des comités et des conseils d'association un véritable dialogue en amont. Ce dialogue ainsi banalisé, auquel pourraient participer les acteurs de la société civile, devrait avoir un caractère paritaire et non coercitif. - Introduire dans le cadre du prochain programme MEDA un mécanisme de crise pour résoudre les difficultés graves que ce dialogue permanent n'aurait pas permis de prévenir. A l'initiative de l'une des parties (un pays partenaire ou le Conseil à la majorité qualifiée), des consultations seraient engagées, au niveau des hauts fonctionnaires voire au niveau ministériel, en format Troïka, devant aboutir à des engagements réciproques pour remédier à la situation. Ces consultations seraient suivies d'une période d'observation, au terme de laquelle les mesures appropriées seraient adoptées. **** 1. Près de huit ans après son lancement, le partenariat euro-méditerranéen nécessite, malgré des progrès indiscutables, un examen sérieux des réalisations obtenues au regard de ses objectifs initiaux, dans le contexte des tensions qui affectent les pays mé
été réalisés (amélioration spectaculaire du décaissement des crédits, extension du système du cumul pan-européen de l'origine aux pays méditerranéens, renforcement du financement du secteur privé par la BEI, signature de huit nouveaux accords d'association,...), le partenariat tarde à produire ses effets sur le développement des pays concernés. 4. Le regain d'intérêt pour la région à la suite des événements du 11 septembre 2001 puis du conflit iraquien, qui a conduit les Etats-Unis à lancer plusieurs projets pour la région (Middle East Partnership Initiative, projet d'une zone de libre-échange d'ici 2013, projet d'une grande initiative de l'OTAN en faveur de la Méditerranée, idée d'une OSCE pour la région), ne s'est pas traduit par une relance du partenariat avec l'Europe. 5. Pourtant, le nouveau contexte dans lequel s'inscrit aujourd'hui le Processus de Barcelone milite pour une relance du partenariat, pour deux raisons essentielles : - d'un côté, l'élargissement de l'Union, la qualité de candidats potentiels offerte aux Balkans occidentaux, pourraient affecter l'équilibre que l'Union se doit de maintenir entre les relations avec l'Est du continent et celles nouées avec les Etats de la Méditerranée, préoccupation à l'origine du lancement du Processus de Barcelone. Pour cette raison, il importe de faire en sorte que les pays adhérents puissent pleinement prendre part à la coopération avec la Méditerranée et faire partager leur expérience des processus de réforme et de démocratisation. - de l'autre, la crise irakienne est à l'origine d'une nouvelle donne dans la région qui suscite une plus forte « demande d'Europe » chez nos partenaires méditerranéens ainsi qu'une volonté affichée de relancer le dialogue politique avec l'Union européenne. 6. Le manque de vitalité du partenariat ne tient pas aux objectifs et à l'approche globale du Processus de Barcelone, qui demeurent valides : il traduit, outre les difficultés propres à la région, un trop faible investissement politique et financier de l'Europe et une pratique du partenariat insuffisamment responsabilisante pour les parties. 7. Il importe aujourd'hui d'engager une discussion approfondie, ouverte et sincère entre tous les partenaires sur la mise en œuvre de l'acquis de Barcelone. 8. La dernière conférence ministérielle de Crète (26-27 mai 2003) a constitué une première étape vers la nécessaire relance du partenariat. En outre, l'initiative lancée par la Commission en faveur d'un renforcement et d'une rationalisation de la coopération avec les voisins de l'Europe élargie vise cependant à offrir de nouvelles perspectives à nos plus proches partenaires, parmi lesquels les pays méditerranéens. Il s'agit d'un cadre général, commun à des pays dont les besoins et les caractéristiques sont fortement hétérogènes, mais qui fixe un certain nombre de principes essentiels
Barcelone, tout en lançant de nouvelles initiatives sur la base des actions déjà réalisées. C'est dans cet esprit, en tenant compte des recommandations formulées par la Commission dans sa récente communication en vue de la Conférence de Naples5, que l'Allemagne, Chypre, l'Espagne, la France, le Royaume-Uni, la Grèce, Malte, la Pologne et le Portugal souhaitent formuler un certain nombre de propositions pour une relance du Processus de Barcelone, en matière politique (I), économique (II) et dans le domaine du développement social, humain, des droits de l'Homme et de la démocratisation (III). I. JETER LES BASES D'UN VERITABLE DIALOGUE POLITIQUE ET DE SECURITE A) LA PRISE EN COMPTE DU CONTEXTE ACTUEL 10. Malgré la difficulté majeure que constitue l'aggravation de la situation au Proche-Orient (crise du processus de paix et Irak), le renforcement du volet politique et de sécurité de Barcelone doit être l'un des principaux objectifs visés par l'Union dans sa volonté de redynamiser le processus. Il y va en effet de la crédibilité de celui-ci et de l'ambition qui avait été affichée par l'Europe à Barcelone de faire de la région une zone de paix et de prospérité partagées. 11. L'Union devrait préparer sans tarder un ensemble d'orientations à partir de l'acquis que constitue le document du Secrétariat Général du Conseil sur l'état du dialogue. Ces orientations pourraient être soumises à nos partenaires du Sud et être mises en œuvre par les Hauts Fonctionnaires avant la fin de l'année 2003. L'Europe devrait prendre tout particulièrement en compte les deux préoccupations suivantes: - d'une part, maintenir l'approche globale du problème de la stabilité / sécurité dans la région (incluant l'ensemble de ses fractures, y compris économique et culturelle), à laquelle les pays méditerranéens demeurent très attachés et dont l'Union avait reconnu la nécessité lors de la préparation du projet de Charte ; - d'autre part, accorder une plus grande attention aux nouveaux défis de la sécurité particulièrement importants dans le bassin méditerranéen (terrorisme, criminalité et trafics d'êtres humains, mais aussi retards dans le processus de démocratisation et atteintes aux droits de l'Homme). B) LES ORIENTATIONS ENVISAGEABLES Elles pourraient s'articuler autour des trois idées ci-après : a) La mise en œuvre d'une méthode appropriée aux difficultés du dialogue politique 12. Au vu des difficultés rencontrées depuis le début du processus pour la tenue de ce dialogue dans le cadre à 27, il conviendrait, pour faciliter celui-
donnant de la visibilité à des mesures de coopération qui devraient être préparées dès à présent. Elles porteraient sur: ¬ Les actions envisagées au titre du dialogue sur la PESD 14. Une première liste de ces actions a été approuvée par le CAG Relex du 21 juillet 2003. Leur mise en œuvre sera essentielle pour dissiper les fausses perceptions et les appréhensions des pays méditerranéens à l'encontre de la PESD qui ont contribué à empêcher un dialogue constructif sur les questions de sécurité. Ces actions pourront, à la demande des pays méditerranéens, être organisées dans des groupes de format variable comprenant soit l'ensemble des pays partenaires (format existant), soit des sous-groupes régionaux qui ont identifié des besoins communs, soit un seul pays méditerranéen. Cette coopération, qui n'impliquera que ceux des partenaires qui le souhaiteront et sera placé sous la responsabilité du COPS, devrait être suffisamment articulée avec le cadre euro-méditerranéen. ¬ Les mesures de confiance de nature non militaire (« mesures de partenariat ») 15. Ces mesures, dont la mise à l'étude avait été décidée à la Conférence de Marseille, pourraient être adoptées sans réelles difficultés : il s'agit d'actions de coopération qui sont soit actuellement en cours d'élaboration (cas de lutte contre la criminalité et les trafics figurant dans le programme de coopération sur les matières JAI), soit susceptibles de s'appuyer sur des travaux et des décisions déjà prises par l'Union pour la sécurité maritime et l'environnement. 16. Il serait aussi souhaitable de renforcer la visibilité politique de l'action de l'UE concernant l'appui à la gestion des catastrophes naturelles, dont le contenu devrait être renforcé : exercices conjoints, meilleur partage d'informations qualitatives (séminaires/échanges d'expérience) et quantitatives (accès aux bases de données UE). c) La relance du dialogue sur les thèmes prioritaires 17. Si lourdement qu'il ait pesé sur le cours du processus, le conflit du Proche-orient a, en réalité, servi trop souvent d'alibi à l'immobilisme des partenaires et à dissimuler du côté des Etats méditerranéens des réticences tout autant explicables par l'absence d'une tradition de relations internationales entre pays du Sud. Plus que le souci de résultats immédiats qui a souvent inhibé le dialogue, c'est le processus même du dialogue qui doit être privilégié. 18. L'Union européenne devrait proposer aux pays méditerranéens de préparer, conjointement avec eux, un projet d'agenda sur des thèmes prioritaires pour le dialogue. - la lutte contre le terrorisme, pour lequel des progrès sont nécessaires et peut-être possibles désormais en fonction de l'évolution de la posture de la Syrie ; le dialogue politique devrait être complété par des coopérations concrètes (prévention, gestion des conséquences,...) ; - le renforcement de la démocratisation et le respect des droits de l'Homme (cf partie III) ; - la question des migrations et des échanges humains : la reprise du dialogue entamé dans le cadre du volet politique en octobre 2000 est jugée essentielle pour l'équilibre du partenariat par les pays du Maghreb. Elle serait aussi de l'intérêt de l'Union pour leur faire accepter les mesures de renforcement de la lutte contre l'immigration clandestine et faciliter la mise en œuvre des orientations de coopération du programme JAI dans ce domaine, en particulier par la conclusion d'accords de réadmission ; - la prévention des conflits et la gestion des crises. II. MIEUX AIDER LES PAYS MEDITERRANEENS A AFFRONTER LES DEFIS DU DEVELOPPEMENT 20. Les pays méditerranéens ne sont que très inégalement parvenus à s'insérer dans le marché mondial. La plupart d'entre eux ont su mener à bien l'ajustement de leur économie sous l'égide des institutions de Bretton Woods (stabilisation monétaire et budgétaire), mais la réduction de la dépense publique qui en a résulté n'a pas été compensée par une augmentation des investissements privés, locaux ou étrangers : la part de la Méditerranée dans les investissements directs européens était inférieure en 2000 à ce qu'elle était lors du lancement du Processus de Barcelone. Le taux de croissance par habitant des pays partenaires a sensiblement diminué depuis les vingt dernières années (malgré une remontée en fin de période) et le chômage, en particulier celui des jeunes, est un fléau qui atteint même les pays dont la croissance est la plus forte. 21. Outre l'instabilité persistante de la région, deux raisons importantes contribuent à expliquer cette évolution préoccupante, qui ont toutes deux pour effet de restreindre les possibilités d'investissement dans la zone : - Un retard en matière de réformes structurelles (lenteur de l'application des lois sur la régulation des marchés, entraves aux droits de propriété, restrictions sectorielles importantes aux investissements étrangers, retard du processus de privatisation, insuffisante ouverture de l'économie) ; - L'étroitesse des marchés nationaux que ne permet pas de compenser une intégration régionale et sous-régionale très faible (en 2000, le commerce intra-régional ne représentait que 4,7% du commerce extérieur des pays méditerra
balances commerciales); - l'impact, sur les productions textiles méditerranéennes, de la fin des Accords Textile-Vêtements au 1er janvier 2005 et l'adhésion de la Chine à l'OMC. 23. Sans une accélération considérable des réformes et du processus d'investissement, la plupart des pays concernés s'exposent à une crise dont les effets pourraient être profondément déstabilisateurs en termes économiques, environnementaux, mais également sociaux et donc politiques. Il est impératif pour l'Europe de prévenir cette situation, qui risque de se traduire par une augmentation considérable de la pression migratoire et de l'insécurité à ses frontières. Pour stimuler et soutenir réellement les réformes, elle doit s'interroger sur l'efficacité du dispositif qu'elle a projeté sur cette région : la question d'un rehaussement de son engagement doit être posée, tant sur le plan qualitatif que quantitatif. 24. L'Union devrait adapter sa coopération dans la mesure où ses priorités et la plupart des programmes ont été définis pendant les premières années du processus et devraient, de ce fait, être revus à la lumière de la situation présente. Malgré les efforts réalisés ces dernières années pour une meilleure concentration des actions sur des secteurs prioritaires, l'ensemble de la coopération de MEDA continue de souffrir d'une trop grande dispersion et d'une faible visibilité. 25. Il conviendrait donc de recentrer l'ensemble de la coopération financière sur les quelques priorités qui commandent le processus de développement des pays méditerranéens et auxquelles seraient adossés les moyens ou instruments de coopération correspondants : l'appui aux réformes dans le domaine économique, le développement social et humain, la gouvernance (transparence, responsabilisation des décideurs), la promotion des droits de l'Homme et de la démocratisation, l'intégration régionale et sous-régionale. A) PROMOUVOIR ET ACCOMPAGNER LES RÉFORMES DANS UN ESPRIT DE CO-RESPONSABILITÉ 26. La légitimité du Processus de Barcelone repose d'abord sur sa capacité à promouvoir les réformes. Or l'expérience de ses sept premières années a montré clairement que des résultats ne pourront être atteints dans ce domaine qu'en instaurant une véritable co-responsabilisation pour les décisions à prendre. Pour concrétiser cette démarche, l'Union pourrait réfléchir aux deux suggestions suivantes : a) Relancer durablement le comité de dialogue économique euro-méditerranéen à haut niveau 27. L'idée d'un dialogue économique euro-méditerranéen est ancienne. Elle s'est traduite initialement par l'organisation régulière de réunions d'experts et la créat
pérennisation et du renforcement de ce pilotage du volet économique reste posée : l'implication des ministères économiques doit aller jusqu'à l'évaluation de la coopération au regard de la mise en œuvre effective des réformes structurelles dans les pays partenaires 29. Ce dialogue, qui rassemblerait des responsables de haut niveau dans le domaine de la politique économique, émanant des Etats, de l'ensemble des directions compétentes de la Commission, en association avec la BEI sur les sujets de sa compétence, pourrait se réunir semestriellement. Ces réunions seraient consacrées à un examen périodique de la situation des économies des pays de la région et de la mise en œuvre des réformes ainsi qu'aux adaptations devant en découler pour les orientations de la coopération. 30. Les travaux de cette enceinte porteraient sur : - le suivi de la conjoncture économique dans la région ; - l'évaluation, sur la base d'indicateurs précis et mesurables, de l'impact économique de la coopération; - le suivi des réformes structurelles menées par les pays méditerranéens, des politiques économiques et commerciales et, de façon générale, de la mise en œuvre des accords d'association dans ce domaine ; - le dialogue pour promouvoir un développement orienté vers les plus défavorisés. 31. Ce dialogue, à travers une approche globale et stratégique des problèmes de développement dans la région, devrait permettre : - une meilleure adéquation entre les instruments de la coopération euro-méditerranéenne et l'évolution des besoins de nos partenaires; - de mobiliser l'aide européenne de façon réactive et adaptée pour aider les partenaires déjà avancés dans la mise en œuvre de leur accord d'association à passer le cap de la transition (pertes de recettes douanières, entreprises soumises à une concurrence accrue) ; - d'encourager les progrès en matière de réforme grâce à la diffusion de bonnes pratiques et à l'émulation entre pairs (par exemple la Tunisie pourrait y présenter sa politique de transition fiscalo-douanière). - d'améliorer la complémentarité entre les actions de la Commission et de la BEI, et entre ces actions et celles des Etats membres dans leur coopération bilatérale. 32. Ce dialogue pourrait être complété au niveau ministériel à un rythme adapté, par exemple tous les deux ans. · La contractualisation des programmes 34. Il s'agirait de lier l'intensité de l'aide à l'implication de nos partenaires dans la mise en œuvre des réformes, sur une base contractuelle, après s'être doté d'instruments d'évaluation rigoureux et transparents. L'on pourrait définir des engagements réciproques dans le domaine institutionnel, et non pas seulement en matière macro-économique. 35. Les critères sur la base desquels ces engagements seraient pris ne devraient pas présenter un caractère homogène et standardisé, mais prendre la forme d'objectifs et d'indicateurs adaptés à la spécificité de chacun des partenaires. Ceci supposerait, symétriquement, que la Commission procède à l'évaluation systématique de l'impact des programmes, au regard de conditionnalités qui auraient été elles-mêmes systématiquement communiquées aux Etats membres lors de l'adoption des projets. 36. Pour être pleinement efficace, cette démarche contractuelle devrait reposer sur une étroite articulation des crédits MEDA et des prêts de la BEI, leurs conditionnalités d'attribution pouvant ainsi se conforter mutuellement: les deux instruments devraient être plus souvent mobilisés pour les différents volets d'une même thématique. 37. Enfin, une approche plus responsabilisante pour la mise en œuvre des réformes par les pays partenaires ne saurait être efficace que dans le cadre d'une coordination plus étroite entre les Etats membres et la Commission, mais également avec la BEI et les donateurs extérieurs à l'Union (institutions financières internationales et Etats-Unis en particulier) dans le cadre de la coordination locale · L'association plus étroite des pays partenaires aux décisions 38. Une plus grande responsabilisation de nos partenaires supposerait également qu'en contrepartie, ces derniers soient en mesure de s'approprier pleinement les stratégies de coopération qui les concernent. Il conviendrait de mettre en œuvre une concertation plus étroite sur la définition des programmes de coopération, de façon à mieux rééquilibrer le pilotage du partenariat dans un sens moins unilatéral et à garantir un plus grand respect des objectifs définis en commun grâce à une meilleure appropriation par les partenaires. 39. Dans ce domaine, de réels progrès ont été réalisés, à tout le moins s'agissant de la coopération bilatérale et de la préparation des documents de stratégie et des programmes indicatifs nationaux qui font l'objet d'une plus grande concertation en amont avec les pays bénéficiaires. Afin d'assurer une « contractualisation » de cette concertation, il importerait d'introduire dans le prochain règlement (MEDA III) le principe selon lequel les pays méditerranéens participeraient à la définition des strat
adoptées à la Conférence de Valence de juin 1999. 41. Il conviendrait également de recourir plus systématiquement à la coprésidence des Conférences Ministérielles thématiques. c) Renforcer l'appui au développement institutionnel 42. Pour promouvoir les réformes, les programmes MEDA consacrés au développement institutionnel (environnement réglementaire, judiciaire et technique des entreprises ; secteur du logement) devraient être renforcés. La méthode des jumelages administratifs (mise à disposition pour plusieurs années dans les administrations du sud de fonctionnaires de bon niveau des Etats membres), qui a connu un succès certain dans le cadre du programme PHARE pour les pays candidats, mériterait de devenir un axe important de la coopération de l'Union en matière institutionnelle. Après validation des premières expériences actuellement prévues dans le cadre de la mise en œuvre des accords d'association, cette méthode pourrait être étendue à d'autres secteurs, tels que l'éducation, la santé, l'agriculture,... Cette approche pourrait compléter utilement celle des facilités d'ajustement sectoriel, dont la place tend à devenir centrale dans MEDA ce qui permet, certes, d'améliorer le rythme de décaissement de l'aide mais au détriment d'un véritable transfert de savoir-faire entre le nord et le sud. 43. Dans le même temps, il conviendrait de rechercher plus systématiquement les moyens d'identifier et d'entrer en contact avec les futurs décideurs des pays méditerranéens. d) Evaluer l'impact, en termes de développement durable, de la libéralisation économique 44. L'ouverture commerciale et le développement de productions plus compétitives sont susceptibles d'accroître la consommation des ressources disponibles ainsi que les émissions polluantes, particulièrement dans le secteur agricole (surconsommation et pollution de l'eau). Il importe donc d'évaluer l'impact sur l'environnement de la mise en œuvre des accords d'association, de façon régulière et par secteurs stratégiques. L'étude d'impact, en terme de développement durable, de la zone euro-méditerranéenne de libre-échange décidée lors de la Conférence de Stuttgart (1999) et dont la mise en œuvre devrait commencer bientôt, devrait permettre de mieux intégrer l'environnement dans les orientations stratégiques du partenariat. En outre, il conviendrait d'élargir à la dimension environnementale, sociétale et territoriale de l'agriculture l'étude d'impact de la libéralisation des échanges en matière agricole, prévue par le plan d'action de Valence. B) FAVORISER L'INTÉGRATION RÉGIONALE ET SOUS-RÉGIONALE 45. En matière économique, la lenteur des progrès réalisés par nos partenaires méditerranéens s'explique
partenariat euro-méditerranéen, la France a lancé une initiative en faveur d'un partenariat renforcé avec le Maghreb. Le choix du Maghreb comme première étape se justifie par le fait que cette région, la plus proche de nos frontières, a déjà posé les premières bases de son intégration à travers l'Union du Maghreb Arabe, en même temps qu'elle s'ouvre sur l'est de la Méditerranée avec le projet d'une zone de libre-échange réunissant le Maroc, la Tunisie, l'Egypte et la Jordanie (Déclaration d'Agadir). 47. Comme le suggère la Commission dans sa communication en vue de la Conférence de Naples, il s'agirait de définir avec les trois pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie) des programmes et projets communs qui favoriseraient l'intégration régionale, en particulier dans le domaine des infrastructures, auxquels l'aide de l'UE (fonds MEDA associés à des prêts de la BEI) pourrait être consacrée. Les secteurs des transports, de l'énergie, des technologies de l'information et de l'immigration pourraient être envisagés. 48. Cette coopération sous-régionale avec le Maghreb constituerait une « expérience pilote », destinée à être généralisée, dans son principe, à l'ensemble des pays partenaires. Parallèlement, l'Union devrait poursuivre son effort en faveur de l'intégration de l'ensemble de la Méditerranée, notamment à travers son soutien à l'initiative d'Agadir dont l'extension à d'autres pays devrait être encouragée (cf infra). b) Offrir une « prime à la coopération sous-régionale » 49. Il pourrait être envisagé de réserver une partie de l'enveloppe régionale de MEDA à des programmes destinés à stimuler l'intégration d'une sous-région. Une prime serait ainsi donnée aux pays partenaires qui prendraient l'initiative de définir ensemble des programmes communs. Mais ceci suppose à tout le moins que la part de l'enveloppe régionale au sein de MEDA soit augmentée pour retrouver le niveau initialement fixé de 10%. 50. Pourrait en bénéficier l'initiative forte et prometteuse qu'est la constitution d'une zone de libre échange d'ici 2006 dans le cadre de la Déclaration d'Agadir (accord paraphé le 11 janvier à Amman). Sur ce point, l'effort préconisé en direction des trois pays du Maghreb pourrait inciter l'Algérie à se joindre au Processus d'Agadir, pour favoriser une véritable intégration régionale entre les trois pays de la sous-région. En outre, l'assistance européenne à la mise en place de la zone de libre échange mériterait d'être encore enrichie et accrue, dans le prolongement du dialogue commercial déjà à l'œuvre. C) DYNAMISER LA COOPERATION FINANCIERE 51. L'Union a maintenu jusqu'à présent son aide à la Méditerranée peu ou prou au niveau de celle des premières années du proc
justify">52. Dans les années à venir, l'effort financier européen devra être de nature à accompagner les réformes identifiées comme prioritaires par les différents partenaires impliqués dans le dialogue euro-méditerranéen. En tout état de cause, la diversification des instruments de coopération (programme géographique MEDA et programmes thématiques) devra être encouragée. A cet égard, les pistes récemment proposées par la Commission pour mobiliser les ressources communautaires au bénéfice des « nouveaux voisins » mériteraient aussi d'être approfondies afin que les pays méditerranéens bénéficient pleinement des avantages attendus de ce nouveau programme. La synergie entre les différents instruments aura pour conséquence d'accroître l'effet de levier des fonds MEDA, qui devront notamment mieux s'articuler avec les opérations de la BEI. b) Evaluer le dispositif financier au regard des besoins de la transition économique 53. Le dispositif d'aide actuel de l'Union repose essentiellement sur une assistance d'expertise / formation pour l'appui à la transition et aux réformes (fonds MEDA accordés en priorité au volet commercial) et sur les opérations de la BEI. En revanche, il n'est pas destiné à contribuer à lui seul au financement du développement des pays méditerranéens, censé être assuré par l'investissement privé, lequel est jusqu'à présent très insuffisant en raison, comme on l'a vu, du retard préoccupant des réformes et du processus d'intégration régionale. 54. C'est pourquoi, conformément à la décision du Conseil Ecofin du 15 mars 2002, les conclusions du Conseil européen de Barcelone reprises dans le plan d'action de Valence, ont prévu qu'au terme de l'évaluation de la FEMIP, prévue pour la fin de l'année 2003, et eu égard aux résultats des consultations avec nos partenaires du Processus de Barcelone, la décision serait prise, soit de maintenir cette formule, soit d'envisager la création d'une filiale à participation majoritaire de la BEI, destinée aux pays partenaires du Bassin méditerranéen 55. Quelle que soit l'issue du débat, il importera que la solution retenue permette de mieux répondre aux défaillances du financement du secteur privé et de favoriser le développement de l'intégration régionale. Le dispositif financier retenu (notamment prêts et dons) devrait avoir pour mission de répondre aux besoins spécifiques des économies méditerranéennes, de façon incitative et sur la base d'une expertise approfondie des problématiques économiques de la région. III. PROMOUVOIR UNE ACTION AMBITIEUSE DANS LE DOMAINE DU DIALOGUE CULTUREL ET DU DEVELOPPEMENT SOCIAL ET HUMAIN A) INSTITUER LE DIALOGUE DES CULTURES 56. Il avait été reconnu, dès la Conférence de Barcelone, que ce dialogue rev&eci
culturel orienté en particulier vers les jeunes, à favoriser une meilleure compréhension réciproque entre les deux rives de la Méditerranée, puisse être lancée officiellement à Naples. 58. La mise sur pied du dialogue culturel euro-méditerranéen est devenue d'autant plus urgente qu'il est, sur un autre plan, un complément indispensable de l'action à mener auprès de nos partenaires méditerranéens dans le domaine du développement social et humain dont les retards sont, comme l'a souligné le récent rapport du PNUD consacré aux pays arabes, un handicap majeur pour leur développement. Aussi l'Union, avec l'aide du comité de sages désignés à cet effet par le président de la Commission, devrait-elle également procéder à un réexamen de l'ensemble de cette question, tant sous l'angle du dialogue (qui relève du cadre du volet politique) que pour les projets de coopération. B) RENFORCER LES ACTIONS DE COOPÉRATION DANS LE DOMAINE ÉDUCATIF ET SOCIAL 59. Les réformes structurelles dans le domaine de l'éducation et de la formation où les performances des pays méditerranéens sont globalement médiocres devraient, à cet égard, constituer l'une des priorités faites de la coopération euro-méditerranéenne. Les pistes suivantes pourraient être explorées : - accélérer et renforcer les actions prévues en faveur de l'évolution du statut de la femme, et en particulier concernant le droit des femmes à l'éducation ; - poursuivre l'effort en faveur de l'éducation de base, qui continue à souffrir de disparités considérables entre sexes, régions (urbaines / rurales notamment) et pays ; -œuvrer, au plan communautaire, au rapprochement des dispositions nationales dans chaque Etat membre en matière d'immigration, de façon à faciliter le long séjour aux fins d'études et de formation professionnelle, afin que leurs bénéficiaires puissent valoriser la formation acquise dans leur pays d'origine ; - Dans le cadre du projet de la Présidence de créer un espace euro-méditerranéen de l'enseignement supérieur lors de la Réunion informelle des ministres de l'éducation (Catane, 7-8 novembre 2003), prendre appui sur l'expérience de l'espace commun UEALC de l'enseignement supérieur et sur le programme Tempus-Meda, en articulant le processus autour des priorités suivantes : développement de la mobilité des étudiants pré et post doctorants, des enseignants et des chercheurs, analyse des mécanismes nationaux mis en place par les pays sur les pratiques d'évaluation et de contrôle pour garantir la qualité de l'enseignement supérieur, analyse de la compatibilité des systèmes de crédits mis en place dans les différents pays, analyse des formations techniques supérieures. 60. Pour accompagner les
communautaire et bilatérale apportée dans ce domaine est encore trop faible au regard des dépenses d'infrastructures, par exemple. C) PROMOUVOIR LES OBJECTIFS DU PARTENARIAT EN MATIÈRE DE DÉMOCRATISATION ET DE RESPECT DES DROITS DE L'HOMME 61. La récente communication de la Commission sur les droits de l'Homme et la démocratisation en Méditerranée propose des pistes novatrices et concrètes pour dépasser un dialogue sur les droits de l'Homme souvent trop formel, et progresser dans un domaine où les avancées demeurent insuffisantes. Cette relance paraît particulièrement opportune dans le nouveau contexte régional, au moment où la multiplication des actes terroristes conduit les Etats de la région à privilégier une approche répressive et où la démocratisation en Méditerranée suscite un nombre croissant d'initiatives. 62. En complément des propositions formulées par la Communication, certaines mesures pourraient contribuer à améliorer l'action de l'Union européenne dans le domaine de la démocratie et des droits de l'Homme, dans le respect des différents modèles sociaux, qu'il s'agisse du renforcement et de l'enrichissement des programmes de coopération existants, ou de la mise en œuvre de méthodes plus responsabilisantes fondées sur l'évaluation et le dialogue. a) Renforcer la promotion des droits de l'Homme dans les programmes de coopération: 63. En ce qui concerne les droits de l'Homme dans le cadre de MEDA proprement dit, les moyens financiers les plus importants sont consacrés à leur promotion indirecte à travers des projets bilatéraux portant plus largement sur la gouvernance et le renforcement de l'Etat de droit (coopération policière et judiciaire). Les pays du Maghreb en sont les principaux bénéficiaires. Cette approche globale et plus facilement appropriable par les Etats doit être renforcée et étendue à l'ensemble des pays partenaires. Elle pourrait se traduire par la mise en place de facilités d'ajustement sectoriel dans certains domaines de la gouvernance et de l'Etat de droit (coopération judiciaire et policière en particulier), associées à des échéances et à des indicateurs précis. 64. Mais il convient également d'augmenter sensiblement les moyens consacrés aux actions directes en faveur des droits de l'Homme, en particulier à travers l'Initiative européenne pour la démocratie et les droits de l'Homme (coopération en matière de systèmes pénaux et pénitentiaires, soutien aux media, renforcement des syndicats, aides aux victimes de la torture,...), qui restent encore trop modestes à ce jour s'agissant de la Méditerranée. 65. En ce qui concerne la société civile, la mise en place d'un programme de renforcement des capacités des acteurs de la société civile permettrait de répondre à un important besoin. Un tel programme pourrait être régional ou sous-régional et s'articulerait &ea
inopérante, une réflexion devrait être engagée sur les moyens de responsabiliser plus efficacement nos partenaires. En effet, l'adoption de mesures purement facultatives (plans d'action) pourrait ne pas suffire à dépasser les réticences des Etats, sachant que les crédits additionnels pour accompagner ces plans d'action seront nécessairement limités. 67. Les mesures suivantes pourraient contribuer à responsabiliser plus efficacement les partenaires : · Evaluation des actions et des progrès réalisés en matière de droits de l'Homme : 68. Dans un premier temps, il conviendrait de procéder à un bilan pays par pays des résultats des actions régionales et bilatérales financées par le programme MEDA, comme de l'ensemble des initiatives adoptées par ailleurs (ex. Réseau euromed des droits de l'Homme), dans le domaine de l'Etat de droit, de la démocratie et des droits de l'Homme. 69. Pour assurer le suivi technique des plans d'action, il importe, comme le propose la Communication, d'instituer progressivement des sous-comités consacrés aux droits de l'Homme dans le cadre de l'ensemble des accords d'association, avec une souplesse nécessaire dans l'application du dialogue selon la situation particulière de chaque pays. L'élaboration et l'actualisation des plans d'action pourraient avoir lieu dans le cadre du dialogue à haut niveau renforcé, tel qu'envisagé avec le Maroc, eu égard à la sensibilité de la matière. Pour donner à ce dialogue une base concrète et substantielle, il conviendrait que les partenaires examinent, chaque année et pour chacun des pays partenaires, un rapport sur la situation en matière de droits de l'Homme et les progrès réalisés notamment dans le cadre des plans d'action, dans le cas où ceux-ci auront été adoptés, qui pourrait être rédigé de façon contradictoire avec l'aide des réseaux d'ONG (en particulier le Réseau euromed des droits de l'Homme). 70. De même, l'analyse de la situation en matière de droits de l'Homme dans chaque document de stratégie-pays devrait être considérablement renforcée et approfondie. 71. Il conviendrait par ailleurs, à l'occasion de l'adoption du programme MEDA III, de consacrer dans le nouveau règlement le principe de la participation de la société civile à la définition et au suivi des stratégies de coopération et des programmations, déjà initiée dans la pratique. 72. Les plans d'action pour les droits de l'Homme devraient s'articuler étroitement avec les plans d'action prévus par l'initiative Europe élargie-nouveaux voisins. Les progrès réalisés par les partenaires en matière de droits de l'Homme feraient ainsi l'objet des "benchmarkings" prévus dans cette initiative. Ils devraient déterminer l'accès des pays partenaires aux coopérations avancées prévues par l'initiative (accès à certains programmes communautaires, aux « quatre libe
paritaire et non coercitif. 75. Pour résoudre les difficultés graves que ce dialogue permanent n'aurait pas permis de prévenir, un mécanisme de crise devrait être introduit dans le cadre du prochain programme MEDA (2007-2013). A l'initiative de l'une des parties (un pays partenaire ou le Conseil à la majorité qualifiée), des consultations seraient engagées, au niveau des hauts fonctionnaires voire au niveau ministériel, en format Troïka, devant aboutir à des engagements réciproques pour remédier à la situation. Ces consultations seraient suivies d'une période d'observation, au terme de laquelle les mesures appropriées seraient adoptées. ** 76. Les suggestions qui précèdent ne sont que des premières pistes de réflexion qui devront être approfondies et complétées. Ainsi que l'a proposé la France lors de la récente Conférence de Crète, cette tâche pourrait être confiée à un Comité de personnalités de haut niveau, dont la mission serait de tracer les orientations à moyen et long terme pour un partenariat renforcé entre l'Union européenne et les pays méditerranéens, prenant en compte le nouveau contexte de la région et l'initiative « nouveaux voisins ». Pour qu'il puisse travailler utilement, il serait nécessaire que la composition de ce Comité soit limitée à une dizaine de personnalités jouissant d'une autorité et d'une expérience reconnues, choisies à parité entre le nord et le sud, d'un commun accord entre les partenaires. Si elle recueillait l'agrément de ceux-ci, la décision pourrait être avalisée lors de la Conférence de Naples. Le rapport et les propositions du Comité, qui devraient être remis à la fin du 1er semestre 2004 et être rendus publics, pourraient alimenter de manière visible et efficace la réflexion de fond sur le Processus euro-méditerranéen et, à ce titre, être ensuite adoptés par les Etats du partenariat. Enfin, l'Assemblée parlementaire prévue par le plan d'action de Valence devra également jouer un rôle utile pour le renforcement du partenariat dans ses diverses composantes. N° 1297 - Rapport d'information : Avenir du processus euroméditerranéen mission d'information (Roland Blum) 1 La composition de cette mission figure au dos de la présente page 2 Déclaration de Robert Schuman, le 9 mai 1950 3 Les Quinze plus les 12 partenaires du Sud et de l'Est de la Méditerranée : les 3 pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie), Malte, Egypte, Chypre, Israël, Autorité palestinienne, Jordanie, Syrie, Liban et Turquie. 4 La mission d'information sur l'avenir du Processus euro-méditerranéen est composée de M. Roland Blum, Président, M. Jean-Claude
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