N° 1624 ___ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 26 mai 2004. ____________________________________________ RAPPORT D'INFORMATION DÉPOSÉ PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN sur la programmation et la consommation des fonds structurels européens
ET PRÉSENTÉ PAR M. Jean-Louis DUMONT, Député. -- INTRODUCTION 5 I.- LE RISQUE DE DÉGAGEMENT D'OFFICE SEMBLE ÉCARTÉ, MAIS LA VIGILANCE RESTE NÉCESSAIRE 7 A.- RAPPEL DES RÈGLES ET PROCÉDURES RELATIVES AUX FONDS STRUCTURELS 7 B.- LE RATTRAPAGE ENTREPRIS DEPUIS L'ÉTÉ 2002 A PORTÉ SES FRUITS 9 1.- L'état d'avancement des fonds structurels 9 2.- L'impulsion donnée par le Gouvernement à l'été 2002 10 3.- Une grande mobilisation à tous les niveaux et un changement culturel du réseau du Trésor 11 C.- UNE TRÈS GRANDE DIVERSITÉ DE LA CONSOMMATION DES FONDS SELON LES RÉGIONS 13 D.- LA VIGILANCE RESTE NÉCESSAIRE POUR TERMINER LE CYCLE DE PROGRAMMATION 14 II.- LE PRÉSENT CYCLE DE PROGRAMMATION EST RICHE D'ENSEIGNEMENTS ET DE QUESTIONS POUR L'APRÈS-2006 17 A.- LA RECHERCHE D'UNE MEILLEURE PROGRAMMATION DES FONDS STRUCTURELS 17 1.- Les conditions d'une programmation de qualité 17 2.- Les indicateurs de la DATAR sont en grande partie inadaptés pour rendre compte des réalités economiques 18 B.- LA NÉCESSITÉ D'UNE DÉCENTRALISATION PÉRENNE DES FONDS STRUCTURELS 20 1.- L'article 35 du projet de loi sur les responsabilités locales et l'amendement de pérennisation. 20 2.- Une nécessaire flexibilité dans la mise en oeuvre 22 3.- Un partenariat nécessaire entre tous les acteurs 25 4.- Eviter la tentation de substituer les fonds européens aux crédits de l'État 27 C.- LES INCERTITUDES SUR L'APRÈS 2006 28 1.- Le début des discussions sur les prochaines perspectives financières 2007-2013 28 2.- Le nécessaire maintien de fonds structurels pour les régions des 15 États membres 29 CONCLUSION 31 EXAMEN EN COMMISSION 33 LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 41 _____________________________________________________________________ INTRODUCTION Votre Rapporteur spécial pour les Affaires européennes a été chargé, en début d'année, d'une mission de contrôle et d'évaluation sur la programmation et la consommation des fonds structurels européens, dans le cadre de la politique régionale de l'Union européenne (1). Dans le cadre de cette mission, il faut partir du constat - unanimement partagé sur tous les bancs des assemblées lors des deux derniers débats budgétaires sur le prélèvement au profit des Communautés européennes - que les fonds structurels étaient insuffisamment consommés. En octobre dernier, nous craignions unanimement et légitimement un « dégagement d'office » effectué par la Commission européenne, en application des règlements communautaires, à savoir que les crédits affectés à la France pourraient être purement et simplement annulés s'ils n'étaient pas consommés au plus tard dans les deux années suivant la date à laquelle ils auraient dû l'être. Votre Rapporteur spécial a alors entrepris quatre déplacements dans quatre régions différentes : Lorraine, Auvergne, Nord-Pas-de-Calais et Aquitaine. Il a également sollicité et obtenu des informations sur la situation d'une cinquième région, l'Alsace, particulière en ce sens qu'elle est la première et la seule a avoir vécu une expérience de décentralisation totale des fonds structurels. A chaque fois ont été rencontrés les responsables de la préfecture de région (Préfet de région, Secrétaire général pour les affaires régionales - SGAR, « cellule Europe », Trésorier-payeur général - TPG), de la préfecture de département (Secrétaire général), ainsi que du Conseil régional (Président du Conseil régional, directeur de cabinet, « cellule Europe »). Les responsables de la DATAR sur les fonds structurels européens ont également été auditionnés. Cette plongée au cur des dispositifs locaux d'utilisation des fonds structurels a été très riche d'information, à la mesure de la complexité des réalités économiques sous-jacentes. Ce que l'on constate est beaucoup plus complexe que ce qui avait pu être imaginé ex ante et nécessite une analyse très fine et détaillée de la situation. Les réalités régionales sont très différentes les unes des autres ; tel est le premier constat, majeur. Aucune des quatre régions visitées n'était semblable à l'autre : taille, et importance des fonds en jeu, relations entre les représentants de l'État et les collectivités locales, taille des projets, état d'avancement des projets... Et les informations recueillies sont à la hauteur de la diversité des situations qui font la richesse de nos régions. Votre Rapporteur spécial a en outre fait le constat, inattendu au départ de la mission, que si les fonds structurels ont connu un démarrage très lent en début de période de programmation (2000-2002), ils ont ensuite été l'objet d'un vigoureux rattrapage qui a permis d'éviter, dans une très large mesure, le dégagement d'office. C'est un succès pour notre pays qui sans cela aurait été privé de ressources auxquelles il pouvait légitimement prétendre. Les conditions de ce rattrapage montrent néanmoins que nous devons tous rester vigilants, jusqu'à la fin de la période de programmation en 2008, pour que tous les crédits soient engagés et payés dans les délais prescrits. Il convient en outre de s'interroger sur les conditions du partage des rôles entre l'État et les collectivités locales dans la programmation et l'utilisation de ces fonds. Votre Rapporteur est d'avis que ces fonds doivent être décentralisés de façon pérenne. C'est le sens de l'amendement au projet de loi sur les responsabilités locales qu'il a proposé lors de la discussion de ce texte en première lecture à l'Assemblée nationale. Cet amendement ait été repris par votre Rapporteur pour avis, M. Laurent Hénart, puis par votre Commission, et enfin par notre Assemblée (2). Ce texte est maintenant au Sénat en deuxième lecture. Il faut également tirer de ces missions en régions quelques enseignements qui peuvent être utiles pour la préparation des prochaines perspectives financières de l'Union européenne, dont les discussions ont commencé en février dernier. Il est nécessaire que les fonds structurels continuent après 2006 à bénéficier aux régions de l'Union européenne à quinze, comme d'ailleurs l'a proposé la Commission européenne en février dernier, à l'initiative de l'ancien Commissaire chargé de la politique régionale, M. Michel Barnier. I.- LE RISQUE DE DÉGAGEMENT D'OFFICE SEMBLE ÉCARTÉ, MAIS LA VIGILANCE RESTE NÉCESSAIRE A.- RAPPEL DES RÈGLES ET PROCÉDURES RELATIVES AUX FONDS STRUCTURELS En début de programmation, des documents uniques de programmation (DOCUP), base de l'intervention des fonds structurels européens, sont élaborés en partenariat entre l'État, les régions et la Commission européenne, en recherchant une synergie maximale avec les Contrats de plan État-région (CPER). Il existe un lien fort de fait entre le Contrat de Plan État Région (CPER) et le Document unique de programmation (DOCUP) objectif 2. La France bénéficie, au titre de la politique régionale européenne, de plus de 16 milliards d'euros de financements communautaires au travers des divers fonds structurels pour la période 2000-2006. On rappellera que les fonds structurels européens sont le : - Fonds européen de développement régional - FEDER (développement régional), - le Fonds social européen - FSE (soutien de l'emploi), - le Fonds de cohésion (faciliter le rattrapage économique pour l'entrée dans l'euro), - le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole - FEOGA (développement rural) - et l'Instrument financier d'orientation de la pêche - IFOP (pêche). Depuis l'année 2002, les fonds sont organisés en trois objectifs prioritaires : - objectif 1 (rattrapage des région en retard de développement), - objectif 2 (reconversion économique et sociale des régions en difficulté structurelles) et - objectif 3 (adaptation et modernisation des politiques et systèmes d'éducation). La Commission européenne a également créé des programmes d'initiative communautaire (PIC) : - URBAN (développement durable des villes et des quartiers en crise), - INTERREG (coopération transfrontalière), - LEADER+ (développement rural par des initiatives locales), - EQUAL (lutte contre les inégalités et discriminations dans l'accès au marché du travail). Elle gère aussi des « actions innovatrices », afin d'explorer de nouvelles voies d'action et des projets pilotes dont on peut donner quelques exemples : - aides à la commercialisation de produits agricoles de qualité - aide à l'utilisation des NTIC (Internet...) - amélioration des réseaux d'infrastructures, de la voirie rurale, des services de transport - professionnalisation des acteurs du tourisme et développement des politiques de communication - amélioration des dessertes des zones d'activité - contribution à la maîtrise de l'effet de serre et à la réduction de la production de déchets - redéveloppement des bassins miniers et sidérurgiques - aide au développement des parcs naturels régionaux, etc. Il ressort des analyses de la DATAR, à partir des données de la base PRESAGE, que la programmation porte, à la date du 1er mai 2004, à hauteur de 41 % sur les domaines de l'environnement productif (agriculture, sylviculture, zones rurales, pêche, aides aux entreprises, tourisme, recherche, développement technique et innovation), 36 % sur les infrastructures de base (transports, télécommunications et société de l'information, énergies, environnement y compris eau, aménagement et réhabilitation, social et santé) et 20 % sur les ressources humaines (politique du marché du travail, intégration sociale, éducation, formation professionnelle, adaptabilité, actions positives pour les femmes). La programmation de projets financés sur fonds européens s'inscrit dans une procédure lourde. L'État français a d'abord négocié avec la Commission européenne, en 2000, pour chaque objectif et pour chaque PIC, un DOCUP (document de programmation unique), complété d'un complément de programmation, qui définissent l'enveloppe budgétaire et le cadre où devront s'insérer les projets. Il y a un DOCUP par région pour les objectifs 1 et 2, un DOCUP national pour l'objectif 3 et un DOCUP pour chaque PIC. En France les préfets de région sont en général « autorité de gestion » et « autorité de paiement », au sens du règlement n° 1260/1999 du 21 juin 1999 portant dispositions générales sur les fonds structurels. Ensuite chaque porteur de projet (collectivité locale, groupement de collectivités, associations, entreprises privées, particuliers) dépose une demande auprès des services de la préfecture. Dans chaque région a été mis en place un comité de programmation (qui étudie en continu toutes les demandes) et un comité de suivi (qui se réunit une fois par an avec la Commission européenne). Les préfectures font appel aux services instructeurs des ministères techniques (agriculture, emploi, transports, équipement...) en tant que de besoin. Les Trésoriers payeurs généraux sont chargés du paiement de l'utilisation des fonds. Des mécanismes de contrôle de l'utilisation des fonds très rigoureux sont mis en place, au niveau national et communautaire. B.- LE RATTRAPAGE ENTREPRIS DEPUIS L'ÉTÉ 2002 A PORTÉ SES FRUITS 1.- L'état d'avancement des fonds structurels Sur le FEDER on constate que toutes les régions ont échappé au dégagement d'office au 31 décembre 2003. Cela s'est fait souvent d'extrême justesse au prix d'une marche forcée dans les derniers mois de l'année 2003. Si la situation du FSE s'est améliorée en 2003, 9 régions objectifs 2 (34 millions d'euros) et 3 régions objectif 1 (57 millions d'euros) n'ont pas échappé au dégagement d'office au 31 décembre 2003. La raison communément invoquée est la lourdeur des procédures liée aux projets FSE, la difficulté des critères de sélection, ainsi que la concurrence entre les projets relatifs à l'emploi relevant de l'objectif 2 (régionalisé) et de l'objectif 3 (national). On a aussi entendu que le ministère du Travail n'avait pas une culture de projet, contrairement à l'Agriculture, rompue depuis longtemps aux procédures communautaires. Les désaccords entre le ministère du Travail et la Commission européenne ont également ralenti la programmation en début de période. On a pu évoquer également comme cause de sous-consommation le fait que la part du FSE a été attribuée par l'État, en début de programmation, et qu'elle a été surévaluée par rapport aux besoins. Ainsi la région Aquitaine en actuellement est à demander à la Commission européenne l'autorisation de transférer quelques 22 millions d'euros du FSE vers le FEDER... L'état d'avancement des fonds structurels au 1er mai est le suivant, selon les chiffres de la DATAR. _ Programmes régionaux objectif 1 et objectif 2 La programmation continue de progresser et le niveau atteint (59,3 % en crédits communautaires) est supérieur au niveau optimal (48,8 %). Les taux de réalisation sont de 23,9 % en crédits communautaires, ils restent encore inférieurs au taux de réalisation optimale (42,6 %). La situation au regard du dégagement d'office progresse favorablement mais reste très différente selon les régions, les objectifs et les fonds. Le niveau de programmation des régions qui bénéficient d'une subvention globale (51,5 % en crédits communautaires, soit une progression de 0,9 %) est très différenciée selon les régions. Le niveau de réalisation (en crédits communautaires) est de 22,3 %, soit une progression de 1,5 % par rapport au mois précédent. _ Programmes d'initiative communautaire Le rythme d'avancement d'URBAN reste en retrait, mais il convient de relever une amélioration au niveau de la réalisation (augmentation de 1,6% de paiements en coût total comparé au mois précédent). L'évolution est très différenciée selon les programmes. Les sites de Bordeaux, de Grigny / Viry-Chatillon et le Mantois en Ile-de-France présentent des situations sensiblement plus satisfaisantes au regard de celles des autres sites. La programmation de LEADER+ progresse (25 % en coût total), mais elle reste en retrait par rapport au taux de programmation optimale (40 %) La mise en uvre du volet 1 a atteint un taux de programmation en coût total de 28,7 %. Pour le volet 2, le niveau de programmation reste faible, compte tenu de la priorité arrêtée par les GAL pour mener à bien leur plan de développement. Dans l'attente du lancement du nouvel appel à projets, la programmation du programme EQUAL est restée stable en avril. De même, les dépenses FSE réalisées ont très légèrement progressé pour atteindre 16 % de la dotation 2000-2006 en coût FSE et 19 % en coût total. _ Programmes nationaux La programmation en crédits communautaires du PNAT 1 et 2 (Programme nationale d'assistance technique) est de 39 % et de 78,9 % pour le PNI (Programme national informatique). Ce dernier programme finance notamment les investissements liés à l'informatisation, les dépenses de rémunération des animateurs régionaux et nationaux programmées jusqu'en 2006. Le taux de paiement des crédits communautaires est de 32 % du montant programmé pour le PNAT 1 et 2 et de 38 % pour le PNI. Grâce à la signature de 322 nouvelles conventions en avril, la barre des 15.000 conventions cofinancées par l'Objectif 3 depuis 2000 a été franchie. En coût total, la programmation s'établit à un niveau de 55 % de la dotation 2000-2006, et représente 5,8 milliards d'euros. Les dépenses totales réalisées ont progressé de 76 millions d'euros en avril, pour atteindre 3,2 milliards d'euros en cumul depuis 2000 soit 30 % de la dotation 2000-2006. 2.- L'impulsion donnée par le Gouvernement à l'été 2002 Après deux années de mise en uvre, le faible taux d'avancement des projets en terme de programmation (15 %) et d'engagement (6 %) avait poussé le Gouvernement à prendre en 2002 des mesures de simplification des procédures, de renforcement de l'appui aux projets et d'une plus grande association des collectivités locales, et notamment des régions afin d'éviter l'application de la règle dite du « dégagement d'office », qui implique que les fonds sont perdus au-delà de deux ans de retard. Face à cela, le Gouvernement a pris, en 2002, des mesures tendant à : - une simplification substantielle des procédures (« service unique » pour les demandes de soutien, élargissement des DOCUP et compléments de programmation, limitation du nombre de cofinancements, possibilité de financer des projets déjà commencés - voire terminés ! -, réduction du nombre de pièces à joindre au dossier de demande, dispense de l'avis du TPG pour les projets inférieurs à 23 000 euros, création de fonds de concours locaux pour accélérer les paiements) - un renforcement de l'appui aux projets (rôle d'animation des secrétariat généraux pour l'action régionale - SGAR des préfectures de région et des trésoriers-payeurs, édition de guides simplifiés, dossiers types, actions de communication) - une plus grande association des collectivités locales (expérience de transfert de compétence à la région Alsace, délégation de compétence par des subventions globales à une douzaine de régions). Ce plan a tenu ses objectifs. Notre pays s'était caractérisé en début de programmation par une inutile lourdeur des procédures nationales qui s'ajoutait à la lourdeur des procédures budgétaires. Les règles nationales imposaient souvent des contraintes supplémentaires par rapport aux règlements communautaires. Les DOCUP et leurs compléments de programmation étaient inutilement détaillés, interdisant de fait de nombreux projets. Les circuits d'engagement, de paiement et de contrôle étaient inutilement longs et complexes. Sur tous ces points, l'effort de simplification a porté ses fruits et levé les blocages. La possibilité de délégation de l'autorité de paiement au Trésor public (ou à la Caisse des dépôts) a été partout une réussite. 3.- Une grande mobilisation à tous les niveaux et un changement culturel du réseau du Trésor _ La mobilisation des préfectures Dans les quatre régions visitées, nous avons pu constater la grande mobilisation des services déconcentrés de l'État et des collectivités locales. Les SGAR ont mis en place des cellules « Europe » qui ont animé des équipes très bien formées qui ont sillonné le territoire en faisant la promotion de instruments financiers européens. Des documents multiples ont été réalisés : guides pratiques, manuels de procédures, CD-ROM, etc. Ainsi en Lorraine les mesures gouvernementales prises en 2002 ont amélioré substantiellement la programmation et la consommation des fonds structurels. Le SGAR a constitué une équipe d'animation qui a sillonné le territoire, avec les documents explicatifs correspondants. Les cellules « Europe » de la préfecture de région et des préfectures de département ont été renforcées. Les TPG ont joué le jeu en participant activement à l'aide au montage des dossiers pour respecter les règles communautaires rigoureuses. _ Le réseau du Trésor public Les quatre régions visitées ont toute montré l'extrême mobilisation du réseau du Trésor public (particulièrement le TPG de la Meuse). Il s'agit d'une véritable révolution culturelle où des personnels traditionnellement amenés à faire du contrôle tatillon de la dépense publique ont été conduits à faire de la promotion qualitative de la dépense des fonds européens. Les informations recueillies laissent à penser que cette évolution n'a pas été acquise sans mal, le réseau du Trésor ayant eu une première réaction d'opposition à cette évolution. Force est néanmoins de constater que cette mutation a été réussie et remarquable. Peut-être les réseaux du Trésor ont-ils craint de se voir doublés par ceux de la Caisse des dépôts et consignation, ou encore se sont-ils interrogés sur leur rôle résiduel dans le processus en cours de décentralisation ? Nous sommes passés en quelques mois d'une situation où les TPG remettaient souvent en cause les projets sélectionnés par les préfets, pour des motifs juridiques, à une autre où ces réseaux de contrôleurs financiers ont été impliqués très en amont dans la conception des dossiers. Chaque dossier est examiné simultanément du point de vue financier, économique et juridique, ce qui évite le double visa et leur éventuelle contradiction. Les réseaux du Trésor ont même apporté un soutien capital aux porteurs de projets, en les aidant à monter des projets qui demandent une ingénierie administrative dont tous ne disposent pas. Leur intervention a été décisive pour faire avancer des projets très difficiles à mettre au point à cause de la complexité et de la particularité des procédures communautaires. Votre Rapporteur spécial a constaté une utilisation habile du réseau des contrôleurs financiers au niveau de chaque collectivité locale. Le résultat remarquable a été un raccourcissement des délais d'instruction et un raccourcissement des délais de paiement (moins de 5 jours). _ Le rôle de la DATAR Plusieurs gestionnaires de fonds européens se sont plaints du rôle de la DATAR. L'avis de la DATAR est nécessaire pour les grands projets structurants. La DATAR est un intermédiaire nécessaire pour les relations avec la Commission européenne. Les responsables sur le terrain critiquent souvent la mauvaise connaissance par la DATAR des réalités régionales et économiques. De plus ses interventions sont souvent vécues comme un allongement inutile des délais. Pour se défendre, la DATAR fait valoir qu'elle est la seule administration à avoir une vision globale de l'utilisation des fonds structurels en France, et que son intervention est nécessaire pour une bonne cohérence des projets. Elle explique aussi que plusieurs retards critiqués par les responsables de région sont dus aux procédures devant la Commission européenne et non à son intervention. Le manque de moyens est également invoqué. C.- UNE TRÈS GRANDE DIVERSITÉ DE LA CONSOMMATION DES FONDS SELON LES RÉGIONS Les taux de programmation et de réalisation sont très différents par région, comme le montrent les tableaux de la DATAR issus de la bases PRESAGE et présentés ci-dessous. TAUX DE PROGRAMMATION PAR RÉGION - Objectif 2
TAUX DE RÉALISATION PAR RÉGION - Objectif 2
D.- LA VIGILANCE RESTE NÉCESSAIRE POUR TERMINER LE CYCLE DE PROGRAMMATION Le rattrapage de programmation effectué au cours de l'année 2003 a permis d'éviter le risque de dégagement d'office au 31 décembre dernier. L'élan donné a été tel que de nombreuses régions doivent maintenant changer de méthode de programmation. Jusqu'au 31 décembre de l'en dernier, on acceptait quasiment tous les projets présentés dans les formes pour permettre une programmation suffisante. La situation s'est complètement retournée au début de l'année 2004. Les dotations budgétaires s'approchent de leur saturation en termes de programmation et les régions en sont maintenant à sélectionner les projets en fonction de leur intérêt. De plus, le taux de financement éligible baisse ; pour un même projet déposé maintenant, le taux de prise en charge passe par exemple de 50 % à 30 % ou de 30 % à 20 %. Ce processus est particulièrement visible en région Nord-Pas-de-Calais, mais il est général à l'ensemble du territoire, certes avec des différences notables selon le degré d'avancement des programmations. Les paiements restent encore très en retard et dépendent encore beaucoup de la vitesse de remontée des factures. On constate dans plusieurs régions un comportement des maîtres d'ouvrage qui gardent encore les factures et n'en demandent le remboursement qu'en fin de projet. La visite en région Aquitaine a montré que le rattrapage accéléré de l'année 2004 risque d'avoir des conséquences sur la viabilité finale de certains projets. On a sans doute accepté trop de projets trop vite sans s'assurer de toutes les conditions de viabilité, et surtout sans s'assurer que le plan de financement était complètement bouclé. En région Aquitaine on s'attend à ce que plusieurs projets ne puissent se terminer dans de bonnes conditions, entraînant en fin de programmation, vers la fin de l'année 2006, un nouveau risque de sous-consommation. De nombreux projets ont été accepté avec un taux de financement européen supérieur au taux autorisé, et on ne sait pas encore quels seront les financements qui prendront le relais ; il manque actuellement ainsi 51 millions d'euros qui devront être financés au niveau national, sinon les fonds européens devront être remboursés. Les services de la préfecture regrettent que les données de la base PRESAGE soient systématiquement en retard par rapport aux réalités économiques ; ils entreprennent actuellement une actualisation de tous les projets en cours, en prenant en compte leur montants réels, et non les montants prévus à l'origine. Des marges de manoeuvre financières, qui ne devraient pas dépasser 10 % du montant des crédits, pourraient ainsi être dégagées. La vigilance reste donc nécessaire jusqu'à la fin de la période de réalisation, tant vis-à-vis de la programmation que des paiements. II.- LE PRÉSENT CYCLE DE PROGRAMMATION EST RICHE D'ENSEIGNEMENTS ET DE QUESTIONS POUR L'APRÈS-2006 A.- LA RECHERCHE D'UNE MEILLEURE PROGRAMMATION DES FONDS STRUCTURELS 1.- Les conditions d'une programmation de qualité _ Une programmation moins chaotique, plus sélective et de qualité Les successions de retards et de coups d'accélérateurs sont certainement néfastes à la qualité de la programmation. Il aurait fallu engager plus vite le processus dès l'année 2002. Les périodes d'accélérateur posent la question de la qualité des projets financés. Il faudrait mieux programmer les projets sur toute la durée du cycle en recherchant une meilleure efficacité des fonds structurels européens. La présente programmation a montré une imbrication trop complexe des cofinancements (fonds européens, État, région, départements, communes). De nombreux gestionnaires en région ont critiqué les effets néfastes de financements croisés trop nombreux. _ La nécessité d'une ingénierie financière et administrative La programmation des fonds structurels sur la période 2000-2006 a montré la nécessité pour les collectivités locales et les porteurs de projets d'une ingénierie financière et administrative importante. Des personnels doivent être spécialisés et formés de façon adéquate, à tous les niveaux (région, département, communes...). Les carences en ingénierie financière et administrative sont surtout patentes dans les collectivités locales des zones rurales ou reculées, ainsi que dans les petites collectivités locales, qui sont ainsi défavorisées alors qu'elles sont peut-être les plus nécessiteuses. On estime généralement à 15 le nombre d'agents nécessaire au niveau régional, que ce soit à la préfecture ou au Conseil régional. Une « grosse » région comme le Nord-Pas-de-Calais a même calculé que 150 personnes différentes travaillent sur ces fonds, ce qui représente un équivalent de 50 emplois à temps plein. La DATAR a estimé qu'environ 1.500 personnes travaillaient en France sur les fonds structurels, 1/3 de contractuels sur des crédits d'assistance technique et 2/3 de fonctionnaires. _ Quelle taille de projet optimale ? Le débat n'a pas été tranché entre les partisans d'une diversification de l'usage des fonds structurels et les promoteurs de projets structurants pour le territoire. Tout le monde s'accorde néanmoins à rejeter le saupoudrage consistant à accorder des fonds à chaque collectivité locale pour des microprojets. Si cette méthode satisfait les élus locaux pris individuellement, elle ne permet pas d'assurer une utilisation optimale des fonds. Une raison supplémentaire tient au fait que le « coût administratif » d'un projet est relativement fixe, quelque soit sa taille. En région Aquitaine, le coût moyen d'un projet est évalué à 85.000 euros, ce qui est unanimement jugé comme une dispersion inutile. 2.- Les indicateurs de la DATAR sont en grande partie inadaptés pour rendre compte des réalités economiques _ Les indicateurs de consommation des fonds structurels En région Auvergne les gestionnaires de la préfecture et du Conseil régional constatent unanimement que le logiciel PRESAGE d'enregistrement des fonds européens ne permet pas de prendre en compte la dynamique des projets en cours de constitution. Cette région, sous l'impulsion de son ancien Président, M. Valéry Giscard D'Estaing, a fait clairement le choix de gros projets structurants (infrastructures) plutôt que la multiplication de petits projets morcelés. Ainsi cette région figue-t-elle parmi les dernières dans les tableaux de la DATAR à partir des données de PRESAGE en matière de programmation comme de paiement. Il s'agit d'une lecture trop statique et comptable des choses qui ne prend pas en compte la réalité des projets économiques. Les responsables de la région nous ont expliqué qu'ils ont en préparation plusieurs gros projets qui seront déposés dans les semaines qui viennent. Ces projets lourds sont plus longs à mettre en place. Mais il suffira que deux ou trois projets de la sorte soient programmés et enregistrés dans la base PRESAGE pour que les taux de programmation augmentent considérablement, faisant faire un bond au taux de programmation et donc au classement de cette région. Il en ira de même, immédiatement après, pour les paiements. La DATAR explique que la base PRESAGE n'est qu'un enregistrement comptable des fonds programmés et consommés, qui suit mécaniquement l'avancement des procédures formelles nationales et européennes, et qu'on ne peut pas lui faire dire autre chose. En région Alsace, au contraire, a été privilégiés un grand nombre de petits projets au détriment de projets de grande envergure. Le comité de programmation traite tous les deux mois une moyenne de 60 dossiers. L'évaluation à mi-parcours, au moment de la révision en cours du DOCUP, montre qu'environ la moitié des projets a été réalisée. Les dossiers en cours d'instruction qui ne sont pas encore enregistrés dans la base PRESAGE sont également nombreux et devraient, sans problème majeur, consommer l'intégralité des crédits disponibles. Les gestionnaires du Conseil régional parlent volontiers d'une « course de fond » plutôt qu'une course de vitesse, l'important étant de tenir la distance jusqu'à la fin de l'année 2006. Ils critiquent également les régions qui ont trop accéléré en 2003 en gérant les fonds comme des appels à projet avec le risque d'effets d'aubaine, de mauvaise programmation et de dossiers mal bouclés. La qualité importe autant que la quantité. Les gestionnaires de la région Alsace pointent du doigt néanmoins le risque de dégagement d'office dû à une insuffisante remontée des factures, qui est de la responsabilité des maîtres d'ouvrage, ou pour les projets programmés qui ne se réaliseront pas. En région Aquitaine les gestionnaires des fonds à la préfecture de région ont expliqué à votre Rapporteur spécial que la base PRESAGE est toujours en retard par rapport à la maturité des projets en cours de constitution, et qu'ils n'ont pas d'inquiétudes particulières quand aux risques de dégagements d'office. _ L'affectation de la réserve de performance Les règlements communautaires avaient prévu l'attribution d'une réserve de performance s'élevant à 4 % des crédits communautaires pour encourager et récompenser les régions qui auraient le plus et le mieux programmé et payé. La DATAR a fait des propositions à la Commission européenne qui a décidé selon le tableau présenté ci-après. RÉSERVE DE PERFORMANCE
La DATAR explique qu'elle n'a fait qu'appliquer les règlements communautaires et tenir compte des critères de calcul tels que définis au moment des DOCUP : taux entre 2 % et 7 %, seuil de 80 % des crédits consommés. Les textes communautaires lui donnent cependant une véritable marge d'appréciation, et on peut cependant regretter le manque de transparence et la rigidité de ces critères, qui ne permettent pas de récompenser les régions à leur juste mesure. Les régions Alsace, Auvergne et Aquitaine ont été particulièrement mal traitées dans l'affectation de la réserve de performance. Ces trois régions soulignent à juste titre que les critères de la DATAR n'ont pas permis de prendre en compte les dynamiques de programmation des fonds, qui montrent un chemin plus rassurant que les indicateurs issus de la base PRESAGE. De plus pour les régions Alsace et Auvergne, il est reproché à la DATAR de n'avoir pas pris en compte les processus de délégation de compétence au cours de l'année 2003, qui ont fait perdre deux ou trois mois cruciaux, justement dans la période où la simplification des procédures et l'animation des projets battait son plein. B.- LA NÉCESSITÉ D'UNE DÉCENTRALISATION PÉRENNE DES FONDS STRUCTURELS 1.- L'article 35 du projet de loi sur les responsabilités locales et l'amendement de pérennisation. Plusieurs expériences de transferts de compétences sont actuellement en cours. La plus importante concerne la désignation de la région Alsace comme autorité de gestion et de paiement pour l'ensemble du DOCUP de l'objectif 2 (110 millions d'euros). Plusieurs projets du programme INTERREG III (coopération entre régions transfrontalières) sont gérés directement par des conseils régionaux (Aquitaine, Alsace, Bas-Rhin, Haute-Normandie, Poitou-Charentes, Nord-Pas-de-Calais, Guadeloupe, Réunion) ou par un GIP (Lorraine-Alsace). Le programme URBAN (territoires urbains en difficulté) voit plusieurs de ses programmes gérés directement par un GIP (Grigny-Vitry), des communautés urbaines (Strasbourg, Bordeaux) ou même des communes (Bastia, Le Havre). Il faut distinguer ces véritables transferts de compétence des « délégations de compétence » où le préfet de région reste autorité de gestion et de paiement : en effet les régions se sont vues affecter des subventions globales pour la délégation de la gestion de plusieurs projets intéressant leur territoire, selon des proportions variables, comme l'indique le tableau ci-après. SUBVENTIONS GLOBALES - FONDS STRUCTURELS OBJECTIF 2
(*) Rappelons que les fonds structurels font en Alsace l'objet d'un transfert de compétence Votre Rapporteur spécial souligne la nécessité d'un transfert adéquat de moyens humains correspondant à ce transfert de compétences. On estime généralement entre 10 et 15 le nombre de fonctionnaires nécessaires au niveau d'une région pour la gestion des fonds européens. Il s'agit de dossiers techniques qui nécessitent une formation adéquate, une connaissance approfondie des procédures communautaires et une expérience de terrain. L'assistance technique aux porteurs de projets est nécessaire. L'article 83 du projet de la loi sur les responsabilités locales dispose à juste titre que la collectivité territoriale qui fait l'objet d'une expérimentation se voit mettre à disposition par l'État les services ou partie des services qui participaient à l'exercice des compétences pour la durée de l'expérimentation. La logique d'une meilleure programmation des fonds structurels européens passe par une décentralisation pérenne de leur gestion. Le gouvernement l'a déjà partiellement reconnu en 2002 quand il a fait de la participation des collectivités locales une des conditions nécessaires à l'amélioration de la consommation des crédits. Le gouvernement reconnaît que le partenariat avec les collectivités locales est une des clés du succès de la programmation. Ce partenariat, où les co-financements se situent souvent aux niveaux communautaire, étatique et local, doit nécessairement s'effectuer dans un cadre décentralisé. Il s'agit de définir un interlocuteur unique pour les porteurs de projets, au niveau local approprié, dans le souci de simplification des démarches et procédures et de raccourcissement des délais. Seulement à cette condition pourra se faire la meilleure cohérence et complémentarité entre les différents intervenants d'un projet. Il s'agit là d'une innovation fondamentale qui ouvre des pistes pour une appropriation complète, à l'avenir, de ces dispositifs européens, par les collectivités locales. Que penser alors du faible taux de consommation des crédits européens en Alsace, seule région où l'État a transféré ses compétences d'autorité de gestion et de paiement (quelques 110 millions d'euros sur la période) ? Il semble que ce retard persistant ne remette pas en cause la pertinence de la décentralisation, au contraire. Il faut prendre en compte le fait que l'opération de transferts de compétences, par la signature d'une convention État-région, par la constitution d'équipes spécialisées (entre 10 et 15 personnes par région sont nécessaires), a pris plusieurs mois, au cours de l'année 2003, juste au moment où le plan de relance du gouvernement prenait effet et où la plupart des régions rattrapaient leur retard. On peut également citer le cas du département de la Meuse, où une petite équipe de la préfecture a pu mener à bien un rattrapage exemplaire dans un territoire qui n'est pas favorisé. Ce qui peut être fait dans les services de la préfecture pourrait l'être tout autant dans les services du Conseil régional ou du Conseil général, pourvu que les personnes correspondantes soient désignées et formées. 2.- Une nécessaire flexibilité dans la mise en oeuvre _ Lorraine En Lorraine le Conseil régional a reçu 58 millions d'euros en gestion directe selon le régime de la subvention globale (délégation de compétence), mais le préfet reste autorité de gestion et autorité de paiement. Les services de l'État estiment maintenant que les collectivités locales ne pourront jamais gérer les fonds européens avec autant d'efficacité qu'eux. _ Nord-Pas-de-Calais La région Nord-Pas-de-Calais a longuement hésité à demander une délégation de compétence, elle ne l'a finalement pas fait. Ses responsables au plus haut niveau ont estimé qu'ils ne pouvaient pas se passer du réseau des fonctionnaires de l'État pour aider à la mise en place des projets. Faut-il y voir le reflet d'une « culture nordiste » reposant sur une « demande d'État » forte et un grand respect de l'État, garant de l'intérêt national, de la solidarité nationale ? _ Aquitaine A l'opposé, en Aquitaine, les responsables du Conseil régional expriment une forte revendication de prise en main totale de la gestion des fonds structurels. Le refus de l'État de déléguer ses compétences dans le cadre de l'actuelle programmation a été vécu comme une grande frustration, et cette région était sans doute prête à jouer un rôle direct, actif et efficace. _ Alsace Une convention de 2002 avec l'État a prévu le transfert de compétence de 70 % de l'objectif 2 (110 millions d'euros au total). Les 3 fonds (FEOGA-G,FSE et FEDER) sont concernés par l'expérimentation. Selon le principe du guichet unique pour le dépôt des dossiers, l'État reste associé en tant que partenaire et cofinanceur des opérations. Des contacts permanents sont entretenus avec les services du SGAR. Le préfet de région copréside avec le Président du Conseil régional le comité de suivi. Les services de l'État ont accepté de façon très différente ce transfert. La coopération est très bonne avec les services du SGAR, assez bonne avec la DRAF, moins bonne avec les autres services (DRTEFP, DRIRE, ANVAR) et surtout les TPG. On a même pu parler de « divorce » entre les TPG et le Conseil régional. Les services du Trésor public ont dans un premier temps tenté de s'opposer à l'expérimentation de décentralisation, puis quand elle s'est réalisée ils se sont retirés totalement du circuit de programmation, de paiement et de contrôle des fonds européens. Le Conseil régional d'Alsace explique qu'il lui a substitué le CNASEA pour le FEOGA et la Caisse des dépôts pour les autres fonds. La conséquence a été que les services du Trésor sont maintenant sous-employés de façon chronique, au point qu'il faut se demander à quoi ils servent. Le circuit de la Caisse des dépôts a donné satisfaction et a permis de réduire les délais de paiement à 5 jours, soit la même durée moyenne que dans les autres régions où les TPG ont gardé les procédures de paiement. Le transfert de compétence a entraîné la reprise de 200 dossiers programmés par l'État, avec l'ensemble des responsabilités qui s'y rattachent. Plus de 250 dossiers nouveaux ont été programmés entre le 1er janvier et le 31 décembre 2003. Une équipe d'une quinzaine de personne a été créée au sein de la Direction de l'Animation et de l'Aménagement des Territoires de la Région Alsace, dont 4,5 postes d'animateurs territoriaux et 2 instructeurs installés dans une antenne haut-rhinoise (territorialisation des services oblige). Des conventions ont été passées avec la Caisse des dépôts (FEDER et FSE) et le CNASEA (FEOGA) pour ce qui concerne les paiements. D'autres conventions ont été établies entre la Région Alsace et l'ANVAR (gestion de la subvention globale) et les ODASEA (animation et pré instruction des dossiers agricoles). Deux personnes ont été mises à disposition du Conseil régional d'Alsace par l'État pour 6 mois. L'animateur PRESAGE Alsace, financé par le Programme National Informatique (PNI), est placé auprès des services de la Région. Il peut intervenir à la demande de l'État sur les autres fonds et initiatives promus par l'Union européenne (URBAN, LEADER +, etc.). Fin 2003 et pour quelques semaines, le SGAR a mis à disposition des services de la Région, à temps partiel, une personne compétente pour accélérer les opérations de certification et de mise en paiement des crédits communautaires. _ Auvergne La définition du DOCUP Auvergne a été essentiellement le fait des services de la préfecture, avec une information tardive du Conseil régional, en même temps que le contrat de plan État-régions. Aucune discussion n'a été possible. L'État a donné l'impression qu'il suppléait, par le DOCUP, ses manquements dans l'exécution du contrat. L'Auvergne a la particularité que le Conseil régional s'est vu accorder, par une convention de 2003, une délégation de compétence (subvention globale) pour 70 % des crédits du FEDER et 100 % du FSE. Il a été décidé après de longues discussions entre les services de l'État et le Conseil régional un partage souple des attributions de chacun : l'État garderait la gestion directe de certains projets structurants à ampleur nationale qu'il avait déjà projeté ou programmé (30 % du FEDER) ; l'État, avec son réseau du Trésor public, garde la charge du paiement et du contrôle des fonds. Cette expérience a mis en évidence la nécessité du rôle de l'État maintenu même dans une situation décentralisée : lien avec le réseau des ministères techniques, réseau du Trésor public pour les paiements et le contrôle, programmation conjointe pour des projets cofinancés. Ainsi votre Rapporteur spécial a entendu que « l'État régional doit se maintenir sans devenir une coquille vide »... De l'avis unanime, cette expérimentation en Auvergne a entraîné une simplification et une plus grande présence de proximité. L'opération de délégation de compétence a néanmoins été très lourde mais très bien gérée, selon un calendrier précis qui a été respecté. Elle a été neutre pour les porteurs de projets, pour garantir la continuité, sans rupture. Il s'agissait de remettre le bénéficiaire au centre du dispositif. Le système a tellement bien fonctionné que la révision du DOCUP à mi-parcours s'est faite en lien direct avec la Commission européenne. La DATAR qui devait assurer le rôle de coordinatrice est intervenue trop tard, au moment où tout était déjà réglé... De toutes façons la connaissance technique des dossiers lui faisait défaut et on ne voit pas l'intérêt de son intervention. Les représentants de l'État en région Auvergne sont très satisfaits de l'opération de délégation de compétence au Conseil régional. La coopération se passe très bien, avec des équipes en symbiose. Cette réussite est sans doute due à la volonté politique qui a prévalu au plus haut niveau, avec un accord entre le Premier ministre et le président du Conseil régional. Les représentants de l'État en préfecture Auvergne notent cependant qu'au stade actuel de la réforme de l'État, ils ne sont pas en situation de négocier à égalité avec les Conseil régionaux ; ils appellent de leurs vux une réforme, allant dans le sens de la LOLF, mais plus concrète, confiant au préfet une responsabilité globale sur l'ensemble des crédits affectés à son territoire, avec, bien sûr, la définition d'objectifs et d'indicateurs de résultats. Enfin, la DATAR est critiquée une fois de plus dans son action pour le montage des dossiers, car son discours n'est pas adapté aux réalités régionales. La cellule « Europe » du Conseil régional d'Auvergne est passée de 5 à 14 personnes pour cette expérience. La professionnalisation des équipes et des méthodes a fait que les dossiers sont maintenant mieux montés. 3.- Un partenariat nécessaire entre tous les acteurs _ Un partenariat renforcé entre l'État et les collectivités locales Les quatre régions visitées ont toutes montré la nécessité d'un partenariat fort entre l'État et la région dans la définition et la gestion des fonds structurels, quel que soit le niveau de centralisation ou décentralisation. La plupart des projets sont cofinancés à plusieurs niveaux (fonds européens, État, région, département...). Les expérimentations de décentralisation ont également montré la nécessité de déconcentration des services de l'État. Face à un Conseil régional qui a des compétences et une expertise, les préfectures ne peuvent plus fonctionner en prenant des décisions ad referendum, en demandant sans cesse des consignes de Paris. _ Le partage des tâches entre collectivités locales Les visites effectuées dans les régions on montré la nécessité de décentralisation au niveau des régions, mais aussi dans certains cas de réserver la possibilité de décentraliser à d'autres niveaux (départements, GIP, communes...) pour certains projets ou enveloppes. Certes, les régions ont vocation à gérer les fonds européens dans le cadre de leurs compétences économiques. Mais les départements aussi doivent pouvoir participer la responsabilité de la gestion financière des fonds européens pour la période 2000 - 2006. La concentration de toutes les procédures au niveau de la région risquerait de créer une superstructure bureaucratique qui ralentirait l'instruction des procédures et les éloignerait du terrain, là où elles seraient limitées au territoire d'un seul département, par exemple. Cette raison, qui favorise une utilisation plus efficace et plus efficiente des fonds européens, vaut aussi pour les autres collectivités locales, leurs regroupements ou des groupements d'intérêt public. Il faut rechercher une participation pleine et entière des collectivités locales et leurs regroupements, chacune à son niveau de compétence naturel. Le conseil régional a certes compétence pour promouvoir le développement économique, social, sanitaire, culturel et scientifique de la région, pour l'aménagement de son territoire et pour assurer la préservation de son identité, dans le respect de l'intégrité, de l'autonomie et des attributions des départements et des communes. Il est l'interlocuteur logique pour les fonds européens lors de leur phase de définition (DOCUP), en liaison avec le CPER. La région est une collectivité chargée du développement économique, puisqu'elle est compétente en matière de planification économique et de programmation des équipements. Elle est également compétente pour la formation initiale (lycées) et professionnelle. Elle est chargée des aides directes ou indirectes aux entreprises et elle est présente dans les transports (transports ferroviaires de passagers, financement des infrastructures). A titre expérimental elle s'investit dans la protection du patrimoine, le développement des ports et aéroports et la protection de l'environnement. Le département est conçu comme collectivité gestionnaire, tournée vers les services et les actions de solidarité : action sociale, aide à l'enfance ou aux handicapés, mais aussi transports scolaires, ports de pêche et de commerce, routes départementales, enseignement secondaire (collèges), bibliothèques, musées, équipement rural, aménagement foncier, gestion de l'eau et de la voirie rurale. La commune est l'administration de proximité : transports urbains, écoles maternelles et primaires, urbanisme (permis de construire), bibliothèques et musées, mais aussi crèches, établissements d'enseignement artistique, théâtres, salles de spectacle, festivals, équipements sportifs, tourisme, voirie communale. Les domaines d'intervention des différents fonds structurels représentent donc les champs de compétences de tous les niveaux de collectivités locales ; ce n'est donc une surprise que de voir que de nombreux projets soutenus sur les fonds européens sont cofinancés par l'État, les régions, les départements, les communes ou les groupements de collectivités. Il faut favoriser au maximum la gestion des fonds structurels directement au niveau de la collectivité décentralisée qui a les compétences correspondantes. La meilleure connaissance du terrain par les collectivités locales, leurs élus et leurs services, permet certainement une meilleure programmation proche des réalités économiques et sociales. Le département de la Meuse, par exemple, a constitué une « cellule Europe » en charge des projets sur son territoire. L'impression générale est que les DOCUP et les compléments de programmation, qui ont été définis au niveau de la région, sont confectionnés plus pour les départements dynamiques comme la Moselle ou la Meurthe-et-Moselle que pour lui. Ils sont peu adaptés à un territoire essentiellement rural et comportant des sites industriels abandonnés. A quoi sert d'inscrire dans les DOCUP le développement des nouvelles technologies si les porteurs potentiels de projet n'ont pas les compétences requises ou si les besoins des territoires les plus fragiles consistent encore en adduction d'eau et en apport d'électricité ? En outre le coût administratif du montage d'un projet est fixe, quel que soit son montant financier ; le DOCUP de Lorraine est ainsi plus adapté aux grands projets qu'aux petits dossiers des territoires les plus fragiles. Le retard persistent de programmation des fonds du FSE s'explique par un manque de relais au niveau départemental pour l'appui aux porteurs de projets en particulier par l'insuffisance de personnel. La Cour des comptes, dans son rapport sur le FEDER d'août 2003, notait la nécessaire articulation entre les DOCUP et les collectivités locales, chacune à son niveau d'organisation. Le ministère de l'Intérieur, dans sa réponse aux observations de la Cour, notait que s'agissant tout d'abord du repérage des projets, le lien avec l'échelon départemental, et notamment les préfets de département et les sous-préfets d'arrondissement, n'avait pas toujours été établi suffisamment tôt alors que ce réseau naturel de correspondants a un rôle déterminant à tenir en matière de programmation. A contrario, on a pu regretter le comportement de l'État-région qui, en début de programmation, lors de l'élaboration des DOCUP, a réparti sans concertation les fonds européens entre les départements, au détriment de la qualité des projets. Un élément intéressant en Auvergne est la participation de 5 DOCUP régionaux au plan « Massif central », une initiative à encourager dans d'autres contextes. 4.- Eviter la tentation de substituer les fonds européens aux crédits de l'État La période de contrainte budgétaire très forte actuelle induit une tentation tout aussi forte pour l'État de compenser par des financements communautaires ses propres carences de financement. On constate un retrait progressif de l'État d'une grande partie des projets, ainsi qu'une réduction de son taux de financement. Ce constat a été établi dans les cinq régions que nous avons examinées, et il est sans doute général sur l'ensemble du territoire national. Cette période de difficultés budgétaires n'est pas la première, mais le conflit potentiel sur l'utilisation des fonds européens est nouveau. En effet, lors des précédentes programmations budgétaires - et jusqu'en 1999 -, l'État était maître de l'utilisation des fonds européens sans que les collectivités locales aient à y intervenir. En fait les départements ministériels se répartissaient les fonds entre eux, sans prise en compte réelle de l'avis des collectivités locales. La régulation budgétaire passait naturellement par ce canal. Cette situation n'est plus admissible avec le processus de décentralisation en cours. Dans un système où les aides individuelles aux entreprises sont décentralisées, les régions acceptent de plus en plus difficilement que l'État considère que les fonds européens sont les siens. Si les régions peuvent comprendre les nécessités de la régulation budgétaire, comme en période actuelle, elles ne peuvent plus accepter l'opacité totale avec laquelle l'État effectue parfois des substitutions de financement ; la transparence est maintenant devenue une nécessité. Cette substitution des crédits communautaires aux crédits de l'État n'est pas toujours possible, comme l'a montré le refus de la Commission européenne de voir le FEDER financer des infrastructures routières en Lorraine. Mais là où l'État est son propre gestionnaire, il fait ce qu'il veut. En Auvergne, on a cité le cas du projet du tramway de Clermont où l'État devait engager 60 millions d'euros mais en a accordé seulement 6. Les fonds européens se sont élevés à 20 millions d'euros sur ce projet. En Aquitaine, on a pu citer le cas d'une route, la RN134, qui devait être financée par l'État à hauteur de 10 millions d'euros ; le FEDER a dû prendre le relais pour assurer le projet. Même en Alsace, où la région a la main sur la programmation des fonds structurels, le retrait de l'État est regretté ; il laisse à la région le dilemme de soit ne pas réaliser le projet, soit le réaliser sur son propre budget. Les services du Conseil régional d'Alsace ont constaté un retrait de l'État sur de nombreux projets comme les missions locales FSE ou dans l'agriculture. Ils soulignent que cette situation peut devenir dangereuse à cause du cumul du retrait de l'État en raison de la régulation budgétaire et du processus de décentralisation et, après 2006, de la réduction - voire la disparition - des fonds européens, entraînant une pression très forte sur les ressources des collectivités locales, au premier chef les régions. Les financements privés, en complément des financements publics, encouragés par la Commission européenne, ne pourront non plus prendre le relais. Cette évolution, si elle se confirmait, comporterait le risque que les habitudes prises de se tourner systématiquement vers la région pour demander des fonds n'aboutissent in fine à une très forte déception après 2006. C.- LES INCERTITUDES SUR L'APRÈS 2006 1.- Le début des discussions sur les prochaines perspectives financières 2007-2013 Dans sa communication de février 2004 sur les prochaines perspectives financières 2007-2013, la Commission européenne a proposé courageusement d'allouer 0,41 % du PIB communautaire à la future politique régionale, soit 336,3 milliards d'euros pour les 25 États membres (contre 215 milliards actuellement). Ce montant est en deçà des 0,45 % revendiqués par les régions. Les fonds seront concentrés sur un nouvel objectif 1 de convergence pour les régions en retard de développement (régions dont le PIB est inférieur à 75 % du PIB communautaire, donc essentiellement des nouveaux États membres l'Union), avec 78 % des ressources allouées. Toutefois, un nouvel objectif 2 est préservé, qui se verrait attribuer 18 % des ressources, soit 58 milliards d'euros, sans zonage. Ces 58 milliards seront affectés pour 10 milliards aux régions qui sortent de l'actuel objectif 1 pour des raisons statistiques (phasing out), et 48 milliards pour les autres régions (contre 51 milliards sur la période 2000-2006). La Commission propose d'allouer 4 % des ressources financières au futur objectif 3, dit de coopération, qui concernera la coopération transfrontalière et transnationale. Une incertitude de taille soulignée par la DATAR réside dans l'acceptabilité des futurs fonds structurels de l'objectif 2 (aides aux entreprises) au regard des règles communautaires de la concurrence. Ce point important est actuellement en cours de discussion à Bruxelles à la Commission européenne, entre les Directions générales « Régions » et « Concurrence » de la Commission européenne, ainsi qu'entre les États membres. La Commission devrait présenter ses propositions législatives en juin prochain, avec pour objectif d'achever la discussion interinstitutionnelle fin 2005, un an avant le début de la prochaine programmation. Le respect de ce calendrier permettrait de travailler à la préparation des DOCUP en 2006, pour que les programmes puissent démarrer en 2007. Une simulation macroéconomique Des projections effectuées par la délégation pour l'Union européenne du Sénat dans le rapport (n° 204 - 2003/2004) de MM. Yann Gaillard et Simon Sutour du 5 février 2004 montrent que, selon les propositions de la Commission européenne, la France pourrait se voir attribuer environ 14 milliards d'euros pour la période 2007-2013 au titre de la politique régionale, contre 17 milliards pour la période 2000-2006 (en euros 2004) ; 10 milliards seraient alors affectés à l'objectif 2, soit une baisse de 18 % par rapport à la période actuelle. Ce rapport montre également que, par rapport à un scénario où la France métropolitaine ne recevrait plus de fonds structurels (correspondant à un budget communautaire à 1 % du RNB), ces résultats seraient rendus possibles avec 0,9 milliard d'euros par an de « surcoût » pour le budget de l'État. En d'autres termes, le choix serait donc entre, d'une part, un scénario (budget communautaire à 1 % du RNB) où la France métropolitaine ne recevrait plus de fonds structurels, et, d'autre part, un scénario (budget communautaire à 1,24 % du RNB) où la France recevrait 14 milliards d'euros sur la période 2007-2013 au titre de la politique régionale, moyennant un surcoût en terme de prélèvement pour le budget des Communautés européennes de 20,3 milliards d'euros. La différence serait, selon ces calculs, le prix à payer pour que la France métropolitaine continue à bénéficier de fonds structurels dans ses régions. La raison de ce surcoût est la répartition retenue entre les objectifs 1 (78 %), 2 (18 %) et 3 (4 %) ; pour obtenir un objectif 2 maintenu, il faut accepter une augmentation en proportion des fonds des autres objectifs, en particulier l'objectif 1 en faveur des États membres en retard de développement (principalement les nouveaux États membres). Votre Rapporteur spécial rappelle qu'il ne s'agit que d'une simulation économétrique et que ses résultats devront être comparés à d'autres projections. 2.- Le nécessaire maintien de fonds structurels pour les régions des 15 États membres La proposition de la Commission européenne de consacrer 0,41 % du PIB communautaire à la future politique de cohésion constitue un minimum de crédibilité et d'efficacité. Les régions françaises qui ont besoin de l'objectif de compétitivité régionale ne doivent pas être sacrifiées comme variable d'ajustement budgétaire. Cependant, cette proposition est clairement incompatible avec la position défendue par la France et cinq autres États membres, gros contributeurs, de limiter le budget communautaire à 1 % du PIB communautaire. La priorité doit évidemment revenir aux régions et aux États les plus pauvres, sans oublier l'effort en faveur des régions ultra-périphériques, dont nos départements et collectivités d'outre-mer. Mais il est nécessaire de continuer d'aider les autres régions confrontées aux restructurations économiques et sociales. Il s'agit de l'impérieuse nécessité du futur objectif 2 sur la compétitivité régionale et l'emploi, pour anticiper les restructurations à travers les objectifs de Lisbonne et de Göteborg. Les ressources allouées à la compétitivité devraient s'articuler autour des deux priorités définies par la Commission européenne : emploi et compétitivité (innovation et économie de la connaissance, environnement et prévention des risques, accessibilité et services d'intérêt économique général). Une partie des ressources devrait être allouée à la dimension urbaine. Des taux de financement plus élevés devront être prévus pour les territoires à handicap naturel permanent (îles, montagnes). La région Nord-Pas-de-Calais estime que le traitement des friches industrielles et le traitement des sols pollués pourrait être utilement soutenu dans le cadre de la nouvelle programmation : ils sont souvent la condition de la réindustrialisation et du redémarrage de l'activité économique. En région Aquitaine, on évoque les actions en faveur de la recherche, des transferts de technologie, de l'innovation, la politique de la ville, ainsi que le développement des zones rurales (équipements, infrastructures, Internet...) ; d'autres intervenants évoquent la réindustrialisation et les infrastructures (routes, fer...). La coopération territoriale européenne est essentielle pour renforcer le rôle des régions au niveau transfrontalier et transnational ; la Commission européenne doit proposer un instrument juridique de coopération pour faciliter la délégation des compétences des collectivités locales à une entité unique. Mais il faut défendre un objectif 2 maintenu dans les territoires des anciens États membres ; il pourrait comporter des aides à l'introduction des nouvelles technologies de l'information et de la communication, des actions pour le développement d'infrastructures permettant le désenclavement de territoires reculés, le soutien de l'emploi et de la formation par des aides aux entreprises, des actions pour la protection de l'environnement, ainsi que la réalisation des priorités communautaires établies par la stratégie de Lisbonne, y compris les restructurations économiques et sociales résultant de la mondialisation. De nombreux territoires français seraient éligibles en prenant comme critère le niveau de chômage, le retard de formation, ou le manque d'utilisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication. L'avenir des fonds européens passe aussi par des projets transfrontaliers entre régions de différents États membres (coutellerie par exemple, cité en région Auvergne en liaison avec les régions correspondantes d'Allemagne et d'Italie). * * * CONCLUSION En conclusion, votre Rapporteur spécial doit, à nouveau, insister sur le fait que tout désengagement de l'État a des effets amplifiés sur la non exécution ou l'exécution retardée de projets. Ces effets négatifs se ressentent sur le terrain de toutes les régions visitées, dès lors que la solution de facilité consiste, pour l'État à tenter de faire jouer aux fonds structurels le rôle d'une variable budgétaire d'ajustement, pour compenser son désengagement. Cette solution, qui engendre des effets négatifs, plus que proportionnels à ce désengagement financier, sur le déroulement concret d'opérations, doit être naturellement combattue. La réussite tant dans la programmation que dans la consommation des crédits passe par un partenariat entre l'État-région et la région-collectivité locale, ainsi que par un suivi précis et systématique de l'avancement des dossiers sur une base mensuelle. En tout état de cause, les fonds européens hors LEADER+(3) ne doivent pas être utilisés pour un saupoudrage de crédits. Il ne peut y avoir de fonds structurels européens pour la France qu'à la condition d'avoir un budget européen fort et dynamique, en envisageant des ressources propres adaptées. Le montant global de ce budget doit approcher le plus possible le plafond actuel fixé à 1,24 % du revenu national brut européen. Au cours de sa réunion du 26 mai 2004, votre Commission a examiné une communication de votre Rapporteur spécial pour les Affaires européennes, sur la programmation et la consommation des fonds structurels, dans le cadre de la politique régionale de l'Union européenne. Il convient de partir du constat - partagé sur tous les bancs des assemblées lors des deux derniers débats budgétaires sur le prélèvement au profit des Communautés européennes - que les fonds structurels sont insuffisamment consommés. En octobre dernier était craint, unanimement, un « dégagement d'office » effectué par la Commission européenne, en application des règlements communautaires, à savoir que les crédits affectés à la France pourraient être annulés s'ils n'étaient pas consommés dans les deux années suivant la date à laquelle ils auraient dû l'être. Votre Rapporteur spécial a alors entrepris quatre déplacements en régions Lorraine, Auvergne, Nord-Pas-de-Calais et Aquitaine, et a obtenu des informations sur la situation en Alsace. Il n'a malheureusement pas reçu du préfet ni du Conseil régional de Lorraine les informations qu'il avait demandées et qui auraient pu l'éclairer sur les dérives dont il avait par ailleurs eu écho. Cette mission d'information, dans la perspective du prochain débat budgétaire, devrait donc être prolongée. Les réalités régionales sont très différentes les unes des autres. En outre, si les fonds structurels ont connu un démarrage très lent en début de période de programmation (2000-2002), ils ont ensuite été l'objet d'un vigoureux rattrapage - voire d'un emballement - qui a permis d'éviter, dans une très large mesure, le dégagement d'office. Les conditions de ce rattrapage montrent néanmoins qu'il convient de rester vigilant, jusqu'à la fin de la période de programmation. Sur le FEDER on constate que toutes les régions ont échappé au dégagement d'office au 31 décembre 2003 ; cela s'est fait souvent d'extrême justesse, au prix d'une « marche forcée » dans les derniers mois de l'année 2003. Si la situation du FSE s'est améliorée en 2003, 9 régions « objectif 2 » (34 millions d'euros) et 3 régions « objectif 1 » (57 millions d'euros) n'ont pas échappé au dégagement d'office au 31 décembre 2003. Les raisons communément invoquées sont la lourdeur des procédures, la concurrence entre les projets relatifs à l'emploi relevant des objectifs 2 et 3, l'absence de culture de projet du ministère du Travail et ses désaccords initiaux avec la Commission européenne. On a pu évoquer également le fait que la part du FSE a été attribuée par l'État et lui seul, en début de programmation, et qu'elle a été surévaluée par rapport aux besoins. La France s'était caractérisée, en début de programmation, par une inutile lourdeur des procédures nationales, qui s'ajoutait à la complexité des procédures communautaires. Le faible taux d'avancement des projets a poussé le Gouvernement à prendre, durant l'été 2002, des mesures de simplification des procédures, de renforcement de l'appui aux projets et de plus grande association des régions, afin d'éviter l'application de la règle du dégagement d'office. Ainsi sont devenus éligibles des projets déjà engagés - voire terminés ! Dans les quatre régions visitées, la grande mobilisation des services déconcentrés de l'État et des collectivités locales est indéniable. Les SGAR (Secrétaires généraux pour les affaires régionales) ont mis en place des cellules « Europe » qui ont animé des équipes bien formées qui ont apporté leur concours technique et juridique aux porteurs de projets. On a pu parler d'une véritable « révolution culturelle » du réseau du Trésor public, comme par exemple pour les services du TPG de la Meuse, dont l'implication personnelle mérite d'être saluée ; des personnels traditionnellement amenés à faire du contrôle tatillon de la dépense publique ont été conduits à faire de la promotion qualitative de la dépense des fonds européens. Chaque dossier est examiné simultanément du point de vue financier, économique et juridique, ce qui évite le double visa et leur éventuelle contradiction. Le réseau des contrôleurs du Trésor a même apporté un soutien capital aux collectivités locales, en les aidant à monter des projets qui demandent une ingénierie administrative dont tous ne disposaient pas. Le résultat, remarquable, a été un raccourcissement des délais d'instruction et de paiement. Les responsables sur le terrain critiquent souvent la mauvaise connaissance, par la DATAR, des réalités régionales et économiques et ses interventions technocratiques sont souvent vécues comme un allongement inutile des délais. Pour se défendre, la DATAR fait valoir que son intervention est nécessaire à une bonne cohérence des projets. L'élan donné a été tel que de nombreuses régions doivent maintenant changer de méthode de programmation. Alors que jusqu'au 31 décembre de l'an dernier on acceptait quasiment tous les projets présentés dans les formes pour permettre une programmation suffisante, la situation s'est complètement retournée au début de cette année. Les dotations budgétaires s'approchent de leur saturation en termes de programmation et les régions en sont maintenant à refuser certains projets, en fonction de leur intérêt. Le taux de financement éligible baisse, pour un même projet déposé maintenant, le taux de prise en charge passe par exemple de 50 % à 30 % ou 20 %, ce qui comporte des conséquences dramatiques pour les porteurs de projets. Les paiements restent encore très en retard et dépendent encore beaucoup de la vitesse de remontée des factures, qui se fait souvent en fin de chantier. L'accélération de la programmation en 2003 s'est souvent faite au détriment de la qualité des projets, sans attendre le bouclage définitif des dossiers de financement. Ainsi les services de la préfecture d'Aquitaine entreprennent actuellement une actualisation de tous les projets en cours, en prenant en compte leur montants réels, et non les montants prévus à l'origine. Des marges de manoeuvre financières, qui ne devraient cependant pas dépasser 10 % du montant des crédits, pourraient ainsi être dégagées. La vigilance reste donc indispensable jusqu'à la fin de la période, tant vis-à-vis de la programmation que vis-à-vis des paiements. Le présent cycle de programmation est riche d'enseignements et de questions pour l'après-2006. La recherche d'une meilleure programmation des fonds structurels passe par une programmation moins chaotique, plus sélective et de qualité. De nombreux gestionnaires en région ont critiqué les effets néfastes de financements croisés trop nombreux. Ils ont tous insisté sur la nécessité, pour les collectivités locales et les porteurs de projets, d'une ingénierie financière et administrative importante. Des personnels doivent être spécialisés et formés de façon adéquate, à tous les niveaux. Les carences en ingénierie sont surtout patentes dans les zones rurales, ainsi que dans les petites collectivités locales, qui sont ainsi défavorisées alors qu'elles sont peut-être les plus nécessiteuses. Le débat n'a pas été tranché entre les partisans d'une diversification de l'usage des fonds structurels et les promoteurs de grands projets structurants pour le territoire. Tout le monde s'accorde néanmoins à rejeter le saupoudrage consistant à accorder des fonds à chaque collectivité locale pour des microprojets, hors LEADER+. Les indicateurs de la DATAR, issus de la base PRESAGE, sont en grande partie inadaptés pour rendre compte des réalités du terrain, notamment par l'absence de prise en compte des grands projets structurants qui prennent du temps à se mettre en place. L'affectation faite de la réserve de performance (4 % des montants), sur la base de ces indicateurs, a été vécue comme particulièrement injuste par les régions où la dynamique et la qualité de consommation n'ont pas été prises en compte. Les fonds européens doivent être décentralisés de façon pérenne, et c'est le sens d'un amendement à l'article 35 du projet de loi sur les responsabilités locales. La logique d'une meilleure programmation des fonds structurels européens passe par cette décentralisation, qui doit être mise en place de façon flexible pour s'adapter aux particularités locales. Ainsi la région Nord-Pas-de-Calais n'a pas demandé de délégation de compétence, ses responsables au plus haut niveau ayant estimé qu'ils ne pouvaient pas se passer du réseau des fonctionnaires de l'État pour la mise en place des projets. Faut-il y voir le reflet d'une « culture nordiste » reposant sur un grand respect de l'État, garant de l'intérêt et de la solidarité nationaux ? A l'opposé, en Aquitaine, les responsables du Conseil régional ont exprimé une forte revendication de prise en main totale de la gestion des fonds structurels ; le refus de l'État de déléguer ses compétences dans le cadre de l'actuelle programmation a été vécu comme une grande frustration, et cette région était sans doute prête à jouer un rôle direct, actif et efficace. L'expérimentation de décentralisation totale en Alsace est vécue unanimement comme un succès, malgré le « divorce » avec le réseau du Trésor public et grâce à l'action de la Caisse des dépôts, comme organisme délégué de paiement. La région Auvergne présente une particularité : le Conseil régional s'est vu accorder une « délégation de compétence » pour 70 % des crédits du FEDER et 100 % de ceux du FSE. L'État, avec son réseau du Trésor public, garde la charge du paiement et du contrôle des fonds. La réussite de cette nouvelle coopération État-Région est sans doute due à la qualité du dialogue qui a prévalu à tous les niveaux, notamment au sommet avec un accord entre le Premier ministre et l'ancien président du Conseil régional. Les quatre régions visitées ont toutes montré la nécessité d'un partenariat fort entre l'État et la région dans la définition et la gestion des fonds structurels, quel que soit le niveau de centralisation. Les expérimentations de décentralisation ont également montré la nécessité de déconcentration forte des services de l'État. Cette culture de coopération doit être amplifiée dans le cadre de la décentralisation en cours. Les visites effectuées dans les régions ont montré la nécessité de décentralisation au niveau des régions, mais aussi, dans certains cas, de réserver la possibilité de décentraliser à d'autres niveaux pour certains projets. A contrario, on a pu regretter le comportement de l'État-région qui, en début de programmation, lors de l'élaboration des DOCUP, a réparti sans concertation les fonds européens entre les départements, au détriment de la qualité des projets. La période de contrainte budgétaire actuelle induit une tentation forte pour l'État de compenser par des financements communautaires ses propres carences. On constate un retrait progressif de l'État d'une grande partie des projets, ainsi qu'une réduction de son taux de financement. Ce constat a été établi dans les cinq régions examinées, et il est sans doute général sur l'ensemble du territoire national. Cette période de difficultés budgétaires n'est pas la première, mais le conflit potentiel sur l'utilisation des fonds européens est nouveau. En effet, lors des précédentes programmations budgétaires, l'État était maître de l'utilisation des fonds européens sans que les collectivités locales aient à y intervenir. La régulation budgétaire passait naturellement par ce canal. Cette situation n'est plus admissible avec le processus de décentralisation en cours. Dans un système où les aides individuelles aux entreprises sont décentralisées, les régions acceptent de plus en plus difficilement que l'État considère que les fonds européens sont les siens. Si les régions peuvent comprendre les nécessités de la régulation budgétaire, comme en période actuelle, elles ne peuvent plus accepter l'opacité totale avec laquelle l'État effectue parfois des substitutions de financement. La transparence est maintenant devenue une nécessité. Il est nécessaire que les fonds structurels continuent, après 2006, à bénéficier aux régions de l'Union européenne à quinze, comme d'ailleurs l'a proposé la Commission européenne en février dernier, à l'initiative du Commissaire chargé de la politique régionale, M. Michel Barnier. Cependant, cette proposition est clairement incompatible avec la position défendue par la France et cinq autres États membres, gros contributeurs, de limiter le budget communautaire à 1 % du PIB communautaire. Les régions françaises qui ont besoin de l'objectif de compétitivité régionale ne doivent pas être sacrifiées comme variable d'ajustement budgétaire. Il ne peut y avoir de fonds structurels européens pour la France qu'à la condition d'avoir un budget européen fort et dynamique, en envisageant des ressources propres adaptées. Le montant global de ce budget doit approcher le plus possible le plafond actuel fixé à 1,24 % du revenu national brut européen. La Commission devrait présenter ses propositions législatives en juin prochain, avec pour objectif d'achever la discussion interinstitutionnelle fin 2005, un an avant le début de la prochaine programmation. Le respect de ce calendrier permettrait de travailler à la préparation des DOCUP en 2006, pour que les programmes puissent démarrer en 2007. Des projections effectuées par la délégation pour l'Union européenne du Sénat montrent que dans la proposition initiale de la Commission, la France pourrait se voir attribuer environ 14 milliards d'euros pour la période 2007-2013, contre 17 milliards pour la période 2000-2006 (euros 2004) ; 10 milliards seraient affectés à l'objectif 2, soit une baisse de 18 % par rapport à la période actuelle. Ils devront être réaffectés aux nouveaux objectifs de compétitivité et d'emploi définis par la Commission européenne. L'avenir des fonds européens passe aussi par des projets transfrontaliers entre régions de différents États membres. M. Augustin Bonrepaux a rappelé avoir alerté la Commission depuis cinq mois déjà sur la sous-consommation des crédits européens. Il s'agit de savoir pourquoi, alors que l'État a pris des engagements sur cinq ans dans des contrats de pays ou de pôle touristique, il n'y a plus de crédits disponibles aujourd'hui. Ceci aboutit à une substitution de crédits européens aux crédits d'État, sans consultation des élus, avec parfois des refus de la Commission européenne, comme pour la construction d'une route en Lorraine avec des crédits du FEDER substitués à ceux qui auraient dû venir de l'État. Où sont passés les crédits destinés par l'État à la Région Midi-Pyrénées, alors que 300 millions d'euros ont été accordés à l'agglomération toulousaine ? Ainsi, en Ariège, sur trois programmes relatifs à une route, un seul a débuté. Dans ces conditions, on se demande bien comment il sera possible de réaliser des opérations d'aménagement et de développement du territoire d'ici 2007, car il n'y a plus ni crédits européens, ni crédits d'État. Le ralentissement de la mise à disposition des crédits induit un ralentissement des travaux déjà commencés. M. Louis Giscard d'Estaing a tenu à préciser que le rattrapage en matière de sous- consommation des crédits européens date de l'été 2002. On manque toutefois d'outils de suivi des fonds structurels au niveau national, entre la DATAR, le réseau du Trésor Public ou le logiciel PRÉSAGE, pourtant considéré comme un outil très performant. On a pu constater une diminution du taux de prise en charge par la Région Nord-Pas-de-Calais en raison d'une augmentation du taux de subvention sur crédits européens. On peut également se demander s'il n'y a pas une corrélation inversement proportionnelle entre le nombre d'agents de l'État chargés du suivi des fonds structurels, et le caractère effectif des programmations sur ces crédits. Enfin, on ne peut pas parler de manière trop générale de désengagement de l'État quand on ne sait pas réellement quels engagements ont été pris : on ne dispose ainsi d'aucun engagement officiel du ministre de l'Équipement de l'époque, M. Jean-Claude Gayssot, sur le financement du tramway de Clermont-Ferrand. Le Président Pierre Méhaignerie a estimé nécessaire une clarification de tous les dispositifs mis en uvre. Il y a aujourd'hui un enchevêtrement incompréhensible de fonds versés sans que personne ne sache selon quelle logique ils sont mis en uvre. On pourrait revenir à une globalisation des crédits, comme cela se faisait dans les années 1970. S'il y a un affaiblissement de la capacité d'investissement public, c'est en raison de l'incroyable augmentation des dépenses de fonctionnement et des prestations sociales au cours de ces dernières années : les crédits sociaux de l'État, des collectivités locales et de la sécurité sociale ont ainsi augmenté de 12 % en deux ans. Enfin, il est nécessaire de mieux hiérarchiser les priorités, car tous les investissements ne sont pas nécessairement utiles ou ne justifient pas de subventions à hauteur de 80 % du montant de l'opération. On peut, à cet égard, citer le cas de salles polyvalentes. Mme Béatrice Pavy a souligné le décalage entre la sous-consommation des crédits du FSE et les besoins insatisfaits. Cela peut s'expliquer par des retards de programmation, compte tenu d'un délai de deux ans pour le versement des crédits européens. Des demandes ont été faites, mais les crédits ne sont pas arrivés à temps, ce qui a obligé à annuler les projets. Il est donc indispensable aujourd'hui de prévoir une nouvelle programmation. M. Pascal Terrasse a convenu du manque de lisibilité et de continuité des actions menées à partir de financements croisés. Le saupoudrage n'a aucun sens, c'est pourquoi il faut répondre aux besoins dans le cadre de zones géographiques adéquates. De la même manière, la gestion centralisée des crédits européens n'est pas optimale, car la région, notamment depuis le renouvellement des exécutifs régionaux, est l'échelon pertinent pour gérer en direct ces crédits et éviter ainsi leur sous-consommation. En 2002, ont été lancés des appels à projets pour les collectivités locales, mais aujourd'hui l'État ne peut plus les cofinancer ; il faut donc remettre à plat l'ensemble du dispositif. M. Augustin Bonrepaux s'est interrogé sur l'utilisation effective des crédits : alors que les premiers crédits sont arrivés à la fin de l'année 2002, comment se fait-il qu'il n'y ait déjà plus de crédits fin 2003 ? En ce qui concerne les taux de prise en charge, ceux-ci sont fixés dans le DOCUP : si certains sont trop élevés, c'est en raison de la mauvaise utilisation des crédits, due au saupoudrage. Enfin, il est nécessaire de faire le point sur les contrats de plan État-régions, car l'étalement des investissements est provoqué par la politique fiscale du gouvernement laquelle, avec la baisse de l'impôt sur le revenu, de l'impôt de solidarité sur la fortune, ou de la taxe professionnelle dans des conditions très coûteuses, prive l'État de recettes. M. Michel Bouvard, Président, s'est demandé dans quelles conditions et à quel moment l'État a pris ces engagements de dépense. On a ainsi découvert que la station d'épuration de St Etienne devait bénéficier d'aides du FEDER, sans que l'on sache qui a pris cet engagement, ni quand. Il s'agit d'alerter le gouvernement sur la poursuite de la programmation des projets car, avec le gel de crédits budgétaires sur le FNADT, les projets seront arrêtés, les crédits communautaires non mobilisés et donc se profile le risque de dégagements d'office importants lors des facturations en fin de période. Il serait souhaitable d'associer les comités de massif à la mise en uvre du plan INTERREG III en matière de coopération transfrontalière en zone de montagne. La fin du zonage pour l'objectif 2 en 2007 peut justifier une programmation sur les régions à handicap plutôt que par thématique. Il faut savoir pourquoi les préfets ont décidé de concentrer les demandes de crédits communautaires sur le FSE, plutôt que sur le FEDER ou le FEOGA. Il en résulte un frein pour les projets compte tenu du délai de versement des aides, sans qu'il soit certain que la Commission européenne accepte aujourd'hui un redéploiement sur les autres fonds structurels. La campagne précédente ayant pris fin, il serait souhaitable de connaître le montant définitif des dégagements d'office opérés sur les anciens objectifs 2 et 5b de la programmation 1993-1999. En réponse aux différents intervenants, votre Rapporteur spécial a apporté les précisions suivantes : - La gestion des crédits européens a été vivement critiquée à raison de la complexité des circuits de décision. Des mesures correctives ont été prises en 2002, juste après la signature des DOCUP. Aujourd'hui, les instances européennes envoient directement les fonds aux régions par l'intermédiaire de fonds de concours locaux. Les trésoriers payeurs généraux peuvent donc débloquer les crédits très rapidement. Auparavant, cette gestion était centralisée et reposait sur plusieurs circuits de financement consécutifs. Si ces mesures de simplification ont été appliquées à partir de l'été 2002, il faut souligner que cette mutation est la conséquence d'une réflexion engagée avant 2002. La voix des élus qui réclamaient une simplification de ces procédures a donc été entendue. Aux contraintes imposées par l'Union européenne et par l'État s'ajoutaient souvent celles des régions et des départements. - Le coût de gestion d'un dossier est en moyenne, par exemple de 85.000 euros en Aquitaine. Dès lors, le saupoudrage des fonds européens a un effet extrêmement contre - productif sur la gestion de ces crédits. Aujourd'hui, les crédits européens semblent quasiment épuisés. Nos concitoyens doivent prendre conscience que l'Europe agit concrètement sur notre territoire. M. Michel Delebarre, Président de la Communauté urbaine de Dunkerque, a fait installer un panneau indiquant le rôle du financement européen dans le financement d'un chantier. - Entre 2004 et 2006, le risque de pénurie de crédits européens est réel. Il pourrait être dramatique pour la programmation à venir, qui ira de 2007 à 2013. Il faudra que la France, par la voie de ses ministres et de son Commissaire européen, exprime une volonté forte. Il faudrait abandonner la politique de zonage et maintenir des crédits. Il serait donc souhaitable que le budget européen se rapproche du seuil de 1,24 % du RNB de l'Union. - En ce qui concerne la réserve de performance, il faut rappeler que c'est la DATAR qui a formulé des propositions à la Commission européenne, à partir des données de PRESAGE. Cette réserve a donc été, malheureusement, attribuée de manière mécanique. - La gestion des crédits du FSE, particulièrement lente et lourde, laisse à désirer. Il conviendrait peut-être de poursuivre cette mission, car les informations obtenues lors des déplacements dans les régions sont d'une grande richesse. On peut regretter, dans les faits, une départementalisation des enveloppes de crédits. En conséquence, au sein d'une même région, il arrive que les responsables d'un département ne soient pas informés que les crédits du département voisin ne sont pas utilisés. Dans ce cas, les crédits sont perdus. - Pour la période 2004-2006, les comités de suivi vont pouvoir superviser finement l'utilisation de tous les crédits. Il arrive parfois qu'un certain montant de crédits soit annoncé dans une région mais que, par la suite, ce montant soit revu à la baisse. * * * M. Michel Bouvard, Président, a indiqué qu'en accord avec le Président Pierre Méhaignerie, il proposait à la Commission que cette communication, si votre Rapporteur spécial en est d'accord , fasse l'objet d'un rapport d'information pour contribuer ainsi à la suite du débat. La Commission des finances a alors autorisé, en application de l'article 146 du Règlement, cette publication. LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES _ Région Lorraine M. G. Toulgoat, TPG de la Meuse M. R. Ringhand, Directeur au Secrétariat général aux affaires régionales, Préfecture de région M. F. Bovet, Chef du bureau de l'aménagement du territoire et des finances de l'États, Préfecture de la Meuse Mme Collot, chargée de mission au bureau de l'aménagement du territoire et des finances de l'États, Préfecture de la Meuse _ Région Nord Pas de Calais M. P. Mauroy, Ancien Premier ministre, Président de la Communauté Urbaine de Lille M. J.-P. Richer, Préfet de Région, Préfet du Nord M. Y. Duruflé, SGAR, Préfecture de région M. Y. Jounot, Secrétaire général, Préfecture du Nord M. J.-C. Saffache, TPG de région M. F. Delagrange, Directeur Europe des services du Conseil régional Mme C. Dubray, Chef de service au Conseil régional _ Région Auvergne M. P. Mongin, Préfet de Région, Préfet du Puy de Dôme M. M. Renouf, SGAR, Préfecture de région Mme M. Gomont, chargée de mission au SGAR, Préfecture de région M. P. Dos, Directeur général des services du Conseil régional M. M. Coudert, Responsable du service « Europe » du Conseil régional · Région Aquitaine M. A. Rousset, Président du Conseil régional M. Y. Imbert, SGAR, Préfecture de région M. P. Buchoux, Directeur du développement des projets de l'État, Préfecture de la Gironde M. P. Gatin, TPG de région Mme W. Deycart, Trésorerie générale M. J.-M. Renversade, Délégué régional aux affaires européennes, services du Conseil régional M. J-M. Blanc, Directeur des fonds européens, services du Conseil régional _ Région Alsace M. M. Levy, Directeur de l'aménagement du territoire, services du Conseil régional _ DATAR (Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale) M. M. Gastambide, Conseiller aux affaires européenne et internationales Mme M. Afflalo, Chargée de mission équipe Europe et international ________________________________________________________________________________________________ N° 1624 - Rapport d'information de la commission des finances sur la programmation et la consommation des fonds structurels européens (Rapporteur : M. Jean-Louis Dumont) 1 () En effet, en application des articles 57 et 59 de la LOLF, les rapporteurs spéciaux sont chargés d'une mission permanente de contrôle budgétaire et disposent de pouvoirs d'investigation qu'ils peuvent exercer tout au long de l'année. A ce titre ils procèdent à toutes investigations sur pièces et sur place, et à toutes auditions qu'ils jugent utiles. Les rapporteurs spéciaux peuvent utiliser le résultat de leurs contrôles dans leurs rapports sur le projet de budget ; ces contrôles peuvent également faire l'objet, à tout moment, d'un rapport d'information établi par le rapporteur spécial, dont la Commission des finances autorise la publication (article 146 du Règlement de l'Assemblée nationale). 2 () Avis (n° 1432) sur le projet de loi relatif aux responsabilités locales présenté le 11 février 2004 au nom de la Commission des finances par M. Laurent Hénart . 3 () Les spécificités du monde rural font que l'on peut encore avoir besoin de micro-projets dans des domaines comme l'alimentation en eau, l'environnement ou les réseaux informatiques. |