N° 3340
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 26 septembre 2006.
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LES ARTICLES 6, 12, 16 À 19 ET 37 À 42 DU PROJET DE LOI (n° 3175) pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié,
PAR M. Alain JOYANDET,
Député.
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Voir les numéros :
Assemblée nationale : 3175, 3337, 3339 et 3334
INTRODUCTION 5
I.– LA PARTICIPATION DES SALARIÉS ET L’ACTIONNARIAT SALARIÉ 7
II.– LES DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉPARGNE ET AU FINANCEMENT DE L’ÉCONOMIE 13
A.– LA COMMERCIALISATION DES PRODUITS FINANCIERS ET DES PRODUITS D’ASSURANCE–VIE 13
1.– La responsabilisation des producteurs et des distributeurs dans la communication sur les produits 13
2.– Le devoir de conseil au client 15
B.– L’ÉLABORATION DE CODES DE BONNE CONDUITE PROFESSIONNELS 16
C.– LA BASE LÉGALE DU FICHIER DES DÉMARCHEURS COMPLÉTÉE 17
D.– AUTRES DISPOSITIONS PROTECTRICES EN FAVEUR DES SOUSCRIPTEURS ET BÉNÉFICIAIRES D’ASSURANCES SUR LA VIE 18
EXAMEN EN COMMISSION 19
I.– DISCUSSION GÉNÉRALE 19
II.– EXAMEN DES ARTICLES 23
TITRE IER : DÉVELOPPER LA PARTICIPATION DES SALARIÉS 23
Chapitre I : Favoriser le développement de la participation 23
Avant l’article 6 23
Article 6 : Élargissement de l’assiette fiscale de la participation 25
Article additionnel après l’article 6 : Création d’une prime de partage des profits 29
Chapitre III : Moderniser l’épargne salariale 34
Article 12 : Étalement de l’imposition des sommes transférées d’un compte épargne temps sur un PERCO ou un PEE 34
TITRE II : DÉVELOPPER L’ACTIONNARIAT DES SALARIÉS 37
Chapitre II : Améliorer la participation des salariés au capital de l’entreprise 37
Avant l’article 16 37
Article 16 : Placement des actions gratuites sur un PEE et création d’une déduction fiscale au titre d’émissions d’actions s’adressant à l’ensemble des salariés 37
Article 17 : Participation des FCPE aux pactes d’actionnaires 40
Article 18 : Institution d’un fonds de reprise de l’entreprise 42
Article 19 : Création d’un crédit d’impôt au titre de la création d’une société de reprise 44
TITRE IV : DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉPARGNE ET AU FINANCEMENT DE L'ÉCONOMIE 46
Article 37 : (Article L. 533-4-1 (nouveau) du code monétaire et financier et article 132-27 (nouveau) du code des assurances) - Obligations en matière de publicité des producteurs et distributeurs de produits financiers 46
Article 38 : (Articles L. 533-4, article L. 533-4-2 (nouveau) du code monétaire et financier) - Devoir de conseil des prestataires de services d’investissement 48
Article 39 : (Articles L. 132-27-1 (nouveau) et article L. 520-1 du code des assurances) - Devoir de conseil en matière d’assurance-vie 50
Article 40 : (Articles L. 611-3-1 (nouveau), article L. 614-2, article L. 511-29, article L. 613-1 et article L. 621-1 du code monétaire et financier et article 414-1 (nouveau), article L. 310-12 et article L. 310-9 du code des assurances) - Instauration de codes de bonne conduite professionnels 52
Article 41 : (Article L. 341-6 du code monétaire et financier) - Aménagement des règles d’enregistrement des démarcheurs financiers 54
Article 42 : (Article L. 132-5, article L. 132-21, article 132-23 du code des assurances) - Aménagements du régime de l’assurance-vie 55
AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 57
INTRODUCTION
Le présent projet de loi tend à améliorer les dispositifs d’épargne salariale et d’actionnariat salarié et, donc, le financement d’ensemble de notre économie. Dans un ensemble quelque peu hétérogène, votre Commission des finances est saisie, d’une part, de dispositions relatives à l’épargne salariale et à l’actionnariat salarié (titres I et II) et, d’autre part, de dispositions relatives à l’épargne et au financement de l’économie (titre IV).
Le présent projet de loi propose en particulier de développer les mécanismes d’intéressement et de participation des salariés aux résultats de leur entreprise. Les régimes mis en place respectivement en 1958 et 1967 sont améliorés et adaptés aux réalités économiques et des outils d’implication des salariés plus récents, tels que l’attribution d’actions gratuites, sont développés.
Faisant suite à une large consultation des acteurs économiques, le projet de loi permettra des avancées significatives, sans pour autant remettre en cause les fondements des dispositifs. Il s’agit de les consolider, de les sécuriser et de les simplifier. Ainsi, à titre d’exemple, le blocage de la participation pendant cinq années n’est pas remis en cause car la participation doit continuer à permettre la constitution d’une épargne à moyen terme. Très attaché aux dispositifs « historiques », votre Rapporteur déplore cependant leur trop faible diffusion dans les très petites entreprises et proposera à cet effet la création d’un nouveau dispositif, facultatif, adapté aux entreprises de moins de cinquante salariés.
Le titre IV du projet de loi a pour objectif de moderniser les conditions de commercialisation des produits financiers et des produits d’assurance.
Les mesures proposées se situent dans le contexte d’une importante évolution du cadre juridique de la commercialisation de ces produits, liée à l’adoption de la directive européenne concernant les marchés d’instruments financiers du 21 avril 2004. Cette directive n’a pas encore fait l’objet de transposition, mais celle-ci doit intervenir très prochainement par ordonnance, selon l’habilitation donnée par le Parlement par la loi du 20 juillet 2005, n° 2005-811 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de l'assurance.
Certains articles du titre IV ont pour objet de réaliser une transposition très partielle de cette directive, d’autres introduisent des mesures non prévues par elle.
Ces mesures font également suite au rapport présenté par M. Delmas-Marsalet, membre du collège de l’Autorité des marchés financiers (AMF), à la suite de la mission dont l’a chargé le Ministre de l’Économie, des finances et de l’industrie après que des épargnants eurent porté devant la justice la vente inadaptée de produits financiers dont ils avaient été les victimes. Ce rapport de décembre 2005 comporte de nombreuses propositions pour prévenir les risques de la commercialisation abusive des produits d’épargne, dont certaines ont inspiré les présentes dispositions.
*
* *
I.– LA PARTICIPATION DES SALARIÉS ET L’ACTIONNARIAT SALARIÉ
Le présent projet de loi vise en premier lieu à mieux associer les salariés aux résultats de leur entreprise. Il propose de renforcer et d’améliorer les dispositifs existants – intéressement, participation, plan d’épargne d’entreprise et abondement de l’employeur, attribution d’actions gratuites – et permettra d’adapter leur fonctionnement à la vie économique des entreprises.
L'intéressement, créé par l’ordonnance du 7 janvier 1958, vise à associer les salariés aux performances et aux résultats de leur entreprise. L'intéressement est un régime facultatif et devant présenter un caractère collectif et aléatoire lié aux résultats et aux performances.
La participation, créée par l’ordonnance du 17 août 1967, est un dispositif obligatoire pour les entreprises d'au moins 50 salariés, tendant à la redistribution au profit de ceux-ci d'une partie des bénéfices de l'entreprise. Les sommes issues de la participation sont obligatoirement bloquées pendant 5 ans et sont exonérées d’impôt sur le revenu dans la limite d’un plafond. Il existe différentes modalités de gestion des droits tirés de la participation, parmi lesquelles l'attribution d'actions de l'entreprise, l'affectation à un fonds que l'entreprise doit consacrer à ses investissements (compte courant bloqué), l'acquisition de titres de sociétés d'investissement à capital variable (sicav), l'acquisition de parts de fonds communs de placement créés dans le cadre de la participation ou d'un plan d'épargne d’entreprise et l'affectation à un plan d'épargne salariale.
Les tableaux suivants présentent les sommes perçues par les salariés au titre de l’intéressement et de la participation en 2002 et 2003.
L’INTÉRESSEMENT EN 2002 ET 2003 | ||
2002 |
2003 | |
Montant total distribué en millions d’euros |
4.637 |
4.991 |
Nombre de bénéficiaires en milliers |
3.753 |
3.871 |
Nombre total des salariés en milliers |
15.428 |
15.393 |
Montant moyen en euros |
1.236 |
1.289 |
Source : Rapport annuel du CSP pour 2004/2005, p 20. |
LA PARTICIPATION EN 2002 ET 2003 | ||
2002 |
2003 | |
Montant total distribué en millions d’euros |
4.927 |
5.313 |
Nombre de bénéficiaires en milliers |
4.243 |
4.401 |
Nombre total des salariés en milliers |
15.428 |
15.393 |
Montant moyen en euros |
1.161 |
1.207 |
Source : Rapport annuel du CSP pour 2004/2005, p 20. |
Le plan d'épargne entreprise est un système d'épargne collective ouvrant aux salariés la possibilité de constituer, avec l'aide de leur entreprise, un portefeuille de valeurs mobilières. Le plan épargne d'entreprise peut être alimenté par des versements des salariés complétés par l'abondement de leur employeur ainsi que par l’intéressement et la participation. Les sommes placées sur le plan sont bloquées pendant au moins cinq ans. L’abondement de l’employeur et l’intéressement versés au plan d’épargne d’entreprise sont exonérés d’impôt sur le revenu dans la limite de plafonds.
Le tableau suivant présente les régimes fiscaux et sociaux des dispositifs d’épargne salariale.
RÉGIMES FISCAUX ET SOCIAUX DES DISPOSITIFS D’ÉPARGNE SALARIALE | ||||
ENTREPRISES |
SALARIÉS | |||
RÉGIME SOCIAL |
RÉGIME FISCAL |
RÉGIME SOCIAL |
RÉGIME FISCAL | |
Participation Durée de blocage : 5 ans (sauf cas de déblocage anticipé*) Obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés Plafond : la participation versée à chaque salarié est plafonnée à 23.301 euros en 2006. |
- exonération de cotisations sociales |
- déduction du bénéfice imposable - exonération de taxes (salaires, apprentissage) et participations (formation continue, construction) assises sur les salaires - constitution d’une provision pour investissement de 25% ou 50 % des versements supérieurs au minimum légal |
- exonération des cotisations sociales - assujettissement à la CSG et à la CRDS - assujettissement des produits générés par la participation à la CSG, à la CRDS et au prélèvement social de 2,3 % |
- non imposable (sauf intérêts des comptes courants bloqués perçus annuellement et non réinvestis). |
Intéressement Dispositif facultatif devant présenter un caractère aléatoire Plafonds : le montant de la prime individuelle est plafonné 15.534 euros en 2006. Dans l’entreprise, le total de l’intéressement versé est limité à 20% des salaires bruts versés aux salariés. |
- exonération de cotisations sociales |
- déduction du bénéfice imposable - exonération de taxes et participations assises sur les salaires - sous certaines conditions et si versement dans le cadre d’un plan d’épargne : constitution d’une provision pour investissement égale à 50 % de l’abondement complétant l’intéressement** |
- exonération des cotisations sociales - assujettissement à la CSG et à la CRDS - assujettissement des produits générés par la participation à la CSG, à la CRDS et au prélèvement social de 2,3% |
- imposable si l’intéressement n’est pas placé sur un plan d’épargne salariale - non imposable si versement sur un plan d’épargne salariale dans la limite de 15.534 euros en 2006. |
Abondement versé par l’entreprise dans le cadre d’un : - PEE - PEI Durée de blocage : 5 ans minimum (sauf cas de déblocage anticipé*) |
- exonération de cotisations sociales |
- déduction du bénéfice imposable - exonération de taxes et participations assises sur les salaires - sous certaines conditions et si versement dans le cadre d’un plan d’épargne : constitution d’une provision pour investissement égale à 50 % de l’abondement complétant l’intéressement |
- abondement de l’entreprise exonéré des cotisations sociales dans la limite de 300% des versements du salarié et de 2.300 euros (4.410 euros en cas d’investissement en titres de l’entreprise) - assujettissement de l’abondement à la CSG et à la CRDS - assujettissement des revenus et plus-values produits par l’ensemble des avoirs détenus dans le plan à la CSG, à la CRDS et au prélèvement social de 2,3 % |
- abondement non imposable dans la limite de 300% des versements du salarié et de 2.300 euros (4.410 euros en cas d’investissement en titres de l’entreprise). |
Abondement versé par l’entreprise dans le cadre d’un Perco (sortie au moment de la retraite***) |
- exonération des cotisations sociales - assujettissement à la contribution spécifique de 8,2 % pour la fraction excédant 2.300 euros |
- déduction du bénéfice imposable - exonération de taxes et participations assises sur les salaires - constitution d’une provision pour investissement égale à 25% de l’abondement ou à 50 % si les versements complémentaires des salariés sont investis en titres donnant accès au capital de l’entreprise |
- abondement de l’entreprise exonéré des cotisations sociales dans la limite de 300% des versements du salarié et de 4.600 euros - assujettissement de l’abondement à la CSG et à la CRDS - assujettissement des revenus et plus-values produits par l’ensemble des avoirs détenus dans le plan à la CSG, à la CRDS et au prélèvement social de 2,3 % |
- abondement non imposable dans la limite de 300% des versements du salarié et de 4.600 euros |
*Parmi les cas de déblocage anticipé autorisés : le décès ; l'invalidité ; le surendettement ; la cessation du contrat de travail ; la création ou reprise d'entreprise ; l'acquisition ou l'agrandissement d'une résidence principale. ** Pour les entreprises de moins de 100 salariés ayant mis en place un accord d’intéressement avant le 20 février 2003, ainsi qu’un plan d’épargne salariale. *** pour le PERCO, les cas de déblocage anticipé sont : le décès du salarié, de son conjoint ou de la personne liée au salarié par un PACS, l’invalidité, le surendettement, l’expiration des droits à l'assurance chômage, l’acquisition de la résidence principale. |
En 2004, 54,1 % des salariés du secteur marchand non agricole bénéficiaient d’au moins un dispositif de participation financière (intéressement, participation ou plan d’épargne salariale), qu’ils aient ou non touché des sommes à ce titre. Ainsi, 8,3 millions de salariés sont couverts par un dispositif de participation financière et 6,4 millions ont effectivement perçu une prime. Le montant global distribué titre de la participation et de l'intéressement s'élève à 11,3 milliards d'euros en 2004 et le montant global de l'abondement versé par les entreprises aux plans d'épargne salariale s'élève à 1,3 milliard d'euros. Au total, les sommes distribuées (près de 12,7 milliards d’euros) progressent de 9,2 % en un an (notamment du fait de la hausse de la participation).
En 2004, les bénéficiaires de la participation financière ont reçu en moyenne 1.990 euros. Le montant total des dépôts sur les plans d’épargne salariale atteint 7,7 milliards d'euros en 2004.
Par ailleurs, l'encours de fonds communs de placement d'entreprise et des sicav d'actionnariat salarié est estimé à 65 milliards d’euros au 30 juin 2005.
Le graphique suivant présente la proportion de salariés ayant accès à un mécanisme de participation financière, en fonction de la taille de leur entreprise.
Les dispositifs d'épargne salariale et d’actionnariat salarié ont, en quelques années, été l'objet de nombreuses mesures, parmi lesquelles la création du PERCO, les mesures de déblocage anticipé de l’épargne salariale ou encore la création du régime d’attribution d’actions gratuites.
Sans toucher aux équilibres fondamentaux qui régissent ces dispositifs, souvent depuis plusieurs décennies, le présent projet propose des améliorations concrètes, afin de développer la diffusion des dispositifs d’épargne salariale, notamment l'instauration d'un supplément de participation ou d’intéressement, le développement de l'actionnariat salarié, le développement de la diffusion de la participation dans les Pme, en s’appuyant sur les accords de branche, et la création d’incitations à la mobilisation de l’épargne salariale dans le cadre d’une reprise d’une entreprise par ses salariés.
Votre Rapporteur tient, par ailleurs, à souligner la trop faible diffusion de l’épargne salariale dans les très petites entreprises et propose de créer un nouveau dispositif plus souple fondé sur le volontariat. En effet, 92 % des salariés ayant accès l’épargne salariale travaillent dans des entreprises de plus de 50 salariés alors que les entreprises de moins de 50 salariés représentent 42 % des entreprises. Plus de 5,7 millions de salariés d’entreprises de moins de 50 salariés n’ont accès à aucun mécanisme d’épargne salariale (1). Il s’agirait de permettre aux entreprises de moins de 50 salariés de verser une prime non assujettie aux cotisations sociales et taxes assises sur les salaires et limitée à 1.000 euros par salarié. Sans concurrencer l’intéressement et la participation puisqu’elle ne s’adresserait qu’aux entreprises dans lesquelles ces dispositifs ne sont pas mis en œuvre, cette mesure permettrait de mieux associer les salariés des très petites entreprises aux résultats de leur entreprise.
II.– LES DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉPARGNE ET AU FINANCEMENT DE L’ÉCONOMIE
1.– La responsabilisation des producteurs et des distributeurs dans la communication sur les produits
Le présent projet de loi poursuit l’objectif d’une plus grande responsabilisation des émetteurs et distributeurs de produits financiers et de produits d’assurance.
Un principe de responsabilité du distributeur de produits financiers est posé quant aux communications à caractère promotionnel qu’il adresse à ses clients. Le présent projet s’inspire, pour fonder ce principe, de la définition retenue par la directive du 21 avril 2004 concernant les marchés d’instruments financiers, dite directive « MIF ». En effet, l’article 19 de cette directive fixe des règles pour la fourniture de services d’investissement à des clients, précisant que « Toutes les informations, y compris publicitaires, adressées par l’entreprise d’investissement à des clients ou des clients potentiels, sont correctes, claires et non trompeuses. »
Ces termes sont repris avec une légère adaptation formelle, dans l’article 37 du projet exigeant des prestataires un contenu « exact, clair et non trompeur », afin d’assurer la bonne information des épargnants.
Afin de clarifier les obligations incombant au producteur d’une part, au distributeur d’autre part, une convention devra être établie entre eux. Le producteur devra mettre à la disposition du distributeur les informations nécessaires pour l’appréciation de toutes les caractéristiques du produit proposé au client. Réciproquement, le distributeur de services d’investissement doit soumettre ses documents publicitaires au responsable de la publication des documents d’information chez le producteur. Ce dernier peut donc exercer un contrôle sur la publicité que fera le distributeur. Des exceptions sont possibles à cette obligation d’établir entre eux une convention, qui figureront dans un futur décret en Conseil d’État.
L’article 37 intervient dans le domaine régi par la directive « MIF », notamment de son article 19. Cependant, le présent texte ne constitue pas une transposition en droit interne de la directive, transposition qui devra intervenir très rapidement par ordonnance, pour respecter les délais prévus de transposition et d’entrée en vigueur. (La transposition doit être effectuée au 31 janvier 2007 et l’entrée en vigueur au 1er novembre 2007).
Il convient de préciser que cette directive a été suivie de la directive du 10 août 2006 portant mesures d’exécution. Cette dernière établit les « exigences organisationnelles et les conditions d’exercice applicables aux entreprises d’investissement ». L’article 27 de cette deuxième directive comporte de très nombreuses précisions sur les éléments qui devront figurer dans les informations et publicités : exactitude, modalités de comparaison des produits, appréciation de la performance, indications sur les coûts grevant la performance, présentation des simulations, notamment.
En présence de deux textes communautaires aussi complets et précis, qui sont supposés faire l’objet de transpositions imminentes, votre Rapporteur s’interroge sur l’opportunité de légiférer aujourd’hui, alors que les dispositions du code monétaire et financier devront être largement réformées, ainsi que le règlement général des marchés financiers (RGMF). Il y a lieu de souligner que la date limite de transposition de la directive de 2006 mentionnée ci-dessus est fixée au 31 janvier 2007 et la date d’application des dispositions dans l’Union le 1er novembre 2007.
Un doute sérieux peut aussi être émis sur l’utilité d’imposer, en sus des obligations prévues par les directives, l’établissement de conventions entre producteurs et distributeurs, dans la mesure où la mise en jeu de la responsabilité de l’un ou de l’autre sera possible sur la base des dispositions de la directive transposée. En outre, dans la pratique, les producteurs et les distributeurs sont toujours liés par des conventions, du moins lorsqu’il y a une relation entre eux. Dans ce cas, est-il utile de créer par la loi une obligation non exigée par le droit européen et au demeurant déjà remplie par les professions ?
L’article 37 comporte une deuxième partie appliquant au domaine des assurances les mêmes principes quant aux documents publicitaires et les mêmes obligations quant à l’établissement de conventions entre l’entreprise d’assurance ou de capitalisation et son intermédiaire.
Sur ce point, notre législation vient récemment d’accueillir la transposition en droit interne de la directive du 9 décembre 2002 sur l’intermédiation en assurance. Cette transposition a été faite par la loi n° 2005-1564 du 15 décembre 2005 portant diverses dispositions d’adaptation communautaire dans le domaine de l’assurance. Un décret d’application a été publié le 30 août 2006.
Il convient donc d’apprécier dans quelle mesure le présent projet comporte un apport indispensable au droit existant, afin de justifier une instabilité juridique, peu appréciée des acteurs économiques et de la jurisprudence.
L’inclusion de l’obligation pour le document à caractère publicitaire de présenter un « contenu exact, clair et non trompeur » constitue un apport positif, certes inspiré de la directive « MIF », mais adapté à la réalité des produits commercialisés par les assureurs, qui englobent des purs produits financiers ou des assurances-vie à support de produits financiers. Cette obligation pourrait d’ailleurs être étendue au domaine de la mutualité.
En revanche, l’obligation faite aux entreprises d’assurances et aux intermédiaires d’élaborer des conventions afin de répartir les responsabilités ne constitue pas, selon votre Rapporteur, un élément indispensable. Tout d’abord, elle ne correspond pas à la réalité des relations entre producteurs et intermédiaires dans le cas où l’intermédiaire est indépendant : c’est le cas du courtier, indépendant quant à la rédaction de ses documents publicitaires et répondant de leur contenu à travers sa responsabilité civile professionnelle. Cette obligation ne répond pas non plus à la réalité des relations entre une entreprise d’assurance et son réseau de salariés et de mandataires, car dans ce cas l’entreprise est entièrement responsable de ses intermédiaires, sauf faute de la part de ceux-ci. Elle est en outre la plus solvable.
Dès lors, l’élaboration des conventions apparaît comme une contrainte non prévue par les textes européens qui sans leur être contraire, conduit à légiférer et réglementer un mode de relations qui peut être établi au sein des professions concernées. Ainsi, il appartient à l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles (ACAM) de contrôler la qualité de la publicité. Cette autorité a élargi ses modalités de contrôle depuis la loi du 1er août 2003 et a procédé au recrutement de commissaires–contrôleurs chargés de vérifier, même en l’absence d’alerte, les documents contractuels et précontractuels.
Le présent projet de loi, dans son article 38, opère une transposition très partielle de la directive « MIF » déjà évoquée : il s’agit en effet de transposer les paragraphes 4 à 6 de l’article 19 relatif aux « règles de conduite pour la fourniture de services d’investissements à des clients ». Ces paragraphes imposent au prestataire fournissant des produits d’investissement de se procurer certaines informations sur le client : sa situation financière et ses objectifs d’investissement, ses connaissances et son expérience en matière d’investissements, notamment. Ayant connaissance de ces éléments, le conseiller doit recommander au client les services et instruments financiers qui lui conviennent.
Si le prestataire estime qu’un produit ne convient pas au client, il doit l’en avertir. Également, si, faute de communication par le client de ces éléments d’information, il ne peut déterminer si le produit lui convient, celui-ci doit aussi en avertir le client. Ces procédures peuvent ne pas s’appliquer à la réception et à la transmission d’ordres.
Ces éléments du devoir de conseil sont suivis par d’autres non repris par le présent projet de loi ; ils sont en outre complétés par les dispositions de la directive du 10 août 2006 portant mesures d’exécution.
Bien que ces éléments constituent un apport utile et nécessaire à la protection du client, alors que, comme le souligne le rapport rédigé par M. Jacques Delmas-Marsalet, les produits financiers s’avèrent de plus en plus complexes et font porter le risque davantage sur l’épargnant que sur l’établissement fournisseur du produit, votre Rapporteur considère cependant préférable de procéder de façon globale à la transposition des deux directives en question.
Une transposition aussi partielle de textes très complets et ambitieux risquerait en effet d’entraîner des contradictions entre les dispositions issues des différents textes de transposition et nuirait à la clarté de la démarche. Elle entraînerait aussi les professions concernées dans une suite d’adaptations, complexes à mettre en œuvre, impliquant notamment une formation des conseillers chargés de la commercialisation.
Le présent projet prévoit que des codes de bonne conduite seront rédigés par les professions, tant pour la commercialisation des instruments financiers ou des produits d’épargne que pour celle des produits d’assurance.
Il donne en cela suite aux préconisations du rapport Delmas-Marsalet proposant que des règles de conduite opérationnelles, inspirées des meilleures pratiques des professions, soient insérées dans des codes de bonne conduite professionnels, approuvés par les pouvoirs publics.
Les éléments constitutifs possibles de ces codes figurent en effet dans le rapport et sont relatifs à plusieurs problèmes fréquemment constatés.
Il s’agit tout d’abord de fournir une information sur les produits plus aboutie, incluant un profilage du produit, c'est-à-dire identifiant le type d’investisseur auquel le produit est destiné. Les réseaux de distribution des produits doivent mettre en place un ciblage pour la commercialisation : segmentation de la clientèle, modulation de l’offre, hiérarchisation au regard de la compétence du vendeur, adéquation des produits selon la compétence des vendeurs, notamment quand il s’agit de produits complexes ou risqués.
Ensuite, la notion de la fourniture d’un conseil approprié au client est prépondérante, avec une traçabilité de la prestation de conseil, cette dernière obligation étant extrêmement difficile à organiser par la profession, tant pour ce qui est du mode d’enregistrement de la prestation de conseil que de la conservation dans le temps. Pour que le conseil soit sincère, le distributeur doit neutraliser l’effet de systèmes de rémunération variable en fonction des produits conseillés. Enfin, le producteur comme le distributeur doivent inclure dans la communication sur le produit une information sur la durée minimum de placement recommandée pour obtenir le rendement promis, ainsi que des précisions sur la liquidité du placement.
Ces normes professionnelles anticipent la transposition de la directive « MIF » du 21 avril 2004 et en particulier son article 19 sur les règles de conduite pour la fourniture de services d’investissement à des clients. Elles précisent la manière dont les professionnels donneront une application complète de l’article 38.
Il appartiendra aux associations professionnelles représentatives des secteurs concernés d’élaborer ces codes de conduite : la Fédération bancaire française (FBF), l’Association française des entreprises d’investissement (AFEI), la Fédération française des assurances (FFSA) ou encore le Groupement des entreprises mutualistes d’assurances (GEMA) et l’Association française de gestion (AFG).
L’homologation des codes sera effectuée par arrêté du ministre chargé de l’économie, selon le mécanisme déjà en vigueur pour les normes professionnelles élaborées, par exemple, par l'Association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (AFECEI). Cette homologation sera liée à l’avis conforme du Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières (CCLRF). Un code de bonne conduite homologué pourra être étendu à une autre catégorie professionnelle, cette fois après simple avis de ce comité.
L’avantage de cette modalité est d’obtenir des normes élaborées par la place et non pas imposées par les pouvoirs publics, ce qui est d’autant plus important qu’elles encadreront le travail quotidien des conseillers chargés de vendre des produits financiers, et feront partie de la formation professionnelle donnée aux conseillers.
L’article 41 du présent projet a pour effet de compléter la base juridique du fichier des démarcheurs, en particulier en ce qui concerne la situation du sous–mandataire.
Le fichier des démarcheurs a été créé à la suite de la loi n° 2003-706 de sécurité financière du 1er août 2003, afin de répertorier les personnes morales ou physiques titulaires d’une carte de démarchage délivrée par leur organisme mandant.
Cependant, à la suite d’une annulation partielle par le Conseil d’État du décret du 28 septembre 2004 au motif de la non-conformité entre le fichier et les dispositions de la loi (L. 341-6), le fichier se trouve en partie privé de base juridique. Il convient donc de rétablir cette base.
D.– AUTRES DISPOSITIONS PROTECTRICES EN FAVEUR DES SOUSCRIPTEURS ET BÉNÉFICIAIRES D’ASSURANCES SUR LA VIE
Actuellement, dans le cadre d’un contrat d’assurance–vie, le versement du capital dû en cas de décès de l’assuré n’est soumis à aucun délai. Or les cas dans lesquels le bénéficiaire se heurte à la lenteur et à l’absence de diligence de l’assureur sont trop fréquents.
Le projet de loi fixe à un mois le délai maximum pour le versement du capital ou de la rente garantis par le contrat. Si ce délai n’était pas respecté, un système de rémunération du capital est imposé.
Cette mesure s’appliquera aux contrats en cours, dont elle n’impose pas la modification.
Le projet de loi rend obligatoire la revalorisation du capital garanti même après le décès de l’assuré pendant toute la période qui s’écoulera jusqu’à la réception par l’assureur des pièces mentionnées au contrat nécessaires au paiement de la prestation. Cette période peut durer plusieurs années, si le souscripteur n’a pas fait connaître son intention au bénéficiaire.
L’instauration d’une rémunération, même minimale, engage l’assureur à faire preuve de diligence pour effectuer le versement du capital ou de la rente. En outre, les conditions de cette rémunération devront être précisées dans le contrat.
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Au cours de sa séance du 26 septembre 2006, votre Commission a procédé à l’examen du présent projet de loi.
Votre Rapporteur a indiqué que les deux premiers titres du projet de loi comportent une amélioration des mécanismes d’intéressement et de participation des salariés aux résultats de leur entreprise, mis en place respectivement en 1958 et 1967, en les adaptant aux réalités économiques actuelles. Ce projet de loi permettra des avancées significatives, sans remettre en cause les fondements des dispositifs historiques, dont on peut déplorer la trop faible diffusion dans les très petites entreprises.
Le quatrième titre du projet de loi a pour objectif de moderniser les conditions de commercialisation des produits financiers et des produits d’assurance. Les mesures proposées se situent dans le contexte d’une importante évolution du cadre juridique de la commercialisation de ces produits, liée notamment à l’adoption de la directive européenne concernant les marchés d’instruments financiers du 21 avril 2004. Cette directive doit faire l’objet d’une très prochaine transposition par ordonnance, selon l’habilitation donnée par le Parlement par la loi du 20 juillet 2005 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de l'assurance. Certains articles du titre IV ont pour objet de réaliser une transposition très partielle de cette directive, d’autres introduisent des mesures additionnelles. Enfin, quelques mesures distinctes apportent plus de transparence et de sécurité aux investisseurs et aux souscripteurs de contrats d’assurance sur la vie.
Dans le cadre de l’amélioration de la participation des salariés aux résultats de l’entreprise, l’article 6, améliore la définition du bénéfice fiscal retenu pour le calcul de la participation. Il propose de retenir le bénéfice soumis à l’impôt avant tout abattement ou exonération. Ainsi les entreprises de plus de 50 salariés bénéficiant d’un certain nombre de régimes fiscaux favorables permettant d’abaisser le bénéfice imposable seraient dorénavant soumises à cette obligation, sous réserve qu’elles soient en situation bénéficiaire. Cependant, la rédaction proposée est très générale et pourrait être source d’insécurité juridique, aussi serait-il préférable de lister les dispositifs dont on ne souhaite pas qu'ils contribuent à exonérer les entreprises. Cet article propose également de retenir le bénéfice avant imputation d’un report de déficit.
L'article 12, également favorable aux salariés, mais à l’impact plus limité, propose de créer un régime fiscal favorable pour faciliter les transferts d'un compte épargne temps (CET) vers un plan d’épargne pour la retraite collectif ou un plan d’épargne d’entreprise dans certaines conditions.
Le développement de l’actionnariat salarié repose sur plusieurs mesures. Ainsi, le régime fiscal avantageux des augmentations de capital réservées aux salariés adhérents d’un plan d’épargne d’entreprise serait étendu par l’article 16 aux titres cédés aux salariés suite au rachat par une entreprise de ses propres titres pour les revendre avec une décote à ses salariés adhérents du PEE. Le total des titres ainsi cédés aux salariés adhérents ne pourra excéder 10 % du total des titres émis par l’entreprise.
L’article 17 permettra aux fonds communs de placement d’entreprise (FCPE) constitués dans les entreprises dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé d'être partie à un pacte d'actionnaires, afin de favoriser la transmission de l'entreprise, la stabilité de l'actionnariat ou la liquidité du FCPE.
Les articles 18 et 19, complémentaires, visent à favoriser les opérations de reprise dans lesquelles sont impliqués les salariés adhérents d’un PEE, par le biais de l’épargne salariale et certains salariés par le biais de la constitution d’une holding de reprise bénéficiant d’un régime fiscal favorable. Ces articles visent les cas dans lesquels la reprise ne permet pas d’atteindre le seuil de l’intégration fiscale, soit la détention de 95 % des titres de la société reprise.
Si 8 millions de salariés ont accès à au moins un dispositif de participation financière ou d’intéressement, 6 millions de salariés de très petites entreprises ou de PME ne bénéficient d’aucun régime d’intéressement ou de participation, soit parce qu’ils travaillent dans une entreprise de moins de 50 salariés pour laquelle les dispositifs ne sont pas obligatoires, soit parce qu’ils travaillent dans une PME dont la direction a estimé les dispositifs trop complexes pour les mettre en œuvre. Il convient donc de combler ce manque.
La quatrième partie du projet de loi a pour objectif d’accroître la transparence dans la commercialisation des produits d’investissement financiers et les produits d’assurance, et de mieux informer et protéger les investisseurs et les souscripteurs de contrats d’assurance sur la vie, notamment.
Le projet de loi poursuit l’objectif d’une plus grande responsabilisation des producteurs et distributeurs de produits financiers et de produits d’assurance en ce qui concerne la rédaction des documents publicitaires.
Les articles 37 et 38 transposent très partiellement la directive du 21 avril 2004 sur les « marchés d’instruments financiers » et la directive « mesures d’exécution » du 10 août 2006. Il s’agit de clarifier et de simplifier les documents à caractère publicitaire portant sur les produits financiers et sur les assurances sur la vie. Il s’agit également de réformer le devoir de conseil au client. Cependant, l’obligation faite aux professionnels de se lier par convention en ce qui concerne l’information et la publicité s’ajouterait aux dispositions, déjà ambitieuses, des deux directives et introduirait des normes législatives et réglementaires là où les professions se sont déjà organisées ou le font actuellement.
Pour ce qui est de l’assurance, le droit européen a déjà été transposé et il convient d’être circonspect avant d’ajouter des normes à des normes européennes d’harmonisation maximale. Cependant, le renforcement du devoir de conseil au souscripteur, prévu par l’article 39, constitue un ajout utile à notre droit positif, de même qu’une disposition de l’article 37 prévoyant que le contenu de la publicité relative au contrat d’assurance doit être « exact, clair et non trompeur ».
Le projet incite à la rédaction de codes de bonne conduite par les professions, tant pour la commercialisation des instruments financiers ou des produits d’épargne que pour celle des produits d’assurance. Il s’agit de s’inspirer les meilleures pratiques professionnelles possibles.
Enfin, l’article 42 comporte des dispositions protectrices des souscripteurs et des bénéficiaires d’assurances sur la vie. Bien que non liées à l’objectif principal du texte, elles répondent à des difficultés très fréquemment rencontrées par les personnes devant faire face, dans des moments difficiles, à la mauvaise volonté ou à l’absence de diligence de la part des assureurs. Ainsi, le projet de loi fixe à un mois le délai maximum pour le versement du capital ou de la rente garantis par le contrat. Si ce délai n’était pas respecté, un système de rémunération du capital serait imposé. Il est important de noter que la mesure s’appliquera aux contrats en cours, dont elle n’impose nullement la modification.
De même, est rendue obligatoire la revalorisation du capital garanti, même après le décès de l’assuré pendant toute la période qui s’écoulera jusqu’à la réception par l’assureur des pièces mentionnées au contrat nécessaires au paiement de la prestation, ce qui peut engager l’assureur à faire preuve de diligence pour effectuer le versement du capital ou de la rente.
M. Jean-Pierre Balligand a souligné que deux députés, MM. François Cornut-Gentille et Jacques Godfrain s’étaient vus confier une mission par le Gouvernement sur le développement de la participation. Il est regrettable que leurs propositions n’aient pas été reprises dans le projet de loi, par exemple celles qui sont relatives aux bases du calcul de la participation devant être distribuée aux salariés. Ce n’est pas un signe positif, dans la période actuelle où les rémunérations des salariés et celles des dirigeants atteignent des écarts souvent scandaleux. Certaines dispositions du projet apportent quelques avancées, mais l’ensemble reste en deçà des enjeux véritables ; il faut apporter des améliorations plus significatives, si l’on veut éviter la rupture de la confiance entre les dirigeants d’entreprises et leurs salariés.
M. Jean-Jacques Descamps, Président, a observé que le phénomène des écarts entre les rémunérations au sein de l’entreprise n’est pas limité à notre pays. D’ailleurs, il faut souligner l’existence d’un marché international des dirigeants et des cadres de haut niveau.
M. Jean-Pierre Balligand a rappelé que cet état de fait est compensé, aux États-Unis, par le poids de l’assemblée générale des actionnaires minoritaires. Aux USA on voit fréquemment des dirigeants quitter leur poste.
Votre Rapporteur a souligné que le vice-président du Conseil de la participation, auditionné par ses soins, avait confirmé que ce conseil avait été consulté sur le texte, lequel prend en considération les débats qui se sont tenus au conseil.
Votre Commission a ensuite examiné les articles 6, 12, 16 à 19 et 37 à 42 du présent projet de loi.
DÉVELOPPER LA PARTICIPATION DES SALARIÉS
Favoriser le développement de la participation
Votre Commission a examiné un amendement de M. Jean-Pierre Balligand prévoyant une information des salariés lors de la négociation annuelle sous forme d’un indicateur, fourni par l’entreprise, faisant le rapport entre l’ensemble des sommes perçues par les salariés au titre de l’intéressement et la masse salariale de l’entreprise.
Votre Rapporteur a considéré que l’amendement risquait de compliquer les éléments de la négociation salariale annuelle. Bien qu’en accord avec son objectif de ne pas voir l’intéressement se substituer au salaire, il a jugé préférable de distinguer clairement au contraire les deux notions.
M. Jean-Pierre Gorges a estimé que l’amendement ne retient pas un bon critère, car la mesure de ces indicateurs pose une difficulté.
M. Jean-Jacques Descamps, Président, a rappelé qu’il peut en effet y avoir une variation erratique possible de ces deux données en fonction d’éléments liés à la vie de l’entreprise.
M. Jean-Pierre Balligand a défendu l’amendement en expliquant qu’il vise à créer un climat décrispé au sein de l’entreprise, les critères pouvant éventuellement être revus. Il s’agit simplement de créer de la transparence et d’éclairer les accords d’intéressement.
M. Pierre Hériaud, en jugeant cette approche sympathique, a soutenu l’idée d’une discussion annuelle sur les salaires. Toutefois on ne perçoit pas l’intérêt de rendre obligatoire un tel indicateur, d’autant plus qu’il faudrait trouver des critères pertinents.
M. Jean-Jacques Descamps, Président, s’est interrogé sur la nécessité de légiférer sur la question.
M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a estimé que du point de vue de l’entreprise, comme de celui du salarié, il existera une propension à utiliser ces dispositifs pour éviter des augmentations de salaires.
Votre Rapporteur a précisé que si l’intention de l’amendement est positive, il existe un danger d’oublier que l’indicateur principal reste le salaire.
M. Jean-Jacques Descamps, Président, a estimé que l’indicateur proposé par l’amendement établit un rapport entre deux chiffres, alors qu’il faudrait un rapport entre l’évolution dans le temps de ces deux mêmes chiffres. Les salariés établissent automatiquement un rapport s’ils sont amenés à constater un décrochage entre les deux données, les salaires d’une part, et l’intéressement de l’autre.
M. Jean-Pierre Gorges a estimé qu’un rapport concernant chaque salarié pouvait avoir plus de sens qu’une donnée globale pour l’ensemble de la masse salariale.
Suivant l’avis défavorable de votre Rapporteur, votre Commission a alors rejeté l’amendement.
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Élargissement de l’assiette fiscale de la participation
Le présent article modifie la définition du bénéfice fiscal retenu pour le calcul de la participation devant être répartie entre les salariés.
L’article L. 442-2 du code du travail définit la formule de calcul de la réserve spéciale de participation (RSP) devant être distribuée aux salariés. Elle est égale à la moitié du produit entre, d’une part les bénéfices, moins 5 % des capitaux propres, et d’autre part, le rapport entre les salaires et la valeur ajoutée, soit la formule suivante :
RSP = 1/2 (B - 5 % C) x (S/VA) |
B = bénéfice net fiscal soumis à l’impôt sur les sociétés (ou à l’impôt sur le revenu) |
C = capitaux propres |
S = salaires de l'entreprise |
VA = valeur ajoutée de l'entreprise |
Les entreprises peuvent mettre en place une formule de calcul dite dérogatoire si les droits des salariés au titre de la participation sont au moins équivalents à ceux résultant de la formule prévue par le code du travail.
I.– LA NON PRISE EN COMPTE DES REPORTS DE DÉFICITS ANTÉRIEURS
Au cours des débats sur la formule de calcul ayant précédé la rédaction du présent article, des acteurs économiques ont indiqué qu’il serait préférable de retenir le bénéfice comptable et non le bénéfice fiscal.
Une étude de l’INSEE sur un échantillon d’entreprises de plus de 50 salariés menée pour le conseil supérieur de la participation permet de conclure que la formule retenant le bénéfice comptable donnerait en moyenne un résultat inférieur à celui obtenu en s’appuyant sur le bénéfice fiscal pour les entreprises qui distribuent déjà de la participation (en moyenne, l’écart est de – 2,3 % pour l’année 2002 et de – 9 % pour l’année 2000). Les écarts varient beaucoup d’un secteur à l’autre. Parmi les entreprises ne versant pas de participation, la substitution du bénéfice comptable au bénéfice fiscal conduirait une part importante de celles-ci à verser de la participation : 8 % de salariés supplémentaires bénéficieraient alors de la participation. En conclusion, la modification du mode de calcul pourrait avoir des conséquences positives pour certaines entreprises, mais également négatives pour un certain nombre d’autres.
Le conseil supérieur de la participation conclut dans son rapport annuel paru en décembre 2005 que le passage « au bénéfice comptable réduit le montant de la RSP pour la plupart des salariés qui en bénéficient avec la formule basée sur le bénéfice fiscal. » Le conseil estime également que « si, en revanche, on maintenait la notion actuelle de bénéfice fiscal, la question du report des déficits antérieurs devrait être examinée. En effet, les déficits des exercices antérieurs peuvent maintenant être reportés sans limite de temps, ce qui peut conduire à ne distribuer aucune participation alors même que l'entreprise dégage des bénéfices importants.»
Le présent article propose (2°) de ne pas diminuer le bénéfice retenu pour le calcul de la RSP du report des déficits antérieurs.
Il est certain que cette mesure pose question du point de vue de la stricte logique économique, puisqu’elle soumettrait des entreprises supportant des déficits d’exercices précédents d’un point de vue fiscal à une obligation de participation, alors même qu’elles n’acquittent pas d’impôt sur les sociétés et ne versent pas de dividendes.
Pour autant, comme le souligne le conseil supérieur de la participation, le fait que des entreprises dégageant au cours d’un exercice un bénéfice important n’aient pas à verser de participation n’est pas satisfaisant.
II.– LA NON PRISE EN COMPTE DES EXONÉRATIONS ET ABATTEMENTS
La formule de calcul actuelle présente également l’inconvénient que les entreprises exonérées d’impôt sur les bénéfices en vertu d’un dispositif fiscal avantageux (par exemple celles qui sont situées dans les zones franches urbaines, les pôles de compétitivité, ou encore les jeunes entreprises innovantes) sont également exonérées du versement de la participation, alors qu’elles auraient les capacités d’y avoir recours.
Un décret devait prévoir les conditions dans lesquelles la réserve spéciale de participation des entreprises situées dans les zones franches urbaines et exonérées d’impôt devait être calculée. Ce décret n’a jamais été pris.
Le présent article propose de retenir le bénéfice soumis à l’impôt avant tout abattement ou exonération prévu par le code général des impôts (1°). Ainsi, les entreprises de plus de 50 salariés bénéficiant d’un certain nombre de régimes fiscaux favorables permettant d’abaisser le bénéfice imposable et ayant pour conséquence qu'elles n'ont pas à verser de participation seraient dorénavant soumises à cette obligation, sous réserve bien entendu qu'elles soient en situation bénéficiaire. Il s'agirait des entreprises suivantes :
– entreprises situées dans les zones de revitalisation rurale exonérées d'impôt pendant deux ans suivant leur création (article 44 sexies du code général des impôts) ;
– jeunes entreprises innovantes qui sont exonérées d'impôt à raison des bénéfices réalisés au titre des trois premiers exercices (article 44 sexies A du code général des impôts) ;
– entreprises créées pour reprendre une entreprise en difficulté qui bénéficient d'une exonération d'impôt à raison des bénéfices réalisés pendant deux ans suivant leur création (article 44 septies du code général des impôts) ;
– entreprises implantées dans les zones franches urbaines exonérées d'impôt à raison des bénéfices des activités implantées dans la zone pendant cinq ans (article 44 octies du code général des impôts). Le bénéfice fait ensuite l’objet d'un abattement allant de 60 % à 20 % pendant trois ans à l'issue de cette période de cinq ans. Les entreprises de moins de cinq salariés bénéficient d'une sortie en sifflet d'une durée de neuf ans;
– entreprises implantées dans un pôle de compétitivité exonérées d'impôt à raison des bénéfices réalisés pendant les trois premiers exercices bénéficiaires. À l'issue de cette période, les bénéfices ne sont soumis à l'impôt que pour la moitié de leur montant pendant deux exercices supplémentaires (article 44 undecies du code général des impôts).
En dehors de ces dispositifs d'exonération sur une politique de zonage, la rédaction très large retenue dans le présent article (« tout abattement ou exonération prévu par le code général des impôts ») amènerait également à soumettre à l'obligation de participation :
– les sociétés d'investissements immobiliers cotées (sociétés dont le capital social est supérieur à 15 millions d'euros) ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'immeubles en vue de la location, qui bénéficient d'une exonération d'impôt sur les sociétés pour les bénéfices provenant de la location d'immeubles à condition que 85 % de ces bénéfices soient distribués aux actionnaires avant la fin de l'exercice suivant. Elles sont également exonérées sur le bénéfice provenant des plus-values réalisées lors de la cession d'immeubles à condition que 50 % des plus-values soient distribués aux actionnaires dans les deux exercices suivants et pour les dividendes reçus des filiales à condition qu'ils soient distribués en totalité au cours de l'exercice suivant (article 208 C du code général des impôts) ;
– les entreprises situées dans les départements d'outre-mer et exerçant une activité dans les secteurs éligibles à la réduction d'impôt au titre des investissements productifs neufs réalisés outre-mer, dont les bénéfices « ne sont retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés que pour les deux tiers de leur montant » (article 217 bis du code général des impôts : si le code ne retient pas le terme « d'abattement », ce dernier est employé dans les textes d’application). En ce cas, la rédaction de l’article 6 amène à retenir le bénéfice dans sa totalité pour la RSP ;
– les entreprises bénéficiant du régime des sociétés mères et filiales : les revenus de filiales françaises ou étrangères touchés par la société mère «peuvent être retranchés du bénéfice net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges » (article 216 du code général des impôts). Il n'est pas certain que le terme abattement s'applique à ces sociétés mères et, ce régime existant pour éviter les doubles impositions et ne constituant pas un avantage fiscal dérogatoire, il ne devrait pas être concerné par le présent article.
En conséquence, à la rédaction très générale proposée ici et qui pourrait être source d’insécurité juridique, il serait préférable de lister les dispositifs dont on ne souhaite pas qu'ils aboutissent à exonérer les entreprises de participation.
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Votre Commission a adopté cet article, sans modification.
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Article additionnel après l’article 6
Création d’une prime de partage des profits
Votre Rapporteur souligne, comme toutes les études le démontrent, que les salariés des très petites entreprises sont encore trop souvent exclus des régimes d’intéressement, de participation et d’épargne salariale car ces derniers ne sont pas adaptés : les salariés des entreprises de moins de 50 salariés, qui représentent 42 % de l’ensemble des salariés, ne pèsent que 8 % des salariés ayant accès à un dispositif de participation financière.
Plus de 5,7 millions de salariés d’entreprises de moins de 50 salariés n’ont donc accès à aucun mécanisme d’épargne salariale. Dans les entreprises de moins de dix salariés, seuls 8 % des salariés sont couverts par un dispositif, le plus souvent un plan d’épargne, le moins coûteux à mettre en place (grâce aux plans d’épargne interentreprises), ce qui ne signifie pas qu’ils aient perçu une prime. Dans les entreprises de 10 à 49 salariés, 15 % des salariés sont couverts par un mécanisme d’épargne salariale.
Il est donc proposé que, en l’absence d’accord d’intéressement ou de participation, toute entreprise employant habituellement moins de cinquante salariés puisse verser une prime de partage des profits à l’ensemble de ses salariés après clôture des comptes d’un exercice. Les primes versées seraient exonérées de cotisations sociales et de taxes et participations assises sur les salaires. Les primes versées ne pourraient se substituer à aucun des éléments de rémunération.
Ce dispositif facultatif très simple à mettre en œuvre permettrait aux petites entreprises de mieux associer les salariés à leurs résultats.
Le montant de la prime versée à chaque salarié ne pourrait excéder 1.000 euros et le montant total des primes versées ne pourrait excéder 15 % du bénéfice, tel qu’il est retenu pour être imposé à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés.
Le montant de la prime versée à chaque salarié pourrait être uniforme, proportionnel à la durée de présence dans l’entreprise au cours de l’exercice ou au salaire perçu ou retenir conjointement plusieurs de ces critères. Pour l’entreprise, le montant des primes de partage des profits versées aux salariés serait déductible des bases retenues pour l’assiette de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés. Pour les salariés, les primes perçues seraient soumises à l’impôt sur le revenu, à la CSG et à la CRDS.
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Votre Commission a examiné un amendement de votre Rapporteur instituant une prime de partage des profits d’un montant maximum de 1.000 euros par salarié dans les entreprises de moins de cinquante salariés, le montant des primes versées ne pouvant excéder 15 % du bénéfice.
Votre Rapporteur a expliqué que ce dispositif facultatif, très simple à mettre en œuvre, permettra aux petites entreprises de mieux associer les salariés à leurs résultats. Il ne concurrencerait ni l’intéressement, ni la participation et serait réservé aux très petites entreprises et aux PME qui n’ont pas recours à ces mécanismes. Toutes les études démontrent en effet que les salariés de ces entreprises sont encore trop souvent exclus des régimes d’intéressement, de participation et d’épargne salariale. Les 6,5 millions de personnes potentiellement concernées représentent pourtant 42 % de l’ensemble des salariés. Or seulement 8,7 % d’entre eux ont aujourd’hui accès à un dispositif de participation financière. Il s’agit donc de permettre aux entreprises de moins de 50 salariés de verser une prime de partage des profits à l’ensemble de leurs salariés, sous réserve de respecter un plafond total de 15 % de leur bénéfice. Cette prime serait déductible de l’assiette de l’impôt sur les sociétés et non soumise aux cotisations sociales. Il s’agirait d’une rémunération nette de 1.000 euros pour les salariés concernés. Cette avancée se situe donc bien au cœur de la problématique de la participation.
M. Jean-Pierre Gorges s’est interrogé sur les limitations à 1.000 euros et à 15 % des bénéfices prévues par l’amendement. Il faut laisser aux chefs d’entreprises la liberté de répartir le bénéfice.
Votre Rapporteur a expliqué que ce plafonnement permet d’éviter une transformation de salaire en prime. Cette dernière doit rester une part accessoire de la rémunération et ne pas se substituer à l’assiette salariale des cotisations sociales.
M. Pierre Hériaud s’est exprimé en faveur de cet amendement, dont le cœur de cible est les petites entreprises où les salariés ne bénéficient pas aujourd’hui de dispositifs d’intéressement. Il s’agit donc d’un gain net et direct de pouvoir d’achat. Pour autant, il convient de conserver une capacité d’autofinancement afin que la valeur ajoutée dégagée par l’entreprise demeure réinvestie l’année suivante. De ce fait, le plafond de 15 % des bénéfices est indispensable.
M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a estimé que cet amendement pouvait dégager des montants considérables, déductibles de l’IS et des cotisations sociales. Compte tenu des risques qu’il représente pour l’équilibre des finances publiques, il importe donc d’évaluer précisément son impact financier. Il importe également de savoir comment ce dispositif s’articule avec l’extension des accords d’intéressement aux entreprises de moins de 50 salariés, votée par le Parlement il y a moins d’un an. Les deux dispositifs ne doivent pas se cumuler et il vaudrait mieux attendre de voir précisément comment la diffusion de ces accords se déroule avant d’instaurer un nouveau dispositif.
M. Jean-Jacques Descamps, Président, a considéré que cette prime d’intéressement devait être exceptionnelle et non pérenne, afin de ne pas grever la capacité d’autofinancement des PME, si elles modifiaient toutes de la sorte la répartition de la valeur ajoutée entre capital et travail.
Votre Rapporteur a insisté sur l’exclusion de fait, aujourd’hui, dans les très petites entreprises, de tout intéressement pour les salariés concernés. En pratique, des enveloppes sont versées en fin d’année, hors de tout cadre légal. Le versement de la prime de partage des profits doit être régulier, même si elle reste basée sur le volontariat dans chaque entreprise. Elle est bien évidemment réservée uniquement aux entreprises qui n’ont pas mis en place un dispositif d’intéressement et l’amendement peut utilement être précisé sur ce point. Enfin, le pouvoir d’achat ainsi injecté dans l’économie sera recyclé pour les finances publiques sous la forme d’impôt sur le revenu supplémentaire.
M. Jean-Pierre Gorges a insisté sur la simplicité de cette mesure, favorable au pouvoir d’achat des salariés des petites entreprises. L’argent ainsi distribué sera recyclé via la consommation des ménages, ce qui entraînera pour l’État des rentrées de TVA supplémentaires.
M. Jean-Pierre Balligand s’est interrogé sur la multiplication des dispositifs d’intéressement. S’il est effectivement nécessaire d’accorder de nouveaux avantages fiscaux et sociaux pour les salariés des TPE et des PME, on peut se demander si la création d’un véhicule supplémentaire est un bon moyen pour populariser la mesure. À titre d’exemple, la création de nouveaux dispositifs d’épargne retraite par la loi « Fillon » en 2003 a brouillé le message par rapport aux dispositifs déjà existants. Il faut donc éviter qu’une vision immédiate de court terme risque de porter atteinte au développement global de l’intéressement et de la participation.
M. Pierre Hériaud a souligné que l’objectif de l’amendement était d’offrir aux petites entreprises un dispositif simple et facile à mettre en place. Le problème est que l’information sur la mesure ait lieu dans de bonnes conditions.
Votre Rapporteur a approuvé le fait de ne pas cumuler la mesure proposée par l’amendement avec les dispositifs existants d’intéressement et de participation. Il s’est en revanche opposé à la suppression des plafonds de 15 % de bénéfice et de 1.000 euros de versement prévus par l’amendement. Certes, il s’agit de créer un nouveau dispositif. Cependant, la société est aujourd’hui complexe et les problèmes ne sont pas les mêmes pour les grandes et les petites entreprises. Il est indispensable de mettre en place des dispositifs spéciaux pour les très petites entreprises et pour les PMI-PME. La législation est trop souvent adaptée aux grands groupes et moins réceptive aux attentes des petites sociétés. Compte tenu de leur rôle en matière d’emploi et de maillage du territoire, il apparaît nécessaire de créer des mesures qui leur soient spécifiquement adaptées. En matière d’emploi des jeunes, la mise en place de telles mesures a permis des résultats tangibles, comme le montre la baisse actuelle du chômage.
Votre Commission a alors examiné un sous-amendement proposé par M. Jean-Jacques Descamps, Président, visant à préciser que le dispositif ne vaut qu’ : « en l’absence d’accord d’intéressement visé à l’article L. 441-1 ou de participation visé à l’article L. 442-5 ». Votre Commission a adopté ce sous-amendement.
Votre Commission a ensuite examiné un sous-amendement de M. Jean-Pierre Gorges, visant à supprimer les plafonds de 15 % et de 1.000 euros. Le sous-amendement a été rejeté.
M. Jean-Jacques Descamps, Président a noté qu’il serait nécessaire de réfléchir, au moment du débat en séance publique, à la dénomination donnée à cette prime.
Votre Commission a adopté cet amendement ainsi modifié (n° 43).
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Votre Commission a examiné un amendement de M. Jean-Pierre Balligand donnant la possibilité au conseil d’administration de créer un comité des rémunérations en son sein, chargé d’examiner toute question relative à la détermination de la part variable de la rémunération des mandataires sociaux, de définir les règles de fixation de cette part variable, d’en apprécier les conséquences pour l’entreprise et d’établir un rapport annuel à l’attention de l’assemblée générale des actionnaires.
M. Jean-Pierre Balligand a estimé que la mise en place de comités spécialisés au sein des conseils d’administration peut être un moyen d’assurer un fonctionnement plus transparent du conseil et d’informer l’ensemble des parties prenantes concernant le gouvernement d’entreprise. Bien évidemment, ni le président, ni les directeurs généraux de l’entreprise ne participeraient à l’examen des modalités de leur propre rémunération. Cet amendement rejoint les préoccupations évoquées par la commission des Finances du Sénat concernant l’application de la loi de sécurité financière. Le conseil d’administration doit concilier le caractère collégial de ces décisions avec le principe interne du contradictoire, s’agissant d’un élément important d’organisation interne de l’entreprise.
Votre Rapporteur a indiqué que cet amendement répond à un souci louable de transparence, mais qu’il faut éviter de vouloir traiter de toute question concernant la gouvernance d’entreprise dans un projet de loi centré sur l’intéressement et la participation. On peut également douter du caractère opérationnel du dispositif proposé, étant donné qu’il prévoit une simple possibilité d’instituer le comité.
M. Pierre Hériaud a rappelé que nombre d’entreprises disposent déjà d’un tel comité et qu’il n’est donc pas nécessaire de légiférer plus avant en la matière.
Suivant l’avis défavorable de votre Rapporteur, votre Commission a rejeté cet amendement.
Moderniser l’épargne salariale
Étalement de l’imposition des sommes transférées d’un compte épargne temps sur un PERCO ou un PEE
Le compte épargne temps (CET) peut être alimenté en temps ou en argent. Lorsque l’alimentation du CET se fait en temps, il peut être abondé, à l’initiative du salarié, dans les conditions et limites définies par l’accord collectif par les jours de congés payés, à l’exception des quatre premières semaines, les repos compensateurs, les jours de repos accordés à l’occasion de la RTT, ou les heures effectuées au-delà de la durée prévue par une convention de forfait. La convention ou l’accord collectif peut prévoir un abondement des droits, soit par l’employeur, soit par le salarié. L’accord peut ainsi prévoir que le salarié peut affecter les augmentations et les compléments de salaire au CET. Il peut s’agir des primes et indemnités conventionnelles, de tout ou partie des primes d'intéressement attribuées dans le cadre d'un accord d'intéressement, et à l'issue de leur période d'indisponibilité, de tout ou partie des sommes issues de la réserve spéciale de participation ou d'un PEE.
Le CET peut être utilisé pour compléter la rémunération du salarié, alimenter un PEE ou un PERCO, contribuer au financement de prestations de retraite à caractère collectif et obligatoire, procéder à des rachats des périodes d’études auprès du régime général d’assurance vieillesse et indemniser en tout ou partie des congés non rémunérés, une période de formation en dehors du temps de travail, un passage à temps partiel ou une cessation progressive ou totale d’activité.
L'article 11 du présent projet de loi propose que les droits inscrits à un CET et qui sont utilisés pour alimenter un PERCO ne soient pas pris en compte pour l'appréciation du plafond global de versements des salariés sur les plans d'épargne d'entreprise auxquels ils participent. Les versements annuels d'un salarié sur ses plans d'épargne d'entreprise ne peuvent en effet excéder un quart de sa rémunération annuelle ou de son revenu professionnel imposé à l'impôt sur le revenu au titre de l'année précédente. L'article 11 propose également que les droits inscrits sur un CET qui servent à alimenter un plan d'épargne d'entreprise ne soient pas retenus pour l'appréciation du plafond de versements, à la condition que ces droits servent à l'acquisition de titres de l'entreprise ou d'une entreprise qui lui est liée ou à l'acquisition de parts de FCPE dont plus d’un tiers de l’actif est constitué de titres de l’entreprise (ou d’une entreprise qui lui est liée) ou de sicav ayant pour objet la gestion d’un portefeuille de valeurs mobilières émises par l’entreprise.
Le I de ce présent article propose, quant à lui, de créer un régime fiscal favorable pour faciliter ces transferts d'un CET vers un PERCO ou un PEE.
Les droits issus du CET pourraient ainsi, pour l’imposition des revenus, sur demande expresse du bénéficiaire, être répartis par parts égales sur l'année au cours de laquelle le contribuable en a disposé et sur les trois années suivantes. Ainsi, la charge de l'impôt sur le revenu serait atténuée, en application du I de l’article 163 A du code général des impôts, dans sa rédaction issue du présent article.
Les sommes inscrites au crédit d’un CET (sauf celles issues de l’intéressement) ne sont en effet pas imposées l’année de leur inscription mais imposées comme un salaire l’année de leur versement aux salariés, à l’exception des sommes issues de l’épargne salariale qui sont exonérées d’impôt sur le revenu (participation, abondements de l’employeur à un PEE et intéressement issus d’un PEE et bloquées 5 ans).
Par ailleurs, lorsque la convention ou l'accord collectif prévoit que tout ou partie des droits affectés sur le CET sont utilisés pour effectuer des versements sur un ou plusieurs PERCO, ceux de ces droits qui correspondent à un abondement en temps ou en argent de l'employeur bénéficient des exonérations fiscales et sociales applicables à ce dispositif. Aussi, les sommes qui, à l'initiative des salariés, sont transférées du CET vers le PERCO et qui correspondent à un abondement en temps ou en argent de l'employeur au CET, sont assimilées à un abondement direct de l'employeur au PERCO et sont exonérées de cotisations de sécurité sociale et d'impôt sur le revenu dans la limite de 4.600 euros.
Le présent article complète l’article 163 A du code général des impôts dont le régime d’étalement sur quatre années vise actuellement les seules indemnités de départ volontaire à la retraite ou de mise à la retraite.
L’exercice de cette option ne serait pas compatible avec l’application du dispositif dit « du quotient » pour les revenus exceptionnels permettant de limiter l’impôt dû, mais ne permettant pas d’étaler son paiement (le revenu exceptionnel est divisé par quatre, ce quart est ajouté aux revenus « habituels » ; l’impôt dû se trouve donc être majoré et cette majoration est ensuite multipliée par quatre et ajoutée à l’impôt dû au titre des revenus « habituels »).
Le II de l’article 163 A du code général des impôts dans sa rédaction issue du présent article prévoirait que, en cas de transfert du domicile fiscal à l’étranger, l’impôt restant dû sur les sommes transférées doit être acquitté (1 de l’article 167 du code général des impôts) et que, en cas de décès du contribuable, l’impôt restant dû sur les sommes transférées doit être acquitté (1 de l’article 204 du même code). De telles précisions sont déjà prévues pour les indemnités de départ à la retraite bénéficiant du régime d’étalement. Elles doivent également être prévues pour les sommes transférées d’un CET vers un PEE ou un PERCO.
Le II du présent article prévoit que ces dispositions seraient applicables aux droits inscrits sur un CET transférés sur un PERCO ou un PEE dans les conditions définies à l’article 11 à compter du 1er janvier 2006.
Le coût du présent article n’a pu être estimé.
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Votre Commission a examiné un amendement de M. Jean-Pierre Balligand, visant à supprimer cet article. En effet, celui-ci prévoit que les droits constitués sur un plan épargne-temps sont transférés vers un plan d’épargne pour la retraite collectif. Ainsi, les salariés pourraient dépasser l’horaire légal de 35 heures, ne pas être rémunérés pour cela en raison de l’affectation dans un compte épargne-temps et être ainsi incités à placer ces sommes pour leur retraite. Votre Rapporteur a rappelé le désaccord de fonds existant sur la pertinence du compte épargne temps, et s’est opposé, pour ce motif, à l’amendement.
L’amendement a été rejeté.
Votre Commission a ensuite adopté l’article 12, sans modification.
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DÉVELOPPER L’ACTIONNARIAT DES SALARIÉS
Améliorer la participation des salariés au capital de l’entreprise
Votre Commission a examiné un amendement de M. Éric Woerth, visant à déplafonner le nombre de mandats d’administrateurs de sociétés anonymes que peut cumuler un même administrateur, actuellement fixé à 5.
Votre Rapporteur a jugé que ce texte était sans relation avec le projet, auquel il convient de conserver une cohérence.
L’amendement a été retiré.
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Placement des actions gratuites sur un PEE et création d’une déduction fiscale au titre d’émissions d’actions s’adressant à l’ensemble des salariés
L’article 16 poursuit plusieurs objets. En premier lieu, il modifie l’article L. 443-5 du code du travail relatif aux augmentations de capital réservées aux salariés (et mandataires sociaux dans les entreprises de moins de 100 salariés) adhérents d’un plan d’épargne d’entreprise. Ces augmentations de capital font l’objet d’un régime fiscal avantageux : en effet, les titres de l’entreprise peuvent être vendus aux salariés avec une décote maximale de 20% ou de 30% si les titres sont indisponibles pendant dix ans par rapport à leur valeur sur le marché. L’avantage retiré par le salarié de cette décote n’est pas soumis à l’impôt sur le revenu. Pour l’entreprise, les sommes sont exonérées de cotisations sociales et de taxes et participations assises sur les salaires. Ce dispositif s’adresse aux entreprises cotées ou non cotées. En substitution totale ou partielle au rabais de 20%, des actions gratuites peuvent être données aux adhérents du PEE.
Par ailleurs, l’assemblée générale qui décide de l’augmentation du capital réservée aux adhérents du PEE peut également prévoir l’attribution d’actions gratuites, indépendamment des opérations d’augmentation de capital réservées aux adhérents du PEE. La contre valeur de ces actions s’impute alors sur le plafond de l’abondement de l’employeur au PEE (4.140 euros).
I. Il est proposé au A du I du présent article d’étendre ces dispositions aux titres cédés aux adhérents du PEE. Ces titres seraient donnés par l’entreprise (il n’y aurait donc pas augmentation de capital) suite au rachat par une entreprise de ses propres titres, il pourrait également s’agir de titres que la société détient en autocontrôle, pour les revendre avec une décote à ses adhérents du PEE. Le total des titres ainsi cédés aux adhérents ne pourrait excéder 10% du total de ceux que l’entreprise a émis. Ainsi, le régime fiscal favorable s’appliquerait aux cessions de titres, la société n’ayant pas à supporter les inconvénients d’une augmentation de capital : dilution du capital, perte de contrôle...
En second lieu (B du I), le présent article propose de permettre de verser des actions attribuées dans le cadre du dispositif d’attribution d’actions gratuites sur un PEE, ce qui est novateur puisque jusqu’à présent, seules des sommes liquides pouvaient être versées sur un tel plan. L’attribution d’actions gratuites devrait concerner l’ensemble des salariés de l’entreprise. Ces titres seraient versés à l’issue de la période d’acquisition et bloqués ensuite pendant 5 ans. Les versements de telles actions gratuites seraient limités à 7,5% du plafond annuel de la sécurité sociale (soit 2.330 euros par salarié en 2006, ce plafond ne s’imputant pas sur le plafond de l’abondement de l’entreprise au PEE). Au vu de l’avantage important que constituerait cette mesure, la fixation d’un tel plafond apparaît opportune.
Cette attribution devrait faire l’objet d’un accord d’entreprise ou, à défaut d’accord, d’une décision du conseil d’administration ou du directoire. La répartition des actions entre les salariés adhérents du PEE pourrait être uniforme, proportionnelle à la durée de présence dans l’entreprise ou proportionnelle au salaire, ce qui constitue des critères classiques en matière d’épargne salariale. Le régime fiscal des actions gratuites ainsi versées sur un PEE serait extrêmement incitatif : exonération de la plus value d’acquisition réalisée lors de l’acquisition, exonération de la plus value de cession au moment de la vente. Ce régime fiscal serait identique à celui applicable aux actions souscrites ou achetées suite à une levée d’option et bloquées pendant cinq ans sur le PEE, cependant, dans le cas des levées d’option, le titre est acheté et n’est pas attribué gratuitement). Par ailleurs, les revenus tirés de la détention des actions seraient également exonérés d’impôt sur le revenu s’ils sont bloqués 5 ans sur le PEE.
II. Une nouvelle possibilité de déduction fiscale, extra comptable, est mise en place pour les entreprises qui émettent des actions, soit en application d’une attribution d’actions gratuites à émettre ou de la levée d’options de souscriptions d’actions, soit en application d’une augmentation de capital réservée aux adhérents du PEE : les entreprises pourraient déduire la différence entre la valeur des titres à la date de l’augmentation de capital et le prix de souscription par les bénéficiaires de ces dispositifs. Cette déduction serait soumise à plusieurs conditions : les stock options et les actions gratuites devraient bénéficier à tous les salariés et être attribuées de façon uniforme, proportionnellement à la durée de présence dans l’entreprise ou proportionnellement au salaire.
Les A, B et C du II complètent à cet effet le I de l’article 217 quinquies du code général des impôts. Dans les entreprises ayant accordé des options donnant droit à la souscription d'actions, les sociétés peuvent déduire les charges exposées du fait de la levée d’options de souscription ou d’achat d’actions (rémunération des intermédiaires, impôt sur les opérations de bourse, frais d’inscription au registre des transferts). Cette déduction, qui découle des principes généraux en matière de détermination du bénéfice, serait complétée par la mention des frais liés aux opérations d’attribution d’actions gratuites.
Par ailleurs, le I de l’article 217 quinquies dispose en son second alinéa que les moins values résultant de la différence entre le prix d’achat des actions (actions existantes) et leur valeur d’origine est déductible, conformément aux dispositions de l’article 39 duodecies du code général des impôts relatif au régime des plus et moins values à court terme et à long terme.
Les cessions d’actions réservées aux adhérents d’un PEE bénéficieront également de la possibilité de déduction des moins values découlant de l’article 39 duodecies, bien qu’elles ne soient pas citées dans le I de l’article 217 quinquies.
Le D du II décrit le nouveau mécanisme de déductions et renvoie à un décret les modalités d’application du dispositif. Votre Rapporteur souligne le caractère positif de ce mécanisme et notamment le fait qu’il profite à l’ensemble des salariés selon des critères égalitaires.
Le coût de ces dispositions n’a pas pu être chiffré.
III. Les dispositions du présent article seraient applicables aux cessions d’actions et émissions d’actions autorisées par les assemblées générales extraordinaires réunies à compter du 1er janvier 2006. Elles pourraient donc bénéficier à des émissions d’actions déjà autorisées, sous réserve qu’elles respectent les conditions d’attribution à l’ensemble des salariés.
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Votre Commission a adopté cet article sans modification.
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Participation des FCPE aux pactes d’actionnaires
Le présent article propose de permettre aux fonds communs de placement d’entreprise (FCPE) constitués dans les entreprises dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé d'être parties à un pacte d'actionnaires « afin de favoriser la transmission de l'entreprise, la stabilité de l'actionnariat ou la liquidité du FCPE ». Cette possibilité serait réservée aux entreprises dont les titres ne sont pas cotés car ce sont elles qui connaissent des difficultés de liquidités et de cessions des titres. Un FCPE est un fonds collectif destiné à recevoir l’épargne des salariés dans le cadre d’un plan d’épargne salariale ou d’un accord de participation et à l’investir en valeurs mobilières.
La notion de pacte d’actionnaires qu’il est proposé d’introduire dans le code monétaire et financier n’a pas été définie par la loi. Votre Rapporteur s’étonne qu’une notion aussi largement répandue ne soit pas précisée au plan législatif. Il n’a retrouvé dans le code de la construction et de l’habitation qu’une disposition faisant référence à un pacte d’actionnaires dans son article L. 422-2-1 relatif aux sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré : « L'actionnaire de référence peut être constitué d'un groupe de deux ou trois actionnaires, liés entre eux par un pacte emportant les effets prévus à l'article 1134 du code civil […]. Le pacte d'actionnaires est communiqué dès sa conclusion ». Très largement répandu, le pacte d’actionnaires est un outil permettant d’organiser le contrôle de la gestion de la société et le contrôle de la composition de son capital.
Cette mesure tend principalement à faciliter les opérations de reprise d'une entreprise par ses salariés, en complément d'autres investisseurs. Elle permettrait notamment de faciliter les reprises par étapes (en permettant par exemple aux salariés d'être assurés, par le biais du pacte, d'avoir le contrôle de l'entreprise à terme). A l’heure actuelle, les FCPE n'ayant pas la personnalité juridique, ils ne peuvent pas constituer de pacte d'actionnaires. L'autorité des marchés financiers n’avait autorisé, dans sa doctrine, que les pactes par lesquels les actionnaires s'engagent à racheter les actions à la société de gestion du FCPE lorsque des besoins de liquidité apparaissent pour rembourser les porteurs de parts (les salariés) mais un tel cas ne s'est pas présenté.
Le présent article étend donc les capacités de conclusion d’un pacte d'actionnaires par un FCPE tout en encadrant cette nouvelle possibilité car les clauses du pacte ne doivent pas pouvoir affecter les droits reconnus aux salariés par la réglementation du travail, notamment les droits de retirer des sommes investies sur le PEE, dès lors que la durée de blocage est écoulée ou en cas de déblocage anticipé. Un décret précisera les conditions d'application de cet article. Il convient de souligner que l'encadrement posé aux termes duquel le pacte d'actionnaires devra « favoriser la transmission de l'entreprise, la stabilité de l'actionnariat ou la liquidité du fonds » demeure assez vague : on peut s'interroger sur sa portée, voire sur les risques d’interprétation.
Les règlements des FCPE devant être agréés par l’AMF, le présent article impliquerait que le règlement de cette dernière soit modifié pour tenir compte du nécessaire contrôle des conditions posées par le présent article.
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Votre Commission a adopté cet article sans modification.
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Institution d’un fonds de reprise de l’entreprise
Les articles 18 et 19 sont complémentaires. Ils visent à favoriser les opérations de reprise auxquelles participeraient les salariés adhérents d’un PEE par le biais de leur épargne salariale et certains salariés ayant vocation à être davantage impliqués dans la reprise, par le biais de la constitution d’une société de reprise bénéficiant d’un régime fiscal favorable.
I. Le présent article, dont la rédaction mériterait d’être améliorée, propose en premier lieu de permettre de créer, au sein d’un PEE, un FCPE dédié à la réception des sommes que les salariés épargnent en vue de racheter des titres de leur entreprise dans le cadre d’une opération de rachat des titres de leur entreprise. Le fonds spécifique devrait être créé en vertu d’un accord avec le personnel.
Il est proposé (nouvel article L. 443-3-1 du code du travail) que l’opération de rachat soit réservée aux salariés, ce qui exclut les mandataires sociaux adhérents du PEE. Par ailleurs, l’opération de rachat des titres ne serait pas réellement réservée aux salariés, puisque le but est bien que ceux-ci participent au rachat de leur entreprise avec l’aide, d’une part de la société de reprise créée notamment par eux dans les conditions prévues à l’article 19 et, d’autre part, des investisseurs extérieurs.
Ce FCPE ne serait pas soumis aux obligations de liquidité normalement applicables aux fonds pour protéger les salariés.
Les sommes placées sur le FCPE ne seraient pas bloquées pendant cinq années : il est proposé que le délai de blocage applicable à la participation (article L. 442-7 du code du travail) et celui applicable aux sommes versées sur un PEE (article L. 443-6) ne lui soient pas applicables. Par conséquent les modalités de déblocage anticipé ne seraient pas, elles non plus, applicables et les salariés seraient libres de retirer les sommes placées sur ce FCPE dédié au rachat des titres de la société.
Le conseil de surveillance du FCPE serait composé de membres désignés par les salariés porteurs de parts (et non pour moitié composé de salariés porteurs de parts et pour moitié de représentants de l’entreprise).
Au moins 15 salariés, ou 30 % des effectifs si l’entreprise compte moins de 50 salariés, devraient être impliqués dans l’opération de rachat par le biais du FCPE et un accord conclu avec le personnel devrait préciser l’identité des salariés impliqués, le contrôle final de l’entreprise reprise et le terme de l’opération.
Il est proposé en second lieu (a du 3° du I du présent article) de permettre aux salariés de détenir en direct sur le PEE des actions émises par une société de reprise qui serait créée dans les conditions prévues par l’article 19 pour racheter leur entreprise. Les titres détenus dans ce cadre seraient soumis aux règles habituelles applicables aux PEE, notamment celle du blocage pendant une période de cinq ans.
Une incertitude subsiste sur la possibilité de créer dans le cadre du PEE un autre FCPE spécifique contenant, quant à lui, des titres de la société de reprise, et dont l’actif pourrait n’être composé que de titres de la société de reprise. Il semble que l’intention du Gouvernement soit plutôt que le FCPE contenant les sommes dédiées au rachat des titres de la société rachetée puisse également réunir des titres de la société de rachat.
Le II du présent article contient une simple disposition de coordination.
Les dispositions du présent article seraient applicables aux opérations intervenues à compter de l’entrée en vigueur du présent projet de loi.
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Votre Commission a adopté cet article sans modification.
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Création d’un crédit d’impôt au titre de la création d’une société de reprise
L’article 19 institue un régime fiscal favorable pour les entreprises constituées pour le rachat d’une société en tout ou partie et dont le capital est détenu par les salariés de la société rachetée (II du présent article).
Ces dispositions visent les cas dans lesquels la reprise ne permet pas d’atteindre le seuil de l’intégration fiscale, c'est-à-dire la détention de 95 % des titres de la société reprise. En effet, l’entreprise rachetée doit alors acquitter un impôt sur les sociétés et la société qui a racheté sera en déficit du fait des charges d’emprunt supportées pour le rachat. Il est donc proposé d’atténuer la charge des intérêts supportés par la société de rachat par un crédit d’impôt dont l’excédent, ne pouvant s’imputer sur l’impôt dû, est restitué à l’entreprise.
Ce mécanisme de rachat différerait sensiblement de l’ancien RES (rachat d’une entreprise par ses salariés) dans lequel les salariés qui souscrivaient au capital d’une société créée pour racheter leur entreprise pouvaient déduire de leur rémunération, pendant six ans, les intérêts des emprunts contractés pour financer leur souscription (dans la limite de 91.500 euros) ou bénéficier d’une réduction d’impôt égale à 25 % de leurs souscriptions effectuées dans les trois ans suivant la création et retenus dans la limite de 6.000 euros pour un célibataire. Les titres de la société nouvelle devaient être conservés pendant cinq ans. La société nouvelle devait détenir, dans les deux mois, 50 % des droits de vote de la société rachetée et les droits de vote de la société nouvelle devaient être détenus par plus du tiers des salariés de la société rachetée.
Dans le présent dispositif, c’est la société de rachat qui bénéficie du crédit d’impôt et non les salariés et les conditions posées en termes de contrôle des deux sociétés sont moins strictes et plus réalisables.
La société de reprise bénéficierait d’un crédit d’impôt égal à l’impôt sur les sociétés dû par la société rachetée, au prorata des droits des salariés de la société rachetée dans les droits sociaux de la société créée pour le rachat et dans la limite des intérêts supportés par cette dernière au titre des prêts souscrits pour le rachat.
Les droits de vote de la société de reprise devraient être détenus par au moins 15 personnes qui étaient salariées de la société rachetée lors du rachat ou 30 % des salariés, si son effectif était inférieur à 50 salariés.
L’opération de reprise devrait avoir fait l’objet d’un accord avec le personnel précisant l’identité des salariés impliqués, le contrôle final de l’entreprise et le terme de l’opération.
Un décret préciserait les obligations déclaratives des sociétés concernées pour bénéficier de ce nouveau crédit d’impôt.
Le B du II du présent article précise dans un nouvel article 220 R du code général des impôts les modalités d’imputation du crédit d’impôt sur l’impôt sur les sociétés dû par la société créée pour le rachat et définirait les intérêts d’emprunt servant de plafond au crédit d’impôt.
Le C du II du présent article prévoirait les modalités d’imputation du crédit d’impôt pour les sociétés mères dans le cas où la société constituée pour le rachat est une filiale : dans ce cas, de manière classique, la société mère est substituée aux sociétés filles pour le paiement de l’impôt et donc pour le bénéfice du crédit d’impôt.
Par ailleurs, les droits d’enregistrement sur les acquisitions de droits sociaux en vue du rachat par la société créée dans les conditions prévues au présent article ne seraient pas exigibles (III du présent article). Les actes constatant les apports mobiliers effectués dans les conditions prévues au présent article seraient enregistrés gratuitement (IV du présent article).
Par voie de conséquence, le I du présent article propose que le régime fiscal applicable aux stock options ne soit pas remis en cause en cas d’échange d’actions, de fusion, de scission, de division ou de regroupement ou de l’apport à une société de reprise créée dans les conditions prévues au présent article. Le régime fiscal continuerait à s’appliquer aux actions reçues en échange. Le salarié qui apporterait ses titres à la société de reprise (et recevrait en échange ses titres) verrait l’obligation de portage continuer à s’appliquer sur les nouveaux titres. Sans une telle disposition, l’apport des titres sous option vaudrait cession.
Le coût du présent dispositif n’a pas pu être évalué. Il serait applicable aux sociétés constituées à compter de l’entrée en vigueur du présent projet de loi.
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Votre Commission a adopté cet article sans modification.
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DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉPARGNE ET AU FINANCEMENT
DE L’ÉCONOMIE
Article 37
(Article L. 533-4-1 (nouveau) du code monétaire et financier et article 132-27 (nouveau) du code des assurances)
Obligations en matière de publicité des producteurs et distributeurs de produits financiers
I. Cet article introduit un nouvel article L. 533-4-1 dans le code monétaire et financier, lequel s’inspire d’une disposition de la directive « marchés d’instruments financiers » pour exiger que tout document à caractère publicitaire diffusé par un prestataire de services d’investissement présente un contenu « exact, clair et non trompeur ».
L’article impose aussi la rédaction de conventions entre producteurs et commercialisateurs précisant la responsabilité de chacun quant au contenu des documents à caractère publicitaire.
Votre Rapporteur estime que l’adoption de cet article constituerait un début de transposition partiel de la directive et qu’il serait préférable d’attendre l’ensemble des dispositions de transposition, ainsi que celles de la directive portant « mesures d’exécution » afin de limiter les modifications successives du droit applicable. De plus, imposer des conventions non prévues par les deux directives suscite quelque doute ; aussi cette question devrait-elle plutôt être examinée dans le cadre de la très prochaine transposition.
II. L’article, dans sa deuxième partie, procède de la même façon en ce qui concerne la publicité sur un contrat d’assurance individuel comportant des valeurs de rachat, un contrat de capitalisation ou un contrat de groupe sur la vie. Votre Rapporteur estime utile d’adopter le principe selon lequel le document à caractère publicitaire doit présenter un contenu « exact, clair et non trompeur », dans la mesure où cette formulation suffisamment précise n’est pas présente dans les précédents textes adoptés.
Il ne retiendra pas cependant l’obligation d’élaboration des conventions établissant la responsabilité respective entre producteur et intermédiaire, jugeant préférable de laisser cet aspect à l’organisation de la profession et préférant ne pas ajouter de contraintes nouvelles par voie législative aux dispositions qui viennent de régir le secteur. En effet, des conventions existent généralement dans le cas d’un réseau de distribution. Pour les autres cas, elles ne semblent pas répondre à une nécessité.
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Votre Commission a examiné deux amendements de votre Rapporteur, visant respectivement à supprimer les alinéas 1 à 7 et les alinéas 11 à 15 de cet article.
Votre Rapporteur a rappelé que les alinéas 1 à 7 de cet article concernent la commercialisation d’instruments financiers. Ils constituent un début de transposition, trop partiel et réducteur, de la directive « marchés d’instruments financiers » de 2004. Il serait souhaitable de prendre en considération l’ensemble des dispositions de transposition, ainsi que celles de la directive de 2006 portant « mesures d’exécution », afin de limiter les modifications successives du droit à très brève échéance, puisque ces deux textes doivent entrer en vigueur à la fin de l’année 2007. De plus, imposer des conventions entre producteurs et distributeurs non prévues par les deux directives conduit à ajouter des normes supplémentaires à un ensemble européen déjà ambitieux. Dans la pratique, des conventions rédigées par les entreprises bancaires, par exemple, lient déjà tous les producteurs et distributeurs de services d’investissement lorsqu’ils travaillent en réseau.
Les alinéas 11 à 15 de cet article concernent la commercialisation des produits d’assurance. Ils ont pour effet d’ajouter des normes supplémentaires à la transposition qui vient d’être faite, par la loi du 15 décembre 2005, de la directive de 2002 sur l’intermédiation en assurances. Créer une obligation de rédiger des conventions entre producteurs et intermédiaires, portant sur l’information et la publicité, ne répond pas à la réalité de la relation entre l’entreprise d’assurance et son agent ou intermédiaire, d’une part, ni aux relations entre l’entreprise d’assurance et le courtier indépendant, d’autre part.
En revanche, les alinéas 8 à 10 apportent une protection des épargnants souscripteurs d’un produit d’assurance, protection inspirée de la directive « MIF », qui est ici utile, car elle s’adapte à la réalité des produits commercialisés par les assureurs, qui englobent des purs produits financiers ou des assurances-vie à support de produits financiers. Cette obligation pourrait d’ailleurs utilement être étendue au domaine de la mutualité.
Votre Commission a adopté ces amendements (n° 44 et 45) et l’article 37 ainsi modifié.
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(Articles L. 533-4, article L. 533-4-2 (nouveau) du code monétaire et financier)
Devoir de conseil des prestataires de services d’investissement
Cet article opère une transposition très partielle de la directive « MIF » : il s’agit en effet de transposer les paragraphes 4 à 6 de l’article 19 relatif aux « règles de conduite pour la fourniture de services d’investissements à des clients ».
En outre, le septième alinéa est contraire à la directive « mesures d’exécution » qui a été publiée le 2 septembre 2006, donc après le dépôt du projet de loi. Ce dernier prévoit un refus de vente lorsque le produit est inadapté au client alors que l’article 35-5 de la directive se limite à indiquer que le distributeur « s’abstient de recommander » le produit.
Votre Rapporteur juge préférable d’éviter de morceler la tâche de transposition en adoptant dès aujourd’hui une disposition qui devra être suivie par un corps législatif et réglementaire très important dans quelques semaines ou quelque mois, au plus tard.
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Votre Commission a examiné un amendement de votre Rapporteur, visant à supprimer cet article. Votre Rapporteur a souligné que l’article opère une transposition très partielle de certains paragraphes de l’article 19 de la directive « MIF ». Ces paragraphes imposent au prestataire fournissant des produits d’investissement de se procurer certaines informations sur le client : sa situation financière et ses objectifs d’investissement, ses connaissances et son expérience en matière d’investissement, notamment. Ayant connaissance de ces éléments, le conseiller doit recommander au client les services et instruments financiers qui lui conviennent.
Ces éléments constitutifs du devoir de conseil sont suivis par d’autres, non repris par le présent projet de loi ; ils sont en outre complétés par les dispositions de la directive du 10 août 2006, portant mesures d’exécution.
Bien que ces éléments constituent un apport utile et nécessaire à la protection du client, alors que, comme le souligne le rapport de M. Jacques Delmas-Marsalet, les produits financiers s’avèrent de plus en plus complexes et font porter le risque sur l’épargnant et non plus sur l’établissement fournisseur du produit, il semble cependant préférable de procéder de façon globale à la transposition des deux directives. Une transposition aussi partielle de textes très complets et ambitieux risquerait d’entraîner des contradictions entre les dispositions issues des différents textes de transposition et nuirait à la clarté de la démarche. Elle entraînerait aussi les professions concernées, qui attendent les modalités de la transposition depuis plus de deux ans, dans une suite d’adaptations complexes à mettre en œuvre, impliquant notamment une formation des conseillers de clientèle chargés de la commercialisation. Le processus de transposition d’une évolution aussi importante dans les pratiques de commercialisation doit être clair, global et cohérent ; il est dommage d’y procéder de façon morcelée, à travers un texte de loi dont les visées sont autres.
Votre Commission a adopté cet amendement (n° 46) et l’article 38 a ainsi été supprimé.
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(Articles L. 132-27-1 (nouveau) et article L. 520-1 du code des assurances)
Devoir de conseil en matière d’assurance-vie
Cet article étend au domaine des assurances les dispositions décrites au chapitre III du présent rapport, applicables à la prestation de services d’investissement.
Il réaffirme le devoir de conseil qui incombe au professionnel en cas de prestation de service d’investissement, mais également lorsqu’il propose un service d’assurance–vie. Le code des assurances comporte un devoir de conseil au client, impliquant la vente de produits adaptés aux exigences et aux besoins du souscripteur (article L. 520-1). Cependant ce devoir de conseil s’applique à l’intermédiaire de l’entreprise d’assurance, c'est-à-dire l’agent général ou le courtier (soit 85 % de la vente de contrats) mais ne s’applique pas à la vente en direct par l’entreprise d’assurances elle-même (15 % de la vente). L’extension prévue par cet article soumettra donc toutes les ventes au devoir de conseil.
La présente disposition calquée de l’article 38 pourrait sembler surabondante dans la mesure où la commercialisation d’un produit d’assurance par un assureur répond à une logique différente de celle du placement financier. Il est vrai que le besoin auquel répond la souscription d’un contrat d’assurance individuel ou un contrat de capitalisation est différent, revêtant une dimension familiale ou patrimoniale. En outre, le souscripteur y bénéficie de dispositions protectrices comme celle de la faculté de renonciation pendant un délai de trente jours.
Toutefois, il doit être tenu compte de l’évolution des contrats d’assurance aujourd’hui proposés aux clients : lorsqu’il s’agit de placements d’assurance sur la vie, le contrat comporte très souvent un placement en purs produits financiers ou en unités de compte. Le souscripteur se trouve alors face au même risque que le client achetant une part dans un OPCVM. Les assureurs commercialisent également des produits d’investissement financier.
L’article conduit donc à insérer une nouvelle disposition à la suite de l’article L. 132-27 prévoyant que l’entreprise d’assurance ou de capitalisation indique les exigences et besoins exprimés par le client, et les raisons pour lesquelles un produit déterminé a été conseillé. Cela suppose que soient recueillies des informations auprès du client (éventuellement au moyen d’un questionnaire) sur sa situation financière et ses objectifs de placement, ainsi que de tenir compte « des connaissances du client et de son expérience en la matière ».
Cet enrichissement du conseil au client s’inspire de dispositions de la directive du 21 avril 2004 concernant les marchés d’instruments financiers, dite directive « MIF ». Celle-ci devra faire l’objet d’une transposition en 2007 mais ne concernera ni les assureurs ni les produits d’assurance.
Les personnes chargées de commercialiser un produit d’assurances devront intégrer ces éléments comme faisant partie du devoir de conseil, éléments qui s’ajouteront aux dispositions de la directive sur l’intermédiation en assurance du 9 décembre 2002, transposée en droit interne par la loi du 15 décembre 2005 n° 2005-1564 et son décret d’application du 30 août 2006.
L’adoption de dispositions supplémentaires quelques mois après une réforme substantielle peut soulever des doutes et l’on peut regretter que la loi du 15 décembre 2005 n’ait pas intégré ces dispositions. Cependant, les nombreux cas de souscripteurs d’assurances-vie se trouvant sans recours devant la mauvaise performance des fonds investis et l’appauvrissement qui en résulte plaident en faveur d’un devoir d’information et de conseil bien défini et obligeant tous les vendeurs.
L’alinéa 5 de l’article prévoit notamment une obligation de mise en garde du client lorsque celui-ci ne fournit pas les informations nécessaires, disposition inspirée de l’article 19,5°, de la directive « MIF ».
On notera qu’au contraire des propositions du rapport de M. Jacques Delmas-Marsalet, l’article ne permet pas à l’assureur de refuser de vendre au client un produit risqué, même si ce produit ne correspond visiblement pas à l’expérience et aux besoins de ce client. La prise de risque est donc toujours possible.
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Votre Commission a adopté cet article, sans modification.
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(Articles L. 611-3-1 (nouveau), article L. 614-2, article L. 511-29, article L. 613-1
et article L. 621-1 du code monétaire et financier et article 414-1 (nouveau),
article L. 310-12 et article L. 310-9 du code des assurances)
Instauration de codes de bonne conduite professionnels
Cet article concerne tant la commercialisation des instruments financiers ou des produits d’épargne que celle des produits d’assurance.
L’article donne une suite aux préconisations du rapport Delmas-Marsalet proposant que des règles de conduite opérationnelles, inspirées des meilleures pratiques des professions, soient insérées dans des codes de bonne conduite professionnels, approuvés par les pouvoirs publics.
Ainsi est il créé un article L. 611-3-1 prévoyant que les codes de bonne conduite rédigés par les organisations représentatives des professionnels pourront être homologués par le ministre chargé de l’économie, à la demande de celles-ci. Le comité consultatif de la législation et de la réglementation financières (CCLRF) devra donner par arrêté un avis conforme pour cette homologation.
Des codes de bonne conduite ont déjà été rédigés pour les activités financières : ainsi l’Autorité des marchés financiers (AMF), la Commission bancaire et l’Association française de gestion ont-elles mis au point des codes et engagé les entreprises à s’y conformer ; toutefois l’effectivité de leur mise en œuvre peut être améliorée. Cependant, tel n’est pas le cas du secteur de l’assurance qui n’a pas encore rédigé de tels codes. Dans ce secteur, il existe des engagements déontologiques, mais consacrés à des questions particulières, sans traiter de façon générale des modalités de commercialisation des produits.
Si l’élaboration des codes ne constitue pas une obligation selon le droit communautaire, elle sera néanmoins indispensable, en pratique sinon juridiquement, en prévision de l’entrée en vigueur de la directive « MIF » déjà évoquée. Dans ce cadre et même en anticipant les obligations nombreuses prévues par la directive, l’élaboration concertée des codes par les professions permettra d’éviter de mauvaises pratiques concurrentielles.
Cet article complète l’article L. 511-29 du code monétaire et financier en élargissant le rôle de l’Association française des établissements de crédit et des entreprises d’investissement (AFECEI) pour lui conférer un rôle en matière d’élaboration des codes de bonne conduite.
Prenant en considération le fait que certaines professions ne sont pas actuellement représentées par des associations, l’article prévoit qu’un code de bonne conduite homologué pourra être étendu à une ou plusieurs autres catégories professionnelles, après un simple avis du CCLRF et de l’AFECEI ou de l’association représentative des entreprises d’assurance mise en place par le projet.
En effet, cet article insère dans le code des assurances un nouvel article L. 414-1 prévoyant la création par les professionnels de la mutualité de cette association, ayant notamment pour objet l’élaboration de codes de bonne conduite applicables à ses membres.
Enfin, cet article insère une référence aux codes de bonne conduite dans les dispositions relatives à la surveillance et au contrôle des établissements de crédit comme d’assurance. C’est ainsi que la Commission bancaire devra veiller à ce que les entreprises qu’elle surveille mettent en œuvre les moyens de se conformer aux codes ; l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles (ACAM) devra en faire de même dans son secteur. L’Autorité des marchés financiers (AMF) n’est pas mentionnée, car elle dispose déjà des pouvoirs nécessaires à ce contrôle.
Cette tâche confiée aux autorités s’accompagne d’un pouvoir de contrôle, d’injonction ou de sanction, lequel n’était pas prévu par la réglementation européenne récente.
En conclusion, cet article constitue un apport très important à la démarche de transparence conduite depuis plusieurs années. Il complète utilement les dispositions des articles 37 et 39 ; par ailleurs il n’impose pas aux entreprises d’assurance de nouvelle modification dans la rédaction des contrats et ne contribue pas à une fluctuation trop rapide du droit. Néanmoins, il engage ces entreprises dans une pratique comportant des obligations déontologiques accrues, par cette réflexion ouverte dès aujourd’hui pour la rédaction des codes de bonne conduite et par la formation des nouvelles générations de conseillers. On soulignera que certaines associations ont déjà entrepris ce travail et sont alors intéressées à sa généralisation.
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Votre Commission a adopté cet article, sans modification.
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(Article L. 341-6 du code monétaire et financier)
Aménagement des règles d’enregistrement des démarcheurs financiers
Cet article modifie la première phrase de l’article L. 341-6 du code monétaire et financier qui concerne l’obligation, pour les organismes ayant recours au démarchage financier, d’enregistrer en qualité de démarcheurs les personnes salariées, employées ou mandataires à qui elles confient des produits financiers.
L’enregistrement des démarcheurs, c'est-à-dire des personnes proposant des produits bancaires et financiers (produits d’investissement financier ou assurance-vie) en dehors des lieux habituels de vente, s’effectue dans un fichier tenu par la Banque de France. Ce fichier, créé à la suite de la loi de sécurité financière du 1er août 2003, répertorie plus de 200.000 personnes morales ou physiques, qui sont titulaires d’une carte de démarchage délivrée par l’organisme mandant. Le fichier est conçu de telle sorte que les mandants (établissements de crédits ou entreprises d’investissement) doivent inscrire leurs mandataires et sous–mandataires dans le répertoire.
Cependant, le décret du 28 septembre 2004 pris en application de la loi précitée a fait l’objet d’une annulation par le Conseil d’État le 16 janvier 2006 du fait de la non-conformité entre le fichier et les dispositions de la loi (L. 341-6), dans la mesure où celle-ci prévoyait que les mandataires sont chargés de l’inscription des mandataires de deuxième niveau.
L’article a pour effet de redonner une base juridique complète au fichier, à la suite de cette décision du Conseil d’État, dans la mesure où la situation du sous–mandataire n’était plus régie par le code. La rédaction proposée conduit à préciser que les sous–mandataires recrutés par les mandataires des organismes ne pourront être directement inscrits dans le fichier : ils devront l’être par l’intermédiaire d’un mandant déjà connu de la Banque de France. En effet, le mandant demeure le responsable final de la commercialisation des produits par ses mandataires et même les sous–mandataires recrutés par ceux-ci.
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Votre Commission a adopté cet article, sans modification.
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(Article L. 132-5, article L. 132-21, article 132-23 du code des assurances)
Aménagements du régime de l’assurance-vie
Cet article concerne le contrat d’assurance sur la vie et le contrat de capitalisation et vise à améliorer le contenu de leurs clauses en faveur de l’assuré ou de son bénéficiaire en cas de décès de l’assuré.
Le I de l’article comporte plusieurs améliorations en faveur des assurés.
Le « A » enrichit l’article L. 132-5 du code des assurances d’un alinéa rendant obligatoire une revalorisation du capital garanti même après le décès de l’assuré pendant toute la période qui s’écoulera jusqu’à la réception par l’assureur des pièces mentionnées au contrat nécessaires au paiement de la prestation, pièces qui doivent être réunies par l’héritier du souscripteur défunt ou le bénéficiaire du contrat. Cette période peut, ainsi que le soulignent les assureurs, durer plusieurs années lorsque le bénéficiaire du contrat ne se fait pas connaître. De telles circonstances tendent cependant à se raréfier avec l’obligation incombant à l’assureur d’adresser chaque année au souscripteur une information comportant la valeur de rachat de son contrat, ce qui laisse une trace, et avec la création en décembre 2005 du fichier AGIRA à l’initiative des assureurs, qui constitue une aide à la recherche des bénéficiaires.
L’instauration d’une rémunération, même minimale et éventuellement réduite après le décès, engage l’assureur à diligenter le versement du capital ou de la rente. Les conditions de cette rémunération doivent être précisées dans le contrat, dans un but de transparence.
Le « B » modifie l’article L. 132-21 du code des assurances et confère plus de transparence au contrat d’assurance-vie, au bénéfice de son souscripteur, en exigeant que les modalités de calcul de la valeur de rachat ou de la valeur de transfert, ou encore de la valeur de réduction figurent dans le contrat même, et non plus dans un règlement général mentionné dans la police et tenu à la disposition du client à sa demande.
Une disposition protectrice des souscripteurs est également prévue, visant à proscrire à l’avenir aux assureurs d’imputer une indemnité de réduction lorsqu’il y a rachat du contrat. Si l’assuré s’est abstenu de verser une ou plusieurs primes, le seul élément de baisse de la garantie réside dans le calcul de la valeur de réduction (calcul de la garantie finale), strictement liée aux primes non versées.
Le « C » confère un caractère impératif à la formulation de l’article L. 132-23 pour conserver sa valeur à un contrat d’assurance-vie ou de capitalisation, même si le client n’a payé aucune des primes prévues. Il convient de préciser qu’avant la loi du 15 décembre 2005, les assureurs imputaient la commission liée au contrat sur la première année du contrat, aussi la valeur de rachat était-elle considérée comme nulle la première année, le client ayant perdu les premières primes versées (il s’agissait des contrats à frais précomptés). La loi de 2005 a fait disparaître ce risque, avec une imputation de la commission et du risque du contrat, à présent limitée à 5 % la première année. La disposition a pour objet de mettre fin aux cas de refus de rachat ou réduction pour les derniers contrats, peu nombreux, où le rachat était impossible lorsque moins de 15 % des primes ont été versées ou pendant les deux premières années du contrat.
La liquidité de ce type de contrats s’en trouve accrue et ils rejoignent le droit commun, selon lequel les versements du client sont libres et celui-ci peut racheter son contrat à tout moment.
Enfin, il est ajouté à cet article une disposition favorable à l’assuré ou à son bénéficiaire en cas de décès, disposition très attendue et de forte portée : la fixation d’un délai maximum d’un mois pour le versement du capital ou de la rente garantis par le contrat. Si ce délai n’était pas respecté, un système de rémunération du capital serait alors imposé. Cette obligation devrait limiter les problèmes rencontrés aujourd’hui très fréquemment par les assurés ou les bénéficiaires se heurtant à la lenteur et l’absence de diligence des assureurs.
Le II prévoit que la disposition relative au délai d’un mois s’appliquera de manière rétroactive aux contrats d’assurance sur la vie en cours à la date de publication de la présente loi. Cela n’impliquera pas une modification des documents contractuels, aussi une mise en œuvre rapide est-elle souhaitable. Les autres dispositions ne s’appliqueront qu’aux contrats nouvellement conclus après l’entrée en vigueur de la loi.
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Votre Commission a adopté cet article, sans modification.
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Votre commission des Finances a ensuite adopté le projet de loi, ainsi modifié.
AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION
Après l’article 6
Amendement n° 43 présenté par M. Alain Joyandet, Rapporteur pour avis :
Insérer l’article suivant :
« I. Le titre IV du livre quatrième du code du travail est complété par un chapitre V ainsi rédigé :
« Chapitre V
Prime de partage des profits
« Art. L. 445-1.- En l’absence d’accord d’intéressement visé à l’article L. 441-1 ou de participation visé à l’article L. 442-5, toute entreprise employant habituellement moins de cinquante salariés peut verser, quelles que soient la nature de son activité et sa forme juridique, une prime de partage des profits à l’ensemble de ses salariés après clôture des comptes d’un exercice.
Le montant de la prime versée à chaque salarié ne peut excéder 1.000 euros et le montant total des primes versées ne peut excéder 15% du bénéfice tel qu’il est retenu pour être imposé à l’impôt sur le revenu ou aux taux de l’impôt sur les sociétés prévus au deuxième alinéa et au b du I de l’article 219 du code général des impôts.
L’effectif de l’entreprise est calculé selon les dispositions de l’article L. 442-1 du code du travail.
Le montant de la prime versée à chaque salarié peut être uniforme, proportionnel à la durée de présence dans l’entreprise au cours de l’exercice ou au salaire perçu dans la limite d’un plafond fixé par décret ou retenir conjointement plusieurs de ces critères.
« Art. L. 445-2.- I. Pour l’entreprise, le montant des primes de partage des profits versées aux salariés en application des dispositions de l’article L. 445-1 est déductible des bases retenues pour l’assiette de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés.
Pour les salariés, les primes perçues sont soumises à l’impôt sur le revenu selon les règles fixées au a du 5 de l’article 158 du code général des impôts.
II.- Les primes versées n’ont pas le caractère de rémunération au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et de l’article L. 741-10 du code rural et ne peuvent se substituer à aucun des éléments de rémunération, au sens des mêmes articles, en vigueur dans l’entreprise ou qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales ou contractuelles. Les primes n’ont pas le caractère d’élément de salaire pour l’application de la législation du travail. »
II. La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. La perte de recettes pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Article 37
Amendement n° 44 présenté par M. Alain Joyandet, Rapporteur pour avis :
Supprimer les alinéas 1 à 7 de cet article.
Amendement n° 45 présenté par M. Alain Joyandet, Rapporteur pour avis :
Supprimer les alinéas 11 à 15 de cet article.
Article 38
Amendement n° 46 présenté par M. Alain Joyandet, Rapporteur pour avis :
Supprimer cet article.
© Assemblée nationale