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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 février 2007.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI n° 3429, autorisant l’approbation d’un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Chypre relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure,
PAR M. JEAN GLAVANY,
Député
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INTRODUCTION 5
I – CHYPRE AUJOURD’HUI : UNE ÎLE DIVISÉE AU SEIN DE L’UNION EUROPÉENNE 7
A – LA QUESTION DE LA RÉUNIFICATION TOUJOURS EN SUSPENS 7
B – LA SITUATION POLITIQUE AU SUD ET AU NORD DE L’ÎLE 11
C – UNE ÉCONOMIE QUI PROFITE DE L’INTÉGRATION DANS L’UNION EUROPÉENNE 11
II – DES RELATIONS FRANCO–CHYPRIOTES CONFIANTES ET ACTIVES … 15
A – DES CONVERGENCES DE VUES ET DES CONTACTS CONSTANTS 15
B – DES RELATIONS ÉCONOMIQUES D’UN VOLUME ENCORE MODESTE 16
C – LA COOPÉRATION CULTURELLE, SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE 17
III – … QU’ILLUSTRE L’ACCORD DE COOPÉRATION EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ SIGNÉ EN 2005 19
A – UN PROJET ANCIEN CONCRÉTISÉ EN 2005 19
B – UNE COOPÉRATION JUSTIFIÉE PAR LA SITUATION STRATÉGIQUE DE CHYPRE 20
C – UN ACCORD CLASSIQUE DONT L’OBJET EST AVANT TOUT OPÉRATIONNEL 27
Mesdames, Messieurs,
L’Assemblée nationale est saisie du projet de loi n° 3429 autorisant l’approbation d’un accord entre le Gouvernement français et celui de la République de Chypre relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure.
Il s’agit là d’un texte classique qui reprend des stipulations habituellement contenues dans ces accords de coopération qui se multiplient, fort heureusement, pour lutter contre une criminalité de plus en plus organisée, multiforme et internationale.
L’intérêt particulier de cet accord réside dans le fait qu’il est signé avec un pays désormais membre de l’Union européenne qui, en outre, est aujourd’hui encore partagé en deux.
On évoquera les relations entre notre pays et la République de Chypre après avoir rappelé quelques éléments essentiels sur la situation politique et économique de cette île. Puis seront examinées les stipulations, qui ne sont guère originales, de cet accord qui vient donner un cadre juridique à une coopération qui a été envisagée depuis plus de dix ans entre les deux pays.
I – CHYPRE AUJOURD’HUI :
UNE ÎLE DIVISÉE AU SEIN DE L’UNION EUROPÉENNE
A – La question de la réunification toujours en suspens
Depuis 1974, l’île de Chypre est partagée en deux, de part et d’autre de la « ligne verte », ou « ligne Attila » pour les Turcs. D’un côté, la République de Chypre, seule à être reconnue par la Communauté internationale, exerce pleinement sa souveraineté sur la partie Sud de l’île ; de l’autre, au Nord, la « République Turque de Chypre du Nord » (« RTCN »), proclamée en 1983, à ce jour uniquement reconnue par la Turquie et occupée par les forces de ce pays.
Selon les statistiques officielles, la population chypriote dans toute l’île s’élevait fin 2005 à 854 000 personnes, dont 77 % de Chypriotes grecs et 10 % de Chypriotes turcs. Les minorités maronite, arménienne et latine constituaient 1 % de la population et les résidents étrangers 13 %. Ces données n’incluent pas la population venue de Turquie qui dépasserait les 100 000 personnes. L’île de Chypre a une superficie de 9 251 km2 dont 3 335 km2 (37,2 %) pour la partie turque et 256 km2 pour les bases souveraines britanniques d’Akrotiri et de Dhekelia (soit 2,8 % de la surface de toute l’île). La zone tampon de l’ONU entre le Nord et le Sud correspond à 2,6 % de la surface de la République de Chypre.
La partie Nord, qui représenterait un peu moins de 200 000 habitants
– Chypriotes turcs et Turcs originaires de Turquie –, échappe de fait à l’autorité du Gouvernement légal de la République de Chypre. Environ 40 000 soldats turcs y sont présents. Depuis 1974, la quasi-totalité des Chypriotes turcs s’y est regroupée. Depuis se sont ajoutés des milliers d’immigrants turcs d’Anatolie, aussi nombreux aujourd’hui que les Chypriotes turcs « de souche ».
2) L’échec d’une solution politique sous l’égide de l’ONU
Dès 1964, avant même la partition, les Nations unies ont envoyé une force d’interposition entre les deux communautés, la FNUCHYP (UNFICYP, en anglais), dont le mandat a d’ailleurs été renouvelé pour six mois le 15 décembre 2006 par le Conseil de sécurité. La situation étant stable, il a été décidé de réduire de 30 % le volume de cette force en juin 2005. Elle compte moins de 1 000 hommes.
L’ONU a cherché, dans le cadre de missions de bons offices, à favoriser des négociations directes et indirectes entre les deux communautés dans la perspective d’un règlement global, qui apparaisse juste et puisse être durable. Elle a encouragé les deux parties à adopter des mesures de conciliation : en 2003, le Nord a ouvert quatre points sur la ligne de démarcation ; on en compte cinq aujourd’hui ; les Chypriotes grecs ont facilité l’accès des Chypriotes turcs originaires de l’île aux structures administratives par la délivrance notamment de documents d’identité.
En décembre 2003, M. Kofi Annan, alors Secrétaire général de l’ONU, a invité les parties à se retrouver pour reprendre les négociations. Il a obtenu leur accord sur des modalités et un calendrier de négociations accordant un rôle important aux Nations unies. Le projet de règlement, très largement élaboré par les Nations unies, a pris la forme d’un plan qualifié de « plan Annan » et qui prévoyait la réunion des deux communautés sous l’égide d’un Etat confédéral, avec un Conseil présidentiel collégial, deux chambres assurant l’équilibre entre Chypriotes grecs et turcs et une Cour suprême. Il a été soumis, le 24 avril 2004, à un double référendum. Si la population du Nord de Chypre a voté en sa faveur à hauteur de 65 %, les Chypriotes du Sud l’ont rejeté massivement pour 76 % d’entre eux.
Les autorités chypriotes grecques et donc la très grande majorité de la population du Sud de l’île ont rejeté ce plan pour de nombreuses raisons, mais notamment parce qu’il ne prévoyait pas, selon elles, une véritable réunification de Chypre en maintenant, par exemple, deux banques centrales. Les Chypriotes grecs contestaient également le fait que seul un nombre limité d’entre eux aurait pu retourner dans le Nord et que la liberté d’établissement dans cette zone ne leur aurait pas été assurée, contrairement aux principes de l’Union européenne. En outre, pour eux, les institutions actuelles de la République de Chypre auraient été remplacées par un Etat qui n’aurait pas été pour autant fédéral, dans lequel aucune décision politique ou administrative n’aurait été possible sans l’accord des dirigeants des deux communautés. En cas de désaccord, il était prévu qu’intervienne une Cour suprême de neuf juges, comprenant trois juges Chypriotes grecs, trois juges Chypriotes turcs et trois juges étrangers dont un Britannique ; cette Cour aurait disposé de larges pouvoirs, exécutifs et législatifs, et, pour les opposants au plan, le risque était que les trois juges étrangers prennent en fait les décisions.
Le vote des Chypriotes turcs en faveur de ce plan a évidemment été présenté par ceux–ci et par la Turquie comme la démonstration d’une bonne volonté pour sortir de l’impasse actuelle. L’argument a notamment été mis en avant dans le processus d’ouverture des négociations d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne.
Le fait est que, faute de vote favorable des deux communautés de l’île, une réunification immédiate était donc impossible alors que l’entrée de la République de Chypre dans l’Union européenne devait avoir lieu le 1er mai 2004. C’est une île encore divisée qui a intégré l’ensemble européen, instaurant une situation inédite pour l’Union qui a toujours fait du règlement des questions de frontières un préalable à l’adhésion. Désormais, des soldats de l’ONU sont présents sur le territoire même de l’Union européenne.
3) L’absence de relance réelle des négociations depuis 2004
A l’issue de sa mission dans la région en juin 2005, le Secrétaire général adjoint des Nations unies, M. Kieran Prendergast, a estimé que le fossé entre les deux parties s’élargissait ; il a jugé que le moment n’était pas propice à la reprise des pourparlers.
Sur le fond, si les deux parties chypriotes ne cessent de se déclarer disposées à reprendre le dialogue, leur approche semble différer.
Les Chypriotes turcs, qui ont voté en faveur du plan Annan, estiment avoir été privés de l’égalité que ce plan devait leur conférer. Ils aspirent à une solution globale rapide, sur la base de ce plan, afin de rejoindre l’Union européenne par la réunification. L’élection, en avril 2005, de M. Mehmet Ali Talat à la tête de la « RTCN » a confirmé ce désir de trouver une solution à la situation actuelle qui ne semble pas satisfaisante pour les dirigeants et la population du Nord de l’île.
Les autorités chypriotes ont, pour leur part, multiplié les mesures ponctuelles au profit de la communauté chypriote turque comme la délivrance de passeports chypriotes, les soins médicaux gratuits, la facilité d’installation d’entreprises mais le Président Papadopoulos, fort du soutien populaire et au pouvoir jusqu’en 2008, conditionnait jusqu’à présent la reprise des discussions à nombre d’amendements au plan du Secrétaire général de l’ONU ; ces amendements ont été adressés à ce dernier mais n’ont jamais été rendus publics. M. Papadopoulos estime que des questions essentielles pour la résolution du problème chypriote – comme la présence de l’armée et des colons turcs ou l’application du traité de garantie de 1960 qui associe Grèce, Turquie et Royaume-Uni – relèvent de la Turquie. Il souhaiterait, dès lors, engager des discussions bilatérales avec ce pays, ce qu’Ankara refuse.
La position chypriote s’appuie sur les résolutions du Conseil de sécurité et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. On pourrait considérer que son adhésion à l’Union européenne donne à la République de Chypre un nouveau levier, important, pour peser sur une Turquie qui aspire à intégrer le club européen. Cependant, on doit observer que Chypre n’abuse pas de cet instrument. Le Président Papadopoulos a pris l’initiative d’une rencontre à Paris, le 28 février 2006, avec le Secrétaire général de l’ONU. Les discussions ont notamment porté sur un processus de discussions au niveau technique entre les parties chypriote grecque, chypriote turque et l’ONU, assorti de mesures de confiance.
Le Secrétaire Général, bien qu’il n’a pas désigné de nouveau représentant spécial pour succéder à M. Alvaro de Soto, a alors fait savoir à plusieurs reprises qu’il pourrait reprendre sa mission s’il constatait au préalable une volonté réelle des parties d’aboutir à un règlement. Encouragé en ce sens par les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, il a dépêché à nouveau sur place M. Ibrahim Gambari, Secrétaire général adjoint des Nations unies aux affaires politiques, à Ankara, Athènes et Nicosie du 3 au 9 juillet 2006 pour une nouvelle mission d’évaluation. Cette tournée visait aussi à montrer que les Nations unies ne se satisfaisaient pas du statu quo et souhaitaient relancer un processus de discussions. Les membres permanents du Conseil de sécurité ont exprimé publiquement leur soutien à cette mission et leur souhait qu’une discussion puisse avoir lieu au Conseil sur la base du rapport remis par mission de M. Gambari à M. Annan.
La visite du Secrétaire général adjoint devait permettre d’encourager le dialogue sur des dossiers techniques mais également d’organiser, sous ses auspices, une nouvelle rencontre entre MM. Papadopoulos et Talat. Celle-ci s’est tenue le 8 juillet 2006. Les deux dirigeants se sont engagés à son issue sur un certain nombre de « principes » : la réunification de l’île, la nécessité d’un règlement global, le refus du statu quo, un accord sur le lancement immédiat d’un processus de discussions bi-communautaires… Mais faute de progrès concrets sur ce point, les Comités n’ont pas encore, à ce jour, engagé leurs travaux, M. Talat semblant vouloir, pour la partie Nord, notamment subordonner le lancement de ces comités à une nouvelle rencontre avec M. Papadopoulos, ce que ce dernier refuse. Afin de relancer les échanges, M. Gambari a adressé le 15 novembre 2006 à MM. Papadopoulos et Talat une lettre proposant un processus en trois étapes, auquel les deux intéressés ont répondu positivement. M. Annan a alors rencontré M. Talat à Genève le 20 novembre 2006.
En dépit de ces efforts et de ces échanges, il faut cependant constater que, en réalité, le processus n’est pas vraiment enclenché aujourd’hui, après l’échec du référendum de 2004, alors même que les responsables des Nations unies – le Secrétaire général et son Secrétaire général adjoint – viennent de changer, ce qui n’est pas sans conséquence. Tant M. Annan que M. Gambari s’étaient impliqués personnellement dans ce dossier et disposaient d’une sérieuse connaissance de la question et des acteurs concernés.
On sait aussi que le processus des négociations d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne a été, en partie, suspendu à la fin de 2006, en raison du refus de ce pays de ratifier le protocole à l’accord d’union douanière dit « accord d’Ankara », protocole qui prévoit l’extension de cette convention aux dix nouveaux Etats membres de l’Union européenne dont la République de Chypre.
Finalement le problème chypriote est aujourd’hui encore loin d’être résolu et il risque de peser lourdement dans les relations entre l’Union européenne et la Turquie. Pour l’heure, il ne peut être réglé que sous l’égide de l’ONU et non de l’Union européenne ; la République de Chypre refuse d’ailleurs de sortir de ce cadre onusien. Cela ne signifie nullement que l’Union n’ait pas son mot à dire en la matière mais le règlement de cette question, à un terme plus ou moins proche, semble bien être un préalable à l’adhésion de la Turquie.
B – La situation politique au Sud et au Nord de l’île
1) Au Sud, la position du Président Papadopoulos est confortée
M. Tassos Papadopoulos a été élu Président de la République de Chypre pour cinq ans en 2003. Des élections législatives se sont déroulées le 21 mai 2006 ; elles n’ont pas modifié l’alliance formée par l’AKEL, le parti progressiste du peuple travailleur, qualifié de néo-communiste (18 sièges) et celui du Président Papadopoulos, le DIKO (11 sièges, soit deux de plus qu’aux élections de 2001). De son côté le Rassemblement démocratique, le DISY, demeure, avec 18 sièges, dans l’opposition. Ces élections étaient les premières à avoir lieu depuis le référendum d’avril 2004. Les observateurs considèrent qu’elles ont conforté la position du Président Papadopoulos qui avait appelé à voter contre le plan Annan. Les élections municipales du 17 décembre 2006 ont confirmé la prédominance de la coalition gouvernementale.
2) Au Nord, la quête d’un soutien européen
Lors des élections du 17 avril 2005, M. Mehmet Ali Talat, représentant le parti turc républicain, situé à gauche de l’échiquier politique, a été élu à la tête de la « RTCN » avec 55,6 % des voix. Les élections législatives partielles tenues le 25 juin 2006 ont confirmé la position du parti de M. Talat, lui attribuant 25 sièges sur 50. La majorité formée autour du parti de M. Talat reposait alors sur une alliance avec le parti DP (Democratic party) de M. Serdar Denktash, fils de l’ancien dirigeant Rauf Denktash. A l’été 2006, cette majorité a connu un changement de configuration. Trois députés du DP ont fondé une nouvelle formation politique le « Parti de la liberté et des réformes ». Désormais, le Premier ministre de la « RTCN », M. Ferdi Sabit Soyer, gouverne en s’appuyant sur le Parti de M. Talat et cette nouvelle formation, se passant ainsi du DP qui est devenu une force d’opposition.
M. Talat devrait s’appuyer sur le soutien de l’Union européenne, qu’il appelle de ses vœux, et notamment les crédits PHARE adoptés le 20 octobre 2006, pour encourager le développement de la partie Nord de Chypre.
C – Une économie qui profite de l’intégration dans l’Union européenne
Si la vie politique à Chypre reste dominée par la question de la réunification, l’entrée dans l’Union a eu des répercussions importantes dans l’île, en particulier au plan économique. Chypre était sans doute l’un des candidats à l’adhésion les mieux placés en 2004 parce ce pays disposait déjà d’une économie de marché et avait le PIB le plus élevé des dix candidats. Chypre est ainsi le plus riche des nouveaux Etats membres de l’Union européenne, avec un PIB par habitant à prix courants de 18 230 euros en 2005, équivalent à 82,6 % de la moyenne de l’Union européenne. Ce pays n’a donc pas eu à supporter la transition difficile qu’ont connue les pays d’Europe centrale et orientale.
1) Des performances économiques satisfaisantes au Sud
Les performances économiques demeurent satisfaisantes, notamment en termes de chômage (3,6 % en 2005) et d’inflation (2,5 % en 2005) et, après un ralentissement, la croissance était à nouveau en augmentation en 2005 (3,8 %). Le gouvernement chypriote, qui s’était préparé activement à l’adhésion et vise une accession à l’euro au 1er janvier 2008, a engagé une politique de rigueur budgétaire qui a entraîné des mouvements de contestation dans la fonction publique et chez les agriculteurs.
Ainsi, il a décidé de lancer un « programme de convergence 2004-2008 » dont l’objectif est de ramener le déficit budgétaire sous la barre des 3 % du PIB ce qui a été le cas en 2005 avec un déficit de 2,4 %, de faire descendre la dette publique en dessous du ratio de 60 % du PIB et d’assurer la soutenabilité des finances publiques. La procédure pour déficits excessifs recommandée par la Commission européenne a ainsi été abandonnée en juillet 2006.
En matière de réformes structurelles, le gouvernement chypriote a défini une stratégie en trois points : libéralisation de l’économie, développement de l’ « économie de la connaissance » et recherche d’un développement durable s’appuyant sur la modernisation des infrastructures de base et le capital humain. Des réformes en matière de retraites et de système de santé semblent aussi nécessaires ; elles ont déjà été engagées, notamment par l’allongement de la durée du travail des fonctionnaires à 63 ans.
C’est dans ce contexte que l’AKEL, de tendance néo-communiste, a été le seul parti à voter contre la ratification du traité constitutionnel en juin 2005, bien qu’il soutienne le gouvernement. Par ailleurs, tout en obtenant des délais de transition, Nicosie a mis un terme à la fiscalité dérogatoire des sociétés offshore. Elle a également introduit plus de rigueur dans la gestion de son pavillon maritime (Chypre est la 8e puissance maritime mondiale), ce qui lui a permis de rejoindre la liste blanche du Mémorandum de Paris, dans laquelle figurent les navires qui se conforment aux normes internationales.
Chypre répond aux critères de Maastricht et la politique actuelle de discipline budgétaire permet d’espérer une entrée dans l’euro, avec Malte, le 1er janvier 2008. Comme le notait, notre collègue, M. Christian Philip, dans son récent rapport au nom de la Délégation pour l’Union européenne, consacré à la situation de la République de Chypre : « L’adhésion à l’euro présentera pour Chypre un avantage particulier. D’abord, elle créera une zone monétaire unique pour toute l’île et pourrait favoriser son unification économique car il est probable que le Nord l’utilisera de fait. Ensuite, elle aplanirait la question litigieuse du pouvoir sur la monnaie entre les deux communautés en transférant ce pouvoir à la Banque centrale européenne. » (1)
Si l’économie chypriote souffre encore de faiblesses structurelles comme sa grande dépendance à l’extrême volatilité de l’industrie touristique, qui représente 15 % de son PIB, elle connaît de bonnes performances, ce qui est loin d’être le cas pour la partie turque de l’île.
2) Le décrochage économique du Nord de l’île
La partie Nord de Chypre est isolée économiquement depuis la création de la « RTCN » en 1983. Depuis 1974 et jusqu’à cette date, aucun embargo n’avait été appliqué aux ports et aéroports du Nord, et ce malgré l’occupation par les troupes turques. Une telle mesure a donc été prise en 1983. Elle a des conséquences tangibles sur le développement économique du Nord de l’île qui ne peut commercer qu’avec la Turquie.
Il convient toutefois de relativiser ce retard économique. D’après certaines sources, le PIB serait passé, dans cette partie de l’île, de 3 000 à près de 12 000 euros par habitant ces dernières années, grâce à une aide importante d’Ankara. Cette évolution positive est également imputable aux mesures prises par la République de Chypre, que nous avons déjà évoquées : ouverture de la ligne verte et du marché de travail, gratuité des soins hospitaliers, attribution de passeport… Si le tourisme est encore peu important par rapport au Sud de l’île, il tend à se développer avec des lignes aériennes qui relient le Nord de l’île au Royaume-Uni, via la Turquie, les communications aériennes n’étant possibles pour le Nord de Chypre qu’avec ce pays.
L’Union européenne a décidé de débloquer, fin 2006, une aide de 259 millions d’euros pour le Nord de Chypre. Il faut voir dans ce soutien financier un premier pas vers une « normalisation » de la partie Nord, au plan économique tout du moins. Ce montant de cette aide doit cependant être rapproché des 350 millions d’euros accordés par la Turquie chaque année, sous forme de subventions ou de prêts.
La Commission européenne a installé un bureau à Nicosie-Nord sans procéder, cependant, à une inauguration officielle pour éviter que cela soit interprété comme une reconnaissance juridique de la « RTCN ».
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C’est dans ce contexte complexe que s’organisent les relations entre la France et la République de Chypre. De l’avis de tous, ces liens sont étroits et, très souvent, notre pays et ce nouveau membre de l’Union se retrouvent au plan européen sur de nombreux dossiers.
Alors que la question de la sécurité est de plus en plus obsédante en Europe, et que Chypre fait figure de porte de l’Union européenne, il était tout naturel que les deux pays se rapprochent pour organiser leurs échanges en ce domaine. L’Union encourage activement ce type de coopération bilatérale.
II – DES RELATIONS FRANCO–CHYPRIOTES
CONFIANTES ET ACTIVES …
A – Des convergences de vues et des contacts constants
1) La mise en place d’un dialogue structuré
Les relations bilatérales entre la France et la République de Chypre sont traditionnellement bonnes. Ce pays considère que nous avons une position équilibrée sur la question chypriote. Depuis l’entrée de Chypre dans l’Union européenne, les autorités françaises veillent d’ailleurs à renforcer le dialogue avec cet Etat membre sur l’ensemble des grands dossiers européens, sur lesquels existent entre les deux pays de nombreuses convergences de vues.
A l’occasion de la visite officielle effectuée par le Président Papadopoulos, à l’invitation du Président de la République, du 3 au 5 novembre 2005, il a ainsi été décidé d’établir un dialogue structuré entre la France et la République de Chypre, afin de renforcer la concertation et la coopération bilatérale sur l’ensemble des sujets d’intérêt commun.
2) De nombreuses visites bilatérales
Le rythme des visites bilatérales à haut niveau tend à s’accélérer. Du côté français, Mme Noëlle Lenoir, alors ministre déléguée aux affaires européennes, s’est rendue à Nicosie en juillet 2003. M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur, y a effectué un séjour en septembre 2004 et il a été à nouveau reçu le 27 janvier 2006 par le Président Papadopoulos. Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée aux affaires européennes à l’époque, a effectué une visite à Chypre en janvier 2005. Mme Catherine Colonna s’y est rendue le 21 juillet 2006, ainsi que Mme Michèle Alliot–Marie, ministre de la défense, le 23 juillet 2006 et M. Xavier Bertrand, ministre de la santé le 3 août 2006 dans le cadre de l’opération « Solidarité Liban ». On a pu mesurer à l’occasion de l’organisation de cette opération destinée à évacuer de nombreux civils du Liban lors des combats de l’été dernier que la coopération entre la France et Chypre était particulièrement efficace, les autorités chypriotes ayant manifestement apprécié le fait que la France les sollicite pour cette entreprise.
Du côté chypriote, dans le cadre de la visite officielle du Président Papadopoulos en novembre 2005, M. Iacovou, ministre des affaires étrangères, qui avait déjà été reçu par M. Michel Barnier en décembre 2004, s’est entretenu avec M. Philippe Douste-Blazy. Lors de sa venue à Paris pour rencontrer le Secrétaire général des Nations unies le 28 février 2006, M. Papadopoulos a également eu un entretien avec Mme Catherine Colonna.
Par ailleurs, M. Lillikas, ministre du commerce, de l’industrie et du tourisme, qui a effectué plusieurs séjours en France au cours des deux dernières années pour y rencontrer les autorités françaises, a été reçu par Mme Colonna. Francophile et parfaitement francophone, M. Lillikas a, depuis, été nommé ministre des affaires étrangères lors du remaniement ministériel du 8 juin 2006.
B – Des relations économiques d’un volume encore modeste
La France entretient avec Chypre des relations économiques d’un volume global modeste mais fortement excédentaire en faveur de notre pays. En 2005, Chypre était notre 82e client mais occupait la 30e place en termes d’excédents. De 2001 à 2005, le montant global des excédents accumulés par la France sur Chypre s’est élevé à 1,4 milliard d’euros. Selon les statistiques chypriotes, la France était, en 2005, le 8e fournisseur de Chypre avec 3,6 % du marché et son premier client avec 16,9 % du marché, ce qui s’explique, pour l’essentiel, par le fait que des réexportations sont effectuées depuis ce pays vers la France.
Les exportations françaises vers Chypre se sont élevées en 2005 à 243,5 millions d’euros, en baisse de 19,8 % par rapport au montant de 2004. Après le pic record de 2002, l’excédent commercial de la France a connu en 2005 sa troisième année de baisse consécutive. Ce recul est particulièrement sensible aux postes « équipements électriques et électroniques » (– 48,9 % à 25,7 millions d’euros) et « produits de l’industrie automobile » (– 47,4 % à 52,3 millions d’euros). Le poste « bateaux, avions, trains, moto » enregistre, en revanche, une très forte progression (+ 729 % à 41,5 millions d’euros).
Étant donné le faible développement de l’appareil productif chypriote, le volume de nos importations reste limité, à hauteur de 21,1 millions d’euros en 2005. Sur les sept premiers mois de 2006, les exportations françaises vers Chypre ont crû de 120,7 %, à 275 millions d’euros contre 124,5 millions pour la même période en 2005.
En 2005 et 2006, quatre importantes opérations ont été conclues avec ce pays :
– La participation, à hauteur de 42 %, de Bouygues, d’Egis et de la Chambre de commerce et d’industrie Nice-Côte d’Azur au consortium qui a remporté l’appel d’offres en vue de la rénovation et de la gestion des deux aéroports internationaux de Chypre.
– L’acquisition par le groupe franco-grec Carrefour-Marinopoulos d’un opérateur local de la grande distribution pour un montant de 37 millions d’euros.
– La signature, fin juin 2006, d’un contrat de fournitures d’une centrale thermique de 180 MW, dont les turbines sont fabriquées à Belfort, d’un montant de 210 millions d’euros.
– La signature d’un contrat de près de 2 millions d’euros sur dix ans entre l’Etat chypriote et l’Imprimerie nationale en septembre 2006.
C – La coopération culturelle, scientifique et technique
La France et Chypre sont liées par un accord culturel signé en 1969. Ce texte a institué une commission mixte qui ne se réunit plus cependant depuis juillet 1994. Les moyens de l’action culturelle française à Chypre sont modestes : 231 000 euros en 2006 dont plus de la moitié recouvrent des frais de rémunération. Le réseau comprend un centre culturel à Nicosie, deux Alliances françaises, à Limassol et Paphos, un établissement scolaire qui va développer un nouveau cursus franco-chypriote jusqu’au baccalauréat et une association culturelle dans la partie Nord de l’île. La grille des équivalences entre diplômes français et chypriotes a été entièrement revue en 2005, ce qui permet désormais de faire sans difficulté la promotion des études en France.
Les priorités assignées à l’action en matière culturelle sont :
– La promotion de l’enseignement du français – un tiers des crédits y sont consacrés – notamment à destination des fonctionnaires chypriotes. Actuellement, 50 000 élèves apprennent le français dans le système scolaire chypriote, au titre de la deuxième langue vivante. A l’Université de Chypre, les étudiants, qui étaient 40 à étudier le français en 2002, étaient 750 en 2005. Les inscriptions au DELF (diplôme d’études en langue française) sont passées de 1 300 en 2002 à 2 300 en 2006.
– Le renforcement et la diversification des coopérations scientifique et universitaire qui représentent aujourd’hui 30 % des crédits. En juin 2004, a été créé un Programme dit « Zénon » destiné à financer la mobilité de jeunes chercheurs. Par ailleurs, des efforts sont faits du côté chypriote pour accroître le nombre de bourses universitaires. En 2003, 187 étudiants chypriotes ont été accueillis en France, soit une augmentation de 140 % par rapport à 1998. Un programme de 36 bourses de 1er cycle pour la France a été mis en place en 2005 sur fonds chypriotes, à travers une convention avec le CNOUS (Centre national des œuvres universitaires et scolaires). La coopération archéologique, notamment, est ancienne et fonctionne de façon satisfaisante.
– Le développement de la coopération technique, notamment dans le domaine institutionnel. Cette activité s’est développée au cours des dernières années, dans le cadre de l’harmonisation avec l’acquis communautaire.
Dans la perspective de la réunification, notre action se développe également dans la partie Nord de l’île, essentiellement dans le domaine culturel.
Enfin, Chypre est devenu membre associé de l’Organisation internationale de la Francophonie lors du sommet de Bucarest qui s’est tenu fin septembre 2006.
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La coopération entre Chypre et la France pourrait sans doute être renforcée. Elle est cependant d’un bon niveau au regard de la taille de ce pays. L’accord qui est soumis aujourd’hui à l’Assemblée nationale ouvre un nouveau pan à cette coopération dans un secteur pour le moins sensible.
III – … QU’ILLUSTRE L’ACCORD DE COOPÉRATION
EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ SIGNÉ EN 2005
A – Un projet ancien concrétisé en 2005
Le présent accord signé le 4 mars 2005 vient donner un cadre juridique à un projet de coopération en matière de sécurité intérieure vieux de plus de dix ans. En effet, en 1995, à l’occasion de l’installation du nouvel officier de liaison français par le chef de l’Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants à Nicosie, le directeur général de la police chypriote s’était étonné de l’absence d’accord de coopération entre la République française et la République de Chypre.
La coopération avec la République de Chypre en matière de sécurité intérieure existait mais n’était fondée sur aucun texte particulier. Cette coopération opérationnelle passait par le canal de l’Office international de police criminelle (Interpol) et de l’Office européen de police (Europol). Dès le 8 septembre 1995, le principe de la conclusion d’un accord de coopération entre la France et Chypre, sur la base du projet d’accord intergouvernemental type, était décidé par une note du ministère des affaires étrangères adressée au ministre de l’intérieur. Mais cette note n’a pas été suivie d’effets pendant sept ans jusqu’à une rencontre des directeurs généraux des polices française et chypriote, le 25 mars 2002. Le processus de négociation a alors été véritablement engagé pour aboutir à la signature, le 4 mars 2005, à Nicosie, de l’accord franco-chypriote relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure.
Dans la pratique, la coopération s’était toutefois développée avant cette signature avec la création en janvier 2000 d’un poste d’attaché de sécurité intérieure à Chypre. Les actions de coopération en matière de sécurité engagées depuis cette date ont porté sur : les faux documents de voyage, l’immigration clandestine et le contrôle des flux migratoires, les contrôles transfrontières, le maintien de l’ordre, la lutte contre les faux moyens de paiements, la lutte contre les stupéfiants, la lutte anti-terroriste, la sécurité civile.
Une mission interministérielle conduite par l’ambassadeur chargé de la lutte contre la criminalité organisée, en décembre 2004, a fait le point des actions conduites par la République de Chypre et des perspectives communes, ce qui a permis de préparer l’accord de 2005. Avant même la mise en œuvre de ce texte, un programme de coopération a été défini pour 2006, qui portait sur les matières suivantes : la lutte contre le trafic des stupéfiants ; le maintien de l’ordre – que l’on qualifie en termes choisis de « gestion démocratique des foules » – et la lutte contre l’hooliganisme ; un audit de l’unité d’intervention antiterroriste chypriote par le RAID ; la sécurité civile et la gestion d’une crise à la suite d’un tremblement de terre ; l’immigration clandestine.
Un séminaire euro–méditerranéen sur le trafic de faux euros, auquel des spécialistes chypriotes du faux monnayage ont participé, a également été organisé en 2006 par la direction centrale de la police judiciaire du ministère de l’intérieur et de l’aménagement du territoire.
B – Une coopération justifiée par la situation stratégique de Chypre
Par sa position géographique, Chypre a pu apparaître comme une porte d’entrée commode vers l’Europe et comme une plaque tournante de tous les trafics. En outre, la présence d’une ligne de partition, qui n’est pas considérée juridiquement comme une frontière de l’Union, mais qui, dans les faits, est bien aujourd’hui encore une sorte de limite extérieure de l’Europe, plus ou moins contrôlée et étanche, pose des difficultés particulières qui rendent nécessaires cette coopération de sécurité intérieure.
De l’avis de tous, l’entrée de Chypre dans l’Union européenne l’a conduite à engager des efforts profonds dans le domaine de la lutte contre le blanchiment et les trafics divers ainsi que le terrorisme.
1) La lutte engagée à Chypre contre le blanchiment, les trafics internationaux et le terrorisme.
Les derniers rapports du Fonds monétaire international (FMI) et de Moneyval (2) estiment que les autorités chypriotes ont démontré leur volonté de lutter fortement contre le blanchiment d’argent. Ils soulignent que les institutions de lutte contre le blanchiment, comme la banque centrale de Chypre et la cellule de renseignements financière chypriote (MOKAS) sont compétentes et que, entre 2002 et 2005, de nombreux progrès ont été réalisés. Ces institutions de lutte contre le blanchiment qui ont été renforcées sont actuellement correctement dotées en personnel. Comme cela avait été recommandé dans le deuxième rapport de Moneyval, en 2002, MOKAS est dorénavant habilité à suspendre les transactions financières. En outre, les experts en la matière estiment que les autorités chypriotes ont effectué un travail louable en fédérant les autorités compétentes en lien avec le cadre établi par Moneyval.
Selon le gouvernement français et les observateurs internationaux, la situation en matière de crime organisé dans l’île de Chypre se présente de manière plus contrastée. La République de Chypre apparaît comme un Etat membre de l’Union assez peu criminogène alors que dans la partie Nord de l’île, sous le contrôle de l’armée turque, cohabiteraient de puissants réseaux criminels. Au Sud, la police de la République de Chypre, malgré des effectifs limités, est jugée performante et active sur le terrain, grâce à une bonne formation et un équipement moderne. Les traditions administratives et judiciaires britanniques ont, en effet, été conservées. La corruption y est marginale et la législation conforme aux normes européennes. En matière de lutte contre le trafic de stupéfiants, les autorités chypriotes sont extrêmement vigilantes, faisant preuve d’une très grande sévérité ; de fait, la consommation locale est très faible. Les saisies concernent principalement les aéroports où débarquent, l’été, de nombreux touristes.
2) La lutte contre le terrorisme
Les autorités chypriotes considèrent que la menace terroriste pesant sur leur pays est faible et ce malgré la présence de deux bases militaires britanniques sur l’île et la situation créée par l’occupation turque. Chypre n’a, en effet, pas été confrontée au terrorisme international depuis les années quatre–vingt.
En la matière, la position des autorités de Chypre est proche de celle du Gouvernement français. Ces autorités considèrent que la lutte contre les groupes terroristes relèvent de la politique de lutte contre la criminalité. Toute assimilation de la lutte contre le terrorisme à une guerre leur semble inappropriée.
A la suite des attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, les autorités chypriotes ont pris un certain nombre de mesures visant à accroître la sécurité et à renforcer leur dispositif anti-terroriste, comme la création d’un bureau de lutte anti-terroriste (Office for Combating Terrorism), la création d’une unité de lutte contre le financement du terrorisme (Unit for Combating Money Laundering), le renforcement de l’Ethnike Hypêresia Plêrophorion (EYP – plus connu sous l’ancien acronyme KYP) qui est le service national de renseignement chypriote directement placé sous l’autorité du Président de la République, ou, enfin, la ratification en novembre 2001 de la convention de l’ONU pour la répression du financement du terrorisme.
En outre, la police chypriote dispose, depuis 1975, d’un groupe spécial d’intervention, le Special Antiterrorist Squad (SAS), intégré au sein de l’Unité d’action rapide et de réponse immédiate (Mobile Immediate Action Unit). Le RAID a effectué une mission d’évaluation de ce groupe du 19 au 23 juin 2006. Sa structure est équivalente à celle d’une CRS. Les membres de ce groupe, très bien équipés et d’un très bon niveau de préparation, suivent régulièrement des stages aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne.
Au plan multilatéral, depuis le 1er mai 2004, date de son adhésion à l’Union européenne, Chypre participe activement aux différentes instances de discussion et de coopération ad hoc relatives à la lutte contre le terrorisme : groupe terrorisme du troisième pilier de l’Union européenne, PWGT (Police working group on terrorism), Europol, etc.
Enfin, le dispositif anti-terroriste chypriote a été évalué par des experts européens du 19 au 21 octobre 2004, ce qui a donné lieu à un rapport du Secrétariat du Conseil de l’Union diffusé en février 2005. Les experts préconisaient, entre autres, que les autorités fassent adopter une loi autorisant le service central de renseignements à accéder à l’ensemble des bases de données criminelles, et modifient leur Constitution pour rendre légales les écoutes téléphoniques.
3) La question migratoire et les flux entre le Nord et le Sud de l’île
Depuis son adhésion à l’Union européenne, Chypre doit faire face à une immigration illégale et de nombreuses demandes d’asiles. Suivant les recommandations de l’Union européenne, les autorités chypriotes ont fait d’importants efforts pour contrôler leurs frontières en installant des radars et en achetant des vedettes de patrouille maritime.
Mais elles ne peuvent pas contrôler efficacement le trafic des personnes en provenance du Nord de l’île. Au cours de l’année 2005, selon les statistiques du Haut Commissariat aux Réfugiés de l’ONU, 16 clandestins sont entrés à Chypre par les territoires contrôlés par la République de Chypre et 5 191 par le Nord de l’île, sous occupation militaire turque. Il est clair que cette occupation des territoires du Nord a ouvert une brèche dans le dispositif frontalier de la République de Chypre et, par extension, dans celui de l’Union Européenne.
En 2004 et 2005, ce sont donc respectivement 5 287 et 5 191 clandestins qui sont passés par Chypre Nord pour entrer dans la République de Chypre. Les dernières statistiques par nationalités se répartissent comme suit :
– Pakistanais : 45 %
– Irakiens et Turcs (d’origine kurde) : 15 %
– Chinois : 11 %
– Syriens : 10 %
– Palestiniens : 8 %
– Bangladesh et Indiens : 7 %
– Iraniens : 2 %
– Géorgiens, Moldaves et Ukrainiens : 2 %
Chypre est l’Etat membre de l’Union européenne qui connaît le plus grand nombre de demandes d’asile en proportion, soit une demande pour sept immigrés.
|
1995 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
Immigrés clandestins |
122 |
224 |
182 |
725 |
3 796 |
5 287 |
5 191 |
Demandeurs d’asile |
- |
- |
- |
839 |
4 032 |
9 655 |
7 651 |
Source : République de Chypre - Rapport n° 3458 de la Délégation pour l’Union européenne, Assemblée nationale, 2006.
La ligne de partition est placée sous la responsabilité des Nations unies et les troupes de l’ONU déployées tout au long de celle-ci. Elles évitent d’y effectuer le moindre contrôle au motif qu’ils ne font pas partie de leur mandat. De leur côté, les autorités chypriotes se refusent à considérer cette ligne de partition comme une frontière et assurent des contrôles à l’intérieur des territoires placés sous leur responsabilité directe. Si la récente évaluation effectuée par des experts des Etats membres de l’espace Schengen a confirmé la bonne reprise de l’acquis par la République de Chypre, la perméabilité de la ligne de démarcation et l’entrée de l’île dans l’Union européenne ont favorisé, au Nord, l’activité de nombreuses filières criminelles qui s’appuient sur l’impunité offerte par la zone de non droit que constitue la partie septentrionale de l’île. La République de Chypre est, sans doute, en mesure de répondre à de nombreuses exigences qui peuvent la conduire à intégrer à l’espace Schengen à un terme raisonnable mais lui imposer un contrôle de la « ligne verte » serait donner à cette dernière un statut de frontière et reconnaître de facto la « RTCN ».
Finalement la République de Chypre qui était traditionnellement qualifiée de « pays de rebond » à destination de l’Union européenne est devenue depuis son adhésion à l’Union le 1er mai 2004 un pays de destination en matière d’immigration clandestine.
4) L’articulation entre cet accord de coopération et les règles européennes relatives aux questions de sécurité
On pourrait s’interroger sur l’opportunité de conclure un accord de coopération en matière de sécurité intérieure avec un pays membre de l’Union européenne alors que celle-ci intervient dans le domaine de la justice et de la sécurité au titre du troisième pilier. La signature d’une telle convention se justifie par le fait qu’en matière de Justice et d’affaires intérieures (JAI), les dispositions européennes sont loin de régler toutes les questions et ne prévoit pas dans le détail, notamment, les conditions dans lesquelles deux pays peuvent organiser une coopération opérationnelle entre leurs forces de police.
Plus encore, dans le cadre du troisième pilier, l’idée est bien d’instituer des méthodes communes et de coopération en matière policière. A cette fin, les accords entre Etats membres sont encouragés.
Il est vrai que l’adhésion de la République de Chypre à l’Union européenne a permis de mettre en place un certain nombre de dispositions intégrées dans l’acquis communautaire et garantes de la sécurité aux frontières aériennes, terrestres et maritimes, mais aussi en matière de lutte contre le trafic d’êtres humains. L’intégration à l’espace Schengen à laquelle la République de Chypre est candidate, devrait permettre à ce pays de renforcer plus encore son niveau de sécurité, mais aussi de développer la coopération policière avec l’ensemble des pays membres afin de maintenir le niveau de sécurité de l’Union européenne.
Le présent accord bilatéral entre la France et la République de Chypre s’inscrit dans le cadre des normes générales définies au plan européen par les décisions du Conseil de l’Union européenne et relatives à la coopération en matière de police et judiciaire, notamment celles relatives au principe de disponibilité (principe défini dans le programme de La Haye (3)) et à la protection des données dans le troisième pilier.
En outre, à côté des canaux de coopération policière multilatéraux – Interpol, Europol, Schengen –, l’accord passé entre la France et Chypre permettra désormais d’institutionnaliser et de développer la coopération opérationnelle – c’est-à-dire concrètement les échanges d’informations – entre ces deux pays par le biais d’autres canaux. En effet, des informations pourront être échangées entre les services français et leurs homologues chypriotes, soit grâce à des contacts directs, soit par le canal de l’attaché de sécurité intérieure français en poste à Nicosie, ou alors par le réseau des officiers de liaison compétents en matière de lutte contre les trafics de stupéfiants ou l’immigration illégale.
Pour résumer, l’Union européenne fixe les grands principes de la coopération entre Etats membres en matière de sécurité intérieure, encourage les accord bilatéraux afin de constituer en son sein un véritable réseau de lutte contre toutes les formes de criminalité.
5) Une coopération bilatérale engagée par Chypre avec d’autres Etats membres de l’Union européenne
La République de Chypre a déjà conclu des accords bilatéraux de ce type avec les Etats membres suivants : Autriche, Bulgarie, Estonie, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Malte, Pologne, République Tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Slovaquie et Slovénie.
6) La France multiplie ce type d’accords
La France a conclu des accords de coopération transfrontalière en matière policière et douanière avec la plupart de ses partenaires frontaliers :
Belgique : accord relatif à la coopération transfrontalière en matière policière et douanière, signé à Tournai le 5 mars 2001.
Luxembourg : accord relatif à la coopération dans les zones frontalières entre les autorités de police et les autorités douanières signé à Luxembourg le 15 octobre 2001.
Allemagne : accord relatif à la coopération dans les zones frontalières entre les autorités de police et les autorités douanières, signé à Mondorf-les-Bains le 9 octobre 1997.
Suisse : accord relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière, signé à Berne le 11 mai 1998.
Italie : Accord relatif à la coopération transfrontalière en matière policière et douanière signé à Chambéry le 3 octobre 1997.
Espagne : traité relatif à la coopération transfrontalière en matière policière et douanière, signé à Blois le 07 juillet 1998.
Ces accords, pris en vertu de l’article 39 de la convention d’application de l’accord de Schengen qui invite les Etats membres de Schengen à se prêter aide pour la prévention et la répression de faits punissables, prévoient :
– Une assistance par l’échange d’information de nature policière dans le cadre de la lutte contre la criminalité transfrontalière.
– Des modalités générales de coopération policière (détachement d’officiers de liaison, poursuites et observations transfrontalières, assistance lors d’événements de grande envergure, etc.).
– Une coopération directe dans les zones frontalières (mise en place de patrouilles mixtes, coopération directe entre unités correspondantes …).
– Une coopération par la mise en place de centres communs de coopération policière.
Outre Chypre, la France a également conclu des accords de coopération en matière de sécurité intérieure avec les pays de l’Union européenne suivants :
Grèce : accord relatif à la coopération en matière d’affaires intérieures, signé à Athènes le 14 février 1997.
Hongrie : accord relatif à la coopération en matière d’affaires intérieures, signé à Budapest le 16 janvier 1997.
Malte : accord relatif à la coopération en matière d’affaires intérieures, signé à Paris le 9 mars 1998.
Pays-Bas : accord sur la coopération dans le domaine de la police et de la sécurité, signé à La Haye le 20 avril 1998.
Pologne : accord relatif à la coopération en matière d’affaires intérieures, signé à Varsovie le 12 septembre 1996.
Roumanie : accord relatif à la coopération en matière d’affaires intérieures, signé à Bucarest le 21 février 1997.
Suède : accord de coopération policière en matière de lutte contre le terrorisme, le trafic illicite de stupéfiants et la criminalité organisée, signé à Paris le 15 décembre 1989.
République tchèque : accord relatif à la coopération en matière policière, de sécurité civile et d’administration publique, signé à Prague le 2 avril 1997.
Enfin, la France a également signé de telles conventions avec les pays de la rive méditerranéenne :
République populaire et démocratique d’Algérie : accord intergouvernemental de coopération en matière de sécurité et de lutte contre la criminalité, approuvé par la loi n° 2006-67 du 25 janvier 2006.
Maroc : accord relatif à la coopération en matière de sécurité, signé à Paris le 30 mai 2000.
A ce jour, de nombreux accords de ce type sont également en cours de négociation par la France. Cinq d’entre eux sont prêts à être signés ou en cours de finalisation avec la Slovénie, la Croatie, la Lituanie, l’Autriche et l’Albanie. Des processus de négociation sont également engagés – à des degrés divers – avec plus d’une vingtaine de pays. Il faut néanmoins préciser que ces pourparlers sont rendus difficiles par l’absence ou l’insuffisance de législation en matière de protection des données à caractère personnel chez certains des partenaires de la France comme l’Angola, le Ghana, la Turquie, le Yémen ou Libye, entre autres.
C – Un accord classique dont l’objet est avant tout opérationnel
Observons tout d’abord que l’accord débute par un préambule qui non seulement fait référence aux accords internationaux de la France et de Chypre mais aussi à leurs obligations en tant qu’Etats membres de l’Union européenne. On a vu comment que la coopération en matière de sécurité engagée ici dans un cadre bilatéral s’articule avec les règles qui, dans le domaine de la sécurité, relèvent de la compétence de l’Union.
Ce préambule indique les deux objectifs que poursuivent la France et Chypre avec la signature de cet accord. Il s’agit tout d’abord de lutter contre les différentes formes de criminalité internationale mais également d’engager une coopération dans le domaine de la lutte contre le trafic illicite de stupéfiants.
L’article premier de l’accord fixe le champ de cette coopération. Elle peut être soit technique soit opérationnelle. La coopération technique regroupe toutes les actions de formation et de conseil menées dans le cadre des accords signés entre pays. La coopération opérationnelle a pour objectif prioritaire le retour de la sécurité intérieure, dans les domaines les plus divers. Douze domaines sont ici concernés :
– la lutte contre la criminalité organisée ;
– la lutte contre le trafic illicite des stupéfiants, des substances psychotropes et de leurs précurseurs chimiques ;
– la lutte contre le terrorisme ;
– la lutte contre les infractions à caractère économique et financier ;
– la lutte contre la traite des êtres humains ;
– la lutte contre l’immigration illégale et la criminalité y afférente ;
– la sûreté des moyens de transports aériens, maritimes et terrestres ;
– la lutte contre les faux et les contrefaçons de moyens de paiement et de documents d’identification ;
– la lutte contre le vol et le trafic illicite d’armes, de munitions, d’explosifs et de matières nucléaires et de produits bactériologiques, ainsi que d’autres matériaux dangereux et marchandises et technologies à usage civil et militaire ;
– la lutte contre le trafic des biens culturels et des objets d’art volés ;
– la police technique et scientifique ;
– la formation des personnels.
Cette liste n’est pas exhaustive puisque l’article premier stipule, dans son dernier alinéa, que les Parties peuvent étendre leur coopération à d’autres domaines relevant de la sécurité intérieure par voie d’arrangements entre les ministres désignés responsables de l’exécution de l’accord.
L’article 2 de l’accord fixe le principe selon lequel les activités prévues dans ce texte ne sauraient s’appliquer que dans le respect des législations nationales. Cette stipulation est classique.
Le deuxième alinéa de cet article indique en particulier que chacune des Parties est fondée à refuser de communiquer certaines informations si elle constatait qu’une telle communication était de nature à porter atteinte aux droits fondamentaux de la personne. De même une demande de coopération peut être refusée dans le cas où la Partie concernée estimerait qu’une telle coopération porterait atteinte, notamment, à sa souveraineté, à la sécurité, l’ordre public ...
L’article 3 porte sur la méthode de coopération entre les Parties. Celle–ci passe notamment par la communication d’informations relatives aux personnes soupçonnées de prendre part aux différentes formes de criminalité internationale, par la prise de mesures policières à la demande de l’autre pays si elles apparaissent nécessaires pour atteindre les objectifs de l’accord, par une assistance réciproque en personnel et en matériel, par des échanges d’informations sur les méthodes et les nouvelles formes de la criminalité internationale, enfin par des échanges de résultats de recherches en criminalistique et en criminologie et de spécialistes dans le but d’acquérir des connaissances professionnelles de haut niveau et de découvrir les moyens, méthodes et techniques modernes de lutte contre la criminalité internationale.
L’article 4 fixe les conditions de la coopération en matière de lutte contre le trafic de drogue. A cette fin, les Parties s’échangent informations et expériences dans le respect des conventions internationales comme la Convention unique des Nations unies sur les stupéfiants du 30 mars 1961, la Convention sur les substances psychotropes du 21 février 1971 et la Convention du 19 décembre 1988contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes. Cette coopération suppose l’échange d’informations opérationnelles sur les méthodes du trafic de drogue et le blanchiment, sur les résultats en criminalistique et en criminologie afférents à cette question mais aussi l’échange d’échantillons de stupéfiants et de produits en lien avec le trafic de ces substances.
La coopération en matière de lutte contre le terrorisme est évoquée à l’article 5. Là encore, elle prend la forme d’échanges d’informations. En organisant, dans un cadre juridique précis, ces échanges et la communication de données entre les deux parties, cet accord devrait rendre plus aisées les demandes françaises en la matière et permettre de les voir traitées dans un délai écourté.
L’article 6 porte sur la coopération technique, c’est-à-dire la formation générale et spécialisée, le conseil technique et l’accueil réciproque de fonctionnaires, alors que l’article 7 mentionne les modalités de mise en œuvre de cette coopération.
L’article 8 stipule que les ministres concernés sont responsables de la bonne exécution de l’accord ; c’est une formule classique. Il prévoit également que les organismes concernés par la mise en place de cet accord seront désignés par la voie diplomatique.
L’article 9 détaille les mesures relatives à la protection des données à caractère personnel afin de les rendre compatibles avec la législation française. Comme toujours dans ce type d’accord, il est mentionné que la Partie destinataire de données nominatives ne peut les utiliser qu’aux fins et conditions définies par la Partie émettrice. En outre sont rappelés les principes de finalité, de droit d’accès des particuliers, de destruction et de protection contre tout accès non autorisé.
On rappellera que c’est l’article 24 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure qui règle aujourd’hui la question du traitement de données personnelles par les services de police en France. Contrairement à l’article 68 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, qui contient les principes généraux relatifs aux transferts de données à caractère personnel vers des Etats étrangers, l’article 24 de la loi de 2003 concerne spécifiquement les données contenues dans des traitements de police. Il constitue un cadre légal spécifique pour les échanges de données à caractère personnel entre services de police et de gendarmerie français et services de police étrangers ou organismes de coopération internationale en matière de police judiciaire. L’intérêt de cet article résulte dans le fait qu’il détermine les conditions – notamment le niveau suffisant de protection – qui doivent être respectées pour que puissent avoir lieu de tels transferts de données à caractère personnel.
Pour ce qui concerne les protections des données à Chypre, on constate que la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) considère que « les législations des pays de l’Union européenne, y inclus les pays d’Europe centrale et orientale membres de l’Union européenne depuis le 1er mai 2004 […] offrent tous un niveau de protection équivalent, du fait, notamment, de la mise en œuvre de la directive 95/46 CE » ; cette directive du 24 octobre 1995 est relative à la protection de personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données. La loi chypriote n°138 (I) transposant cette directive a ainsi créé une Autorité nationale de surveillance et de protection des données personnelles dotée d’un pouvoir d’investigation. Par ailleurs, Chypre a signé et ratifié la Convention du Conseil de l’Europe pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel (Convention 108). Cette convention est entrée en vigueur à Chypre le 1er juin 2002. Les autorités chypriotes ont également signé, le 17 mars 2004, son protocole additionnel concernant les autorités de contrôle et les flux transfrontières de données. Il convient également de souligner qu’en sa qualité d’Etat membre de l’Union, Chypre participe aux négociations en cours au Conseil sur le projet de décision-cadre relative à la protection des données à caractère personnel traitées dans le cadre de la coopération policière et judiciaire en matière pénale.
Si l’on considère que l’article 9 de l’accord aujourd’hui soumis à l’Assemblée nationale contient des garanties propres, on peut estimer que du point de vue juridique le dispositif n’appelle pas de critiques en matière de protection des données.
L’article 10 de la convention de coopération stipule, quant à lui, que les informations doivent être traitées confidentiellement et ne peuvent être transmises à un Etat tiers sans l’accord écrit de la Partie qui les transmises, ce qui constitue une garantie.
L’article 11 règle la question des différends relatifs à l’interprétation où à l’application de l’accord et les dispositions finales apparaissent à l’article 12. Elles prévoient que l’accord est conclu pour une durée de trois ans renouvelable par tacite reconduction, pour des périodes de même durée. Il peut être dénoncé à tout moment par notification écrite, suspendu en respectant un préavis de trois mois, ou amendé. La durée de trois ans est traditionnellement choisie pour ce type d’accords dans la mesure où elle permet d’apprécier dans la durée la qualité et l’intérêt d’une coopération technique et opérationnelle en matière de sécurité intérieure, sans pour autant s’engager dans un accord trop long, qui deviendrait inutile en cas de coopération décevante.
Proche au plan européen des positions françaises dans le domaine de la Justice et des Affaires intérieures, Chypre se montre particulièrement bien disposée envers la France, considérée comme un pays ami et allié. Notre expérience et notre savoir faire dans le domaine de la sécurité intérieure et du contrôle des flux transfrontaliers intéressent Nicosie qui rencontre, avec son entrée dans l’Union européenne, des problèmes croissants comparables aux nôtres par certains aspects.
C’est pourquoi il vous est proposé d’adopter le projet de loi autorisant la ratification de cet accord de coopération en matière de sécurité intérieure entre la France et la République de Chypre, sachant que ce pays a ratifié ce texte le 17 janvier 2006.
La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mardi 6 février 2007.
Après l’exposé du Rapporteur, et suivant ses conclusions, la Commission a adopté le projet de loi (no 3429).
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La Commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, le présent projet de loi.
NB : Le texte de l’accord figure en annexe au projet de loi (n° 3429).
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