N° 3806
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2011.
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2012
TOME II
CULTURE
CRÉATION ; TRANSMISSION DES SAVOIRS
ET DÉMOCRATISATION DE LA CULTURE
Par M. Patrick BLOCHE,
Député.
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Voir les numéros : 3775, 3805 (annexe n° 8).
INTRODUCTION 5
PREMIÈRE PARTIE : L’ÉVOLUTION DES CRÉDITS EN FAVEUR DE LA CRÉATION, DE LA TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DE LA DÉMOCRATISATION CULTURELLE : UNE STAGNATION ET NON UNE « SANCTUARISATION » 7
I.- LE PROGRAMME « CRÉATION » : L’ARBRE QUI CACHE LA FORÊT 7
A. LE SPECTACLE VIVANT 7
B. LE SOUTIEN À LA CRÉATION, À LA PRODUCTION ET À LA DIFFUSION DES ARTS PLASTIQUES 10
C. LES INCITATIONS FISCALES EN FAVEUR DU CINÉMA ET DE L’AUDIOVISUEL 11
II.- TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DÉMOCRATISATION DE LA CULTURE : UNE NOUVELLE BAISSE INQUIÉTANTE QUI PÉNALISE L’ACCÈS À LA CULTURE 13
DEUXIÈME PARTIE : LE FINANCEMENT PUBLIC DU CINÉMA ET DE L’AUDIOVISUEL PAR LE CNC : UN MODÈLE À PRÉSERVER. 15
I.- UN DISPOSITIF VERTUEUX QUI A FAIT SES PREUVES 15
A. LA PERTINENCE D’UN ECOSYSTÈME UNIQUE AU MONDE 15
1. Le financement de la création par la diffusion : un système vertueux qui a su évoluer 16
a) Le financement par des taxes affectées 16
2. Des objectifs atteints : la France a un cinéma national et une production audiovisuelle dynamique. 21
B. UNE HAUSSE DES RECETTES QUI A COÏNCIDÉ AVEC L’APPARITION DE NOUVEAUX BESOINS DE FINANCEMENT 23
1. Le rendement conséquent de la Taxe sur les Services de Télévision (TST) 23
2. L’apparition de nouveaux besoins et la réalisation de nouvelles missions 25
II.- UN SYSTÈME FRAGILISÉ AU MOMENT MÊME OÙ IL DEVRAIT ÊTRE CONFORTÉ 28
A. UNE RÉFORME ATTENDUE MAIS UN PLAFONNEMENT CONTESTABLE AU PROFIT DU BUDGET DE L’ÉTAT 28
1. La réforme de la TST doit mettre fin à l’optimisation fiscale qui fragilise le CNC 28
2. La TST doit rester une recette dynamique et l’autonomie de gestion du CNC doit être préservée 30
3. Le plafonnement des ressources du CNC expose notre système d’aides au cinéma et à l’audiovisuel à un risque de remise en cause par les autorités communautaires. 32
B. UNE FRAGILISATION D’AUTANT PLUS INCOMPRÉHENSIBLE DANS UN CONTEXTE DE FORTES MUTATIONS 34
1. Il faut donner les moyens d’affronter de nouveaux défis 34
2. L’avenir d’un modèle économique qui mérite une réflexion ambitieuse 39
TRAVAUX DE LA COMMISSION 43
I.– AUDITION DU MINISTRE 43
II.– EXAMEN DES CRÉDITS 43
AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 57
ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 59
Le présent rapport a pour objet d’examiner, au sein de la mission « culture », le programme 131 « création », et le programme 224 « transmission des savoirs et démocratisation de la culture », le programme 175 « patrimoines » faisant l’objet d’un avis distinct confié à Mme Sophie Delong.
Pour autant, le rapporteur souhaite consacrer quelques développements à l’évolution des crédits de la mission « culture » dans leur ensemble.
Dans la présentation générale du budget réalisée par le ministère de la culture et de la communication, on peut lire que les crédits de la mission culture, hors dépenses de personnel, s’élèvent à 2,09 milliards d’euros, soit une progression de 2,9 %, « témoignant ainsi de l’effort du gouvernement en faveur des secteurs culturels ».
À y regarder de plus près, le chiffre annoncé témoigne surtout d’un optimisme excessif : hors fonds de concours, par nature aléatoires, et en réintégrant les dépenses de personnel, l’augmentation des crédits dévolus à la mission culture n’atteint plus que 1,8 %, quand le projet de loi de finances est construit sur une hypothèse d’inflation de 1,7 %. Si l’on compare les crédits ouverts en loi de finances pour 2011 et ceux demandés dans le projet de loi de finances pour 2012, hors l’enveloppe exceptionnelle prévue pour la réalisation de la Philharmonie de Paris, la hausse n’atteint plus que 0,18 %, soit une baisse du budget de la culture en valeur.
Cette baisse succède à celle constatée dans le projet de loi de finances de l’an passé, qui atteignait 0,15 % en crédits de paiement.
La baisse est encore plus spectaculaire s’agissant des autorisations d’engagement, qui diminuent de 116 millions d’euros, soit – 4 %, obérant ainsi les capacités d’intervention du ministère à l’avenir.
Cette hypothèque pèsera d’autant plus lourdement que de fortes tendances centrifuges s’exercent sur les compétences qui lui sont dévolues, tant au niveau central qu’au niveau déconcentré. L’aventure hasardeuse du Conseil de la création artistique a heureusement pris fin, sans d’ailleurs que l’on sache exactement ce qu’il est advenu du solde des crédits d’intervention qui lui étaient alloués. Mais l’hypothèse de la création d’un Centre national de la musique entretient l’inquiétude de ceux qui constatent depuis longtemps le démembrement progressif du Ministère de la Culture et le doute sur le fait que tous les acteurs de la filière musicale soient réellement bénéficiaires des actions que pourrait conduire le futur centre.
À ces signaux préoccupants s’ajoutent les effets néfastes de la Révision générale des politiques publiques, qui se traduisent cette année encore par une diminution de 110 équivalents temps plein travaillés (ETPT). Le récent lancement d’un appel d’offres du ministère pour des prestations d’assistance et de conseil à la sous-direction des affaires juridiques illustre les effets d’une politique vidant progressivement de sa substance les capacités d’intervention et d’expertise internes à l’administration. Contrairement à ce qu’affirme le dossier de presse, on est fondé à émettre de sérieux doutes sur le fait que « le ministère disposera des emplois nécessaires à l’accomplissement de ses missions ».
Ce désengagement progressif de l’État de la politique culturelle suscite des inquiétudes d’autant plus vives que dans le même temps, la loi de réforme des collectivités territoriales avait pour objectif premier de supprimer la clause de compétence générale, alors même qu’était engagé un dialogue entre le ministère, les professionnels et les collectivités dans le cadre des Entretiens de Valois. À la suite de la mobilisation des professionnels et des élus, toutes les collectivités pourront maintenir leur action en faveur de la culture. Mais les menaces que font peser sur leur autonomie fiscale la suppression de la taxe professionnelle et la non-compensation d’une partie des charges que l’État a transférées aux collectivités impactent la pérennité de ces interventions.
À la contrainte budgétaire s’ajoute une politique culturelle dont la lisibilité est difficilement perceptible. Cette année encore, on peine à identifier un projet culturel largement éclipsé par des décisions intempestives dont la légitimité scientifique, artistique et culturelle est largement contestée. Après le Conseil de la création artistique, créé en janvier 2009, dissous en mai 2011, on peut s’interroger sur la pertinence de l’inscription de 10 millions d’euros de crédits de paiement pour financer le projet de Maison de l’histoire de France.
Ce constat alarmant sera développé plus précisément dans la première partie du présent rapport, consacrée à l’évolution des crédits des programmes 131 et 224 précités.
La seconde partie sera consacrée à l’étude d’un secteur de l’action culturelle. Le choix du rapporteur s’est porté cette année sur les ressources et les besoins de financement du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC).
L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe au 10 octobre 2010 la date butoir pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.
À cette date, 79,1 % des réponses étaient parvenues au rapporteur pour avis.
PREMIÈRE PARTIE : L’ÉVOLUTION DES CRÉDITS EN FAVEUR DE LA CRÉATION, DE LA TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DE LA DÉMOCRATISATION CULTURELLE : UNE STAGNATION ET NON UNE « SANCTUARISATION »
À l’instar de l’évolution du budget général de la mission culture, l’examen des crédits des programmes 131 « création » et 224 « transmission des savoirs et démocratisation culturelle » incite à relativiser la satisfaction gouvernementale.
I.- LE PROGRAMME « CRÉATION » : L’ARBRE QUI CACHE LA FORÊT
Les crédits du programme 131 affichent une hausse spectaculaire de 51,87 millions d’euros. Mais sont inscrits sur ce programme 45 millions d’euros en faveur de la Philharmonie de Paris, un projet dont la conduite n’a pas été sans heurt s’agissant de la participation de l’État et dont le budget, partagé avec la Ville de Paris et la région Ile-de-France, s’élève à 336,5 millions d’euros.
Si l’on déduit le montant dévolu à cette opération exceptionnelle, la hausse n’atteint plus que 6,87 millions d’euros, desquels il faut encore déduire 5,07 millions d’euros résultant d’opérations de périmètre : 4,84 millions d’euros ont été transférés du programme 175 « patrimoines » vers le programme 131 au titre de la subvention de fonctionnement et d’équipement courant de l’Institut de recherche et coordination acoustique/musique (IRCAM) ; s’y sont ajoutés 240 000 euros de complément de dotation en provenance du programme 224.
La hausse n’est donc plus que de 1,8 million d’euros, soit 0,2 %, c’est-à-dire une baisse en euros courants.
Les crédits de paiement affectés à l’action « soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant » augmentent, à hauteur de 55 millions d’euros, du fait notamment des dépenses exceptionnelles et des effets de périmètre évoqués supra. En revanche, les autorisations d’engagement diminuent de 2,4 %.
Notons tout d’abord que le ministère se félicite d’un plan en faveur du spectacle vivant, annoncé par le ministre de la culture en Avignon en juillet dernier. Les objectifs sont ambitieux :
« – réaffirmer la place centrale de l’art et des artistes, par un soutien accru à la création et aux créateurs, à l'émergence, à l’innovation et au secteur indépendant ;
– poursuivre la structuration de l'emploi, en accompagnant les parcours professionnels des artistes, et en veillant à stabiliser et à conforter les conditions dans lesquelles ils exercent leur activité ;
– renforcer l’irrigation des territoires par l’affirmation des missions territoriales des labels et réseaux, et par la mise en œuvre d’une politique d’itinérance et de reprises en faveur notamment des territoires ruraux, dans un esprit de partage avec tous les publics ;
– consolider la présence européenne et internationale, par le déploiement de bureaux spécialisés à l’étranger et la constitution de pôles européens de production. »
Mais on peut se demander si l’on peut encore qualifier de « plan » un agrégat de mesures disparates dotées d’une enveloppe dérisoire de 3,5 millions d’euros qui représente, sur un total de moyens consacrés au spectacle vivant de 718 millions d’euros, un coup de pouce de 0,5 %. Cette enveloppe se répartit entre 1,5 million d’euros de crédits centraux et 2 millions d’euros de crédits déconcentrés.
S’agissant des crédits centraux, aucun détail ne figure dans le projet annuel de performances sur l’emploi de ces fonds. Il est seulement fait mention du renforcement du dispositif des bureaux spécialisés à l’étranger, « afin de mieux diffuser les projets des artistes français en Europe et dans le monde », auquel seront consacrés 100 000 euros au titre de ce plan. Le dossier de presse du ministère fait bien état d’un fonds de soutien à l’innovation « destiné à mieux accompagner les ensembles musicaux et les compagnies émergentes », qui figurait parmi les dix mesures annoncées dans le cadre du plan de soutien, mais on n’en retrouve pas trace dans le projet annuel de performances.
S’agissant des crédits déconcentrés :
– 0,9 million d’euros seraient affectés aux scènes nationales ;
– 0,2 million d’euros au réseau de la danse en région ;
– 0,2 million d’euros aux pôles nationaux des arts du cirque (PNAC) et aux centres nationaux des arts de la rue (CNAR). Soulignons le paradoxe qui consiste par ailleurs à baisser de 700 000 euros la subvention aux CNAR ;
– 0,7 million d’euros aux musiques actuelles, les crédits du plan en faveur du spectacle vivant venant en fait financer des actions inscrites dans un autre plan, le plan de soutien aux musiques actuelles, annoncé en avril 2011 au Printemps de Bourges.
S’agissant des établissements publics nationaux de spectacle vivant, les subventions pour charges de service public diminuent de 3 millions d’euros par rapport au projet de loi de finances pour 2011 : la Comédie française perd 600 000 euros, le Théâtre national de Chaillot 1,2 million et l’Opéra de Paris 1 million. Les autres opérateurs voient leur dotation strictement reconduite, ce qui était déjà le cas l’année précédente. Parler, comme le fait le ministère dans son dossier de presse, de « stabilité remarquable » est donc inexact.
Pour ce qui concerne les investissements, la hausse est de 3,7 millions d’euros, afin de financer la rénovation de l’Opéra comique et la restructuration du Théâtre de Chaillot. Les autorisations d’engagement connaissent en revanche une baisse brutale, passant de 21,9 millions d’euros inscrits au projet de loi de finances pour 2011 à 5,3 millions d’euros.
S’agissant des crédits d’intervention, les crédits centraux de fonctionnement augmentent de 6 millions d’euros, mais il faut en retrancher 4,86, du fait des opérations de périmètre susmentionnées : 4,62 millions d’euros ont été transférés du programme 175 « patrimoines » vers le programme 131 au titre de la subvention de fonctionnement et d’équipement courant de l’Institut de recherche et coordination acoustique/musique (IRCAM), ainsi que 240 000 euros de complément de dotation en provenance du programme 224. Le solde bénéficie principalement aux aides à la création et aux nouvelles écritures, ainsi que plus marginalement aux institutions et lieux de création et de diffusion.
Les crédits centraux d’investissement augmentent à hauteur de la dotation en faveur de la Philharmonie de Paris et d’une mesure de périmètre s’élevant à 457 000 euros, correspondant à un transfert du programme 175 en faveur de l’IRCAM. Les autres dotations font l’objet d’une stricte reconduction.
Les crédits déconcentrés d’investissement sont reconduits quasiment à l’identique. Les crédits déconcentrés de fonctionnement augmentent de 2,5 millions d’euros, ainsi que le nombre des bénéficiaires, qui passe de 1954 à 2006.
Les variations constatées globalement par labels ou réseaux sont faibles au regard des montants en cause, mais un phénomène de « redéploiement » de crédits s’opère au détriment de certains. Les crédits sur le secteur de la musique connaissent à la fois des baisses fortes pour les orchestres et ensembles musicaux et les festivals et une hausse notable pour les SMAC et les « autres lieux de musiques » qui comportent aussi des lieux de musique actuelle ; les compagnies conventionnées accusent une perte de 5,4 millions, tandis que les équipes non conventionnées sont augmentées de 3,4 millions.
On relèvera plus précisément que :
– les crédits des scènes conventionnées baissent de 250 000 euros avec 7 bénéficiaires de moins (111 en 2012, contre 118 en 2011) ! Notons que la ligne « scènes conventionnées » ne figure dans le projet annuel de performances au titre des « institutions labellisées », mais dans la liste des « aides aux lieux hors réseaux et labels », ce qui est d’autant plus inquiétant que, dans le PAP, une mise à jour de la circulaire « Trautmann » du 5 mai 1999, relative au programme des scènes conventionnées, est annoncée en commentaires. De ce fait, on est amené à se demander quelles sont les dispositions prévues.
– pour les équipes conventionnées, on constate une baisse importante de 5,4 millions d’euros pour un nombre de structures aidées quasi identique (424, soit une de plus qu’en 2011), mais aussi une augmentation du montant minimum attribué à un bénéficiaire. Pour les équipes conventionnées théâtre, la baisse atteint 2,7 millions. Elle est de 1,3 million pour les compagnies conventionnées de danse et de 1,4 million pour les ensembles musicaux ;
– pour les équipes non conventionnées, les crédits augmentent de 3,4 millions d’euros avec un nombre de bénéficiaires en légère augmentation (15 de plus en 2012). 1,2 million de plus est affecté aux compagnies de théâtre, arts de la rue, cirque, marionnettes ; 500 000 euros aux ensembles musicaux et 1,7 million aux compagnies chorégraphiques.
Une aide est clairement identifiée dans le PAP, alors qu’elle n’apparaissait pas les années précédentes : l’aide aux résidences, dotée de 2,16 millions pour 68 bénéficiaires
On constate donc un « redéploiement » entre les conventions et les aides au projet et à la résidence : les compagnies conventionnées sont plus ancrées dans les territoires et développent souvent mieux le volume d’emploi artistique dans la durée ; quand elles sont privées de leur conventionnement ou que le montant de celui-ci baisse du jour au lendemain, c’est évidemment leur activité et les emplois induits qui sont mis à mal !
On notera enfin une augmentation importante du nombre de festivals soutenus, mais avec une réduction forte de 858 000 euros environ de crédits alloués : les festivals de théâtre enregistrent une baisse de 300 000 euros, alors que le nombre de bénéficiaires est multiplié par trois. La baisse pour les festivals de musique atteint près de 700 000 euros ! Par ailleurs, alors qu’une forte baisse du nombre de bénéficiaires avait été constatée en 2011, ce nombre augmente en 2012 : la baisse des crédits est d’autant plus inexplicable au regard de l’extension de ces soutiens à 91 festivals nouveaux.
Les crédits de paiement diminuent de 4,5 millions d’euros, et les autorisations d’engagement de 1,2 million d’euros. Cette diminution s’explique par l’achèvement de l’opération d’investissement au Palais de Tokyo : 13 millions d’euros de crédits de paiement étaient inscrits au titre des dépenses d’investissement dans le projet de loi de finances pour 2011, chiffre qui s’élève cette année à 5,4 millions.
Les dépenses d’intervention augmentent de 6 millions d’euros, hausse qui bénéficie principalement aux crédits centraux du fait de l’inscription de 1,5 million supplémentaire, par rapport au budget de 2011, au titre du soutien à la société gestionnaire du Palais de Tokyo, qui rouvrira en 2012. Ces crédits supplémentaires doivent permettre de prendre en compte l’impact des travaux de restructuration et de l’élargissement de la mission de cette structure.
0,25 million d’euros sont également inscrits au titre du plan photo en crédits centraux, une somme identique abondant les crédits déconcentrés. Enfin, la hausse des dépenses d’intervention doit être relativisée au regard du transfert de 2 millions d’euros au titre de la commande publique, crédits inscrits auparavant en dépenses d’investissement. On constate par ailleurs une baisse de 0,25 million d’euros entre les projets de loi de finances pour 2011 et 2012 à l’occasion de ce transfert.
Les crédits déconcentrés augmentent, tant en fonctionnement, à hauteur de 2 millions d’euros, qu’en investissement, à hauteur de 3 millions d’euros. Les principaux bénéficiaires en sont les Fonds régionaux d’art contemporain (FRAC), dont la dotation de fonctionnement augmente de 700 000 euros. 2,19 millions d’euros, soit une somme identique à celle de 2011, seront consacrés aux acquisitions des FRAC. Les crédits d’investissement permettront également d’accompagner le développement des FRAC de nouvelle génération, qui se traduit par la réalisation de six nouveaux équipements. Une partie de ces opérations est menée dans le cadre des contrats de plan État-régions, représentant 5,64 millions d’euros de crédits de paiement.
S’agissant des dépenses fiscales associées au programme, le crédit d’impôt pour les dépenses de production de cinéma devrait représenter en 2011, pour les films agréés en 2010, 58,3 millions d’euros. Ce coût devrait s’élever à 48,7 millions d’euros pour le crédit d’impôt audiovisuel, au titre des programmes agréés en 2010. Par ailleurs, la loi de finances pour 2009 a instauré un crédit d’impôt international au profit des entreprises de production exécutive cinématographique ou audiovisuelle soumises à l’impôt sur les sociétés, au titre de certaines dépenses engagées dans le cadre d’œuvres produites par un producteur étranger et tournées en France. La dépense fiscale 2011, relative aux œuvres ayant bénéficié du crédit d’impôt international en 2010, est estimée à 7,3 millions d’euros.
Enfin, il convient de mentionner les sociétés de financement de l’industrie cinématographique et de l’audiovisuel (SOFICA), qui sont des sociétés d’investissement dont l’objet est de collecter des fonds privés consacrés exclusivement au financement de la production cinématographique et audiovisuelle. Ces sociétés sont créées soit à l’initiative de professionnels du cinéma et de l’audiovisuel, soit à celle d’opérateurs du secteur bancaire et financier. Les souscriptions au capital des SOFICA ouvrent droit à une réduction d’impôt plafonnée au taux de 36 % du montant souscrit, majoré dans certains cas à 43 %.
Les SOFICA sont agréées chaque année par le ministre du budget après avis du CNC. Une enveloppe maximale de collecte leur est allouée en fin d’année N à l’aune du bilan des investissements passés et des engagements pris pour l’année N+1. En 2010, l’enveloppe autorisée de collecte s’élevait à 63,07 millions d’euros, soit une dépense fiscale de 30,3 millions d’euros. À partir de la collecte 2011, la dépense fiscale est réduite en raison de la diminution de l’avantage fiscal de 48 à 43 % au maximum. Pour une collecte autorisée de 63,07 millions d’euros, la dépense s’élèvera à 27,1 millions d’euros.
Le rapport du comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales de juin 2011 a attribué à ces dispositifs les notes respectives de 2 et 3 (1).
Le dispositif des SOFICA devrait être reconduit, à la suite de l’adoption d’un amendement en première partie de la présente loi de finances, jusqu’en 2014.
Par ailleurs, une Étude comparative des systèmes d’incitation fiscale à la localisation de la production audiovisuelle et cinématographique du CNC, publiée en septembre 2011, met en évidence la dégradation de « l’avantage comparatif » des deux crédits d’impôts « nationaux » par rapport aux dispositifs qu’ils ont inspirés chez nos partenaires européens. Le rapporteur suivra avec intérêt les débats entre les professionnels et le CNC sur les moyens d’améliorer l’attractivité de ces incitations fiscales, notamment s’agissant de l’assiette des dépenses éligibles.
II.- TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DÉMOCRATISATION
DE LA CULTURE : UNE NOUVELLE BAISSE INQUIÉTANTE
QUI PÉNALISE L’ACCÈS À LA CULTURE
Les autorisations d’engagement inscrites sur ce programme diminuent fortement de 4,9 %, tandis que les crédits de paiement, hors dépenses de personnel, diminuent de 0,7 %. Rappelons que pour 2011, les crédits avaient déjà connu, hors dépenses de personnel, une baisse importante de 7,57 %, ramenée à 1,44 % en neutralisant l’effet de débudgétisation à destination du Centre national du cinéma et de l’image animée.
Le programme comporte une action dédiée aux fonctions de soutien. Les dépenses de fonctionnement baissent de 2 millions d’euros, la paupérisation du ministère étant présentée comme le succès d’une gestion efficiente…
Notons par ailleurs une pratique peu orthodoxe, qui s’est installée à la faveur d’importants changements de maquette budgétaire dans le projet de loi de finances pour 2011 et qui est passée inaperçue : elle consiste à inscrire l’ensemble des dépenses de personnel du ministère sur le programme 224. Non seulement ces dépenses ne sont pas ventilées par programme au sein de la mission, mais elles ne sont pas non plus réparties entre la mission médias et la mission culture, cette dernière supportant l’ensemble des crédits du titre II pour les deux missions. Sachant que la mission constitue l’unité de vote dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances, on ne peut que s’étonner d’une pratique qui restreint à ce point l’exercice du droit d’amendement. Une telle présentation prive également les responsables de programme de toute marge de manœuvre dans la gestion des effectifs, même si cette marge de manœuvre est déjà fortement limitée par la loi organique relative aux lois de finances (2).
En tout état de cause, les effectifs du ministère continuent de décroître de 110 ETPT. On aimerait savoir quels principes orientent les arbitrages du ministère dans cette gestion de la pénurie, s’il privilégie l’administration centrale ou déconcentrée, s’il sanctuarise telle ou telle direction. La présentation du budget entretient à cet égard une confusion totale.
Enfin, une lecture minutieuse du projet annuel de performances permet de constater que 260 550 euros de crédits de paiement, auparavant consacrés au fonctionnement de feu le Conseil de la création artistique et auparavant inscrits au programme 129 « coordination du travail gouvernemental », sont transférés à l’action n° 7 « fonctions de soutien du ministère » du présent programme, et que 4 ETPT soient également réintégrés à ce titre dans les effectifs du ministère, pour un montant de 392 788 euros.
Les crédits en faveur de l’enseignement supérieur atteignent par ailleurs 226,5 millions d’euros, soit une hausse de 1,4 million. Les subventions pour charge de service public versées aux établissements publics d’enseignement supérieur s’élèvent à 137,2 millions d’euros, soit une hausse de 2 millions d’euros. Les dépenses d’investissement augmentent de 2,4 millions d’euros. L’essentiel de cette hausse concerne les travaux de mise en accessibilité des établissements d’enseignement supérieur aux personnes en situation de handicap et les travaux engagés dans les écoles du spectacle vivant. Les crédits destinés aux écoles d’art en région sont reconduits, et les crédits déconcentrés d’investissement augmentent, notamment pour financer les projets inscrits aux contrats de plan État-régions. On peut également noter la hausse des crédits, à hauteur d’un million d’euros, en faveur des structures de formation du spectacle vivant.
Les crédits en faveur des établissements d’enseignement spécialisé, c’est-à-dire les conservatoires à rayonnement régional, baissent quant à eux de 230 000 euros par rapport au projet de loi de finances pour 2011, et s’établissent à 29,228 millions d’euros.
Les crédits destinés à l’action culturelle internationale sont quasiment stables.
S’agissant de la démocratisation culturelle, le dossier de presse du ministère se félicite d’un soutien financier qui traduit la volonté du gouvernement de conforter cet axe fort de la politique culturelle. En réalité, le chiffre de 75,7 millions d’euros de crédits de paiement doit être considéré avec précaution : il recouvre en réalité les crédits dévolus à deux actions distinctes, l’action n° 4 « action en faveur de l’accès à la culture » et l’action n° 2 « soutien à l’éducation artistique et culturelle ».
Les crédits de paiement inscrits à l’action n° 2 augmentent de 450 000 euros, soit 1,4 %, mais les autorisations d’engagement diminuent de 0,1 %.
En revanche, les crédits inscrits à l’action n° 4 s’élèvent à 43,82 millions d’euros, en baisse de 3,7 %, soit 1,7 million d’euros. Cette baisse succède à celle de 15,72 % constatée en 2011, cette diminution s’élevant à 9,3 % en tenant compte des débudgétisations opérées en direction du CNC. Une fois encore, cette action sert de variable d’ajustement en dépit des objectifs affichés d’accès à la culture pour tous. Se trouvent donc fragilisées toutes les actions transversales en direction des publics cible, des pratiques amateurs, de la politique de la ville, etc.
Les actions territoriales sont touchées de plein fouet, les crédits destinés à rééquilibrer l’action du ministère vers les territoires éloignés de la culture diminuant de 4 millions d’euros. Notons toutefois que tous les territoires ne sont pas logés à la même enseigne, puisque 1,38 million d’euros de crédits nouveaux sera alloué au financement de Marseille 2013 capitale européenne de la culture.
DEUXIÈME PARTIE : LE FINANCEMENT PUBLIC DU CINÉMA ET DE L’AUDIOVISUEL PAR LE CNC :
UN MODÈLE À PRÉSERVER.
Notre pays dispose depuis 1946 d’un système de financement du cinéma et de la production audiovisuelle exemplaire qui a su s’adapter aux évolutions de la création et de la diffusion et a permis le maintien de la diversité culturelle sur nos écrans.
Ce système repose sur un principe, la diffusion finance la création, qui se décline de deux manières : il comporte d’une part une dimension fiscale, des prélèvements étant réalisés sur les recettes des diffuseurs et affectés à un compte de soutien géré par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), d’autre part une dimension réglementaire comportant des obligations de financement et de diffusion à la charge des chaînes de télévision.
Il s’agit donc d’un système vertueux, puisque ce n’est pas le contribuable qui finance le cinéma et l’audiovisuel, mais le spectateur. Le budget de l’État n’est pas sollicité et le CNC ne reçoit aucune subvention.
Il s’agit également d’un système redistributif et mutualiste, car la contribution versée par les diffuseurs finance la production des œuvres et permet également d’aider l’industrie technique, de soutenir les distributeurs et les exploitants. Chaque acteur de la filière bénéficie ainsi d’un retour sur le prélèvement de richesse effectué, soit directement par le versement d’aides, soit indirectement par la possibilité de diffuser des contenus attractifs dans un réseau de salles extrêmement dense.
Le rapporteur a souhaité consacrer la partie thématique de son avis au premier des deux piliers du soutien à la création cinématographique et audiovisuelle, c’est-à-dire le fonds de soutien géré par le CNC, qui fête cette année son 65e anniversaire, mais qui subit également depuis l’an dernier des attaques susceptibles de le fragiliser.
I.- UN DISPOSITIF VERTUEUX QUI A FAIT SES PREUVES
Le système redistributif et mutualiste du fonds de soutien géré par le CNC a fait ses preuves et a notamment permis à la France, depuis 1946, de conserver un cinéma national quand tant d’autres, à commencer par le cinéma italien, se sont vus concurrencer par les productions américaines et ont progressivement décliné.
Le système au centre duquel se trouve le CNC repose sur un prélèvement fiscal effectué sur les diffuseurs, affecté au financement d’un fonds de soutien de la création.
L’architecture de cette fiscalité a évolué afin de s’adapter à l’élargissement du nombre et de la nature des fenêtres de diffusion.
La taxe spéciale additionnelle (TSA) a ainsi été créée en 1948 comme fondement du financement du système d’aide à l’industrie du cinéma. Elle est assise sur le prix des entrées au cinéma et donc directement liée aux évolutions du secteur. Son taux est de 10,72 % (majoré de 50 %, soit un taux de 16,08 %, pour les films pornographiques ou d’incitation à la violence). Notons que dans la mesure où elle est due sur l’ensemble des entrées en salles, alors que le soutien qu’elle rend possible n’est ouvert qu’aux seules entreprises établies en France, la TSA permet en fait de faire contribuer les films américains au financement de la création française.
La « taxe vidéo » est assise sur le chiffre d’affaires de la vente et de la location de vidéos physiques depuis sa création en 1993, ainsi que sur le chiffre d’affaires de la vidéo à la demande (VàD) depuis 2003. Le taux est de 2 %, une taxe majorée à 10 % s’appliquant aux œuvres pornographiques ou d’incitation à la violence.
La pratique télévisuelle se substituant pour partie à la fréquentation des salles de cinéma, une « taxe sur les services de télévision » (TST) a été créée en 1986. La taxe « éditeurs », c’est-à-dire celle applicable aux chaînes, est assise sur les recettes de publicité et de parrainage (déduction faite de 4 % pour frais de régie), celles issues des appels surtaxés et SMS, sur la redevance audiovisuelle et, depuis 2009, sur les autres ressources publiques (notamment les dotations budgétaires). Le taux de la taxe est de 5,5 % de l’assiette imposable au-delà d’une franchise de 11 millions d’euros. Une majoration de 0,2 point s’applique aux chaînes diffusées en haute définition, et une majoration de 0,1 point à la diffusion en télévision mobile personnelle.
Enfin, une part complémentaire à la TST a été créée en 2007, à la suite d’un vote unanime du Parlement, payée par les distributeurs de services de télévision, assise sur les abonnements « classiques », dont les principaux redevables sont Canal + et Numéricable, ainsi que sur les offres des fournisseurs d’accès à internet et des opérateurs de téléphonie mobile, lorsqu’elles incluent des services de télévision. L’assiette de la taxe a été modifiée dans le cadre de la loi de finances pour 2011.
Elle est composée des abonnements et autres sommes acquittés par les usagers en rémunération d'un ou plusieurs services de télévision, ainsi que des abonnements à des offres composites pour un prix forfaitaire incluant des services de télévision. Le produit de ces abonnements et autres sommes fait l’objet d’une déduction de 10 %. Lorsqu’une offre composite inclut également, pour un prix forfaitaire, un accès à des services de communication au public en ligne ou à des services de téléphonie, cette déduction est portée à 55 %. Le taux de la taxe est progressif, de 0,5 % à 4,5 % selon 9 tranches d’imposition au-delà d’une franchise de 10 millions d’euros. Une majoration de 2,2 % sur la dernière tranche distributeurs est par ailleurs prévue pour les éditeurs qui s’auto-distribuent.
Un compte spécial du Trésor retraçant les opérations de soutien avait été créé par la loi de finances pour 1960. Transformé par la suite en compte d’affectation spéciale, il a été supprimé et depuis le 1er janvier 2009, le produit des trois taxes finançant le fonds de soutien au cinéma, à l’audiovisuel et au multimédia est directement affecté au CNC. En outre, depuis le 1er janvier 2007 pour la TSA et le 1er janvier 2010 pour la TST, le CNC assure le contrôle et le recouvrement auparavant exercés par la direction générale des finances publiques, en contrepartie du prélèvement de frais de gestion. Le rapport d’octobre 2011 de la Mission d’évaluation et de contrôle de notre Assemblée (3) évalue l’économie réalisée grâce à la gestion directe du CNC à 10 millions d’euros.
Estimation des recettes pour 2012
Recettes du compte de soutien |
Exécution 2010 |
Budget 2011 |
Prévisions pour 2012 |
TSA |
146 343 408 € |
127 870 000 € |
130 013 000 € |
TST |
574 754 782 € |
583 346 000 € |
539 004 000 € |
Taxe « vidéo » |
33 065 975 € |
38 517 000 € |
31 733 000 € |
Autres recettes |
228 034 € |
50 000 € |
50 000 € |
Totaux |
754 392 200 € |
749 783 000 € |
700 800 000 € |
b) Le fonds de soutien
Ces taxes affectées financent un fonds de soutien au cinéma, à l’audiovisuel et au multimédia, les soutiens poursuivant deux finalités générales :
– le soutien à caractère économique, grâce essentiellement aux aides dites « automatiques », générées du fait de la diffusion des œuvres, et mobilisées au stade de la production, de la distribution et de la diffusion d’œuvres nouvelles ;
– la contribution à la diversité et au renouvellement de la création et de la diffusion cinématographiques, objectif principal des aides financières dites « sélectives », octroyées au cas par cas sur le fondement de critères artistiques et culturels. C’est à cette catégorie que se rattache la fameuse avance sur recettes, créée en 1960, destinée à favoriser la réalisation de premiers films et plus généralement à soutenir des films indépendants, audacieux au regard des normes du marché et qui ne peut sans aide publique trouver son équilibre financier. Il s’agit d’une aide qui repose pour partie sur une subvention et pour partie sur un prêt sans intérêt remboursable. Les projets sont sélectionnés par des commissions d’experts.
Ces deux finalités se déclinent dans les secteurs du cinéma, de l’audiovisuel et la vidéo, selon des proportions différentes en fonction des caractéristiques de ces secteurs. Ainsi, l’équilibre entre soutien automatique et soutien sélectif diffère selon qu’il s’agit du cinéma ou de l’audiovisuel : dans le cinéma, le soutien automatique se situe en moyenne aux alentours de 60 %, le soutien sélectif ayant eu tendance à augmenter au cours des dernières années. Le soutien automatique est plus important dans le domaine de l’audiovisuel, s’élevant à environ 80 %. Ces différences s’expliquent par le fait que le marché de la production cinématographique repose sur l’offre, qu’il faut contribuer à faire émerger, tandis que le marché de l’audiovisuel est un marché de commande.
En outre, le CNC a développé des dispositifs transversaux destinés à accompagner l’émergence d’usages culturels spécifiques aux nouvelles technologies. Il s’agit notamment du soutien aux industries techniques audiovisuelles, à la recherche et au développement en audiovisuel et multimédias, à la création artistique multimédia ou bien encore au jeu vidéo.
Le soutien automatique : un soutien vertueux au réinvestissement corrélé
aux évolutions du marché de la diffusion et redistributif
Contrairement à ce que leur dénomination pourrait laisser supposer, les aides automatiques ne constituent en aucune manière une « rente », pour reprendre l’expression employée par le rapport de la Mission d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale dans son rapport du mois d’octobre sur Le financement des politiques culturelles de l’État par des ressources affectées.
Ce sont des subventions de réinvestissement : la diffusion des œuvres génère un soutien automatique selon des règles propres à chaque compartiment du compte de soutien, soutien qui peut être mobilisé par le bénéficiaire pendant un certain laps de temps.
Ce sont des soutiens liés aux recettes perçues sur les diffuseurs et donc corrélés à l’évolution du marché : ainsi, le montant du soutien automatique en faveur du cinéma, qu’il s’agisse de la production, de la distribution ou de l’exploitation, est déterminé par application de coefficients au produit de la TSA, appelés « taux de retour », coefficients qui peuvent être adaptés en cas de ralentissement du marché et de baisse des entrées en salles, comme ce fut le cas en 2005 ; le soutien automatique à l’audiovisuel est calculé en fonction de la durée de diffusion de l’œuvre, à laquelle est appliqué un premier coefficient en fonction du genre soutenu (animation, fiction, documentaire de création ou spectacle vivant), puis un coefficient appelé le « point minute », ajustable en fonction des ressources du CNC ; le soutien automatique est attribué à un éditeur vidéo au prorata du chiffre d'affaires qu'il a réalisé sur des « films générateurs », chiffre d’affaires qui constitue également l’assiette de la « taxe vidéo ».
Ce sont des aides redistributives : cette redistribution s’opère de l’amont vers l’aval jusqu’au producteur ; dans le domaine du soutien au cinéma, la redistribution est horizontale, puisque les taux de retour sont dégressifs en fonction du succès du film en salles. Les grosses productions à grand succès financent ainsi les « petits » acteurs de la production, de la distribution ou de l’exploitation : cette solidarité contribue au renouvellement de la création et au maintien d’un vivier de petits producteurs. Les taux de retour ont d’ailleurs été modifiés en 2009 dans le secteur de la production afin de renforcer leur caractère redistributif au profit des petits films.
La logique de ces aides est donc une logique « industrielle », irremplaçable dans un contexte de raréfaction du crédit bancaire, ainsi que l’a souligné M. Marin Karmitz au cours de son audition. Mais cela ne veut pas dire qu’elles ne contribuent pas à la diversité de la création et au maintien d’un réseau de producteurs indépendants : on en veut pour preuve le soutien automatique dont bénéficie par exemple le producteur indépendant du film à succès « Le nom des gens », et qui lui est indispensable pour financer son prochain film.
L’équilibre avec le soutien sélectif fait l’objet d’un relatif consensus, qui satisfait les professionnels. Dans le cinéma, ce consensus traduit la légitimité qu’une solidarité intelligente entre grands et petits acteurs confère à ce système qualifié par les professionnels eux-mêmes « d’épargne forcée ».
Schéma général des taxes affectées au CNC
et du fonctionnement du fonds de soutien en 2011
Source : CNC.
2. Des objectifs atteints : la France a un cinéma national et une production audiovisuelle dynamique.
S’agissant du cinéma, le bilan de cet écosystème est extrêmement positif : la mission confiée à l’Inspection générale des finances et à l’Inspection générale des affaires culturelles sur les besoins de financement et les ressources du CNC, dont les conclusions ont été rendues en mai 2011 et communiquées au rapporteur, juge pertinente l’intervention publique dans le domaine du cinéma, notamment au regard de quatre objectifs.
Tout d’abord, la sauvegarde de la diversité suppose le maintien d’un tissu de sociétés de production indépendantes. Le rapport juge notamment que « le faible écart entre le nombre de films d’initiative française sortis dans l’année (203 en 2010) et le nombre de sociétés de production actives (175 en 2010) est un des éléments qui témoigne de l’absence de concentration dans le secteur ».
Ensuite, le soutien au cinéma permet l’émergence de nouveaux talents : le nombre de premiers films s’élève à 77 en 2010 et les deuxièmes films à 33, niveaux stables depuis cinq ans. Selon une étude réalisée par le CNC et citée dans le rapport, entre 1997 et 2006, 20,1 % des réalisateurs de premier film réalisent un deuxième film.
Le bilan est également satisfaisant au regard de l’objectif de sauvegarde de la part des films français dans les sorties en salles : en nombre de films, la part des films français dans le total des films sortis est globalement stable entre 40 et 46 %. Appréciée en pourcentage du total des entrées, la fréquentation en salles de films d’initiative française représente 36,8 % en 2009, contre 49,7 % pour le cinéma américain. Jusqu’en 1987, la part française n’était jamais inférieure à 43 %. Certes, la part américaine des films a significativement augmenté dans les années 1980 sans que le cinéma français ne parvienne à combler son retard. Mais comparée aux autres pays européens, la part de marché des films nationaux est supérieure en France.
Par ailleurs, le maintien d’un tissu significatif de salles de cinéma est déterminant. Le CNC a d’ailleurs augmenté les soutiens consacrés au maintien d’un maillage fin du territoire : en 1992, les soutiens à l’exploitation représentaient 40 millions d’euros. En 2011, ils se sont élevés à plus de 80 millions. Sur une longue période, le nombre d’écrans se maintient à un bon niveau, même s’il a temporairement chuté durant les années 1990. Le nombre d’écrans est même supérieur à celui d’il y a 35 ans. En France, 5 470 salles étaient actives en 2009, réparties dans un peu plus de 2000 établissements.
Enfin, le Fonds Sud (4) a bénéficié, en plus de 25 ans, à plus de 500 projets provenant de plus de 70 pays, pour un total de 55 millions d’euros. Bon nombre de ces films ont été remarqués dans les festivals de cinéma internationaux tel « Oncle Boonmee » du réalisateur thaïlandais, Apichatpong Weerasethakul, Palme d’Or au festival de Cannes en 2010.
S’agissant de l’audiovisuel, le CNC a atteint son objectif d’accompagnement de l’explosion des programmes dans les années 1990. En passant de 526 heures aidées en 1986 à 4 249 heures en 2009, le CNC s’est inscrit dans la dynamique du secteur qui a vu l’émergence continue de nouveaux diffuseurs.
En revanche, ce bilan positif doit être nuancé au regard notamment de la piètre compétitivité des œuvres françaises de fiction sur le marché national, comme sur le marché international. Il s’agit du genre le plus cher et le plus demandé par les chaînes, dans le financement duquel elles conservent une place prépondérante et tendanciellement croissante. Après avoir connu une embellie dans les années 1990, la fiction française est aujourd’hui en crise.
Comme le souligne le rapport de la mission Chevallier sur la fiction française (5), le premier signe de cette crise est le faible volume de fictions françaises produit. En 2009, 752 heures ont été produites, soit une baisse de 17,6 % par rapport à 2008 et le plus bas niveau depuis 2004. L’investissement des chaînes a également diminué de 6,7 % par rapport à 2008, s’établissant à 493,4 millions d’euros.
Pourtant, les fictions télévisées et tout particulièrement les séries, n’ont jamais été aussi populaires dans notre pays. Elles ont réalisé, en 2009, 69 des meilleures audiences de la télévision, toutes chaînes confondues. Mais pour répondre à cette attente, les chaînes françaises préfèrent miser sur les séries américaines ; le public français plébiscite en effet les séries anglo-saxonnes : sur les 10 premières audiences de fictions, toutes chaînes confondues, en 2009, seules 4 fictions françaises apparaissent — et plutôt en fin du classement : Joséphine ange gardien (4e), Julie Lescaut (7e), Avalanche (9e) et Père et Maire (10e).
Cette situation semble spécifique à la France : selon une étude du CSA sur la place de la fiction américaine dans les grands pays européens, citée par le rapport de l’IGF et de l’IGAC mentionné supra, les séries nationales sont en tête des meilleures audiences du genre au Royaume-Uni, en Allemagne et en Italie. Au Royaume-Uni, où l’absence de la barrière de langue pourrait faciliter le succès des séries américaines, aucune n’apparaît dans les dix meilleures audiences.
La récente étude « Script series report » de Médiamétrie, menée dans onze territoires -Australie, Allemagne, Canada anglophone, Québec, Espagne, États-Unis, France, Italie, Royaume-Uni, Suède, Turquie-, entre septembre 2010 et juin 2011, confirme ce constat. Dans la plupart des pays, les fictions américaines sont présentes dans le classement de tête des meilleures audiences mais y sont moins nombreuses que les fictions nationales, qui se situent souvent au sommet de ce classement.
Au Royaume-Uni et en Italie, les quinze séries qui rassemblent le plus de téléspectateurs, sont exclusivement nationales. Elles dominent largement en Allemagne ou en Espagne. En France en revanche, c'est la série américaine "The Mentalist", diffusée par TF1, qui apparaît en tête du classement et sept des quinze séries les plus regardées sont américaines.
Le rapport Chevallier souligne également que « l’exception française est aussi celle du manque de diversité au niveau des formats produits : jusqu’en 2008, on avait pu remarquer une montée en puissance des séries de 26 minutes et de 52 minutes. Mais 2009 a vu le volume des premières redescendre à son plus bas niveau depuis 2006 et celui des secondes repasser en dessous de celui des unitaires. […] Le manque de séries, et notamment de soaps, pose un vrai problème en France pour la fidélisation du public domestique, mais aussi pour l’exportation : les ventes internationales de fictions françaises ont subi un recul de 19,4 % en 2009 pour atteindre 21,6 millions d’euros. ».
La poursuite de l’adaptation des interventions du Centre, en fonction des évolutions économiques et technologiques de la diffusion, a été rendue possible par une importante augmentation du rendement des taxes affectées au CNC.
Évolutions des taxes affectées au CNC
(en millions d’euros)
2009 |
2010 |
2011 | |||
Prévision |
Exécution |
Prévision |
Exécution |
Prévision | |
TSA |
120,61 |
127.89 |
121,35 |
146,34 |
127,87 |
TST |
390,47 |
451,02 |
422,3 |
574,75 |
583,3 |
Taxe vidéo |
29,17 |
32,9 |
32,16 |
33,06 |
38,5 |
Total |
540,6 |
611,9 |
575,87 |
754,4 |
749,78 |
Le rendement de la TSA s’explique en 2009 et 2010 par la conjugaison de deux facteurs : d’une part l’importante hausse de la fréquentation des salles, avec 196 millions d’entrée en 2009 et 210 millions en 2010, ainsi que la hausse du prix moyen du billet sous l’effet des « entrées en relief (3 D) », cette hausse atteignant 3 % en 2010.
La taxe vidéo et VàD a connu une évolution positive tant par la réforme de la chronologie des médias en 2009 que du fait de la légère croissance du marché de la vidéo physique portée par le développement du « Blu-Ray » et du dynamisme du marché de la VàD.
Mais l’augmentation des recettes du Centre tient surtout au dynamisme de la TST. Si ce dynamisme peut s’expliquer par le redressement des recettes publicitaires des chaînes en 2009, par rapport à une prévision réalisée en 2008 au plus fort de la crise, il tient surtout au fort rendement de la TST-distributeurs, instaurée en 2007.
À cet égard, il est utile de revenir sur les conditions dans lesquelles cette extension a été réalisée : l’assujettissement des fournisseurs d’accès à internet et des opérateurs mobiles a été instauré en contrepartie de la sécurisation du taux réduit de TVA sur au moins la moitié des abonnements à des offres composites.
Dans le cas de ces offres incluant l’accès à internet, la téléphonie fixe et la télévision, l’article 286 bis du code général des impôts prévoyait que la fourniture de services de télévision permettait d’appliquer un taux réduit de TVA sur la part de l’abonnement correspondante : chaque fournisseur devait ventiler son chiffre d’affaires entre chaque catégorie d’opérations, ventilation effectuée sur le fondement de critères économiques et techniques.
La définition de critères incontestables, au cas par cas, s’étant avérée délicate, la loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur a sécurisé ce dispositif : elle dispose que « lorsque ces services sont compris dans une offre composite pour un prix forfaitaire comprenant d’autres services fournis par voie électronique, le taux réduit s’applique à hauteur de 50 % de ce prix ». L’administration fiscale a par la suite précisé que cette règle ne faisait pas obstacle à ce qu’un opérateur procède à une ventilation différente à condition d’être en mesure de montrer qu’elle reflète mieux la réalité économique de la prestation. C’est ainsi que Free a pu continuer à bénéficier d’un taux de TVA réduit sur 56 % du prix de ses abonnements aux offres composites.
En contrepartie de la consolidation du taux réduit de TVA sur les offres de télévision intégrées aux offres composites, le Parlement a adopté à l’unanimité le principe d’une extension de la TST aux distributeurs de services de télévision. Elle se justifiait par l’assujettissement de ces nouveaux diffuseurs au principe de droit commun qui a été présenté infra, selon lequel les diffuseurs financent la création. Jusqu’au 1er janvier 2011, l’assiette de la taxe correspondait aux abonnements et autres sommes acquittées par les usagers en rémunération d’un ou de plusieurs services de télévision, après déduction de 10 % ; elle était identique à celle à laquelle était appliqué le taux de TVA réduit.
Le rendement de cette nouvelle TST-distributeurs s’est révélé extrêmement dynamique, puisque la part de recettes supplémentaires pour le Centre est passée de 43 millions d’euros en 2008 à 140 millions d’euros en 2010.
Ce dynamisme résultait du succès des offres composites mais aussi, pour reprendre les termes du rapport de l’IGF et de l’IGAC précité, « du positionnement des opérateurs cherchant à soumettre une part toujours plus importante de leurs offres au taux réduit de TVA ». La dépense fiscale liée à l’application de ce taux réduit avait ainsi atteint 1,3 milliard d’euros en 2010.
Cette augmentation des ressources a permis au CNC de poursuivre l’adaptation de ses missions aux évolutions économiques et technologiques des marchés de la diffusion.
Deux tiers des ressources dégagées ont été mobilisés pour couvrir une partie des besoins du Plan numérique. Ce plan répond à la mission patrimoniale du CNC, pour ce qui concerne l’aide à la numérisation des œuvres et plus particulièrement des œuvres dont la rentabilité n’est pas avérée mais qui présentent un intérêt artistique et culturel incontestable. De la même manière, le CNC joue pleinement son rôle en soutenant l’équipement numérique des petites salles et en leur permettant de ne pas être laissées de côté dans la révolution numérique en cours.
Le plan numérique 2010-2015
La révolution numérique est un enjeu stratégique pour toute la filière cinéma - audiovisuel. Le CNC a lancé en 2010 un plan pluriannuel ambitieux destiné à accompagner les professionnels dans les meilleures conditions tout en limitant au maximum la période de transition, la plus coûteuse et complexe : coûteuse pour les salles, qui doivent maintenir un double équipement, coûteuse pour les distributeurs, qui doivent prévoir des copies argentiques et des copies numériques, ce qui pénalise d’ailleurs particulièrement les « petits » films, comme l’a indiqué au rapporteur le Syndicat des réalisateurs de films lors de son audition. Ces coûts de transition pénalisent tout particulièrement les films d’auteurs.
Le plan repose d’une part sur un volet législatif. Ainsi, la loi n° 2010-1149 du 30 septembre 2010, relative à l’équipement numérique des salles, impose le principe des contributions des distributeurs et autres utilisateurs de l’équipement numérique et garantit que les conditions de négociation de celles-ci et de fixation de leurs montants ne nuisent ni à la liberté de programmation des exploitants, ni à la maîtrise des plans de sortie des distributeurs. Les négociations entre distributeurs et exploitants ont depuis lors été facilitées par les recommandations de bonnes pratiques émises par le comité de concertation pour la diffusion numérique en salles, instauré par la loi du 30 septembre 2010. Par ailleurs, la loi a mis en place un comité de suivi parlementaire composé de deux députés et de deux sénateurs, chargé d'évaluer son application et de s'assurer qu'elle répond aux exigences de diversité culturelle de l'offre cinématographique et d'aménagement culturel du territoire.
Le plan numérique s’appuie, d’autre part, sur des soutiens spécifiques, afin de permettre la prise en charge d’une grande partie du financement de la numérisation des salles de cinéma ainsi que des œuvres cinématographiques et audiovisuelles. Il inclut également des investissements en faveur de la conservation du patrimoine à l’heure du numérique.
Les soutiens financiers destinés aux salles reposent sur l’aide à l’équipement numérique des salles et sur l’accès facilité au crédit bancaire grâce à la garantie de l’IFCIC. L’aide sélective à la numérisation des salles, placée sous le régime communautaire de minimis, est destinée aux établissements de petite taille (3 écrans au maximum) qui ne sont pas, du fait de leur programmation, susceptibles de générer suffisamment de contributions des distributeurs pour couvrir au moins 75 % du coût de leurs investissements. Cette aide a déjà bénéficié, début septembre 2011, à près de 245 établissements, soit 331 salles. Elle est versée pour partie sous forme d’avance remboursable et pour partie sous forme de subvention. Des aides régionales complètent ce dispositif.
Par ailleurs, des études sont en cours concernant deux catégories d’établissements cinématographiques, qui devront faire l’objet d’aides spécifiques : les établissements dits « peu actifs » (programmant moins de 5 séances hebdomadaires sur l’année) et les circuits itinérants.
S’agissant des œuvres, le CNC souhaite accompagner les ayants droit dans une démarche de restauration, d’exploitation et de conservation des œuvres pour le futur, afin de favoriser leur accès par le public, dans toutes les formes actuelles et à venir de diffusion.
L’accord-cadre signé le 15 mai 2011 lors du festival de Cannes par le ministre de la culture et de la communication, le ministre chargé de l’industrie, le commissaire général à l’investissement (CGI) en charge du « grand emprunt » et les détenteurs des principaux catalogues, précise les modalités de financement de la numérisation des œuvres qui ont un potentiel commercial, dans le cadre du programme de financement des « investissements d’avenir ». Depuis lors, des négociations individuelles avec la Caisse des dépôts et consignations (CDC) ont été entamées afin de déterminer le volume de films concernés et le coût moyen de la numérisation.
Le CNC a vocation à compléter ces financements par un dispositif d’aide ciblé sur les films dont la rentabilité économique n’est pas avérée mais dont l’intérêt patrimonial est important, et en premier lieu les films de court-métrage ainsi que les films muets. L’aide du CNC, qui sera notifiée à la Commission européenne, sera accordée après avis d’une commission ad hoc.
Un inventaire national des œuvres, préalable indispensable aux travaux de numérisation des œuvres, a été engagé en septembre 2010 et se poursuivra dans les principaux laboratoires ainsi qu’aux archives françaises du film.
Un tiers des ressources supplémentaires a été utilisé pour adapter les modalités d’intervention du fonds de soutien, y compris en prenant en charge des dépenses assumées auparavant par le ministère de la culture et de la communication (cf. infra).
S’agissant du soutien automatique, une importante réforme est intervenue début 2011 dans le domaine de la production cinématographique. Elle vise, d’une part, à rendre ce soutien plus redistributif, en renforçant la solidarité entre les films à grand succès et les films plus difficiles et, d’autre part, à mieux reconnaître le rôle du producteur délégué. En outre, le soutien automatique audiovisuel est désormais ouvert à la production destinée exclusivement aux nouveaux supports (internet fixe et mobile) ou multi supports ; dans le cadre du plan d’investissement en faveur du numérique, la dotation du soutien automatique à la production audiovisuelle a été renforcée en 2011 pour accompagner le développement des programmes sur les réseaux numériques, notamment du fait de la montée en puissance des chaînes de la TNT qui multiplient la diffusion d’œuvres audiovisuelles et commencent à investir de manière conséquente dans des programmes de stock originaux, conformément à leurs nouvelles obligations.
S’agissant du soutien sélectif, une aide destinée aux auteurs et auteurs-réalisateurs pour la conception de projets a été mise en place en février 2011. Dans le cadre du plan de soutien conjoncturel à la production audiovisuelle, 7,3 millions d’euros issus de la réserve numérique constituée au bilan du CNC, ont été utilisés en 2010 pour renforcer les aides au réinvestissement complémentaire et le soutien au spectacle vivant. Ces aides ont été renforcées en 2011. L’avance sur recettes, aide la plus emblématique du CNC, a été sensiblement renforcée au cours des dernières années, son enveloppe augmentant de 11,5 %.
Les ressources supplémentaires ont également contribué, à la marge, à la couverture de dépenses de gestion, à hauteur de 11 millions d’euros en 2009 et de 15 millions d’euros en 2010, ainsi qu’à la constitution de réserves comptables.
Les réserves comptables du CNC
La trésorerie du CNC s’élevait, à la fin du mois d’août 2011, à 788 millions d’euros :
– 215 millions d’euros ont été provisionnés au titre de la réserve numérique, dont 120 pour la numérisation des salles, montants qui doivent être progressivement décaissés au fur et à mesure du déploiement du Plan numérique ;
– conformément aux recommandations prudentielles de la Cour des comptes et dans le cadre de la réforme budgétaire et comptable du Centre (6), les droits de tirage des professionnels au titre du soutien automatique ont été provisionnés à hauteur de 420 millions d’euros. Ces droits peuvent être exercés à tout moment, dans un délai de trois à dix ans selon les aides ;
– une réserve de solidarité pluriannuelle, correspondant environ au produit d’un mois de perception des taxes affectées au Centre, soit 56 millions d’euros, a été constituée afin de permettre la continuité des interventions du CNC en cas de décrochage brutal et inattendu des marchés ;
– 7 millions d’euros ont été provisionnés pour la réalisation de travaux immobiliers.
II.- UN SYSTÈME FRAGILISÉ AU MOMENT MÊME OÙ IL DEVRAIT ÊTRE CONFORTÉ
L’apparition de comportements d’optimisation fiscale de la part d’un certain nombre d’opérateurs a rendu nécessaire une réforme de la TST. Mais cette réforme attendue a été accompagnée d’un plafonnement des taxes affectées au CNC, le surplus devant revenir au budget de l’État, ce qui fragilise l’ensemble du système au moment même où il devrait être conforté.
Depuis le printemps de cette année, et à la suite de la suppression du taux réduit de TVA sur la part « télévision » des offres composites et de la réforme consécutive de la TST distributeurs, ces derniers ont tenté de minorer leur contribution au CNC par un contournement de la législation fiscale.
À la suite d’une mise en demeure adressée par la Commission européenne à la France en mars 2010, la loi de finances pour 2011 a supprimé le taux réduit de TVA applicable aux services de télévision distribués par les fournisseurs d’accès à internet dans le cadre d’une offre unique composite pour un prix forfaitaire, sauf si les droits de distribution des services de télévision ont été acquis en tout ou partie contre rémunération.
Le régime de la TST avait conséquemment été modifié et assis sur deux composantes : les abonnements à des services de télévision, après abattement de 10 %, et les abonnements à des offres composites, après abattement de 55 %.
Assiette de la TST sur les offres composites avant et après la loi de finances pour 2011
Assiette antérieure |
Nouvelle assiette | |
Base |
Part de l’offre correspondant aux services de télévision soumise au taux réduit de TVA (généralement 50 %) |
100 % du prix hors TVA de l’abonnement à l’offre composite |
Abattement |
10 % de la base |
55 % de la base |
Assiette finale |
45 % du prix de l’offre |
45 % du prix de l’offre. |
Source : rapport IGF/IGAC.
Comme déjà souligné, l’assiette de la TST distributeurs était identique à celle de la TVA à taux réduit. L’incitation à apprécier cette assiette de manière large, pour prétendre au bénéfice de ce taux réduit de TVA, ayant été supprimée, les opérateurs se sont repositionnés, ce qui a occasionné des effets collatéraux sur l’assiette de la TST.
Pour reprendre les termes du rapport de l’IGF et de l’IGAC, « les opérateurs de télécommunication n’ayant plus aucun avantage fiscal à inclure un service de télévision dans leurs offres de téléphonie, l’assiette de la TST devrait être aussi mécaniquement rétrécie qu’elle n’avait été artificiellement gonflée depuis trois ans ». Votre rapporteur avait d’ailleurs exprimé cette inquiétude lors des débats budgétaires de l’an passé.
De fait, Free, notamment, n’a pas tardé à proposer à scinder son offre triple play entre une offre « double play » comportant la téléphonie VOIP et internet pour 29,90 euros par mois et une option de services de télévision à 1,99 euro, réduisant d’autant l’assiette de la TST. Le CNC a évalué que la propagation de ce comportement d’optimisation fiscale à l’ensemble des opérateurs aurait pu coûter 140 millions d’euros.
À l’occasion de l’examen du projet de loi de finances rectificative de juillet 2011, le Gouvernement avait déposé un amendement réformant la TST devant notre Assemblée ; il avait été retiré, dans l’attente de la remise du rapport de la Mission d’évaluation et de contrôle sur le financement des politiques culturelles par des politiques affectées. Un amendement poursuivant ce même objectif avait également été déposé par le rapporteur général du budget du Sénat puis retiré, car ce même amendement prévoyait dans le même temps de réduire les recettes du CNC. Nous y reviendrons.
C’est finalement à l’occasion de l’adoption par notre Assemblée de l’amendement n° 432 du gouvernement à la première partie du projet de loi de finances pour 2012 que les adaptations permettant de mettre fin à ces comportements et à sécuriser la TST ont pu être votées.
Le champ de l’assiette est clarifié et comprend toute offre permettant d’accéder à des services de télévision : la taxe est assise tant sur les abonnements à des services de télévision proposés séparément qu’à des offres multiples dès lors que leur souscription permet de recevoir des services de télévision.
En contrepartie de l’élargissement de l’assiette, le barème de la taxe est allégé et simplifié : à un barème de neuf tranches comprises entre 0,5 et 4,5 % se substitue un barème de quatre tranches de 0,5 à 3,5 %. Le produit résultant de ce barème a été présenté à la représentation nationale comme devant être identique à celui perçu en 2010, soit 190 millions d’euros pour les seuls fournisseurs d’accès à internet.
Cette réforme était attendue, mais aurait pu s’accompagner d’ajustements suggérés par le rapport de l’IGF et de l’IGAC : assujettissement des éditeurs de VàD financée par la publicité, sécurisation de l’imposition, au titre de la TST éditeurs, des recettes de SMS et des appels surtaxés, généralisation de l’imposition de la publicité sur la télévision de rattrapage.
La réforme de la TST était nécessaire afin de rétablir l’équité fiscale entre les différents contributeurs au compte de soutien. Mais, à l’occasion des débats relatifs à la première partie de la loi de finances pour 2012, le gouvernement a également fait adopter un amendement plafonnant l’ensemble des taxes affectées au CNC, dans le but de limiter ces ressources à 700 millions d’euros. La volonté affichée est de faire contribuer le Centre, au même titre que les autres opérateurs, à l’effort de redressement des finances publiques de l’État.
En réalité le CNC a déjà fait l’objet d’attaques spécifiques : le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général du budget au Sénat l’an passé, sur la première partie du projet de loi de finances initiale pour 2011, stigmatisait déjà un « opérateur prospère », et proposait de réduire ses ressources, via un prélèvement au profit du budget de l’État, à hauteur de 130 millions d’euros. Ce sont finalement 20 millions qui avaient été prélevés.
De nouveau, lors des débats sur la loi de finances rectificative du 29 juillet 2011, Monsieur Philippe Marini avait déposé un amendement qui proposait dans le même temps de réformer la TST et d’opérer un prélèvement de 10 % des ressources affectées au CNC, ce pendant quatre ans.
Le second amendement n° 431 rectifié du gouvernement, adopté le 21 octobre dernier, confirme les inquiétudes qu’avaient déjà soulevées ces précédentes initiatives : il procède à un plafonnement taxe affectée par taxe affectée du produit susceptible d’être perçu par le CNC, l’excédent ayant vocation à être versé au budget de l’État.
Une telle démarche démontre une profonde incompréhension du fonctionnement du soutien public au cinéma et à l’audiovisuel qu’ont dénoncée légitimement tous les professionnels du secteur.
Notons tout d’abord que le CNC est certes, pour reprendre l’expression de l’ancien rapporteur général du budget au Sénat, M. Philippe Marini, un « opérateur prospère ». Mais, si ses recettes ont augmenté de façon dynamique, en particulier ses recettes de TST, c’est en partie du fait du comportement d’optimisation fiscale des fournisseurs d’accès à internet qui avaient intérêt à valoriser de manière pour le moins extensive la part des services de télévision dans les offres composites, afin de bénéficier d’un taux réduit de TVA ; l’assiette de la TST-distributeurs étant identique à celle assujettie à ce taux réduit, son produit avait augmenté proportionnellement à cette valorisation. Quant au niveau de la trésorerie du Centre, elle s’explique largement par la nécessité de provisionner les droits de tirage des bénéficiaires du soutien automatique, comme la Cour des comptes l’avait d’ailleurs demandé.
Le CNC fait bon usage des taxes qui lui sont affectées et les résultats sont probants, comme cela a été rappelé. Il assure le contrôle et le recouvrement auparavant exercés par la direction générale des finances publiques, pour un coût de gestion dix fois inférieur.
Plus généralement, la ponction en faveur du budget de l’État, par un plafonnement de chacune des taxes affectées au CNC, ponction qui a vocation à être pérennisée, risque de fragiliser gravement l’ensemble du dispositif de soutien public au cinéma et à l’audiovisuel.
Tout d’abord, et comme cela a été expliqué, les soutiens automatiques versés par le CNC sont directement corrélés au niveau des taxes perçues. Plafonner ces taxes a donc une conséquence directe sur le niveau de ces soutiens. Ainsi, si le nombre des entrées en salles augmente l’année prochaine, ou que la part des films français progresse, ce qu’on ne peut que souhaiter, le plafonnement de la TSA entraînerait un écrêtement parallèle des soutiens versés.
Le même raisonnement s’applique à la TST pour sa partie éditeurs, car le chiffre d’affaires des éditeurs est à la fois la base de la taxe et la base de leurs obligations de production, donc des soutiens automatiques qui ne sont délivrés à la production audiovisuelle, qu’à condition que l’œuvre bénéficie de l’apport d’un diffuseur français. De même pour la taxe sur la vidéo : le chiffre d’affaires des éditeurs vidéo est la base taxée, et c’est aussi la base des soutiens automatiques délivrés par le CNC.
Or, les soutiens automatiques sont au cœur du système français de soutien au cinéma et à l’audiovisuel, pour les raisons déjà évoquées.
Au surplus, ils sont la condition de l’acceptabilité du système pour les grands opérateurs. Si ceux qui contribuent le plus au système n’ont plus accès à un retour automatique, c’est en effet la fin du système intelligent qui unissait objectivement les acteurs du secteur dans leur diversité.
Enfin, les soutiens automatiques du CNC sont indissociables du régime des obligations de production à la charge des chaînes de télévision. En effet, ces soutiens assurent une stabilité et une prévisibilité du co-financement par les pouvoirs publics des œuvres que doivent commander les chaînes de télévision et constituent à ce titre un pilier indispensable du système de régulation à la française existant en matière d’audiovisuel et de cinéma.
On comprend la nécessité que l’effort de redressement des finances publiques soit partagé, mais pas au prix du démantèlement d’un système vertueux qui a fait ses preuves depuis 65 ans et alors même qu’on demande depuis deux ans au CNC un surcroît d’efforts : outre les transferts d’actions auparavant financées par le budget du Ministère de la Culture et de la Communication intervenus depuis 2010 (subvention à la Cinémathèque française, le « fonds Sud », fonds « Image de la Culture », Média, Eurimages), le fonds de soutien prendra en charge, à partir de 2012, la subvention à l’Ecole nationale supérieure de l’image et du son (ENSMIS – la « Fémis ») ainsi que des aides auparavant financées par des crédits déconcentrés par l’État aux DRAC notamment en faveur du patrimoine cinématographique en régions. Les transferts réalisés depuis 2008 représentent structurellement, à partir de 2012, une charge budgétaire annuelle de 51 millions d’euros !
Dans ce contexte, on ne peut accueillir que négativement la proposition, émise par le rapport de la mission confiée à Franck Riester, Didier Selles, Alain Chamfort, Daniel Colling et Marc Thonon sur La création musicale et la diversité à l’ère numérique, de faire financer un centre national de la musique par un prélèvement de 95 millions d’euros sur le budget du CNC.
3. Le plafonnement des ressources du CNC expose notre système d’aides au cinéma et à l’audiovisuel à un risque de remise en cause par les autorités communautaires.
Le plafond global des ressources du CNC introduit par le gouvernement, à hauteur de 700 millions d’euros, comporte de forts risques de déstabilisation de tout notre système d’aides à la création par les autorités communautaires.
En effet, ces aides sont considérées comme des aides d’État au regard du droit communautaire, aides d’État en principe interdites par le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Elles bénéficient toutefois d’une dérogation au titre de l’article 107, paragraphe 3, point d), qui dispose que « peuvent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur […] les aides destinées à promouvoir la culture et la conservation du patrimoine, quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges et de la concurrence dans l'Union dans une mesure contraire à l'intérêt commun ».
Dans ce cadre, notre système d’aides ainsi que les modifications qui y sont apportées, doivent être notifiées à la Commission européenne. À la suite de la notification de ce système en 2006, la France bénéfice d’une autorisation qui arrive à expiration et doit conduire notre pays à renotifier l’ensemble des soutiens au cinéma et à l’audiovisuel avant la fin de l’année.
Or, la Commission européenne assimile les taxes affectées à des aides d’État, qui ne sont donc « compatibles avec le marché intérieur » que dans la mesure où « elles sont destinées à promouvoir la culture et la conservation du patrimoine ».
Si l’excédent de taxes perçues, reversé au budget de l’État, devait être important par rapport au plafond introduit par le gouvernement dans son amendement n° 431 rectifié, la Commission pourrait être amenée à considérer que ces prélèvements n’ont pas pour objet de répondre à la finalité culturelle qui seule légitime la dérogation au principe général d’interdiction des aides d’État.
À cet égard, il semblerait que l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ait procédé à l’évaluation du rendement de la TST en 2012, en tenant compte de la réforme de l’assiette et du barème de la taxe telle qu’elle a été votée dans le cadre de l’examen de la première partie de la loi de finances pour 2012. L’ARCEP évalue ce produit à 300 millions d’euros, au lieu des 229 millions d’euros de plafond introduits par l’amendement du Gouvernement. Cela signifierait que 70 millions d’euros auraient vocation à être reversés au budget général, alors que leur prélèvement n’est conforme au droit communautaire que dans la mesure où il poursuit un objectif culturel.
Cette difficulté présenterait au demeurant un caractère potentiellement récurrent dans la mesure où l’amendement gouvernemental confère au principe d’un plafonnement des taxes affectées au CNC un caractère pérenne.
Au demeurant, une augmentation du budget initial d’un régime d’aide existant qui excède 20 %, est considérée comme une modification de l’aide existante. Si un excédent de 70 millions d’euros de TST par rapport au plafond de 229 millions d’euros, devait être constaté en fin d’exercice, il conviendrait alors de renotifier ce dispositif.
Ces incertitudes introduites par l’amendement gouvernemental fragilisent d’autant plus notre système d’aides que celui-ci a déjà fait l’objet d’une plainte d’un opérateur à la suite du réajustement opéré l’an passé et que notre pays est donc placé sous le regard tout particulièrement vigilant de la Commission. Créer sciemment un surplus artificiel en sous-évaluant le rendement prévisible d’une taxe dans le but d’alimenter le budget de l’État, rompt la cohérence qui jusqu’alors préservait le système.
Enfin, le contexte communautaire est lui-même mouvant, puisque la Commission a lancé une consultation dans le cadre de la révision prochaine de sa communication sur les critères d’évaluation des aides d’État destinées à soutenir la production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles. Les positions que notre pays pourrait souhaiter défendre dans ce cadre le seront d’autant plus efficacement que nous aurons su nous montrer irréprochables au regard des règles existantes.
Gardons-nous des opérations hasardeuses destinées à satisfaire des objectifs de court terme, sans concertation préalable et qui sont susceptibles de constituer une très lourde hypothèque à moyen terme : l’exemple de la « taxe télécoms », instaurée pour compenser le manque à gagner publicitaire de France télévision, devrait inciter à la prudence. Si la procédure engagée contre la France par les autorités communautaires devait aboutir, comme cela est probable, le remboursement des sommes indûment perçues pourrait représenter une charge de plus d’un milliard d’euros pour le budget de l’État fin 2012 !
La fragilisation du CNC et de notre système de soutien public à l’audiovisuel et au cinéma intervient paradoxalement au moment où il faut faire face à de nouveaux défis.
Les ressources affectées au Centre doivent lui permettre de financer les priorités que celui-ci a établies pour l’année prochaine, mais, au-delà, elles doivent lui permettre d’accompagner les évolutions importantes, technologiques et économiques, que va connaître la création cinématographique et audiovisuelle dans les années à venir.
Les priorités du CNC pour 2012
Les priorités du CNC pour 2012 doivent permettre de prolonger les efforts d’adaptation des soutiens automatiques et sélectifs destinés au cinéma, à l’audiovisuel et au multimédia :
− une réforme du soutien automatique à la distribution cinématographique, en lien avec les professionnels, est envisagée dont l’objectif est de renforcer ce maillon essentiel pour la diversité de l’offre de films ; le rapport de M. Michel Gomez sur La transparence de la filière cinématographique, la relation entre le producteur et ses mandataires, a mis en évidence le poids du risque économique supporté par les distributeurs et a suggéré des pistes d’amélioration du système des soutiens à cette profession. La réforme pourrait consister à réviser les taux de retour afin de mieux soutenir la « distribution du milieu » et les distributeurs non intégrés, ainsi qu’à mettre en place un bonus au réinvestissement dans les minimas garantis et les frais d’édition. Votre rapporteur juge cette réforme opportune et se félicite de l’ouverture de discussions avec les professionnels ;
− le CNC souhaite renforcer le soutien à la VàD, en mettant en place, courant 2012, un soutien automatique à la VàD, qui devrait contribuer à structurer encore davantage ce secteur et à renforcer l’offre légale de films ;
− en 2012, un nouveau dispositif sélectif dénommé « aide aux Cinémas du monde » sera mis en place, pour accentuer les initiatives venues des cinémas d’autres pays s’associant avec de partenaires français (coproducteurs, distributeurs…). Ce dispositif fusionnera et renforcera deux mécanismes existants : le « Fonds Sud » et l’aide aux films en langue étrangère (AFLE) ;
– le CNC poursuivra la mise en œuvre du plan d’investissement en faveur du numérique, notamment en finançant de manière complémentaire au grand emprunt, la numérisation des œuvres cinématographiques et audiovisuelles dont la rentabilité commerciale n’est pas avérée mais dont l’intérêt patrimonial est important ;
− les soutiens à la musique dans les œuvres d’image seront renforcés en 2012 pour tenir compte des préconisations de la mission confiée à Marc-Olivier Dupin en mai 2011, qui remettra ses propositions à la fin de l’année.
Ainsi, le décret du 1er avril 2011 a étendu le soutien automatique versé dans le cadre du compte de soutien à l’industrie des programmes audiovisuels (COSIP) aux productions financées par une plateforme internet sans diffuseur télévisé.
L'élargissement du bénéfice du COSIP vise à accompagner le développement et la production d’œuvres patrimoniales audiovisuelles sur internet. Il vient compléter les dispositifs de soutien existants, sans les remplacer : le soutien sélectif en faveur des projets pour les nouveaux médias, qui existe depuis 2007 ; les soutiens sélectif et automatique audiovisuels avec des financements « mixtes » (TV et internet), qui existent depuis 2008.
Le « web COSIP » permet aux producteurs disposant d’un compte automatique audiovisuel de le réinvestir sur des œuvres audiovisuelles préachetées par une ou plusieurs plateformes internet seules, selon des modalités proches de celles des projets déjà aidés par le COSIP, à partir du même compte de soutien du producteur et pour les mêmes genres audiovisuels éligibles qu’au COSIP, c’est-à-dire des œuvres patrimoniales de fiction, d’animation, de documentaire de création ou de captation de spectacle vivant.
Un suivi du dispositif sera mis en place par le CNC afin de dresser un bilan de son application à l’issue d’une période de deux ans, mais il y a fort à parier que ces besoins devraient aller croissants. En outre, l’attention de votre rapporteur a été attirée par le Syndicat des producteurs indépendants (SPI) sur les seuils d’investissement minimums requis pour bénéficier de ce soutien : ils ont été fixés à un niveau identique à ceux du COSIP « classique », c’est-à-dire qu’une production est éligible dès lors qu’elle bénéficie de l’apport d’une plateforme au moins égale à 25 % de la part française du financement et composé d’une part de numéraire supérieure à 9 000 euros de l’heure. La spécificité de ces projets ne permet pas d’atteindre ce seuil de 9 000 euros et le bénéfice du « web COSIP » s’avère sans doute mal calibré.
Par ailleurs, le COSIP « classique » va devoir accompagner deux mouvements importants : les efforts de renouveau de la fiction française et l’intérêt croissant des chaînes de la TNT pour les programmes dits « de stock », c’est-à-dire les œuvres patrimoniales susceptibles d’être aidées par le Centre.
Entre 1986 et 2009, l’émergence de nouveaux diffuseurs avec la création de La Cinq et de M6, la privatisation de TF1, la création de la Cinquième, le lancement des bouquets numériques par satellite et le lancement des chaînes gratuites de la TNT, a entraîné une augmentation importante du nombre d’heures aidées : elles sont passées de 526 en 1986 à 4 249 en 2009. Ce volume est relativement stable depuis 2001 et se situe entre 4 000 et 4 500 heures aidées.
Mais les chaînes de la TNT, installées depuis 2005, après avoir privilégié les programmes dits « de flux », commencent à témoigner de l’intérêt pour les programmes « de stock » : d’après les informations recueillies par votre rapporteur, NRJ 12 s’apprêterait ainsi à lancer une série de 100 fois 26 minutes.
Ce bref rappel historique et l’exemple susmentionné laissent présager une hausse très importante du volume d’heures aidées dans les années qui viennent, à plus forte raison dans le contexte de l’arrivée annoncée de six nouvelles chaînes sur la TNT.
En outre, le COSIP devra accompagner le renouveau souhaitable de la fiction française. Lors de son audition, France Télévisions a reconnu qu’en dépit des fortes audiences réalisées par des fictions diffusées sur ses chaînes dans les années 1990, le groupe a depuis « raté le coche » et peine à retrouver le succès. Ce renouveau devrait se traduire par le développement de nouveaux formats : la fiction dite « unitaire », fiction unique ou composée de deux parties qui composent une histoire cohérente, devrait céder la place à des séries dites de « day time », ayant vocation à être diffusées dans la journée, et à des séries de prestige.
Cette transition de la fiction unitaire vers la série devrait mécaniquement augmenter le nombre d’heures aidées par le COSIP : d’après la Confédération des producteurs audiovisuels, de 4 200 heures aidées environ, on devrait passer à 6 000 voire 7 000 heures dans les années qui viennent.
Le CNC devra accompagner cette mutation, en veillant à encourager le renouveau de l’écriture de la fiction, encore trop marquée par les contraintes du format unitaire et les codes inspirés par l’écriture cinématographique. Pour reprendre les termes du rapport Chevallier précité que partage votre rapporteur, « la révolution de la fiction télévisuelle passe d’abord, en France, par une réaffirmation du scénario et du métier de scénariste ; […] la France conserve encore une culture — pour ne pas dire un culte — du réalisateur et des acteurs, héritée du cinéma. Or, le réalisateur n’a pas la même place au cinéma et à la télévision », surtout pour les séries. Comme l’a indiqué la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) lors de son audition, la formation à cette écriture spécifique devra être améliorée. La question de la rémunération des scénaristes devra sans doute également se poser, comme le montre le rapport précité.
En outre, le Syndicat des producteurs indépendants (SPI) a insisté lors de son audition sur l’importance du pilote. Comme l’explique le rapport Chevallier, « la réalisation d’un pilote est le passage obligé du développement d’une série, puisqu’il constitue le préambule à la décision d’écriture de la saison. Parfois non diffusé – même en cas de développement puis de tournage de la saison 1 ! –, le pilote sert non seulement à convaincre le diffuseur (et les autres partenaires financiers, notamment sur le marché international), mais aussi à recadrer les choix artistiques fondamentaux de la série. En France, le mot "pilote" doit être entendu dans une acception différente : le pilote, c’est souvent ce premier épisode sous forme de 90 minutes qu’une chaîne octroie au tandem scénariste/producteur – à charge pour eux de démontrer l’efficacité du projet sur cet unique épisode –, avant de le lancer dans l’arène de la programmation avec l’espoir qu’il trouve sa place du premier coup… Dans ces conditions, le pilote "à la française" ne participe pas à proprement parler du développement d’un format sériel. »
Votre rapporteur considère, de fait, qu’il est nécessaire d’inciter les chaînes à commander davantage d’épisodes pilotes, même si, pour les formats longs, cette proposition se heurte à des problèmes de financement. Cela permettrait de laisser à ces programmes plus de temps pour trouver leur public. Un dispositif incitatif a été mis en place en 2008 par le CNC afin d’encourager la mise en production de pilotes de séries de fiction. Ce dispositif pourrait être opportunément renforcé.
En outre, le CNC devrait mieux soutenir la phase du développement des projets, qui fait l’objet d’un sous financement chronique, éventuellement sous forme d’enveloppes spécifiques au sein du COSIP.
En contrepartie, il n’est pas interdit d’imaginer une dégressivité des soutiens pour les séries longues, comme cela se pratique d’ailleurs dans le domaine du documentaire.
Le renouveau de la fiction suppose en outre que le soutien sélectif conserve toute sa place. Certes, la production de séries longues implique des coûts que les « gros » producteurs sont les plus à même de supporter. Mais les sociétés indépendantes ont, à n’en pas douter, un rôle important à jouer dans le renouveau de ce genre. Une concentration excessive des sociétés de production audiovisuelle serait sans doute préjudiciable à ce renouveau.
En ce qui concerne le cinéma, des évolutions technologiques importantes doivent pouvoir être anticipées : comme l’a indiqué Canal + lors de son audition, le devis moyen des films français reste stable. D’après les chiffres du rapport de l’IGF et de l’IGAC, le devis moyen des films d’initiative française s’établit à 5,48 millions d’euros. Ce chiffre est globalement stable depuis 10 ans, puisqu’il a crû de 2,6 % en euros courants, mais devrait augmenter afin de tenir compte du développement de la 3D, lequel implique des investissements plus importants.
En outre, comme l’a souligné la Société des auteurs- réalisateurs- producteurs (ARP), il est important d’accroître le soutien des films français à l’export, préoccupation que partage votre rapporteur. Ce soutien existe, mais il est probablement insuffisant au regard des résultats des films français à l’export.
Les aides publiques à l’exportation des films
L’aide publique à l’exportation d’œuvres cinématographiques françaises s’exerce à travers quatre mécanismes :
Les aides à l’exportation des films français à l’étranger octroyées par le CNC :
Le CNC met en œuvre, depuis 1997, des aides à la diffusion des films français à l’étranger. En 2010, le budget de ces aides était de 3 millions d’euros. Les crédits prévus pour 2011 s’élèvent à 3,6 millions d’euros et devraient permettre de renforcer l’efficacité de ces aides et d’en élargir le champ.
Ces aides se décomposent elles-mêmes en trois catégories : l’aide à la prospection à l’étranger,l’aide à la distribution et les aides au sous-titrage et au doublage
Unifrance film International : la promotion du cinéma français à l’étranger
Cette association, soutenue par le CNC à hauteur de 6,8 millions d’euros sur un budget total de 9,3 millions, intervient dans trois grands domaines : l’organisation de grands festivals de films français au Japon, au Brésil, en Chine, aux États-Unis ou en Russie, la mise à disposition des exportateurs français d’infrastructures dans les grands marchés du film et le développement de l’expertise et de la veille sur les résultats des films français à l’export.
Inciter à la programmation des films européens en Europe
Soutenue par le programme MEDIA de la Commission européenne et par le CNC (à hauteur de 0,25 million d’euros), l’association Europa Cinémas s’emploie à créer en Europe un réseau de salles, "les salles pavillons", qui s'engagent à programmer au moins 50 % de films européens dont 30 % de films non nationaux sur leurs écrans et à organiser des actions de promotion autour de la cinématographie européenne.
Une action directe de soutien à la diffusion des films français à l’étranger.
Pour dynamiser la diffusion internationale de notre cinématographie, une offre de copies gratuites de films français a été mise en place pour les distributeurs des pays de l’Est, d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Amérique latine.
En 2010, 188 copies de films ont été envoyées à travers le monde pour aider à la diffusion de films français. L’Europe de l’Est est le premier bénéficiaire de cette offre avec 85 copies.
Les recettes d’exportation ont varié entre 124 millions d’euros en 2003 et 137 millions d’euros en 2009, d’après les chiffres du rapport précité, avec un pic en 2006 à hauteur de 170 millions d’euros. L’Europe de l’ouest est la première zone d’accueil pour le cinéma français avec 47,6 % des recettes totales en 2009. L’Amérique du nord arrive au deuxième rang des importateurs de films français, avec 22,5 % des recettes totales en 2009, année exceptionnelle compte tenu de l’exportation du film anglophone Taken.
Le nombre d’entrées en salles et les recettes des films français connaissent une hausse tendancielle sur la dernière décennie, mais cette tendance connaît des variations significatives : en 2009, les films français ont enregistré 67,3 millions d’entrées à l’étranger, contre 83,3 millions en 2009.
Comme l’a souligné Europacorp lors de son audition, les films français ne s’exportent pas dans les pays émergents, contrairement aux grosses productions américaines. Compte tenu de l’ampleur des marchés concernés, les recettes sont potentiellement importantes et entretiennent une course aux budgets de production de plus en plus élevés. Le retard français devient donc de plus en plus difficile à combler.
Comme on l’a vu, le système français de soutien au cinéma et à l’audiovisuel repose sur le principe d’un financement de la création par la diffusion.
Or, d’importantes évolutions affectent le modèle économique de certains diffuseurs et rendront nécessaire, à plus ou moins brève échéance, une réflexion sur les modalités de fonctionnement de ce système.
Notons tout d’abord que les recettes publicitaires des chaînes dites historiques devraient connaître une érosion importante dans les années à venir, sous l’effet d’une concurrence de chaînes nouvelles mais aussi de nouveaux modes de diffusion.
L’apparition de six nouvelles chaînes sur la TNT devrait participer d’un mouvement de fragmentation des audiences qui se traduit non seulement par une évolution de la répartition des recettes publicitaires, mais qui pourrait aussi avoir des conséquences sur le montant global de ces recettes. Par ailleurs, la multiplication des créneaux publicitaires et le moindre effet « marque » de certaines chaînes pourraient entraîner une baisse du prix moyen de l’écran publicitaire.
Dans leur rapport, l’IGF et l’IGAC indiquent que cet effet est mesuré par le ratio entre la part de marché publicitaire et la part d’audience : ce ratio varierait de plus du simple au double entre les chaînes de la TNT et certaines grandes chaînes historiques.
De même, le développement de la télévision de rattrapage sur internet par les grandes chaînes, dont le modèle économique repose sur la publicité, pourrait participer de cet « effet prix », dans la mesure où cette offre est sans doute partiellement substituable à l’offre de diffusion traditionnelle des chaînes.
Par ailleurs, les éditeurs de services de télévision doivent subir la concurrence de nouvelles formes de diffusion.
Ils sont tout d’abord concurrencés sur internet par les sites de partage ou de mise à disposition de vidéos en ligne comme Youtube, Dailymotion ou Netflix (7), dont les offres concurrencent également le DVD et la VàD payante. Ainsi en 2009, 1,8 milliard de vidéos ont été consommées sur Youtube.
Cette concurrence que les chaînes doivent affronter sur internet va être accentuée par l’arrivée d’internet sur l’écran de télévision : c’est que l’on appelle la télévision connectée. Les principaux fabricants de postes de télévision proposent des téléviseurs connectables, dont le développement devrait bénéficier de l’expansion rapide de l’internet à haut débit et du déploiement à grande échelle de la fibre optique. Les offres de services sont variables selon les constructeurs et font l’objet d’accord avec les éditeurs de contenus. Ces écrans offrent en outre la possibilité d’accéder directement sur le téléviseur à tous les contenus audiovisuels : sites de partages de vidéo, télévision de rattrapage et vidéo à la demande.
La télévision connectée va également permettre le développement des acteurs « over the top » (OTT) comme Google ou Apple : ils viennent se greffer sur les réseaux financés par les fournisseurs d’accès à internet, les agrègent et négocient des commissions d’intermédiaires ou des revenus publicitaires. Grâce aux plateformes connectées, le téléspectateur n’a plus besoin de souscrire une offre triple play auprès de son opérateur : une connexion internet suffit avec un boîtier dédié Google ou Apple.
L’offre de services délinéarisés gérés directement depuis le téléviseur, la console ou le terminal, sans intervention ni rémunération de l’opérateur de réseau, risque de fragiliser les fournisseurs d’accès à internet et les chaînes de télévision.
Cette fragilisation des chaînes est susceptible d’avoir des répercussions sur les deux piliers du financement de la création, c’est-à-dire le pilier fiscal, via le tassement prévisible de l’assiette taxable et le développement de diffuseurs échappant à toute taxation, mais aussi via les obligations réglementaires des chaînes.
Il est prévisible que l’exacerbation de la concurrence qu’elles subissent soulève la question de l’allègement de la pression fiscale qui pèse sur elles. Une telle voie ne pourrait être explorée qu’à condition que les chaînes prennent des engagements en contrepartie, comme par exemple des investissements dans la fiction française.
En outre, certains éditeurs de services de télévision réclament de longue date un assouplissement des obligations réglementaires auxquelles ils sont assujettis. Mais votre rapporteur a également constaté, au cours de ses auditions, que de nombreuses réflexions sont en cours qui visent moins à assouplir ces obligations qu’à les faire évoluer : le phénomène de concentration actuellement observé ne doit-il pas conduire à substituer à des obligations de chaînes, des obligations de groupes ? Ne faut-il pas faire évoluer les grilles de diffusion du cinéma à la télévision ?
À ce sujet, le ministère de la culture et de la communication a lancé une consultation publique, dont les réponses sont en cours d’analyse, dans le but de déterminer s’il convient d’assouplir la réglementation relative à la grille horaire de programmation des films de cinéma sur les services de télévision. La consultation souligne que cette question est soulevée de manière récurrente par certains éditeurs qui considèrent que la multiplication des modes d’accès délinéarisés aux œuvres, lesquels ne sont soumis à aucune restriction de programmation de cette nature, crée une distorsion de concurrence. Le texte de la consultation évoque des pistes de réforme comme la possibilité de mettre en place des assouplissements distincts selon la catégorie des services. Elle interroge également les professionnels sur les conditions et les critères qui pourraient fonder cette ouverture.
En tout état de cause, les bouleversements qui s’annoncent sur les marchés de la diffusion, interrogeront immanquablement notre système de soutien à la création.
La Commission procède, le 27 octobre 2011, en commission élargie à l’ensemble des députés, dans les conditions fixées à l’article 120 du Règlement, à l’audition de M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication, sur les crédits pour 2012 de la mission « Culture » (8).
La Commission examine, au cours de sa séance du mercredi 2 novembre 2011, pour avis, les crédits pour 2012 de la mission « Culture » sur le rapport de Mme Sophie Delong (Patrimoines) et de M. Patrick Bloche (Création ; Transmission des savoirs et démocratisation de la culture) .
Mme Sophie Delong, rapporteure pour avis des crédits du programme « Patrimoines ». J’ai choisi de consacrer mon avis au premier bilan que l’on peut tirer de la réforme du régime des travaux sur les monuments historiques.
Contrairement à une idée reçue, l’État n’est propriétaire que d’un faible nombre de monuments historiques. Sur les 14 000 monuments classés et les 27 000 monuments inscrits, il ne détient que 4 % des édifices protégés, les communes 44 %, notamment les églises construites avant 1905, les propriétaires privés 46 %, les 6 % restants revenant aux autres collectivités publiques.
Jusqu’en 2005, le régime des travaux sur les monuments historiques n’appartenant pas à l’État était le suivant: la maîtrise d’ouvrage n’était pas assurée par les propriétaires, mais par l’État, via les directions régionales des affaires culturelles (DRAC), tandis que la maîtrise d’œuvre était sous monopole des Architectes en chef des monuments historiques, les ACMH.
Pour les monuments appartenant à l’État, les ACMH disposaient du même monopole pour la maîtrise d’œuvre. La maîtrise d’ouvrage en région était assurée par les DRAC, en Ile-de-France soit par le Service national des travaux (SNT), pour les travaux de restauration, soit par l’Établissement public de maîtrise d’ouvrage des travaux culturels (EMOC) pour les grands projets culturels. Enfin, lorsque les monuments étaient remis en dotation au Centre des monuments nationaux (CMN), la maîtrise d’ouvrage était assurée par les DRAC, ou, en Ile-de-France, par le SNT.
Ce système présentait de nombreux inconvénients : les propriétaires autres que l’État avaient l’impression d’être dépossédés de leur bien ; au demeurant, s’agissant des collectivités, il paraissait curieux de maintenir la compétence des DRAC sur la maîtrise d’ouvrage des travaux sur les monuments appartenant à ces collectivités, alors même que le mouvement de décentralisation s’approfondissait. La maîtrise d’ouvrage en Ile-de-France souffrait d’une extrême complexité, le SNT et l’EMOC ayant des domaines de compétence se recouvrant pour partie. Sur un même chantier, ils ont pu intervenir dans le même temps et en parallèle, sans aucune instance de coordination, comme au palais de Chaillot. Pour le CMN, il devenait incohérent de demander à l’établissement d’assurer la présentation des monuments au public sans lui donner la compétence de la maîtrise d’ouvrage sur les travaux de restauration, puisqu’il pouvait prévoir un programme d’activités alors que dans le même temps les DRAC prévoyaient un programme de travaux qui venait télescoper ce projet.
Du côté de la maîtrise d’œuvre, le monopole des ACMH a été contesté par les autorités européennes.
Une réforme de très grande ampleur a donc été mise en œuvre à partir de 2005 et est entrée en vigueur en 2008.
Première modification d’ampleur : les propriétaires autres que l’État assurent seuls la maîtrise d’ouvrage des travaux sur leurs monuments. Pour les travaux d’entretien, ils peuvent avoir recours, pour la maîtrise d’œuvre, à un « architecte du patrimoine », c’est-à-dire un architecte qui, sans être ACMH, a des qualifications spécifiques dans le domaine du patrimoine. Pour la maîtrise d’œuvre des travaux de restauration, plus lourds, ils peuvent avoir recours à un ACMH ou à un architecte français ou européen présentant des qualifications équivalentes et une expérience suffisante.
Deuxième modification : le CMN devient maître d’ouvrage pour les travaux sur les monuments qui lui sont remis en dotation. Comme pour les autres monuments appartenant à l’État, les ACMH conservent leur monopole sur la maîtrise d’œuvre des travaux de restauration.
Troisième modification : le SNT et l’EMOC fusionnent au sein d’un nouvel établissement public, l’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC). Il est chargé, pour le compte de l’État ou de ses établissements publics, de missions de maîtrise d’ouvrage, mais aussi d’un rôle de conseil, d’assistance et de conduite d’études préalables dans le domaine immobilier.
Quatrième modification : le rôle des DRAC a été repensé. Jusqu’à la réforme, elles avaient un rôle de surveillance des monuments et un rôle de prescripteur des travaux. Désormais, elles continuent à assurer la maîtrise d’ouvrage sur les monuments historiques appartenant à l’État, notamment les cathédrales. Mais pour ce qui concerne les monuments n’appartenant pas à l’État, elles ont désormais une nouvelle mission : le contrôle scientifique et technique. Elles doivent accompagner les propriétaires autres que l’État, leur prodiguer des conseils, et s’assurer que les travaux se déroulent dans des conditions satisfaisantes.
Quel bilan peut-on tirer de cette réforme, que j’ai présentée à grands traits et sur laquelle vous pourrez trouver plus d’éléments dans mon rapport ?
Tout d’abord, la transition a été difficile : le CMN s’est vu transférer la maîtrise d’ouvrage à la fin de 2007. Or il n’avait pas, à cette époque, de département de maîtrise d’ouvrage. L’impossibilité, dans un premier temps, de recourir à des emplois « hors titre 2 », c’est-à-dire de recruter en dehors du seul vivier constitué par les fonctionnaires du ministère de la culture, a ralenti les choses. La direction est opérationnelle depuis le début de cette année, et les choses sont rentrées dans l’ordre.
Dans le même temps, la réforme du SNT et de l’EMOC a été annoncée, ce qui a démobilisé les fonctionnaires du SNT: ce service s’est alors vidé de sa substance, de sorte que le passage de relais n’a pas pu se faire avec le CMN et avec l’OPPIC. Là encore, les choses sont rentrées dans l’ordre.
Enfin, de nombreux textes réglementaires qui devaient permettre la mise en œuvre de la réforme n’ont été pris qu’en 2009. Il en va notamment ainsi du décret sur l’assistance à maîtrise d’ouvrage. Il s’agit en effet d’une compétence pointue et technique, qui requiert une certaine expérience. Pour les petits chantiers, il n’existe pas d’offre privée d’assistance à maîtrise d’ouvrage. Il était donc important que les DRAC puissent accompagner les propriétaires autres que l’État, notamment les petites communes, dans l’exercice de leurs prérogatives.
Après ces quelques mots sur la manière dont s’est déroulée la transition d’un régime à l’autre, quelques remarques sur le nouveau système. Il est trop tôt pour tirer un bilan définitif, surtout après une réforme d’aussi grande ampleur. Le fait que le ministère de la culture ait mis en place un observatoire de la réforme est de mon point de vue une excellente chose. Il conviendra d’être attentif sur plusieurs points.
D’abord, il faudra que les maîtres d’ouvrage privés ne fassent pas primer leur légitime préoccupation pour le coût des travaux sur la qualité de ceux-ci. De la même façon, il faudra veiller à ce que les entreprises spécialisées dans les monuments historiques ne soient pas pénalisées, pour des raisons de coût, au profit des entreprises générales. L’observatoire mis en place par le ministère doit travailler sur la possibilité de mettre en œuvre une certification des entreprises de monuments historiques, c’est une piste intéressante. En outre, il ne faudrait pas que l’ouverture à la concurrence de la maîtrise d’œuvre entraîne un moins-disant sur les prix pour les propriétaires privés, et un rattrapage dans le secteur encore sous monopole, c’est-à-dire pour les travaux de restauration sur les monuments appartenant à l’État. Enfin, il faut absolument que les DRAC aient les moyens d’exercer le contrôle scientifique et technique pour garantir la protection des monuments et l’accompagnement des propriétaires.
Pour conclure, sans revenir sur les aspects budgétaires de ce rapport, que j’ai développés en commission élargie jeudi dernier, je vous demanderai de donner un avis favorable à l’adoption des crédits du programme « Patrimoines ».
M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis sur les crédits des programmes « Création » et « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ». En ce qui concerne l’examen des crédits que je rapporte, vous ne serez pas étonnés de l’avis défavorable que j’émets à la suite des considérations que j’ai développées lors de la commission élargie de la semaine dernière.
J’ai consacré la partie thématique de mon avis à un sujet qui était déjà d’actualité l’an passé et qui l’est plus encore cette année, c’est-à-dire le financement du cinéma et de l’audiovisuel par le Centre national du cinéma et de l’image animée, le CNC.
De nombreux collègues investis sur ce sujet seront d’accord avec moi pour affirmer qu’il s’agit d’un modèle unique à préserver. Il s’agit également d’un système vertueux puisque le budget de l’État n’est pas mis à contribution. Ce n’est pas le contribuable qui est sollicité, mais le spectateur, par exemple à travers la taxe spéciale additionnelle, dite TSA, assise sur les entrées en salles de cinéma.
Le financement du cinéma et de l’audiovisuel repose sur deux piliers : le fonds de soutien du CNC et les obligations de diffusion et de production des chaînes de télévision. Il fonctionne sur le fondement d’un principe : le financement de la création par la diffusion. Je me suis intéressé au premier pilier, c’est-à-dire le fonds de soutien du CNC, qui a permis le développement d’un écosystème unique au monde et qui a su évoluer avec le temps.
Le compte de soutien est financé par la TSA, la taxe « vidéo », dont le produit a connu une évolution dynamique grâce, notamment, à la réforme de la chronologie des médias en 2009, et la taxe sur les services de télévision, dite TST.
Ce fonds se décline en soutiens automatiques, soit 60 % du total, et en soutiens sélectifs, soit 40 % de ce fonds. Je souhaite attirer votre attention sur les soutiens automatiques, improprement qualifiés de « rente » par la Mission d’évaluation et de contrôle de notre Assemblée dans son rapport sur le financement des politiques culturelles par des ressources affectées. Il s’agit en réalité d’un soutien redistributif et mutualiste dont la mise en cause pourrait entraîner l’explosion de notre modèle.
Les objectifs assignés au fonds de soutien sont atteints, puisque notre cinéma national a été préservé quand tant d’autres cinémas nationaux ont périclité, et nous bénéficions également d’une production audiovisuelle dynamique. La fréquentation en salles de films d’initiative française représente 36,8 % du total des entrées en 2009, contre 49,7 % pour le cinéma américain. Nous disposons d’un maillage dense de salles de cinéma sur notre territoire, et nous contribuons à la production de films étrangers grâce au Fonds Sud. Quant à l’audiovisuel, nous avons assisté à l’explosion du nombre d’heures produites, du fait notamment du développement de la télévision numérique terrestre. On constate toutefois une crise de la fiction française sur laquelle je reviendrai.
En outre, l’augmentation des recettes du CNC au cours des années récentes a coïncidé avec l’apparition de nouveaux besoins. Cette augmentation des recettes s’explique par la progression dynamique de la TSA et de la taxe vidéo, mais surtout par l’augmentation conséquente du rendement de la TST. Cette dernière hausse tient à l’attitude des opérateurs que nous avions voulu mettre à contribution par la réforme votée à l’unanimité en 2007 : l’assiette de la TST étant à l’origine identique à celle de la TVA à taux réduit, le fait que ces opérateurs aient cherché à accroître cette dernière a eu mécaniquement un effet sur le rendement de la TST.
Ces ressources supplémentaires ont permis de financer le Plan numérique, c’est-à-dire à la fois le financement de la numérisation d’œuvres appartenant à notre patrimoine cinématographique, mais aussi de la numérisation des petites salles de cinéma, dans le cadre de la loi de septembre 2010 sur l’équipement numérique des salles, votée à l’unanimité, et dont notre collègue Michel Herbillon avait été le rapporteur. La numérisation des œuvres intervient en complément des financements octroyés dans le cadre du Grand emprunt.
Ce système vertueux se trouve fragilisé au moment même où il devrait être conforté. Je rappellerai brièvement qu’à la suite de la réforme de la TST en 2001, certains opérateurs, comme Free, pour ne pas le nommer, ont développé des stratégies d’optimisation fiscale destinées à réduire le montant de leur contribution. J’ajoute que le rapporteur général du budget du Sénat d’alors, M. Philippe Marini, avait en outre envisagé d’opérer sur les ressources du CNC un prélèvement de 130 millions d’euros, somme qui avait pu être ramenée à 20 millions d’euros.
Dans le cadre de l’examen de la première partie de la présente loi de finances, le Gouvernement a fait adopter deux amendements : l’amendement n° 432 réforme l’assiette et le barème de la TST, afin de mettre fin aux comportements d’optimisation fiscale que j’ai décrits. Cet amendement fait l’objet d’un consensus. En revanche, l’amendement n° 431 rectifié opère un plafonnement taxe par taxe des ressources affectées au CNC, de sorte que le total de ces recettes ne pourrait excéder 700 millions d’euros, le surplus devant être reversé au budget général.
Cet amendement a suscité l’émotion légitime de tous les professionnels réunis à Dijon dans le cadre des Rencontres cinématographiques, émotion telle qu’ils ont même été reçus par le Président de la République, au moment même où la zone euro traversait une nouvelle crise. Le Président de la République n’aurait pas été informé de cette démarche du ministère du budget et l’examen du projet de loi de finances au Sénat devrait être l’occasion de corriger cette initiative malheureuse.
Il convient de souligner que l’amendement n° 431 aurait pour effet de mettre en cause les soutiens automatiques versés par le CNC, alors même que ces derniers sont la condition de l’acceptabilité du système pour les grands opérateurs qui en bénéficient et acceptent dans le même temps de financer des films d’auteurs, des films indépendants, des premiers ou deuxièmes films : en 2010, nous avons compté 77 premiers films et 33 deuxièmes films, ce qui est un résultat très positif.
J’ajoute que le plafonnement des ressources du CNC intervient alors même que de nombreux transferts de charges opérés depuis le budget du ministère de la culture pèsent sur le budget du Centre, qu’il s’agisse du financement de l’École nationale supérieure de l’image et du son, la « Fémis », du financement de la Cinémathèque ou de la prise en charge des aides auparavant financées par des crédits déconcentrés par l’État aux DRAC, notamment en faveur du patrimoine cinématographique en régions. Ces transferts de charges représentent 51 millions d’euros.
Par ailleurs, la mission confiée notamment à notre collègue Franck Riester sur La création musicale et la diversité à l’ère numérique propose de faire financer un Centre national de la musique par un prélèvement de 95 millions d’euros sur le budget du CNC. J’estime qu’il n’est pas bon de déshabiller Pierre pour habiller Paul.
Enfin, le reversement au budget de l’État d’un éventuel surplus des recettes du Centre au-delà d’un plafond de 700 millions d’euros me parait présenter un risque important au regard du droit communautaire. L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) a en effet évalué le rendement de la TST à 300 millions d’euros, au lieu des 229 millions inscrits dans le projet de loi de finances à la suite de l’adoption de l’amendement n° 431 du Gouvernement. Ce surplus représenterait plus de 20 % du rendement évalué par le Gouvernement.
Or, les aides au cinéma et à l’audiovisuel bénéficient d’un régime dérogatoire au droit commun communautaire interdisant les aides d’État, dans la mesure où elles participent d’une politique de promotion de la culture. Un prélèvement sur des fonds dont la mobilisation est censée répondre à un objectif culturel risque de fragiliser notre système, d’autant que le régime dérogatoire aménagé en faveur du cinéma et de l’audiovisuel va être réformé, et que la Commission européenne a lancé une consultation dans cette perspective. La TST pourrait donc être fragilisée dans les mêmes conditions que la taxe « télécom », qui devrait être abolie à la fin de l’année, et qui avait été mise en place pour compenser la suppression de la publicité sur France Télévisions.
Cette fragilisation intervient dans un contexte de fortes mutations et au moment où notre système, qui a fait la preuve de son efficacité depuis 65 ans, doit faire face à de nouveaux défis : j’évoquerai le dynamisme du « Web COSIP », le nécessaire renouveau de la fiction française, qui doit reposer sur un renouveau de l’écriture mais aussi l’affectation de crédits supplémentaires pour le financement des pilotes de série, afin d’éviter des échecs d’audience, l’intérêt croissant des chaînes de la TNT pour les programmes dits « de stock », précisément ceux qui peuvent prétendre au soutien du CNC, ou le renforcement du soutien à l’export pour les films français.
J’ajoute qu’on peut se demander si à l’avenir la production audiovisuelle pourra continuer à bénéficier du soutien des chaînes, à travers leurs obligations réglementaires : au moment où vont être lancées six nouvelles chaînes gratuites sur la TNT, où se développent les sites de partage de vidéos en ligne, les opérateurs « over the top » comme Google ou Apple, les services délinéarisés, la concurrence est de plus en plus vive. Faute d’audience et de ressources publicitaires, les chaînes pourraient se retrouver en difficulté pour honorer ces obligations, qui constituent le second pilier du financement du cinéma et de l’audiovisuel, aux côtés du fonds de soutien du CNC.
C’est pourquoi ce fonds de soutien doit être renforcé, quitte à ce qu’ait lieu une évolution progressive des obligations de chaînes vers des obligations de groupe ou que les grilles de diffusion du cinéma à la télévision puissent être modifiées.
En conclusion, nous disposons d’un système vertueux que le monde nous envie, il convient de le protéger même si nos finances publiques traversent une situation difficile.
Mme Marie- Hélène Amiable. Je souhaiterais revenir sur la déclaration effectuée le 13 octobre dernier par le Président de la République soulignant que le budget de la culture ne serait pas sacrifié en France et que la culture était une réponse à la crise. Je démontrerai que la présentation du budget de la culture est flatteuse alors qu’il ne connaît pas d’augmentation. Ce week-end, des rumeurs ont circulé indiquant que le plan d’austérité bis et la nécessité d’économiser 6 à 8 milliards d’euros toucheraient les crédits de la mission « Culture ». Par ailleurs, 4 milliards d’euros devraient être prélevés sur les collectivités territoriales alors même qu’elles jouent un rôle culturel de premier plan.
Cette actualité appelle plusieurs commentaires ; l’engagement du Président de la République pourra-t-il être maintenu ? Les députés du groupe GDR dénoncent depuis deux semaines le caractère fallacieux du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ne sommes-nous pas en train d’examiner des crédits qui seront amputés dans quelques jours ?
Si les crédits de paiement sont en légère augmentation, les autorisations d’engagement sont elles en baisse de 4,3 % par rapport à 2011, hors inflation. Les crédits de la mission passent de 2,9 milliards d’euros en 2008 à 2,6 milliards d’euros en 2012.
Les crédits relatifs à l’action Patrimoine monumental diminuent de 8 %.
L’action Patrimoine des musées de France connaît une baisse de 5 % et reste soumise à la révision générale des politiques publiques. Ce malaise s’est traduit notamment par la grève du personnel du musée d’Orsay, lors de sa réouverture.
L’action Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant diminue quant à elle de 2,5 %.
Le Président de la République a annoncé la création du Centre national de la musique sans préciser son financement, alors même que les centres nationaux de création musicale observent une baisse de 770 000 euros de leurs crédits et que les orchestres permanents connaissent une diminution de leurs crédits de 833 000 euros.
Je suis inquiète de l’absence d’un système de protection mutualiste et pérenne pour les professionnels du spectacle vivant et de l’audiovisuel. La liberté d’expression des intermittents doit être préservée.
Les indicateurs traduisent une diminution de la diffusion des arts plastiques.
Enfin, la transmission des savoirs baisse de 5,6 % et la part des crédits culturels affectée aux territoires prioritaires par rapport aux élèves scolarisés diminue fortement. Depuis 2007, c’est une baisse de 40 % qui affecte l’accès à la culture.
Je suis également inquiète par le projet de plafonner les taxes affectées au Centre national du cinéma, alors que ce système profondément original permet de protéger de petits et moyens exploitants de salles de cinéma confrontés aux investissements liés à la numérisation ou à l’accessibilité.
C’est pourquoi, le groupe GDR ne votera pas les crédits de la mission « Culture ».
M. Michel Herbillon. Je tiens à saluer le choix du Gouvernement qui a pris l’initiative de sanctuariser le budget de la culture en maintenant ses crédits, preuve de l’importance donnée à la politique culturelle.
Je souhaiterais souligner que le bilan culturel depuis cinq années est important. En premier lieu, l’offre patrimoniale a été développée, avec notamment la mise en œuvre de grands projets structurants comme le Centre national des archives à Pierrefitte sur Seine, la Maison de l’histoire de France et le musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée à Marseille. Je n’oublie pas la dimension culturelle qui est présente dans le projet du Grand Paris. Les moyens affectés aux monuments historiques bénéficieront de 376 millions d’euros.
En deuxième lieu, les moyens consacrés à la création augmenteront de 6 % en 2012 avec notamment la création de la Philharmonie de Paris qui permettra à la capitale d’avoir une salle de répétition digne de ce nom et le site de création contemporaine du Palais de Tokyo. Un des fils rouges de cette mission est la volonté de protéger et de défendre les artistes et de soutenir et de promouvoir la création.
En troisième lieu, le spectacle vivant augmente de 7 %, ce qui permettra de mettre en œuvre le plan d’action vis-à-vis des artistes et de soutenir à la fois les emplois et les structures.
Enfin, je mettrai en exergue la démocratisation culturelle, au cœur des priorités du Gouvernement. Un des premiers accès à la culture passe par le cinéma, c’est pourquoi le Gouvernement est attaché au modèle unique du Centre national du cinéma qui a permis de sauvegarder une création nationale alors que d’autres pays comme l’Italie n’ont pu le faire. Il ne doit pas être fragilisé.
Je citerai plusieurs exemples de cette politique de démocratisation : le Plan musées en régions, la gratuité des musées nationaux pour le jeune public, le soutien à l’opération Centre Pompidou mobile, le projet Demos ou la relance des conventions culturelles.
En conclusion, le groupe UMP adoptera les crédits de la mission « Culture ».
M. Éric Berdoati. Je souhaiterais une réflexion de la question de la gratuité, liée à la démocratisation culturelle. Moi-même dans ma commune, j’ai cédé à la tentation et ai instauré la gratuité pour la médiathèque et le musée. Néanmoins, comment faire prendre conscience de la valeur d’un bien lorsque celui-ci est gratuit, au moins en apparence ? Il est difficile de conjuguer gratuité et valeur des biens que l’on est amené à entretenir ou à apprécier.
Je suis moi aussi attaché au Centre national du cinéma. Le cinéma est la première entrée dans le monde culturel et la qualité et la capacité de production du cinéma français doit être préservée.
Je reviens sur le rapport de notre rapporteure Sophie Delong relatif au patrimoine. Au-delà des acronymes difficiles à déchiffrer et de la complexité de l’ensemble du dispositif, une question, à mon sens, a été occultée : quelle stratégie faudrait-il mettre en place pour le patrimoine ? La réforme du Centre des monuments nationaux montre bien ce qu’il en est. Quatre années ont été nécessaires pour mener à bien cette réforme, qui aurait pu être plus efficace et moins coûteuse.
Mme Pascale Crozon. Je souhaiterais revenir sur la remarque de M. Éric Berdoati relative à la gratuité. L’accès à la culture n’est pas évident. Dans ma circonscription, à Villeurbannais, le Théâtre national populaire n’est pas forcément accessible à notre population. Il serait utile de mener une étude globale sur le sujet.
Les effectifs au sein du ministère continuent de décroître, 110 postes devraient être supprimés, le seront-ils au ministère ou au sein des directions régionales ?
M. Christian Kert. Je souhaiterais insister sur les succès remportés par la Réunion des musées nationaux lors de concours européens, signe de notre savoir faire.
Ma question concerne la situation économique des entreprises spécialisées dans les monuments historiques. Des inquiétudes avaient pu s’exprimer à ce sujet ; Madame la rapporteure, avez-vous rencontré leurs représentants et quelles sont les perspectives qui se dégagent ?
Mme Pascale Crozon. J’ai omis de préciser que le groupe SRC votera contre le budget de la mission « Culture ».
Mme Sophie Delong, rapporteure pour avis. Je vous remercie de vos multiples questions. À Madame Amiable, plus que des éléments chiffrés du budget et des baisses dans tel ou tel secteur, aux bases toujours contestables, je voudrais souligner qu’il me semble important d’aborder les questions concrètes et les réalisations. Cette mandature a vu de grandes évolutions pour la culture, en particulier dans le domaine de l’accès de tous à la culture. Cette question a fait l’objet de débats depuis longtemps, mais nous en avons maintenant des exemples concrets. Comme le rappelait Michel Herbillon, le Centre Pompidou mobile, concept extrêmement novateur et que j’ai la chance d’accueillir à Chaumons, est une réussite dont témoigne, dès les premières semaines, l’affluence de visiteurs, scolaires ou non. La démocratisation prend ici tout son sens. Elle est une réalité.
J’aborderai à cette occasion la question de la gratuité : le Centre Pompidou mobile a une structure qui rappelle un chapiteau de cirque itinérant et abrite des œuvres majeures, en nombre réduit, quatorze, ce qui évite la lassitude d’un public pas nécessairement familier de l’art contemporain. C’est un projet vraiment innovant, pour un coût raisonnable, et qui après Chaumons se rendra dans plusieurs villes de France. Le bouillonnement culturel est là. Et il conviendrait, si l’on voulait aborder la question des chiffres du budget, de prendre en compte non seulement les crédits votés, mais également les crédits consommés. Or, depuis quelques années, le réalisme et la lucidité permettent que soient effectivement consommés les crédits annoncés.
Je remercie Michel Herbillon d’avoir, à bien des égards, apporté les réponses que j’aurais faites. On peut, en effet, se féliciter de l’accès égal de tous à la culture qui est aujourd’hui possible dans les faits et non plus seulement dans les mots.
La gratuité de l’accès à la culture n’est pas notre sujet mais une extrême souplesse est ici nécessaire, comme l’ont montré de nombreux rapports. En effet, les particularités locales sont à prendre en compte, elles sont souvent déterminantes pour élaborer une politique dans ce domaine, pour l’évaluer ou la réorienter à la lumière des résultats obtenus.
En ce qui concerne la réforme du régime des travaux sur les monuments historiques, notre système était effectivement extrêmement complexe. Il est à l’image de certaines de nos institutions, où s’empilent les structures. Dans le cas présent, on peut citer l’exemple du SNT et de l’ÉMOC, fusionnés après plusieurs années alors qu’il eût été tellement plus simple et efficace d’y penser dès l’origine. Le coût en a été élevé, en particulier pour les personnels du SNT ; le délai entre l’annonce de la restructuration des services et sa mise en œuvre a entraîné le développement d’un stress au travail que l’on imagine. Ce sont les conséquences lourdes de cette absence d’anticipation, autre que verbale, et de décisions concrètes. Il reste à souhaiter que des leçons en seront tirées.
Monsieur Christian Kert, je m’associe à vos compliments sur la réussite de la Réunion des musées nationaux. Par ailleurs, je voudrais saluer l’action du CMN : le transfert au Centre de la maîtrise d’ouvrage des travaux des restauration permet maintenant une action cohérente et les responsabilités identifiées. S’agissant des entreprises de restauration des monuments historiques, sujet qui vous est familier puisque vous êtes l’auteur d’un rapport sur la conservation et l’entretien du patrimoine monumental, elles ne nous ont pas fait part d’inquiétudes sur leur volume du travail mais se sont félicitées de l’ouverture à la concurrence qui les rend moins dépendantes d’un seul maître d’œuvre. Elles s’inquiètent en revanche de la d’un risque de fragilisation de leur savoir-faire, avant tout artisanal, si les marchés devaient être emportés par les grandes entreprises générales dont elles ne seraient que sous-traitantes, avec les difficultés que comporte une telle situation. La possibilité de mettre en œuvre une certification de ces entreprises est explorée par l’observatoire de la réforme, mise en place par le ministère de la culture. Cette certification doit permettre de valoriser les savoir-faire des entreprises de restauration, d’éviter qu’ils ne se perdent et que la qualité des travaux ne s’en ressente.
M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis. Un certain nombre de sujets ont été évoqués et notamment la « démocratisation culturelle ». Cette forme de slogan est un peu usée par nos discours officiels, surtout quand les enquêtes récurrentes du ministère de la culture et de la communication dans ce domaine indiquent que les pratiques culturelles des Français n’ont pas été bouleversées durant les dernières décennies.
Effectivement, on n’ouvrira pas ce matin le débat sur la gratuité, même si des expériences peuvent être pertinentes et intéressantes, notamment en ce qui concerne les musées comme, par exemple, de donner un accès gratuit pour les expositions permanentes et payant pour les expositions temporaires. Les augmentations de fréquentation sont de bons indices en la matière. Mon opinion est que ce ne sont pas des dispositifs financiers incitatifs qui sont les plus efficaces. Dans ce domaine l’éducation artistique est la priorité. Si, dès le plus jeune âge, on ne donne pas envie à nos jeunes concitoyens de fréquenter un musée, une salle de spectacle ou d’aller au concert alors, adulte, l’envie n’en viendra pas spontanément. Dans l’apprentissage de chacune ou de chacun, le fait d’avoir accès à l’œuvre d’art très tôt est déterminant. Trop de nos concitoyens considèrent encore qu’une pièce de théâtre, un concert ou un spectacle chorégraphique ne leur sont pas destinés. Par ailleurs, les lieux conventionnés ou labellisés sont en relation contractuelle avec la puissance publique, que ce soit l’État ou les collectivités territoriales, ces dernières, rappelons-le, contribuant pour 70 % au financement public de la culture. Il serait sans doute nécessaire de revisiter les termes du contrat, en fixant des missions de service public plus clairement affirmées et, peut-être, en demandant davantage d’efforts tant en matière de programmation que de recherche ou de conquête de nouveaux publics.
Le malheureux ministère de la culture et de la communication a été victime de deux phases de la Révision générale des politiques publiques, les RGPP 1 puis RGPP 2, et a, de ce fait, été amené à transférer un certain nombre de ses missions et donc à les débudgétiser, puisqu’elles sont prises en charge par d’autres structures. Je l’ai évoqué pour le CNC qui finance aujourd’hui les crédits déconcentrés des DRAC dans le domaine du cinéma, mais aussi ce qu’on appelle communément la Fémis ainsi que la cinémathèque française. Sous ces coups de butoir renouvelés, le ministère perd de nouveau cette année 110 équivalents temps plein (ETP). Mais je ne suis pas en mesure de vous donner les programmes ou actions concernés, ni de vous préciser si la perte affecte davantage l’administration centrale ou les DRAC. Le « bleu » budgétaire, malgré la LOLF, n’en donnant aucune indication, l’opacité est complète. Les effectifs du ministère de la culture en 2012 seront de 11 014 ETP, les suppressions représenteront donc 1 %, ce qui n’est pas secondaire.
S’agissant du CNC, j’ai déjà longuement développé mon rapport pour avis. Je voudrais cependant une nouvelle fois vous alerter sur les risques que comporte l’amendement de plafonnement de chaque taxe affectée au Centre, qui risque de remettre en cause le soutien automatique et donc de faire exploser un système qui n’aura plus ce caractère redistributif grâce auquel les grands opérateurs financent les premiers films et les films d’auteurs.
Mais nous sommes aussi, en quelque sorte, dans l’œil du cyclone, le cyclone étant la Commission européenne, puisque la France doit, avant la fin de l’année, notifier son système d’aides d’État au cinéma. Notre cadre dérogatoire n’est justifié que par ses objectifs culturels et je crains que la Commission européenne ne voie d’un mauvais œil le fait que des opérateurs des télécommunications, des fournisseurs d’accès à internet soient taxés par l’intermédiaire de la TST, mais que 70 millions d’euros en provenant soient reversés directement au budget de l’État. Lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, notre débat portait sur 229 millions d’euros de rendement de la TST, or l’ARCEP l’évalue à 300 millions d’euros. Le surplus est de 70 millions, supérieur donc aux 20 % de la somme initialement prévue au-delà desquels le contrôle de la Commission devient sévère.
Nous risquons de fragiliser ce système vertueux qui ne met jamais à contribution le budget de l’État. Le financement du cinéma et de la production audiovisuelle en France est, je le rappelle unique au monde. Il nous a permis de maintenir un cinéma national et une production audiovisuelle dynamiques, payés par le spectateur. Que des taxes affectées puissent être ainsi reversées au budget de l’État est non seulement illogique, mais surtout dangereux.
Mme la présidente Michèle Tabarot. Nous en arrivons à l’examen des deux amendements dont la Commission est saisie.
Après l’article 48
La Commission est saisie de l’amendement n° 1 AC.
M. Michel Herbillon. Cet amendement a pour objet d’adapter le dispositif de crédit d’impôt en faveur des tournages en France de films à production internationale. La réalité des conditions de production de ces films montre en effet que le délai de douze mois suivant la date des derniers travaux qui ont été réalisés en France, tel que prévu par la législation en vigueur pour l’obtention de l’agrément fiscal, est trop court. En fait les films produits, notamment au plan international, ont souvent des temps de réalisation et de montage beaucoup plus important et qui dépassent cette échéance des douze mois. C’est pourquoi je propose que le délai d’agrément définitif pour le bénéfice du crédit d’impôt soit porté de douze à vingt-quatre mois. C’est très important pour conforter l’attractivité de la France et de son dispositif en matière de localisation des tournages.
M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis. Cet amendement porte sur le crédit d’impôt en faveur des tournages en France de films à production internationale. Nous aurions pu également prendre en compte d’autres demandes : que le plafond du crédit d’impôt pour les productions nationales soit situé au même niveau que celui qui existe pour les productions internationales notamment, ou que soit entreprise une réforme des dépenses éligibles à ce crédit d’impôt national. Mais nous sommes là dans le domaine sensible des « niches fiscales » au moment où il nous est demandé de réduire le déficit public. Cependant, l’amendement de notre collègue Herbillon est technique, et porter la durée de douze à vingt-quatre mois permet en effet de prendre en compte le temps long des productions internationales. J’y suis donc favorable.
L’amendement n° 1 AC est adopté à l’unanimité.
La Commission examine ensuite l’amendement n° 2 AC.
M. Michel Herbillon. L’amendement n° 2 AC est également technique. Il s’agit de rectifier une erreur intervenue lors de la codification dans le code du cinéma et de l’image animée de dispositions qui étaient contenues antérieurement dans le code général des impôts et relatives à la taxe sur les entrées de cinéma. En effet, conformément au droit constant, la taxe sur les entrées de cinéma ne saurait entrer dans la base d’imposition des taxes sur le chiffre d’affaires autres que la TVA auxquelles sont soumis les exploitants de cinémas.
M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis. Cet amendement rappelle, s’il en était besoin, l’étanchéité du financement du cinéma et de l’audiovisuel par rapport au budget de l’État. Corriger cette erreur est effectivement nécessaire, j’émets donc un avis favorable.
L’amendement n° 2 AC est adopté à l’unanimité.
Mme la présidente Michèle Tabarot. Nous allons passer au vote sur les crédits de la mission « Culture », Mme Sophie Delong émettant un avis favorable et M. Patrick Bloche un avis défavorable à leur adoption.
La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits pour 2012 de la mission « Culture ».
AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION
Amendement n° 1 AC présenté par M. Michel Herbillon
Après l’article 48
Insérer l’article suivant :
Culture
I.- Au troisième alinéa de l’article 220 Z bis du code général des impôts, le nombre « douze » est remplacé par le nombre « vingt-quatre ».
II.- La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par l’instauration d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Amendement n° 2 AC présenté par M. Michel Herbillon
Après l’article 48
Insérer l’article suivant :
I.- L’article L. 115-3 du code du cinéma et de l’image animée est complété par un dernier alinéa ainsi rédigé :
« Le montant de la taxe ne peut entrer en compte dans la détermination de l’assiette des divers impôts, taxes et droits de toute nature autres que la taxe sur la valeur ajoutée auxquels est soumise la recette normale des salles de spectacle cinématographiques. »
II.- La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par l’instauration d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
(par ordre chronologique)
Ø Centre national du Cinéma et de l’Image (CNC) – M. Éric Garandeau, président, Mme Audrey Azoulay, directrice générale déléguée et M. Olivier Guillemot, directeur financier et juridique.
Ø Canal + – M. Frédéric Mion, secrétaire général, M. Manuel Alduy, directeur Cinéma du Groupe Canal+ et M. Olivier Zegna-Rata, directeur des relations extérieures.
Ø Société civile des auteurs, réalisateurs, producteurs (ARP) – M. Jean-Paul Salomé, président, Mme Florence Gastaud, déléguée générale et M. Dante Desarthe, vice-président.
Ø Confédération des producteurs audiovisuels (CPA) – M. Vincent Gisbert, délégué général du Syndicat des producteurs et créateurs d’émissions de télévision (SPECT) et M. Stéphane Le Bars, délégué général de l’USPA et délégué général du SPFA.
Ø Mme Catherine Ahmadi-Ruggeri, inspectrice générale des affaires culturelles, M. Bruno Parent et M. Philippe Pascal, inspecteurs des finances.
Ø Pathé – M. Jérôme Seydoux, co-président et M. Marc Lacan, directeur général en charge de la gestion.
Ø Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) – M. Pascal Rogard, directeur général et M. Guillaume Prieur, directeur relations institutionnelles.
Ø Union des producteurs de films (UPF) – M. Alain Terzian, président et Mme Marie-Paule Biosse Duplan, déléguée générale.
Ø Mme Laurence Franceschini, directrice générale des médias et des industries culturelles et M. Roland Husson, sous-directeur de l’audiovisuel.
Ø MK2 – M. Marin Karmitz, président.
Ø Société des réalisateurs de films (SRF) – M. Cyril Seassau, délégué général, Mme Pauline Durand Vialle, déléguée adjointe, M. Jean Jacques Jauffret, réalisateur membre du Conseil d’administration de la SRF et Mme Anne Zinn Justin, réalisatrice membre du Conseil d’administration de la SRF.
Ø Direction de France Télévisions – M. Christian Vion, directeur général adjoint en charge de la production et des moyens des antennes et Mme Anne Grand d’Esnon, directrice des relations institutionnelles.
Ø Association des producteurs de cinéma (APC) – M. Frédéric Goldsmith.
Ø Association des producteurs indépendants (API) – M. Guy Verrecchia, co-président et Mme Hortense de Labriffe, déléguée générale.
Ø EuropaCorp – M. Christophe Lambert, directeur général.
Ø Syndicat des producteurs indépendants – Mme Marie Masmonteil, présidente, M. Antoine Rein, président « Cinéma Long-métrage », M. Jérôme Caza, président « Télévision », Mme Juliette Prissard, déléguée générale, Mme Emmanuelle Mauger, déléguée « Télévision » et M. Cyril Smet, délégué « Cinéma ».