N° 150 - Proposition de résolution de M. Jean-Marc Ayrault tendant à la création d’une commission d’enquête sur les conditions de la libération des infirmières bulgares en Libye et sur les accords franco-libyens



Document

mis en distribution

le 13 août 2007


N° 150

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 août 2007.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête sur les conditions de la libération des infirmières bulgares en Libye et sur les accords franco-libyens,

(Renvoyée à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

PAR MM. Jean-Marc AYRAULT, François HOLLANDE, Mme Élisabeth GUIGOU, MM. Pierre MOSCOVICI, François LONCLE et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (1) et apparentés (2),
députés.

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(1)  Ce groupe est composé de : Mmes Patricia Adam, Sylvie Andrieux, MM. Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Mme Delphine Batho, M. Jean-Louis Bianco, Mme Gisèle Biemouret, MM. Serge Blisko, Patrick Bloche, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Jean-Michel Boucheron, Mme Marie-Odile Bouillé,

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M. Christophe Bouillon, Mme Monique Boulestin, M. Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Alain Cacheux, Jérôme Cahuzac, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. Laurent Cathala, Bernard Cazeneuve, Jean-Paul Chanteguet, Alain Claeys, Jean-Michel Clément, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mmes Catherine Coutelle, Pascale Crozon, M. Frédéric Cuvillier, Mme Claude Darciaux, MM. Michel Debet, Pascal Deguilhem, Mme Michèle Delaunay, MM. Guy Delcourt, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, Julien Dray, Tony Dreyfus, Jean-Pierre Dufau, William Dumas, Jean-Louis Dumont, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Mme Odette Duriez, MM. Philippe Duron, Olivier Dussopt, Christian Eckert, Henri Emmanuelli, Mme Corinne Erhel, MM. Laurent Fabius, Albert Facon, Mme Martine Faure, M. Hervé Féron, Mmes Aurélie Filippetti, Geneviève Fioraso, M. Pierre Forgues, Mme Valérie Fourneyron, MM. Michel Françaix, Jean-Claude Fruteau, Jean-Louis Gagnaire, Mme Geneviève Gaillard, MM. Guillaume Garot, Jean Gaubert, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Patrick Gille, Jean Glavany, Daniel Goldberg, Gaëtan Gorce, Mme Pascale Got, MM. Marc Goua, Jean Grellier, Mme Élisabeth Guigou, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. François Hollande, Mmes Sandrine Hurel, Monique Iborra, M. Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Michel Issindou, Éric Jalton, Serge Janquin, Henri Jibrayel, Régis Juanico, Armand Jung, Mme Marietta Karamanli, M. Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Patrick Lebreton, Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Michel Lefait, Jean-Marie Le Guen, Mme Annick Le Loch, M. Patrick Lemasle, Mmes Catherine Lemorton, Annick Lepetit, MM. Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Bernard Lesterlin, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Jean Mallot, Louis-Joseph Manscour, Mmes Jacqueline Maquet, Marie-Lou Marcel, MM. Jean-René Marsac, Philippe Martin, Mmes Martine Martinel, Frédérique Massat, MM. Gilbert Mathon, Didier Mathus, Mme Sandrine Mazetier, MM. Michel Ménard, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Arnaud Montebourg, Pierre Moscovici, Pierre-Alain Muet, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Mmes Marie-Renée Oget, Françoise Olivier-Coupeau, M. Michel Pajon, Mme George Pau-Langevin, MM. Christian Paul, Germinal Peiro, Jean-Luc Pérat, Jean-Claude Perez, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, M. Philippe Plisson, Mme Catherine Quéré, MM. Jean-Jack Queyranne, Dominique Raimbourg, Mme Marie-Line Reynaud, MM. Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Alain Rousset, Patrick Roy, Michel Sainte-Marie, Michel Sapin, Mme Odile Saugues, MM. Christophe Sirugue, Dominique Strauss-Kahn, Pascal Terrasse, Jean-Louis Touraine, Mme Marisol Touraine, MM. Philippe Tourtelier, Jean-Jacques Urvoas, Daniel Vaillant, Jacques Valax, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vauzelle, Michel Vergnier, André Vézinhet, Alain Vidalies, Jean-Michel Villaumé, Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque.

(2)  Mme Chantal Berthelot, MM. Guy Chambefort, Gérard Charasse, René Dosière, Paul Giacobbi, Mme Annick Girardin, MM. Joël Giraud, Christian Hutin, Serge Letchimy, Albert Likuvalu, Mmes Jeanny Marc, Dominique Orliac, Sylvia Pinel, Martine Pinville, M. Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Marcel Rogemont et Mme Christiane Taubira.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La libération des otages bulgares détenus en Libye pendant huit ans est la réparation d’une monstrueuse injustice. Condamnés sur des bases imaginaires, objets des sévices les plus ignobles, ces innocents ont, de l’aveu même des autorités libyennes, servi de « boucs émissaires » à la stratégie du colonel Khadafi pour obtenir la levée de l’embargo international pesant sur son régime.

Dès lors qu’aucune autre voie que la négociation n’était possible, nous avons soutenu les efforts de l’Union européenne pour permettre leur retour à la liberté. Nous approuvons l’aide sanitaire et l’appui financier aux familles des enfants contaminés par le virus du sida. Nous nous félicitons que la France, par l’entremise du Président de la République, ait donné l’impulsion décisive en s’engageant personnellement dans la gestion du dossier. Les émissaires choisis par le chef de l’État relèvent de sa responsabilité.

La commission d’enquête porte sur les conditions exactes de la libération des otages de Libye et sur les protocoles d’accord (mémorandum) entre la France et la Libye qu’a conclus le président de la République à Tripoli au lendemain de cette libération. La coïncidence entre les deux évènements, le flou et les déclarations contradictoires qui ont entouré le contenu de ces accords, mais aussi et peut être surtout la nature de la réconciliation de la France avec un régime qui fait bon marché des droits de l’homme et des règles internationales, méritent une information complète et impartiale des Français. C’est dans ce cadre que nous souhaitons que la commission d’enquête puisse procéder aux auditions de toutes les personnalités qui ont concouru à la gestion de ce dossier.

On ne peut en effet se satisfaire des affirmations du Président de la République et du Gouvernement selon lesquelles la France n’a consenti aucune contrepartie autre que celles prévues par l’accord entre l’Union européenne et la Libye. Plusieurs faits jettent le doute sur cette thèse officielle.

Ø Les déclarations du fils du colonel Khadafi – Saïf Al-Islam Khadafi – qui établissent un lien direct entre la libération des otages et les protocoles d’accord franco-libyens.

Ø Les annonces concernant la construction par la France d’une centrale nucléaire en Libye et une coopération en matière militaire et d’industrie de défense.

Ø La conclusion soudaine de contrats commerciaux entre des firmes françaises d’armement et le régime libyen.

Dans cet écheveau compliqué de négociations à plusieurs niveaux, la commission d’enquête de l’Assemblée nationale veut établir la transparence sur les questions qui brouillent ce dossier au risque de ternir son heureux dénouement.

Ø Y-a-t-il eu un troc entre la libération des otages et les accords franco-libyens ?

Ø Que contiennent exactement les protocoles d’accord franco-libyens ?

Ø Quelle est la portée de la coopération militaire et nucléaire ?

Ø Quels sont les garde-fous obtenus par la France sur leur utilisation ?

Ø Quelle est la nature exacte du volet financier ?

Ø Y-a-t-il d’autres contreparties qui n’ont pas été rendues publiques ?

Ø L’Union européenne a-t-elle été informée des accords militaires avec la Libye comme le prévoit le code de bonne conduite sur la vente de matériels sensibles décidé par le Conseil européen en 1999 ?

Au-delà de ces questions et faute d’explications claires du Président de la République, la commission d’enquête a pour but de comprendre les raisons d’une réconciliation aussi précipitée avec un régime dictatorial qui a utilisé l’arme du terrorisme contre notre pays (notamment en commettant l’attentat contre le DC 10 d’UTA) et qui s’est affranchi des règles internationales pendant tant d’années.

Ø La France a-t-elle obtenu de la Libye des garanties sur le respect des droits de l’homme et du droit international ?

Ø Jusqu’où peut aller la coopération avec le régime libyen ?

Ø Quel rôle la Libye va-t-elle jouer dans le projet de construction d’une union méditerranéenne ?

Dans une démocratie parlementaire, il est de la responsabilité du Parlement de contrôler l’action diplomatique de l’exécutif et d’en rendre compte devant les Français. Nous ne faisons aucun procès d’intention au Président de la République et au Gouvernement. Nous pouvons comprendre la nécessité de nouveaux rapports avec la Libye qui permettent à ce pays de rejoindre la communauté internationale. À la condition d’en connaître les tenants et les aboutissants et de pouvoir en débattre publiquement.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

Il est créé, en application des articles 140 et suivants du règlement de l’Assemblée nationale, une commission d’enquête de trente membres afin de connaître les conditions exactes de la libération des otages de Libye, ainsi que le contenu, la portée et les termes de la négociation des protocoles d’accord conclus par la France avec la Libye.


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