N° 2353 - Proposition de loi de M. Georges Ginesta visant à optimiser le temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels en généralisant les gardes de 8 heures



N° 2353

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 février 2010.

PROPOSITION DE LOI

visant à optimiser le temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels en généralisant les gardes de 8 heures,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Georges GINESTA, Patrick BEAUDOUIN, Jean-Yves BONY, Loïc BOUVARD, Chantal BRUNEL, Gilles CARREZ, Jean-Louis CHRIST, Olivier DASSAULT, Lucien DEGAUCHY, Marianne DUBOIS, Daniel FASQUELLE, André FLAJOLET, Marc FRANCINA, Jean-Pierre GIRAN, Jean-Pierre GORGES, Anne GROMMERCH, Jacques GROSPERRIN, Arlette GROSSKOST, Françoise HOSTALIER, Maryse JOISSAINS-MASINI, Michel LEZEAU, Jean-François MANCEL, Jean-Pierre MARCON, Jean-Claude MATHIS, Pierre MÉHAIGNERIE, Alain MOYNE-BRESSAND, Jacques REMILLER, Camille de ROCCA-SERRA, Yves VANDEWALLE, François VANNSON, Jean-Sébastien VIALATTE, Philippe VITEL, Michel VOISIN et Michel HEINRICH,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les sapeurs-pompiers professionnels ou volontaires entretiennent avec les Français une relation privilégiée. Ce lien justifié s’explique largement par les missions qui sont les leurs dans la protection des personnes et des biens et par la prévention et la lutte contre les risques de toute nature.

Cependant, des travaux récents de la Commission des finances de l’Assemblée nationale ont montré que la gestion du corps des sapeurs-pompiers professionnels n’était plus adaptée aux évolutions constatées depuis plusieurs années dans les secours aux personnes.

Le rapport d’information (n° 1829), présenté en juillet 2009 par MM. Georges Ginesta, Bernard Derosier et Thierry Mariani au nom de la Mission d’évaluation et de contrôle (MEC) de cette commission, conclut à une dérive préoccupante des dépenses des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS).

Au nombre des problèmes identifiés figure l’organisation du temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels.

Fondée essentiellement sur des gardes de 24 heures (décret n° 2001-1382 du 31 décembre 2001), ce dispositif, historiquement justifié, n’est plus adapté aux activités actuelles des SDIS.

En effet, la direction de la sécurité civile (DSC) du ministère de l’intérieur montre, d’après les dernières statistiques, qu’en moyenne, les sapeurs-pompiers professionnels effectuent 90 gardes par an. Grâce, ou à cause de la législation sur le temps de travail et des règles de récupération, ils sont donc absents de leur lieu de travail plus de 270 jours par an. Ce temps est largement utilisé par certains pour effectuer des vacations en tant que sapeurs-pompiers volontaires, y compris dans leurs SDIS de rattachement, en contradiction totale avec l’attachement qu’ils manifestent au système de gardes de 24 heures. Ils suppriment ainsi le temps de vacation historiquement destiné aux sapeurs-pompiers volontaires dans le cadre d’un engagement citoyen pour les autres catégories de la population.

Le système n’est cependant pas uniforme. En effet, le décret de 2001 sur le temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels permet de moduler les gardes en fonction des obligations du service. Il ressort des statistiques de 2007, qu’en moyenne, 63 % des SDIS pratiquaient des gardes de 24 heures, 26 % des gardes de 12 heures, 3 % des gardes de 10 heures, 4 % des gardes de 8 heures et 4 % d’autres systèmes de garde (gardes mixtes). Ces données démontrent que, bien que majoritairement pratiquées, les gardes de 24 heures ne sont pas une fatalité et qu’une organisation différente du temps de travail est possible.

En effet, les données statistiques montrent aussi qu’entre 23 heures et 6 heures du matin il y a très peu d’interventions. Il a ainsi été constaté que, pour la France entière, chaque sapeur-pompier professionnel effectuait en moyenne 143 interventions par an (avec une variation de 50 à 296 selon les SDIS). Pour prendre l’exemple des sapeurs-pompiers professionnels de Reims dans la Marne, la durée de travail effectif moyenne est de 2 heures 17 minutes par garde de 24 heures.

Dans ces conditions, et partant du principe qu’un métier que l’on exerce peu est un métier que l’on exerce mal, on est en droit de se poser la question de la capacité opérationnelle des sapeurs-pompiers professionnels pris individuellement et de la persistance des gardes de 24 heures. Les sapeurs-pompiers eux-mêmes en conviennent indirectement. Le faible nombre de leurs interventions les amène en effet à multiplier les formations et les exercices d’entrainement opérationnel afin de garder un haut niveau de compétence ce qui a aussi conduit à la création de plus de quatre-vingts écoles de sapeurs-pompiers en France.

C’est pourquoi je propose la généralisation des gardes de 8 heures. Avec ce dispositif, le temps annuel légal étant de 1 607 heures, les sapeurs-pompiers seraient présents deux cent jours ouvrés par an dans les centres de secours et exerceraient davantage leur métier. Cette mesure supprimerait la nécessité d’aménager des chambres à coucher individuelles dans les centres de secours pour les affecter à d’autres usages. Cette rationalisation permettrait également de supprimer plusieurs des écoles de sapeurs-pompiers autorisant ainsi à réduire les frais de fonctionnement.

Cette nouvelle organisation du temps de travail aurait aussi l’intérêt d’être moins coûteuse, car elle permettrait de moduler les effectifs en fonction de l’activité opérationnelle tout au long de la journée. Revoir, dans ce cadre, la planification des tâches devient une nécessité afin de permettre une réelle économie des ressources humaines et matérielles.

L’évaluation du décret de 2001 sur le temps de travail n’ayant jamais été réellement conduite, il est temps d’étendre les gardes de 8 heures à tous les centres de secours.

C’est pour toutes ces raisons qu’il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, d’adopter la proposition de loi suivante.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Le chapitre IV du titre II du livre IV de la première partie de la partie législative du code général des collectivités territoriales est complété par une section 7, intitulée « Organisation du temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels » et comprenant un article L. 1424-7 ainsi rédigé :

« Art. L. 1424-7. – La durée de travail effectif journalier ne peut pas excéder 8 heures consécutives.

« L’organisation de la journée de travail s’adapte aux contraintes définies par la durée de travail journalier.

« Les effectifs de sapeurs-pompiers s’adaptent aux contraintes définies par l’organisation de la journée de travail. »

Article 2

Les modalités d’application de l’article 1er sont fixées par décret en Conseil d’État.


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