N° 3971
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 novembre 2011.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENE
sur le projet de création d’un
fonds européen pour la démocratie,
(Renvoyée à la commission des affaires européennes.)
présentée par
M. Jean-Claude MIGNON,
député.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
En ces temps de difficultés budgétaires et économiques, il est de notre devoir à l’égard du contribuable européen d’éliminer dans toute la mesure du possible duplications et redondances. Il est a fortiori inacceptable d’en créer de nouvelles au niveau communautaire ! C’est pourtant ce qui s’est passé au cours des dernières années avec la création de diverses agences de l’Union européenne à l’utilité pour le moins incertaine, un excellent exemple de ces dérives étant fourni par l’Agence des droits fondamentaux. Il est étonnant de vouloir dupliquer à grands frais ce que fait mieux et à moindres coûts le Conseil de l’Europe.
Cet état de fait est d’autant plus contestable que les États sont entrés en la manière dans une logique quelque peu schizophrénique. À Strasbourg, au Conseil de l’Europe, il faut faire des économies constantes, au point de menacer parfois la pérennisation de l’institution, au nom d’un discours de rigueur qui s’atténue de plus en plus dès lors que l’on se rapproche de Bruxelles. Là également, je renvoie ceux qui en douteraient à l’évolution comparée des budgets de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et de l’Agence des droits fondamentaux. Mme Marie-Louise Bemelmans-Videc, membre néerlandaise de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe vient ainsi de relever que le budget de la Cour européenne des droits de l’homme était inférieur au budget des publications de l’Union européenne et représentait moins du quart du budget de la Cour de Justice.
Ce serait une étrange logique d’aménagement du territoire que celle qui consisterait à créer une nouvelle structure dans chaque État membre de l’Union européenne.
Mettons fin à une logique d’un autre temps et revenons à l’essentiel, à l’idée qu’unis au sein de l’Europe, nous ferons mieux face aux difficiles défis que nous devrons relever. Et laissons chacune des deux organisations paneuropéennes faire ce qu’elle fait le mieux.
C’est la raison pour laquelle je vous invite à adopter la présente proposition de résolution.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE
Article unique
L’Assemblée nationale,
Vu l’article 88-4 de la Constitution,
Vu le rapport au Parlement européen de M. Alexander Lambsdorff (INI/20 2011/2245) sur les modalités de l’éventuelle création d’un Fonds européen pour la démocratie,
– constate avec étonnement l’idée de créer un Fonds européen pour la démocratie, qui serait institué par une Convention internationale et s’inscrirait dans le cadre de la politique de voisinage de l’Union européenne ;
– s’interroge sur la cohérence politique de ceux qui soutiennent une telle initiative en pleine période de crise budgétaire aiguë dans un grand nombre de pays membres de l’Union européenne alors même que le Conseil de l’Europe remplit déjà cette mission ;
– rappelle que la principale limite opposée au Conseil de l’Europe lorsqu’il entend exercer la totalité de ses missions est d’ordre budgétaire et s’étonne que cette contrainte disparaisse dès lors que la démarche suivie s’inscrit dans le cadre de l’Union européenne ;
– souligne qu’à l’exception du Belarus, les États concernés par le partenariat oriental de l’Union européenne appartiennent au Conseil de l’Europe et que celui-ci développe de très efficaces mécanismes de suivi (« monitoring ») ;
– insiste sur le fait que l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a su dépasser la logique territoriale pour accorder le statut de partenaire pour la démocratie au Maroc et au Conseil national palestinien, répondant de la sorte aux objectifs de la politique étrangère de l’Union européenne ;
– fait observer que le Conseil de l’Europe est la seule organisation multilatérale mondiale à avoir accordé un statut de partenaire aux ONG internationales, via la Conférence des OING ;
– renouvelle son souhait que l’Union européenne ne duplique pas systématiquement et à grands frais les organes et politiques du Conseil de l’Europe, à l’image de l’Agence des droits fondamentaux ou de la création d’une nouvelle assemblée parlementaire internationale pour le partenariat oriental (Euronest) ;
– souligne que la création dans chaque État membre d’une nouvelle organisation, comme prévu en l’espèce, ici à Varsovie, répond certainement à une logique d’aménagement du territoire communautaire, mais en aucun cas à celle d’une politique rationnelle et respectueuse du contribuable européen ;
– invite en conséquence le gouvernement français à s’opposer très fermement à une initiative particulièrement inopportune à l’heure où l’Union européenne avance sur la voie de l’adhésion à la convention européenne des droits de l’homme et que s’esquisse ainsi un rapprochement bienvenu entre les deux grandes organisations paneuropéennes.
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