N° 4168 - Proposition de loi de M. Jean-Paul Garraud tendant à renforcer l'effectivité de la peine complémentaire d'interdiction du territoire français et visant à réprimer les délinquants réitérants



N° 4168

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 janvier 2012.

PROPOSITION DE LOI

tendant à renforcer l’effectivité de la peine complémentaire d’interdiction du territoire français
et visant à réprimer les délinquants réitérants,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Jean-Paul GARRAUD, Jacques REMILLER, Jean-Pierre SCHOSTECK, Éric CIOTTI, Philippe GOUJON, Claude BODIN, Jean-Marc ROUBAUD, Lionnel LUCA, Patrick LABAUNE, Brigitte BARÈGES, Christian MÉNARD, Christian VANNESTE, Alain COUSIN, Jean-Claude BOUCHET, Jean-Pierre NICOLAS, Véronique BESSE, Dominique SOUCHET, Charles de la VERPILLIÈRE, Didier JULIA, Jean-Michel COUVE, Patrice CALMÉJANE, Thierry LAZARO, Bernard CARAYON, Richard MALLIÉ, Michel ZUMKELLER, Philippe MEUNIER, Philippe COCHET, Jean-Michel FERRAND, Alain MOYNE-BRESSAND, Georges MOTHRON, Jacques MYARD, Christophe GUILLOTEAU, Nicolas DHUICQ, Patrice VERCHÈRE, Daniel SPAGNOU, Michel TERROT, René-Paul VICTORIA, Dominique TIAN, Olivier JARDÉ, Chantal BOURRAGUÉ, Jean PRORIOL, Marie-Louise FORT, Isabelle VASSEUR, Jean-François LAMOUR, Yves ALBARELLO, Alfred ALMONT, Jean AUCLAIR, Patrick BEAUDOUIN, Étienne BLANC, Philippe BOËNNEC, Marcel BONNOT, Valérie BOYER, Françoise BRANGET, Françoise BRIAND, Philippe BRIAND, Bernard BROCHAND, Chantal BRUNEL, Dominique CAILLAUD, Louis COSYNS, Lucien DEGAUCHY, Marie-Christine DALLOZ, Olivier DASSAULT, Marc-Philippe DAUBRESSE, Bernard DEBRÉ, Jean-Pierre DECOOL, Richard DELL’AGNOLA, Bernard DEPIERRE, Éric DIARD, Michel DIEFENBACHER, Jean-Pierre DOOR, Jean-Pierre DUPONT, Paul DURIEU, Christian ESTROSI, Marc FRANCINA, Yves FROMION, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Claude GATIGNOL, Bernard GÉRARD, Alain GEST, Franck GILARD, Georges GINESTA, Jean-Pierre GIRAN, Claude GOASGUEN, Didier GONZALES, Jean-Pierre GORGES, Philippe GOSSELIN, Michel GRALL, Jacques GROSPERRIN, Pascale GRUNY, Louis GUÉDON, Gérard HAMEL, Philippe HOUILLON, Jacqueline IRLES, Maryse JOISSAINS-MASINI, Laure de LA RAUDIÈRE, Jacques LAMBLIN, Raymond LANCELIN, Marc LE FUR, Michel LEJEUNE, Dominique LE MÈNER, Jean-François MANCEL, Jean-Pierre MARCON, Christine MARIN, Muriel MARLAND-MILITELLO, Alain MARLEIX, Franck MARLIN, Patrice MARTIN-LALANDE, Henriette MARTINEZ, Jean-Claude MATHIS, Damien MESLOT, Pierre MORANGE, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Philippe MORENVILLIER, Étienne MOURRUT, Jean-Marc NESME, Yves NICOLIN, Yanick PATERNOTTE, Béatrice PAVY, Bérengère POLETTI, Josette PONS, Didier QUENTIN, Éric RAOULT, Jean-Luc REITZER, Bernard REYNÈS, Jean-Marie ROLLAND, Francis SAINT-LÉGER, Paul SALEN, Alain SUGUENOT, Alfred TRASSY-PAILLOGUES, François VANNSON, Jean-Sébastien VIALATTE, Philippe VITEL, Gérard VOISIN, Michel VOISIN, et André WOJCIECHOWSKI,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Il résulte du dernier rapport 2011 de l’observatoire national de la délinquance et des réponses pénales que, pour certains délits de masse, comme les cambriolages ou les vols avec violences, le nombre de ressortissants étrangers mis en cause, depuis 2008, a respectivement augmenté de 40 % et de 37,4 %.

Dans ce contexte, il est opportun de renforcer la législation à l’encontre des délinquants de nationalité étrangère et plus généralement à l’encontre de ceux qui violent de manière réitérée la loi pénale.

En premier lieu, en ce qui concerne les étrangers qui soit résident irrégulièrement en France, soit y résident régulièrement mais depuis moins de trois ans, et qui se seront rendus coupables d’un crime ou d’un délit puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement, la peine complémentaire d’interdiction du territoire français doit être prononcée par principe par la juridiction, qui disposera toutefois de la possibilité d’y déroger.

La peine d’interdiction du territoire français, prononcée par la juridiction, ne pourra être inférieure à certains seuils allant d’un an pour un délit puni de trois ans d’emprisonnement à quatre ans lorsque la peine encourue s’élève à dix ans d’emprisonnement. Il en est de même pour les crimes : la peine d’interdiction du territoire ne pourra plus être inférieure à six ans pour un crime puni de quinze ans d’emprisonnement et dix ans lorsque la peine encourue s’élève à trente ans.

La présente proposition de loi ne touche pas à l’économie générale actuelle de la peine d’interdiction du territoire français qui demeure une peine complémentaire et qui, en application de l’article 131-30 du code pénal, lorsqu’elle est prévue par la loi, peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l’encontre de tout étranger coupable d’un crime ou d’un délit sous réserve des dispositions des articles 131-30-1 et 131-30-2 du code pénal qui tiennent compte de la situation personnelle de la personne condamnée.

Au-delà des restrictions légales énoncées aux articles 131-30-1 et 131-30-2, à l’instar des autres dispositions de peines plancher et pour garantir le principe constitutionnel de la personnalisation des peines, la juridiction de jugement pourra décider, par une décision spécialement motivée, de ne pas prononcer cette peine ou déroger à cette durée en prononçant une peine complémentaire inférieure à ces seuils.

En second lieu, dans le souci de lutter plus efficacement contre les actes de délinquance commis par une frange de la population qui a fait de la violation de la loi pénale son mode habituel de vie, la proposition de loi vise à renforcer les moyens de répression des infractions.

La loi n° 2007-1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des mineurs et des majeurs a introduit dans le code pénal les articles 132-18-1 et 132-19-1 relatifs aux peines minimales de privation de liberté pour les crimes et les délits commis en état de récidive légale.

Afin de renforcer l’efficacité de la réponse pénale, il est proposé d’appliquer, à certaines conditions, aux infractions commises en réitération un dispositif similaire à celui des peines planchers prévues, depuis la loi du 10 août 2007, pour les infractions commises en état de récidive légale. Des peines minimales seraient ainsi prévues en cas de réitération telle que définie à l’article 132-16-7 du code pénal issu de la loi n° 2005-1549 du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales : « Il y a réitération d’infractions pénales lorsqu’une personne a déjà été condamnée définitivement pour un crime ou un délit et commet une nouvelle infraction qui ne répond pas aux conditions de la récidive légale ».

Ces dispositions permettront de mieux sanctionner les parcours délinquants caractérisés par la multiplication des agissements venant troubler l’ordre public selon différentes modalités (atteintes aux biens, atteintes aux personnes, infractions à la législation sur les stupéfiants..).

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Après le premier alinéa de l’article 131-30 du code pénal, sont insérés neuf alinéas ainsi rédigés :

« Sous réserve des dispositions des articles 131-30-1 et 131-30-2, le prononcé de la peine d’interdiction du territoire français est obligatoire à l’encontre de toute personne de nationalité étrangère qui soit réside irrégulièrement en France, soit réside en France depuis moins de trois ans, et qui est déclarée coupable d’un crime ou d’un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale à trois ans. La durée de la peine d’interdiction du territoire français ne peut être inférieure aux seuils suivants :

« 1° Un an, si le délit est puni de trois ans d’emprisonnement ;

« 2° Dix-huit mois, si le délit est puni de cinq ans d’emprisonnement ;

« 3° Trente mois, si le délit est puni de sept ans d’emprisonnement ;

« 4° Quatre ans, si le délit est puni de dix ans d’emprisonnement ;

« 5° Six ans, si le crime est puni de quinze ans de réclusion ou de détention ;

« 6° Huit ans, si le crime est puni de vingt ans de réclusion ou de détention ;

« 7° Dix ans, si le crime est puni de trente ans de réclusion ou de détention.

« Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer cette peine ou de la prononcer pour une durée inférieure à ces seuils en considération des circonstances de l’infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d’insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci. »

Article 2

Après l’article 132-18-1 du même code, il est inséré un article 132-18-2 ainsi rédigé :

« Art. 132-18-2. – Pour les crimes commis en réitération au sens de l’article 132-16-7 dans le délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la précédente condamnation est devenue définitive, la peine d’emprisonnement, de réclusion ou de détention ne peut être inférieure aux seuils suivants :

« 1° Trois ans, si le crime est puni de quinze ans de réclusion ou de détention ;

« 2° Quatre ans, si le crime est puni de vingt ans de réclusion ou de détention ;

« 3° Cinq ans, si le crime est puni de trente ans de réclusion ou de détention ;

« 4° Sept ans, si le crime est puni de la réclusion ou de la détention à perpétuité.

« Toutefois, la juridiction peut prononcer une peine inférieure à ces seuils en considération des circonstances de l’infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d’insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci. »

Article 3

Après l’article 132-19-2 du même code, il est inséré un article 132-19-3 ainsi rédigé :

« Art. 132-19-3. – Pour les délits commis en réitération au sens de l’article 132-16-7 dans le délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la précédente condamnation est devenue définitive, la peine d’emprisonnement ne peut être inférieure aux seuils suivants :

« 1° Six mois, si le délit est puni de trois ans d’emprisonnement ;

« 2° Un an, si le délit est puni de cinq ans d’emprisonnement ;

« 3° Dix-huit mois, si le délit est puni de sept ans d’emprisonnement ;

« 4° Deux ans, si le délit est puni de dix ans d’emprisonnement.

« Toutefois, la juridiction peut prononcer, par une décision spécialement motivée, une peine inférieure à ces seuils ou une peine autre que l’emprisonnement en considération des circonstances de l’infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d’insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci. »


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