N° 671 - Rapport d'information de M. Patrice Martin-Lalande déposé en application de l'article 146 du règlement, par la commission des finances, de l'économie générale et du Plan relatif à la communication de la Cour des comptes sur le bilan de la réforme de la redevance audiovisuelle



N° 671

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 31 janvier 2008.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 146 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

relatif à la communication de la Cour des comptes
sur le bilan de la réforme de la redevance audiovisuelle

ET PRÉSENTÉ

par M. Patrice MARTIN-LALANDE,

Député.

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COMMUNICATION DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL 5

A.– LA RÉFORME DE LA COLLECTE DE LA REDEVANCE : UNE RÉUSSITE TECHNIQUE ET ORGANISATIONNELLE QUI PERMET UNE ÉCONOMIE DE 100 MILLIONS D’EUROS PAR AN 6

B.– LA QUESTION DES EXONÉRATIONS SOCIALES ET DE LA JUSTICE FISCALE 7

C.– UNE RÉPONSE PARTIELLE AU BESOIN DE FINANCEMENT DES SOCIÉTÉS PUBLIQUES 10

EXAMEN EN COMMISSION 15

ANNEXE : COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES RELATIVE AU BILAN DE LA RÉFORME
DE LA REDEVANCE AUDIOVISUELLE
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COMMUNICATION DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Suivant l’esprit tant des travaux de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC) de votre commission des Finances et des rapports présentés par votre Rapporteur général (1) et votre Rapporteur spécial (2) que de la LOLF (3) elle-même, la redevance audiovisuelle a fait l’objet d’une réforme de grande ampleur dans la loi de finances initiale pour 2005 (4). L’aspect le plus visible en a été un recouvrement désormais adossé à celui de la taxe d’habitation.

Depuis lors, certaines critiques ont été émises, s’exprimant notamment à travers des amendements récurrents lors des débats budgétaires successifs : montant trop, ou insuffisamment, élevé, régime d’exonérations inéquitable, collecte complexe et peu transparente, confusion avec les impôts locaux…

Afin de disposer d’un point de vue objectif sur cette réforme et en application des dispositions du 2° de l’article 58 de la LOLF, votre commission des Finances a donc demandé à la Cour des comptes, le 12 octobre 2006, de dresser le bilan de la réforme de la redevance audiovisuelle.

En réponse à cette demande, la Cour lui a adressé une communication de grande qualité, qui fait apparaître que la réforme de la redevance audiovisuelle :

– est un succès véritable en ce qui concerne tant la simplification et le coût de la collecte que la lutte contre la fraude et le service rendu à l’usager ;

– est un « demi-succès » en termes de restructuration des services ;  

– a globalement renforcé l’acceptabilité de la redevance ;

– est neutre sur le plan de la justice fiscale ;

– n’apporte pas de réponse du point de vue du rendement de la redevance et de son aptitude à financer durablement les sociétés de l’audiovisuel public, la légère croissance du produit de la redevance restant inférieure à celle des budgets de ces sociétés.

Cette communication est publiée dans le présent rapport d’information. Votre Rapporteur spécial souhaite, au préalable, formuler trois séries d’observations sur les conclusions de la Cour des comptes, dont il salue et partage l’analyse.

1.– LA RÉFORME DE LA COLLECTE DE LA REDEVANCE : UNE RÉUSSITE TECHNIQUE ET ORGANISATIONNELLE QUI PERMET UNE ÉCONOMIE DE 100 MILLIONS D’EUROS PAR AN

L’un des objectifs clefs de la réforme de la redevance était bien de simplifier la collecte et d’en réduire le coût… tout en luttant plus efficacement contre la fraude, vu l’ampleur de l’évasion fiscale dont la redevance faisait l’objet avant 2005. De ce point de vue, le bilan établi par la Cour des comptes est globalement positif.

Rejoignant le constat de la Cour comme celui de la direction du Budget, on peut ainsi relever que la réforme de la redevance a permis de générer en 2006 des recettes brutes en hausse de près de 45 millions d’euros (à 2 256,8 millions d’euros) par rapport aux encaissements bruts réalisés au titre de l’année 2004, soit + 2 % en deux ans. Elle a également permis non seulement – comme on le verra ci-après – d’exonérer un plus grand nombre de contribuables et de diminuer le montant de redevance, mais également de limiter la taxe à une seule redevance audiovisuelle par foyer, quel que soit le nombre de postes dont sont équipés le ou les locaux affectés à l’habitation occupés par le redevable et ses enfants rattachés à son foyer fiscal.

S’agissant de l’amélioration du rendement de la redevance tout d’abord, il va de soi que la diminution du taux de fraude est mécaniquement liée à l’abandon de la taxation des résidences secondaires, choix politique qu’il convient de rappeler. Comme le constate la Cour des comptes, désormais « les fraudeurs potentiels sont plus aisément identifiables » ! S’agissant d’une taxe dont le régime était aussi complexe que celui de la redevance, la simplification correspondait à un assainissement, qu’exigeait aussi l’évolution technologique. En effet, la redevance n’était due, dans une résidence secondaire, que pour un téléviseur fixe, ce qui en exonérait les détenteurs d’appareils de réception les plus modernes (téléviseurs mobiles, ordinateurs portables).

Par ailleurs, en adossant le recouvrement de la redevance à la taxe d’habitation et en émettant un seul avis d’imposition pour les deux taxes, la réforme a permis de générer des gains de gestion importants : évaluant le coût complet de la réforme (économies de gestion par rapport à l’ancien système – trésorerie, contrôle, contentieux – et coûts supplémentaires engendrés par la réforme), la Cour des comptes parvient au résultat suivant : « en euros constants, l’économie réalisée est de 100 millions d’euros par an, ce qui représente une diminution de 65 % des coûts ».

Enfin, si la réforme est également une réussite en matière de restructuration des services, le rapport de la Cour des comptes fait apparaître que les économies de personnel liées à la suppression du service de la redevance n’ont été pas totalement à la hauteur des gains de productivité. À ce propos, la Cour relève, d’une part, que les mesures financières dérogatoires liées à la réforme et au plan d’accompagnement social ont été prises dans des conditions irrégulières « car elles nécessitaient des textes réglementaires, qui n’ont pas été pris ».

D’autre part et surtout, si 499 agents (soit plus de la moitié des agents à reclasser) ont été réaffectés à des activités nouvelles (5), 465 agents ont été reclassés dans le réseau de la direction générale de la Comptabilité publique (DGCP) pour y participer aux activités traditionnelles du Trésor public « au cours d’une année où le total des effectifs de la DGCP a diminué de 480 agents ».

Le rapport de la Cour des comptes permet donc d’établir que, par cet effet de « vases communicants », la DGCP s’est « affranchie, en réalité, des contraintes de restructuration et de l’amélioration de productivité qui pouvait être escomptée de la diminution globale de 480 agents en 2005 de l’effectif total employé par la DGCP ».

On rappellera, pour autant, que la réforme s’est traduite par la suppression du service de la redevance audiovisuelle au 1er octobre 2005, symbole fort des économies réalisées grâce à cette modernisation. Au total, la Cour des comptes constate que :

– l’organisation du recouvrement a été « incontestablement simplifiée », avec par exemple la déclaration de détention ou de non détention d’un téléviseur à une date unique (au moment de la déclaration des revenus), et non plus à la date anniversaire de l’acquisition du récepteur ;

– le service rendu au contribuable a été « amélioré, car les centres des impôts et les trésoreries sont désormais compétents pour cet impôt, alors que seuls les six centres de la redevance l’étaient auparavant » ;

– la réforme a été mise à profit pour « mettre en place des structures nouvelles en relation directe avec l’usager, de nature à faciliter ses démarches relatives au règlement d’impôts ou d’amendes, en dehors de la redevance ».

2.– LA QUESTION DES EXONÉRATIONS SOCIALES ET DE LA JUSTICE FISCALE

S’agissant de la « neutralité fiscale » de la réforme, votre Rapporteur spécial tient à préciser que la Cour des comptes, au moment de la rédaction de son rapport, en octobre dernier, ne pouvait que tenir pour acquis le cadre législatif dessiné par le Parlement dans la loi de finances pour 2004, dont la philosophie repose – rappelons-le – sur un mouvement d’ampleur équivalente entre, d’un côté, le nombre de contribuables nouvellement exonérés et, de l’autre, celui des nouveaux redevables (… à savoir les quelque 700 000 « droits acquis » dont il a beaucoup été question, l’automne dernier).

les « droits acquis » ou le maintien provisoire d’exonÉrations de redevance

Alors que la réforme avait étendu significativement le champ des personnes exonérées en permettant à un million de foyers modestes – qui payaient la redevance en 2004 – de ne plus la payer, la poursuite de l’alignement des conditions de dégrèvement de la redevance sur celles de la taxe d’habitation devait entraîner à partir de 2008 l’assujettissement à la redevance d’environ 700 000 foyers supplémentaires qui, bien que payant la taxe d’habitation, en étaient exonérés avant 2005.

En effet, lors de la réforme de la redevance audiovisuelle, l’alignement de la collecte sur celle de la taxe d’habitation a eu pour effet de faire entrer dans l’assiette d’imposition un certain nombre de redevables déjà assujettis à la taxe d’habitation mais jusqu’alors exonérés de redevance. Conformément au 3° de l’article 1605 bis du code général des impôts, les redevables de la redevance, lorsqu’ils ne sont pas dégrevés au titre du droit commun (prévu par le 2° du même article) et alignés sur les exonérations ou dégrèvements de taxe d’habitation, ont pu bénéficier de droits acquis aux conditions suivantes :

– ils étaient âgés d’au moins 65 ans au 1er janvier 2004, non imposables à l’impôt sur le revenu (revenus de 2002), non redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune (au titre de 2002) et n’habitaient pas avec des personnes imposables à l’impôt sur le revenu ;

– ou bien ils étaient mutilés, invalides civils ou militaires, ou atteints d’une invalidité ou d’une infirmité d’au moins 80 % et avaient un revenu fiscal de référence de 2003 n’excédant pas le seuil défini au I de l’article 1417 du code général des impôts, sous réserve de ne pas être redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune et de satisfaire à la condition de cohabitation. Soulignons que par tolérance administrative, les personnes redevables de taxe d’habitation qui hébergeaient chez elles une personne infirme pouvaient bénéficier de cette exonération.

Afin d’aménager une transition supportable pour cette population de contribuables (très majoritairement composée de personnes de plus de 65 ans), le législateur avait accepté de prolonger trois ans de plus (de 2005 à 2007) l’exonération dont ils bénéficiaient. La fin de cette mesure provisoire, qui touchait encore 880 000 foyers fin 2006 (et probablement 700 000 aujourd’hui), aurait dû avoir pour conséquence d’augmenter les encaissements de redevance d’environ 100 millions d’euros en 2008.

Si la disparition de ces « droits acquis » est inévitable pour aligner in fine les dégrèvements de redevance sur les exonérations de la taxe d’habitation, le législateur a considéré avec sagesse qu’il était plus équitable :

– de pérenniser le dégrèvement de redevance pour la part la plus fragile de ces contribuables (3 % du total, soit 27 866 foyers en 2006), à savoir certains mutilés, invalides ou infirmes ;

– de ménager une sortie moins rapide du dispositif dont bénéficient ces personnes âgées.

En décidant récemment de prolonger ces « droits acquis » en 2008, le Parlement a donc modifié l’équilibre initial de la réforme dessinée par la loi de finances pour 2005 et, ce faisant, la « neutralité fiscale » évoquée par la Cour.

Le coût des amendements récemment adoptés reste néanmoins limité à une centaine de millions d’euros en 2008, étant entendu que les contribuables de plus de 65 ans concernés par le maintien de cette exonération l’an prochain devraient réintégrer le régime de droit commun en 2009.

les exonÉrations de redevance dans le dÉbat parlementaire

La question du maintien des dégrèvements de redevance au titre des droits acquis a été abordée à l’occasion de l’examen des projets de loi :

– de finances pour 2008 ;

– de finances rectificative pour 2007 ;

– pour le pouvoir d’achat.

La loi de finances pour 2008 (article 142 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007) a pérennisé le dégrèvement de redevance dont bénéficient les contribuables fragilisés par une situation de handicap lourd (amendement présenté par votre Rapporteur spécial) et qui voient donc leur exonération maintenue sans limitation de durée. Son coût a été évalué par le Gouvernement à 2,7 millions d’euros.

La loi de finances rectificative pour 2007 (article 29 de la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007) a accordé, pour la seule année 2008, un dégrèvement de 50 % du montant de la redevance audiovisuelle due par les contribuables âgés de plus de 65 ans (au 1er janvier 2004) concernés par la disparition du régime d’exonération provisoire (amendement présenté par nos collègues Censi, Raison, Apparu, Giscard d’Estaing et votre Rapporteur spécial). Son coût a été évalué par le Gouvernement à 50 millions d’euros.

Néanmoins, la future loi pour le pouvoir d’achat devrait – en définitive et lorsque cette disposition aura été promulguée – accorder une exonération complète de redevance pour ces mêmes contribuables en 2008 (amendement du Gouvernement adopté par l’Assemblée nationale en première lecture, le 20 décembre dernier, et adopté conforme par le Sénat le 24 janvier). Le coût précédemment évoqué serait alors porté à 100 millions d’euros.

Votre Rapporteur spécial considère que la question devra être définitivement tranchée à l’occasion du projet de loi de finances pour 2009, dans le cadre de la réforme globale du financement de l’audiovisuel public, ce que le Gouvernement paraît lui-même admettre puisqu’il s’est engagé à présenter, avant le 15 octobre 2008, un rapport au Parlement sur la mise en œuvre du dispositif de maintien des exonérations de redevance audiovisuelle pour les personnes qui en bénéficiaient avant la loi de finances pour 2005.

On rappellera simplement que l’alignement des conditions d’exonération de redevance sur celles applicables en matière de taxe d’habitation reste un facteur de clarté et d’équité : liée à un élément très important de la vie des Français, la taxe d’habitation bénéficie, en effet, d’un régime d’exonérations dont le caractère de justice sociale est testé en permanence, dans un nombre de cas très diversifié, sans faire l’objet de contestations fortes.

3.– UNE RÉPONSE PARTIELLE AU BESOIN DE FINANCEMENT DES SOCIÉTÉS PUBLIQUES

En 2008, et pour la quatrième année consécutive, la charge fiscale pesant sur les foyers français au titre de l’audiovisuel public restera stable (6). Le montant de la redevance audiovisuelle due par les particuliers reste en effet inchangé à 116 euros en France métropolitaine et à 74 euros outre-mer. Il s’agit d’un choix politique que le Gouvernement et la majorité parlementaire assument.

Pour autant, votre Rapporteur spécial a la conviction qu’il est nécessaire de faire croître la redevance au niveau de financement sur lequel se sont engagés le Gouvernement et les sociétés audiovisuelles dans le cadre des contrats d’objectifs et de moyens (COM). Ceux-ci ont progressé de 2,5 % par an en moyenne depuis 2004, progresseront de 3,6 % en 2008 et devraient, en application des COM, progresser encore de 3,1 % en 2009…

Comme le rappelait – l’an dernier déjà – la Cour des comptes (7), « à structures et conditions de fonctionnement inchangées de l’audiovisuel public », le risque est grand de voir apparaître, plus rapidement que prévu, « la nécessité d’un financement structurel par le budget général pour un montant significatif, en complément des ressources de la redevance et des remboursements de dégrèvements prévus par la loi ».

Faut-il alors considérer nécessaire un réexamen approfondi de la redevance audiovisuelle, non plus comme en 2004 sous l’angle des conditions de la collecte, mais dans ses modalités et peut-être dans ses principes ? La question doit être posée.

Comme le fait remarquer la Cour dans la communication publiée dans le présent rapport d’information, « l’absence de revalorisation régulière du taux de la redevance érode les ressources de l’audiovisuel public et pourrait faire peser un aléa à terme sur le système de financement par la redevance ».

Votre Rapporteur spécial souhaite, quant à lui, rappeler la position qui est la sienne depuis longtemps et qu’il a eu l’occasion de réaffirmer lors du récent débat budgétaire (8).

que faire pour assurer la couverture des besoins futurs de l’audiovisuel ?

– Le premier élément de réponse se trouve à coup sûr dans l’entêtement du Gouvernement à plafonner les compensations de dégrèvements accordées par l’État pour des motifs sociaux (9).

Comme les années précédentes, votre Rapporteur spécial déplore que ces compensations restent plafonnées en 2008 et continue de contester ce plafonnement, même s’il a bien conscience qu’étant donné la situation budgétaire de notre pays, la compensation intégrale des dégrèvements ne s’imposera sans discussion que lorsque les besoins définis par les COM atteindront ou dépasseront le montant de redevance plafonné.

Mais, si l’une des conséquences positives de la réforme de la redevance a été une extension du nombre de personnes bénéficiant d’une exonération pour des motifs sociaux, rien ne saurait justifier que les exonérations en question soient financées par le budget de l’audiovisuel public. C’est d’ailleurs ce principe qu’affirme avec force la loi du 1er août 2000 relative à l’audiovisuel en disposant que « les exonérations de redevance audiovisuelle décidées pour des motifs sociaux donnent lieu à remboursement intégral du budget général de l’État ». Aussi le plafond de l’article 21 du présent projet de loi de finances contrevient-il manifestement au principe de remboursement intégral imposé par la loi organisatrice de l’audiovisuel.

Il reste anormal de financer sur le budget de l’audiovisuel public des politiques sociales, elles-mêmes par ailleurs parfaitement légitimes. Votre Rapporteur spécial regrette donc, sur le plan des principes, que, le 19 octobre dernier, le Gouvernement ait poussé l’Assemblée nationale, par une seconde délibération (10), à revenir sur son amendement supprimant ce plafond, pourtant adopté une heure plus tôt en séance par l’Assemblée nationale...

D’autant que l’alignement des dégrèvements sur les exonérations de taxe d’habitation réduit la « garantie de ressources » à peu de choses… En effet, la « garantie de ressources » ne fonctionne que par référence au plafond de remboursement des dégrèvements, le plafond pouvant être augmenté (à due concurrence) en cas d’encaissements bruts plus faibles que prévu.

Aussi, dans l’hypothèse où, bien que le total des dégrèvements soit remboursé après déplafonnement, la prise en charge par l’État ne suffirait pas, une impasse de financement apparaîtrait, obligeant l’État à prendre par d’autres moyens ses responsabilités pour garantir des ressources suffisantes aux sociétés audiovisuelles.

– Considérant qu’il ne serait pas sain d’introduire un financement complémentaire des entreprises audiovisuelles sur crédits budgétaires (au risque d’alourdir les prélèvements obligatoires et le déficit), votre Rapporteur spécial estime donc que le deuxième élément de réponse à la question de l’évolution des ressources se trouve dans l’ajustement du montant de la redevance.

Conformément aux engagements pris durant la campagne présidentielle, le montant de la redevance restera stable en 2008. Mais votre Rapporteur spécial plaide pour une indexation annuelle du montant de la redevance sur l’indice des prix à la consommation, à compter du 1er janvier 2009.

Pour éviter de multiplier les financements extrabudgétaires, par souci de suivre l’augmentation normale du coût de la vie et par cohérence avec les dépenses prévues par les COM, le choix de l’indexation annuelle du montant de la redevance sur l’inflation est parfaitement légitime. Si le montant de la redevance avait, depuis 2002, évolué dans la même proportion que l’inflation, les Français acquitteraient aujourd’hui un impôt d’environ 126 euros et son montant pour 2008 aurait été porté à 128 euros. 

L’augmentation du taux de la redevance peut, du reste, être justifiée aussi par le faible niveau de la redevance en France par rapport aux autres pays européens, même si les comparaisons de périmètre s’avèrent très délicates : 204 euros en Allemagne, 196 euros au Royaume-Uni, 147 euros en Belgique wallonne… et même 210 euros en Suède, 246 euros en Norvège, 325 euros en Autriche et 363 euros en Islande.

– Pour le reste – et c’est là un troisième élément de réponse –, votre Rapporteur spécial considère qu’au-delà des efforts déjà accomplis et sous réserve de la compensation intégrale de la perte de recettes publicitaires récemment annoncée, des économies et des synergies sont encore possibles au sein des organismes affectataires de la redevance, comme l’indiquent d’ailleurs – en termes insuffisamment chiffrés – les COM.

La combinaison de ces différentes mesures (déplafonnement des remboursements de dégrèvements pour motifs sociaux, indexation de la redevance sur l’inflation, économies structurelles) devrait permettre à résoudre l’équation budgétaire de l’audiovisuel à court et moyen termes, sans être obligé de modifier l’assiette effective (11) de la redevance.

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Lors de sa conférence de presse du 8 janvier 2008, le Président de la République a annoncé un bouleversement fondamental des modalités de financement de l’audiovisuel public, s’agissant en tout cas des ressources extrabudgétaires de France Télévisions : la suppression totale de la publicité sur les antennes de Radio France et les chaînes de France Télévisions doit être compensée par l’affectation de ressources provenant du renforcement de taxes existantes ou de la création de taxes nouvelles. Une réflexion est en cours, qui devrait aboutir au dépôt d’un projet de loi avant l’été 2008.

Votre Rapporteur spécial rappelle, à cette occasion, qu’après la modification des cahiers des charges (qui relève du pouvoir réglementaire), les contrats d’objectifs et de moyens des deux sociétés audiovisuelles devront être profondément modifiés et soumis, le plus rapidement possible, à l’approbation du Parlement.

Aussi, publier la présente communication de la Cour des comptes constitue un élément indispensable au débat sur le financement de nos sociétés audiovisuelles, qui ne manquera pas d’éclairer les travaux et la réflexion parlementaires, à l’approche de l’examen du projet de loi, annoncé par le Gouvernement. Cette réforme devrait permettre d’assurer, à France Télévisions et Radio France notamment, un cadre de financement à la fois sain et stable.

De même, dans la perspective du débat d’orientation budgétaire, de la recherche d’une soutenabilité pluriannuelle des finances publiques et de l’examen du projet de loi de finances pour 2009, la publication de ce rapport contribuera, aux yeux de votre Rapporteur spécial, à mettre en évidence la nécessité d’une redéfinition du financement de l’audiovisuel public dans son ensemble, ainsi que la possibilité d’une évolution de l’assiette et du montant de la redevance audiovisuelle.

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EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du 30 janvier 2008 à 9 heures 30, votre Commission a procédé à l’examen de la communication de votre Rapporteur spécial sur un rapport de la Cour des comptes relatif au bilan de la réforme de la redevance audiovisuelle.

Le Président Didier Migaud a rappelé qu’en octobre 2006, la commission des Finances avait demandé à la Cour des comptes, en application de l’article 58-2° de la LOLF, de dresser un bilan de la réforme de la redevance audiovisuelle. Débattre du rapport de la Cour, remis en octobre 2007, est d’autant plus opportun que l’annonce d’une réforme de grande ampleur du financement de France Télévisions et de Radio France pose la question des perspectives de développement de l’audiovisuel public français. Dans l’esprit des relations mises en place avec le Premier président de la Cour des comptes, la Commission – et notamment les Rapporteurs spéciaux – doivent exploiter au mieux les travaux de la Cour et multiplier les collaborations avec elle.

Votre Rapporteur spécial a remercié la Cour des comptes pour son examen à la fois exhaustif et objectif de la collecte de la redevance audiovisuelle, de même que pour ses contributions antérieures au contrôle du secteur audiovisuel. À l’heure où le financement de la télévision publique va être redéfini, le rapport de la Cour permet d’établir l’utilité de la réforme de la redevance et d’en confirmer la réussite.

M. Christian Babusiaux, Président de la première chambre de la Cour des comptes, a souligné l’importance de la fonction d’assistance au Parlement, le rapport de la Cour des comptes s’inscrivant pleinement dans ce cadre. Le produit de la redevance audiovisuelle s’est élevé à 2,26 milliards d’euros en 2006 et à peine plus en 2007. Conformément à la loi du 1er août 2000, les dégrèvements de la redevance sont compensés par l’État : ils se sont élevés à 500 millions d’euros en 2006 et à, probablement, 445 millions d’euros en 2007. Ces deux sources de financement représentent les trois quarts des ressources de l’audiovisuel public. La réforme de la redevance, en application de la loi de finances pour 2005, visait à en simplifier la gestion, en réduisant les coûts de perception et en améliorant la collecte. Cette réforme a eu un impact direct en termes de gestion, de relations avec les usagers et de coûts de collecte.

En premier lieu, le système a été simplifié à trois niveaux : l’adossement à la taxe d’habitation a effectivement entraîné une simplification de la déclaration pour les particuliers ; la suppression de la distinction entre résidence principale et résidence secondaire a permis la réduction de la fraude, qui concernait 65 % des résidences secondaires ; enfin, le régime des dégrèvements est devenu plus lisible – parce qu’identique à celui de la taxe d’habitation – moyennant la situation des dégrèvements correspondant à des « droits acquis », à savoir 758 000 personnes exonérées de redevance avant la réforme mais assujetties à la taxe d’habitation : 735 000 personnes âgées et 23 000 personnes handicapées.

En deuxième lieu, l’administration a mis à profit cette réforme pour développer des activités nouvelles : la suppression du service de la redevance, qui assurait la détermination de l’assiette, le recouvrement et le contrôle de la redevance, a permis d’améliorer le service rendu aux usagers et de créer de nouvelles fonctions au sein de la direction générale de la comptabilité publique – DGCP –. L’usager ne pouvait, avant la réforme, que s’adresser au service central ou à l’un des cinq centres régionaux. Désormais, il a la faculté de s’adresser à la trésorerie ou au centre des impôts. Cette proximité a pu être appréciée, dès 2006, alors que 600 000 réclamations ont été déposées. Sur 1 400 agents, environ 500 ont été affectés à des activités nouvelles, comme la gestion à distance du prélèvement automatique ou le traitement des amendes routières issues des radars automatiques.

En troisième lieu, on relève une nette diminution de la fraude, qui concernait plus de 6 % des personnes devant d’acquitter de la redevance et est désormais estimée à 1,25 %. Cette diminution s’explique notamment par un effet mécanique lié tant au système déclaratif qu’à l’extension des dégrèvements et à l’abandon de toute taxation des résidences secondaires. Le ciblage des contrôles est meilleur, le potentiel fraudeur devant déclarer ne pas détenir de téléviseur.

En quatrième lieu, des économies sur la gestion de la redevance ont été réalisées. La comptabilité analytique encore embryonnaire ne permet pas de déterminer avec précision les coûts avant et après la réforme. Toutefois, la réforme en elle-même a coûté 8 millions d’euros en primes et indemnités de reclassement et de formation. Les agents ont également bénéficié d’un plan de promotion exceptionnel, qui n’a pas été chiffré par l’administration. Le coût des contentieux liés à la réforme peut être évalué à 23,5 millions d’euros en 2005. Tenus de s’acquitter simultanément de 116 euros de redevance et de 300 euros en moyenne de taxe d’habitation, les ménages modestes ont dû supporter un alourdissement de charge de trésorerie, principalement lié au caractère encore minoritaire – 32 % – de la mensualisation du paiement. Seule cette dernière permettra de lisser la charge pour les ménages modestes. La réforme a également généré des frais de trésorerie de 15 millions d’euros, la redevance étant perçue en fin d’année alors que l’État avance, par douzièmes, les ressources aux organismes audiovisuels. Bien que ce surcoût soit pérenne, l’économie réalisée sur la gestion de la redevance – dont le coût est passé de 155 à 55 millions d’euros grâce à la réforme – reste substantielle, l’économie nette étant donc de l’ordre de 100 millions d’euros par an.

Toutefois, une partie importante des gains de productivité potentiels ne se sont pas matérialisés. Les 1 400 agents concernés par la réforme ont été réaffectés au sein de la même zone géographique avec des garanties de rémunération et de formation à leur nouveau métier. 500 agents se sont vus assigner des tâches nouvelles, 400 sont chargés du contrôle de la perception de la redevance et 500 ont été introduits dans le réseau traditionnel du Trésor public, sans réduction corrélative des personnels. Les effectifs totaux de la DGCP n’ont pas été réduits à due proportion des gains de productivité : seuls 50 % des gains de productivité théoriques – soit 50 millions d’euros – ont bénéficié à l’audiovisuel public. La réforme a donc eu des effets positifs en termes de gestion, mais ses gains de productivité potentiels n’ont pas été totalement matérialisés. Il convient, en outre, de souligner que la redevance n’a pas fait l’objet d’une requalification juridique : elle demeure considérée comme une redevance pour service rendu – et non comme une taxe –, bien qu’elle soit désormais adossée sur la taxe d’habitation. Ce traitement juridique et comptable n’a pas été remis en cause par Eurostat pour le calcul du taux de prélèvements obligatoires en France.

Présentant les développements du rapport consacrés au financement de l’audiovisuel public, M. Jean Picq, Président de la troisième chambre de la Cour des comptes, a tout d’abord fait observer que la réforme a permis d’accroître le produit de la redevance de 1 % par an depuis 2005, même s’il semble – d’après des données encore provisoires – que la progression soit moins importante en 2007. La base taxable a été diminuée de 10 % environ, du fait tant de l’exonération de redevance pour les résidences secondaires que des redevables dégrevés de taxe d’habitation, mais le taux de recouvrement de la redevance s’est considérablement amélioré, passant de 82 % entre 2002 et 2004 à 91,5 % en 2005. En deuxième lieu, la réforme n’a pas permis de dégager des ressources suffisantes pour faire face à la progression prévisible du budget de l’audiovisuel public, alors qu’elle avait été présentée en 2004 comme une source de recettes substantielles. Dans son rapport public pour 2005, la Cour avait déjà émis quelques interrogations à ce sujet. De fait, l’évolution du produit de la redevance a été inférieure à la progression du budget de l’audiovisuel public : cet écart, de 1,5 point environ en 2005 et 2006, devrait passer à 2,5 points à partir de 2008, si on se réfère aux contrats d’objectifs et de moyens (COM) signés entre l’État et les sociétés de l’audiovisuel public, lesquels prévoient une augmentation moyenne des dépenses de 3,5 % à 4 % par an : 3,5 % pour France Télévisions, 4 % pour ARTE–France et 2,4 % pour Radio France.

Au demeurant, le rapport souligne que la place de la redevance dans le financement de l’audiovisuel public mérite une attention particulière du Parlement. En matière de procédure budgétaire, la Cour recommande le rattachement des exonérations et dégrèvements de redevance à la mission Médias, au sein d’un programme ad hoc. Par ailleurs, au moment de l’examen du projet de loi de finances, le Parlement se prononce sur le budget de l’année n+1, alors même que le produit de la redevance pour l’année n n’est pas connu et que les prévisions de recettes sont souvent supérieures aux recettes effectivement encaissées : en cas de moins-value de recettes, le Parlement devrait donc se saisir de la première occasion pour se prononcer sur la situation réelle du financement de l’audiovisuel public, à savoir celle de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour l’année n. L’absence de revalorisation de la redevance provoque une érosion du financement de l’audiovisuel public. Si l’alignement des exonérations de redevance sur le régime de la taxe d’habitation devait être reporté, cela risquerait de conduire à une obligation de financement par le budget général pour un montant significatif.

On ne saurait occulter le fait que, depuis le 26 octobre 2007, date de remise du rapport à la commission des Finances, le Président de la République s’est exprimé au sujet du financement de l’audiovisuel public. La question de l’écart structurel entre la progression de la redevance et celle du budget de l’audiovisuel public reste pendante. D’une part, alors qu’entre 1990 et 2002, le produit de la redevance a progressé de 2,9 % par an en moyenne, le montant de 116 euros n’a pas été revalorisé depuis 2002 et a même été réduit de 50 centimes lors de la réforme, les systèmes informatiques ne pouvant traiter les centimes. D’autre part, en raison du caractère inachevé de l’alignement des exonérations, quelque 700 000 redevables de la taxe d’habitation demeurent dégrevés de redevance. Si ce choix est confirmé, le manque à gagner serait de 81 millions d’euros environ, soit 3,6 % du produit de la redevance. Enfin, cet écart structurel n’est plus compensé, depuis 2007, par une augmentation des recettes publicitaires, en raison d’un contexte de marché défavorable. La Cour des comptes exprime donc la crainte que cette situation ne débouche sur une mise à contribution structurelle du budget général, au-delà de celle correspondant aux remboursements de dégrèvements pour motifs sociaux. Cette interrogation prend une ampleur nouvelle en raison de la perspective de la suppression des recettes publicitaires.

Votre Rapporteur spécial s’est réjoui du résultat des investigations menées par la Cour des comptes. La réforme de la redevance a produit des résultats globalement positifs. Si le coût de reclassement des agents dans la même zone géographique n’est pas neutre, il est nuancé par l’ampleur des économies engendrées par le nouveau mode de collecte de la redevance, estimées à 100 millions d’euros chaque année. La réforme de la collecte de la redevance n’est pas allée au bout de sa logique : le seul fait générateur de la redevance demeure de facto la détention d’un téléviseur fixe classique. Or, d’autres supports permettent aujourd’hui de recevoir les programmes télévisés : récepteurs portatifs, téléphones mobiles, ordinateurs personnels... Une adaptation de la réglementation apparaît souhaitable. De ce point de vue, la suppression de la redevance pour les résidences secondaires était particulièrement bienvenue, puisque, avant la réforme, la redevance n’était due, dans une résidence secondaire, que pour un téléviseur fixe, ce qui en exonérait les détenteurs d’appareils de réception les plus modernes. Pour autant, si la réforme a permis de générer des économies, celles-ci ne sont pas suffisantes pour résoudre les problèmes de financement de l’audiovisuel public. L’État a choisi d’utiliser une partie des économies réalisées pour accroître les effectifs de la DGCP, choix dont le Parlement n’est pas responsable. En outre, on doit déplorer le manque à gagner que constitue, pour l’audiovisuel public, l’absence de compensation totale des exonérations sociales. L’audiovisuel public n’a pas à prendre à sa charge une politique sociale décidée par l’État.

Il est souhaitable que le financement de l’audiovisuel public repose sur une recette affectée, mise à l’abri des mesures de régulation budgétaire. L’audiovisuel public ne saurait être piloté à court terme : telle est d’ailleurs la logique qui a présidé à la mise en place des COM. Les engagements pris dans ces contrats doivent être tenus. Par ailleurs, le Rapporteur spécial a regretté le rejet, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2008, de son amendement proposant de réévaluer le montant de la redevance chaque année, en fonction de l’évolution de l’indice des prix à la consommation. Si cette indexation sur l’inflation avait eu lieu depuis 2002, le montant unitaire de la redevance serait aujourd’hui de 128 euros, ce qui aurait contribué à couvrir les dépenses prévues par les COM. La redevance demeure le meilleur moyen de financer l’audiovisuel public. Le rapport remis par la Cour des comptes constitue un éclairage indispensable face à certaines idées reçues. La réforme de la redevance est un exemple de réforme produisant des résultats positifs et rapides.

M. Michel Bouvard a remercié la Cour des Comptes pour la qualité de son rapport, qui montre combien la réforme a apporté une simplification tout en procurant des économies et en contribuant à la lutte contre la fraude. Toutefois, le travail de contrôle engagé par la commission des Finances doit être approfondi sur plusieurs points. En premier lieu, il convient d’examiner le devenir des 400 agents anciennement affectés au recouvrement de la redevance et qui, selon M. Jean-François Copé, devaient se voir confier des tâches nouvelles ou pourvoir au remplacement de départs en retraite. Le rapport de la Cour indique pour sa part que 500 postes dégagés par la réforme ont été affectés à la DGCP sans emploi précis. Il faut aller au bout de la réforme sur cette question. S’agissant de l’accès aux fichiers des câblo-opérateurs, il semble que l’amélioration du rendement de la collecte ait fonctionné à plein : existe-t-il encore une marge de progression ? Concernant les suites de la réforme, une réflexion s’impose sur le périmètre de l’audiovisuel public, qui n’a cessé de nécessiter des moyens supplémentaires, qu’il s’agisse du déploiement de la télévision numérique terrestre, de la diffusion sur l’Internet ou encore de la création de France 24. Or, à l’évidence, les ressources disponibles ne sont plus suffisantes. Il conviendra également de rester vigilant sur l’emploi des nouveaux moyens alloués à l’audiovisuel public : qu’en est-il des gains de productivité possibles ? Où en est-on de la réflexion sur la performance au regard des différences de statut ou de coûts salariaux qui caractérisent l’audiovisuel public ? Enfin, qu’un effort supplémentaire soit demandé au contribuable ou qu’une réforme du régime de publicité intervienne prochainement, il demeure que le cahier des charges des différents opérateurs doit être mieux respecté, en particulier concernant la diffusion de certains sports.

M. Thierry Carcenac a remercié la Cour pour son éclairage sur la réaffectation des agents du recouvrement, qui l’intéresse tout particulièrement en sa qualité de Rapporteur spécial sur la gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public. Cet éclairage en appelle d’ailleurs un autre sur le recouvrement des amendes de police, notamment celles issues des radars automatiques. En effet, près de 500 agents y sont affectés pour un coût annuel de 104 millions d’euros. Les travaux de la Cour soulèvent également la question de l’égalité de traitement de nos concitoyens devant l’impôt, puisqu’il est aujourd’hui possible techniquement d’avoir accès à la télévision tout en étant légalement dispensé de payer la redevance.

M. Louis Giscard d’Estaing s’est félicité du suivi par le Rapporteur spécial et par la Cour des comptes de l’impact d’une réforme qui avait été largement souhaitée par la commission des Finances. Si la collecte de 2006 a fait apparaître un surcroît de recettes de 45 millions d’euros, alors même que les exonérations de redevance étaient étendues à un million de foyers modestes, il faut bien en conclure que l’augmentation des exonérations n’a en rien obéré la progression des recettes. S’agissant du cas particulier des résidences secondaires, la décision d’y exonérer de facto la détention d’un téléviseur n’ayant pas, semble-t-il, eu d’impact négatif sur la collecte, doit-on en déduire que les contrôles antérieurement effectués étaient inopérants ?

M. Henri Nayrou a ainsi résumé le bilan de la réforme effectuée en 2005 : « Bien, mais peut mieux faire » ! Cependant, les échanges sur cette réforme ne concernent que le passé, alors que d’importantes questions se posent pour l’avenir, compte tenu des récentes déclarations relatives au financement de l’audiovisuel public. Ainsi, quels seront ses mécanismes de financement ? Pour quelle augmentation des moyens ? Avec quelles conséquences sur la stabilisation de la redevance comme des exonérations ? Il manquera 1,2 milliard d’euros par an pour financer l’audiovisuel public. À cet égard, une redevance à 116 euros est-elle suffisante ?

M. Marcel Rogemont, usant de la faculté que l’article 38 du Règlement de l’Assemblée nationale confère aux députés d’assister aux réunions des commissions dont ils ne sont pas membres, a remercié la Cour et le Rapporteur spécial d’avoir mis en évidence le problème posé par la stabilité du tarif de la redevance au regard des besoins de financement. Alors que pendant la campagne électorale, le candidat Nicolas Sarkozy s’était engagé à augmenter les ressources publicitaires plutôt que la redevance, c’est apparemment l’inverse que le Président de la République promeut aujourd’hui. Malgré une amélioration transitoire, le financement de l’audiovisuel public risque de se dégrader fortement ; à cet égard, le Rapporteur spécial a raison d’insister sur le besoin de trouver d’autres moyens de financement.

Le Président Didier Migaud a estimé que la réforme de la redevance audiovisuelle était nécessaire, le rapport de la Cour des comptes confirmant ses effets positifs. Puisque la demande d’enquête formulée par la Commission en vertu de l’article 58-2° de la LOLF consistait en une évaluation globale des conséquences de la réforme, tant sur son coût qu’en matière d’effectifs, le rapport y répond parfaitement. Cela n’empêche pas de persister à regretter que le choix ait été fait d’adosser la redevance à la taxe d’habitation plutôt qu’à l’impôt sur le revenu, ce qui eût permis une moindre confusion pour les contribuables et, pour les bénéficiaires, un recouvrement davantage lissé dans le temps. Comme l’a suggéré M. Thierry Carcenac, il serait souhaitable, toujours sur le fondement de l’article 58-2° de la LOLF, de s’interroger sur la collecte d’autres prélèvements, dont les amendes forfaitaires de la police de la circulation. Sur la question du financement de l’audiovisuel public, les travaux de la Cour viennent confirmer des inquiétudes déjà formulées sur le décalage croissant entre les COM et les moyens qui sont alloués aux opérateurs. Le débat devra se poursuivre sur l’élargissement de l’assiette de la redevance.

M. Christian Babusiaux, Président de la première chambre de la Cour des comptes, a précisé que la Cour a récemment adressé un rapport à la commission des Finances du Sénat sur le recouvrement des amendes radars. En outre, le Sénat lui a commandé un rapport sur la répartition du produit de ces amendes : celui-ci sera disponible courant 2008. Concernant la lutte contre la fraude et la possibilité de consulter les fichiers des câblo-opérateurs, la Cour relève, dans son rapport, que la commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) autorise des rapprochements individualisés et non un rapprochement global. Cependant, cette possibilité est peu utilisée par les services du ministère des Finances puisque seules 200 demandes ont été formulées à ce jour. Il est donc possible de développer ce type de contrôle. Toutefois, la diminution de la fraude réduit cette dernière à sa dimension morale, sans en faire – comme avant 2005 – un problème financier global pour l’audiovisuel. Les fraudeurs représentent 1,5 à 2 % des personnes déclarant ne pas posséder un poste de télévision, soit 15 000 à 20 000 personnes. L’intensification de la lutte contre la fraude ne suffirait donc pas, à elle seule, à couvrir les besoins de financement de l’audiovisuel public.

Le Président Didier Migaud a relevé que l’élargissement du champ des exonérations a permis, de facto, de réduire le nombre de fraudeurs.

M. Jean Picq, Président de la troisième chambre de la Cour des comptes, a confirmé que le produit brut de la redevance a augmenté de 45 millions d’euros entre 2004 et 2006, soit une progression de 1 % par an. On peut estimer, tout en restant très prudent compte tenu du caractère provisoire des données, que ce taux ne sera pas le même en 2007. Le rapport de Cour met en évidence le fait qu’il n’existe pas beaucoup d’autres leviers de financement pour l’audiovisuel public que celui de la redevance. Le choix de ne pas l’augmenter depuis 2002 a évidemment des conséquences sur l’équilibre financier du secteur, la perspective de la suppression des ressources publicitaires renforçant les craintes. Rendant compte, dans son rapport public 2004, d’un contrôle effectué à France Télévisions, la Cour jugeait déjà que, si l’évolution du groupe était globalement positive, ce dernier devait poursuivre sa mutation dans trois domaines : la cohérence du groupe et le contrôle des filiales, l’évolution des charges de personnel et la coordination entre les différentes chaînes. Prochainement, la Cour remettra un rapport à la commission des Finances sur les sociétés audiovisuelles extérieures, lancera un contrôle de France Télévisions et reviendra sur la question de la redevance dans son rapport public annuel, ce qui témoigne de l’importance accordée à ce sujet.

En réponse aux différents intervenants, votre Rapporteur spécial a considéré que :

– compte tenu de l’importance de la redevance qui finance trois quarts du budget de l’audiovisuel public, il est important de constater que les conditions de collecte sont désormais quasiment optimales, comme en témoigne la progression de la ressource affectée aux entreprises publiques et la diminution des charges de l’État ;

– le chef de l’État a affirmé que la question de l’évolution du périmètre de l’audiovisuel public n’était pas à l’ordre du jour. Le foisonnement de l’offre sur les chaînes thématiques permet aujourd’hui à chacun de visionner des programmes correspondant à ses centres d’intérêts : cette évolution rend d’autant plus nécessaire le maintien de chaînes généralistes publiques et privées et rend primordial le rôle de France 2 et de France 3 ;

– France Télévisions respecte son cahier des charges en matière de programmes sportifs. Mêmes si certaines fédérations sportives émettent des critiques, on ne peut que faire le constat d’une représentation exemplaire des pratiques sportives retransmises sur les antennes de France Télévisions. La comparaison avec les chaînes privées est flatteuse pour le service public ;

– concernant la proposition d’adosser également la redevance sur les ordinateurs ou les téléphones portables, il convient de rappeler que 95 % des foyers français ont un téléviseur et acquittent la redevance : le nombre de personnes possédant un équipement permettant de recevoir la télévision, mais pas de téléviseur à proprement parler, est donc limité. Cependant, compte tenu du principe de neutralité technologique des supports, cette extension correspond à une exigence de justice ;

– le respect des engagements financiers pris dans les COM est assuré pour 2008. Le problème de financement apparaîtra, à compter de 2009, si la redevance est maintenue à son niveau actuel et n’évolue pas au moins comme l’inflation ;

– enfin, il ne faudrait pas, en supprimant la publicité sur les antennes publiques, que l’on substitue à une dépendance aux contraintes de l’audimat… une autre dépendance, budgétaire cette fois !

La Commission a ensuite, conformément à l’avis du Rapporteur spécial, autorisé, en application de l’article 58-2° de la LOLF, la publication de la communication de la Cour des comptes.

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ANNEXE :

COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES RELATIVE AU BILAN DE LA RÉFORME DE LA REDEVANCE AUDIOVISUELLE

PA 49856

COMMUNICATION

A LA COMMISSION DES FINANCES,

DE L’ECONOMIE GENERALE ET DU PLAN

DE L’ASSEMBLEE NATIONALE

Article 58-2° de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances

 

BILAN DE LA REFORME

DE LA REDEVANCE AUDIOVISUELLE

Octobre 2007

sommaire

PARTIE I :  LA REDEVANCE ET SA REFORME 28

I. LA REDEVANCE AUDIOVISUELLE 28

A. Evolution et justifications de la redevance 28

B. Fait générateur de la redevance 28

C. Taux de la redevance 30

D. Statut de la redevance 30

II. ORIGINE, OBJECTIFS ET CONTENU DE LA REFORME DE 2004 32

A. Origine 32

B. Objectifs 32

C. Contenu de la reforme 33

PARTIE II :  PRODUCTIVITE, CONDUITE DU CHANGEMENT ET QUALITE DE SERVICE 34

I. PRODUCTIVITÉ ET CONDUITE DU CHANGEMENT 34

A. Transformation de l’organisation 34

B. Redéploiement des personnels 35

C. Le coût de la reforme 38

D. Réaffectation ou cession des immeubles 38

II. AMELIORATION DE LA QUALITE DE SERVICE 40

A. En matiere de redevance 40

B. En dehors de la redevance 40

PARTIE III :  EQUITE ET LUTTE CONTRE LA FRAUDE 42

I. REGIME DES DEGREVEMENTS 42

A. L’élargissement des cas de dégrèvements pour motifs sociaux 42

B. Etat des dégrèvements depuis la réforme 43

II. LUTTE CONTRE LA FRAUDE 43

A. L’organisation et les moyens 44

B. Une fraude en baisse mécanique 46

C. Les difficultes de mise en œuvre 47

PARTIE IV :  BILAN FINANCIER D’ENSEMBLE 50

I. LES ÉCONOMIES RÉALISÉES 50

A. Le coût de gestion de la redevance avant la réforme 50

B. L’estimation difficile du coût réel actuel : une comptabilité analytique inadaptée 50

C. La réforme a engendré des frais de contentieux de l’ensemble « taxe d’habitation+redevance » 51

D. La réforme a engendré des frais de tresorerie 53

E. Le coût global 53

II. L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES A l’AUDIOVISUEL PUBLIC » 54

A. Les résultats 2006 54

B. Un taux de recouvrement en hausse 56

C. Les remboursements des exonérations et dégrèvements 56

D. Le mécanisme de garantie 57

III. LE PRODUIT DE LA REDEVANCE 58

A. La suppression des « droits acquis » 58

B. L’eventualité d’une augmentation du taux unitaire de la redevance 58

CONCLUSION 61

INTRODUCTION

Le présent rapport vise à dresser le « bilan d’ensemble de la réforme de la redevance audiovisuelle », en réponse à la demande adressée le 12 octobre 2006 à la Cour par le président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan de l’Assemblée nationale en application de l’article 58-2° de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

La communication du rapport intervient au-delà du délai de huit mois imparti par l’article précité de la LOLF, comme convenu avec le président de la commission des finances, qui, dans sa lettre du 12 octobre 2006, indiquait : « Compte tenu du calendrier probable des échéances électorales de 2007, il me semble parfaitement possible d’envisager, si vous en êtes d’accord, une restitution de ces travaux pour le mois de septembre 2007 et non pas pour le mois de juin ».

L’enquête a été menée, de février à mai 2007, auprès :

− de l’administration centrale du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi et du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, à savoir de la direction générale de la comptabilité publique (DGCP), de la direction générale des impôts (DGI) et de la direction du budget ;

− de deux des trésoreries générales les plus directement concernées par la suppression du service de la redevance audiovisuelle, celles d’Ille-et-Vilaine et de Haute-Garonne ;

− et de la direction du développement des médias (DDM) dans les services du Premier ministre.

En application du code des juridictions financières, un relevé d’observations provisoires a été adressé, le 25 juillet 2007, aux quatre directions concernées.

Le présent rapport a été établi au vu des réponses écrites apportées en juillet et août 2007 par ces directions, et après les auditions de leurs représentants le 20 septembre 2007.

Après un rappel sur la redevance et sa réforme (Partie I), le bilan de la réforme est examiné sous trois angles :

- Partie II : Productivité, conduite du changement et qualité de service,

- Partie III : Équité fiscale et lutte contre la fraude,

- Partie IV : Bilan financier d’ensemble.

PARTIE I : LA REDEVANCE ET SA REFORME

I. LA REDEVANCE AUDIOVISUELLE

A. ÉVOLUTION ET JUSTIFICATIONS DE LA REDEVANCE

1. Évolution

La redevance audiovisuelle a été créée par une loi du 31 mai 1933. Assise sur les postes de radio, elle a été conçue comme un droit d’usage « en vue d’en consacrer le produit aux dépenses de la radiodiffusion ». En 1949, elle a été étendue aux récepteurs de télévision.

En 1974, la perception de la redevance a été soumise à l’autorisation parlementaire, ainsi que sa répartition entre les sociétés de programmes.

En 1980, la redevance appliquée aux postes de radio a été supprimée. Depuis le 1er janvier 1987, la redevance de l’audiovisuel ne vise que les appareils de télévision et les dispositifs assimilés.

2. Justifications

La mission des organismes du secteur audiovisuel public consiste, selon la direction du développement des médias (DDM), à offrir « au public le plus large » les programmes et services d’organismes constituant un « pôle de référence en matière d’information, de création audiovisuelle et de diversité culturelle ». La DDM ajoute que, dans ce cadre, l’existence d’un financement public :

- assure aux organismes bénéficiaires les moyens de proposer « une programmation diversifiée, de qualité, dans le but d’éduquer, d’informer et de distraire » ;

- et permet de « limiter la durée des écrans publicitaires sur les chaînes de France Télévisions et sur les antennes de Radio France, et de ne pas interrompre les programmes par des coupures publicitaires, à la différence des chaînes privées ».

Pour justifier que ce financement public revête la forme d’un concours spécifique, plutôt que celle d’une contribution du budget général de l’Etat, trois arguments sont généralement invoqués :

- l’importance de la somme à financer ;

- les aléas, pour les entreprises du secteur de l’audiovisuel public, induits par les mesures de régulation infra-annuelle appliquées au budget de l’État ;

- la difficulté de garantir une croissance annuelle réelle de la ressource de l’ordre de 3 %, parallèle à la croissance des dépenses de ces entreprises.

B. FAIT GÉNÉRATEUR DE LA REDEVANCE

Le fait générateur de la redevance est la détention d’un récepteur de télévision au 1er janvier de l’année considérée.

1. Le récepteur et les « dispositifs assimilés »

L’appareil récepteur s’entend comme tout dispositif, tel que l’assemblage d’un moniteur vidéo et d’un démodulateur, dit "tuner", permettant la réception des signaux de télévision. A contrario, ne sont assujettis que les appareils en état de capter ces signaux. Cette définition est confirmée par l’article 1605 II 1°et 2° du code général des impôts (CGI) modifié par l’article 41 de la loi de finances pour 2005, qui dispose que la redevance est due « à condition de détenir un appareil permettant la réception de la télévision ou un dispositif assimilé ».

Une instruction ministérielle du 22 décembre 2005 a précisé que « les micro-ordinateurs munis d’une carte de télévision permettant la réception de la télévision ne sont pas taxables ». Si cette instruction ministérielle restreint la définition légale du fait générateur, l’incidence actuelle sur le produit de la redevance doit être relativisée. En effet :

- 95 % des foyers fiscaux sont déjà équipés d’un téléviseur ;

- le développement d’Internet n’a pas pour effet, du moins jusqu’à présent, de substituer significativement ce type de récepteur à un autre.

2. La « détention » du récepteur

La redevance est due par toute personne physique imposée à la taxe d’habitation au titre d’un local meublé affecté à l’habitation, que la résidence soit principale ou secondaire, si le contribuable détient un récepteur, appareil de télévision ou assimilé, au 1er janvier de l’année pour l’usage privatif du foyer.

Cette condition de « détention » d’une télévision est regardée comme remplie dès lors que le contribuable n’a pas indiqué dans sa déclaration de revenus ne pas détenir de téléviseur dans sa résidence principale ou secondaire.

En pratique, le contribuable ne détenant pas de télévision doit cocher une case nouvelle dans la déclaration de revenus, indiquant ainsi sur l’honneur ne pas détenir de télévision au 1er janvier de l’année, que ce soit dans sa résidence principale ou dans sa résidence secondaire. Une seule redevance audiovisuelle est due, quel que soit le nombre de postes détenus dans l’ensemble des locaux meublés affectés à l’habitation pour lesquels le redevable est assujetti à la taxe d’habitation.

S’agissant des professionnels (salles d’attente d’avocat ou de médecin, hôtels, cafés, restaurants, discothèques, etc.), la redevance est également due par toutes les personnes physiques autres que les particuliers, et par les personnes morales, à la condition de « détenir » un récepteur de télévision ou un dispositif assimilé permettant la réception de la télévision dans un local situé en France. Pour les professionnels (personnes physiques ou morales), la déclaration se fait désormais par l’intermédiaire de la déclaration de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ou par une annexe à cette déclaration.

L’assujettissement à la redevance est indépendant de l’usage effectif qui est fait du récepteur. Un redevable ne peut prétendre s’exonérer du paiement de la taxe en soutenant que son téléviseur a été modifié de telle manière qu’il ne peut recevoir les chaînes publiques, dès lors que la redevance présente le caractère d’une taxe et n’est pas la contrepartie exacte du service rendu.

C. TAUX DE LA REDEVANCE

Le taux est déterminé par référence à un « taux de base » prévu par l’article 1605 III du Code général des impôts (CGI). Il était fixé, chaque année, par décret jusqu’en 2005, année à partir de laquelle il l’a été par le législateur dans les lois de finances initiales. Ce taux de base, actuellement de 116 € en France métropolitaine et de 74 € dans les départements d’outre-mer, est celui qui s’applique aux particuliers.

Pour les professionnels, la redevance est due :

- au taux plein jusqu’à deux appareils ;

- avec un abattement de 30 % entre le troisième et le 30ème appareil ;

- avec un abattement de 35 % au-delà du 30ème appareil.

Une réfaction supplémentaire de 25 % est applicable aux hôtels de tourisme dont la période d’activité annuelle n’excède pas neuf mois. Les appareils détenus dans les débits de boissons autorisés à servir des boissons alcoolisées supportent une taxe égale à quatre fois le montant de la redevance. Enfin, le taux est doublé pour les appareils de location puisque la redevance due est égale au 26ème de la redevance annuelle par période de sept jours.

Au total, la redevance est égale :

- pour une résidence particulière, à 1 taxe au taux de base, ou « taxe de base » ;

- pour un débit de boisson, à 4 « taxes de base » multipliées par le nombre d’appareils ;

- pour les autres établissements recevant du public, à 1 « taxe de base » multipliée par un quotient fonction principalement du nombre d’appareils.

D. STATUT DE LA REDEVANCE

1. Statut en droit français

Jusqu’au 31 décembre 2003, la redevance relevait du régime de la parafiscalité, comme l’avaient confirmé à plusieurs reprises les jurisprudences du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État. Le gouvernement en arrêtait par décret l’assiette et le taux. Mais il revenait au législateur d’autoriser annuellement son recouvrement ainsi que sa répartition entre les organismes bénéficiaires.

L’article 63 de la LOLF, en prévoyant la suppression des taxes parafiscales au plus tard au 31 décembre 2003 « à défaut de dispositions législatives particulières » a rendu nécessaire une évolution du statut de la redevance.

Ainsi, la loi de finances initiale pour 2004 du 31 décembre 2003 a transformé la redevance en taxe affectée. Elle constitue dès lors un impôt se rattachant à la catégorie des « impositions de toute nature » visée à l’article 34 de la Constitution.

2. Compatibilité avec le droit communautaire

Une décision de la Commission européenne en date du 20 avril 2005 a validé la compatibilité du système français de financement de l’audiovisuel public avec le droit communautaire. La Commission a considéré qu’en l’espèce, les entreprises chargées d’un service d’intérêt économique général n’étaient soumises aux règles de la concurrence que pour autant que l’application de celles-ci ne faisait pas échec à l’accomplissement de la mission particulière qui leur avait été impartie. Les conditions cumulatives à réunir par ces entreprises sont les suivantes :

- les financements publics doivent être proportionnés aux coûts d’exécution de la mission d’intérêt général ;

- une séparation doit être opérée au plan comptable entre activités d’intérêt général et activités commerciales (avec publicité, par exemple).

La Commission a alors considéré que ces conditions étaient remplies.

3. Statut au regard de la définition des « prélèvements obligatoires »

a. Les définitions données par l’INSEE, l’OCDE et le Rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution joint au projet de loi de finances pour 2007

Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), les prélèvements obligatoires sont « les impôts et cotisations sociales effectives reçus par les administrations publiques et les institutions européennes ».

S’agissant de la redevance audiovisuelle, l’INSEE relève qu’elle est, au contraire, « le prix d’achat d’un service dans l’indice des prix ». De même, pour l'Organisation de coopération et du développement économique (OCDE), les prélèvements obligatoires correspondent à des versements effectifs versés à des administrations publiques sur une base non volontaire, ce qui se caractérise par « l’absence de contrepartie immédiate ». Il en résulte, a contrario, que l’existence d’une telle contrepartie exclut du champ des prélèvements obligatoires les versements correspondants. Enfin, le Rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution joint au projet de loi de finances pour 2007 indique également, dans son annexe 1, que « certains prélèvements ne sont pas considérés comme obligatoires car ils (…) sont la contrepartie d’un service rendu (la redevance télévision, les amendes non fiscales, les droits de timbres sur les permis de conduire, passeports, cartes grises…)».

La redevance audiovisuelle est donc une imposition de toute nature, mais n’est pas considérée comme un prélèvement obligatoire, ce qui reflète la différence de définition entre ces deux notions.

b. La question de la « contrepartie » de la redevance

Le rapport d’information n° 119 sur la redevance audiovisuelle présenté à l’Assemblée nationale en juillet 2003 relevait que « les chaînes publiques ne représentent plus qu’une part limitée de l’audience, devenue même minoritaire puisque d’un ordre de grandeur limité à 40 % et encore appelé à diminuer ». Autrement dit, la détention d’un récepteur ne donne plus accès à une chaîne de télévision spécifique, ni aux seuls programmes des opérateurs publics.

Le dossier relatif à la redevance rendu public par la DDM après la réforme note, quant à lui, que la redevance n’est pas liée à la réception des chaînes publiques et n’est pas la contrepartie « exacte » du service rendu.

Pour autant, il existe bien une contrepartie sous forme de « service rendu ».

Selon l’INSEE12, la redevance ne pourra être classée parmi les prélèvements obligatoires tant qu’elle sera « directement affectée » et qu’elle ne sera « ni sans contrepartie (…), ni d’un montant disproportionné » par rapport à celle-ci.

En comptabilité nationale, si le législateur substituait à l’actuelle redevance un financement direct par l’État via l’impôt, le taux des prélèvements obligatoires en serait accru d’autant. Mais il n’en résulterait pas un reclassement automatique des entreprises publiques bénéficiaires dans le secteur des « administrations publiques ». Selon l’INSEE, une telle reclassification « n’interviendrait qu’au cas par cas, selon que les ventes des entreprises publiques concernées couvriraient ou non 50 % de leurs coûts de production ».

II. ORIGINE, OBJECTIFS ET CONTENU DE LA RÉFORME DE 2004

A. ORIGINE

Depuis plusieurs années, la réforme de la redevance donnait lieu à débats. Comme le rappelle la DDM, plusieurs rapports avaient proposé des pistes de réflexion, « concluant tous à la nécessité de garantir une ressource publique dynamique au secteur audiovisuel public (…). La redevance audiovisuelle sous sa forme précédente souffrait de défauts qui avaient accru l’impopularité d’une taxe trop souvent fraudée ».

B. OBJECTIFS

Les objectifs du législateur apparaissent dans l’« exposé des motifs » de l’article 41 de la loi du 30 décembre 2004 et dans les travaux préparatoires à l’adoption de ce texte. L’« exposé des motifs » propose « une simplification du mode de perception ».

S’agissant des travaux préparatoires, le rapport d’information à la suite duquel a été déposé le projet de réforme évoque deux objectifs : un « gain substantiel du produit » et une « économie de gestion ». L’examen en commission du même rapport d’information a donné à son auteur l’occasion de mentionner, en outre, l’objectif visant à « limiter la fraude qui représente deux millions de redevables. La réforme proposée constitue donc une mesure de justice ». Enfin, le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du plan de l’Assemblée nationale, évoquant la réforme de la redevance lors du débat d’orientation budgétaire pour 2005, le 26 juin 2004, mentionne la nécessité de collecter la redevance « de façon plus intelligente » et de réduire les coûts de collecte de façon à ne pas alourdir la charge de la collectivité.

Au total, le législateur avait donc trois grands objectifs :

- une rationalisation : améliorer le recouvrement de la redevance en la collectant d’une « façon plus intelligente » offrant une « simplification » et dégageant « des économies de gestion » ;

- un souci d’équité conduisant notamment à rechercher une réduction de la fraude ;

- une optimisation financière : réduire les coûts de collecte de façon à ne pas alourdir la charge de la collectivité et améliorer le produit de la collecte.

C. CONTENU DE LA REFORME 

La réforme de la redevance audiovisuelle résulte de la loi de finances pour 2005 n° 2004-1484 du 30 décembre 2004, dont les articles 41 et 55 ont introduit, en matière de redevance audiovisuelle, quatre innovations :

1 : l’article 41 a adossé le recouvrement de la redevance à celui de la taxe d’habitation. L’assujetti étant désormais le redevable de la taxe d’habitation due pour un logement équipé d’un récepteur, la redevance due par les particuliers est désormais gérée à partir du fichier de la taxe d’habitation. La collecte est assurée directement par le réseau du Trésor public et non plus par le service de la redevance de l’audiovisuel, lequel a été supprimé.

2 : le régime des dégrèvements de redevance a été aligné sur celui des dégrèvements de la taxe d’habitation. Sont ainsi dégrevés de redevance, notamment, les bénéficiaires du revenu minimum d’insertion (RMI), les personnes âgées de 60 à 65 ans, les veufs ou veuves quel que soit leur âge, sous condition de ressources, et les contribuables dont la taxe d’habitation n’est pas perçue du fait de la mesure générale de plafonnement des impositions en fonction des ressources et charges de famille.

3 : l’article 55 de la loi du 30 décembre 2004 a ouvert des crédits pour couvrir le montant des dégrèvements et institué un mécanisme garantissant la ressource de l’audiovisuel public : si les encaissements de redevance sont inférieurs au montant inscrit en loi de finances initiale (LFI), notamment du fait de dégrèvements plus importants que prévu, le budget général de l’État compense à due concurrence ce manque à gagner. Présenté comme provisoire en 2005, ce mécanisme a été reconduit en 2006.

4 : en matière de contrôle, ont été autorisés de nouveaux instruments de lutte contre la fraude. Ainsi, chaque année, les redevables doivent-ils à présent déclarer s’ils détiennent un récepteur. La déclaration de « non-détention » rend les intéressés plus aisément identifiables par les services de contrôle. Est également permis, dans certaines limites, un rapprochement entre les listes d’abonnés des câblo-opérateurs et la liste des contribuables déclarant ne pas détenir de récepteur13. Dans le cadre du nouveau dispositif de collecte, les contrôles sont appuyés par une structure nationale spécialisée, créée en 2005 : le « pôle d’assistance des contrôles sur la redevance » (POLRE), situé à Toulouse, qui assure notamment l’assistance des services de contrôle au niveau local.

PARTIE II : PRODUCTIVITE, CONDUITE DU CHANGEMENT ET QUALITE DE SERVICE

I. PRODUCTIVITÉ ET CONDUITE DU CHANGEMENT

A. TRANSFORMATION DE L’ORGANISATION

Dirigé par un chef de service, trésorier-payeur général, l’ancien service de la redevance audiovisuelle (SRA), doté d’une autonomie fonctionnelle au sein de la direction générale de la comptabilité publique (DGCP), comprenait, d’une part, un service central à Paris, employant près de 50 agents, et d’autre part, cinq « centres régionaux de la redevance » chargés du recouvrement et de la comptabilisation.

Au 31 décembre 1998, l’effectif du SRA, exprimé en emplois budgétaires, était, selon l’inspection générale des finances (IGF), de 1 471 emplois. Au 31 décembre 2004, il était encore de 1 388 agents correspondant en « équivalents temps plein travaillé »14 (ETPT), selon la DGCP, à 1 273,8 emplois budgétaires. La réaffectation des 1 388 agents a été opérée sur des emplois vacants à la date de suppression du SRA, complétés, en principe à titre exceptionnel, par des autorisations de surnombres temporaires. Ces dernières ont été régularisées lorsqu’un départ en retraite a laissé ultérieurement un emploi vacant dans le service considéré et que cet emploi y a été maintenu.

Sur l’effectif de 1 388 agents, 409 se consacraient aux tâches de contrôle des redevables. Ils étaient répartis sur l’ensemble du territoire national. Le solde, soit 964 agents, était affecté aux travaux d’assiette, de recouvrement et de comptabilisation. Il était réparti comme suit :

- Effectifs de l’ancien service de la redevance (hors agents du contrôle) au 01.01.05:

SITES

Catégorie A

Catégorie B

Catégorie C

TOTAL

Paris

9

15

21

45

Lille

13

39

76

128

Lyon

13

49

80

142

Rennes

22

120

198

340

Strasbourg

9

31

49

89

Toulouse

18

78

107

203

Martinique

1

3

4

8

La Réunion

1

3

5

9

Total

86

338

540

964

(Source : DGCP)

S’agissant du coût global du service, l’IGF l’avait estimé pour 1998 à 136 M€ par an, soit 7 % du rendement de la redevance, alors que la même année, la fraude était évaluée « a minima » par l’IGF à 183 M€ pour moins de 2 Md€ d’encaissements. L’Etat ne compensait que pour moitié ce coût de 136 M€ en prélevant sur le compte d’affectation spéciale15 73 M€, les crédits de l’audiovisuel public n’étant réduits que de ce seul montant de 73 M€.

Du fait de l’adossement de la collecte de la redevance au recouvrement de la taxe d’habitation pour les particuliers et à celui de la TVA pour les professionnels, le service de la redevance audiovisuelle a été supprimé, le 1er octobre 2005. La redevance est désormais recouvrée :

- auprès des particuliers, par les agents du réseau du Trésor public chargés du recouvrement de la taxe d’habitation ;

- auprès des professionnels, par les services déconcentrés de la DGI, plus précisément par les « services des impôts des entreprises », déjà chargés de la TVA.

B. REDÉPLOIEMENT DES PERSONNELS

1. Reclassement géographique et sectoriel

Les agents de l’ex-SRA chargés du contrôle des redevables n’ont pas fait l’objet, à proprement parler, d’un « reclassement » : ils sont restés affectés au contrôle de la redevance, tout en relevant désormais des trésoriers-payeurs généraux de leur département d’affectation. Le véritable reclassement n’a porté que sur les agents du SRA qui traitaient d’opérations d’assiette, de recouvrement ou de comptabilisation, soit, au 1er janvier 2005, les 964 personnes mentionnées plus haut.

a. Maintien quasi-général sur les sites

Sur ces 964 agents, 942, soit près de 98 %, ont fait l’objet d’un reclassement sur le site où les employait le SRA avant sa suppression :

- Reclassement géographique des effectifs du SRA à fin juillet 2005 :

Sites

Au 01.01.05

(Avant mise en œuvre de la réforme)

Au 31.07.05

(Après mise en œuvre

de la réforme)

Effectifs du SRA

Effectifs de l’ex-SRA

Evolution

Paris

45

40

- 5

Lille

128

117

- 11

Lyon

142

142

-

Rennes

340

335

- 5

Strasbourg

89

85

- 4

Toulouse

203

205

+ 2

Martinique

8

9

+ 1

La Réunion

9

9

-

Sous-total

964

942

- 22

Autres sites

-

22

+ 22

Total

964

964

-

b. Une réaffectation aux « activités nouvelles » de plus de la moitié des agents

499 agents de l’ex-SRA, soit plus de la moitié des 964 agents à reclasser, ont été réaffectés à des activités dites « nouvelles », à savoir :

- les deux « pôles interrégionaux d'apurement administratif » (PIAA) installés, l’un à Rennes et l’autre à Toulouse, chargés de vérifier les comptes soumis à l'apurement administratif ;

- les deux « centres prélèvement services » situés respectivement à Lille et à Strasbourg, spécialisés dans la gestion à distance du prélèvement automatique des impôts des particuliers ;

- le « centre national de gestion des concours » à Lille ;

- et, en matière d’amendes, le « centre amendes services » de Toulouse, et la « trésorerie contrôle automatisé » (TCA) à Rennes.

- Reclassement des effectifs au 31.07.05

SITES

Affectations dans les services du réseau du Trésor public

Affectations aux

activités nouvelles

TOTAL

Cat.A

Cat. B

Cat. C

S/total

Cat. A

Cat. B

Cat. C

S/total

Paris

8

14

8

40

       

40

Lille

7

19

40

66

6

14

31

51

117

Lyon

10

33

59

102

3

14

23

40

142

Rennes

12

33

39

84

9

85

157

251

335

Strasbourg

8

20

3

61

 

9

15

24

85

Toulouse

9

24

39

72

8

53

72

133

205

Martinique

1

4

4

9

       

9

La Réunion

1

3

5

9

   

-

 

9

Sous-total

56

150

237

443

26

175

298

499

942

Autres sites

     

22

       

22

TOTAL

     

465

     

499

964

(Source : DGCP – 25.05.07)

L’examen détaillé de ces réaffectations fait apparaître que les « activités nouvelles » ayant accueilli la plus grande part de ces 499 agents ont été les suivantes :

SITES

Cat A

Cat B

Cat C

Total

LILLE

Centre prélèvement services

Centre national de gestion des concours

4

2

7

7

18

13

29

22

Sous-total Lille

6

14

31

51

LYON

Centre prélèvement services

3

14

23

40

RENNES

Trésorerie contrôle automatisé amendes

Pôle d’apurement administratif des comptes de collectivités locales

6

3

65

20

124

33

185

56

Sous-total Rennes

9

85

157

251

STRASBOURG

Centre prélèvement service

 

9

   

TOULOUSE

Centre prélèvement service

Pôle d’apurement administratif des comptes de collectivités locales

Pôle national contrôle redevance

6

2

25

16

12

36

28

8

67

44

22

Sous-total Toulouse

8

53

72

133

TOTAL

26

175

298

499

Ces « activités nouvelles » ont donc été :

- le nouveau mode de traitement des amendes, pour 262 personnes (dont 195 à la « trésorerie contrôle automatisé » de Rennes et 67 au « centre amendes services » de Toulouse) ;

- la gestion à distance du prélèvement automatique des impôts des particuliers, pour 93 personnes ;

- l’apurement administratif, pour 100 personnes (56 au PIAA de Rennes et 44 à celui de Toulouse).

Parallèlement aux 499 agents réaffectés à des activités « nouvelles », les 465 autres agents du SRA ont été reclassés dans le réseau pour y participer aux activités traditionnelles du Trésor public.

Cette affectation, dans le réseau traditionnel, de 465 agents du SRA est intervenu au cours d’une année où le total des effectifs de la DGCP a diminué de 480 agents (57 275 à fin 2004, 56 795 à fin 2005).

En décidant d’affecter 465 agents du SRA au réseau traditionnel, la DGCP s’est donc affranchie, en réalité, des contraintes de restructuration et de l’amélioration de productivité qui pouvait être escomptée de la diminution globale de 480 agents en 2005 de l’effectif total employé par la DGCP.

Il est vrai qu’en 2006 la baisse de l’effectif global a été beaucoup plus forte, avec une diminution de 1 354 agents.

2. Le « plan d’accompagnement social » et la conduite du changement

Le plan d’accompagnement social, ou « Relevé de conclusions relatif au plan d’accompagnement social », a fait l’objet d’un accord signé par les ministres et les organisations syndicales, le 25 novembre 2004. Ce plan a été mis en place au 1er janvier 2005, après adoption de la loi du 30 décembre 2004 par le Parlement.

Le dispositif, propre à la DGCP, a concerné l’ensemble des agents de la redevance : le service central, les cinq centres régionaux (Rennes, Toulouse, Lille, Lyon et Strasbourg), ainsi que les services de contrôle.

Il a été assorti d’engagements variés, qu’il s’agisse de garanties juridiques et géographiques, de rémunérations, de qualification ou de formation. S’y est ajouté un dispositif d’orientation des agents. Parmi les dispositions de ce plan figuraient :

- un « accompagnement indemnitaire » spécifique,

- 151 promotions supplémentaires réservées aux agents concernés, s’ajoutant aux promotions autorisées pour ces services dans le cadre de la tranche 2005 du « plan ministériel de qualification », soit 92 postes,

- de nombreuses garanties en matière d’affectation : maintien dans la ville d’affectation pour une majorité des agents, maintien dans leur ville d’affectation pour tous les agents des services de contrôle.

Il y a lieu de relever que ces différents avantages ont été accordés alors que les agents restaient pour la plupart, non seulement dans la même direction, mais sur le même site.

Enfin, un effort de formation a été organisé, couvrant une douzaine de cursus : en moyenne, les agents ont bénéficié de 20 jours de formation ; en avril 2007, 807 agents avaient ainsi été formés, ce qui représentait un total de 15.895 jours de formation (hors tutorat).

Au total, dès l’été 2005, le reclassement des agents du SRA était pratiquement achevé. L’administration a été notamment en mesure de concilier les préférences géographiques de la grande majorité des agents avec une modernisation du Trésor public.

La DGCP se propose de réunir « avant la fin de l’année 2007 » la « commission nationale de suivi paritaire de la réforme ».

C. LE COÛT DE LA RÉFORME

L’indemnité exceptionnelle de mutation prévue dans le plan d’accompagnement social a bénéficié à 293 personnes, pour un coût total de 2 063 840 €. L’indemnité exceptionnelle de reconversion, qui a concerné 37 bénéficiaires, a coûté 197 226 €. La prime exceptionnelle de 500 € a représenté un total d’environ 700 000 €.

Comme on l’a vu plus haut, 15 895 journées de formation ont été dispensées à l’occasion de la réforme, pour un coût moyen unitaire de 300€, ce qui représente au total (15 895 x 300 =) 4 768 500 €.

Ces éléments sont retracés par le tableau suivant :

Nature

Montant (€)

Indemnité exceptionnelle de mutation

2 063 840

Indemnité exceptionnelle de reconversion

197 226

Prime exceptionnelle de 500€ par agent

700 000

Formation

4 768 500

TOTAL

7 729 566

Ce coût de près de 8 M€ n’est pas disproportionné par rapport aux enjeux, dans la mesure où la réforme de la redevance est intervenue dans un contexte de diminution globale des effectifs.

Néanmoins, la DGCP n’a pas été en mesure de chiffrer, de façon plus précise, ce coût, qui n’est pas complet puisqu’il n’inclut ni la charge du plan de promotions exceptionnel, ni celle du « pécule » des agents dactylocodeurs.

Les mesures financières dérogatoires ont été prises dans des conditions irrégulières, car elles nécessitaient des textes réglementaires, qui n’ont pas été pris.

D. RÉAFFECTATION OU CESSION DES IMMEUBLES

Les conséquences immobilières de la réforme ont affecté essentiellement la DGCP. Celle-ci a cherché, conformément aux objectifs globaux de la politique immobilière de l’Etat, à rationaliser l’emploi des surfaces existantes, tout en favorisant l’intégration des personnels de l’ancien SRA au sein des services déconcentrés du Trésor public dans le cadre de ses nouvelles missions, qu’il s’agisse des amendes avec le « centre amendes services », des « centres prélèvements service » ou CPS, de l’apurement administratif avec les PIAA, ou de la gestion des Domaines.

a. Situation au 1er octobre 2005

A la date de mise en œuvre de la réforme de la redevance audiovisuelle, les surfaces occupées par les différents services (antennes, divisions ou circonscriptions de contrôle et centres régionaux) étaient de 31 542 m² sur 95 implantations.

Au 1er octobre 2005, la répartition de ces 31 542 m² entre surfaces locatives et patrimoniales était la suivante :

- secteur locatif : 79 implantations, représentant 17 933 m² ;

- secteur patrimonial : 16 implantations, représentant 13 609 m².

b. Situation au 31 mars 2007

Au 31 mars 2007, la situation immobilière était la suivante :

Parmi les 79 implantations, représentant 17 933 m², en secteur locatif :

- 49 avaient fait l’objet d’une résiliation de bail entre le 31 mai 2005 et le 31 mars 2007, soit une diminution de 6 897 m² des surfaces en cause ;

- 30 avaient été maintenues en location pour un total de 11 036 m² ; mais sur ces 30, 10 feront l’objet d’une résiliation à l’échéance sur la période 2007 à 2009, soit une diminution supplémentaire de 1 344 m².

Quant aux 13 609 m² du secteur patrimonial, la rationalisation des surfaces dévolues au Trésor public avait permis de diminuer les emprises de 4 235 m². Globalement, au 31 mars 2007, les surfaces conservées par la DGCP s’élevaient à 23 062 m² dont 11 036 m² en location et 12 026 m² à titre patrimonial.

c. Bilan et perspectives à l’échéance de l’année 2009

Il n’apparaît pas qu’aient été fixés, à l’occasion de la réforme de la redevance, des objectifs immobiliers spécifiques en dehors des objectifs globaux ou « axes directeurs » de la politique immobilière de l’État qui privilégient l’optimisation des surfaces, par reconversion d’immeubles et rapprochements d’activités, la cession des immeubles inadaptés et le recours à la location en fonction des opportunités.

- Bilan immobilier en 2007 et bilan prévisionnel pour 2009

En m²

2005

Au 30.03.2007

Différence 2007/2005

%

Projection

2009

Différence 2005/2009

%

(Patrimonial)

(13 609)

(9 374)

(4 235)

(- 31,12)

(9 087)

(13 609)

(- 33,22)

(Locatif)

(17 933)

(11 036)

(6 897)

(- 38,46)

(9 692)

(8 241)

(- 45,95)

Total

31 542

20 41016

11 132

- 35,29

18 779

12 763

- 40,46

(source : DGCP)

Au total, les conséquences immobilières de la suppression du SRA ne se sont traduites que par la réduction, prévue pour la fin 2007, d’un peu plus du tiers des surfaces consacrées à cet ancien service au 1er janvier 2005. Cette réduction a pris, ou prendra, la forme, soit de cessions, par résiliation de baux ou par vente, soit de transferts à des administrations autres que la DGCP.

L’effort de cession s’est heurté, dans le parc locatif, à l’absence de clause de résiliation anticipée (contrepartie de loyers modérés) et, dans le parc propriété de l’État, à la longueur des délais de cession, supérieurs à un an.

L’effort de cession devra être poursuivi, même si une part des deux tiers restants du parc immobilier de l’ex-SRA peut être affectée à la réimplantation de certaines trésoreries ou au développement des « activités nouvelles » de la DGCP : gestion modernisée des amendes, pôles interrégionaux d’apurement administratif, centres prélèvements service, etc.

II. AMÉLIORATION DE LA QUALITÉ DE SERVICE

A. EN MATIÈRE DE REDEVANCE 

1. Simplification de l’assiette 

Avant comme après la réforme du 30 décembre 2004, l’assiette est fonction d’une classification des récepteurs en deux catégories :

- les appareils installés dans des établissements où ils sont à la disposition d’usagers multiples ou successifs, tels que débits de boisson ou hôtels ;

- les appareils détenus par les particuliers et destinés à un usage privatif.

S’agissant, toutefois, de cette seconde catégorie, alors que l’assiette était égale avant 2005 à un récepteur pour chaque résidence, principale ou secondaire, équipée de manière permanente d’au moins un téléviseur, la réforme du 30 décembre 2004 a posé le principe d’une seule redevance due par foyer fiscal soumis à la taxe d’habitation, quel que soit le lieu de réception, résidence principale ou secondaire.

2. Simplification des motifs sociaux de dégrèvement

La réforme du 30 décembre 2004 a aligné les dégrèvements de redevance audiovisuelle pour motifs sociaux sur ceux de la taxe d’habitation. Le maintien de deux systèmes distincts aurait empêché le redéploiement des agents du SRA, qui auraient dû gérer un régime spécifique d’exonération. Le régime des dégrèvements est plus simple et plus lisible, tant pour l’administration que pour les redevables.

3. Simplification des taux, des avis d’imposition, des actes de paiement et de l’accès aux services en charge du traitement des réclamations

Avant 2005, le taux s’élevait à 116,50 € en métropole et à 74,31 € dans les départements d’outre-mer. La réforme a arrondi ces taux à, respectivement, 116 € et 74 €.

L’adossement au recouvrement de la taxe d’habitation a permis l’émission d’un seul avis d’imposition pour cette taxe et pour la redevance audiovisuelle. Il en est résulté, pour l’ensemble constitué par la taxe d’habitation et la redevance, un seul acte de paiement et une seule procédure de recouvrement forcé.

La réforme a également simplifié l’accès aux services chargés du traitement des réclamations en multipliant les points de contact accessibles aux usagers : ces derniers peuvent désormais s’adresser aux centres des impôts et aux trésoreries, alors que seuls les six centres de la redevance étaient compétents en la matière auparavant.

B. EN DEHORS DE LA REDEVANCE 

1. Soutien au réseau du Trésor public

La suppression du SRA a été mise à profit pour faciliter la mise en place de plusieurs structures d’appui au réseau du Trésor public, qu’il s’agisse des deux « pôles interrégionaux d’apurement administratif » ou du « centre national de gestion des concours de recrutement » ouvert à Lille.

2. Amélioration des relations avec l’usager

En matière de relations directes avec l’usager du Trésor public (hors redevance audiovisuelle), plusieurs structures nouvelles ont bénéficié de la réforme de la redevance audiovisuelle :

- deux des quatre « centres prélèvement service », ou CPS ;

- le « centre amendes service » de Toulouse, centre d’appel qui, pour les

contrevenants de 32 départements :

§ apporte des informations d’ordre général ou individuel en réponse aux questions que ces personnes posent par téléphone ou par courrier concernant leurs amendes ;

§ prend en charge les paiements par carte bancaire ;

§ peut octroyer des délais de paiement ;

- enfin, la « trésorerie des amendes du contrôle automatisé », ou TCA, à Rennes, dotée d’une responsabilité nationale pour la gestion des amendes issues du contrôle automatisé par radar (« amendes radar »).

*

Au total, grâce à diverses mesures de simplification, notamment la suppression de toute distinction entre résidence principale et résidence secondaire, la réforme du 30 décembre 2004 améliore sensiblement le service rendu au redevable de la redevance audiovisuelle.

Toutefois, le bénéfice complet de ces simplifications n’interviendra qu’au 31 décembre 2007, quand sera supprimé le régime des « droits acquis » par les personnes dégrevées de redevance avant la réforme, mais assujetties à la taxe d’habitation, et qui bénéficient actuellement d’un dégrèvement de redevance à titre transitoire.

En ce qui concerne, enfin, la qualité du service rendu aux redevables hors redevance audiovisuelle, la réforme a contribué à moderniser le réseau en facilitant la constitution, d’une part, de pôles d’appui spécialisés, et, d’autre part, des structures nouvelles en relations directes avec l’usager, destinées à faciliter ses démarches et les procédures de règlement d’impôts ou d’amendes.

PARTIE III : ÉQUITE ET LUTTE CONTRE LA FRAUDE

i.

RÉGIME DES DÉGRÈVEMENTS

Dans la mesure où le fait générateur est la détention du récepteur, la redevance audiovisuelle demeure :

- un impôt sur la consommation, insusceptible de progressivité ;

- un impôt dont le taux ne varie pas en fonction de la catégorie de l’appareil ni de son prix, contrairement par exemple à l’ancienne vignette automobile dont le taux variait en fonction de la puissance administrative du véhicule et de son ancienneté.

Au regard de la nature de la redevance, la réforme est neutre : elle ne modifie pas la situation préexistante.

Elle a certes modifié le régime de dégrèvement social de la redevance, auquel la réforme vise à substituer celui de la taxe d'habitation. Il n'aurait cependant guère de sens de se livrer à une comparaison en termes d'équité de ces deux régimes, qui résultent de décisions successives en faveur de catégories sociales souvent identiques, et dont les champs se recouvrent largement : en 2004, sur 4,4 millions de foyers exonérés de redevance, 78 % étaient également exonérés de taxe d'habitation. Numériquement, le nombre des dégrèvements supplémentaires provoqués en 2005 par la première phase de l'alignement des deux régimes (700 000) devrait correspondre, selon les estimations de la DGI, à celui des foyers qui cesseront de bénéficier de dégrèvements au titre des "droits acquis" en 2008, lorsqu'interviendra la deuxième phase de l'alignement.

La réforme a cependant permis un élargissement des catégories de personnes bénéficiant de dégrèvements de la redevance.

A. L’ÉLARGISSEMENT DES CAS DE DÉGRÈVEMENTS POUR MOTIFS SOCIAUX

En alignant les dégrèvements sur ceux de la taxe d’habitation, plusieurs centaines de milliers de foyers supplémentaires aux revenus modestes, principalement des personnes âgées de 60 à 65 ans et des bénéficiaires du RMI, ont bénéficié d’un dégrèvement.

En 2005, plus de 5,1 millions de foyers ont bénéficié d’un dégrèvement pour motifs sociaux, contre 4,4 millions en 2004 :

-  Les exonérations de redevance de 2002 à 2004 (avant la réforme de la redevance)

 

2002

2003

2004

Nombre au 30.06

Nombre au 31.12

Nombre au 31.12

Nombre au 31.12

Personnes âgées (65 ans et plus)

2 899 866

3 111 527

3 204 782

3 324 350

Personnes âgées (70 ans et plus)

452 728

457 938

437 465

406 817

Invalides

690 466

711 512

690 313

672 652

Etablissements

24 693

24 767

25 331

25 938

Fonds de solidarité vieillesse

44 342

44 297

41 001

35 900

TOTAL

4 112 095

4 350 041

4 398 892

4 465 657

(Source : DGCP / Service central de la redevance)

B. ÉTAT DES DÉGRÈVEMENTS DEPUIS LA RÉFORME

Le nombre de dégrèvements de redevance audiovisuelle accordés dans le rôle général de 2006 s’est élevé à 5,1 millions (soit 149 000 de moins qu’en 2005) pour un montant total de 571,6 M€. Ce montant est en légère baisse par rapport à 2005 (- 17,5 M€) du fait de la diminution du nombre de bénéficiaires des « droits acquis ».

Le tableau ci-après présente la ventilation de ces dégrèvements (hors ceux obtenus sur réclamation contentieuse)17.

- Dégrèvements accordés en 2005 et 2006 (après la réforme de la redevance)

 

2005

2006

Nombre d'articles dégrevés

Montants des dégrèvements accordés

Nombre d'articles dégrevés

Montants des dégrèvements accordés

Exonération spécifique aux départements d’outre-mer

40 780

3 017 720 €

41 190

3 048 060 €

Titulaires de l’allocation supplémentaire du Fonds de solidarité vieillesse ou du Fonds spécial d’invalidité

80 853

9 235 266 €

75 377

8 590 180 €

Titulaires de l’allocation aux adultes handicapés, sous condition de ressources

301 709

34 760 104 €

312 242

35 953 078 €

Contribuables infirmes ou invalides, sous conditions de ressources

144 372

16 723 632 €

141 507

16 390 788 €

Contribuables âgés de plus de 60 ans, sous conditions de ressources

2 647 029

303 967 566 €

2 630 376

301 917 798 €

Veufs ou veuves, sous conditions de ressources

120 457

13 853 354 €

115 138

13 240 382 €

Bénéficiaires du revenu minimum d’insertion

755 457

84 957 864 €

805 075

90 646 940 €

Droits acquis : contribuables de plus de 65 ans, sous condition de ressources

1 025 733

118 796 154 €

851 422

98 629 208 €

Droits acquis : contribuables handicapés, sous condition de ressources

33 075

3 821 790 €

27 866

3 220 192 €

Total

5 149 465

589 133 450 €

5 000 193

571 636 626 €

(Source : DGI)

II. LUTTE CONTRE LA FRAUDE

L’évasion fiscale dont la redevance audiovisuelle faisait l’objet a été l’un des motifs déterminants de la réforme. L’organisation des services chargés de lutter contre cette fraude a été rénovée ; le taux de fraude sur la redevance a diminué, en partie pour des raisons mécaniques, le champ d’application de la redevance audiovisuelle ayant été réduit du fait de l’exclusion presque totale des téléviseurs présents dans les résidences secondaires, qui constituaient une importante source de fraude avant la réforme.

Les inexactitudes dans la déclaration faite par les particuliers entraînent l’application d’une amende de 150 €. Les omissions ou inexactitudes dans les déclarations des professionnels sont passibles d’une amende de 150 € par récepteur.

A. L’ORGANISATION ET LES MOYENS

Dans le cadre de la nouvelle architecture de la collecte de la redevance, la DGI et la DGCP prennent chacune leur part dans l’organisation de la lutte contre la fraude, selon une procédure rénovée, même si les services de la DGCP assurent l’essentiel des activités de contrôle proprement dites.

1. Les effets de la réforme : un partage des rôles entre la DGI et la DGCP

Auparavant, le service de la redevance assurait à la fois les activités d’assiette, de recouvrement et de contrôle. La nouvelle répartition des rôles entre la DGI et la DGCP résulte de deux éléments introduits par la réforme :

- la déclaration de « non détention » d’un téléviseur est effectuée par les particuliers sur leur déclaration de revenus imposables (dite « 2042 »), dont la gestion relève de la DGI ; s’agissant des professionnels, la redevance est liée à la déclaration de TVA, qui relève également de la DGI ; la DGI est donc à la source des informations de base permettant de cibler les contrôles sur la redevance ;

- le contrôle proprement dit est confié à la DGCP ;

- lorsque les contrôles effectués conduisent à recouvrer la redevance contrairement à la déclaration initiale des redevables, des rôles supplémentaires sont émis par la DGI.

Au cours de cette procédure, des transferts d’informations à la fois sensibles, en raison de leur caractère nominatif, et de masse ont lieu entre la DGI et la DGCP, ce qui entraîne des risques de par la nature même des données transférées. A l’issue de chacun des rôles de taxe d’habitation et de redevance, un fichier nommé FACTV (fichier d’aide au contrôle TV) est communiqué par la DGI à la DGCP pour le contrôle de la non détention. Il recense les redevables taxe d’habitation qui sont dans le champ de la redevance adossée à la taxe d’habitation, qui ont déclaré ne détenir aucun poste de télévision et qui ne sont pas susceptibles d’être dégrevés sur le rôle de redevance.

Ces risques sont maîtrisés par la DGI et la DGCP, qui ont formalisé leurs relations. Des procédures écrites ont été mises en œuvre de manière satisfaisante pour le recouvrement au titre de la redevance due pour 2005 et 2006. En particulier, la procédure de rectification contradictoire, empruntée à la DGI, permet désormais, par des contrôles sur pièces, de dialoguer avec le redevable et de lui permettre de régulariser sa situation.

354 emplois « équivalents-temps plein » sont prévus, en LFI 2007, pour les « fonctions de contrôle de la redevance » assurées par la DGCP. En 2004, c’est-à-dire avant la suppression du service de la redevance, 409 agents (personnes physiques) étaient affectés au contrôle de la redevance. Ces deux chiffres ne sont pas directement comparables, car il s’agit dans un cas de personnes physiques et dans l’autre d’équivalents temps plein. Cependant, on peut en inférer une relative stabilité des personnels de contrôle.

2. Les résultats des contrôles en 2005 et 2006

Les contrôles ont porté en 2005 et 2006, comme avant la réforme, sur les particuliers et les professionnels.

a. Le contrôle des particuliers

Le contrôle des particuliers sur pièces

Les contrôles sur pièces ont été menés à partir du mois d’octobre 2005 en utilisant le fichier des contribuables ayant coché la case de non détention sur leur déclaration de revenus. Ce fichier comportait 1,2 million de références en 2005 et 1,1 million en 2006.

A la suite des croisements de fichiers évoqués ci-dessus et des procédures de rectification contradictoire engagées, près de 40 000 demandes d’émission d’un rôle supplémentaire ont été adressées aux services fiscaux pour mise en recouvrement en décembre 2005 et avril 2006, pour un montant total de 5,7 M€ au titre de la redevance de 2005.

Le contrôle des particuliers sur place

Au 31 décembre 2006, plus de 320 000 enquêtes sur place avaient été réalisées à partir des contrôles sur pièces : près de 15 % des contribuables contrôlés avaient reconnu détenir un appareil de télévision dans leur résidence, dont près de 7 % au 1er janvier 2005 et près de 8 % après le 1er janvier 2005.

Près de 18 000 demandes d’émission d’un rôle supplémentaire, représentant un montant total de plus de 2,6 M€, avaient été transmises aux services fiscaux pour mise en recouvrement au 31 décembre 2006.

- Total des rôles supplémentaires pour la redevance au titre de 2005

Rôles supplémentaires

(RS)

Décembre 2005

Avril 2006

Décembre 2006

Total

Nombre

Montant (€)

Nombre

Montant (€)

Nombre

Montant (€)

Nombre

Montant (€)

R

17 705

2 053 780

7 845

910 020

14

1 624

25 564

2 965 424

RS suite à procédure de rectification contradictoire

-

-

11 952

2 806 932

1 382

271 912

13 334

3 078 844

RS suite à contrôle sur place

-

-

57

6 612

17 169

2 354 454

17 226

2 361 066

TOTAL des rôles supplémentaires

17 705

2 053 780

19 854

3 723 564

18 565

2 627 990

56 124

8 405 334

(Source : DGI/DGCP)

Près de 13 000 rôles supplémentaires ont été émis avec une amende de 150 € et près de 44 000 sans amende.

b. Le contrôle des professionnels

La DGI a adressé en 2005 et 2006 plusieurs lettres de relance aux  professionnels qui n’avaient pas déclaré de redevance audiovisuelle (200 000 professionnels étaient concernés dans la première phase).

Les contrôles sur place, menés par les services de la DGCP à la suite de ces relances, ont porté sur les professionnels qui n’avaient pas répondu à ces lettres, plus particulièrement ceux qui acquittaient la redevance au cours des années précédentes.

Au 31 décembre 2006, plus de 33 200 contrôles avaient été menés : plus de 16 % d’entre eux (5 000) avaient permis la constatation immédiate d’infractions qui avaient donné lieu à la demande d’émission d’un avis de mise en recouvrement, pour un montant de plus de 2,8 M€ au titre de la redevance de 2005.

S’agissant de la redevance au titre de 2006, 77 399 professionnels avaient été contrôlés au 31 août 2007 (soit 1 point de plus que l’objectif assigné aux services), avec des résultats positifs pour 18 % d’entre eux, l’objectif initial étant là aussi dépassé de 1 point.

B. UNE FRAUDE EN BAISSE MÉCANIQUE

Avant la réforme, l’inspection générale des finances (IGF) évaluait la fraude à la redevance audiovisuelle à 10,9 % pour 1999. Le service de la redevance évaluait ce taux (pour les particuliers) à 8,5 % en 2002, soit le taux de fraude le plus élevé de tous les impôts français.

 

2002

2003

2004

Taux de fraude

8,5 %

8,57 %

6,36 %

(Source : Données 2003-2004 du service central de la redevance audiovisuelle)

Le système déclaratif sur lequel reposait la redevance de l’audiovisuel avant la réforme était probablement la cause principale de la fraude. Celle qui portait sur les téléviseurs installés dans les résidences secondaires était en particulier évaluée à plus de 65 % selon l’IGF en 1999.

Depuis la réforme, le taux de fraude peut être évalué comme suit :

- le fichier des déclarants de « case cochée » sur la déclaration de revenus (non exonérés) donne le nombre maximal de fraudeurs potentiels ;

- un pourcentage de fraudeurs est constaté dans le total de la population contrôlée ;

- par convention, on extrapole ce pourcentage au nombre maximal de fraudeurs potentiels.

Ce taux de fraude ne prend pas en compte les fraudes qui peuvent exister en amont, c'est-à-dire, entre autres, sur les revenus déclarés au titre de l’impôt sur le revenu ; une telle évaluation est en effet difficile.

En 2005, le fichier comprenait 1,2 million de contribuables et en 2006 1,1 million. Rapporté au nombre d’articles de redevance audiovisuelle émis en 2005 (19,3 millions), le niveau théorique maximal du taux de fraude s’établit à : 1,2/19,3 = 6,2 %, ce qui est déjà inférieur à la situation antérieure. 20 % des contrôles réalisés en 2005 et 2006 sur la redevance de 2005 ont été positifs : 84 000 contrôles positifs sur 428 000.

Le taux de fraude peut ainsi être estimé à 1,25 % (20 %x6,2 %) pour 2005. Les contrôles sur la redevance 2006 n’étaient pas achevés à la date d’établissement du présent rapport.

*

En matière de lutte contre la fraude, la « case à cocher» dans la déclaration de revenus a permis de mieux identifier les fraudeurs potentiels. Les services de contrôle ont été maintenus et une procédure de rectification contradictoire a été instaurée. L’ensemble de ce dispositif renforce les moyens de lutte contre la fraude.

Cela étant, la diminution de la fraude résulte certainement, pour une large part, de la réduction du nombre des redevables et donc d’une baisse du dénominateur de l’indicateur du taux de fraude :

- l’abandon de toute taxation des récepteurs dans les résidences secondaires a mécaniquement réduit une source importante de fraude ;

- l’extension des dégrèvements et le maintien des « droits acquis » ont de facto réduit le nombre de redevables, et donc celui des fraudeurs potentiels.

Cette réduction a donc été atteinte au prix de la renonciation à des ressources potentielles.

C. LES DIFFICULTÉS DE MISE EN œUVRE

1. Une incompréhension de la part d’un nombre assez significatif de redevables

La présence d’une case à cocher dans la déclaration de revenus des particuliers a donné lieu, lors de la première année d’application, à certaines incompréhensions : la case ne doit être cochée que si l’on ne détient pas de téléviseur. Certains contribuables ont coché de bonne foi la case, alors qu’ils étaient dégrevés, pensant qu’il s’agissait de la seule manière d’échapper à la redevance.

La rédaction de la phrase a été revue avec des représentants des usagers et les explications accompagnant la déclaration de revenus ont été renforcées par la DGI. Lors de la première année d’application de la réforme, la phrase figurant sur la déclaration de revenus au titre de l’année 2004 était la suivante : « Si, au 1er janvier 2005, aucune de vos résidences n’est équipée d’un appareil récepteur de télévision, cochez la case. » L’année suivante (déclaration des revenus perçus en 2005), la phrase est devenue : « Cochez la case, si aucune de vos résidences (principale ou secondaire) n’est équipée d’un téléviseur. » La virgule a disparu dans la déclaration relative aux revenus 2006.

Ces efforts semblent avoir en partie porté leurs fruits. En 2005, environ 10,1 % des ménages qui remplissent une déclaration de revenus avaient coché la case de non détention d’un téléviseur, ce qui peut paraître très élevé, si on le compare au taux d’équipement des foyers en téléviseurs, que l’INSEE estimait à 95 % en 2004. Ce taux est ramené à 8,8 % en 2006.

Si l’on compare néanmoins le nombre de redevables de taxe d’habitation dans le champ de la redevance disposant d’un téléviseur au nombre total de redevables de taxe d’habitation dans le champ de la redevance, on obtient un résultat de 95,14 % pour 2006, soit un chiffre très proche de celui de l’INSEE.

2. Un fait générateur qui pourrait fragiliser les contrôles

Pour les particuliers, le fait générateur de la redevance audiovisuelle est la détention d’un téléviseur au 1er janvier (alinéa 1 du II de l’article 1605 du CGI). Cette précision calendaire a été introduite en raison de l’adossement de la déclaration à celle des revenus et du recouvrement à la taxe d’habitation. Auparavant, la redevance était due et recouvrée à la date anniversaire de l’acquisition du récepteur, telle que déclarée par le détenteur ou le revendeur.

De plus, la déclaration de détention ou de non détention d’un téléviseur, pour les particuliers, intervient désormais à une date unique, au moment de la déclaration de revenus. Les homologations des rôles d’impôt sur le revenu intervenant au cours de l’été ou en début d’automne, le traitement du fichier des redevables ayant coché la case de non détention d’un téléviseur ne peut intervenir avant le mois d’octobre, soit 10 mois après le 1er janvier, date du fait générateur.

Du fait de ce délai incompressible, un redevable contrôlé, dont il est établi qu’il détient un téléviseur à la date du contrôle, peut arguer du fait qu’il ne détenait pas son téléviseur au 1er janvier. Le résultat des contrôles sur pièces et sur place peut en être altéré, dans la mesure où les contestations sont facilitées.

Ce constat doit néanmoins être nuancé. La difficulté ne concerne au mieux qu’un exercice pour chaque particulier dont la détention d’un téléviseur au 1er janvier n’est pas établie. Si les services de contrôle constatent qu’un particulier détient bien un téléviseur à un moment de l’année, il sera assujetti à la redevance pour l’année suivante, avec des possibilités de contestation réduites.

Il reste que l’instauration d’une date unique est une simplification.

3. Le contrôle des revendeurs de téléviseurs : un dispositif à compléter

Le nombre de déclarations de ventes d’appareils de télévision enregistrées par la DGCP avait fortement diminué en 2005 (3,4 millions en 2005 contre 5 millions en 2004). En 2006, les liaisons entre les vendeurs de télévision et le pôle de Toulouse ont été normalisées. Le nombre de ventes déclarées s’est élevé à 5,1 millions.

A l’occasion du débat sur la réforme de la redevance, certains représentants des revendeurs avaient manifesté le souhait de voir disparaître cette obligation déclarative. Elle a finalement été maintenue, mais une disposition antérieure, qui permettait aux agents du service de la redevance d’avoir accès aux pièces comptables (factures) des revendeurs pour évaluer ces déclarations, n’a pas été reconduite. La loi de finances initiale pour 2004 prévoyait (art. 37, X-A) que « les agents (chargés de contrôler les revendeurs) ont, dans l'exercice de leurs fonctions, le droit de se faire communiquer par les commerçants, constructeurs, importateurs, réparateurs et bailleurs de dispositifs de réception, les livres dont la tenue est prescrite par le titre II du livre Ier du code de commerce ainsi que tous les livres de comptabilité, documents annexes, pièces de recettes et de dépenses ». Cette disposition n’a pas été reprise dans la loi de finances initiale pour 2005, qui a réformé le recouvrement de la redevance.

L’article L. 16C du livre des procédures fiscales prévoit que les agents du Trésor public assurent le contrôle de la redevance. Toutefois, cet article ne leur permet pas de procéder à une vérification de comptabilité que seuls peuvent actuellement exercer les agents de la DGI. Cette situation rend difficiles les enquêtes de terrain portant sur les professionnels détenant des téléviseurs, les hôtels par exemple, et prive de la possibilité de contrôle sur place à l’encontre des vendeurs et loueurs de télévision. La DGCP et la DGI étudient une solution juridique sécurisée.

4. L’accès aux fichiers des câblo-opérateurs et des diffuseurs de programmes payants : une disposition encore très peu utilisée

La réforme de la redevance a introduit (art. L 96-E du livre des procédures fiscales) un droit de communication, au bénéfice de l’administration, sur les établissements diffuseurs ou distributeurs de services payants de programmes de télévision, des éléments des contrats de certains de leurs clients.

Cette disposition concerne les câblo-opérateurs, les fournisseurs de télévision par ADSL, et les opérateurs par satellite, et avait reçu l’accord de la commission nationale informatique et libertés (CNIL, cf. communiqué du 26 septembre 2003), sous réserve que les renseignements ainsi demandés le soient « de manière ponctuelle et motivée et portent sur des personnes nommément désignées », conformément à la directive 95/46/CE (art. 13).

Elle a jusqu’ici reçu une application prudente par les services du ministère des finances. 200 demandes relatives à la redevance 2005 ont été transmises par la DGCP à plusieurs opérateurs, à l’été 2006. Sur ces 200 demandes individuelles, 11 ont reçu une réponse des cablo-opérateurs indiquant l’existence d’un abonnement. 500 demandes supplémentaires sont en cours de préparation. La DGCP a effectué plusieurs déclarations à la CNIL s’agissant de l’exercice de ce droit de communication.

Ce faible nombre de demandes peut surprendre, mais la prudence de l’administration s’explique par les contraintes qui s’attachent au respect des exigences de la directive précitée. Plus d’un million de redevables cochent la case de non détention d’un téléviseur chaque année et les fournisseurs de services télévisés payants ont plusieurs millions d’abonnés.

5. Le rapport coût-bénéfice du contrôle de la redevance audiovisuelle

Le coût complet minimal des services de contrôle de la redevance est évalué par l’enquête de la Cour à 16 M€ (cf. infra.). Les contrôles opérés par ces services ont permis de rapporter environ 8 M€ au titre de la redevance 2005.

Cette comparaison n’est cependant pas totalement opérante, car l’effet dissuasif de l’existence de ces services de contrôle de la redevance ne peut être chiffré ; il est fort probable qu’une baisse des moyens affectés au contrôle aurait pour conséquence une remontée du taux de fraude. Au demeurant, ce coût de 16 M€ ne représente que 0,7 % du produit encaissé.

PARTIE IV : BILAN FINANCIER D’ENSEMBLE

I. LES ÉCONOMIES RÉALISÉES

Au coût ponctuel de la réforme (environ 8 M€) s’ajoutent des coûts pérennes.

Le coût de l’assiette et du recouvrement de la redevance audiovisuelle ressort théoriquement de la lecture des documents budgétaires, puisque des frais d’assiette et de recouvrement, qui s’ajoutent aux frais de trésorerie évoqués ci-dessus, sont prélevés chaque année sur le produit de la redevance. Ils s’élèvent en 2006 à 25,6 M€, presque deux fois moins qu’en 2005 (50,1 M€).

Cependant, le prélèvement figurant aujourd’hui en loi de finances n’est pas évalué selon la méthode des frais réels d’assiette et de recouvrement par la DGI et la DGCP pour la redevance audiovisuelle. Il revêt un caractère forfaitaire, sans reposer sur un chiffrage des coûts effectivement supportés.

La réforme a modifié la structure de ces frais, tout en les réduisant. En effet, l’adossement du recouvrement de la redevance à celui de la taxe d’habitation a entraîné des économies d’échelle significatives pour la DGCP, les deux contributions étant désormais gérées de concert.

A. LE COÛT DE GESTION DE LA REDEVANCE AVANT LA RÉFORME

Le rapport de l'inspection générale des finances sur le service de la redevance de 1999 a montré que le coût de la collecte et du contentieux dépassait sensiblement le budget du service, tel qu’il apparaissait en charges du CAS n° 902-15 (« frais de gestion du service chargé de la perception de la redevance »), et qui s’élevait à 73 M€ en 2000, les dépenses de personnel représentant 57,30 % de ce total et les frais d'affranchissement  25,19 %.

Le recouvrement contentieux de la redevance était à la charge de la DGCP et donc hors budget « recouvrement de la redevance » tel qu’il apparaissait au CAS : celui-ci ne comportait pas les rémunérations accessoires des agents d'encadrement, l’occupation domaniale des locaux  et la quote-part du coût des services de l'administration centrale impliqués dans la collecte de la redevance. Ces coûts étaient valorisés à 62 M€ par l’IGF dans son rapport précité, soit presque l’équivalent des coûts directs du service figurant au CAS (74 M€). Le coût global du service de la redevance estimé par l’IGF s’élevait ainsi à 136 M€.

B. L’ESTIMATION DIFFICILE DU COÛT RÉEL ACTUEL : UNE COMPTABILITÉ ANALYTIQUE INADAPTÉE

Les coûts directement affectables à la redevance sont ceux des services de contrôle. Au titre de la loi de finances initiale pour 2007, ces effectifs s’élèvent à 354 équivalents temps plein travaillés, soit, si l’on retient un coût moyen de l’agent de 30 000 €, des coûts de personnel d’environ 10,6 M€. Il faut ajouter à ces coûts de personnel des coûts immobiliers, informatiques et de fonctionnement dont la DGCP ne peut déterminer avec certitude le montant. Si l’on émet l’hypothèse que ces frais supplémentaires peuvent être évalués à 50 % des dépenses de personnel (ils en constituaient presque 100 % du temps du service de la redevance, selon l’IGF, mais la réforme a permis d’optimiser les frais d’affranchissement et le coût du recouvrement forcé), on arrive à un total d’environ 16 M€ pour les services de contrôle, ce qui représente déjà environ les deux tiers des 25,6 M€ prélevés forfaitairement en 2006 pour l’assiette et le recouvrement de la redevance audiovisuelle. A fortiori, ce coût est nettement supérieur au prélèvement de 24 M€ de frais de trésorerie, d’assiette et de recouvrement, prévu en LFI 2007, dans la mesure où les frais de trésorerie représentent déjà 15 M€ sur les 24 M€ prévus.

Hors dispositif de contrôle, la réforme a, selon la DGCP, permis de réaliser une économie théorique sensible, car l’adossement du recouvrement de la redevance à celui de la taxe d’habitation a permis de fusionner le traitement des deux impôts, un seul avis d’imposition étant désormais émis. La DGCP ne peut isoler les coûts de recouvrement de la redevance par rapport à la taxe d’habitation et estime que, s’agissant d’une ligne supplémentaire sur l’avis de taxe d’habitation, le coût est marginal. Quant à la DGI, elle ne peut pas non plus distinguer les activités liées à la redevance de celles liées à la TVA (redevance professionnels) ou à l’impôt sur le revenu (constitution du fichier FACTV).

En revanche, l’année 2005 a fait ressortir pour la DGI une augmentation des charges essentiellement liée :

− au renseignement des usagers par les centres des impôts,

− à l’instruction des recours contentieux et gracieux,

− au traitement des rôles consécutifs au contrôle.

Le traitement des réclamations propres à la redevance a été évalué par la DGI pour 2005 à une charge de 260 emplois équivalents temps plein, assurés sans transfert d’emploi.

*

L’un des arguments avancés à l’occasion du débat sur la réforme était précisément le coût parfois jugé excessif du service de la redevance et des frais qui pouvaient lui être associés. L’absence de la comptabilité d’analyse des coûts des actions de la DGCP ne permet pas, malgré la mise en œuvre de la LOLF, de déterminer les coûts complets de l’activité liée à la redevance audiovisuelle. Le manque général d’outils d’analyse va à l’encontre de la LOLF et de la nécessité réaffirmée de mieux mesurer le coût des actions de l’administration, pour en rendre compte. De manière générale, le coût de gestion de la redevance ne fait pas l’objet d’un suivi systématique.

C. LA RÉFORME A ENGENDRÉ DES FRAIS DE CONTENTIEUX DE L’ENSEMBLE « TAXE D’HABITATION+REDEVANCE »

Le taux d’intervention sur la taxe d’habitation augmente entre 2004 et 2005. Ce taux, qui rapporte le coût complet de gestion d’un impôt à ses recettes encaissées, est ainsi passé de 3,77 % en 2004 à 3,86 % en 2005. Or le chiffre de 2005 correspond aux coûts de l’ensemble « taxe d’habitation+redevance », alors que celui de 2004 n’est relatif qu’à la seule taxe d’habitation, puisque la réforme de la redevance n’était pas encore intervenue.

Le taux brut d’intervention sur la taxe d’habitation, appliqué à la redevance, ne semble pas être un indicateur pertinent pour évaluer le coût de la redevance, dans la mesure où les deux impôts sont désormais gérés de manière conjointe et indifférenciée. En revanche, l’évolution de ce taux entre 2004 et 2005 permet d’estimer l’effet marginal de la réforme sur la gestion de l’ensemble formé par la taxe d’habitation et la redevance audiovisuelle.

Cette comparaison montre que la mise en œuvre de la réforme a entraîné des coûts supplémentaires.

Selon la DGCP, l’adossement du recouvrement de la redevance audiovisuelle à celui de la taxe d’habitation a engendré des contentieux supplémentaires au titre de l’ensemble « taxe d’habitation+ redevance » ; le montant moyen de taxe d’habitation acquitté par un ménage étant d’environ 300 €, les 116 € supplémentaires au titre de la redevance, à décaisser au même moment, constituent une augmentation importante, de près de 40 %, de ce montant. En effet, auparavant, le montant de la redevance pouvait être acquitté à un autre moment de l’année. Pour de nombreux ménages, cette augmentation peut causer des difficultés de trésorerie.

Cette interprétation est confirmée par le fait qu’entre 2005 et 2006, selon la DGCP, on assiste à une forte augmentation (+ 27,7 %) d’« articles majorés », c’est-à-dire de dossiers résultant de contentieux, au titre de la taxe d’habitation relative aux années respectives 2004 et 2005. Les contentieux relatifs à l’année N étant traités au premier trimestre N+1, il paraît pertinent de comparer les données 2006 et 2005.

La comptabilité d’analyse des coûts de la DGCP permet d’évaluer indirectement ces coûts marginaux, en comparant le coût de recouvrement de la taxe d’habitation après adossement, à celui de la taxe d’habitation seule, avant adossement. Cette comptabilité analytique permet ainsi d’établir les données suivantes :

Coût de recouvrement de la taxe d’habitation par la DGCP avant la réforme (base 2005)

274,4 M€

Coût de recouvrement de la taxe d’habitation par la DGCP après la réforme (base 2006)

305,8 M€

Taux d’évolution brut

+ 11,4 %

Taux moyen d’évolution annuelle du coût de recouvrement taxe d’habitation (hors réforme) 18

+ 2,8 %

Différentiel imputable à l’adossement

+ 8,6 %

Traduction en M€ = 274,4 M€ x 8,6 % =

23,5 M€

(Source : DGCP)

Le recul n’est pas suffisant pour apprécier le caractère pérenne de ces contentieux supplémentaires et donc des coûts de gestion associés. Une éventuelle baisse pourrait résulter de deux éléments :

− la progression du taux de mensualisation, qui est actuellement de 32,39 %, pour le paiement de la taxe d’habitation et de la redevance ;

− une accoutumance des redevables au dispositif ; certains ménages ont pu ne pas avoir prévu qu’ils devraient payer simultanément la redevance et la taxe d’habitation et pourront prendre des dispositions pour éviter ces difficultés à l’avenir.

D. LA RÉFORME A ENGENDRÉ DES FRAIS DE TRÉSORERIE

La réforme a également engendré des frais de trésorerie, prélevés sur le produit de la redevance chaque année. Ces frais s’élèvent à 15,6 M€ en 2006. Ils rémunèrent les avances consenties par l’Etat jusqu’à encaissement de la taxe d’habitation, dont les dates limites de perception sont le 15 novembre et le 15 décembre. Malgré la hausse importante des taux d’intérêt, ces frais diminuent en 2006 de 4,4 % par rapport à 2005 (16,3 M€), grâce à la progression du recouvrement mensuel de la redevance adossée à la taxe d’habitation pour les particuliers mensualisés. La proportion de contribuables mensualisés pour leur taxe d’habitation a crû depuis 2004 et s’établit pour 2006, comme on vient de le voir, à 32,39 %. On peut donc s’attendre à une diminution supplémentaire des frais de trésorerie corrélative à une nouvelle progression de la mensualisation.

La totalité de ces frais de trésorerie peut être imputée à la réforme, qui a reporté l’essentiel des encaissements de redevance vers la fin de l’année calendaire ; les ressources correspondantes sont versées aux organismes de l’audiovisuel public par douzièmes dès le début de l’année. Auparavant, la redevance était recouvrée de manière mieux répartie sur l’année, ce qui facilitait l’adéquation entre le recouvrement et le versement des ressources.

E. LE COÛT GLOBAL

En conclusion, les coûts directement affectables à la gestion de la redevance sont aujourd’hui d’environ 31 M€, soit 16 M€ de coûts de contrôle et 15 M€ de frais de trésorerie. Les contentieux au titre de la taxe d’habitation et de la redevance engendrés par la réforme peuvent pour leur part être estimés à 23,5 M€.

Un bilan complet de la réforme doit prendre en compte à la fois les économies de gestion et les coûts supplémentaires engendrés par la réforme, hors ponctuel de la réforme estimé à 8 M€ (cf. supra).

Or, le total des coûts est de 31 M€ + 23,5 M€ = 54,5 M€.

Si l’on compare ces 54,5 M€ aux 136 M€ de coût de l’ancien service de la redevance (coût de 1999, selon l’IGF), l’économie réalisée est de 81,5 M€. De manière plus pertinente, compte tenu de la période écoulée entre les deux évaluations, si l’on rapporte le coût de 1999 à des euros de 2006, sur la base des tables de l’INSEE, 136 M€ de 1999 équivalent à 155 M€ de 2006. En euros constants, l’économie réalisée est de 100 M€ par an, ce qui représente une diminution de 65 % des coûts.

II L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES A L’AUDIOVISUEL PUBLIC »

A. LES RÉSULTATS 2006

Les tableaux ci-après permettent une comparaison en exécution des recettes du compte de concours financiers et de leur affectation entre 2005 et 2006.


Trois faits sont à relever :

1. Les encaissements bruts totaux reculent légèrement d’une année sur l’autre (-0,1%).

2. Les encaissements bruts de redevance audiovisuelle adossée à la taxe d’habitation (pour les particuliers) progressent de 1,85 % en 2006 par rapport à 2005 (soit + 36,4 M€), et s’établissent à 2 009,7 M€ en 2006, contre 1 973,3 M€ en 2005.

3. Si l’on prend en compte la diminution des frais d’assiette, de recouvrement et de trésorerie (41,4 M€ en 2006 contre 66,4 M€ en 2005), les encaissements nets progressent de 1 % en 2006 par rapport à 2005 (soit + 22,8 M€), et s’établissent à 2 215,4 M€ en 2006, contre 2 192,7 M€ en 2005. La signification de cette progression doit cependant être relativisée eu égard à l’incertitude qui s’attache au montant réel des frais d’assiette et de recouvrement.

Cette évolution fait suite à une exécution 2005, elle aussi légèrement inférieure aux prévisions budgétaires, dans un contexte rendu incertain par le changement de régime.

Les recouvrements bruts ont été en 2005 en hausse de 46,81 M€ par rapport aux encaissements bruts au titre de l’année 2004, soit + 2,1 %. Ce résultat est dû à deux paramètres principaux : les dégrèvements d’un plus grand nombre de contribuables, par l’alignement sur la taxe d’habitation et le maintien des droits acquis, et la limitation de la taxe à une seule redevance audiovisuelle par foyer. Cette hausse, qui valide la réforme sur le plan du rendement budgétaire, puisque celui-ci a augmenté, alors que le nombre de redevables diminuait sensiblement sous l’effet de ces deux facteurs, doit néanmoins être relativisée pour deux raisons :

− les bases d’imposition 2005 ont été modifiées par rapport à 2004 d’une façon qui rend toute comparaison entre ces deux années impossible, du fait notamment de la sortie en 2005 de la base taxable des redevances perçues antérieurement au titre des résidences secondaires et dont le nombre n’était pas connu des services de la redevance ; le progrès en termes de rendement est de ce fait impossible à mesurer avec exactitude ;

− 2005 constitue une année de transition caractérisée par le cumul, au titre des encaissements bruts de 2005, des perceptions de l’année civile sous le nouveau régime et de la perception d’un montant de 207 M€ au titre des « années antérieures », sensiblement supérieur aux restes à recouvrer annuels sous le nouveau régime, dont le taux de recouvrement est bien supérieur (cf. infra). Une part de cette somme qu’il n’est pas possible d’évaluer précisément19, correspond à un surcroît de recettes unique en 2005 lié à la transition entre les deux régimes. La déduction de ce « ressaut » conduirait à diminuer la hausse des encaissements bruts constatée en 2005 par rapport à 2004, et à constater une progression des encaissements bruts de l’ordre de + 1 % en 2005, au lieu de l’augmentation de 2 % qui ressort du tableau ci-dessus. A contrario, si l’on ne tenait pas compte de l’effet de ressaut, serait enregistrée une progression du même ordre des encaissements bruts sur 2006, au lieu de la légère diminution constatée en données brutes pour cette année.

Au total, on peut, compte tenu de ces incertitudes, recourir, comme le fait la direction du budget, à une comparaison 2004/2006 et relever que : « la réforme de la redevance audiovisuelle a permis de générer des recettes brutes en 2006 en hausse de près 45 M€ (à 2 256,8 M€) par rapport aux encaissements bruts réalisés au titre de l’année 2004 (2 212,0 M€), soit + 2 %, tout en permettant :

− d’exonérer un plus grand nombre de contribuables (alignement sur la taxe d’habitation et maintien des droits acquis) ;

− de diminuer le taux de redevance (116 € en 2006 contre 116,5 € en 2004) ;

− et de limiter la taxe à une seule redevance audiovisuelle par foyer, quel que soit le nombre de postes dont sont équipés le ou les locaux affectés à l’habitation occupés par le redevable et ses enfants rattachés à son foyer fiscal.

Par ailleurs, en adossant le recouvrement de la redevance audiovisuelle à la taxe d’habitation (un seul avis d’imposition pour les deux taxes), la réforme de la redevance audiovisuelle a permis de générer des gains de gestion importants. »

B. UN TAUX DE RECOUVREMENT EN HAUSSE

Le taux de recouvrement « courant »20 de la redevance augmente depuis la réforme.

Exercice

Taux de recouvrement en %

Restes à recouvrer, en M€

2002

2003

2004

2002

2003

2004

Courant

80,6

81,0

83,7

443,6

437,1

380,5

Précédent

63,1

64,3

63,8

118,7

128,0

126,3

Antérieurs

18,8

17,4

19,5

133,7

148,6

160,1

Total

ns

74,9

76,8

696,0

713,7

666,9

(Source : Données du service central de la redevance audiovisuelle)

Tableau : Recouvrement de la redevance audiovisuelle depuis 2005 sur la redevance des particuliers

Exercice

Taux de recouvrement en %

Restes à recouvrer, en M€

2005

2006

Prév 2007

2005

2006

Prév. 2007

Courant

91,5

91,4

NC

189,0

207,0 

NC

Précédent

-

75,1

NC

-

47,1 

NC

Antérieurs

-

-

 

-

-

NC

(Source : DGCP)

Si l’on considère, non pas le recouvrement « courant », mais celui de la redevance de l’exercice N recouvrée dans les années N et N+1, on constate la même augmentation.

Taux de recouvrement sur les particuliers, au 31.12.de l’année N + 1 (année suivant celle de l’émission) :

2002

2003

2004

2005

2006

94,5 %

94,2 %

94,3 %

-

98,0 %

(Source : DGCP)

On relèvera enfin que cette progression de 1 % par an des recettes de la redevance en 2005 et 2006 est inférieure à celle des dotations du compte de concours financiers aux entreprises de l’audiovisuel public (+ 2,7 % en 2005 par rapport à 2004, et + 2,2 % en 2006 par rapport à 2005).

Pas plus qu’en 2004, les recettes de la redevance n’ont permis en 2006 de couvrir l’augmentation des dotations prévues en leur faveur.

C. LES REMBOURSEMENTS DES EXONÉRATIONS ET DÉGRÈVEMENTS

La ligne « remboursement des exonérations et des dégrèvements » s’établit en exécution à 509 M€, soit 69 M€ de plus qu’en LFI 2006 (+ 15,7 %), soit et + 8,4 % par rapport à l’exécution 2005.

Ce dépassement est dû, non à l’augmentation en 2006 du montant des exonérations et dégrèvements, mais principalement à la moins-value par rapport aux prévisions d’encaissement de la redevance (65,1 M€), qui a entraîné l’intervention du mécanisme de garantie dans les conditions développées ci-après.

A cet égard, une mesure de clarification pourrait consister à compenser le décalage entre la connaissance des ressources et l’autorisation des dépenses qui, dans le cas de l’audiovisuel public, aboutit à conduire le débat parlementaire sur les dépenses de l’année n+1 dans l’ignorance des recettes de l’année n, le produit de la taxe d’habitation et de la redevance ne pouvant être estimé qu’en décembre. Ce décalage pourrait être atténué par une disposition prévoyant qu’en cas de moins-value des recettes de la redevance constatée en fin d’année n, le Parlement serait amené à se prononcer à nouveau sur le financement des organismes de l’audiovisuel public à l’occasion de l’examen de la première loi de finances rectificative de l’année n+1. Une telle disposition pourrait éviter que le décalage entre l’examen des recettes et des dépenses ainsi que le mécanisme de garantie ne tendent à faire du processus budgétaire, dans le domaine de l’audiovisuel public, un simple exercice d’alignement des recettes sur les dépenses.

Une autre mesure de clarification pourrait être d’intégrer dans la mission « Médias » le montant des dégrèvements de redevance, qui sont actuellement imputés au programme « Remboursement et dégrèvements d’impôts d’Etat ». Cela nécessiterait la constitution d’un nouveau programme, dans la mesure où ces crédits sont évaluatifs et où un même programme ne peut pas comporter à la fois des crédits limitatifs et des crédits évaluatifs.

D. LE MÉCANISME DE GARANTIE

Le dispositif de garantie de ressources aux organismes de l’audiovisuel public établi en 2005 a été renouvelé en LFI 2006, et en LFI 2007. Il conduit à ce que le plafond des dégrèvements pris en charge par le budget général (440 M€ en LFI 2006 et 509 M€ en LFI 2007, sur le programme « Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État ») soit majoré dans le cas où les encaissements de redevance seraient moins élevés que prévu. En fait, la progression observée de la redevance en 2005 et 2006, (+ 1 % par an), le maintien du taux de celle-ci à l’identique et la progression des budgets des sociétés de l’audiovisuel public (+ 2,5 % par an en moyenne depuis 2004), se conjuguent pour créer un besoin structurel et croissant de financement par le budget général, auquel la pérennisation de facto du mécanisme de garantie donnerait un caractère automatique.

La direction du budget observe à ce propos que « la progression attendue des ressources publiques des organismes de l’audiovisuel public, en 2007 (+ 2,6 % par rapport à 2006, soit + 68,4 M€ HT) et de leurs ressources propres (+ 5,4 % par rapport à 2006, soit + 46 M€ HT) ne justifie pas une compensation intégrale des dégrèvements. » De fait, tout en progressant régulièrement, les plafonds de remboursement des dégrèvements inscrits en loi de finances, comme le montant des remboursements en exécution, sont restés jusqu’à présent inférieurs au montant des dégrèvements de redevance : le nombre de ceux-ci, selon la DGI, a été en 2006 de 5 000 193 pour un montant total de 571 636 626 €, soit sensiblement plus que les plafonds de 444 M€ et de 509 M€ prévus respectivement en LFI 2006 et 2007. Ainsi, alors que les remboursements de dégrèvements étaient jusqu’en 2003 restés sensiblement en deçà du plafond prévu en LFI, ils l’ont dépassé en 2004, 2005 et 2006 respectivement de 10 M€, 29 M€ et 65 M€.

Si cette dynamique se poursuivait, le budget général pourrait avoir à l’horizon 2008/2009 à rembourser au compte de concours financiers un montant égal au montant effectif des dégrèvements, conformément à l’obligation prévue par la loi de 198621 sur la liberté de communication, et supérieur dans les années suivantes. L’écart a tendance à se creuser entre les ressources tirées de la redevance et l’évolution des dotations publiques aux organismes de l’audiovisuel public que les contrats d’objectifs et de moyens conclus en 2006-2007 avec ceux-ci confirment et accentuent.

III. LE PRODUIT DE LA REDEVANCE

L’année 2006 est la première où peuvent être appréciés les effets de la réforme de la redevance audiovisuelle. Celle-ci prévoyait le maintien, jusqu’en 2007 inclus, des « droits acquis », c’est-à-dire le principe de dégrèvements pour les personnes exonérées de redevance avant la réforme, mais non dégrevées de taxe d’habitation. Elle avait en outre maintenu inchangé le taux unitaire de la redevance, favorisant une légère progression de son produit, en partie grâce aux économies de gestion opérées. L’exécution 2007 devrait permettre de disposer du recul nécessaire pour appréhender au mieux la dynamique des effets liés à la réforme et affiner les hypothèses.

A. LA SUPPRESSION DES « DROITS ACQUIS »

La poursuite de l’alignement des conditions de dégrèvement de la redevance sur celles de la taxe d’habitation, que prévoit la réforme, doit normalement entraîner à partir de 2008 l’assujettissement à la redevance d’environ 700 000 personnes supplémentaires. Ces personnes en étaient exonérées avant 2005, tout en étant assujetties à la taxe d’habitation. Elles étaient au nombre de 1 million en 2005, et environ 880 000 en 2006. Il s'agit, pour 97 %, de personnes qui étaient au moment de la réforme, à la fois âgées de plus de 65 ans et non imposables à l'impôt sur le revenu : le vieillissement et la progression de leur revenu tendent à réduire numériquement cette population. Les 3 % restants correspondent à des personnes handicapées. L’évaluation de 700 000 pour 2007 repose sur une exploitation par la DGI, partielle à la date d’établissement du présent rapport, des déclarations d’impôt sur le revenu.

L’enjeu financier, en termes de ressources destinées au secteur de l’audiovisuel public, est d’environ 81 M€ (environ 700 000 personnes, selon la DGI, payant chacune 116 euros), soit 3,36 % du produit brut de la redevance. En outre, ces 81 M€ de ressources additionnelles n’auraient plus à être remboursés par le budget général au compte de concours financiers.

En cas de report de cet alignement s’ouvrirait plus rapidement que prévu la perspective d’un financement de l’audiovisuel public par le budget général pour un montant significatif, en complément des ressources de la redevance.
B. L’EVENTUALITÉ D’UNE AUGMENTATION DU TAUX UNITAIRE DE LA REDEVANCE

La question de l’évolution du taux a été débattue lors de la réforme : le taux de la redevance audiovisuelle ne devait pas augmenter à l’occasion de l’adossement du recouvrement à celui de la taxe d’habitation, notamment du fait des économies engendrées.

Ce taux a augmenté de 36 % de 1990 à 2002, soit une moyenne annuelle de 2,9 %. Il n’a pas été relevé depuis 2002. L’adossement à la taxe d’habitation a même conduit à un ajustement technique, à la baisse, de cinquante centimes, les logiciels de la DGI n’acceptant pas les centimes.

Le taux demeure, en 2006, de 116 € en France métropolitaine et de 74 € dans les départements d’outre-mer. Il est ainsi maintenu à un niveau à peine supérieur à la moitié de celui de plusieurs pays européens, dont l'Allemagne et la Grande-Bretagne, soit environ 190 euros dans ces deux pays.

L’absence de revalorisation régulière du taux de la redevance érode les ressources de l’audiovisuel public et pourrait faire peser un aléa à terme sur le système de financement par la redevance.

Evolution du taux de la redevance

 

Télévision noir et blanc

Télévision couleur

 

Montant
(en euros)

Évolution
(en %)

Montant
(en euros)

Évolution
(en %)

1990

54,12

+ 3,49

84,15

+ 3,56

1991

55,49

+ 2,5

86,29

+ 2,5

1992

56,86

+ 2,5

88,42

+ 2,5

1993

59,46

+ 4,5

92,38

+ 4,5

1994

61,74

+ 4

96,20

+ 4

1995

65,55

+ 6,2

102,14

+ 6,2

1996

68,45

+ 4,5

106,71

+ 4,5

1997

68,45

0

106,71

0

1998

71,80

+ 5

112,05

+ 5

1999

72,41

+ 1,2

113,42

+ 1,2

2000

73,02

+ 0,9

114,49

+ 0,9

2001

73,02

0

114,49

-

2002

74,31

+ 1,8

116,50

+ 1,8

2003

74,31

0

116,50

0

2004

116,50

0

116,50

0

2005

116

0

116

0

2006

116

0

116

0

Entre 1999 et 2007, soit sur une période de 8 années, le taux a augmenté de 2,27 %, soit 0,28 % par an en moyenne.

L’Allemagne et le Royaume-Uni ont un taux plus élevé et consacrent plus de ressources publiques (ramenées à un montant par habitant) au secteur de l’audiovisuel public que la France.

L’Espagne n’a plus de redevance audiovisuelle depuis 1965 mais consacre un montant significatif de ressources publiques au secteur de l’audiovisuel public, même s’il s’agit de raisons conjoncturelles.

Les données par pays sont les suivantes :

Pays

Montant annuel de la redevance (en €, en 2006)

Ressources publiques totales affectées au secteur audiovisuel public (en M€, en 2006)

Ressources publiques affectées au SAP par habitant (en €)

Part d'audience du secteur audiovisuel public (en 2005)

France

116,00

2 736

44,93

39 %

Allemagne

204,36

7 120

86,35

44 %

Royaume Uni

196,25

4 773

79,08

42 %

Italie

99,60

1 482

25,22

44 %

Espagne

-

2 825

64,04

38 %

Source : Direction du développement des médias

*

Par rapport à 2004, dernière année où l’ancien système de collecte de la redevance était en vigueur, le montant des encaissements bruts, qui s’est élevé en 2006 à 2 256,8 M€, est en progression de 45 M€, soit 2 %. Cette progression annuelle moyenne de 1 % du montant collecté depuis l’entrée en vigueur de la réforme, malgré la stabilité du taux, en confirme le bien-fondé. En effet, cette progression, en apparence modeste, correspond à une efficacité accrue de la perception de la redevance, qui vient plus que compenser la réduction du champ d’application opérée par la réforme. Cette réduction inclut environ un million de redevables exonérés de taxe d’habitation qui ont cessé à partir de 2005 d’être assujettis à la redevance, ainsi qu’un nombre indéterminé de redevables autrefois imposés à raison des téléviseurs détenus dans des résidences secondaires, alors que la redevance n’est plus due qu’une fois par foyer fiscal dans le nouveau régime.

Les contrats d’objectifs et de moyens signés récemment avec les principaux organismes bénéficiaires de la redevance (France Télévisions, Radio France et ARTE France) prévoient une augmentation annuelle de leurs budgets de 3 %, 2,5 % et 3,6 % respectivement sur leur durée d’exécution, avec une augmentation plus forte en début de période. L’exécution des COM en 2008 supposera ainsi une augmentation des dotations aux sociétés de l’audiovisuel public située entre 3,5 et 4 % en 2008.

La poursuite de l’alignement des conditions de dégrèvement de la redevance sur celles de la taxe d’habitation, que prévoit la réforme, doit normalement entraîner à partir de 2008 l’assujettissement à la redevance d’environ 700 000 personnes supplémentaires qui en étaient exonérées avant 2005, tout en étant assujetties à la taxe d’habitation. De cet alignement dépend la capacité de la réforme à générer un montant additionnel de ressources suffisant pour faire face en 2008 à cette augmentation.

Dans le cas contraire s’ouvrirait plus rapidement que prévu la perspective d’un financement de l’audiovisuel public par le budget général pour un montant significatif, en complément des ressources de la redevance. Cette perspective appellerait sans doute un examen approfondi des modalités de la redevance audiovisuelle.

CONCLUSION


1. L’organisation du recouvrement de la redevance a été incontestablement simplifiée, puisque ce dernier est désormais conjoint avec celui de la taxe d’habitation. Le service rendu à ceux qui s’acquittent de la redevance a été amélioré, car les centres des impôts et les trésoreries sont désormais compétents pour cet impôt, alors que seuls les 6 centres de la redevance l’étaient auparavant.

La réforme de la redevance a, en outre, été mise à profit pour mettre en place des structures nouvelles en relation directe avec l’usager, de nature à faciliter ses démarches relatives au règlement d’impôts ou d’amendes, en dehors de la redevance.

Pour l’usager de la redevance, la principale simplification résulte de la suppression de la distinction entre résidence principale et résidence secondaire. L’alignement des conditions de dégrèvement sur celles de la taxe d’habitation est également une simplification. Toutefois, le maintien à titre transitoire jusqu’au 31 décembre 2007, du régime des « droits acquis » par les personnes exonérées de redevance avant la réforme quoiqu’assujetties à la taxe d’habitation, constitue une source de complexité.

Du point de vue social, l’administration a été en mesure de concilier la modernisation recherchée du Trésor public avec les préférences géographiques de la très grande majorité des agents reclassés. Il y a lieu de relever toutefois que différents avantages ont été accordés aux agents alors que ceux-ci restaient pour la plupart non seulement dans la même direction, mais sur le même site.

2. En matière de lutte contre la fraude, les fraudeurs potentiels sont plus aisément identifiables avec l’institution de la « case à cocher» dans la déclaration de revenus a permis de mieux identifier les fraudeurs potentiels. Le dispositif de contrôle a été maintenu. Toutefois, la fraude elle-même n’a diminué que sous l’effet, principalement, de la réduction du nombre des redevables :

− l’abandon de toute taxation des récepteurs dans les résidences secondaires a mécaniquement réduit une source importante de fraude ;

− l’extension des dégrèvements et le maintien des « droits acquis » ont de facto réduit le nombre de redevables, et donc celui des fraudeurs potentiels.

3. Pour ce qui est du bilan financier d’ensemble, trois observations peuvent être formulées.

Le recouvrement de la redevance s’est amélioré. Par rapport à 2004, le montant des encaissements bruts, qui s’est élevé en 2006 à 2 256,8 M€, est en progression de 45 M€ sur deux ans, soit une hausse annuelle moyenne de 1 %. Cette hausse, quoique modeste, confirme le bien-fondé de la réforme.

La réforme a eu un coût. Le coût de la suppression du service de la redevance est estimé, en l’absence d’évaluation globale, à 8 M€, ce qui ne paraît pas disproportionné par rapport aux enjeux.

Enfin, des économies de gestion ont été réalisées. Il n’existe pas de comptabilité d’analyse du coût des actions permettant de retracer le coût complet de gestion de la redevance audiovisuelle. Le coût des services de contrôle de la redevance est estimé à 16 M€. De plus, le coût de gestion des contentieux est estimé à 23,5 M€ par an. Il s’y ajoute enfin des frais de trésorerie de 15 M€ par an. Si l’on compare ces coûts ainsi évalués à 54,5 M€ au coût de l’ancien service de la redevance, estimé en 1999 par l’inspection générale des finances à 136 M€, soit 155 M€ en euros de 2006, l’économie résultant de la réforme peut être évaluée à 100 M€ par an, soit près des deux tiers du coût de l’ancien service de la redevance.

4. En poursuivant l’alignement des conditions de dégrèvement sur celles de la taxe d’habitation, comme l’a prévu la réforme, environ 700 000 personnes supplémentaires, qui en étaient encore exonérées avant 2005, devraient désormais s’acquitter de la redevance. De cet alignement dépend la capacité de la réforme à mobiliser un montant additionnel de ressources suffisant pour faire face en 2008 à l’augmentation des dépenses des entreprises de l’audiovisuel public.

Si cet alignement n’y suffisait pas, le budget général de l’État pourrait être alors exposé au risque d’avoir à prendre en charge pour un montant accru le financement de l’audiovisuel public.

En toute hypothèse, l’évolution du produit de la redevance après la réforme met en lumière son insuffisance tendancielle, à croissance constante des dépenses de l’audiovisuel public.

1 () Voir les rapports généraux de M. Gilles Carrez sur les projets de loi de finances pour 2003, 2004 et 2005.

2 () Voir les rapports spéciaux pour les années 2003, 2004 et 2005, ainsi que le rapport d’information de M. Patrice Martin-Lalande, « Réformer la redevance, pour assurer le financement de l’audiovisuel public » (Doc. AN n° 1019, XIIè législature, 9 juillet 2003) : http://www.assemblee-nationale.fr/12/pdf/rap-info/i1019.pdf

3 () Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

4 () Loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004.

5 () À savoir : le nouveau mode de traitement des amendes, la gestion à distance du prélèvement automatique des impôts et les activités d’apurement administratif.

6 () L’absence de hausse du montant de la redevance s’observe même depuis 6 ans. En effet, le taux unitaire de la redevance n’a pas augmenté depuis 2002 et a même été diminué de 50 centimes d’euros lors de l’adossement à la taxe d’habitation… alors qu’il avait augmenté de 36 % entre 1990 et 2002.

7 () Rapport sur les résultats et la gestion budgétaire de l’exercice 2006 (mai 2007, pages 128 à 130) : http://www.ccomptes.fr/cc/documents/RRGB/Rapport-resultats-gestion-budgetaire.pdf

8 () Voir le rapport spécial 2008 de M. Patrice Martin-Lalande, « Médias – Avances à l’audiovisuel public » (Doc. AN n° 189, annexe n° 26, 11 octobre 2007, pages 26 à 33) : http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/budget/plf2008/b0276-a26.pdf

9 () Ces dégrèvements sont imputés sur le programme Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État de la mission Remboursements et dégrèvements.

10 () Voir le compte-rendu des débats de la première séance du vendredi 19 octobre 2007.

11 () Actuellement, la loi prévoit que la détention de tout moyen de recevoir la télévision oblige à payer la redevance. En fait, seuls les téléviseurs sont pris en compte.

12 Dans une lettre du 22 août 2007, en réponse au relevé d’observations provisoires de la Cour.

13 L’article 41 de cette loi a inséré, dans le livre des procédures fiscales, un article L.96 E prévoyant que les opérateurs de télévision payante sont tenus de fournir à l’administration, sur sa demande, « les éléments des contrats de certains de leurs clients strictement nécessaires à l’établissement de l’assiette de la redevance ».

14 Un « équivalent temps plein travaillé » (ETPT) correspond à 1 personne travaillant à temps plein pendant 1 an.

15 Selon l’article 21 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001, les comptes d’affectation spéciale « retracent (…) des opérations budgétaires de l’Etat financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en rapport direct avec les dépenses concernées. »

16 Ce chiffre anticipe la rétrocession à FR3 de 2 652 à Strasbourg, prévue pour la fin 2007.

17 Les dégrèvements étant, comme le montre ce tableau, le plus souvent accordés sous condition de ressources, on observe un mouvement très progressif de « sortie » du dispositif de dégrèvements pour les personnes dont la situation s’améliore, qui explique la baisse tendancielle du nombre de « droits acquis », comme cela est expliqué infra.

18 + 2,8 % l’an entre 2001 et 2004 toutes choses égales par ailleurs.

19 Dont un ordre de grandeur peut être évalué par différence entre les perceptions sur années antérieures en 2005 et les perceptions effectuées en 2006 au titre des restes à recouvrer sur 2005, soit 200-150= 50 M€

20 Le taux de recouvrement sur la redevance des particuliers sur exercice courant est égal au rapport entre le montant des recouvrements bruts sur la redevance adossée à la taxe d’habitation et le montant total figurant dans les rôles payants émis par la direction générale des impôts, net des dégrèvements contentieux et des remises gracieuses.

21 Art. 53, § V, de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.


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