N° 2826
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 29 septembre 2010
RAPPORT D’INFORMATION
DÉPOSÉ
en application de l’article 145 du Règlement
PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
sur le statut et la réglementation des habitats légers de loisirs
ET PRÉSENTÉ
PAR M. Jean-Louis LÉONARD ET Mme Pascale GOT
Députés.
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SOMMAIRE
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Pages
INTRODUCTION 9
I. — LA DIFFICILE APPRÉHENSION DU CONCEPT DE « CAMPING » : ENTRE RÉGLEMENTATION ÉCLATÉE ET PRATIQUES ÉVOLUTIVES 12
A. — ORIGINES ET DÉVELOPPEMENT DE LA NOTION DE « CAMPING » 12
1. Un peu d’histoire 12
2. La diversification des pratiques au sein des terrains aménagés 13
B. — UNE INSCRIPTION PROGRESSIVE DANS LA RÉGLEMENTATION 15
1. 1959 : le camping fait son entrée dans la réglementation 15
2. 1968-1980 : le traitement séparé de la réglementation des terrains et du statut des habitats 16
a) La réglementation des terrains aménagés 16
b) La question du stationnement des caravanes 17
c) Un nouveau modèle en gestation axé sur la sédentarisation 18
3. Un dispositif stabilisé, des pratiques qui continuent d’évoluer et des interrogations renouvelées (1984-2005) 19
a) La stabilisation du dispositif dans les années 1980 19
b) Le renouvellement des problématiques 19
c) La cristallisation autour de la question du mobile-home 20
C. — UNE RÉGLEMENTATION ÉCLATÉE FONDÉE SUR L’ARTICULATION ENTRE HABITATS LÉGERS ET TERRAINS AMÉNAGÉS 22
1. Trois catégories d’habitats légers de loisirs font l’objet d’une définition réglementaire 22
a) L’habitation légère de loisirs 23
b) La caravane 24
c) La résidence mobile de loisirs (mobile-home) 26
2. L’usage encadré du sol : du contrôle de l’aménagement des terrains à la régulation des conditions d’exploitation 29
a) Du camping libre au camping sur terrains aménagés 29
b) Les trois grandes catégories de terrains aménagés accueillant des habitats légers de loisirs 32
(i) les terrains aménagés de camping et de caravanage 32
(ii) les parcs résidentiels de loisirs (PRL) 33
(iii) les villages de vacances classés en hébergement léger 35
c) Le stationnement en dehors des périodes d’usage 35
3. L’articulation sol/habitat 37
D. — LA DIFFICILE APPRÉHENSION DES DIVERS MODES D’UTILISATION 39
1. Les terrains de camping en France aujourd’hui 39
a) Aperçus sur l’offre générale 39
b) La signification des différents modes d’occupation 43
2. Les différents ressorts de la sédentarisation des habitats légers… et de ceux qui les occupent 47
a) De la résidence légère de loisirs à la « simili résidence secondaire » 47
b) Hébergement de plein air et habitat précaire 48
c) Le cas particulier du camping sur parcelles privées 49
II. — DES ZONES D’OMBRE RÉGLEMENTAIRES QUI FAVORISENT LA DILUTION DES DROITS ET DEVOIRS DE CHACUN DES ACTEURS 50
A. — UN TRIPLE POINT DE VUE À PRENDRE EN CONSIDÉRATION 50
1. Les aspirations contradictoires de la clientèle et des usagers 50
a) Itinérance et sédentarité 50
b) Pratiques individuelles et effet de groupe 51
c) Un groupe social atomisé 52
2. L’adaptation de l’offre à la demande 52
a) Les gestionnaires de terrains privés 52
b) Les fabricants et distributeurs de véhicules de loisirs 53
3. L’intervention des pouvoirs publics 55
a) Le contrôle de la légalité des installations 55
b) Une fonction régulatrice en transition 56
c) La régulation du stationnement des camping-cars : une mission impossible ? 57
B. — PRÉVENIR LES DOMMAGES COLLATÉRAUX D’UN DÉVELOPPEMENT DÉSORDONNÉ ET D’UN USAGE INAPPROPRIÉ 60
1. La préservation des paysages et de l’environnement et la nécessaire maîtrise d’une urbanisation « rampante » 60
a) L’impact direct des habitats légers 60
b) L’insertion paysagère des terrains aménagés 61
2. Le refus de l’habitat léger de loisir comme habitat permanent 63
a) L’impossible contrôle efficace des « dérives » 63
b) L’habitat léger permanent en-dehors des terrains aménagés : entre itinérance et illégalité 64
(i) Le cas particulier de l’habitat des gens du voyage : quand habitat permanent rime avec mobilité 64
(ii) L’habitat permanent sur parcelles privées, entre sédentarisation et habitat précaire subi 64
c) L’habitat léger permanent au sein des terrains aménagés 65
C. — TROIS POINTS DE CRISPATION 66
1. Les relations contractuelles sur les terrains aménagés 66
a) Les données du problème 66
b) Deux logiques en présence 68
c) Un début de solution par la voie amiable ? 69
d) Un climat de défiance aux effets néfastes 71
2. Un risque à conjurer : la parcellisation des terrains de camping 72
a) Une mesure conservatoire pour dissuader la cession en pleine propriété 72
b) Les voies détournées de la parcellisation 73
3. Quelle fiscalité pour l’hébergement léger sédentarisé ? 75
a) Une fiscalité « économique » à prendre en considération 75
b) Une fiscalité à revoir en matière d’aménagement 76
c) Fiscalité d’habitation ou fiscalité d’occupation ? 77
d) Le lien foncier/habitat 78
III. — CONCILIER SOUPLESSE ET DÉVELOPPEMENT ORDONNÉ : 13 PROPOSITIONS POUR AMÉLIORER LE CADRE EXISTANT 79
A. — AMÉLIORER LA LISIBILITÉ DES RÈGLES GÉNÉRALES 79
1. Poursuivre l’harmonisation des dispositions du code du tourisme et du code de l’urbanisme 79
2. Lever les ambiguïtés autour de la question du classement des terrains aménagés 81
3. Préciser le régime d’implantation des mobile-homes dans les terrains de camping, selon leur mode d’exploitation 82
4. Un guide pratique pour expliquer la réglementation 82
B. — MIEUX RECENSER LES PRATIQUES D’OCCUPATION POUR MIEUX PRÉVENIR LES DÉRIVES QU’ELLES PEUVENT GÉNÉRER 83
1. Mieux définir la pratique du camping au sein des terrains de camping 83
2. Un régime de déclaration obligatoire des mobile-homes 84
3. Recenser l’habitat permanent dans les campings « précaires » 85
C. — MIEUX COORDONNER LE CONTRÔLE DE L’AMÉNAGEMENT ET CELUI DES PRATIQUES EFFECTIVES 86
1. Le contrôle au niveau des campeurs 86
2. Le contrôle au niveau des installations de camping 86
D. — RESPONSABILISER LES ACTEURS 87
1. Encadrer la relation contractuelle résultant de l’occupation résidentielle des emplacements de camping 87
2. Mieux informer les consommateurs lors de la vente de l’habitat léger 88
3. Une fiscalité adaptée à l’implantation pérenne et à l’occupation « résidentielle » 89
4. Le stationnement des camping-cars 90
RÉCAPITULATIF DES PROPOSITIONS DE LA MISSION 92
SYNTHÈSE OPÉRATIONNELLE POUR LE SUIVI DES PROPOSITIONS 94
EXAMEN EN COMMISSION 102
ANNEXE I – GLOSSAIRE DES TERMES EMPLOYÉS 109
ANNEXE II – LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA MISSION D’INFORMATION 112
- Mais si vous venez tous les ans, pourquoi vous achetez pas une petite maison ?
- Ben parce qu’après on sera obligé de venir ici tous les ans !
- Mais puisque ça fait 30 ans que vous venez ?
- Oui mais là si on veut, on peut aller ailleurs ! C’est ça le camping !
(Dialogue extrait du film Camping, de Fabien Onteniente)
MESDAMES, MESSIEURS,
Si l’on en croit Mme France Poulain, qui a consacré aux pratiques d’hébergement de plein air des travaux approfondis, « ce qui apparaît déterminant lorsque l’on évoque le camping aujourd’hui en France, c’est bien la force de son invisibilité en tant que pratique sociale » (1).
Cette invisibilité peut sembler paradoxale s’agissant d’une pratique qui concerne à ce jour plus de 8 millions de personnes chaque année, et qui constitue par là même un véritable pilier de l’offre française d’hébergement touristique. Au demeurant, ce secteur est l’un des rares dont la fréquentation n’a pas subi depuis deux ans le contrecoup des effets de la crise économique, avec un rythme de croissance de 5 %, pour atteindre les 103 millions de nuitées en 2009 (2).
Force est toutefois de constater la difficulté d’appréhender globalement ce phénomène foncièrement malléable, recouvrant des réalités évolutives et fort disparates.
Mouvement élitiste et spontané à ses débuts, le camping a connu une adhésion populaire rapide dès les années 1930, avec les premiers congés payés. Inscrivant son essor dans le cadre du double mouvement d’urbanisation et d’avènement de la société des loisirs, il a permis à des citadins de plus en plus nombreux d’accéder librement à des activités de plein air, en rompant momentanément avec le carcan des villes. Nomadisme, évasion, retour à la nature : ces postulats imprègnent jusqu’à ce jour un certain « esprit du camping », ou du moins l’idée traditionnelle qu’on peut s’en faire. Mais sont-ils encore pertinents pour caractériser les pratiques par lesquelles il prospère aujourd’hui ?
Au phénomène anarchique et dispersé des premiers campements « libres », s’est en effet progressivement substituée depuis 1959, date du premier décret sur le camping, une pratique encadrée, s’exerçant majoritairement en groupe sur des territoires délimités, eux-mêmes gérés au travers d’établissements dédiés à cette activité. Nonobstant les impératifs en matière de sécurité et de salubrité publiques qui l’ont prioritairement justifié, ce mouvement général de « domestication » du camping et des campeurs a été confortée par le déploiement d’habitats de plus en plus sophistiqués, le cas échéant de moins en moins mobiles…
Miroir de la société française « en termes d’évolution sociale mais également en termes de plasticité et de réceptivité par rapport aux évolutions technologiques » (3), le camping a connu et continue donc de connaître d’importantes mutations : de nouvelles pratiques sont venues se superposer aux anciennes, les éclipsant parfois, sans pour autant faire disparaître ces dernières.
Il est légitime, dans ces conditions, de s’interroger sur la façon dont la réglementation a tenu compte de ces évolutions. Celle-ci n’est certes pas inexistante mais elle est souvent mal comprise du fait d’un éclatement qui la prive de lisibilité. Il semble en outre exister depuis cinquante ans une sorte de décalage permanent entre les nouvelles pratiques de camping et leur encadrement réglementaire a posteriori, dès lors que la loi du nombre conduit les pouvoirs publics à vouloir les canaliser. Ce sont en fait les vogues successives des différents types d’habitat léger (tentes, caravanes, mobile-homes, camping-cars) qui ont amené à s’interroger sur les moyens permettant d’assurer leur déploiement dans des conditions acceptables par tous et non préjudiciables à l’intérêt public.
Il n’est ainsi guère étonnant que le débat semble aujourd’hui se focaliser sur le statut des mobile-homes et sur les conditions d’accueil des camping-cars : s’agissant des premiers, les interrogations portent principalement sur la pertinence d’un statut récent – il date de 2007 seulement – qui les fait osciller entre une mobilité de jure et une sédentarité de facto, avec des conséquences multiples du point de vue de l’économie touristique ; s’agissant des seconds, les inquiétudes proviennent essentiellement de la difficulté de faire face, dans certaines communes touristiques, à leur afflux massif durant certaines périodes de l’année.
La discussion de la loi de développement et de modernisation des services touristiques, adoptée en juillet 2009, a permis d’évoquer directement ces sujets au travers de plusieurs amendements déposés lors de son examen en commission des affaires économiques. C’est à cette occasion que le Président Patrick Ollier a opportunément proposé la création d’une mission chargée de faire le point sur le statut et la réglementation applicables à l’ensemble de l’hébergement de loisir de plein air, c’est-à-dire en premier lieu aux habitats légers de loisirs eux-mêmes, mais également aux conditions dans lesquelles cette activité se développe.
Dresser préalablement un panorama de ce secteur complexe s’est avéré d’autant plus nécessaire que sa réglementation générale se situe en fait au croisement de trois logiques complémentaires : tout d’abord, une logique de police, historiquement la première mise en œuvre, qui permet de garantir la sécurité des campeurs et le respect du droit de propriété ; ensuite, une logique économique, qui correspond à l’encadrement de l’activité des terrains pour le campement de plein air ; enfin, une logique urbanistique rendue nécessaire pour l’aménagement de terrains spécifiques et pour l’articulation du droit applicable aux sols avec celui applicables aux différents types d’habitats légers. Ce n’est que par l’appréhension simultanée de ces trois logiques qu’il est possible de mieux cerner le camping et ses pratiques.
À partir du recueil des points de vue de l’ensemble des acteurs du secteur « plein air » : pouvoir publics, exploitants de terrains, constructeurs et distributeurs d’habitats légers, touristes et usagers, et au travers de leurs points de vue parfois contradictoires, sont apparues en filigrane les trois approches qui ont servi de base aux travaux de la mission :
- le besoin d’une meilleure lisibilité globale du cadre réglementaire et d’une clarification de notions qui peuvent parfois prêter à confusion ;
- la nécessité de mieux recenser les différentes pratiques par un contrôle plus efficace du déploiement des différents types d’habitat et de leur destination effective ;
- un impératif de limiter des dérives de divers ordres au sein des terrains de camping.
A ce stade, il est important de rappeler que la pratique communément admise du camping en France s’entend exclusivement comme une pratique saisonnière ou temporaire, à usage touristique ou de loisir. Bien sûr, cela ne dispense pas de s’interroger sur les détournements auxquels cette pratique générique donne lieu (développement de l’habitat permanent, « cabanisation », parcellisation des terrains, etc.) mais cela amène aussi à ne pas traiter certains sujets voisins dès lors que la réglementation qui leur est applicable n’est pas celle d’une pratique supposée touristique à la base : on pense bien évidemment à l’habitat permanent et aux conditions d’accueil des gens du voyage.
Au total, les habitats légers de loisirs se caractérisent essentiellement par la souplesse de leur déploiement ainsi que par une extraordinaire plasticité, entendue comme capacité d’adaptation des pratiques aux aspirations de leurs usagers. C’est une force dans le sens où ces caractéristiques ont longtemps favorisé un développement dynamique et ont pleinement contribué à l’attractivité touristique du territoire français. Il ne faudrait pas que cela devienne une faiblesse dès lors que des zones d’ombres réglementaires et des contentieux croissants aboutiraient à la dilution des droits et devoirs de chacun et à des dérives préjudiciables à tous.
I. — LA DIFFICILE APPRÉHENSION DU CONCEPT DE « CAMPING » : ENTRE RÉGLEMENTATION ÉCLATÉE ET PRATIQUES ÉVOLUTIVES
A. — ORIGINES ET DÉVELOPPEMENT DE LA NOTION DE « CAMPING »
Le premier écrit français sur le camping remonte à 1898 : un célèbre voyageur de l’époque, Lucien Baudry de Saunier, fait alors paraître dans la revue du Touring Club de France un article sur un voyage en Angleterre qu’il vient d’effectuer et au cours duquel il a rencontré d’importants propriétaires fonciers utilisant des roulottes pour parcourir leurs terres à dessein de loisir.
Contrairement à l’idée reçue, le terme utilisé – on hésite dans un premier temps entre campisme et camping – n’est pas exclusivement d’origine anglaise mais recycle également une expression française du XIXe siècle, « faire campos », qui désignait la pause estivale permettant aux enfants scolarisés des campagnes de participer aux moissons.
Le développement du phénomène dans les années qui précèdent la première guerre mondiale est plutôt élitiste : ceux qui y participent sont généralement issus de catégories sociales aisées, quand bien même la pratique s’avère plutôt rudimentaire ; il touche des populations jeunes et majoritairement masculines et trouve un écho dans l’apparition concomitante des mouvements « scout » et associatif (4).
Il s’agit de s’échapper des villes et de retourner à la nature pour y vivre sous une forme communautaire rustique prenant le contre-pied du mode de vie moderne. Aussi bien cette pratique dite de « bivouac », souvent liée à la randonnée, suppose-t-elle le recours à un habitat léger, facile à déployer, replier et transporter.
Très tôt forgé sur le mode de l’observation empirique, le concept de camping est cependant amené à évoluer dans ses formes tout au long du 20ème siècle, au fur et à mesure du développement de nouvelles pratiques, qui s’opère par phases successives (5).
Après la première guerre mondiale, le camping trouve rapidement des prolongements dans un mouvement associatif puissant et organisé : des grandes organisations, comme le Touring Club de France ou le Groupement des Campeurs Universitaires amplifient leur action, publient des livres où elles recensent les lieux de séjour pour les campeurs, puis achètent et réalisent des aires de repos. Comme on l’a déjà noté, le scoutisme participe également de cette dynamique. La toile de tente constitue alors l’habitat léger par excellence et conservera cette prééminence jusqu’à la popularisation de la caravane, à partir des années 1960.
Le camping acquiert une première forme de popularisation au cours des années trente, avec la généralisation des congés payés, même si son impact demeure limité. La modestie des équipements et le faible développement des modes de transports individuels contribuent à préserver sa dimension de proximité par rapport aux lieux d’habitation. Au reste, si la pratique se féminise alors, elle ne concerne encore que faiblement les familles sans enfants.
Fait significatif de l’ampleur prise par le phénomène, la Fédération française de camping-caravaning (F.F.C.C.) est constituée en 1938 et s’attelle dès l’année suivante, en concertation avec les pouvoirs publics, à l’élaboration d’un code du camping. Celui-ci devait être présenté devant les chambres mais ne verra jamais le jour du fait du déclenchement de la guerre.
Ce n’est qu’avec la période des « Trente Glorieuses » que le camping entre véritablement dans une phase de pratique de masse. Les espaces du littoral sont alors pris d’assaut par les familles – phénomène à mettre en rapport avec la progression de la diffusion de l’automobile à cette époque – et le camping « libre », perçu de plus en plus comme « sauvage », devient de moins en moins toléré : il en résulte une première réglementation à son sujet en 1959, complétée en 1968.
Portées par la dynamique populaire et par l’arrivée de touristes européens, les années 1970 et 1980 peuvent être considérées comme l’âge d’or du « camping-caravaning » : afin de répondre à une forte demande, de nombreux terrains spécialement aménagés en vue d’une exploitation touristique (souvent à l’origine des anciennes terres agricoles gérées dans un cadre familial) sont alors créés. Parallèlement à ce mouvement de résorption du camping « sauvage », on observe cependant le développement d’une autre forme de camping sur parcelles privées, en dehors des structures collectives évoquées.
À partir du milieu des années 1980, s’engage enfin une course aux équipements de loisirs au sein des terrains aménagés (piscines, bars, restaurants, activités diverses), traduisant l’aspiration au confort des campeurs, tandis que la popularisation de nouveaux types d’hébergement, succès aidant, amène à reconsidérer les questions d’itinérance (camping-car) et de sédentarité (mobile-home).
2. La diversification des pratiques au sein des terrains aménagés
Sur une période d’un demi-siècle environ, une politique active a été menée afin que l’offre de terrains disponibles soit en mesure de satisfaire une demande en pleine expansion, de plus d’un million de campeurs français supplémentaires tous les dix ans (6).
Ce développement se traduit dans le nombre de terrains et d’emplacements créés, au sein desquels s’opère une diversification de plus en plus importante des pratiques.
D’une part, la gestion des « terrains aménagés » devient une véritable activité à plein temps, de type hôtelier (de la simple mise à disposition d’un emplacement nu à celle d’un emplacement locatif), à laquelle se greffent le cas échéant des prestations organisées de loisirs : la nature des activités et du confort offert aux usagers se décline ainsi dans des gammes qualitatives de plus en plus variées.
Le développement des terrains et emplacements de camping en France (1937-1995)
Année |
1937 |
1956 |
1965 |
1975 |
1985 |
1995 |
Terrains recensés |
1 200 points de camping |
Entre 2 000 et 2 500 |
3 085 |
5 279 |
7 996 |
8 539 |
Nombre d’em-placements |
- |
- |
165 000 |
470 000 |
789 000 |
930 719 |
Source : François Perroy, Le camping (PUF). Seuls sont pris en compte les « terrains aménagés » après 1968.
D’autre part, des habitats légers de plus en plus sophistiqués sont mis sur le marché, dont le succès atteste de leur capacité à répondre aux aspirations des usagers. La petite caravane non équipée prend des dimensions de plus en plus imposantes, avant que le mobile-home n’émerge comme une sorte de prolongement naturel – les premiers modèles qui apparaissent à la fin des années 1970 sont de ce point de vue assez emblématiques – mais de moins en moins mobiles. C’est au camping-car qu’il revient d’offrir, à partir des années 1980, le surcroît de mobilité que ne permettent plus ces nouveaux équipements. Il est ce faisant remarquable que tous ces types d’habitats continuent de perdurer, en épousant les innovations techniques du moment, et en cohabitant plus ou moins harmonieusement les uns avec les autres.
Diversification des terrains, diversification des habitats, diversification des campeurs : avant d’examiner plus en détail les effets concrets de ces différentes combinaisons, les lignes de force qu’il est possible d’en dégager et les interrogations que certaines évolutions peuvent susciter, il importe de rappeler comment les pouvoirs publics ont accompagné le développement de cette activité.
B. — UNE INSCRIPTION PROGRESSIVE DANS LA RÉGLEMENTATION
1. 1959 : le camping fait son entrée dans la réglementation
Dans les années 1950, la pratique du camping passe de quelques centaines de milliers à plusieurs millions de pratiquants et la diffusion de l’automobile permet l’arrivée des premières caravanes. Dans ces conditions, le camping « sauvage », notamment dans les milieux sensibles (littoral, forêts) devient de moins en moins tolérable. Des arrêtés municipaux et préfectoraux édictent certes des mesures d’interdiction, sur la base de considérations de sécurité et de salubrité publiques, mais la loi du nombre ne permet pas de tarir les installations anarchiques de campeurs.
Jusqu’en 1959, il n’existe pas de réglementation et la pratique se décline donc en camping « libre », sur des terrains qui n’appartiennent pas aux usagers et dont la jouissance est, selon les cas, autorisée ou pas, et en camping « collectif », sur des terrains aménagés à cet effet, faisant l’objet d’une exploitation commerciale ou associative mais sans support réglementaire spécifique. Le camping se trouve ainsi soumis pour son exercice à la discrétion d’une réglementation locale au « coup par coup ».
Le décret n°59-275 du 7 février 1959 relatif au camping procède tout d’abord à une définition de la pratique comme activité d'intérêt général librement pratiquée, avec l'accord de celui qui a la jouissance du sol, sous réserve, le cas échéant, de l'opposition du propriétaire. Le décret prohibe également et strictement cette pratique dans certaines zones délimitées (emprise des routes, places publiques, voisinages des points d’eau captée pour la consommation, à proximité des monuments historiques et de certains sites protégés) et ouvre la voie à des mesures d’interdiction circonstanciées.
La possibilité est donc expressément accordée aux maires d’interdire le camping, par arrêtés de police motivés par l’ordre public, mais la qualification de cette pratique comme activité d’intérêt général pose des limites à l’interdiction, qui ne peut être générale ni absolue et doit, en tout état de cause, être signalée pour pouvoir être opposée aux campeurs.
En pratique, il s’agit surtout de soumettre cette pratique à des conditions particulières : elle ne peut être interdite de manière temporaire ou permanente que si elle porte manifestement atteinte au maintien de l’ordre et à la protection de la salubrité publique. On voit également poindre en arrière-plan, dans le champ des dispositions réglementaires susceptibles de justifier l’interdiction, des considérations relatives à l’atteinte aux paysages naturels ou urbains, à la conservation des perspectives monumentales, à l’exercice des activités agricoles et forestières, à la conservation des milieux naturels, de la faune et de la flore.
Sur ces bases, apparaissent au niveau local les premières mesures visant à limiter les possibilités d’installation hors des terrains spécifiquement dédiés au camping : le mouvement général est un mouvement de résorption du camping sauvage, mal vu par les pouvoirs publics, qui sont par ailleurs encouragés à créer des « campings municipaux », sur le fondement reconnu de l’intérêt général.
Cette politique de résorption amène parallèlement certains campeurs à faire l’acquisition de parcelles privées dont ils peuvent jouir librement, en dehors de toute réglementation spécifique des terrains habilités à accueillir des habitats légers.
Garantie par la loi, la liberté de pratique du camping demeure la règle et sa limitation l'exception. Le décret ne fait toutefois que poser des jalons et renvoie à des textes d’application ultérieurs, s’agissant de la réglementation des terrains.
2. 1968-1980 : le traitement séparé de la réglementation des terrains et du statut des habitats
Il faut dater du tournant des années 1960/1970 le plein essor des terrains de camping aménagés. Une double action réglementaire s’opère alors en direction des terrains aménagés et du stationnement des véhicules de loisirs (essentiellement la caravane) par deux décrets de 1968 et de 1972, qui visent à limiter les possibilités offertes en dehors des terrains de camping.
De nombreux propriétaires privés accueillent en effet des campeurs sans avoir forcément l’infrastructure adéquate pour cela, en l’absence d’un régime d’autorisation spécifique : outre les risques de sécurité et de salubrité, ces propriétaires font au demeurant concurrence à des terrains commerciaux dont les pouvoirs publics souhaitent encourager le développement tout en l’encadrant.
a) La réglementation des terrains aménagés
Annoncée par le décret de 1959, la réglementation des terrains aménagés est concrétisée par le décret n°68-134 du 9 février 1968, qui impose une déclaration préalable pour toute personne mettant à la disposition de campeurs un terrain non soumis à autorisation du fait de sa capacité (vingt personnes maximum et six habitats légers déployés).
Ce même décret prévoit un classement des terrains de camping (par arrêté préfectoral), qui conditionne leur autorisation d’ouverture et qui fixe leur catégorie (de 1 à 4 étoiles) selon leur niveau d’équipement.
La réglementation de ces terrains porte à la fois sur leur aménagement, sur leur mode d’exploitation et sur la qualité des prestations qu’ils offrent. Ces trois logiques sont étroitement liées dès lors que le classement prévu pour ces terrains est obligatoire de facto, permettant un contrôle global par les pouvoirs publics des différents aspects de l’activité.
Ce dispositif laisse cependant la porte ouverte à une occupation familiale des terrains privés, en l’absence d’une réglementation relative à l’implantation des différents types d’habitats légers.
b) La question du stationnement des caravanes
Les pouvoirs publics manifestent au début des années 1970 une préoccupation particulière en ce qui concerne l’usage d’un habitat léger dont la diffusion a explosé au cours de la décennie précédente : la caravane.
La production des caravanes en France entre 1956 et 1965
Année |
1956 |
1959 |
1960 |
1962 |
1963 |
1964 |
1965 |
Caravanes produites |
3 000 |
6 000 |
9 000 |
12 000 |
15 000 |
25 000 |
30 000 |
Source : Les Cahiers Français, Vacances itinérantes, n°112, juillet 1966 (cité dans François Perroy, op.cit.)
Le mouvement s’amplifie dans la décennie 1970, comme l’atteste le nombre d’immatriculations alors recensées : 55 000 en 1970, 68 620 en 1972, plus de 89 000 en 1979 ! Ce sont au final plus de 800 000 caravanes qui seront mises sur le marché en France en trois décennies.
Le décret n°72-37 du 11 janvier 1972, relatif au stationnement des caravanes, révélateur de la volonté de traiter de manière ciblée les conséquences engendrées par la popularisation de ce type d’habitat léger, prévoit de soumettre à autorisation le stationnement des caravanes pendant une durée supérieure à trois mois (consécutifs ou non) et institue une réglementation spécifique relative à l’ouverture de terrains aménagés pour le stationnement exclusif des caravanes. On prend alors conscience de l’apparition d’un phénomène de sédentarisation anarchique desdites caravanes, mais également d’autres habitats légers de loisirs dits « solides », tant dans les zones à haute fréquentation touristique qu’aux abords des grandes villes, qu’il convient de limiter en imposant une demande de permis de construire.
Une circulaire n°72-186 du 20 octobre 1972 précise alors que l’implantation des constructions et abris démontables ou transportables, ayant pour vocation d’être fixés ou posés au sol, telles les constructions édifiées par éléments préfabriqués ou modules, ainsi que les maisons mobiles, les bungalows et les chalets démontables, doit être autorisée par un permis de construire. De surcroît, toute caravane perdant ses moyens de mobilité doit être assimilée à ces constructions sans fondations.
On voit bien se dégager, à travers ces nouvelles mesures ou interprétations réglementaires, une problématique spécifique ayant trait au statut de l’habitat léger, pour partie détachée de la réglementation de l’usage du sol, selon son degré de mobilité. Le dispositif général demeure cependant lacunaire, ou du moins confus, dès lors que le lien établi entre le sol et l’habitat n’est pas plus clairement défini à travers la nature de la pratique. Il est ainsi significatif que le décret de 1972 porte sur le stationnement de l’ensemble du parc caravanier et qu’il intègre donc également la problématique des gens du voyage.
Les terrains aménagés pour le stationnement des caravanes sont ainsi, soit des terrains de camping, soit des terrains aménagés exclusivement pour le stationnement des caravanes, sans que soit vraiment explicité l’usage de ce type de véhicule, qui relève soit d’une pratique saisonnière soit d’une pratique d’habitat permanent, quand bien même dans les deux cas doit prévaloir le principe de mobilité.
c) Un nouveau modèle en gestation axé sur la sédentarisation
Le décret n°80-694 du 4 septembre 1980 relatif au camping, au stationnement des caravanes et à l’implantation d’habitations légères de loisirs, s’inscrit dans la continuité de cette réflexion sur l’articulation du statut des terrains, du statut des habitats et de la réglementation des différents types d’usage.
En l’espèce, la création des parcs résidentiels de loisirs apparaît comme une solution aux problèmes posés par la sédentarisation des habitats légers dont la mobilité ne va plus forcément de soi. Cette étape mérite d’être soulignée, non pas tant du fait de l’ampleur prise par le dispositif nouvellement créé (le nombre de parcs résidentiels de loisirs reste encore à ce jour plutôt faible) mais bien parce qu’elle traduit la prise en considération d’une nouvelle forme de camping.
Au-delà des caractéristiques extérieures identiques des différents types d’habitat léger, transparaît en effet un début de distinction entre une pratique dite touristique et une pratique de loisirs : la première demeure essentiellement du ressort des terrains de camping et recouvre les caractéristiques du camping traditionnel (occupation d’un emplacement à la nuitée, tout au plus au mois, avec repliement de l’installation) tandis que la seconde se veut davantage résidentielle, tout en étant supposée demeurer saisonnière.
L’adhésion d’une clientèle de plus en plus nombreuse à un habitat léger moins mobile – étant de fait moins facilement transportable – et plus confortable, se confirme à la fin des années 1970, lorsqu’on voit apparaître en France les premiers « bungalows » en provenance du Royaume-Uni. Un nouveau mode d’hébergement de plein air se développe en se calquant sur le modèle du camping saisonnier, tout en s’apparentant dans les faits à une forme d’habitat secondaire à vocation temporaire.
La définition réglementaire des habitations légères de loisirs et la volonté de rediriger celles-ci vers des terrains aménagés spécifiques s’explique d’abord par le souci de ne pas sanctuariser l’offre touristique des terrains traditionnels. Ce faisant, ce train de mesures offre aussi une solution de repli aux campeurs qui avaient été, en quelque sorte, les précurseurs du modèle résidentiel, à partir des parcelles privées.
3. Un dispositif stabilisé, des pratiques qui continuent d’évoluer et des interrogations renouvelées (1984-2005)
a) La stabilisation du dispositif dans les années 1980
Le décret n°84-227 du 29 mars 1984 modifiant le code de l’urbanisme et relatif au camping et au stationnement des caravanes introduit la réglementation relative au camping au sein du code de l’urbanisme, s’agissant à la fois de l’aménagement des terrains et du statut des habitats.
Le décret supprime la distinction de 1972 entre les terrains de camping « généralistes » et les terrains « 100% caravanes » et interdit les terrains de camping comme lieu de résidence principale. Il précise aussi les conditions de décentralisation des compétences en matière d’urbanisme afin de tenir compte de la mise en application de la loi du 7 janvier 1983 portant sur la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État.
En revanche, le classement des terrains et la possibilité d’augmenter le seuil de capacité (régime de l’autorisation d’aménager) restent de la compétence des services déconcentrés de l’État. Les tableaux de classement élaborés en 1968 sont revus en 1984 afin de tenir compte de sensibles améliorations qualitatives.
La distinction entre terrains camping classés « tourisme » et terrains de camping classés « loisirs » est introduite par un arrêté du 11 janvier 1993 portant également réforme du classement de ces terrains.
b) Le renouvellement des problématiques
À la fin des années 1980, le ministère de l’Équipement met en place un groupe de travail consacré à l’« hébergement de plein air » qui s’attache à traiter principalement des problèmes posés par l’évolution des habitats légers de loisirs dans les structures collectives, et qui travaille parallèlement sur le stationnement des caravanes en dehors des terrains aménagés.
L’époque voit en effet poindre de nombreux contentieux à ce sujet, s’agissant des implantations dans les sites sensibles – on se souvient notamment de l’affaire des caravanes de l’Île de Ré. Des contentieux d’un autre type surgissent au sein même des terrains aménagés : en 1984, la commission des clauses abusives (CCA), rattachée à la direction générale de concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), a émis sa première recommandation concernant des contrats d’hôtellerie de plein air, symptôme d’une relation distendue entre les gestionnaires des terrains de camping et une clientèle de plus en plus exigeante.
Les travaux de ce groupe portent donc sur l’évolution des différents aspects de la pratique (sédentarisation de l’habitat, désir d’une partie des campeurs de pouvoir disposer à l’année d’une résidence légère mais fixe). Il s’agit de dresser, le cas échéant, de nouvelles limites d’aménagement pour les structures collectives. Plusieurs études sont aussi réalisées à propos des régularisations d’installations illicites, en vue de donner aux élus les moyens de résorber les infractions constatées.
En tout état de cause, ces travaux et les préconisations auxquels ils donnent lieu (considérer les habitats légers de loisirs comme de réelles constructions à usage d’hébergement, fiscalisation des habitats secondaires y compris au sein des structures collectives) demeurent sans suite.
Il faut attendre le double mouvement engagé en 2005 de codification du droit du tourisme et de réforme des autorisations d’urbanisme pour voir apparaître un début de réponse tangible à ces questions, et en particulier à l’une d’entre elles : l’absence de statut spécifique du mobile-home.
c) La cristallisation autour de la question du mobile-home
Sorte de « chalet monté sur roues », le mobile-home ne fait l’objet d’aucune définition réglementaire. Placé à mi-chemin, en termes de mobilité, entre la caravane et l’habitation légère de loisir, il se rapproche de l’une sur le plan formel (c’est un véhicule tractable) et de l’autre sur le plan pratique (ce véhicule est interdit de circulation par le code de la route, hors autorisation de transport exceptionnel). Il pose ce faisant un vrai problème de classification que ne résout pas la circulaire n° 88-28 du 29 février 1988 relative aux résidences mobiles en considérant que le mobile-home doit être assimilé à une caravane dès lors qu’il conserve ses moyens de mobilité. Ce critère de distinction restera le seul durant près de vingt ans et alimentera une nombreuse jurisprudence (7).
Or, un tel critère ne peut suffire à offrir une définition satisfaisante : non seulement le constat de la perte de mobilité s’avère difficile à établir, mais il peut être assez aisément contourné. Rendant compte d’une réalité ponctuelle, il ne permet pas d’appréhender l’usage effectif de ce type de « véhicule » souvent immobilisé dans le terrain qui l’accueille.
Là encore, des contentieux se développent tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des terrains aménagés et c’est seulement en 2007 qu’une définition est inscrite dans le code de l’urbanisme.
Jusque récemment, bon nombre de contentieux en instance ont du reste continué de porter sur la période antérieure à 2007, ce qui permet d’expliquer la persistance d’un sentiment général de problème en suspens, quand bien même il a été – du moins en partie – résolu.
L’histoire de la réglementation du camping en bref…
Entre 1959 et 1984, s’est imposée progressivement une réglementation qui accompagne le développement du camping comme activité économique, sans constituer un frein à sa pratique du point de vue des usagers. Les nouveaux textes confirment en général les précédents tout en y apportant des précisions.
L’aménagement des terrains est soumis aux obligations du droit de l’urbanisme ainsi qu’à certaines obligations qualitatives et commerciales, par le biais du classement. D’autres textes que ceux mentionnés, ayant une portée plus générale, ont également une influence indirecte mais réelle sur la pratique du camping (la loi "Paysage" par exemple ou encore, plus récemment, l’application des Plans de Prévention de Risques). On ne saurait dire que la réglementation est figée mais plutôt qu’elle évolue au terme d’un processus cumulatif, que ne concerne parfois le camping qu’à la marge.
Durant cette période, s’affirment plusieurs principes importants :
- la pratique du camping demeure une activité libre, sous réserve de dispositions qui sont principalement d’ordre public,
- au fur et à mesure de leur définition, les habitats légers de loisirs voient leur implantation principalement dirigée vers les terrains aménagés faisant l’objet d’une exploitation touristique ou de loisir,
- les terrains de camping n’ont pas vocation à accueillir des habitats légers constituant l’habitat permanent de ceux qui les occupent.
Si les pouvoirs publics ont progressivement tenu compte de l’évolution des pratiques, il est remarquable que le camping ait fait l’objet moins d’une réglementation globale que de réglementations ciblées, visant à limiter des abus (et souffrant parfois d’un certain manque de perspective d’ensemble) ; d’où le décalage qui existe parfois entre l’apparition de certaines pratiques et leur traduction réglementaire.
Rappel des principales étapes réglementaires (1959 - 1993)
- Décret n°59-275 du 7 février 1959 relatif au camping,
- Décret n°68-134 du 9 février 1968 pris en application du décret n°59-275 du 7 février 1959 relatif au camping, modifié par le décret n°68-133 du 9 février 1968,
- Décret n°72-37 du 11 janvier 1972 relatif au stationnement des caravanes,
- Décret n°80-694 du 4 septembre 1980 relatif au camping, au stationnement des caravanes et à l’implantation d’habitations légères de loisirs,
- Décret n°84-227 du 29 mars 1984 modifiant le code de l’urbanisme et relatif au camping et au stationnement des caravanes,
- Circulaire n° 88-28 du 29 février 1988 relative aux résidences mobiles,
- Décret du 11 janvier 1993 Décret n° 93-39 du 11 janvier 1993 modifiant le décret n° 68-134 du 9 février 1968 modifié pris en application du décret n° 59-275 du 7 février 1959 modifié relatif au camping
C. — UNE RÉGLEMENTATION ÉCLATÉE FONDÉE SUR L’ARTICULATION ENTRE HABITATS LÉGERS ET TERRAINS AMÉNAGÉS
Deux processus législatifs distincts ont contribué, au cours des dernières années, à modifier la perception du droit du camping : d’une part, la codification du droit du tourisme, entreprise à droit constant, a permis de regrouper en son sein, en 2005, l’ensemble des dispositions relatives aux équipements et aménagements touristiques, et donc à l’hébergement léger de plein air ; d’autre part, l’importante réforme du permis de construire et des autorisations d’urbanisme de 2005 a permis d’opérer une redéfinition des habitats légers de loisirs et de leur régime d’installation, par l’adoption des dispositions d’ordre réglementaire prises en 2007 pour son application.
Au surplus, la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques a procédé à une importante réforme des procédures de classement des différents types d’hébergement touristique, notamment des terrains de camping et autres terrains aménagés pour l’accueil des habitats légers de loisirs.
Eu égard à l’ampleur des changements intervenus, de forme et de fond, il n’est guère étonnant que se soit manifesté un sentiment général de « flou réglementaire », qui est le propre des périodes de transition. Il est donc indispensable de faire ici un point général sur l’état de la réglementation en vigueur.
1. Trois catégories d’habitats légers de loisirs font l’objet d’une définition réglementaire
Le statut des différentes catégories d’habitats légers de loisirs est d’ordre réglementaire.
Conformément à l’article L. 443-4 du code de l’urbanisme, créé par l’ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005, « les conditions dans lesquelles peuvent êtres installées ou implantées des caravanes, résidences mobiles de loisirs et habitations légères de loisirs » sont en effet définies par décret.
Les dispositions applicables résultant du décret n°2007-18 du 5 janvier 2007 sont entrées en vigueur le 1er octobre 2007 et distinguent les trois catégories suivantes :
– l’habitation légère de loisirs,
– la caravane,
– la résidence mobile de loisirs.
a) L’habitation légère de loisirs
Les habitations légères de loisirs (HLL) sont définies à l’article R. 111-31 du code de l’urbanisme comme des « constructions démontables ou transportables, destinées à une occupation temporaire ou saisonnière à usage de loisir ».
Constructions sans fondations, ces habitations sont soumises, aux termes de l’article R. 111-32 du même code, au droit commun des constructions, sous réserve de leur implantation :
– dans les parcs résidentiels de loisirs spécialement aménagés à cet effet ;
– dans les terrains de camping classés au sens du code du tourisme (elles ne peuvent toutefois excéder 20 % du nombre total d’emplacements ou 35 si le nombre total d’emplacements du terrain est inférieur à 175) ;
– dans les villages de vacances classés en hébergement léger et dans les dépendances de maisons familiales de vacances agréées.
Dans ces différents cas :
– soit elles sont soit dispensées de formalités si leur surface hors œuvre nette est inférieure 35 m² (article R. 421-2 du code de l’urbanisme) ;
– soit elles doivent faire l’objet d’une déclaration préalable si leur surface hors œuvre nette est supérieure à 35 m² (article R. 421-9 du même code).
Ces dispositions appellent les remarques suivantes :
→ Le terme d’habitation légère de loisirs, qui se rapporte à une catégorie spécifique réglementairement définie, ne doit pas être confondu avec le terme générique d’habitat léger de loisirs, qui comprend également les caravanes et les résidences mobiles de loisirs.
→ L’habitation légère de loisirs est la seule des trois catégories répertoriées d’habitats légers à ne pas être définie comme un véhicule mais comme une construction. Il s’ensuit qu’au sein des terrains aménagés, tout mode d’hébergement qui ne dispose pas de moyens de mobilité et/ou qui ne peut être regardé ni comme une caravane ni comme une résidence mobile, sera automatiquement assimilé à cette catégorie.
→ La qualification d’habitation légère de loisirs est étroitement liée à l’implantation de la construction en question dans l’un des terrains mentionnés par l’article R. 111-32.
• Sont regardées comme des caravanes, au sens de l’article R. 111-37 du code de l’urbanisme les :
→ « véhicules terrestres habitables qui sont destinés à une occupation temporaire ou saisonnière à usage de loisir,
La caravane est un véhicule et implique une logique de stationnement.
→ … qui conservent en permanence des moyens de mobilité leur permettant de se déplacer par eux-mêmes ou d'être déplacés par traction…
Cette formulation permet d’inclure le camping-car, autrement dénommé « auto-caravane », au sein de la catégorie des caravanes.
→ … et que le code de la route n'interdit pas de faire circuler ».
La circulation des caravanes est régie par les dispositions du code de la route. La caravane se distingue de la remorque dans le sens où elle dispose d’une immatriculation propre et d’un caractère distinct par rapport au véhicule qui la tracte (hors le cas particulier du camping-car). Le permis de conduire exigé pour la conduite d’un camping-car est le même que celui exigé pour tracter une caravane (8). La largeur du véhicule ne doit pas dépasser 2,55 mètres toutes saillies incluses et sa longueur ne peut excéder 12 mètres.
• Le régime d’implantation des caravanes est fondé sur :
– la définition de secteurs et de périmètres où leur installation est interdite quelle qu’en soit la durée (articles R. 111-38 et R. 111-39 du code de l’urbanisme), soit :
– les secteurs où le camping pratiqué isolément et la création de terrains de camping sont interdits en vertu de l’article R. 111-42 (interdiction stricte qui concerne notamment le littoral, les secteurs sauvegardés, les points d’eau captée pour la consommation) ;
– les secteurs où la pratique du camping a été interdite dans les conditions prévues par l’article R. 111-43 (faculté d’interdiction relevant du plan local d’urbanisme ou en raison de considérations d’ordre public, avec possibles dérogations temporaires et limitées) ;
– les bois, forêts et parcs classés par un plan local d'urbanisme comme espaces boisés à conserver.
– la stricte délimitation des terrains où, du fait de leurs caractéristiques propres, elles peuvent être entreposées en vue de leur prochaine utilisation (article R. 111-40), soit :
- les terrains affectés au garage collectif des caravanes et résidences mobiles de loisirs, les aires de stationnement ouvertes au public et les dépôts de véhicules ;
- les bâtiments et remises ;
- le terrain où est implantée la construction constituant la résidence de l'utilisateur. ;
– une possibilité de stationnement d’une durée maximale de trois mois (consécutifs ou non) par an, en dehors des terrains de camping et des parcs résidentiels de loisirs, dispensée de toute formalité. Au-delà des trois mois, en revanche, une déclaration préalable s’impose (d de l’article R. 421-23).
• Ces dispositions appellent les observations suivantes :
→ Le droit de l’urbanisme ne prend en considération la caravane qu’au sens d’une « installation affectant l’utilisation du sol ». Il faut garder à l’esprit que son utilisation est régie, en tant que véhicule circulant, par les dispositions du code de la route. Toujours au sens du droit de l’urbanisme, il n’existe pas de différence entre la caravane et le camping-car (auto-caravane).
→ La caravane ainsi définie doit se comprendre au sens de « véhicule de loisirs ». Lorsqu’elle constitue l’habitat permanent de ses usagers (cas des gens du voyage), elle entre dans la catégorie des « résidences mobiles » visée par l’article 1er de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000, qui obéit à un régime d’implantation distinct (9). Cette distinction n’est pas nouvelle (elle transparaissait déjà dans le décret de 1972 sur les caravanes) mais traduit bien l’existence pour un même bien meuble d’une réglementation différenciée selon l’usage. Au demeurant, l’article R. 111-39 du code de l’urbanisme mentionne également les « caravanes à usage professionnel ».
→ Il n’existe pas d’obligation stricte relative à l’implantation des caravanes sur certains types de terrains. La canalisation des caravanes vers les terrains de camping s’effectue uniquement par les effets conjugués d’une interdiction de stationnement dans les lieux où le camping est interdit et d’une limitation à trois mois sur les terrains non spécifiquement aménagés, sous réserve d’éventuelles interdictions générales concernant la pratique du camping. Ces dispositions rappellent, d’une manière générale, celles visant à limiter la pratique libre du camping, régie par les articles R. 111-41 à R. 111-43 du code de l’urbanisme, conformes à l’ « esprit » du décret de 1959.
c) La résidence mobile de loisirs (mobile-home)
La définition spécifique du mobile-home constitue la principale innovation du décret de 2007, s’agissant des habitats légers de loisirs. Jusqu’alors, quand bien même la question d’un statut distinct se posait depuis plusieurs années, la « résidence mobile », en tant qu’installation affectant l’utilisation du sol, était assimilée à une caravane dès lors qu’elle conservait ses moyens de mobilité.
• Au premier abord, la nouvelle définition est très proche de celle de la caravane. Sont en effet regardées comme des résidences mobiles de loisirs, au sens de l’article R. 111-33 du code de l’urbanisme, les :
→ « véhicules terrestres habitables qui sont destinés à une occupation temporaire ou saisonnière à usage de loisir,
La destination est, à ce stade, exactement identique à celle de la caravane.
→ … qui conservent des moyens de mobilité leur permettant d'être déplacés par traction…
La définition est encore une fois très proche, si l’on excepte l’absence de référence à un auto-tractage qui concernait le camping-car. Seule manque la mention d’une conservation permanente des moyens de mobilité.
→ … mais que le code de la route interdit de faire circuler »
Là se situe la différence essentielle, qui place, dans l’échelle de mobilité, la résidence mobile de loisirs à un niveau moindre que celui de la caravane : celle-ci ne peut circuler librement sur la voie publique, hors convoi exceptionnel.
D’autre part, les résidences mobiles de loisirs doivent obligatoirement répondre à une norme technique spécifique (NF S56 410), conformément à un arrêté du 28 septembre 2007 (article A. 111-2 du code de l’urbanisme). La preuve de la conformité doit être apportée par le constructeur, l’installateur ou l’importateur.
• La différenciation majeure avec la caravane opère en fait au niveau de l’encadrement strict des possibilités d’implantation des résidences mobiles. Aux termes de l’article R. 111-34 du code de l’urbanisme, celles-ci ne peuvent être en effet installées que dans :
- les terrains de camping aménagés à cet effet, classés au sens du code du tourisme ;
- les parcs résidentiels de loisirs créés avant le 1er octobre 2007 ;
- les parcs résidentiels de loisirs créés après le 1er octobre 2007 et exploités sous régime hôtelier, ou par location d’emplacements d’une durée maximale d’un an renouvelable ;
- les villages de vacances classés en hébergement léger ;
- les terrains affectés au garage collectif des caravanes et résidences mobiles de loisirs, les aires de stationnement ouvertes au public et les dépôts de véhicules, en vue de leur prochaine utilisation (selon le même régime que celui applicable aux caravanes).
Enfin, c’est seulement à titre temporaire, et sur décision préfectorale, qu’elles peuvent être installées dans un autre terrain afin de permettre le relogement provisoire des personnes victimes d’une catastrophe naturelle ou technologique.
• Ces dispositions appellent les observations suivantes :
→ Le mobile-home dispose désormais d’un statut distinct de celui de la caravane. Son implantation est strictement encadrée puisqu’elle ne peut avoir lieu que dans certaines catégories de terrains limitativement énumérées.
→ En tout état de cause, l’implantation d’un mobile-home est désormais interdite sur l’ensemble des parcelles privées, quelle que soit la durée de stationnement (à la différence des caravanes auxquelles ils étaient jusqu’alors assimilés dès lors qu’ils conservaient leurs moyens de mobilité) ;
→ C’est pour conforter cette logique qu’une mesure conservatoire a été adoptée dans le cadre de la loi « Tourisme » du 22 juillet 2009, afin d’interdire l’implantation d’un mobile-home sur les emplacements de terrains de camping ayant fait l’objet d’une cession en pleine propriété (10).
→ Bien qu’il ne soit pas fait état dans cette définition d’une conservation permanente de leurs moyens de mobilité, les résidences mobiles doivent néanmoins les conserver impérativement, faute de quoi elles seront assimilées à des habitations légères de loisirs et leur implantation dans les terrains de camping, sera limitée en nombre, par la règle dite « des 20 % ».
→ En dehors des terrains aménagés, qu’elles aient conservé ou non leurs moyens de mobilité, les résidences mobiles sont désormais automatiquement assimilées à des constructions légères, soumises au droit commun des constructions.
→ La disposition dérogatoire au droit commun s’agissant de l’implantation de mobile-homes en dehors des terrains aménagés doit obéir à la double condition d’un relogement provisoire, au bénéfice des personnes victimes d’une catastrophe naturelle ou technologique. La situation d’urgence caractérisant ce type d’hébergement est ainsi limitée.
Définition matérielle et définition organique : comment s’opère
la qualification des différents types d’habitats légers de loisirs ?
Les définitions auxquelles procède le code de l’urbanisme contiennent à la fois des éléments de définition matériels (notamment pour le mobile-home, puisqu’il est renvoyé à une norme technique spécifique pour le caractériser) et des éléments de définition organiques, qui renvoient à la fois aux caractéristiques d’implantation sur tel ou tel terrain et à l’usage qui est fait de l’habitat.
Ces trois catégories répertoriées d’habitats légers de loisirs constituent donc à la fois des réalités tangibles et, le cas échéant, des catégories juridiques auxquelles il est possible d’assimiler tel ou tel habitat léger spécifique.
Un « habitat léger » ne constitue pas toujours un « habitat léger de loisir » :
Selon qu’elle est destinée à un hébergement saisonnier à vocation touristique ou de loisir ou qu’elle constitue un habitat permanent (cf. le cas particulier des gens du voyage), un régime de stationnement différent s’applique à la caravane. De même, la construction légère sans fondations qui prend le nom d’habitation légère de loisirs dans un terrain aménagé à cet effet est assimilée sur tout autre terrain à une simple construction.
Quel est le statut de la tente ?
Les tentes ne disposent pas de définition spécifique dans le code de l’urbanisme : elles y sont du reste uniquement mentionnées au titre d’installations sur un terrain aménagé, à côté des caravanes, résidences mobiles de loisirs et des habitations légères de loisirs.
Les tentes, du fait de leurs caractéristiques propres, ne nécessitent en général pas d’autorisation, au sein ou en dehors des terrains aménagés, dès lors que l’espace occupé au sol est faible, que la durée de l’installation est limitée, que l’usage revêt un caractère d’hébergement temporaire et que leur nombre sur une même parcelle n’excède pas six.
Elles sont uniquement soumises, en dehors des terrains aménagés, aux limitations visant la pratique isolée du camping.
Quel statut pour les nouveaux « habitats légers » ?
Des installations grande dimension (yourtes, tipis, etc.) sont apparues au cours des dernières années et se présentent précisément comme des « tentes » : elles doivent être assimilées à des habitations légères de loisirs dès lors qu’elles disposent d’éléments intérieurs tels que des blocs cuisines ou sanitaires. De même, en l’absence de limite réglementaire en matière de superficie habitable pour les tentes, les seuils applicables aux habitations légères de loisirs sont applicables à ces habitats dès lors qu’ils y sont assimilés (11).
2. L’usage encadré du sol : du contrôle de l’aménagement des terrains à la régulation des conditions d’exploitation
a) Du camping libre au camping sur terrains aménagés
• L’usage d’un habitat léger de loisirs, quel qu’il soit, implique son stationnement ou son montage sur un sol déterminé ; aussi le décret de 1959 relatif au camping, dont la disposition essentielle a été reprise à l’article R. 331-1 du code du tourisme (12), pose comme principe que « le camping est librement pratiqué avec l’accord de celui qui a la jouissance du sol, sous réserve, le cas échéant, de l’opposition du propriétaire ». Intervient seulement ensuite cette précision d’importance : « Il peut être pratiqué sur des terrains aménagés dans les conditions prévues [par le présent code] ».
Ces terrains aménagés et exploités selon des modalités définies réglementairement par le code de l’urbanisme et le code du tourisme, et qui ont vocation à accueillir en leur sein des habitats légers de loisir, sont :
- les terrains aménagés de camping et caravanage ;
- les parcs résidentiels de loisirs ;
- les villages de vacances classés en hébergement léger ;
- les dépendances des maisons familiales de vacances agréées.
Parallèlement, comme on l’a vu, la réglementation des différentes catégories d’habitats légers de loisirs renvoie systématiquement à la nature des terrains sur lesquels leur implantation est autorisée ou prohibée.
Tant sur le plan du droit que sur le plan de la pratique, il convient en tout état de cause de distinguer ce qu’on appellera, par souci de clarté, le camping sur terrains aménagés du camping sur parcelles privées, s’exerçant en dehors d’une structure collective dédiée.
• Les terrains aménagés obéissent à une réglementation qui leur est propre, indépendamment de celle applicable aux habitats légers qu’ils accueillent, et qui comporte deux volets principaux : d’une part le contrôle de leur aménagement, d’autre part l’encadrement des modalités de leur exploitation.
→ L’aménagement d’un terrain suppose l’occupation spécifique d’un sol, le respect du droit lié à ce sol et la possibilité d’y construire certains équipements collectifs : ces registres renvoient à la législation générale en matière d’urbanisme et au régime des autorisations en vigueur, modifié en 2007.
Il s’agit notamment de tenir compte de la délimitation, dans les documents locaux d’urbanisme, de secteurs où de tels aménagements sont autorisés (en particulier en dehors des espaces urbanisés et eu égard aux règles relatives à l’extension de l’urbanisation).
En application des articles L. 443-1 et R. 421-19 du code de l’urbanisme la délivrance d’un permis d’aménager est obligatoire pour la création ou l’agrandissement d’un terrain de camping qui accueille plus de 20 personnes ou plus de six installations, d’un parc résidentiel de loisirs ou d’un village de vacances classé en hébergement léger. Sont également soumis à cette procédure le réaménagement d’un tel terrain lorsqu’il a pour effet d’augmenter de plus de 10% le nombre d’emplacements, ainsi que les travaux conduisant à modifier substantiellement la végétation qui limite l’impact visuel des installations.
Accompagné le cas échéant d’une étude d’impact réalisée dans les conditions prévues par le code de l’environnement, le permis d’aménager impose le respect de normes d’urbanisme, d’insertion dans les paysages d’aménagement, d’équipement et de fonctionnement et fixe la répartition des emplacements, leur nombre maximum, la capacité maximale d’accueil du terrain et, le cas échéant, sa période d’ouverture en cas d’exploitation saisonnière.
→ L’exploitation du terrain est conditionnée par le respect de plusieurs règles relatives au respect de l’aménagement initial, qui ne doit ni être dénaturé, ni faire l’objet d’une détérioration marquée (s’agissant notamment des prescriptions en matière d’hygiène et de sécurité) et aux conditions générales d’accueil des campeurs.
Le respect des règles liées à l’aménagement fait l’objet d’un contrôle qui s’inscrit dans la pleine continuité de la délivrance du permis d’aménager : ce contrôle peut ainsi conduire à des sanctions en application des dispositions de l’article R. 480-7 du code de l’urbanisme, qui vont de la mise en demeure de procéder aux aménagements et réparations nécessaires jusqu’à la fermeture temporaire du terrain et l’évacuation des emplacements.
S’agissant des conditions pratiques d’accueil des campeurs, elles sont encadrées, depuis le décret de 1968, par le biais d’un régime de classement systématique des terrains faisant l’objet d’un permis d’aménager.
Il ne s’agit pas à proprement parler d’un classement obligatoire mais les dispositions de l’article R. 443-8 du code de l’urbanisme le rendent impératif de fait. Celles-ci disposent en effet que « le bénéficiaire du permis d’aménager ne peut commencer l’exploitation du terrain de camping ou du parc résidentiel de loisirs qu’après avoir […] obtenu du préfet, dans les conditions prévues par le code du tourisme, un arrêté de classement qui détermine le cas échéant le mode d’exploitation autorisé. ». En outre, l’exploitant qui entreprend des travaux de réaménagement est tenu d’interrompre son exploitation jusqu’à l’obtention d’un permis modificatif ou mise en conformité.
En l’état de la réglementation, le lien entre l’aménagement du terrain et son classement persiste donc et conditionne son ouverture, indépendamment de la réforme importante de la procédure de classement mise en œuvre avec la loi n°2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques.
Une nouvelle procédure et de nouvelles normes de classement
Les conséquences de la loi du 22 juillet 2009
La réforme du classement des terrains aménagés s’inscrit dans le cadre d’une réforme globale qui concerne tous les hébergements touristiques. Le cadre en a été fixé par la loi de développement et de modernisation des services touristiques.
Les dispositions applicables aux terrains de camping, aux parcs résidentiels de loisirs et aux villages de vacances sont entrées en vigueur au début de l’été 2010 avec la parution du décret n°2010-759 du 6 juillet 2010 portant diverses dispositions relatives au tourisme et la publication des arrêtés fixant les normes et la procédure de classement de ces trois modes d’hébergement touristique.
Une nouvelle répartition des rôles
Le classement, s’il demeure délivré par le préfet, n’est plus mis en œuvre par les services déconcentrés de l’État : il s’opère désormais par le biais d’un organisme évaluateur accrédité par le Comité français d’accréditation (COFRAC), qui effectue une visite du site et vérifie la conformité des installations à la grille de classement qui lui correspond.
En tout état de cause, la décision de classement ne requiert plus l’avis de la commission départementale d’action touristique (CDAT).
De nouvelles grilles de classement
Les tableaux de classement sont désormais mis au point par Atout France (l’agence de développement touristique de la France dont le rôle a été notablement renforcé par la récente loi) et homologués par arrêté du ministre chargé du tourisme.
Le nouveau dispositif permet de mieux coller aux réalités qualitatives : on passe d’un système où l’on constatait la présence (ou non) d’équipements jugés obligatoires selon le nombre d’étoiles à un système basé sur des critères multiples et un calcul de points. Les grilles ainsi élaborées ont du reste vocation à être modifiées régulièrement afin de faire face aux évolutions du secteur.
Pour les terrains de camping, la manifestation la plus visible consiste en l’apparition d’une 5ème étoile.
La fin du classement obligatoire ?
Dans l’ancien système, le classement était attribué définitivement, tant que le terrain ne demandait pas de changement ou que sa capacité d’ouverture n’était pas substantiellement modifiée. Désormais, la validité du classement est limitée à 5 ans.
Dans ces conditions, on peut considérer qu’il n’est plus systématique puisqu’un exploitant peut décider de ne pas demander le renouvellement de son classement.
Toutefois, les dispositions du code de l’urbanisme n’ayant pas été modifiées (article R. 443-8), la première ouverture du terrain reste conditionnée à l’obtention d’un arrêté de classement.
b) Les trois grandes catégories de terrains aménagés accueillant des habitats légers de loisirs
(i) les terrains aménagés de camping et de caravanage
Le succès global de la politique de résorption du camping « sauvage » menée à partir des années 1960 a conduit à ce que, dans l’acception communément admise, la pratique de l’hébergement léger soit d’abord associée à la fréquentation des terrains de camping, au nombre de plus de 10 000 en France (campings classés et déclarés).
Un recensement exact est cependant assez difficile à déterminer : en dispensant le propriétaire ou l’exploitant de toute formalité autre qu’une déclaration en mairie pour l’aménagement d’un terrain permettant l’accueil de six tentes, caravanes ou résidences mobiles de loisirs, le code de l’urbanisme a en effet ouvert la voie à une forme élémentaire de camping, le camping déclaré, autrement dénommé camping à la ferme ou camping chez l’habitant. On estime à près de 2 000 les terrains de ce type qui accueillent un faible nombre de campeurs, dont les équipements collectifs sont en général fort réduits, et qui constituent souvent une activité annexe pour le propriétaire du terrain. En tout état de cause, les chiffres avancés restent tributaires des déclarations effectuées par les propriétaires.
Les terrains aménagés de camping et de caravanage, constituent l’essentiel des capacités d’accueil des habitats légers de loisirs, avec près de 8 000 sites classés en 2010 et plus de 900 000 emplacements. Ces terrains, bizarrement, ne faisaient pas jusqu’à présent l’objet d’une définition spécifique.
Le décret n° 2010-759 du 6 juillet 2010 portant diverses dispositions relatives au tourisme inscrit désormais cette définition au cœur du code du tourisme (nouvel article D. 331-1-1) : les terrains aménagés de camping et de caravanage « sont destinées à l’accueil de tentes, de caravanes, de résidences mobiles de loisirs et d’habitations légères de loisirs. Ils sont constitués d’emplacements nus ou équipés de l’une de ces installations ainsi que d’équipements communs. Ils font l’objet d’une exploitation permanente ou saisonnière et accueillent une clientèle qui n’y élit pas domicile. Ils doivent disposer d’un règlement intérieur conforme à un modèle arrêté par le ministre chargé du tourisme ».
Ces terrains sont répartis en deux grandes catégories, selon qu’ils sont classés avec la mention tourisme ou la mention loisirs, dès lors que la majorité de leurs emplacements est destinée, soit à une location à la nuitée, à la semaine ou au mois pour une clientèle de passage (tourisme), soit à une occupation généralement supérieure au mois par une clientèle qui n’y élit pas domicile (loisirs) (13).
L’article L. 331-1 du code du tourisme renvoie expressément aux dispositions du code de l’urbanisme s’agissant des règles relatives à l’ouverture et à l’aménagement de ces terrains (articles L. 443-1 et L. 443-2 à titre principal, articles L. 145-2 et L. 145-5 en ce qui concerne les zones de montagne, articles L. 146-1 à L. 146-7 et L. 146-9 en ce qui concerne le littoral) qui sont soumis, aux termes de l’article R. 111-45, à des normes d'urbanisme, d'insertion dans les paysages, d'aménagement, d'équipement et de fonctionnement. Le permis d’aménager nécessaire à l’ouverture d’un terrain de camping obéit aux exigences des articles R. 441-3 et suivants, R. 443-2 et suivants, A 111-7 et suivants du code de l’urbanisme.
Les obligations en matière de sécurité et de salubrité publiques, prépondérantes dans le contrôle effectué par les pouvoirs publics, sont prioritairement prises en compte à ce stade, même si elles peuvent faire l’objet d’un contrôle ultérieur et d’inspections. Ces normes déterminent les conditions générales d’accueil, notamment la superficie et l’agencement des emplacements et des équipements collectifs, ainsi que l’insertion paysagère.
C’est également au stade du permis d’aménager qu’il revient de prévoir une exploitation saisonnière et de fixer le cas échéant, la période d'exploitation, en dehors de laquelle aucune tente ou caravane ne peuvent être ou rester installées sur le terrain, a fortiori encore moins occupées.
Les normes qualitatives qui permettent d’établir le classement relèvent en revanche intégralement du code du tourisme, en particulier des articles D. 332-1 et suivants et des dispositions de l’arrêté du 6 juillet 2010 relatif au classement des terrains de camping.
(ii) les parcs résidentiels de loisirs (PRL)
Ces terrains, qui ont été aménagés, à partir du décret du 4 septembre 1980, en vue principalement d’accueillir des habitations légères de loisirs, ont vu leur définition étoffée par le récent décret du 6 juillet 2010 précité. Peu répandus en France (on en dénombre une centaine), les PRL peuvent être considérés comme un mode d’exploitation intermédiaire entre le camping traditionnel et le « lotissement de loisirs ».
De même que pour les terrains de camping, le code du tourisme renvoie à leur sujet aux dispositions du code de l’urbanisme s’agissant des autorisations relatives à leur aménagement et des prescriptions et interdictions applicables en leur sein pour l’implantation des habitats légers de loisirs.
Ces terrains peuvent être exploités selon trois modes :
- soit par cession d’emplacements en pleine propriété,
- soit sous régime hôtelier,
- soit par location d’emplacements, d’une durée supérieure au mois et inférieure à un an renouvelable, pour des usagers en général propriétaires d’un mobile-home.
Seuls ces derniers, dont la définition a été précisée par le décret du 6 juillet 2010 (article D. 333-4 du code du tourisme (14)) peuvent le cas échéant faire l’objet d’un classement selon des modalités voisines de celles prévues pour les terrains de camping.
La création des parcs résidentiels de loisirs, au début des années 1980, a eu pour objectif principal de répondre aux aspirations d’une clientèle spécifique des terrains de camping, privilégiant des séjours répétés dans un cadre qui tend vers le « résidentiel de fin de semaine ». Il s’agissait également de mettre en place une nouvelle structure à même de recevoir des hébergements plus conséquents, destinés à une occupation saisonnière de moyenne durée, le cas échéant tout au long de l’année.
Cette nouvelle structure devait également permettre de résoudre les problèmes posés par la sédentarisation des habitats légers de loisirs. Les emplacements de PRL sont plus grands que dans les terrains de camping classiques (200 m²), souvent mieux isolées les uns par rapport aux autres et les équipements communs obligatoires sont en général plus nombreux.
Néanmoins, la formule n’a pas eu quantitativement le succès escompté : le coût des équipements communs s’est avéré onéreux et la nécessité de faire appel à un promoteur pour réaliser ce genre de structures a surenchéri encore le coût des investissements initiaux. Par ailleurs, il s’est avéré difficile de trouver des emprises foncières pour les PRL : ceux-ci sont en effets assimilées à un mode d’urbanisation et doivent obligatoirement être implantées dans les zones ouvertes à l’urbanisation des plans locaux d’urbanisme.
Ce faisant, l’objectif consistant à rediriger vers les PRL, par des opérations de regroupement, les campeurs propriétaires de parcelles privées en infraction avec le droit de l’urbanisme n’a pas davantage réussi globalement.
En tout état de cause, la catégorie « parc résidentiel de loisirs » regroupe trois réalités assez sensiblement différentes.
Il est par ailleurs à noter, s’agissant des PRL nouvellement créés, que seuls ceux qui sont exploités sous régime hôtelier ou par location d’emplacement d’une année renouvelable peuvent encore recevoir des mobile-homes en leur sein.
(iii) les villages de vacances classés en hébergement léger
Aménagées à partir du décret de 1968, ces structures se distinguent principalement des terrains de camping et des parcs résidentiels de loisirs par le fait qu’elles comprennent systématiquement des équipements communs tels que des installations sportives et de distractions collectives, et que le séjour en leur sein est pensionné.
Ces villages peuvent comprendre, en totalité ou en partie, des hébergements légers, qui demeurent installés pendant la durée d’ouverture annuelle : ils comportent alors dans leur dénomination une mention « hébergement léger », qui apparaît aussi dans leur classement.
S’agissant de leur aménagement, les villages de vacances en hébergement léger sont soumis à des règles identiques, au niveau du permis d’aménager et de l’implantation d’habitats légers de loisirs, à celles qui s’appliquent aux parcs résidentiels de loisirs exploités sous régime hôtelier.
Pour mémoire, on mentionnera également à ce stade les maisons familiales de vacances agréées, qui peuvent recevoir des habitations légères de loisirs dans leurs dépendances.
c) Le stationnement en dehors des périodes d’usage
Les trois catégories d’habitats légers de loisirs sont concernées différemment par cette question :
Une caravane peut être entreposée, en vue de sa prochaine utilisation, soit sur le terrain où est implantée la construction constituant la résidence de son utilisateur, soit dans les dépôts de véhicules ou sur les terrains affectés au garage collectif des caravanes et résidences mobiles de loisirs.
Un mobile-home ne peut en revanche être entreposé, en vue de sa prochaine utilisation, que dans les dépôts de véhicules ou sur les terrains affectés au garage collectif des caravanes et résidences mobiles de loisirs ;
En tant que constructions, la question du stationnement ne se pose pas pour les habitations légères de loisirs.
L’aménagement des garages collectifs et des dépôts de véhicules susmentionnés est soumis aux dispositions du code de l’urbanisme. Au delà de 50 véhicules, il est nécessaire d’obtenir un permis d’aménager pour de telles installations.
Traits communs et traits distinctifs des différents types de terrains aménagés
Éléments de définition :
Les terrains de camping constituent (de loin) la catégorie la plus importante, qui fait également l’objet de la définition la plus générale (art. D.331-1-1 du code du tourisme) : ce sont des « terrains destinés à l’accueil de tentes, caravanes, résidences mobiles de loisirs ou habitations légères de loisirs, constitués d’emplacements nus ou équipés de l’une de ces installations ainsi que d’équipements communs, qui accueillent une clientèle qui n’y élit pas domicile. ». Ils sont répartis entre terrains « tourisme » et terrains « loisirs ».
Les parcs résidentiels de loisirs se distinguent des terrains de camping à 3 égards :
- ils sont prioritairement destinés à recevoir des habitations légères de loisirs (dont le nombre est en revanche limité à 20% des emplacements dans les terrains de camping) ;
- ils font l’objet d’une exploitation permanente alors que les terrains de camping peuvent le cas échéant ne faire l’objet que d’une exploitation saisonnière ;
- ils peuvent être exploités soit par cession d’emplacements, soit par location d’emplacements, soit sous régime hôtelier. C’est seulement dans ce dernier cas qu’ils sont définis par le code du tourisme (art. R.333-4) et font l’objet d’un classement.
Enfin, les villages de vacances classés en hébergement léger sont définis par les articles D.325-1 et D.325-3-3 du code du tourisme. Ils peuvent être assimilés à des parcs résidentiels de loisirs exploités sous régime hôtelier, dans lesquels les prestations liées au séjour comprennent la pension et des animations diverses.
Contraintes d’aménagement :
Seuls les terrains de camping accueillant moins de 6 installations légères et moins de 20 personnes sont dispensés de toute formalité autre qu’une déclaration en mairie. En règle générale, l’exploitation d’un terrain nécessite l’octroi d’un permis d’aménager (article L.443-1 du code de l’urbanisme). Ces terrains sont donc soumis à des normes d’urbanisme, d’insertion dans les paysages, d’aménagement, d’équipements et de fonctionnement (article R.111-45 pour les terrains de camping, article R.111-46 pour les autres terrains).
Pour les terrains de camping, c’est au stade du permis d’aménager que sont fixés, le principe de l’exploitation saisonnière ou permanente et la période d’exploitation qui en découle le cas échéant (art. R.443-7) ainsi que la délimitation des emplacements réservés aux habitations légères de loisirs.
Les résidences mobiles de loisirs ne peuvent, en tout état de cause, être implantés que dans les terrains « classés au sens du code du tourisme ». Dès lors, un terrain de petite taille doit tout de même faire l’objet d’un classement s’il veut en recevoir en son sein.
La question du classement :
Trois procédures distinctes mais voisines existent pour les terrains de camping, les parcs résidentiels de loisirs exploités sous régime hôtelier, les villages de vacances classés en hébergement léger. En tout état de cause le début d’exploitation d’un terrain demeure en l’état conditionné par l’obtention du classement.
Le déploiement des habitats légers de loisirs sur les différents types de terrains où ils peuvent être implantés revient finalement à imbriquer différentes catégories de « contenants » (les habitats légers de loisirs) dans différentes catégories de « contenus » (les terrains aménagés).
Le tableau ci après résume brièvement les principales configurations d’implantation autorisées par la réglementation :
Terrain privé |
Terrain de camping |
Parcs résidentiels | |
Tente |
- simple déclaration si le nombre d’installations est inférieur. à 6 ou si le nombre de personnes est inférieur à 20 pour une durée limitée. - stationnement de caravanes autorisé pour une durée totale infé-rieure à 3 mois par an - stationnement autorisé sur le terrain de la résidence principale de l’utilisateur en vue d’une prochaine utilisation |
- autorisé sans limitation sous réserve de durée limitée et de qualification en HLL |
- peut être toléré en appoint. |
Caravane |
- autorisé sous réserve d’une durée inférieure à 3 mois par an |
- stationnement non expressément interdit mais cas peu pertinent. | |
Résidences mobiles de loisirs (RML) « mobile-homes » |
- non autorisé |
- autorisé sans limitation, à l’exception des empla-cements ayant fait l’objet d’une cession en pleine propriété |
- autorisé dans les PRL sous régime hôtelier ou exploités par location d’emplacements d’une année renouvelable au maximum. - interdit dans les PRL créés après 2007 exploités avec cession de parcelles ou par location de longue durée (supérieure à un an renouvelable). |
Habitations légères de loisirs (HLL) |
- implantation soumise au droit commun des constructions : il ne s’agit plus à proprement parler de HLL |
- le nombre de HLL ne doit pas excéder 20% des emplacements ou 35 si le terrain comprend moins de 175 emplacements. |
- autorisé sans formalité si la SHON est inférieure à 35 m² - déclaration préalable si la SHON est supérieure à 35 m². |
Ces configurations autorisées laissent la porte ouverte à des modes d’utilisation très divers, qui renvoient eux-mêmes aux modes d’exploitation des terrains aménagés par leurs gestionnaires et, au sein même de ces terrains, à différents modes d’occupation des emplacements.
Le camping aujourd’hui en Europe
Le camping constitue un important segment du tourisme européen : d’après l’institut Eurostat, il totalisait en 2008 plus de 350 millions de nuitées (soit 15 % des nuitées en hébergement touristique marchand au sein de l’Union européenne, 37% de la capacité d’accueil, rapportée au total des hébergements touristiques).
Sur la période 2000-2008, la capacité d’accueil des terrains est restée relativement stable, de l’ordre de 10,2 millions de personnes.
En 2008, on recensait 26 344 terrains de camping, dont (par ordre d’importance) :
- 7981 en France (30%),
- 4710 au Royaume-Uni (18%),
- 2718 en Allemagne (10%),
- 2595 en Italie (9,8%),
- 2358 aux Pays-Bas (9%).
Du point de vue de la capacité d’accueil (en « lits marchands »), la France arrive également en tête (3,7 millions de lits marchands, soit 36,7% du total de l’Union), suivie de l’Italie (1,4 million, soit 13,3%), du Royaume-Uni (1,1 million, soit 10,7%) et de l’Allemagne (800 000, soit 8,2%).
Trois pays rassemblent plus de 60% des nuitées de camping : la France (28%), l’Italie (18,4%) et le Royaume-Uni (17,4%). L’Espagne (8,8%), l’Allemagne (6,5%) et les Pays-Bas (5,3%) arrivent loin derrière.
S’agissant de l’importance relative du camping dans chaque pays, par rapport aux autres modes d’hébergement touristiques marchand, les différences sont sensibles entre la France (32,8% des nuitées) et le Royaume-Uni (23,4%). Dans un pays comme la Grèce, le camping représente moins de 5% des nuitées.
En ce qui concerne le nombre de campeurs, que ceux-ci pratiquent le camping dans leur pays ou dans un autre pays de l’Union, les Français sont en tête (6,6 millions), suivis des Allemands (6,2 millions) et des Néerlandais (3,9 millions). Les campeurs italiens (1,9 million) et espagnols (700 000) sont relativement peu nombreux eu égard à la puissance touristique que constituent leurs pays respectifs.
Ces chiffres laissent entrevoir des pratiques de camping contrastées d’un pays à l’autre. Au sud de l’Europe, le camping demeure essentiellement à vocation « touristique » : les séjours sont courts et supposent l’emploi d’un habitat léger particulièrement mobile (la tente). En revanche, les pays du Nord privilégient en leur sein la pratique d’un camping de fin de semaine, au moyen d’habitats légers qui peuvent le cas échéant être implantés de façon plus stable.
Le cas du Royaume-Uni est intéressant à souligner : dans ce pays, les campings sont organisés en catégories selon le mode d’occupation : « tent and touring parks », « caravan and holiday home parks », et « home parks ». Ces derniers sont en fait des terrains résidentiels où l’habitat est installé en permanence.
La France se situe visiblement à la confluence des deux logiques « touristiques » et « résidentielles ».
D. — LA DIFFICILE APPRÉHENSION DES DIVERS MODES D’UTILISATION
1. Les terrains de camping en France aujourd’hui
a) Aperçus sur l’offre générale
La France figure incontestablement en tête des pays de l’Union européenne s’agissant du nombre terrains de camping déclarés et du nombre de nuitées. Elle réunissait en 2008, à elle seule, 36,2 % des hébergements touristiques de plein air, soit 30 % du nombre total de nuitées (15) (cf. l’encadré ci-contre sur le camping en Europe). Cette prédominance confirmée ne doit pas masquer d’importantes évolutions au cours des quinze dernières années.
L’offre française en matière de terrains de camping est par ailleurs fort variée, qu’il s’agisse de la capacité d’accueil des terrains, de leur classement, de leur répartition géographique ou encore de leur mode d’exploitation et de gestion.
• 1995 - 2010 : Baisse quantitative et hausse qualitative
Le nombre terrains français classés est en baisse régulière depuis près de 15 ans, puisqu’on est passé de 8 539 terrains répertoriés en 1995 à 7 854 en 2010 (et de 930 719 à 916 173 emplacements).
Évolution du nombre de terrains de camping en France entre 1995 et 2010
Source : INSEE 2010
Cette tendance n’est pas forcément symptomatique d’une crise de l’activité (le nombre de nuitées a durant cette période continué de croître) mais illustre plutôt une hétérogénéité accentuée : l’indiscutable amélioration qualitative des prestations offertes par les hôteliers de plein air (agrandissement de la superficie des terrains, concentration des exploitations par rachat) a conduit à une augmentation du nombre de camping « 3 étoiles » et « 4 étoiles » mais ce sont surtout les campings « 2 étoiles » qui ont eu à en pâtir (leur nombre a baissé d’environ 25 %).
Dans une moindre mesure, le nombre de campings « 1 étoile » est également en baisse, de moins 4,3 %, mais paradoxalement, le nombre d’emplacements qu’ils contiennent a augmenté de 1,2 %.
On observe ainsi une amélioration soutenue de l’offre sur le plan qualitatif. Là où 45 % de la capacité d’accueil en plein air était encore concentrée dans les campings « 2 étoiles » en 1995, les campings « 3et 4 étoiles » rassemblent désormais respectivement 36 % et 21 % du nombre total d’emplacements (contre 43 % en cumulé il y a quinze ans).
La répartition totale des emplacements s’effectue ainsi en 2010 :
Source : INSEE 2010
En termes de nuitées, le contraste est encore plus accentué :
Hôtellerie de plein air - Répartition des nuitées françaises par catégorie (2008)
Cette progression qualitative, à un rythme soutenu, a notamment pour but de satisfaire une clientèle à la recherche d’un confort plus important, s’agissant des équipements collectifs autant que de l’habitat léger : elle va de pair avec le développement du mobile-home et de l’habitation légère de loisirs. La création récente de la 5ème étoile traduit s’il en était besoin cette amélioration significative.
• La répartition selon le types d’espaces :
En termes non plus d’évolution mais de répartition selon les différents types d’espace (littoral, montagne, rural, urbain), de forts contrastes apparaissent également.
Répartition du nombre total d’emplacements selon les différents types d’espace (2008)
Source : Insee – DGCIS (30/09/2008)
Le littoral concentre ainsi près de la moitié des emplacements, sur des terrains d’une capacité plus importante que la moyenne. L’encouragement au tourisme « vert », à l’intérieur des terres, ne tarit pas l’appétit des vacanciers pour les côtes françaises et la situation exceptionnelle de certains terrains constitue un fantastique effet d’aubaine pour leurs gestionnaires, qui s’attachent souvent à valoriser davantage leur mode d’exploitation.
La concentration autour du littoral se retrouve si l’on raisonne en nombre total d’emplacements ou en termes de densité touristique. Selon ces deux paramètres, les cinq régions en tête en 2010 étaient les suivantes :
Capacité d’accueil (en % du nombre |
Densité calculée en équivalents-lits |
Languedoc-Roussillon (13 %) |
Corse (23,4 équivalents-lits) |
Aquitaine (11,5 %) |
Languedoc-Roussillon (15) |
Provence-Alpes-Côte-d’Azur (10,5 %) |
l’Aquitaine (10,7) |
Bretagne (9,6 %) |
Poitou-Charentes (10,3) |
Pays de la Loire (9,2 %) |
Bretagne (9) |
Source : Étude sur « l’Hôtellerie de Plein Air en France : marché et perspectives » conduite par la Fédération nationale de l’hôtellerie de plein air et la direction du tourisme (2004)
• La répartition selon le mode de gestion :
Répartition des emplacements totaux par mode de gestion en 2003
La France occupe une position atypique en Europe, dans le sens où une part importante de ses terrains de camping a longtemps été gérée par les collectivités locales (encore 40% en 1995). Cette part tend aujourd’hui à décroître nettement mais les campings municipaux, créés à l’origine pour résorber le camping sauvage, représentent encore plus de 20 % du nombre des emplacements. Ces terrains accueillent souvent des populations de passage (travailleurs saisonniers, ouvriers de chantiers) mais parfois également des personnes précaires à titre d’habitat durable, dans une optique éloignée de toute vocation touristique.
Sur un plan plus général, on assiste, depuis une dizaine d’années, à de profondes mutations dans la gestion des terrains de camping. L’exploitation traditionnelle constituée à partir d’anciennes terres agricoles ou forestières ne trouve pas toujours de repreneur dans le cercle familial, de telle sorte que la propriété du terrain se trouve de plus en plus souvent déconnectée de son exploitation. On voit également monter en puissance, de ce fait, les professionnels du secteur du tourisme, à travers le phénomène des chaînes commerciales.
b) La signification des différents modes d’occupation
Le mode d’exploitation des terrains de camping a également beaucoup changé au cours des deux dernières décennies : de terrains majoritairement nus destinés à une clientèle de passage pour la nuitée (tourisme), on est passé à des terrains accueillant des hébergements plus sophistiqués, pour une durée plus longue, voire parfois pour une installation de plus de six mois dans l’année (loisirs).
La cristallisation de ce phénomène s’est opérée autour du mobile-home, dont le statut de véhicule « mobile » a permis de contourner l’interdiction d’implantation permanente sur des terrains non constructibles, ainsi que la limitation réglementaire de l’implantation des habitations légères de loisirs dans les terrains de camping.
On distingue donc aujourd’hui trois types de pratiques, chacune étant liée à un mode d’occupation d’emplacement :
→ une pratique traditionnelle du camping sur des emplacements nus recevant des tentes et des caravanes : les particuliers apportent leur propre équipement et repartent avec à la fin du séjour (16) ;
→ une pratique hôtelière sur des emplacements locatifs : l’exploitant met à la disposition du campeur à la fois un emplacement et un habitat léger (résidence mobile ou habitation légère) ;
→ une pratique à l’année sur des emplacements résidentiels, consistant pour l’exploitant du terrain à louer un emplacement à l’année (ou plus), en vue de l’implantation par un particulier du mobile-home qui lui appartient.
Ces pratiques peuvent se développer parallèlement au sein d’un même terrain aménagé, selon le choix du gestionnaire, en termes de répartition des emplacements qu’il propose. Les gestionnaires s’adaptent en fait aux besoins de la clientèle, nonobstant d’autres considérations (la location à l’année d’une partie des emplacements apporte ainsi des garanties appréciables en matière de trésorerie).
Par ailleurs, ces pratiques diffèrent sensiblement selon la nature de l’espace touristique considéré (littoral, montagne, rural ou urbain) :
Espace touristique |
Emlacements de passage Emplacement nus / Emplacements locatifs |
Emplacements loués à l’année |
Total | |
Littoral |
242 597 (55 %) |
89 540 (20 %) |
111 480 (25 %) |
443 617 |
Montagne |
84 894 (80 %) |
9 904 (9 %) |
12 359 (11 %) |
107 157 |
Rural |
206 336 (65 %) |
38 871 (12 %) |
73 451 (23 %) |
318 658 |
Urbain |
35 025 (71 %) |
5 825 (12 %) |
8 430 (17 %) |
49 280 |
France métropolitaine |
568 852 (62 %) |
144 140 (16 %) |
205 720 (22 %) |
918 712 |
Source : Insee – DGCIS (30/09/2008)
… et selon le classement du terrain de camping :
Espace touristique |
Emplacements nus |
Emplacements locatifs |
Emplacements résidentiels |
Total |
Campings * |
45 998 (64 %) |
4 869 (7 %) |
20 562 (29 %) |
71 429 |
Campings ** |
220 183 (68 %) |
25 826 (8 %) |
75 930 (24 %) |
321 939 |
Campings *** |
214 207 (63 %) |
57 138 (17 %) |
67 428 (20 %) |
338 773 |
Campings **** |
88 464 (47 %) |
56 307 (30 %) |
41 800 (23 %) |
186 571 |
Toutes étoiles confondues |
568 852 (62 %) |
144 140 (16 %) |
205 720 (22 %) |
918 712 |
Source : Insee – DGCIS (2008)
• Le camping sur emplacements nus demeure partout majoritaire mais concerne désormais moins de la moitié des emplacements dans les terrains de camping « 4 étoiles », mieux disposés à fournir à clientèle des prestations « haut de gamme », et par conséquent plus accueillants aux hébergements légers de type mobile-home ou HLL sous la forme résidentielle. Il reste plébiscité dans les zones de montagne, pour des raisons assez compréhensibles (les conditions climatiques n’incitent guère à l’implantation de longue durée d’hébergements légers qui auront tendance à rapidement se détériorer et la pratique touristique n’est pas la même).
Ce faisant, la pratique du camping sur emplacements nus est en baisse constante depuis 15 ans. Cela se traduit cependant moins en termes d’emplacements que de nuitées.
• La pratique locative, recensée distinctement depuis 1998, est en revanche en pleine expansion, et proportionnellement plus développée sur le littoral, ainsi que dans les campings « 4 étoiles ». Elle demeure logiquement assez faible dans les terrains de camping « bas de gamme ».
Évolution du nombre d’emplacements locatifs entre 1995 et 2010
Source : INSEE
• Le développement du camping résidentiel s’observe également, à titre principal, sur le littoral, ainsi que dans les zones rurales. Paradoxalement, sa diffusion a progressé dans les campings « 1 étoile », ce qui amène à se poser la question de la nature de ce type d’hébergement (loisir ou habitat permanent ?). Ce faisant, c’est dans les campings « 3 et 4 étoiles » qu’elle prospère.
Il convient de noter que les emplacements résidentiels sont recensés séparément par l’INSEE depuis 2004 seulement et que cette pratique est désormais supérieure au mode « locatif ».
En tout état de cause, il apparaît clairement que la distinction entre terrains classés « tourisme » (60 %) et terrains classés « loisirs » (40 %) ne permet plus à elle seule d’apprécier la diversité des modes d’occupation.
On notera enfin que ces données chiffrées ne font pas apparaître l’existence d’une pratique désormais interdite, à savoir l’acquisition par les campeurs en pleine propriété de parcelles privées au sein même des terrains de campings, sur le modèle des PRL exploités par cessions d’emplacements.
2. Les différents ressorts de la sédentarisation des habitats légers… et de ceux qui les occupent
Si l’on peut raisonnablement considérer, s’agissant de structures qui font l’objet d’une exploitation commerciale, que les transformations en cours sont, sur le plan opérationnel, initiées par les gestionnaires de terrains (ce sont eux qui déterminent la façon dont ils vont exploiter leurs emplacements), ces évolutions sont également révélatrices des aspirations de la clientèle (17).
a) De la résidence légère de loisirs à la « simili résidence secondaire »
La possibilité de disposer d’une installation permanente de camping, à vocation saisonnière ou estivale, permet pour de nombreuses personnes, de concilier la volonté d’un certain confort avec la personnalisation de l’hébergement, à moindres frais par rapport à l’acquisition d’une résidence secondaire.
Cette pratique recoupe toutefois deux réalités qui doivent être distinguées :
- d’une part, celle du « camping de fin de semaine », qui suppose en général une certaine proximité entre le lieu d’habitation et le lieu de destination, et qui existe plutôt dans le nord de la France et dans les zones rurales situées dans une relative proximité des villes ;
- d’autre part, un second modèle en plein essor que l’on pourrait qualifier de « résidentiel de vacances », à vocation saisonnière et/ou estivale.
La première pratique – historiquement la plus ancienne – correspond pleinement au modèle « résidentiel de loisirs », pour lequel les PRL ont été créés, mais qui tend aujourd’hui à déborder vers les terrains de camping, contribuant pour partie à sanctuariser l’offre touristique.
Le développement de la seconde – qui tend à prendre aujourd’hui le dessus – est à mettre en rapport avec l’évolution de la société. Une étude récente sur le profil des nouveaux acheteurs de résidences mobiles de loisirs, commandée par le groupe Bénéteau, qui a bien voulu la communiquer à la mission, fait ainsi ressortir que la majorité de ces acheteurs est composée de personnes de plus de 50 ans, désirant avoir accès au littoral méditerranéen ou atlantique. Ils souhaitent y résider l’été dans un cadre familial, avec enfants ou petits-enfants, en faire profiter leur famille. On peut supputer qu’il s’agit en général d’anciens campeurs caravaniers, habitués d’un lieu de villégiature, et qui souhaitent prolonger leurs habitudes dans un cadre plus confortable.
Ce mouvement de fond conduit à relativiser les différences entre les deux modèles. L’évolution de la pyramide des âges amène en effet un public nombreux à vouloir bénéficier du modèle résidentiel, sans que la distance avec le lieu principal d’habitation ni la coupure loisir/travail ne constituent un frein. Ce faisant, le mode d’occupation des emplacements qui en résulte reste en général tributaire de l’exploitation saisonnière.
Si l’habitat permanent dans les campings existe bel et bien, il s’agit surtout d’un habitat précaire, subi et souvent dissimulé.
b) Hébergement de plein air et habitat précaire
Il convient de ne pas négliger l’existence, au sein de terrains de camping situés en général au pourtour des zones urbaines, d’un habitat qui tend à y devenir permanent, et qui est le fait de personnes qui n’ont tout simplement pas les moyens de se loger ailleurs. Le phénomène peut également toucher certaines stations touristiques, où il n’est pas rare de voir arriver dans les centres communaux d’action sociale, au début de la saison touristique, des demandes de logement concernant ces personnes qui, hébergées en basse saison dans les terrains de camping, en sont alors chassées au profit des vacanciers.
Cette population extrêmement difficile à recenser (d’autant que l’habitat permanent n’est réglementairement pas autorisé) se situerait aujourd’hui entre 70 000 et 120 000 personnes (étudiants, travailleurs saisonniers, ouvriers de chantier, personnes en recherche d’emploi entre autres). On y trouverait également près de 20 000 enfants (18).
Un phénomène de substitution est également observable à la périphérie des villes universitaires, s’agissant du logement étudiant. Il apparaîtrait même, d’après des témoignages recueillis par la mission, que certains gestionnaires de terrains négocient directement avec les services administratifs afin de toucher directement les aides au logement desdits étudiants, en échange de quoi ils acceptent de les loger à l’année (hors périodes de congés) dans des sortes de « meublés légers ».
La question concerne au premier chef, mais pas uniquement, les terrains de camping ouverts à l’année, qui font l’objet d’une exploitation permanente (tout au plus 15 % du nombre total). On rappellera que la période d’exploitation du terrain est fixée au stade du permis d’aménager mais également que l’exploitation permanente n’entraîne aucunement le droit à une occupation permanente, encore moins à une domiciliation.
c) Le cas particulier du camping sur parcelles privées
La pratique du camping sur parcelles privées s’est développée en réaction aux politiques de résorption du camping « sauvage » menées à partir des années 1960. Certaines personnes ont alors refusé de rejoindre les structures collectives des terrains aménagés et ont préféré acquérir eux-mêmes un terrain non constructible afin d’y implanter leurs propres habitats légers.
Nonobstant les questions d’hygiène et de sécurité, quand les habitats légers concernés étaient uniquement des tentes et des caravanes, le dispositif pouvait demeurer dans un cadre relativement légal : s’appliquaient alors le seuil des 6 installations et des 20 personnes et la règle du stationnement maximum de trois mois par an. Un tel dispositif excluait la sédentarisation des habitats.
En revanche, la tendance à la sophistication des habitats légers et la force du fait accompli ont contribué à la pérennisation d’une pratique qui prête fortement à caution.
Aujourd’hui, on dénombre environ 250 000 parcelles de ce type, dont près de 80 % sont en infraction aux codes de l’urbanisme et de l’environnement. Ces infractions ont longtemps été tolérées au niveau local du fait du flou réglementaire entourant le statut des habitats légers, notamment le mobile-home.
Par ailleurs, la tolérance aux infractions est forte car sa résorption entraîne le déclenchement d’un mécanisme pénal « lourd » à assumer pour les pouvoirs publics locaux qui en prennent l’initiative.
Actuellement, le taux de remise à l’état naturel de parcelles privées occupées illégalement par des habitats légers installés de manière permanente est extrêmement faible, soit une opération réussie par an environ. Au demeurant, le régime de la prescription triennale des infractions en matière d’urbanisme contribue à figer la situation dès lors qu’aucune modification substantielle n’est apportée aux installations en question.
Eu égard à la pression foncière dans les régions où ce phénomène s’est développé (notamment dans les bandes de littoral), les solutions de repli conduisent aujourd’hui principalement à un « reroutage » vers les terrains aménagés, qui font eux-mêmes l’objet d’une forte pression.
II. — DES ZONES D’OMBRE RÉGLEMENTAIRES QUI FAVORISENT LA DILUTION DES DROITS ET DEVOIRS DE CHACUN DES ACTEURS
Le statut et la réglementation applicables aux habitats légers de loisirs et aux terrains susceptibles de les accueillir se caractérisent par une articulation complexe, qui ouvre la voie à des pratiques fort disparates, elles mêmes susceptibles de générer certaines dérives.
La mission a pris soin de recevoir l’ensemble des acteurs du secteur et a pu ainsi recueillir leurs points de vue, parfois contradictoires, sur l’évolution en cours de certains comportements. Il en ressort la nécessité impérative de réaffirmer deux objectifs essentiels : d’une part, la préservation des paysages et de l’environnement et la maîtrise d’une certaine forme d’urbanisation non contrôlée ; d’autre part le refus de l’habitat permanent au sein d’habitats et de structures dédiées aux loisirs.
Les travaux de la mission ont enfin permis de dégager trois grandes problématiques, autour desquels se concentrent aujourd’hui les principaux problèmes liés à l’habitat léger de loisir : la nature des relations contractuelles sur les terrains aménagés, le risque de parcellisation des terrains de camping, une clarification en matière de fiscalité des habitats immobilisés.
A. — UN TRIPLE POINT DE VUE À PRENDRE EN CONSIDÉRATION
1. Les aspirations contradictoires de la clientèle et des usagers
Le camping itinérant a longtemps fait l’objet d’une perception négative, d’autant plus accentuée lorsqu’il s’exerçait sous une forme « sauvage ». Les craintes suscitées par certains campements improvisés, assimilés au nomadisme des gens du voyage, ont longtemps perduré. En 1967, le secrétaire d’État au Tourisme Pierre Dumas menaçait même d’interdire complètement la pratique « libre » du camping – c’est-à-dire en dehors des terrains aménagés.
Il faut bien reconnaître que cette pratique a été fortement canalisée au cours des quarante dernières années. Les exploitants de terrains de camping, qui avaient un intérêt objectif à accueillir cette clientèle de passage, ont pleinement participé de ce mouvement, à côté des pouvoirs locaux qui ont souvent été à l’initiative de la création de campings municipaux. Le mouvement associatif a également joué un rôle crucial : on rappellera l’initiative du « Plan camping » de la Fédération française de camping-caravaning, en plein cœur des années 1970.
Depuis lors, la popularisation d’habitats de loisirs tels que la caravane « tout confort », ou plus tard le mobile-home, a également contribué à sédentariser les populations de campeurs : en effet, ces habitats ne permettent plus vraiment le bivouac... Et s’il persiste aujourd’hui une certaine forme de mobilité avec la caravane, celle-ci consiste bien davantage à pouvoir changer le cas échéant de lieu de vacances d’une année à l’autre.
Le camping s’exerce donc désormais majoritairement au sein de structures collectives, sur un territoire délimité et organisé. On peut même considérer qu’il existe à l’égard des gestionnaires de terrain, une certaine demande sécuritaire qui va de pair avec un mode de vie à la fois saisonnier et sédentaire.
Si l’on excepte le camping sous la tente, qui semble connaître un regain de faveur avec l’apparition de nouveaux modèles faciles à installer et replier, le camping-car est aujourd’hui le seul véritable habitat léger qui permet encore l’itinérance. Des réticences manifestes s’expriment toutefois à son encontre et elles ne sont pas sans rappeler, jusqu’à un certain point, celles à propos du camping sauvage d’il y a cinquante ans.
b) Pratiques individuelles et effet de groupe
Loin de s’opposer, ces deux phénomènes sont souvent complémentaires et leur réalité transcende le clivage entre itinérance et sédentarité.
Au sein même des terrains de camping, les campeurs sédentarisés recréent des espaces privatifs et le fait de partager avec les autres campeurs la jouissance des équipements collectifs n’empêche pas la personnalisation et la délimitation affirmée de l’emplacement, qui peut prendre différentes formes : paravents, cabanon, jardinet, terrasse.
Cette personnalisation est d’autant plus forte que l’implantation est permanente, lorsque le campeur loue son emplacement à l’année et renouvelle plusieurs fois son contrat. On verra même que l’ultime avatar de cette logique consiste à vouloir acquérir son terrain, tout en demeurant au sein de la structure collective.
C’est dans une perspective totalement différente que s’inscrit le « camping-cariste », qui revendique d’emblée un certain individualisme et une volonté de s’approprier tous les espaces, non seulement pour les traverser mais encore, si la vue est belle et le cadre paisible, pour s’y attarder. L’occupation des espaces les plus recherchés n’est cependant pas sans poser problème dès lors qu’elle conduit à l’émergence d’attroupements récurrents.
Cette « déferlante » concerne principalement certaines stations touristiques côtières, qui voient se peupler leurs aires de stationnement au cours de certaines périodes de l’année sans toujours disposer des infrastructures adaptées afin, de faire face aux exigences contradictoires de ces populations de passage.
La « masse sociale » du camping en France, soit sept millions de personnes, auxquelles il faut ajouter plus de trois millions de touristes étrangers (19), est traversée d’aspirations contradictoires.
En comparaison, la Fédération française de camping-caravaning, (FFCC), qui se veut depuis 1938, le principal relais des campeurs auprès des acteurs du secteur, représente, tous hébergements de plein air confondus, 130 000 adhérents, essentiellement des caravaniers et des camping-caristes.
Il ne s’agit pas de remettre en cause le rôle actif et bénéfique que joue aujourd’hui cette fédération, qui a toujours pleinement participé aux diverses instances de concertation mises en place autour de l’activité « camping », simplement d’insister sur le fait qu’avec la diversification des pratiques, il est de plus en plus difficile de se faire une idée précise du « campeur type ».
Les difficultés rencontrées par certains campeurs, s’agissant des relations contractuelles au sein des terrains de camping, sont ainsi de plus en plus directement relayées par certaines associations de consommateurs, qui dénoncent les pratiques abusives des professionnels du secteur. Des regroupements de consommateurs mécontents s’effectuent également à la base – voir notamment l’association « Mobil’homisez-vous ».
En tout état de cause, la démarche des campeurs reste, sur le plan des revendications, essentiellement individualiste et l’intervention du mouvement associatif est de portée limitée (les terrains gérés par des associations loi 1901 ne concernaient plus en 2008 que 4% du nombre total d’emplacements).
Il faut par ailleurs garder à l’esprit que la demande reste forte, que les emprises foncières deviennent de plus en plus rares dans les zones demandées et que, de ce point de vue, les gestionnaires de terrains occupent une position de force tandis que les campeurs se trouvent parfois en position de rivalité entre eux.
2. L’adaptation de l’offre à la demande
a) Les gestionnaires de terrains privés
Avec plus de 100 millions de nuitées annuelles, pour un chiffre d’affaires d’environ 1,6 milliard d’euros, l’hôtellerie de plein air constitue un acteur de premier plan de l’économie touristique, qui peut s’enorgueillir d’une vraie capacité de résistance aux effets de la crise économique, du fait de son coût relativement modéré par rapport à d’autres formes d’hébergement touristique.
La force de l’hôtellerie de plein air repose en premier lieu sur sa capacité d’adaptation en matière de mode d’exploitation. Le fait que la réglementation applicable se montre globalement souple à ce sujet constitue, selon la profession, un véritable atout car il permet, mobilité des hébergements aidant, de s’adapter en temps réel aux demandes de la clientèle.
Un second avantage réside dans le fait que la réglementation du camping en France conduit les gestionnaires de terrains aménagés à disposer, moyennant certaines dérogations mineures, d’un monopole de droit sur l’implantation de certains habitats légers très demandés, comme le mobile-home, qui leur permet de capter à la fois la clientèle traditionnelle du camping et celle, plus récente, qui a tendance à se sédentariser. Dans certaines régions où la pression foncière est particulièrement forte, elle satisfait ainsi une clientèle qui n’a pas les moyens d’investir dans une résidence secondaire.
Ce phénomène récent engendre parfois des transformations dans les relations entre gestionnaires et usagers de longue durée. Là où, traditionnellement, le gestionnaire se comportait dans l’enceinte de son camp tel le « gardien du règlement intérieur », la clientèle qui loue un emplacement de longue durée pour y implanter une installation de type « mobile-home » a de plus en plus tendance à s’approprier le territoire qu’elle occupe. Les contentieux à ce sujet vont croissant.
Un troisième atout consiste enfin dans la structuration de la profession, notamment autour de la Fédération nationale de l’hôtellerie de plein air (FNHPA) et de l’Union nationale des Parcs résidentiels de loisirs (UNAPAREL). La FNHPA compte ainsi plus de 4 000 adhérents individuels gestionnaires de terrains.
Ces fédérations professionnelles jouent indiscutablement la carte de la qualité et participent de ce fait à la valorisation de leur activité, qu’il s’agisse des questions d’ordre paysager, de la réforme des tableaux de classement ou encore de la sécurisation des relations contractuelles avec leurs usagers.
b) Les fabricants et distributeurs de véhicules de loisirs (20)
On ne saurait négliger la place essentielle qu’occupent les fabricants et les distributeurs de véhicules de loisirs dans l’économie du secteur.
Cette industrie constitue une activité non négligeable pour l’économie française : elle emploie directement 7 000 personnes (sous-traitance non comprise) et, du fait des coûts de transport et d’acheminement du « produit fini », demeure principalement localisée sur le territoire national.
L’activité de distribution est également à prendre en considération : elle emploie 5 000 salariés pour 430 entreprises, répartis sur 630 points de vente.
Aidés par la dimension du marché français (environ un tiers du marché de l’Union européenne), les constructeurs nationaux se situent aujourd’hui au premier rang des constructeurs européens. Certains de ces constructeurs couvrent l’ensemble du secteur, d’autres sont davantage spécialisés : on citera notamment le groupe Trigano, pionnier en matière d’équipements de camping, mais également les groupes Bénéteau, Pilote, Hymer ou Rapido, qui déclinent leur activité sous différentes marques commerciales : Chausson, Caravelair, Bürstner, IRM O’Hara, etc.
Au cours des dernières années, force est de constater l’indéniable sophistication des équipements qu’ils ont mis sur le marché, en particulier s’agissant du mobile-home. Aux vieux modèles anglais importés à la fin des années 1970, pour tout dire assez peu esthétiques, se substituent aujourd’hui des modèles avec toit à double pente, construits avec des matériaux recyclables, mieux isolés, plus fonctionnels.
Les données (21) fournies par le syndicat des véhicules de loisirs (UNI-VDL) permettent mieux de se faire une idée exacte de ce marché :
→ Le parc français de camping-cars est estimé aujourd’hui à plus de 200 000 véhicules en circulation (500 000 pour l’ensemble de l’Europe). Il a enregistré en 2008 environ 22 000 immatriculations de véhicules neufs (contre 85 000 pour l’Europe) et 40 000 immatriculations de véhicules d’occasion.
→ Le parc de caravanes s’élève à 844 800 véhicules, soit 3,3 % des ménages français (on dénombre 4 millions de caravanes en Europe). Plus de 10 000 immatriculations ont été enregistrées en 2008/2009 (100 000 en Europe). Contrairement à l’idée reçue, la caravane continue donc de se vendre.
→ Le recensement des mobile-homes est moins précis : on estime néanmoins leur nombre en France à près de 400 000 unités (dont près de 220 000 appartenant à des particuliers), étant entendu qu’au cours des dernières années il s’est vendu environ 25 000 mobile-homes par an. Après une croissance exponentielle dans les années 1990, la tendance au début 2010 semblait toutefois être très nettement à la baisse (de l’ordre de 25 %).
Le marché du mobile-home se distingue des caravanes et camping-cars à trois titres :
– Tout d’abord, en l’absence d’immatriculation (rappelons qu’il s’agit d’un véhicule que le code de la route interdit de faire circuler) des équipements neufs et d’occasion, il est beaucoup plus difficile d’estimer sa dimension exacte.
– Ensuite, on observe en fait trois types de commercialisation :
- directement par le constructeur, lorsque celui-ci passe un accord avec un terrain de camping qui les exploite sous régime hôtelier,
- par un distributeur spécialisé lorsque la vente est effectuée auprès d’un particulier,
- le cas échéant, par une société liée au terrain de camping qui proposera à sa clientèle une offre complète de type « achat du mobile-home + contrat d’occupation d’un emplacement ».
– Enfin, la vente d’un mobile-home est intrinsèquement liée au fait qu’il ne peut être implanté qu’au sein d’un terrain de camping ou d’un parc résidentiel de loisirs. Ceci explique du reste que le dernier type de commercialisation ait fortement tendance à se développer, l’acheteur devant avoir la certitude qu’il trouvera un lieu de destination approprié.
On notera, pour conclure cette présentation, qu’en partenariat avec les professionnels du secteur de l’hôtellerie de plein air, les constructeurs de véhicules de loisirs ont engagé récemment une réflexion approfondie sur le démontage et le recyclage des équipements hors d’usage.
3. L’intervention des pouvoirs publics
a) Le contrôle de la légalité des installations
Ce sont essentiellement les pouvoirs locaux et les services déconcentrés de l’État, compétents en matière d’instruction et de délivrance du permis d’aménager, qui se doivent de faire respecter la réglementation relative aux terrains aménagés. Ce sont également ces mêmes autorités qui sont en première ligne dans la constatation des infractions relatives au camping sur parcelles privées.
S’agissant des terrains aménagés, il ressort des rencontres effectuées auprès des élus et des services déconcentrés de l’urbanisme que si le contrôle effectué en amont s’avère satisfaisant, il est très difficile d’aller voir à l’intérieur des terrains ce qui s’y passe en aval. Les pouvoirs publics concentrent en fait leurs missions sur les questions de police, d’hygiène, de sécurité et de salubrité publique, ce qui n’est déjà pas négligeable.
Pour le reste, ils disposent souvent de peu de marges d’action, notamment pour les infractions en matière d’urbanisme au sens large (modifications progressives apportées à l’aménagement, respect du cadre naturel et paysager, repliement des installations dans certaines zones protégées, installation sur les emplacements de terrasses ou cabanons divers, etc.).
S’agissant des parcelles privées, la question se pose davantage en termes de tolérance par rapport à l’existant. Les situations acquises sont en effet difficiles à remettre en cause et l’élu local préfère souvent fermer les yeux plutôt que de s’engager dans la spirale du contentieux pénal. Au demeurant, il résulte régime de prescription triennale des infractions en matière d’urbanisme que l’action pénale ne peut souvent plus être engagée, sauf si des modifications substantielles sont apportées au « campement ».
Mieux lutter contre les infractions en matière d’urbanisme :
un nouveau dispositif mis en place par la loi Grenelle II
L’article L. 480-14 du code de l'urbanisme autorisait le maire à saisir le tribunal de grande instance pour lui demander d’autoriser la démolition ou d’imposer la mise en conformité d’un bâtiment édifié sans permis. Cette règle demeurait cependant de portée très limitée : d’une part, elle ne s’appliquait que dans les secteurs soumis à un risque naturel prévisible où il est évidemment essentiel de faire respecter les règles d’urbanisme ; d’autre part, elle ne concernait que les constructions, ce qui excluait les installations légères de loisirs irrégulièrement implantées, telles que le mobile-home.
Un amendement adopté dans le cadre du Grenelle II, à la suite des travaux de la mission, permet de lever ces limitations et autorise le maire à intervenir, avec l’accord du juge, pour mettre fin aux constructions irrégulièrement édifiées et à toutes les constructions et installations irrégulières (article 34 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement).
b) Une fonction régulatrice en transition
La réforme du classement, introduite par la loi du 22 juillet 2009, qui supprime les comités départementaux d’action touristique, qui confie à Atout France la définition des nouveaux tableaux de classement et qui prévoit une nouvelle procédure faisant intervenir des organismes de certification accrédités, est définitivement entrée en vigueur avec la parution des arrêtés du 6 juillet 2010.
Il est cependant difficile de mesurer dès aujourd’hui sa portée, d’autant que les classements en vigueur ne tomberont définitivement qu’en 2012.
Il convient toutefois de noter une certaine inquiétude des services préfectoraux et des élus locaux, perceptible lors des auditions de la mission, au sujet de la capacité de récoler les informations dont ils disposent sur les terrains aménagés avec celles relatives à leur exploitation commerciale.
Une autre inquiétude s’est manifestée au sujet du caractère désormais facultatif du classement. Or, en l’état des dispositions du code de l’urbanisme, l’obtention du classement conditionne l’ouverture des terrains. Par ailleurs, selon le même code, les mobile-homes ne peuvent être implantées que dans les terrains classés au sens du code du tourisme.
Si une clarification s’impose manifestement auprès des pouvoirs publics chargés de faire appliquer la réglementation, il semble en tout état de cause nécessaire de maintenir ces dispositions et de faire en sorte que le classement demeure en pratique systématique pour les terrains nouveaux (ou substantiellement réaménagés), qui accueillent des résidences mobiles et des habitations légères de loisirs.
Bien qu’il s’inscrive désormais principalement dans une optique commerciale, le classement est une garantie de maintien en bon état de la structure collective, qui peut permettre de conjurer efficacement la crainte d’une « cabanisation » délabrée.
La réforme de 2009 n’a pas vocation à affaiblir le pouvoir de contrôle des services de l’État, mais au contraire à les concentrer sur leurs missions essentielles afin que ces dernières soient mieux assurées. Aussi convient-il de veiller à ce que la refonte imminente du code de l’urbanisme (22) apporte toutes les garanties de contrôle aux pouvoirs publics s’agissant de l’aménagement des terrains de camping, selon leurs différents modes d’exploitation.
Au demeurant, l’article 14 de la loi du 22 juillet 2009 prévoit un premier bilan de la mise en œuvre de la nouvelle procédure de classement d’ici le mois de juillet 2011 : il s’agira alors d’apprécier l’opportunité de rendre à nouveau obligatoire le classement. Cette question mérite une veille attentive.
c) La régulation du stationnement des camping-cars : une mission impossible ?
Il s’agit indiscutablement d’un sujet d’inquiétude pour les élus des communes touristiques « prises d’assaut » à certaines périodes de l’année. Le sujet s’avère cependant difficile à traiter au niveau de la réglementation générale car il faut reconnaître la nature ponctuelle et localisée du phénomène.
Trois codes réglementent la circulation et le stationnement du camping-car, à la fois véhicule de catégorie M1 (23) soumis au droit commun (il est conduit avec un permis B) et mode d’hébergement léger assimilé à la caravane :
- le code de la route en ses articles R. 417-1 et suivants, sur le domaine public ;
- le code général des collectivités territoriales (CGCT), en ses articles L. 2212-2, L. 2213-2-2 et L. 2213-4, pour le stationnement sur la voie publique ;
- le code de l’urbanisme pour le stationnement sur le domaine privé, dans des conditions identiques à celles applicables aux caravanes.
À la suite de l’interdiction par plusieurs maires du stationnement des camping-cars sur l’ensemble du territoires de leurs communes, une circulaire interministérielle du 19 octobre 2004 est venue rappeler la portée et le contenu des différentes dispositions législatives et réglementaires, permettant de fonder les décisions éventuelles des autorités locales en matière de stationnement de ces véhicules.
En vertu de ses pouvoirs de police, le maire peut ainsi limiter la circulation et le stationnement de certains véhicules mettant en cause la tranquillité publique, la qualité de l’air, la protection d’espèces animales ou végétales ou d’espaces protégés, la mise en valeur de paysages ou de sites, en application de l’article L. 2213-4 du CGCT. Cependant, lesdits véhicules ne sauraient être privés du droit stationner dès lors que leur arrêt n’est ni dangereux (article R. 417-9 du code de la route), ni gênant (articles R. 417-10 et R. 417-11 du même code), ni abusif (articles R. 417-12 et R. 417-13).
Des limitations à la durée de stationnement peuvent également être apportées : rappelons notamment que la règle générale proscrit tout stationnement au même endroit pour une durée excédant sept jours et que le maire peut réduire cette durée par un arrêté municipal motivé. Ce droit est accordé par l’article R. 411-8 du code de la route, dès lors que la sécurité de la circulation routière l’exige.
Ce faisant, toute interdiction doit être fondée sur des circonstances locales avérées et doit être expressément motivée afin de ne pas être entachée d’illégalité. La jurisprudence du Conseil d’État s’est toujours montrée hostile aux interdictions générales et absolues. L’interdiction doit être établie dans une proportionnalité acceptable et ne pas être excessive par rapport au trouble considéré.
Toute mesure de restriction doit concerner l’ensemble des véhicules de même gabarit, masse et poids : c’est pourquoi une mesure d’interdiction ne saurait concerner les seuls camping-cars. Ainsi la limitation de l’accès des camping-cars aux parkings par des barres de hauteur est-elle considérée comme illégale.
Par ailleurs, la circulaire de 2004 ne fait pas de distinction entre le stationnement diurne et le stationnement nocturne. L’invocation du risque de stationnement d’un véhicule occupé ne suffit pas à justifier l’interdiction mais l’autorise néanmoins dans les zones particulièrement sensibles, « tout en préservant le droit à une halte nocturne en quelque endroit de la commune ».
Ce dernier point mérite particulièrement d’être souligné car il se situe à la lisière de la distinction entre le stationnement de type « véhicule classique » et la pratique du camping. Le statut hybride du camping-car, mi véhicule, mi habitat, permet ainsi de faire écran, eu égard aux limitations apportées par la réglementation à la pratique du camping sur la voie publique. La frontière entre véhicule et habitat léger est par ailleurs particulièrement ténue puisque le moindre déploiement d’un début d’installation (une table et des chaises) autour des véhicules suffit en revanche à requalifier le stationnement en camping.
Profitons-en pour rappeler que sur un terrain de camping ou sur n’importe quel autre terrain privé, le camping-car est considéré pleinement comme une caravane.
Si les camping-caristes rechignent parfois à stationner au sein des terrains aménagés, nonobstant les arguments déjà évoqués, c’est qu’ils considèrent ne pas avoir à s’acquitter de la location d’un emplacement de camping pour un simple stationnement d’une nuitée, alors qu’ils ne souhaitent pas bénéficier de l’ensemble des prestations offertes par la structure collective. Tenant compte de cette réticence, un arrêté du 12 avril 2000 (24) a ouvert la possibilité pour un exploitant de terrain de camping de construire des emplacements réservés aux camping-cars à l’entrée de son terrain, offrant ainsi des prestations réduites.
Quelle marge reste-t-il alors aux collectivités locales pour réguler le stationnement ? Elles peuvent réaliser des aires de services ou de stationnement mais sont confrontées à une difficulté majeure : dans la mesure où il n’existe pas de définition précise de ce type d’aire, aucun standard de qualité n’est exigé et il n’existe pas de catégorie intermédiaire entre le parking public, ouvert à tous, et le terrain de camping. Accessoirement, de tels investissements ont un coût et il s’avère difficile en pratique de le faire supporter aux principaux intéressés qui, lorsqu’ils stationnent sur la voie publique, ne sont, du reste, pas redevables de la taxe de séjour.
Stationnement des camping-cars : que font les autres pays européens :
Différente d’un pays à l’autre, la réglementation du stationnement des camping-cars varie d’abord du fait des réglementations différentes applicables au stationnement en général. Du reste, cette question n’est pas systématiquement gérée au niveau de l’État central : ainsi la réglementation varie-t-elle en Suisse selon les cantons tandis qu’en Belgique, sont distinguées des villes « à zone bleue », où il faut se procurer un disque pour pouvoir stationner.
Le Royaume-Uni autorise le stationnement sans difficulté sur l’ensemble du territoire, sauf interdictions particulières assez limitées. En revanche, en Suède, le stationnement est très réglementé. En Allemagne, les emplacements sont souvent personnalisés, y compris lorsqu’il est possible d’y accéder librement.
Les pays du sud de l’Europe ont privilégié, au cours des dernières années, la voie du stationnement sur des aires équipées. Le stationnement est ainsi possible au Portugal sur les parkings situés aux abords des villes ou des plages et l’Espagne a équipé les parkings de ses complexes sportifs. Une solution expérimentée en Italie consiste à prévoir des aires en périphérie des centres touristiques et à assurer, par un service de navettes, l’accès auxdits centres, souvent piétonniers. 900 aires sont répertoriées et réputées pour la modernité de leurs équipements. Cela ne peut cependant concerner qu’un segment spécifique de villes…
B. — PRÉVENIR LES DOMMAGES COLLATÉRAUX D’UN DÉVELOPPEMENT DÉSORDONNÉ ET D’UN USAGE INAPPROPRIÉ
1. La préservation des paysages et de l’environnement et la nécessaire maîtrise d’une urbanisation « rampante »
Il s’agit de considérer cette question sous le double aspect de l’impact direct des habitats légers et des conséquences liées à l’aménagement des terrains pouvant les accueillir.
a) L’impact direct des habitats légers
Historiquement, c’est avec la sédentarisation de caravanes ou de cabanons sur des terrains situés dans des zones sensibles, en particulier en bordure de littoral, qu’ont émergé les premiers contentieux liés aux habitats légers de loisirs. On se souvient notamment des polémiques autour des caravanes de l’île d’Oléron et de l’île de Ré, qui ont nourri jusqu’à une date récente la réflexion autour du statut même des habitats légers et sur leur mobilité effective.
Le respect de la réglementation imposant aux caravanes de conserver en permanence leurs moyens de mobilité et de ne pas stationner au même endroit plus de trois mois dans l’année aurait dû exclure a fortiori des dérives de ce type. En pratique, néanmoins, il s’est avéré extrêmement difficile de faire constater aussi bien la perte effective des moyens de mobilité que la durée effective du stationnement, lorsque celle-ci n’était pas continue.
Si l’on tient compte par ailleurs du régime de prescription triennale applicable aux infractions en matière d’urbanisme et, le cas échéant, de la tolérance à laquelle ces infractions ont parfois donné lieu avant que ne s’engage à leur égard une politique active de résorption, certaines situations locales sont devenues particulièrement inextricables.
L’implantation progressive de mobile-homes en lieu et place des caravanes n’a fait qu’entretenir ce type de contentieux, d’autant qu’il n’existait pas de définition propre à ce type d’habitat léger et qu’il était assimilé à une caravane dès lors qu’il conservait ses moyens de mobilité.
Depuis le 1er octobre 2007, les mobile-homes ne peuvent plus être installés que dans les terrains aménagés, de telle sorte qu’un habitat de ce type installé sur une parcelle privée peut être d’emblée considéré comme une construction édifiée sans autorisation, ce qui facilite considérablement les constats d’infractions.
Ce faisant, la diffusion à grande échelle des mobile-homes a fini par poser également des problèmes au sein même des terrains aménagés, dès lors qu’ils pouvaient être implantés indifféremment des tentes et des caravanes sur des emplacements nus (à la différence des habitations légères de loisirs, dont le quota est réglementairement fixé à 20 % des emplacements au maximum).
Aussi l’interrogation principale porte-t-elle aujourd’hui sur la possibilité de limiter l’implantation des mobile-homes au sein des terrains aménagés.
Dans un arrêt de 2007 (25), le Conseil d’État a admis qu’il était envisageable de prévoir dans les documents d’urbanisme, « aux fins de préserver les sites et de protéger l'environnement, et compte tenu des particularités de ces modes d'hébergement, que le nombre des emplacements occupés par des résidences mobiles de type « mobile homes » dans les terrains de camping autorisés ne [dépasse pas] une certaine limite par rapport à la capacité globale d'accueil de ces terrains dans une zone naturelle à protéger ». Cette jurisprudence concerne la situation antérieure au 1er octobre 2007 mais semble devoir ne pas être remise en cause du fait des modifications réglementaires intervenues depuis.
Dans un arrêt du 8 septembre 2009 (26), la Cour de cassation, appelée à préciser le champ d’application de l’autorisation prévue à l’article L. 341-10 du code de l’environnement (27), a par ailleurs considéré que le propriétaire d’un camping situé dans un site classé, qui avait installé des résidences mobiles de loisirs sans avoir obtenu l'autorisation spéciale susmentionnée, soutenait à tort que cette autorisation n'était pas nécessaire dès lors qu'il était autorisé à stationner des caravanes et à déterminer leur emplacement, et que l'implantation de mobile homes ne nécessitait pas de permis de construire. La Cour a retenu « qu'à la différence des caravanes, les maisons mobiles, qui avaient l'apparence de chalets de plain-pied, étaient installées en permanence. » La Cour a ainsi considéré que le regroupement de ces résidences mobiles modifiait substantiellement l'aspect du site.
L’implantation de résidences mobiles de loisirs, lorsqu’elle constitue une extension des zones d’occupation pérenne au sein des terrains aménagés, semble donc pouvoir être limitée dans les secteurs fragiles, quand bien même la réglementation des terrains aménagés ne prévoit pas explicitement de limitation à leur encontre.
b) L’insertion paysagère des terrains aménagés
Eu égard au fait que les mobile-homes et les habitations légères de loisirs ne peuvent être implantés qu’au sein des terrains aménagés, la dimension paysagère et environnementale liée à l’installation de ces habitats passe aussi par un meilleur encadrement réglementaire des conditions d’aménagement desdits terrains.
Dans cette perspective, le décret de 2007 qui a organisé le nouveau permis d’aménager a édicté des normes plus rigoureuses d’insertion de ces équipements dans les paysages, applicables aux terrains de camping (article R.111-45 du code de l’urbanisme) et aux parcs résidentiels de loisirs (article R.111-46 du même code).
L’article R. 441-3 du code de l’urbanisme impose ainsi une prise en compte de l’état initial du terrain et de ses abords en indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants. La demande doit également présenter les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages. En particulier, une notice doit être jointe à toute demande de permis, qui précise les moyens envisagés afin de :
- limiter l'impact visuel depuis l’extérieur des installations ;
- répartir les emplacements au sein d'une trame paysagère ;
- assurer l'insertion des équipements et bâtiments collectifs ;
- organiser les circulations à l'intérieur du terrain.
Les mesures appropriées sont définies aux articles A. 111-7 et suivants, issus de l’arrêté du 6 octobre 2007 : mise en place de haies arbustives, bandes boisées ou talus, proscription des alignements excessifs d’hébergements légers, homogénéité de mobilier urbain, organisation des circulations, etc.
Ces dispositions ne peuvent toutefois s’appliquer, en l’état, qu’aux terrains créés après le 1er octobre 2007, ou faisant l’objet de réaménagements conséquents nécessitant l’obtention d’un nouveau permis. Demeurait la question de la « mise aux normes » des terrains de camping existants, qui a été résolue par l’adoption, dans le cadre de la loi Grenelle II, d’un dispositif transitoire.
La mise aux normes des terrains aménagés existants en matière d’insertion paysagère :
un dispositif transitoire mis en place par l’article 35 de la loi Grenelle II
Un amendement adopté dans le cadre du Grenelle II, à la suite des travaux de la mission, après concertation avec les représentants de l’hôtellerie de plein air, prévoit, pour les terrains de camping anciens qui ne respectent pas les nouvelles normes, que leurs propriétaires sont tenus de déposer à la mairie leur projet de réaménagement dans un délai de 3 ans à compter de la publication de la loi. Ils doivent avoir réalisé les travaux dans un délai de huit ans à compter de la même date. Passé ce délai, le maire, et à défaut le préfet, pourra ordonner la fermeture du camping jusqu’à sa mise aux normes.
2. Le refus de l’habitat léger de loisir comme habitat permanent
Si l’on s’en tient à la définition par le code du tourisme et par le code de l’urbanisme de la destination des habitats légers de loisir et de la fonction des terrains aménagés, la possibilité d’un habitat permanent au sein de ces structures semble exclue en principe :
- d’une part, les terrains aménagés pour accueillir des habitats légers ont vocation à accueillir en leur sein une clientèle qui n’y élit pas domicile ;
- d’autre part, au terme de leurs définitions respectives, les trois grandes catégories d’habitats légers de loisir que constituent la caravane, le mobile-home et l’habitation légère de loisir sont destinées à une occupation temporaire ou saisonnière à usage de loisir.
Eu égard à la réalité des faits, quelles sont donc les conditions qui rendent possible l’habitat léger comme mode d’hébergement permanent ?
a) L’impossible contrôle efficace des « dérives »
L’énoncé de la double règle supposée empêcher l’habitat léger permanent (non domiciliation, occupation temporaire) n’est pas sans renvoyer à une véritable difficulté de mise en œuvre pratique du fait :
- de la non concordance des notions de domiciliation et d’occupation, qui autorise le cas échéant la concomitance d’une absence formelle de domiciliation et d’une occupation effectivement permanente ;
- de la difficulté de définir précisément l’usage de loisir autrement que par un faisceau d’indices rétrospectifs.
Considérons par ailleurs l’habitat permanent non plus seulement à partir de la double règle de non domiciliation sur le terrain et d’occupation temporaire de l’habitat, mais au regard des paramètres suivants :
- la propriété de l’habitat léger,
- le rapport entre la mobilité de l’habitat et celle de l’habitant ;
- le caractère voulu (ou subi) pour l’habitant du recours à l’habitat léger ;
- la légalité des conditions d’implantation de l’habitat.
Ces paramètres renvoient, au-delà de ce que la réglementation autorise en de jure et/ou de facto en matière d’habitats légers, à des pratiques sensiblement différentes les unes des autres.
On distinguera notamment deux séries de comportements liés à l’usage d’un habitat léger, selon que le déploiement de ce type d’habitat s’effectue en dehors ou au sein des terrains aménagés prévus pour l’hébergement de loisir.
b) L’habitat léger permanent en-dehors des terrains aménagés : entre itinérance et illégalité
(i) Le cas particulier de l’habitat des gens du voyage : quand habitat permanent rime avec mobilité
Les habitats légers qui constituent l’habitat permanent des gens du voyage ne constituent pas à proprement parler, du point de vue de la réglementation, des habitats légers de loisirs. Quand bien même ils peuvent prendre matériellement une forme identique à certains habitats légers de loisir (essentiellement les caravanes), leur destination différente entraîne une qualification juridique distincte comme « résidences mobiles terrestres », qui sont supposées, aux termes notamment des lois de 1990 et 2000, être accueillies dans aires d’accueil spécifiques, voire même faire l’objet d’une taxation spécifique (28).
La mission ne s’est pas spécifiquement penchée sur ce statut très particulier, qui se situait à l’extrême limite de son objet d’étude. Elle renvoie aux travaux de la mission d’information, créée en septembre 2009 au sein de la commission des lois, portant précisément sur le bilan et l’adaptation de la législation relative à l’accueil et l’adaptation des gens du voyage, qui devrait rendre ses conclusions à l’automne 2010.
Tout juste est-il permis, à partir de cet exemple des gens du voyage, de faire remarquer qu’en pratique, la mobilité n’est pas incompatible avec ce qu’on appelle par ailleurs l’habitat permanent.
(ii) L’habitat permanent sur parcelles privées, entre sédentarisation et habitat précaire subi
Cette forme d’habitat permanent se trouve à la confluence de deux logiques : d’une part celle de certaines personnes nomades en voie de sédentarisation, d’autre part celle de populations précaires pour lesquels l’habitat léger constitue une forme d’hébergement subie, souvent du reste plus isolée.
On peut voir apparaître sur ces parcelles, selon les cas, des types d’habitats légers très différents, qui parfois, en dépit de leur immobilisation, ne se distinguent absolument pas des habitats implantés dans les terrains de camping. Se pose principalement, du point de vue réglementaire, la question de la légalité de ce type de campement, eu égard au régime d’implantation des habitats légers. Il est évident que ces situations précaires soulèvent bien d’autres problématiques.
c) L’habitat léger permanent au sein des terrains aménagés
Ce phénomène a déjà été évoqué au moment de décrire les différents ressorts de la sédentarisation des habitats légers de loisirs. Touchant principalement le pourtour des agglomérations (mais pas uniquement) et concernant de même des populations majoritairement précaires qui ne trouvent souvent pas à se loger ailleurs, on ne dispose pas de chiffres fiables à son sujet, et pour cause : ces populations sont « invisibles ».
Interrogée sur la perception qu’elle avait dudit phénomène, l’association Emmaüs France a indiqué ne pas avoir de véritable prise sur les personnes concernées, eu égard au fait que les cas d’urgence qu’elle a à traiter se situent généralement à un niveau de précarisation beaucoup plus important.
Dans son rapport sur le mal-logement déjà cité, la fondation Abbé-Pierre rappelle opportunément que l’habitat dans les campings ne concerne pas que les personnes en voie de précarisation mais qu’il peut aussi constituer une étape sur la voie de la resocialisation, pour ceux qui étaient « à la rue ».
Par ailleurs, les personnes qui ont recours à un tel mode d’hébergement constituent un véritable nuancier s’agissant aussi bien de leur situation (étudiants, travailleurs précaires, chômeurs, personnes isolées, familles, saisonniers, ouvriers de chantiers, etc.) que de leur mode d’hébergement (celui-ci étant par ailleurs conditionné par leur situation : habitat léger loué comme un meublé ou propriété de l’habitat, mobilité d’un terrain à l’autre tout au long de l’année ou sédentarité, habitat léger constituant un logement permanent seulement une partie de l’année, etc.).
En tout état de cause, la pérennisation d’un habitat permanent au sein de structures collectives initialement dédiées à une activité touristique procède pour partie de la responsabilité de certains gestionnaires de terrains ouverts à l’année, peu regardants dans un premier temps sur les modalités d’occupation, et qui peuvent par la suite se trouver facilement débordés par des situations de fait.
À défaut de pouvoir prévenir à court terme les dérives avérées en la matière, les pouvoirs publics peuvent sanctionner le gestionnaire, surtout si la pratique est dissimulée.
On peut aussi s’interroger sur l’opportunité de garder ouverts à l’année des terrains aménagés qui n’ont pas de véritable vocation touristique.
Enfin, il n’est pas à exclure non plus que le recours à ce type d’habitat soit parfois l’objet d’un choix délibéré, ou du moins qu’il ne soit pas totalement subi. Auquel cas cela amènerait à reconsidérer la vocation uniquement touristique des terrains de camping. Il s’agit en l’occurrence d’un choix de société.
C. — TROIS POINTS DE CRISPATION
1. Les relations contractuelles sur les terrains aménagés
Selon la Fédération française de camping-caravaning (FFCC), 220 000 mobile-homes sont aujourd’hui la propriété de particuliers. Ceux-ci ne pouvant les implanter que sur un terrain aménagé, classé au sens du code du tourisme, il est bien évident que l’installation pérenne de ce type d’habitat sur le lieu de destination spécifique qu’ils ont choisi revêt pour eux un enjeu majeur.
Cette clientèle est donc amenée à louer un emplacement à l’année, au sein d’un terrain aménagé. En l’état de la réglementation, la durée du contrat ne peut être supérieure à une année renouvelable dans les PRL ; dans les terrains de camping, en revanche, il n’existe pas de limitation de durée.
Avec la sédentarisation plus ou moins longue de certains habitats légers de loisirs, on a vu se multiplier, au cours des dernières années, les contentieux entre gestionnaires de terrains et les particuliers qui se plaignent de pratiques abusives de leur part.
On estime aujourd’hui à une centaine le nombre de contentieux en instance. Doit-on considérer pour autant qu’il s’agit d’un microphénomène ? Les particuliers considèrent plutôt que ce faible nombre de contentieux tient essentiellement à un rapport de force qui leur est foncièrement défavorable et les dissuade d’engager une action judiciaire, dès lors :
– que les exploitants de terrains disposent plus ou moins d’un monopole de fait sur l’installation des résidences mobiles ;
– que les emplacements sont rares et la demande forte pour pouvoir bénéficier d’une telle installation (souvent considérée par ses bénéficiaires comme une sorte de « simili résidence secondaire » saisonnière, à moindres frais) ;
– qu’un propriétaire de mobile-home recherche la stabilité, qu’en tout état de cause, le déplacement dudit mobile home a un coût non négligeable, en plus de son coût d’achat initial et que dans ces conditions, ledit propriétaire préférera céder aux exigences de l’exploitant plutôt que d’avoir à quitter son emplacement.
Quelles sont donc les pratiques abusives dénoncées par les particuliers ?
• De telles pratiques peuvent se manifester le cas échéant lors de la vente du mobile-home :
Des accords sont souvent passés entre l’exploitant d’un terrain et un distributeur particulier, afin d’homogénéiser le parc de véhicules installé sur une exploitation : le gestionnaire exige ainsi l’implantation de certains modèles et peut percevoir une commission sur le prix de vente, qui se répercute sur le prix payé par l’acquéreur. Les distributeurs, du reste, se plaignent également de cette situation et souhaiteraient une plus grande transparence entre prix publics et prix effectivement pratiqués.
L’opacité est d’autant plus facilement entretenue que la vente du mobile-home « brut » s’accompagne souvent de frais annexes (transport, installation), parmi lesquels il est difficile de distinguer ceux qui résultent de la prime versée au gestionnaire.
Au total, on constate parfois des écarts de prix conséquents que ne justifie pas le mode de distribution choisi. Il arrive même que certains exploitants de terrain commercialisent eux-mêmes des mobile-homes, moyennant certaines subtilités juridiques (sociétés distinctes avec représentants légaux identiques, etc.).
• Les principaux motifs de récrimination concernent toutefois le contrat d’occupation de l’emplacement :
Ce type de contrat est régi par le droit du louage de choses tel qu’il résulte des articles 1713 et suivants du code civil, aux termes desquels :
– d’une part, « on peut louer toutes sortes de biens meubles ou immeubles. »,
– et d’autre part, « Le preneur a le droit de sous-louer, et même de céder son bail à un autre, si cette faculté ne lui a pas été interdite. Elle peut être interdite pour le tout ou partie. Cette clause est toujours de rigueur. ».
En pratique, il s’agit la plupart du temps de contrats écrits d’une durée de douze mois renouvelable, et qui ne peuvent en aucun cas être assimilés à un bail d’habitation.
- Lors de la conclusion du premier contrat, un « droit d’entrée » est parfois exigé par l’exploitant, dont le montant exact est parfois dilué dans un ensemble de prestations liées à la mise en place de l’installation (raccordements, branchements, etc.).
- Lors de la renégociation du contrat, le renouvellement peut être conditionné par une augmentation du prix de la location, ou encore un changement d’emplacement. L’exploitant du terrain est en position de force pour imposer ses vues et le propriétaire de la résidence mobile cède souvent à ses desiderata dès lors qu’il ne veut pas quitter son emplacement.
- Lors de l’exécution du contrat, sont mises en cause les clauses relatives à la vétusté des installations, permettant à l’exploitant de contraindre le propriétaire à changer de mobile-home (il peut du reste y avoir parfois un intérêt économique direct lorsqu’il en assure lui-même la vente), ainsi que les clauses restrictives sur la sous-location, et plus généralement sur la jouissance de l’emplacement (nombre de personnes autorisées, etc.).
- Lors d’une éventuelle cession à un tiers, la cession du mobile-home implique la conclusion d’un nouveau contrat d’occupation entre l’exploitant et le nouveau propriétaire. L’exploitant peut en profiter le cas échéant pour récupérer l’emplacement à son profit.
- Enfin, la décision de non renouvellement fait l’objet d’une décision unilatérale et contraint le propriétaire de la résidence mobile à trouver un nouvel emplacement ailleurs.
• Interrogées sur les solutions éventuelles permettant de pallier ces dérives, les associations de consommateurs réclament à l’unisson un encadrement réglementaire des rapports entre les exploitants de terrains aménagés et les propriétaires de résidences mobiles de loisirs.
Ils proposent de rendre obligatoire la signature d’un contrat pluriannuel, comportant impérativement des indications relatives :
- à la désignation du loueur et du locataire de l'emplacement loué ;
- aux conditions de renouvellement et de résiliation du contrat ;
- au calcul, au montant et aux conditions de paiement et de révision « du loyer et des charges »;
- à l’information du locataire sur les normes techniques applicables au moment de l’installation et leur évolution ;
- aux critères et modalités d’appréciation de la vétusté de la résidence.
L’idée générale consisterait donc, pour ces associations, à imposer la conclusion d’un contrat-type, plus ou moins basé sur le modèle protecteur du bail d’habitation.
• Pour s’opposer à ce contrat-type obligatoire, les professionnels du secteur de l’hôtellerie de plein air mettent principalement en avant plusieurs arguments.
– La souplesse doit prévaloir comme mode de gestion et, en tout état de cause, l’exploitant doit pouvoir librement disposer de son sol. Cette libre disposition du sol par l’exploitant constitue du reste le meilleur moyen de lutter contre la « cabanisation ».
– La pluriannualité signifie l’entrée dans une logique d’habitation et ouvre le cas échéant la voie à l’habitat permanent.
– Dans l’optique du classement commercial, l’exploitant doit pouvoir contraindre l’utilisateur au respect de certains standards (voir notamment l’appréciation de la vétusté).
– Les prix doivent rester libres car ils sont le reflet de la gestion opérée par l’exploitant (évolution des équipements, investissements réalisés, etc.). Chaque gestionnaire doit s’organiser de la façon qu’il estime la meilleure, sachant qu’en dernier ressort, le succès commercial de son entreprise est de sa responsabilité.
– Les abus existent mais resteraient limités : en pratique, l’objectif de l’exploitant demeure de louer ses emplacements et il n’a donc aucun intérêt à pratiquer la « chasse aux mobile-homes privés ». Bien au contraire, les contrats d’emplacement loués à l’année lui procurent souvent un fond de trésorerie appréciable, qui contribue à l’équilibre financier de son exploitation.
c) Un début de solution par la voie amiable ?
• Une recommandation n° 05-01, relative aux contrats d’hôtellerie de plein air et aux contrats de locations d’emplacements de résidences mobiles, a été émise par la commission des clauses abusives (DGCCRF) le 23 juin 2005. Il en ressort notamment que doivent être considérées comme des pratiques abusives :
– le fait de la part du professionnel d’imposer au consommateur une limitation à la jouissance de son emplacement du fait de travaux réalisés sur ledit emplacement, hors urgence, en excluant tout droit à indemnité ;
– l’appréciation de l’état d’entretien ou de vétusté de la résidence mobile sans l’énoncé de critères objectifs ;
– la résiliation du contrat par le professionnel à bref délai, après envoi d’une mise en demeure, à défaut d’exécution par l’occupant d’une clause quelconque du « bail » ;
– l’obligation faite au propriétaire de la résidence mobile de verser une rémunération au professionnel, sans contrepartie de la part de ce dernier ;
– le versement par l’acquéreur d’une résidence mobile d’une commission, sans mentionner le service rendu en contrepartie par le professionnel ;
– l’exclusion de toute responsabilité du professionnel en cas d’événements survenant sur le terrain de camping et susceptibles de remettre en cause l’exécution du contrat ;
• À la suite de cette recommandation, les fédérations professionnelles se sont engagées dans une démarche de conciliation.
Sous le patronage du secrétaire d’État chargé du tourisme, la FNHPA et la FFCC ont élaboré le 27 novembre 2008 une charte de transparence du camping de loisir, qui vise à encourager une approche responsable de la location des emplacements, par delà la durée du contrat, à préciser les modalités d’accueil des hébergements appartenant aux clients sur l’emplacement loué et à clarifier les obligations relatives à l’usage de l’emplacement loué et du terrain de camping.
Cette charte, qui pose plusieurs grands principes, annonce par ailleurs l’élaboration d’un « contrat-type » à usage facultatif, dont le respect serait nécessaire à l’obtention d’un label qualitatif.
Parallèlement, a été créé un comité de conciliation regroupant les principaux acteurs du secteur, chargé de gérer en amont les éventuelles situations de contentieux.
L’UNAPAREL, associée au lancement de l’initiative mais considérant que la mise en place du contrat-type n’avançait pas assez vite, a également mis au point de son côté un contrat type, dès la saison 2009 (le contrat-type élaboré par la FNHPA venant pour sa part d’être officialisé au début de l’année 2010).
• L’intérêt de ces deux modèles de contrats, globalement assez proches, réside dans le fait qu’ils abordent, dans l’ensemble, les questions ayant suscité des contentieux. Ils ouvrent ce faisant la voie à des solutions intéressantes, telles que :
– l’obligation pour l’exploitant de racheter le mobile-home que le propriétaire a acquis par son intermédiaire, en cas de non renouvellement du contrat ;
– la clarification des frais à payer par l’occupant (fixation d’une redevance forfaitaire annuelle d’occupation et, le cas échéant de prestations individuelles à payer sur présentation de justificatifs) ;
– la clarification des conditions d’installation de l’habitat léger sur l’emplacement et des frais afférents, permettant de mieux détecter l’existence ou pas d’un droit d’entrée « non dû » ;
– la nécessité de renvoyer à des critères objectifs pour juger de la vétusté.
• Ces deux contrats se distinguent par ailleurs sur certains points :
– l’opportunité d’interdire la sous-location ;
– la portée pluriannuelle du contrat ;
– la définition, selon la durée totale d’occupation de l’emplacement, d’une quote-part de frais remboursables liés à l’installation et non amortis, en cas de non renouvellement du fait de l’exploitant ;
– les conditions dans lesquelles peut s’effectuer l’éventuelle cession du mobile-home à un tiers et les conséquences de cette cession s’agissant du contrat de mise à disposition de l’emplacement.
Ces deux initiatives doivent être saluées en tant que telles, ne serait-ce que parce qu’elles ont permis d’amorcer un début de dialogue et de réflexion commune entre les différents acteurs du secteur de plein air (y compris les constructeurs et distributeurs).
• Persistent aujourd’hui deux points importants de désaccord entre les représentants des exploitants et des propriétaires de mobile-homes.
Le premier, d’ordre général, porte sur le caractère facultatif du recours au contrat-type, qui prive celui-ci, selon les associations de consommateur, de toute portée réelle : seuls joueraient ainsi le jeu les exploitants qui ne commettent déjà pas d’abus.
Le second, plus spécifique, porte sur l’évolution du prix d’une année à l’autre, étant entendu que les uns souhaitent la mise en place d’un système indiciaire protecteur, là où les autres rejettent cette logique d’habitation, qui ne prend pas en compte la dimension économique que comporte inéluctablement l’exploitation d’un terrain de camping.
d) Un climat de défiance aux effets néfastes
Attestant de la montée en puissance des contentieux, deux arrêts récents de la Cour de Cassation traitent précisément des relations contractuelles entre exploitants de terrains de camping et propriétaires de mobile-homes.
Le premier (Civ. 3è, 13 mai 2009) indique opportunément que ce contrat doit respecter les principes généraux du droit de la consommation, et notamment la législation sur le refus de vente ou de prestations de services, auquel peut être assimilé le non renouvellement sans motif d’un contrat d’emplacement.
Le second (Civ. 3è, 10 juin 2009) invoque l’article L. 132-1 du code de la consommation (« sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. »). La Cour ne censure ce faisant comme abusives qu’un faible nombre de clauses contractuelles.
Les associations de consommateurs et de défense des propriétaires en tirent la conclusion qu’un encadrement de ces contrats par le biais d’une réglementation spécifique et contraignante est aujourd’hui nécessaire.
En tout état de cause, la multiplication des contentieux trouve aujourd’hui un débouché médiatique qui aboutit à entretenir un véritable climat de défiance, néfaste à l’activité du secteur. Les premiers à s’en plaindre sont les constructeurs et distributeurs de véhicules de loisir qui, nonobstant les effets de la crise économique, déplorent une forte chute des ventes de mobile-homes aux particuliers en 2009 et 2010, et l’imputent pour une large part à la perte de confiance de ceux-ci dans les exploitants.
2. Un risque à conjurer : la parcellisation des terrains de camping
a) Une mesure conservatoire pour dissuader la cession en pleine propriété
Est-ce également cette perte de confiance dans les exploitants qui a incité les particuliers, au cours des dernières années, à vouloir se porter directement acquéreurs d’emplacements au sein des terrains de camping pour mieux garantir la pérennité de leur installation ?
Les raisons de l’émergence d’un tel phénomène sont sans doute plus complexes et peuvent être recherchées tout autant dans le nouveau rapport des campeurs à l’occupation du sol que dans l’évolution du rapport entre la propriété et l’exploitation des terrains aménagés. Car pour qu’il y ait des particuliers qui achètent des parcelles de terrains de camping, encore faut-il que leurs propriétaires soient vendeurs…
La diversification des modes d’exploitation, des pratiques commerciales et des investisseurs a entraîné, au cours des dernières années, une profonde mutation dans la gestion des terrains de camping. Les emplacements nus ont cédé du terrain aux emplacements locatifs et aux emplacements résidentiels.
Un nouveau mode de gestion, largement inspiré de la promotion immobilière, s’affirme désormais, consistant à procéder à la parcellisation des terrains pour l’installation de mobile homes.
Cette parcellisation, qui vise à conserver la structure collective « camping » (elle seule permettant l’implantation desdits mobile-homes), tout en offrant à ses bénéficiaires la garantie d’une occupation pérenne non contrariée par des différends contractuels, a d’abord pris la forme d’une cession de parcelles en pleine propriété.
On pouvait légitimement s’interroger sur le caractère illusoire de cette « pleine propriété », dès lors que sa jouissance effective était conditionnée à son maintien dans le cadre d’une structure collective totalement indépendante : on assistait à la transformation des terrains de camping en sortes de « lotissements légers », en dehors de tout cadre légal.
Il importait de mettre un terme à ces opérations de mitage, pour lesquels des notaires établissaient des actes dont on avait peine à mesurer les conséquences à long terme. Ce fut l’objet d’un amendement adopté lors de la discussion du projet de loi de modernisation et de développement des services touristiques, qui a permis d’introduire dans le code de l’urbanisme une nouvelle disposition interdisant l’installation des mobile-homes sur « les emplacements de terrains de camping ayant fait l’objet d’une cession en pleine propriété » (article L. 443-3-1).
À défaut de pouvoir interdire la vente d’un terrain parcellisé, sauf à remettre en cause le droit de propriété, l’objectif a donc consisté à rendre sans objet la vente desdites parcelles : l’entrée en vigueur immédiate de cette mesure a clairement permis de stopper le phénomène de « vente à la découpe » et à ce titre, il convient de s’en féliciter.
b) Les voies détournées de la parcellisation
La parcellisation n’ayant toutefois pas été formellement interdite, la limitation portée à son développement a pu être aisément contournée au travers de deux procédés distincts : la multipropriété et l’emphytéose.
D’une part, la clientèle peut aujourd’hui encore se voir proposer l’ « acquisition » (en fait le droit à la jouissance) d’une parcelle en contrepartie de l’achat de parts sociales dans la société qui exploite le terrain aménagé. Ce mode de gestion, qui vient tout autant bouleverser le modèle économique des terrains de camping qu’une parcellisation effective, revient in fine à exploiter celui-ci comme un parc résidentiel de loisirs avec parcelles privées, selon des modalités qui apportent du reste assez peu de garanties sur les droits et obligations de chacun (exploitants, campeurs, propriétaires). Le terrain se trouvant être officiellement la propriété d’une seule personne morale, c’est le droit à la jouissance qui permet une occupation effective de longue durée. À la clé, se profile le risque d’une véritable dilution des responsabilités.
D’autre part, à défaut de pouvoir céder des parcelles, la conclusion de contrats de location de très longue durée (jusqu’à 30 ans), permet à certains propriétaires de terrains de présenter comme une forme de « simili propriété » un engagement contractuel qui s’apparente pour le propriétaire de mobile-home à une servitude pleine d’inconnues. À ce sujet, certaines publicités mises en avant par les professionnels du secteur au cours des derniers mois sont à proprement parler scandaleuses (« Devenez propriétaire de votre résidence secondaire » !) et entretiennent un malentendu permanent entre des gestionnaires qui gardent les prérogatives essentielles quant à la gestion de la structure « camping » et des « faux propriétaires » qui demeurent tributaires des premiers, s’agissant des conditions d’exploitation et des frais afférents que ceux-ci imposent.
La multipropriété et l’emphytéose relèvent finalement d’un mélange des genres formellement différent mais fondamentalement identique à la cession de parcelles : en pratique, ces opérations reviennent à créer, pour des hébergements dégradables, des lotissements précaires fondés sur une copropriété sans droit de vote des principaux intéressés.
L’émergence de projets d’aménagement de ce type implique du reste d’importantes conséquences à différents niveaux : baisse de la capacité d’hébergement par la sanctuarisation de l’offre, développement de conflits de divers ordres entre la clientèle « propriétaire » et les exploitants (qui entretient ? qui investit ? qui paye ?), risque de transformation en habitat permanent. Une telle dérive est de nature à hypothéquer à terme la pérennité des terrains de camping.
Le dispositif voté en 2009 se doit donc d’être amélioré sur le plan réglementaire.
Explications sur l’abrogation de l’article L. 443-3-1
du code de l’urbanisme par l’article 33 de la loi Grenelle II
Lors de la discussion en séance publique du projet de loi « Grenelle II », un amendement a été adopté afin d’abroger l’article L. 443-3-1 du code de l’urbanisme (article 33 de la loi définitivement promulguée).
Il n’est pas question, bien entendu, de revenir sur l’esprit de ce qui a été voté en 2009, mais au contraire de mettre au point un dispositif d’ensemble permettant de limiter le phénomène de parcellisation et les voies de contournement qui s’y apparentent.
En pratique, il s’agit de réintroduire, sous une forme plus complète, l’interdiction prévue par l’article L. 443-3-1 dans la partie réglementaire du code de l’urbanisme (article R.111-34), en précisant de façon limitative les conditions d’exploitation des terrains de camping au sein desquels l’implantation d’un mobile-home est autorisée.
Le fait de toucher à la matière réglementaire nécessitait qu’aucune disposition législative ne puisse faire écran au nouveau dispositif. Aussi, les services du ministère de l’écologie et du développement durable se sont-ils engagés, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi portant engagement national pour l’environnement, à adapter la réglementation en vigueur en ce sens, l’abrogation de l’article L.443-3-1 n’intervenant qu’à ce moment là.
3. Quelle fiscalité pour l’hébergement léger sédentarisé ?
Cette question figurait déjà au nombre des sujets dont s’était saisi le groupe de travail mis en place en 1988 pour réfléchir à l’évolution de l’hébergement de plein air. Le phénomène de sédentarisation des habitats légers n’ayant fait depuis lors que s’amplifier, la demande d’une meilleure prise en compte du mode effectif d’occupation desdits habitats dans le calcul de leur contribution aux charges publiques apparaît légitime.
La question de la fiscalité liée aux habitats légers doit toutefois être appréhendée à la fois sous l’angle de l’activité économique, de l’aménagement des terrains et du mode d’occupation. Ce n’est en fait qu’à la marge, et au travers du lien avec le foncier, qu’une fiscalité est aujourd’hui applicable à certains habitats légers.
a) Une fiscalité « économique » à prendre en considération
L’activité économique « camping » génère comme telle des recettes fiscales et contribue pleinement au développement économique des territoires.
• Tout d’abord, aux termes de l’article 279 du code général des impôts, les activités de plein air sont soumises au taux réduit de TVA de 5,5% :
- si le camping est classé ;
- si l’exploitant assure l’accueil de sa clientèle ;
- s’il exploite de l’habitat locatif et s’il consacre au minimum 1,5 % du chiffre d’affaires à de la publicité ;
- s’il délivre une note agréée indiquant les dates de séjour et le montant dû.
À défaut de respecter l’une de ces obligations, le propriétaire est soumis au taux normal de TVA de 19,6 %. Ce même taux s’applique s’il loue son terrain à un gérant.
Il est toutefois possible pour l’exploitant de bénéficier d’une franchise en base de TVA lorsque le chiffre d’affaires global réalisé au cours de l’année est inférieur à 76 300 euros hors taxes (article 293B du code général des impôts).
• En outre, l’activité « camping » entrait jusque récemment dans le champ d’application de la taxe professionnelle dès lors qu’elle était exercée à titre habituel et qu’elle revêtait un caractère professionnel.
La suppression de la taxe professionnelle et son remplacement par la cotisation foncière des entreprises (CFE) et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) conduit, selon les professionnels du secteur, à un alourdissement de la charge fiscale dont doivent s’acquitter les exploitants de terrains, du fait de l’élargissement de l’assiette de l’impôt.
• Enfin, les bénéfices nets générés par la location d’emplacements de camping peuvent être imposés au titre de l’impôt sur les sociétés ou de l’impôt sur le revenu :
- comme des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) lorsque le camping comporte des aménagements ;
- comme des revenus fonciers lorsqu’il s’agit de terrains nus à usage de camping ;
- comme des bénéfices non commerciaux lorsque les emplacements sont loués par un gérant non propriétaire du terrain.
b) Une fiscalité à revoir en matière d’aménagement
Les exploitants de terrains de camping et de parcs résidentiels de loisirs s’acquittent également, au stade du permis d’aménager, de la taxe locale d’équipement (TLE) et des taxes associées pour l’urbanisme, sur les aménagements et infrastructures qu’ils créent (espace loisirs, accueil, piscines, aires de jeux, restauration, commerces), ainsi que sur les habitations légères de loisirs (HLL) qui y sont construites.
Le montant de la TLE est logiquement corrélé à la surface bâtie et au niveau de confort du terrain. Il ne prend toutefois pas en compte, au titre de la surface bâtie, les habitats légers qui ne sont pas considérés comme des constructions, comme les mobile-homes.
En pratique, cela revient à sous-estimer les charges induites par les frais d’équipement et d’acheminement des réseaux dont profitent également ces installations mobiles implantées de façon quasi pérenne, dont la destination est sensiblement la même que celle des HLL.
Cette fiscalité devrait être davantage liée à la capacité d’accueil des terrains, pour faire en sorte que les communes perçoivent des recettes en rapport avec leurs charges effectives, indépendamment des types d’habitat léger (caravanes, camping-cars, mobile-homes, HLL).
C’est du reste déjà le cas s’agissant de certaines taxes d’usage, perçues en fonction du nombre d’emplacements (ordures ménagères par exemple).
c) Fiscalité d’habitation ou fiscalité d’occupation ?
• La taxe d’habitation n’est pas acquittée par les occupants saisonniers de logements de type « habitations légères de loisirs », et a fortiori encore moins par les occupants de mobile-homes, au sein des terrains aménagés. Cette taxe est en effet due pour les locaux affectés à l’habitation (article 1407 du code général des impôts), donc par celui qui dispose de l’habitation meublée à titre privatif (au 1er janvier de chaque année) en qualité notamment de « locataire constant ».
Par ailleurs, si l’habitation légère de loisirs a une vocation saisonnière dans le cadre d’un régime hôtelier, il y a exonération pour le loueur de la taxe d’habitation si celui-ci est soumis à la cotisation foncière des entreprises et à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, et que ladite HLL ne fait pas partie de son habitation principale. Ce n’est qu’à défaut qu’il devra s’acquitter de la taxe d’habitation.
Il n’est de toute façon pas illogique qu’un habitat léger de loisirs ne soit pas redevable de la taxe d’habitation, dès lors qu’est affirmé le principe d’un habitat saisonnier et temporaire.
• À défaut d’une fiscalité d’habitation, les campeurs peuvent néanmoins être redevables, avec la taxe de séjour, d’une fiscalité d’occupation :
– dès lors qu’elle est instituée par la collectivité dans laquelle se trouve le terrain sur lequel ils sont amenés à faire du camping (article 2333-26 du code général des collectivités territoriales) ;
– s’ils ne sont pas domiciliés dans la commune où se trouve le terrain de camping, ou s’ils ne possèdent pas de résidence pour laquelle ils sont passibles de la taxe d’habitation dans cette même commune (article L.2333-29 du même code).
L’occupant est alors redevable :
– soit d’une taxe de séjour dite « au réel », collectée par l’exploitant au profit de la commune, acquittée en fonction du nombre de personnes et de nuitées, selon le barème affiché dans l’établissement (le barème s’élève selon le classement du camping) (29) ;
– soit d’une taxe de séjour forfaitaire, auquel cas c’est l’exploitant du terrain qui est assujetti à la taxe, qui est assise sur une durée moyenne de séjour (en fonction de la période d’ouverture de l’établissement et de la période de perception fixées par la collectivité) et sur la capacité totale d’accueil (nombre de personnes et de lits), déduction faite le cas échéant de certains d’abattements (articles L.2333-42 et 2333-61 du même code).
Le dispositif actuellement en vigueur concernant la taxe de séjour a fait l’objet d’améliorations importantes à la suite des préconisations du rapport de Michel Bouvard (30), il y a près de dix ans, et les barèmes ont été réajustés en 2005.
Notons que cette taxe, qui peut le cas échéant, concerner l’ensemble des hébergements touristiques marchands, est modulable pour chacun d’eux, selon la catégorie des établissements. En d’autres termes, une commune peut instituer une taxe de séjour au réel pour certains types d’établissements et une taxe de séjour forfaitaire pour certains autres.
Les habitats légers de loisirs se distinguent des formes traditionnelles d’habitat par un rapport particulier entre le foncier et ce qui s’y trouve implanté, qui ne correspond pas systématiquement à du bâti.
Les habitations légères de loisirs (HLL) constituent à cet égard une forme spécifique d’habitat léger, assujettie à la taxe foncière sous certaines conditions.
La taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) peut en effet être perçue sur les habitations légères de loisirs, dès lors que celles-ci sont fixées au sol à perpétuelle demeure et qu’elles reposent sur des fondations ou une assise en maçonnerie tel qu’il soit impossible de les déplacer sans les démolir. Elles sont alors supposées présenter alors le caractère de véritables bâtiments.
Cela concerne au premier chef les habitations légères de loisirs implantées sur des terrains aménagés exploités sous le régime de la cession de propriété, notamment dans le cadre de certains parcs résidentiels de loisirs, mais également celles exploitées sous régime hôtelier, assujetties au même titre que les infrastructures communes.
En tout état de cause, les propriétaires des terrains aménagés pour le camping, qu’ils accueillent des habitats légers considérés ou non comme des constructions, sont assujettis à taxe foncière sur les propriétés non bâties dès lors que leurs terrains sont considérés comme des terrains agricoles non cultivés et affectés de manière durable à une activité commerciale (article 1381-5° du code général des impôts).
III. — CONCILIER SOUPLESSE ET DÉVELOPPEMENT ORDONNÉ : 13 PROPOSITIONS POUR AMÉLIORER LE CADRE EXISTANT
Au terme de ses travaux, la mission a identifié plusieurs points sur lesquels elle estime nécessaire de modifier le cadre existant. La matière étant toutefois essentiellement d’ordre réglementaire, il convient de fixer des lignes directrices, avant d’examiner la procédure à suivre.
Les propositions qui suivent sont présentées sous forme thématique. Une synthèse « opérationnelle » et récapitulative permettra également d’appréhender le suivi de ces préconisations.
A. — AMÉLIORER LA LISIBILITÉ DES RÈGLES GÉNÉRALES
1. Poursuivre l’harmonisation des dispositions du code du tourisme et du code de l’urbanisme
Précisons d’emblée que les dispositions figurant dans ces deux codes, qui réglementent la pratique du camping, l’aménagement et le fonctionnement des terrains aménagés et le statut des habitats légers, font globalement l’objet d’une coordination satisfaisante. Il s’agit toutefois de faire en sorte qu’aucun doute ne puisse subsister du fait d’un emploi de termes sensiblement différents dans l’un et l’autre code, voire au sein du même code.
• Avec l’adoption de la loi « Grenelle II », le code de l’urbanisme va faire l’objet d’une refonte dans sa présentation : il conviendra alors de veiller à ce qu’aucun malentendu ne subsiste.
À titre d’exemple, l’article R. 423-60 mentionne encore les commissions départementales d’action touristique, qui ont été supprimées par la loi « Tourisme » de 2009, au sujet des délais d’instructions en matière de demandes de permis ou de déclaration préalable (31).
• Sur un autre plan, le code de l’urbanisme fait référence aux différentes configurations d’exploitation des parcs résidentiels de loisirs (par cession d’emplacements, par locations d’emplacements d’une année, ou sous régime hôtelier) tandis que le code du tourisme ne fait expressément référence qu’aux parcs exploités sous régime hôtelier (ce sont les seuls à pouvoir faire l’objet d’un classement). Les renvois d’un code à l’autre permettent certes d’assurer la coordination d’ensemble mais en termes de lisibilité, mieux vaudrait procéder plus simplement.
• Au sein même du code de l’urbanisme, certaines dispositions prêtent à interrogations. En particulier, l’articulation des articles R. 421-2 et R. 421-9 laisse planer un doute sur le régime d’autorisation applicable aux habitations légères de loisirs dont la surface hors œuvre nette est inférieure à 35 m², et qui sont implantées dans un village de vacances ou dans une maison familiale de vacances.
Ces articles sont ainsi rédigés :
« Art. R. 421-2. – Sont dispensées de toute formalité au titre du présent code (…) : |
« Art. R. 421-9 : (…) les constructions nouvelles suivantes doivent être précédées
|
Or, l’article R. 111-32, qui dresse la liste des terrains dans lesquelles les habitations légères de loisirs peuvent être implantées, mentionne également, en plus des terrains de camping et des parcs résidentiels de loisirs, les villages de vacances classés en hébergement léger et les dépendances des maisons familiales de vacances agréées.
En l’état de la réglementation, on discerne donc mal le régime d’autorisation applicable (déclaration préalable ou dispense de toute formalité ?) aux habitations légères dont la surface hors œuvre nette est inférieure à 35 m², qui sont installées dans les villages et les maisons familiales de vacances.
• S’agissant plus particulièrement des villages de vacances, on sait par ailleurs qu’en matière de permis d’aménager, la procédure applicable est identique à celle des parcs résidentiels de loisirs, en application de l’article R. 421-19 du code de l’urbanisme. Il serait toutefois préférable que cette catégorie propre de terrains aménagés soit mentionnée en tant que telle dès lors que d’autres dispositions lui sont applicables, ce d’autant que les villages de vacances classés en hébergement léger constituent aujourd’hui un créneau particulièrement porteur, amené à se développer.
Au total, la réglementation applicable au secteur du plein air se caractérise par sa dispersion ; si par ailleurs ceux qui la pratiquent ont besoin d’interpréter des dispositions qui pourraient être aisément clarifiées, il est à craindre que son manque de lisibilité continue de perdurer.
Proposition n°1 : Mieux expliciter les dispositions relatives aux habitats légers de loisirs et aux terrains aménagés dont la formulation pourrait prêter à confusion et générer de l’incompréhension.
2. Lever les ambiguïtés autour de la question du classement des terrains aménagés
L’articulation entre l’article R. 443-8 du code de l’urbanisme, qui conditionne l’ouverture des terrains de camping et des parcs résidentiels de loisirs à l’obtention d’un arrêté de classement, et les nouvelles dispositions introduites par la loi n°2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, précisément en matière de classement de ces terrains, peuvent apparaître comme contradictoires.
Le classement semble demeurer obligatoire lors de l’ouverture du terrain ou lors de son réaménagement substantiel mais le nouveau classement étant provisoire, certains de ces terrains pourraient à terme ne plus être classés.
Par ailleurs, l’article R. 443-8 mentionne les parcs résidentiels de loisirs sans préciser s’il s’agit uniquement ou pas des parcs résidentiels de loisirs exploités sous régime hôtelier. Or, il résulte de l’article L. 333-1 du code du tourisme que seuls les parcs résidentiels de loisirs exploités sous régime hôtelier font l’objet d’un classement.
En outre, s’agissant de l’implantation des mobile-homes et des habitations légères de loisirs (HLL) dans les terrains aménagés, les articles R. 111-32 (pour les HLL) et R. 111-34 (pour les mobile-homes) caractérisent ces terrains comme devant être « classés au sens du code du tourisme ».
Sur ces différents points, la mission considère nécessaire de maintenir un classement systématique au stade de l’ouverture ou du réaménagement des terrains, ainsi que pour ceux de ces terrains existants qui accueillent en leur sein des mobile-homes ou des HLL.
En effet, ce type d’habitat, aussi « léger » fût-il, ne peut être considéré exactement de la même façon que l’habitat léger parfaitement mobile. La perspective de terrains aménagés non soumis au classement et au sein desquels on constaterait un défaut ou une insuffisance grave d’entretien des bâtiments et des installations n’est pas tolérable.
Certes, des dispositions existent au sein du code de l’urbanisme afin de permettre aux services de l’État de veiller à cela, mais il semble opportun de conserver le levier des articles du code du tourisme (32) qui prévoient la possibilité pour le préfet de prononcer la radiation du classement, ce qui suppose qu’il y en ait un.
Des garanties sérieuses seraient ainsi apportées par le maintien du classement, à la pérennité de ces installations.
Proposition n°2 : Lever les ambiguïtés sur le classement des terrains aménagés : maintien du classement systématique pour les terrains nouvellement créés, pour ceux qui ont fait l’objet d’un réaménagement substantiel et, en tout état de cause, pour les terrains qui accueillent en leur sein des résidences mobiles de loisirs (mobile-homes) et des habitations légères de loisirs.
3. Préciser le régime d’implantation des mobile-homes dans les terrains de camping, selon leur mode d’exploitation
La mission a fait état des risques de parcellisation des terrains de camping et des dérives engendrées par une individualisation prononcée de la jouissance des parcelles demeurant la propriété de l’exploitant, par le biais de l’emphytéose ou de la multipropriété.
Afin de compléter le dispositif de l’article L. 443-3-1 du code l’urbanisme, créé par la loi du 22 juillet 2009, il s’avérait nécessaire d’abroger ledit article afin de le réintroduire sous une forme complétée dans la partie réglementaire du code de l’urbanisme, où il a sa place logique.
L’abrogation votée en juillet 2010 (article 33 de la loi « Grenelle II ») prenant effet à compter du 10 janvier 2011 (soit six mois après la promulgation de ladite loi), la mission préconise de modifier l’article R. 111-34 du code de l’urbanisme, qui prévoit que les résidences mobiles de loisirs peuvent être installées dans les terrains de camping classés, afin d’y préciser que les résidences mobiles de loisirs ne peuvent être implantées que sur des « emplacements locatifs » ou des « emplacements résidentiels ».
Il conviendra le cas échéant de préciser que :
– l’emplacement locatif résulte d’une exploitation sous régime hôtelier par l’exploitant du terrain ;
– l’emplacement résidentiel résulte d’une exploitation par location d’emplacements d’une durée ne pouvant excéder deux ans, renouvelable.
Proposition n°3 : Modifier la partie réglementaire du code de l’urbanisme pour empêcher la parcellisation des terrains de camping et les pratiques qui s’y apparentent. Préciser que les résidences mobiles de loisirs ne peuvent y être installées que sur des emplacements exploités sous régime hôtelier, ou par location d’une durée maximale de deux ans, renouvelable.
4. Un guide pratique pour expliquer la réglementation
La réglementation applicable aux habitats légers de loisirs et aux terrains sur lesquels ils peuvent être installés a fait l’objet, au cours des cinq dernières années, d’importantes modifications qui vont dans le sens d’une certaine clarification au fond.
Sur la forme, toutefois, force est de constater que cette réglementation « éclatée » manque pour le moins d’un certain didactisme. Le dernier guide réglementaire à l’usage des professionnels et des acteurs locaux, édité en 2005 par ODIT-France (désormais Atout France) mérite une refonte.
Il convient ce faisant de tenir compte du chantier de codification en matière de droit de l’urbanisme ouvert par l’article 25 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, qui autorise le Gouvernement à procéder, par voie d'ordonnances, à une nouvelle présentation des dispositions législatives du code de l'urbanisme.
À cet effet, doit prévaloir, en plus du souci bien légitime de cohérence juridique, le besoin pour les acteurs concernés d’y voir clair en la matière et de pouvoir disposer en permanence d’un document récapitulatif de la réglementation en vigueur, mis à jour en temps réel.
Ce document unique inclurait l’ensemble des dispositions commentées et articulées des différents codes, qui concernent les habitats légers de loisirs et les terrains aménagés : urbanisme, tourisme, mais également environnement, code général des collectivités territoriales, code général des impôts, etc.
La mise en ligne d’un tel document sur le site officiel du ministère du tourisme permettrait son actualisation permanente et fournirait un précieux appui aux acteurs de ce secteur.
Proposition n°4 : Rassembler en un document unique synthétique l’ensemble des dispositions des différents codes applicables aux habitats légers de loisirs et aux terrains qui les accueillent : définitions des différentes catégories d’habitats légers, règles d’urbanisme et d’insertion paysagère, conditions de fonctionnement des terrains classés au regard des obligations du code de l’urbanisme et du code du tourisme, recommandations relatives aux cas particuliers des installations implantées hors des terrains aménagés, etc.
B. — MIEUX RECENSER LES PRATIQUES D’OCCUPATION POUR MIEUX PRÉVENIR LES DÉRIVES QU’ELLES PEUVENT GÉNÉRER
1. Mieux définir la pratique du camping au sein des terrains de camping
Dans le prolongement de sa proposition relative à l’amélioration du dispositif visant à lutter contre la parcellisation des terrains de camping, par la redéfinition du régime d’implantation des mobile-homes au sein desdits terrains, la mission préconise l’insertion dans le code du tourisme d’une définition des trois modes autorisés d’exploitation des terrains de camping : emplacements nus, emplacements locatifs, emplacements résidentiels.
La distinction de ces trois pratiques, qui peuvent avoir lieu simultanément au sein d’un même terrain, semble plus pertinente pour apprécier la réalité du camping d’aujourd’hui que celle opérée, au niveau du classement, entre les terrains « tourisme » et les terrains « loisirs », qui peut, en pratique, dissimuler des situations fort diverses.
Qui plus est, la distinction entre tourisme et loisirs se situe uniquement au niveau du comportement de la clientèle du camping, là où celle proposée tente de mieux relier le comportement de cette clientèle à un mode d’utilisation du sol.
C’est du reste d’ores et déjà la distinction qu’utilise l’INSEE depuis 2004 pour recenser les pratiques d’hôtellerie de plein air au sein des terrains aménagés.
Proposition n°5 : Définir dans le code du tourisme (partie réglementaire) les trois pratiques de camping liées chacune à un mode particulier d’occupation de l’emplacement du terrain : emplacements nus, emplacements locatifs et emplacements résidentiels.
2. Un régime de déclaration obligatoire des mobile-homes
Un élément frappant, au cours des auditions réalisées par la mission, a été la difficulté de disposer de données précises sur les habitats légers de loisirs, en particulier sur les mobile-homes.
En tant que véhicules circulants et de ce fait immatriculés, les caravanes et les camping-cars sont aujourd’hui plus ou moins recensés, quand bien même le récolement des données est difficile. En tant que constructions, même démontables, les habitations légères de loisirs sont encore identifiables.
En revanche, les mobile-homes manquent singulièrement de « traçabilité ». C’est d’autant plus préoccupant qu’un important marché de la vente d’occasion s’est développé à côté du marché des équipements neufs. En l’absence de traces des transactions et de la destination des ventes, l’implantation de ces habitats légers ne peut faire l’objet d’un suivi et d’un contrôle efficaces du respect des règles en vigueur. C’est notamment le cas des équipements en fin de vie, parfois recyclés illégalement comme habitats précaires sur des parcelles privées.
Aussi est-il proposé, d’obliger tout propriétaire de mobile-home à déclarer celui-ci auprès du maire de la commune où il est installé.
Un tel dispositif souple permettrait assurément de mieux cerner la pratique « résidentielle », tout en favorisant une meilleure identification des mouvements opérés par ce type d’équipements.
Proposition n°6 : Obliger toute personne propriétaire d’un mobile-home à déclarer celui-ci auprès du maire de la commune où se situe son terrain d’implantation.
3. Recenser l’habitat permanent dans les campings « précaires »
L’habitat léger comme habitat permanent est plus facile à refuser en principe qu’à juguler en pratique. La lutte contre cette forme d’habitat dégradé doit pouvoir être prise en considération dans le cadre des plans départementaux d’aide au logement des plus défavorisés (PDALPD) tels qu’ils ont été redéfinis par le décret du 29 novembre 2007 pour tenir compte des modifications induites par la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement.
L’actuel régime d’inspection des terrains de camping, prévu par les dispositions coordonnées du code du tourisme (articles D. 331-9 et suivants) et du code de l’urbanisme (articles L. 461-1 et R. 443-12) procède essentiellement de la logique d’aménagement.
C’est le préfet qui, à titre principal, est ainsi habilité à inspecter, même inopinément, les terrains aménagés pour le camping et ceux sur lesquels se trouvent des caravanes dont le stationnement a été autorisé ou aurait dû l'être, lorsque ces terrains sont situés dans les zones soumises à un risque naturel ou technologique prévisible. Sont également habilités les fonctionnaires et agents assermentés désignés par le ministre chargé du tourisme et porteurs d'un ordre de mission ou d'une commission, et les membres de la commission départementale action touristique (CDAT).
Les CDAT ayant été supprimées, l’article R. 331-10 du code du tourisme, qui prévoit qu’à « à l'exception des personnes mentionnées à l'article R. 443-15 du code de l'urbanisme, nul ne peut pénétrer sur un terrain aménagé de camping et caravanage et s'y installer sans l'accord du gestionnaire du terrain ou de son préposé » est également caduc. De surcroît, l’article R. 443-15 du code de l’urbanisme n’existe plus...
Au final, les dispositions réglementaires relatives à l’inspection des terrains de camping méritent d’être totalement refondues : il convient d’élargir leur objet et le champ des personnes autorisées à y procéder.
Dans l’optique d’un meilleur contrôle de l’habitat permanent, l’association des élus locaux aux missions d’inspection semble totalement justifiée, qu’il s’agisse des départements autant que des communes, en première ligne sur ces questions.
Proposition n°7 : Réformer le dispositif permettant l’inspection des terrains de camping en vue de mieux recenser l’habitat permanent.
C. — MIEUX COORDONNER LE CONTRÔLE DE L’AMÉNAGEMENT ET CELUI DES PRATIQUES EFFECTIVES
1. Le contrôle au niveau des campeurs
La pérennisation de certaines formes d’habitat permanent au sein de structures collectives initialement dédiées à une activité touristique procède parfois de la responsabilité de certains gestionnaires de terrains ouverts à l’année, peu regardants dans un premier temps sur les modalités d’occupation, et qui peuvent par la suite se trouver facilement débordés par des situations de fait.
Elle est ainsi révélatrice d’une réglementation du contrôle des aménagements, principalement en amont, qui laisse peu de prise en aval au contrôle des pratiques effectives d’hébergement.
Face au développement de l’habitat permanent, et dans une optique préventive, il serait souhaitable de donner aux maires le pouvoir d’ordonner une période de fermeture annuelle obligatoire des terrains de camping.
En tout état de cause, une telle mesure devrait être justifiée par une appréciation circonstanciée de l’absence de la vocation touristique ou de loisir de l’exploitation du camping à certaines périodes de l’année, sans pour autant exclure la possibilité pour certaines communes de bénéficier d’un passage à l’année d’une population indispensable au maintien de l’activité commerciale locale.
Il ne faudrait pas, en effet, que l’argument du préjudice économique et financier porté aux exploitants fût opposé aux élus.
Proposition n°8 : Permettre aux maires, sous certaines conditions, d’imposer une période de fermeture annuelle obligatoire des terrains de camping.
2. Le contrôle au niveau des installations de camping
En l’état, le permis d’aménager des terrains de camping fixe uniquement le nombre maximum d’emplacements prévus pour l’implantation des habitations légères de loisirs (HLL), limitée à 20 % du nombre total d’emplacements ou à 35 si le nombre total d’emplacements est inférieur à 175. Sur les autres emplacements, peuvent ainsi être déployés indifféremment tentes, caravanes ou mobile-homes.
Or, en pratique, on conçoit bien que l’implantation de mobile-homes ne revêt pas du tout la même dimension que celles des autres habitats légers mobiles et n’a pas du tout le même impact en matière d’aménagement effectif.
Des contentieux se sont ainsi récemment développés, comme on l’a vu, autour de la possibilité de limiter dans les documents d’urbanisme opposables les implantations pérennes de type HLL et mobile-homes.
Il est nécessaire que le permis d’aménager des terrains de camping permette de fixer, en plus du nombre de HLL, le nombre maximal d’emplacements « résidentiels » occupés pas des mobile-homes.
Proposition n°9 : Prévoir explicitement pour les communes la possibilité de limiter le nombre d’installations pérennes dans les terrains aménagés situés dans des zones sensibles et de fixer dans le permis d’aménager le nombre maximal d’emplacements correspondants.
D. — RESPONSABILISER LES ACTEURS
1. Encadrer la relation contractuelle résultant de l’occupation résidentielle des emplacements de camping
S’agissant de la multiplication des contentieux relatifs aux contrats d’emplacements de loisirs conclus entre les gestionnaires de terrains aménagés et les propriétaires de résidences mobiles, la mise en œuvre par les professionnels du secteur de contrats-type permettant de remédier aux abus constatés doit être encouragée.
Il ne s’agit toutefois pas pour le législateur de se substituer aux acteurs directement concernés et d’imposer lui-même un contrat-type rigide et uniforme, qui se révélerait être une formidable « usine à gaz » inadaptée aux réalités variées des différentes exploitations de camping.
À défaut d’un contrat-type obligatoire, le législateur pourrait néanmoins imposer, lors de la signature du contrat, la mention en son sein de certaines clauses, à charge pour l’exploitant et le propriétaire de mobile-home d’en définir les modalités concrètes.
La révision de l’article R. 111-34 du code de l’urbanisme (voir la proposition n°3) acte le principe d’un contrat d’une durée maximale de deux ans, renouvelable.
Par souci d’équilibre et de protection du propriétaire de mobile-home, il est souhaitable d’imposer que figurent dans ce contrat un minimum de clauses :
- sa durée,
- les conditions de son renouvellement et de sa résiliation,
- les modalités de calcul permettant de fixer le montant des prix qui y figurent (loyer annuel de l’emplacement et services annexes) et, en cas de renouvellement, de révision desdits prix,
- les normes applicables au moment de l’installation et l’impact éventuel de leur évolution,
- les critères et modalités d’appréciation de la vétusté de la résidence mobile.
Un tel dispositif « souple », dont il convient de souligner qu’il ne remettrait pas en cause la liberté contractuelle, permettrait de renforcer la logique d’exécution de bonne foi du contrat par les deux parties signataires.
L’essentiel consiste en effet à ce que le contrat soit signé en toute connaissance de cause. Par exemple, si l’exploitant souhaite garder la liberté absolue en matière de fixation du loyer annuel de l’emplacement, lors du renouvellement, il devrait l’indiquer explicitement.
Le contrat en question n’en resterait pas moins soumis, d’une manière générale, aux principes généraux du droit de la consommation s’agissant de ses éventuelles clauses abusives.
Par ailleurs, il convient de noter que ledit contrat n’aurait en tout état de cause pas vocation à s’inscrire dans une logique de « bail d’habitation ».
Proposition n°10 : Rendre obligatoire, dans le contrat passé entre l’exploitant du terrain de camping et le propriétaire de mobile-home, la mention de cinq clauses respectivement relatives à sa durée, aux conditions de son renouvellement ou de sa résiliation, aux prix, à la définition des normes applicables et à l’appréciation de la vétusté de l’installation (à charge pour les cocontractants d’en définir les modalités concrètes).
2. Mieux informer les consommateurs lors de la vente de l’habitat léger
Dans une perspective voisine, il conviendrait que les acheteurs de mobile-homes bénéficient obligatoirement, de la part du vendeur de l’habitat léger (distributeur ou particulier), d’informations relatives au régime spécifique d’implantation du mobile-home dans un terrain aménagé de type camping ou parcs résidentiels de loisirs, et du mode d’occupation qui en résulte (location d’un emplacement résidentiel, interdiction d’y élire domicile, caractère saisonnier et temporaire du mode d’hébergement).
Il s’agit notamment d’éviter que la propriété du mobile-home puisse être perçue comme ouvrant un droit à la jouissance d’une propriété foncière. On devient propriétaire d’un mobile-home, on ne devient pas propriétaire d’une « résidence secondaire ».
Proposition n°11 : Prévoir la mention obligatoire dans le contrat de vente d’un mobile-home d’indications relatives à sa réglementation en termes d’installation et de mode d’occupation.
3. Une fiscalité adaptée à l’implantation pérenne et à l’occupation « résidentielle »
La fiscalité de l’urbanisme, au stade du permis d’aménager, fait aujourd’hui l’objet de travaux importants de la part de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages du ministère de l’écologie, qu’il convient de suivre attentivement.
À terme, la mission soutient totalement le principe que la fiscalité de l’urbanisme des terrains de camping prenne en compte non plus uniquement la surface bâtie mais la capacité maximale d’accueil au sein du terrain aménagé.
S’agissant des terrains aménagés faisant l’objet d’une exploitation commerciale, il convient de ne pas alourdir les charges relatives à cette activité afin de ne pas la pénaliser.
En revanche, s’agissant de la fiscalité d’occupation des mobile-homes privés entreposés à l’année sur des terrains aménagés, il convient d’en conserver le caractère saisonnier (il ne s’agit pas d’habitations) tout en tenant compte d’une occupation susceptible d’être prolongée, qui peut justifier une contribution spécifique.
À cet effet, il est d’ores et déjà possible pour certaines communes, sans modifier la législation existante, d’accroître leurs recettes perçues au titre de la taxe de séjour, en basculant sur le régime de la taxe de séjour forfaitaire uniquement pour les terrains classés avec une mention « loisirs », mention qui semble indiquer une prépondérance de l’occupation à caractère résidentiel.
Ce système a plusieurs avantages : gestion administrative quasi-nulle, modulation au cas par cas par les communes, caractère relativement indolore. Son inconvénient réside toutefois dans le fait qu’une telle mesure pourrait ne pas être parfaitement ciblée (puisque les terrains concernés comportent également une clientèle de passage).
Aussi la mission suggère-t-elle de réformer le dispositif de la taxe de séjour, telle qu’il s’applique aux terrains de camping, afin de permettre sa modulation selon la nature des différents modes d’occupation.
Les occupants des emplacements nus et locatifs pourraient ainsi continuer d’être assujettis, soit à la taxe de séjour journalière, soit à la taxe de séjour forfaitaire, au choix de la commune.
En revanche, une taxe de séjour spécifique pourrait être instituée sur les seuls emplacements résidentiels du terrain de camping, le calcul de cette taxe s’opérant selon le dispositif de la taxe forfaitaire, appliqué aux seuls emplacements résidentiels.
Chaque commune garderait la faculté d’instituer ou non ladite taxe.
Proposition n°12 : Permettre l’application de la taxe de séjour forfaitaire aux seuls emplacements « résidentiels » des terrains de camping.
4. Le stationnement des camping-cars
Le règlement des problèmes liés au stationnement des camping-cars pourrait passer par trois angles d’approche complémentaires :
→ Tout d’abord, afin d’accroître l’offre d’accueil à l’attention des camping-caristes, il pourrait être envisagé d’encourager les communes touristiques à réaliser des équipements afin d’accueillir cette clientèle spécifique. La promotion du maillage territorial des aires de stationnement à un niveau intercommunal pourrait aussi être encouragée.
On pourrait s’inspirer d’une solution expérimentée en Italie, consistant à prévoir des aires en périphérie des centres touristiques et à assurer, par un service de navettes, l’accès auxdits centres, qui sont souvent piétonniers. Cela ne peut cependant concerner qu’un segment spécifique de villes…
Du moins pourrait-il être envisagé que la réalisation de telles infrastructures par les communes touristiques leur permette d’édicter des mesures circonstanciées, s’agissant au moins du stationnement nocturne.
→ Ce faisant, il faudrait mieux définir juridiquement la typologie des aires dédiées aux camping-cars et encadrer leur conception : actuellement, la France compte près de 3 400 aires de stationnement et de services qui sont essentiellement communales.
L’aire de service s’entend comme un dispositif sanitaire permettant aux camping-caristes de réaliser des opérations techniques liées à l’autonomie et à la propreté de leur véhicule : remplissage des réservoirs d’eau potable, vidange des eaux usées et vidange des eaux noires.
L’aire de stationnement, ou aire d’accueil, regroupe l’ensemble des lieux où le stationnement est autorisé et souhaité. Ces aires ne font pas systématiquement l’objet d’adaptation particulière en faveur des camping-cars. L’emplacement idéal de ces aires se situe à l’extérieur des villes ou dans les petites communes, dans des zones calmes et sécurisées. Il convient cependant de distinguer de stationnement diurne ou nocturne.
Au vu de ces différentes catégories, une réflexion doit être menée sur la question de leur définition juridique et en vue de normaliser leur conception (qualité urbanistique et paysagère, normes de manœuvrabilité, dimension des emplacements).
→ Les camping-cars ne supportent aujourd’hui aucune taxe d’occupation dès lors qu’ils ne fréquentent pas les terrains de camping. Par ailleurs, la création d’aires spécifiques à leur profit a un coût.
Il serait logique de faire supporter ce coût aux principaux intéressés par le biais d’un système de « vignette » qui, collecté au niveau national, permettrait d’alimenter un fonds d’aide aux communes s’engageant dans la voie de la réalisation desdites aires.
Proposition n°13 : Mieux définir les aires spécifiques de stationnement de camping-car, encourager leur aménagement dans les communes concernées et créer le cas échéant une contribution spécifique permettant d’aider au financement de ces aménagements.
RÉCAPITULATIF DES PROPOSITIONS DE LA MISSION
Proposition n°1 : Mieux expliciter les dispositions relatives aux habitats légers de loisirs et aux terrains aménagés dont la formulation pourrait prêter à confusion et générer de l’incompréhension (coordination entre les différents codes).
Proposition n°2 : Lever les ambiguïtés sur le classement des terrains aménagés : maintien du classement systématique pour les terrains nouvellement créés, pour ceux qui ont fait l’objet d’un réaménagement substantiel et, en tout état de cause, pour les terrains qui accueillent en leur sein des résidences mobiles de loisirs (mobile-homes) et des habitations légères de loisirs.
Proposition n°3 : Modifier la partie réglementaire du code de l’urbanisme pour empêcher la parcellisation des terrains de camping et les pratiques qui s’y apparentent. Préciser que les résidences mobiles de loisirs ne peuvent y être installées que sur des emplacements exploités sous régime hôtelier, ou par location d’une durée maximale de deux ans, renouvelable.
Proposition n°4 : Rassembler en un document unique synthétique l’ensemble des dispositions des différents codes applicables aux habitats légers de loisirs et aux terrains qui les accueillent : définitions des différentes catégories d’habitats légers, règles d’urbanisme et d’insertion paysagère, conditions de fonctionnement des terrains classés, recommandations relatives aux cas particuliers des installations implantées hors des terrains aménagés, etc.
Proposition n°5 : Définir dans le code du tourisme (partie réglementaire) les trois pratiques de camping liées chacune à un mode particulier d’occupation de l’emplacement du terrain : emplacements nus, emplacements locatifs et emplacements résidentiels.
Proposition n°6 : Obliger toute personne propriétaire d’un mobile-home à déclarer celui-ci auprès du maire de la commune où se situe son terrain d’implantation.
Proposition n°7 : Réformer le dispositif permettant l’inspection des terrains de camping en vue de mieux recenser l’habitat permanent.
Proposition n°8 : Permettre aux maires, sous certaines conditions, d’imposer une période de fermeture annuelle obligatoire des terrains de camping.
Proposition n°9 : Prévoir explicitement pour les communes la possibilité de limiter le nombre d’installations pérennes dans les terrains aménagés et de fixer dans le permis d’aménager le nombre maximal d’emplacements correspondants.
Proposition n°10 : Rendre obligatoire, dans le contrat passé entre l’exploitant du terrain de camping et le propriétaire de mobile-home, la mention de cinq clauses respectivement relatives à sa durée, aux conditions de son renouvellement ou de sa résiliation, aux prix, à la définition des normes applicables et à l’appréciation de la vétusté de l’installation (à charge pour les cocontractants d’en définir les modalités concrètes).
Proposition n°11 : Prévoir la mention obligatoire dans le contrat de vente d’un mobile-home d’indications relatives à sa réglementation en termes d’installation et de mode d’occupation.
Proposition n°12 : Permettre l’application de la taxe de séjour forfaitaire aux seuls emplacements « résidentiels » des terrains de camping.
Proposition n°13 : Mieux définir les aires spécifiques de stationnement de camping-car, encourager leur aménagement dans les communes concernées et créer le cas échéant une contribution spécifique permettant d’aider au financement de ces aménagements.
SYNTHÈSE OPÉRATIONNELLE
POUR LE SUIVI DES PROPOSITIONS
Les dispositions encadrant le statut et l’installation des habitats légers de loisirs de même que l’aménagement et l’exploitation des terrains aménagés (camping et parcs résidentiels de loisirs) sont très largement d’ordre réglementaire.
Le suivi des préconisations de la mission suppose donc une étroite coordination avec les administrations chargées de l’élaboration de cette réglementation, en particulier en matière de tourisme et d’urbanisme. Par ailleurs, certaines mesures peuvent s’inscrire dans une perspective d’adoption à court terme tandis que d’autres nécessitent davantage de concertation.
Dans ces conditions, la présentation qui suit vise à dresser un ordre de priorité et à indiquer le cadre opérationnel souhaitable.
Ce document consiste essentiellement en un programme de travail, dont seront saisis les ministres compétents, et dont la mise en œuvre devra faire l’objet d’un suivi attentif.
À cet effet, il est proposé de dresser un premier bilan des actions mises en œuvre, devant la commission des affaires économiques, dans les six mois qui suivront la publication du rapport.
1) Trois dispositions déjà adoptées :
À titre de rappel préalable, trois dispositions s’inscrivant dans le cadre des travaux de la mission ont d’ores et déjà été adoptées, à l’occasion du vote de la loi « Grenelle II ».
Article 33 |
Abrogation de l’article L. 443-3-1 du code de l’urbanisme (qui interdisait l’implantation de résidences mobiles de loisirs sur les emplacements de terrains de camping ayant fait l’objet d’une cession en pleine propriété) et renvoi à un décret pour réintroduire ce dispositif complété dans la partie réglementaire du code de l’urbanisme (voir Proposition n°3). |
Article 34 |
Modification de l’article L. 480-14 du code de l'urbanisme (qui autorise le maire à saisir le tribunal de grande instance pour lui demander d’autoriser la démolition ou d’imposer la mise en conformité d’un bâtiment édifié sans permis) afin de ne plus limiter cette règle aux secteurs soumis à un risque naturel prévisible, et afin d’inclure dans le champ de son application, outre les constructions, les installations légères de loisirs irrégulièrement implantées, telles que le mobile-home. |
Article 35 |
Mise aux normes progressive (sur huit ans) des terrains de camping existants eu égard aux nouvelles règles d’insertion paysagère édictées en 2007 pour les terrains nouvellement créés. |
2) Quatre propositions doivent être rapidement suivies d’effet :
a) La première concerne la réforme de la partie réglementaire du code de l’urbanisme (article R. 111-34) en vue d’y préciser les nouvelles conditions d’installation des mobile-homes dans les terrains de camping, afin d’empêcher la parcellisation de ces terrains et les pratiques qui s’y apparentent (Proposition n°3).
Le processus a été lancé par l’abrogation de l’article L. 443-3-1 et le décret annoncé par l’article 33 de la loi du 10 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement doit impérativement entrer en vigueur avant le 10 janvier 2011.
Les services du ministère de l’écologie chargés de l’urbanisme vont être saisis en ce sens.
b) En revanche, les trois préconisations suivantes pourraient faire l’objet d’une proposition de loi :
- Imposer dans le contrat conclu entre un exploitant de terrain de camping et un propriétaire de résidence mobile, la mention des clauses relatives à :
• la durée du contrat
• les conditions de renouvellement et de résiliation du contrat,
• les modalités de calcul permettant de fixer le montant des prix figurant au contrat (loyer annuel de l’emplacement et services annexes) et, en cas de renouvellement, de révision desdits prix,
• les normes applicables au moment de l’installation et l’impact éventuel de leur évolution,
• les critères et modalités d’appréciation de la vétusté de la résidence mobile.
(Proposition n°10)
- L’obligation de faire figurer dans tout contrat de vente d’une résidence mobile de loisirs des indications sur la réglementation de cet habitat léger, relative à son installation et aux conditions de son occupation (Proposition n°11).
Afin de bien marquer le fait que ces dispositions ne s’inscrivent pas dans une logique d’habitation, il est proposé de les insérer dans le code de la consommation et de prévoir dans le code du tourisme une disposition qui y renvoie expressément.
- L’obligation pour toute personne propriétaire d’une résidence mobile de loisirs de la déclarer auprès du maire de la commune où se situe le terrain sur lequel elle est installée (Proposition n°6).
Cette disposition serait insérée dans la partie législative du code du tourisme.
3) Un point ne nécessite pas, le cas échéant, de modifications particulières par rapport au droit en vigueur, mais doit être précisé au niveau des principes :
Il s’agit du caractère systématique ou non du classement des terrains de camping et parcs résidentiels de loisirs exploités sous régime hôtelier, soit lors de leur création, soit lors de leur réaménagement.
Par la même occasion, il faudrait également confirmer le régime d’implantation des mobile-homes dans les terrains classés au sens du code du tourisme (Proposition n°2).
4) Quatre préconisations impliquent des modifications de nature réglementaire et la mise en place d’un comité de suivi afin de définir leurs modalités concrètes de mise en œuvre :
a) La définition dans la partie réglementaire du code du tourisme des trois modes d’occupation des emplacements d’un terrain de camping :
• emplacements « nus »,
• emplacements « locatifs »,
• emplacements « résidentiels »
(Proposition n°5).
Cette disposition nécessite, entre autres, une coordination avec les dispositions du code de l’urbanisme (partie réglementaire) qui traitent du camping et des habitats légers de loisirs.
b) La révision du dispositif permettant l’inspection des terrains de camping (partie réglementaire du code du tourisme).
Il s’agit à la fois d’étendre son champ d’application ainsi que la liste des personnes autorisées à y procéder. L’objectif principal consiste à mieux pouvoir, de ce fait, contrôler le développement d’un habitat permanent précaire, à vocation non touristique, dans ces terrains (Proposition n°7).
Cette disposition pourrait nécessiter une coordination avec le code général des collectivités locales, s’agissant de l’inclusion du maire et des services départementaux dans la liste des personnes autorisées à inspecter lesdits terrains.
c) La possible limitation du nombre de résidences mobiles de loisirs im-plantées dans des terrains situés dans certaines zones sensibles (Proposition n°9).
L’objectif consiste notamment à pouvoir considérer, dès lors qu’ils sont implantés de façon pérenne, que les résidences mobiles de loisirs peuvent être considérés comme des constructions légères, selon leur lieu d’installation.
d) La possibilité de permettre aux maires, sous certaines conditions, d’imposer une période de fermeture annuelle obligatoire des terrains de camping et, le cas échéant, la limitation de l’autorisation d’une exploitation permanente (Proposition n°8).
En revanche, il convient de laisser ouverte la possibilité pour certaines communes de bénéficier du passage à l’année d’une population indispensable au maintien d’une activité commerciale locale.
Là encore, il s’agit d’une disposition dont il convient d’étudier les modalités pratiques de mise en œuvre sur le plan réglementaire. Son objectif consiste à ne pas favoriser le développement de l’habitat permanent dans les terrains ouverts à l’année, qui finissent par perdre leur vocation touristique ou de loisir.
5) Enfin, quatre objectifs de long terme peuvent être dégagés :
a) Le suivi de l’harmonisation et de la refonte annoncée des dispositions du code du tourisme et du code de l’urbanisme, s’agissant des habitats légers de loisirs et des terrains aménagés pour l’hébergement de plein air (proposition n°1).
Il s’agit là d’un chantier suffisamment lourd et complexe pour nécessiter un dispositif de veille et une association du législateur.
b) L’élaboration à terme d’un document unique visant à regrouper l’ensemble des dispositions applicables au secteur de plein air (Proposition n°4).
Dans une perspective de lisibilité générale de la réglementation, au profit des différents acteurs du secteur (État, collectivités, professionnels et usagers), une réflexion à ce sujet peut d’ores et déjà être engagée. Ce faisant, eu égard aux modifications récentes, en cours ou à venir, le caractère définitif de ce document demeurerait pour l’instant hypothétique.
c) La réforme de la taxe de séjour, afin de permettre sa modulation à l’intérieur même des terrains de camping, selon la nature de l’occupation des emplacements : « nus » ou « locatifs » d’une part, « résidentiels » d’autre part (Proposition n°12), est tributaire de la réponse apportée à la proposition n°5.
La mission préconise, à ce stade, de réfléchir au sujet mais d’attendre, pour son éventuelle mise en œuvre, un retour sur l’impact de la récente réforme de la taxe professionnelle applicable aux terrains de camping. Il pourrait en effet s’avérer inopportun de pousser plus loin la fiscalité de l’occupation si, par ailleurs, la fiscalité d’exploitation des terrains suffisait à garantir des ressources satisfaisantes aux communes.
d) S’agissant des camping-cars, là encore, il ne semble pas pertinent de formuler dès aujourd’hui des propositions en ce qui concerne l’encouragement à l’aménagement d’aires de services spécifiques et, le cas échéant, la création d’une contribution permettant de financer ces investissements (Proposition n°13).
Il s’agit de procéder préalablement à une estimation précise des besoins, sur les plans quantitatifs, qualitatifs et géographiques.
Trois dispositions adoptées (Grenelle II) | |||
Article 33 |
Abrogation de l’article L. 443-3-1 du code de l’urbanisme créé par la loi « Tourisme » du 22 juillet 2009 |
Renvoi à un décret dans les 6 mois suivant la promulgation de la loi pour préciser et compléter la partie réglemen-taire du code de l’urbanisme (article R. 111-34, voir la proposition n°3) | |
Article 34 |
Modification de l’article L. 480-14 du code de l’urbanisme : possibilité pour le maire de saisir le tribunal de grande instance en matière de constructions illégales. |
Disposition entrée en vigueur le 10 juillet 2010. | |
Article 35 |
Mise aux normes des terrains de camping existants en matière d’insertion paysagère. |
Dispositif transitoire : les exploitants ont 3 ans pour déposer un nouveau permis d’aménager et 8 ans pour effectuer la mise aux normes. | |
Quatre propositions pour une mise en œuvre rapide | |||
Proposition n°3 |
Compléter l’article R. 111-34 du code de l’urbanisme afin d’y préciser les limitations apportées au régime d’installation des mobile-homes dans les terrains de camping. |
Décret attendu au plus tard pour le 10 janvier 2011. (voir l’article 33 de la loi « Grenelle II ») | |
Proposition n°10 |
Obligation de mentionner dans le contrat conclu entre l’exploitant de terrain de camping et le propriétaire de mobile-home les modalités relatives aux clauses suivantes : durée, renouvellement et/ou résiliation, prix et révision, normes applicables et vétusté |
Disposition législative à insérer dans le code de la consommation et dans le code du tourisme. | |
Proposition n°11 |
Obligation d’information de l’acheteur de mobile-home sur les conditions d’installation et d’occupation prévues par la réglementation. |
Disposition législative à insérer dans le code de la consommation et dans le code du tourisme. | |
Proposition n°6 |
Obligation de déclaration en mairie de l’installation d’un mobile-home par son propriétaire. |
Disposition législative à insérer dans le code du tourisme. |
Un point particulier de la réglementation à éclairer | ||
Proposition n°2 |
Clarifier la réglementation applicable en matière de classement. |
Ne nécessite pas forcément de modifications législatives ou réglementaires. |
Quatre préconisations nécessitant la définition des modalités concrètes de leur mise en œuvre (au niveau réglementaire) | ||
Proposition n°5 |
Définir dans le code du tourisme trois modes d’occupation des emplacements des terrains aménagés (nus, locatifs ou résidentiels). |
Dispositions réglementaires (code du tourisme), à coordonner avec le code de l’urbanisme. |
Proposition n°7 |
Réforme du dispositif permettant l’inspection des terrains de camping, en vue de mieux recenser l’habitat permanent. |
Dispositions réglementaires (code du tourisme), à coor-donner avec le code général des collectivités territoriales. |
Proposition n°9 |
Possibilité de limiter le nombre de résidences mobiles de loisirs implantées dans les terrains situés dans les zones sensibles. |
Dispositions réglementaires (code de l’urbanisme) |
Proposition n°8 |
Permettre aux maires, sous certaines conditions, d’imposer une période de fermeture annuelle obligatoire des terrains de camping |
Dispositions réglementaires (code de l’urbanisme, code général des collectivités terri-toriales) |
Quatre objectifs de long terme | ||
Proposition n°1 |
Harmonisation et coordination des dispositions des différents codes en matière d’habitats légers de loisirs et d’aménagement/exploitation des terrains aménagés. |
Mettre en place un dispositif de veille sur les plans législatifs et réglementaires. |
Proposition n°4 |
Élaborer un document unique récapi-tulatif de l’ensemble des dispositions applicables en matière d’hébergement de plein air. |
Faire le point dans six mois sur l’état d’avancement des travaux. |
Proposition n°12 |
Réforme de la taxe de séjour : possibilité de moduler celle-ci au sein d’un même terrain de camping pour l’application du système forfaitaire » aux seuls emplacements résidentiels. |
Attendre les retours sur l’impact de la réforme de la taxe professionnelle pour mieux évaluer le besoin en la matière. |
Proposition n°13 |
Mieux définir et encourager l’aménage-ment d’aires spécifiques de camping-car et, le cas échéant, création d’une contribution spécifique. |
Procéder préalablement à une estimation des besoins (quantitatifs, qualitatifs et géographiques). |
Lors de sa réunion du 29 septembre 2009, la commission des affaires économiques a examiné le rapport d’information de M. Jean-Louis Léonard et Mme Pascale Got sur le statut et la réglementation des habitats légers de loisirs.
M. le Président Patrick Ollier. Nous passons maintenant à l’examen du rapport de la mission d’information sur le statut et la réglementation des habitats légers de loisirs. Mme Pascale Got et M. Jean-Louis Léonard ont été nommés rapporteurs de cette mission il y a plus d’un an, le 8 juillet 2009. Le sujet avait été effleuré au cours de l’examen du projet de loi de développement et de modernisation des services touristiques, dont M. Léonard était le rapporteur. Des amendements avaient alors été déposés, mais nous étions convenus, plutôt que de légiférer à la hâte, de constituer une mission d’information et de prendre le temps de réfléchir. Nos collègues devraient aujourd’hui nous aider à y voir plus clair sur cette réglementation. Je signale que je n’accepterai pas de question sur le sujet des gens du voyage, qui n’a rien à voir. Ceux qui sont intéressés par le sujet peuvent se tourner vers la mission d’information qui a été créée par la commission des lois, et dont le rapporteur est M. Didier Quentin.
M. Jean-Louis Léonard, rapporteur. Je vais commencer par rappeler un peu le contexte, la rapporteure traitera ensuite le sujet des dérives et nous présenterons ensemble nos propositions.
La question des habitats légers de loisirs est apparue à l’occasion de la discussion de la loi sur le tourisme mais nous avions alors très peu de données en raison du manque de suivi statistique. Il existe en fait deux types de conflits : d’une part entre les propriétaires de mobile-homes et les exploitants des terrains de camping ; d’autre part entre les propriétaires de parcelles privées utilisées pour y stationner des mobile-homes et les autorités publiques.
Dans les années 1950, le camping était libre mais la prolifération a conduit à une réglementation. C’est le même problème aujourd’hui avec les mobile-homes. La réglementation est par ailleurs totalement éclatée : les dispositions essentielles figurent dans les codes de l’urbanisme et du tourisme mais elles renvoient aussi aux codes de l’environnement, des collectivités territoriales, des impôts et de la route…
Le mobile-home échappe aux classifications habituelles puisque c’est un véhicule qui n’est pas immatriculé. D’où la proposition qui sera avancée tout à l’heure de préciser son régime d’installation et d’utilisation.
Les habitats légers de loisirs comprennent plusieurs catégories : l’habitation légère de loisir, qui est une construction légère démontable, dont le statut est prévu par le code de l’urbanisme et qui ne pose pas vraiment de difficultés ; la caravane, qui ne pose pas non plus de problèmes spécifiques, hormis le cas des camping-cars et de leur stationnement ; enfin, il y a les mobile-homes, qui sont définis dans le code de l’urbanisme depuis 2007 seulement, et qui répondent à une norme technique spécifique puisqu’ils doivent réglementairement pouvoir être déplacés à cinq kilomètres heures pendant 500 mètres, mais le sont assez peu en pratique.
Pour dresser un panorama au sujet des terrains, je rappellerai qu’il existe en France 8 000 terrains de camping classés. Le chiffre a peu évolué au cours des dernières années : il a même légèrement baissé. L’occupation des emplacements, en revanche, a changé. Au début des années 1960, seules des toiles étaient installées dans ces terrains, avant que ne se diffusent les caravanes jusque dans les années 1980. À partir des années 1990 ont commencé à se répandre les mobile-homes, sans que l’on puisse dans un premier temps, par manque d’outils statistiques, identifier distinctement cette pratique de camping.
Le parc français de caravanes s’élève à 800 000 unités environ, avec 10 000 ventes de véhicules neufs par an, alors que des pointes de 25 000 ventes avaient été atteintes par le passé. Il y a aussi 200 000 camping-cars immatriculés, avec 15 000 à 25 000 ventes par an. Enfin, le parc de mobile-homes, de l’ordre de 400 000, est plus difficile à évaluer. On sait qu’il y en a environ 220 000 qui appartiennent à des particuliers, les autres étant loués par les exploitants des terrains sous régime hôtelier. Il va falloir clarifier tout cela.
La croissance du parc de mobile-homes semble se tasser depuis deux ou trois ans, en raison notamment des problèmes concernant les relations contractuelles. L’exploitation locative ne pose pas de grandes difficultés et ce marché continue de croître. Le problème se concentre autour de la pratique « résidentielle ».
Il faut en effet distinguer trois modes d’occupation des terrains : l’emplacement de camping loué sans équipement pour les campeurs de passage, l’emplacement loué avec équipement à la nuitée ou à la semaine, enfin l’emplacement loué en général à l’année, pour l’installation d’un mobile-home.
Je terminerai cette présentation générale en rappelant que la filière des « véhicules de loisirs » représente 7 000 emplois industriels en France, qui sont des emplois peu délocalisables du fait des contraintes d’acheminement, et 5 000 emplois au niveau de la distribution. La France se situe aujourd’hui au premier rang européen dans ce domaine.
M. le Président Patrick Ollier. Avant de passer la parole à Mme la rapporteure pour qu’elle nous expose les dérives auxquelles le secteur se trouve confronté, je voudrais souligner que le principal problème me semble être les relations contractuelles entre propriétaires de terrains et de mobile-homes, et j’ai vu que vous faisiez des propositions visant à améliorer ces relations.
Mme Pascale Got, rapporteure. Une première série de dérives est effectivement liée effectivement aux relations contractuelles entre les propriétaires de mobile-homes et les gestionnaires de terrains, du fait de la précarité du contrat qui les lie.
Certains gestionnaires exploitent à leur avantage les paramètres suivants : l’obligation légale d’installer un mobile-home dans les terrains de camping, qui crée une certaine pression sur les emplacements disponibles ; le coût du déplacement des mobile-homes, qui ne peut s’effectuer que par convoi exceptionnel ; enfin, l’absence d’encadrement spécifique du contrat de location d’emplacement.
On peut ainsi trouver dans ces contrats des clauses abusives, à l’avantage du gestionnaire, portant sur leur non renouvellement, l’augmentation disproportionnée des prix d’une année à l’autre, l’obligation de changer de mobile-home au vu de considérations esthétiques ou liées à la vétusté sans préciser les critères. Ces dérives frappent une population captive, qui n’a pas forcément de grands moyens financiers mais qui cède aux pressions car elle n’a pas vraiment le choix. Le fait de « trop tirer sur la corde » suscite toutefois aujourd’hui des réactions de leur part : certains saisissent des associations de consommateurs et d’autres entament directement des procédures judiciaires. Ces procédures ont débouché sur un début de jurisprudence : le non renouvellement sans motif du contrat a ainsi été assimilé par le juge à un refus de prestation de vente.
En 2005, la commission des clauses abusives a émis des recommandations sur ce sujet, mais celles-ci, par définition, n’ont pas d’effet contraignant. La Fédération nationale de l’hôtellerie de plein air est aujourd’hui consciente du problème ; une charte de transparence a été signée et un modèle de contrat-type à usage facultatif a été élaboré. Ce contrat-type n’étant pas obligatoire, il est nécessaire de prévoir un encadrement des contrats par la loi et de prendre rapidement cette mesure.
Une deuxième série de dérives est liée aux problèmes d’aménagement. D’abord, il y a encore beaucoup de mobile-homes sur les parcelles privées, 250 000 d’après les estimations, dont 80 % d’installations en infraction avec les codes de l’urbanisme ou de l’environnement. Il y a aussi les extensions, plutôt douteuses, en fond de parcelle, avec des aménagements qui ne sont pas conformes à la loi, souvent dans des zones sensibles. Dans certains endroits, on assiste à des véritables « invasions » de mobile homes, avec des sortes de lotissements « légers ».
La sédentarisation pose aussi des difficultés de deux ordres au sein des terrains de camping aménagés.
Premièrement, les mobile-homes peuvent devenir des sortes de résidences secondaires installées de manière permanente, par exemple dans les zones littorales, onéreuses. L’installation de ceux-ci permet en effet de contourner la limitation des autorisations de construire, qui ne concerne, à l’intérieur des terrains de camping, que les habitations légères de loisirs (20 % des emplacements au maximum). De nouveaux modèles d’exploitation ont aussi vu le jour, suite à la limitation des effets de la « vente à la découpe » en 2009, avec la conclusion de baux emphytéotiques de trente ans ou encore des achats de parts sociales dans la société propriétaire du terrain.
Deuxièmement, il y a la question de l’habitat permanent au sein des terrains de camping, qui ne s’inscrit plus cette fois dans une vocation touristique, et qui concernerait 70 000 à 120 000 personnes, souvent en situation de précarité. Cela toucherait aussi des étudiants en périphérie de grandes villes. Il ne s’agit pas du tout de condamner ces personnes, mais il faut reconnaître qu’il y a là un problème.
Concernant les camping-cars, l’essentiel des dérives est lié à des encombrements de stationnement, surtout en bord de mer…
M. le Président Patrick Ollier. …et aussi à la montagne…
Mme Pascale Got, rapporteure. …c’est vrai, aussi à la montagne. Ces encombrements mettent en première ligne les élus locaux des communes concernées, et qui ont parfois du mal à faire face.
J’ajouterai, M. le rapporteur l’a dit tout à l’heure, que la traçabilité des mobile-homes est très faible. Cela pose des difficultés notamment au regard du recyclage des équipements en fin de vie, surtout des premiers modèles installés, qui connaissent parfois une deuxième et une troisième vies en dehors des terrains aménagés.
M. le président Patrick Ollier. Je félicite les rapporteurs pour leur excellent travail. J’ai été frappé par ce que la rapporteure vient de dire sur les camping-cars car j’ai moi-même rencontré ces difficultés au cours de ma double vie d’élu local, à la fois d’une station de montagne et d’une commune de la région parisienne. Je connais des élus qui ont été obligés d’aller directement parlementer avec des propriétaires de camping-car stationnés qui provoquaient des nuisances.
La question des parcelles privées utilisées illégalement pour le stationnement de mobile homes, en contradiction avec les règles d’urbanisme, est très importante aussi car ces installations sont tout à fait critiquables sur un plan esthétique. Je vais maintenant passer la paroles aux représentants des groupes afin qu’ils puissent réagir.
M. Daniel Fasquelle. Au nom du groupe UMP, je tiens à remercier les rapporteurs pour le travail très intéressant et très fouillé qu’ils ont présenté ainsi que pour leurs treize propositions. C’était un travail nécessaire. Toutefois, les difficultés évoquées ne doivent pas masquer l’essentiel : l’apport de l’hôtellerie de plein air au secteur du tourisme et les réponses qu’elle fournit à la demande des Français. L’hôtellerie de plein air a beaucoup évolué pour satisfaire les attentes de ses clients et il faut saluer le travail des professionnels et de leurs fédérations, qui a permis une nette montée en gamme depuis 10 ans. Certes, il y a encore des dérives et on peut mieux faire : le législateur doit intervenir pour apporter des réponses.
La question de la sédentarisation est fondamentale : l’hôtellerie de plein air ne doit pas servir un autre but que le sien. En matière de fiscalité, il convient absolument de ne pas appliquer la taxe d’habitation puisque nous ne sommes pas en présence de résidences secondaires. Toutefois la fiscalité actuelle est insuffisante au regard des services fournis par les municipalités, qui sont les mêmes que pour les résidences secondaires. Cette situation, qui aboutit à une inégalité de traitement entre les contribuables, selon qu’ils sont propriétaires de résidences secondaires ou de mobile-homes, doit évoluer. Pour ce faire, une modification de la taxe de séjour est nécessaire. Les relations contractuelles constituent également un point majeur du débat et suscitent une attente importante de la part des associations de consommateurs. Il convient de faire en sorte que ces relations s’inscrivent dans la durée, qu’elles soient sécurisées et que les évolutions tarifaires soient encadrées. La protection de l’environnement est également un volet essentiel, dans la mesure où les terrains se situent souvent dans des zones naturelles protégées ou sur des sites exceptionnels. Enfin, on constate aussi des dérives avec les camping-cars qui se transforment en habitations à l’année.
M. Jean Gaubert. Je félicite à mon tour les deux rapporteurs pour leurs travaux. La gestion commerciale est au cœur du sujet : aujourd’hui, les contrats sont déséquilibrés et, les mobile-homes étant difficilement transportables, leurs propriétaires se retrouvent piégés et contraints de renouveler leurs contrats de location sans discussion possible. Sans compter qu’il y a parfois collusion entre les constructeurs de mobile-homes et les propriétaires de campings. Il est donc impossible de faire jouer la concurrence. Le deuxième point crucial concerne les règles d’urbanisme. La situation actuelle démontre l’absence d’anticipation : ainsi, il arrive que des municipalités délèguent la gestion de terrains à des personnes privées qui les transforment ensuite en « cités minières » avec un alignement de mobile-homes dignes des HLM. Enfin, sur la fiscalité, il convient de faire très attention à ne pas prendre acte de la permanence de l’occupation en étendant la taxe d’habitation aux mobile-homes. Une participation est cependant nécessaire. Enfin, Mme Pascale Got évoquait le recyclage des mobile-homes : peut-être pourrait-on étendre ce champ d’activité aux auto-entrepreneurs ?
M. Jean-Louis Léonard. Je tiens à souligner que des efforts ont été faits, notamment avec la généralisation des chartes paysagères pour les terrains nouvellement aménagés. Quant aux terrains existants, le Grenelle II a permis d’imposer, à mon initiative, que leurs propriétaires présentent un projet paysager dans les trois ans suivant le vote de la loi, et le mettent en œuvre dans les cinq années qui suivent.
Par ailleurs, je tiens à insister sur l’importance du contrôle des campings. Ceux-ci sont agréés par les services de l’État pour un certain nombre d’emplacements mais ensuite il n’y a aucun contrôle, ni de l’État ni de la mairie, le maire n’étant d’ailleurs pas habilité à inspecter les terrains privés et à y intervenir, sauf trouble à l’ordre public. C’est pourquoi nous préconisons la réforme du régime d’inspection pour l’étendre aux maires. Nous préconisons aussi une obligation de déclaration en mairie lors de l’installation d’un mobile-home sur un terrain en location situé sur le territoire de la commune, comme cela a été prévu pour les meublés de tourisme dans le cadre de la loi de développement et de modernisation des services touristiques. En matière de fiscalité, il convient de conserver les spécificités actuelles de la taxe de séjour pour tous les séjours à la nuitée ou à la semaine. En revanche, il conviendrait d’identifier au sein des terrains les emplacements qui relèvent du mode d’occupation à l’année par des particuliers et que le maire puisse y appliquer une taxe de séjour forfaitaire s’il le souhaite. Cela ne nécessiterait qu’une petite modification du droit en vigueur. Après, la question de l’affectation de la taxe doit également être posée.
Mme Pascale Got. Pour revenir sur ce qu’a dit M. Fasquelle, il est clair que les actions de la Fédération nationale de l’hôtellerie de plein air vont dans le bon sens, mais il ne faut pas oublier que tous les exploitants de terrains ne sont pas adhérents de cette fédération… Les préoccupations que nous soulevons dans le rapport sont identiques à celles de la Fédération mais la réponse à y apporter doit aller un peu plus loin que la charte et le contrat-type qu’elle a élaborés. Il est impératif que les cinq clauses que nous préconisons figurent à l’avenir dans tous les contrats :
- la durée du contrat de location ;
- les conditions de renouvellement et de résiliation ;
- le calcul du montant et de l’évolution du prix ;
- les normes applicables pour l’appréciation de la vétusté du mobile-homes ;
- un rappel des normes techniques en vigueur.
Bien entendu, il ne s’agit pas d’imposer des contrats uniformes mais ces clauses doivent constituer un socle. Les constructeurs de mobile-homes y sont d’ailleurs favorables. Ils ont en effet vu récemment leurs ventes chuter, certes en raison de la crise, mais vraisemblablement aussi du fait de la multiplication des contentieux. Il convient donc de normaliser les relations contractuelles afin de préserver ce mode de camping qui est très apprécié et très valorisant pour nos territoires.
M. Louis-Joseph Manscour. Je ne comprends pas qu’il soit impossible aux maires de contrôler l’installation des mobile-homes sur le territoire de leurs communes.
M. Jean-Louis Léonard. Sur les terrains privés non aménagés, l’installation de mobile-homes est interdite et le maire a tout pouvoir de faire respecter la loi. Pour les terrains de camping privés, l’agrément est délivré par l’État avec un nombre d’emplacements précis. Le maire n’intervient pas. Or, il s’avère que sur des terrains existant de longue date, la capacité d’accueil a parfois été démultipliée sans le moindre contrôle. C’est pourquoi il convient de conférer aux maires la capacité d’intervenir.
M. le Président Patrick Ollier. Que pensez-vous de la TOPTENOB ? La taxe d’occupation provisoire des terrains non bâtis : c’est ainsi que pourrait se nommer la taxe sur l’occupation des mobile-homes. Ce nom véhicule bien à la fois la notion d’occupation temporaire et d’absence de bâti, qui sont deux éléments fondamentaux.
M. Jean-Louis Léonard. Le nom est intéressant, en effet, mais l’idée n’est pas d’inventer une nouvelle taxe ; il suffit d’utiliser intelligemment les outils qui existent déjà en les adaptant à la marge.
M. le Président Patrick Ollier. Certes, mais cet outil devra être identifié clairement et refléter les deux idées qui le sous-tendent : pas d’occupation permanente par les personnes et pas de bâti. Mais nous aurons l’occasion d’en reparler.
Je propose maintenant à la Commission d’autoriser la publication de ce rapport.
La publication du rapport est autorisée à l’unanimité.
ANNEXE I – GLOSSAIRE DES TERMES EMPLOYÉS
Le camping
Le camping peut se définir, d’une manière générale, comme une pratique à vocation touristique ou de loisir, se caractérisant par l’occupation saisonnière d’un habitat léger. Il se décline en camping libre, en camping déclaré et en camping sur terrains aménagés.
- Camping déclaré : en deçà de six installations et de vingt personnes, le camping fait simplement l’objet d’une déclaration. On parle alors d’aires naturelles de camping ou de camping à la ferme.
- Camping libre : le camping est d’abord défini dans le code du tourisme comme une activité qui se pratique librement, avec l’accord de celui qui a la jouissance du sol, sous réserve le cas échéant, de l’opposition du propriétaire. Cette forme constitue le camping libre.
- Camping sauvage : terme usuel servant à désigner le camping libre pratiqué sans l’accord de celui qui a la jouissance du sol, et encore moins du propriétaire.
- Camping sur terrains aménagés : la définition du camping dans le code du tourisme comporte un second versant, aujourd’hui prédominant : « [Le camping] peut être pratiqué sur des terrains aménagés, dans les conditions prévues par les dispositions [réglementaires du présent code] ».
Les habitats légers de loisirs
Le code de l’urbanisme définit trois grandes catégories d’habitats légers de loisirs : la caravane, la résidence mobile de loisirs (mobile-home) et l’habitation légère de loisirs.
- Caravanes et autocaravanes (camping-cars) : « Sont regardés comme des caravanes les véhicules terrestres habitables qui sont destinés à une occupation temporaire ou saisonnière à usage de loisir, qui conservent en permanence des moyens de mobilité leur permettant de se déplacer par eux-mêmes ou d'être déplacés par traction et que le code de la route n'interdit pas de faire circuler. » (article R. 111-37 du code de l’urbanisme). Le camping-car est considéré comme une caravane.
- Habitations légères de loisirs : « Sont regardées comme des habitations légères de loisirs les constructions démontables ou transportables, destinées à une occupation temporaire ou saisonnière à usage de loisir. » (article R. 111-31 du code de l’urbanisme)
- Résidences mobiles de loisirs (« mobile-homes ») : « Sont regardés comme des résidences mobiles de loisirs les véhicules terrestres habitables qui sont destinés à une occupation temporaire ou saisonnière à usage de loisir, qui conservent des moyens de mobilité leur permettant d'être déplacés par traction mais que le code de la route interdit de faire circuler. » (article R. 111-33 du code de l’urbanisme)
- Véhicules de loisirs : terme usuel servant à désigner les caravanes, les camping-cars et les mobile-homes.
Les terrains permettant d’accueillir les campeurs
- Terrains aménagés : terme usuel servant à désigner les structures collectives faisant l’objet d’une exploitation permanente ou saisonnière, constitués d’emplacements nus ou équipés ainsi que d’équipements communs, et accueillant au sein d’habitats légers de loisirs une clientèle qui n’y élit pas domicile.
- Parc résidentiel de loisirs : terrain aménagé destiné à l’accueil d’habitats légers à vocation de loisirs, susceptible d’être exploité par cession d’emplacement, par location d’emplacement de longue durée, ou sous régime hôtelier (location inférieure au mois). L’exploitation sous régime hôtelier ne peut se faire qu’à la double condition qu’une seule personne physique ou morale ait la propriété ou la jouissance du terrain et que l’exploitation en soit assurée par une seule personne physique ou morale.
- Terrains de camping et de caravane : « Les terrains aménagés de camping et de caravanage sont destinés à l'accueil de tentes, de caravanes, de résidences mobiles de loisirs et d'habitations légères de loisirs. Ils sont constitués d'emplacements nus ou équipés de l'une de ces installations ainsi que d'équipements communs. Ils font l'objet d'une exploitation permanente ou saisonnière et accueillent une clientèle qui n'y élit pas domicile ». On utilise plus fréquemment pour les désigner l’expression « terrains de camping », voire tout simplement l’expression « camping ».
- Terrains (ou parcelles) privées : terrains sur lesquels peut-être pratiqué le « camping autorisé », moyennant certaines conditions. Il existe aussi un camping sur parcelles privées illégal.
Au sein des terrains aménagés
La distinction tourisme/loisirs (selon la durée du séjour)
- Emplacement « loisirs » : se dit d’un emplacement situé au sein d’un terrain aménagé, destiné à une location d’une durée supérieure au mois.
- Emplacement « tourisme » : se dit d’un emplacement situé au sein d’un terrain aménagé, destiné à la location à la nuitée, à la semaine ou au mois.
La distinction selon le mode général d’occupation
- Emplacement locatif : emplacement loué équipé à une clientèle de passage (à la nuitée ou à la semaine). On parle aussi d’exploitation sous régime hôtelier.
- Emplacement nu : emplacement loué à la nuitée, à la semaine ou au mois, à une clientèle de passage qui installe et replie l’habitat léger de loisir dont elle dispose (tente ou caravane).
- Emplacement résidentiel : emplacement loué le plus souvent à l’année pour l’installation d’un mobile-home appartenant à un propriétaire privé.
La distinction des contrats
- Contrat d’hôtellerie de plein air : contrat par lequel l’exploitant d’un terrain aménagé met à la disposition de sa clientèle un emplacement équipé d’un habitat léger de loisirs (exploitation sous régime hôtelier).
- Contrat de location d’emplacement : contrat par lequel l’exploitant d’un terrain aménagé met à la disposition de sa clientèle un emplacement nu pour une durée inférieure à un mois (contrat tourisme), ou supérieure (contrat loisirs).
ANNEXE II – LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA MISSION D’INFORMATION
(Les auditions sont présentées dans l’ordre chronologique)
Fédération nationale de l’hôtellerie de plein air (FNHPA)
– M. Guylhem Féraud, président
– Mme Joëlle Rohaut, vice-présidente
– M. Michel Dubié, secrétaire
– M. Nicolas Bouvier, cabinet Edelman
UFC Que Choisir
– M. Cédric Musso, directeur des relations institutionnelles
– M. Michel Duvernoy, administrateur national
Association nationale des maires des stations classées et des communes touristiques (ANMSCCT)
– Mme Géraldine Leduc, directrice générale
– M. Michaël Bismuth, chargé de mission
Union des industries du véhicule de loisirs (UNI-VDL)
– M. François Feuillet, président d’UNI VDL et PDG de Trigano,
– M. Patrick Mahé, vice-président de la section Résidences mobiles de loisirs de l’UNI-VDL, membre du conseil de surveillance du groupe Bénéteau
– Mme Caroline Nagiel, déléguée générale d’UNI VDL
Fédération nationale des distributeurs de véhicules de loisirs
– M. Patrick Sanz, président
– M. Pascal Arnoud, délégué général
Fédération française de camping et de caravaning
– M. Gérard Coute, président
– Mme Fabienne Pionneau, directrice générale
Union nationale des campings et des parcs résidentiels de loisirs (UNAPAREL)
– Mme Sylvie Henry, présidente
Ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi – Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services
– M. Jacques Augustin, sous directeur du tourisme
Ministère de l’Intérieur – Direction générale des collectivités locales
– Mme Sophie Guiroy, conseillère d'administration, chef du bureau de la domanialité, de l’urbanisme, de la voirie et de l’habitat
Ministère de l’Écologie et du développement durable
– M. Philippe Baffert
– Mme Nathalie Mullié, chef du bureau de la législation et de l’urbanisme
– Mme Valérie Lasek, chef de cabinet du Directeur de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages
Atout France
– M. Philippe Maud’hui, directeur de l’ingénierie et du développement
– M. Christophe de Chassey, sous-directeur destinations et filières
Ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi – Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudses – Commission des clauses abusives
– Mme Marianick Lambert, responsable juridique de l’Union féminine, civique et sociale (UFCS)
– Mme Ariane Pommery, consultante juridique à l’association de défense, d’éducation et d’information du consommateur (ADEIC)
– M. Nicolas Mathey, professeur à la Faculté de droit Paris Descartes
Direction départementale des territoires de l’Oise
– Mme France Poulain, architecte et urbaniste, responsable du service de l’aménagement, de l’urbanisme et de l’énergie
Emmaüs France
– M. Patrick Dugois, délégué général d’Emmaüs France
Table ronde organisée le 21 mai 2010 en mairie d’Hourtin (Gironde)
– M. Christophe Birot, maire d’Hourtin, 2ème vice-président de la commu-nauté de communes des Lacs Médocains,
– M. Jean-Marie Darmian, maire et conseiller général, président du comité départemental du tourisme (CDT) de la Gironde,
– M. Pascal Fenié, adjoint au maire de Lacanau, 4ème vice-président de la communauté de communes des Lacs Médocains (Commission tourisme),
– M. Jean-Pierre Molénat, chef de l’unité Tourisme (Direction départe-mentale des territoires et de la mer),
– M. William Jamet, chargé de mission à la communauté de communes des Lacs Médocains,
– M. Olivier Chanu, directeur du comité départemental du tourisme de Gironde.
1 () France Poulain, Le camping aujourd’hui en France, entre loisir et précarité, éditions de la Direction départementale de l’équipement et de l’agriculture de l’Oise, 2009.
2 () Ministère de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi. Bilan de l’activité touristique 2009 et les perspectives pour 2010 : http://www.economie.gouv.fr/presse/dossiers_de_presse/100413bilan_activite_touristique.pdf .
3 () France Poulain, op.cit.
4 () Le plus ancien club de France spécialisé en matière de camping, le Camping Club de France, remonte précisément à 1910.
5 () Pour un panorama historique d’ensemble, on se reportera avec intérêt à l’ouvrage de François Perroy, Le camping, (PUF, 1998) et à celui de France Poulain déjà cité.
6 () Le camping devient aussi, surtout à partir des années 1970, le lieu de destination privilégiée d’une clientèle européenne (principalement des Néerlandais, des Allemands et des Anglais), qui dépasse aujourd’hui les deux millions de personnes.
7 () Voir notamment CE, 30 déc. 1998, SARL Madex
8 () Une différenciation s’opère en pratique sur la base de considérations matérielles et eu égard à l’usage sur la voie publique entre caravanes et camping-cars. Le cas particulier du stationnement des camping-cars est traité séparément.
9 () Les « résidences mobiles » constituant l’habitat permanent des gens du voyage sont distinguées des autres caravanes par l’article R. 421-23 di code de l’urbanisme (paragraphes d et j) et sont installées sur des aires d’accueil spécifiques (terrains mentionnés aux j et k de l’article R. 421-23 du code de l’urbanisme.
10 () Article L. 443-3-1 du code de l’urbanisme. La question de la parcellisation des terrains aménagés sera traitée ultérieurement.
11 () Voir la réponse ministérielle publiée dans le JO Sénat du 08/02/2007 à la question écrite n° 25128 de M. André Rouvière, sénateur du Gard, sur la législation relative à l’implantation des « yourtes ».
12 () Les dispositions relatives à l’interdiction ou à la limitation de la pratique du camping figurent par ailleurs aux articles R 111-41 à R. 111-43 du code de l’urbanisme.
13 () Cette distinction issue du décret du 11 janvier 1993 relatif au classement des terrains de camping avait été abrogée par un décret de décembre 2009. Elle a été réintroduite par le décret du 6 juillet 2010.
14 () Il est à noter également que la nouvelle rédaction de cet article interdit la multipropriété dans les parcs résidentiels de loisirs exploités sous régime hôtelier.
15 () Source : Camping holidays in the European Union: more than 350 million nights spent on campsites in 2008 (Eurostat)
16 () Le cas échéant, les terrains développent également une activité de « garage hors saison » pour les caravanes.
17 () Sur les questions liées à la sédentarisation, on se permettra de renvoyer aux travaux de France Poulain sur les différents versants de l’appropriation des habitats légers en dehors et au sein des terrains aménagés (http://francepoulain.over-blog.com)
18 () Ces estimations figurent dans le rapport 2010 sur le « mal-logement » de la Fondation Abbé Pierre et se fondent sur les données d’une étude de 2005 pilotée par le CNRS (France Poulain) et le Pôle national de lutte contre l’habitat indigne.
19 () Ces chiffres sont supérieurs à ceux annoncés concernant la pratique annuelle. Ils correspondent à ce qu’on pourrait appeler la population des campeurs réguliers, qui ne campent pas systématiquement chaque année.
20 () Les habitations légères de loisirs, du fait de leur moindre spécificité (ce sont des constructions qui peuvent être implantées en dehors d’une structure de loisirs dès lors qu’elles sont soumises au droit commun des constructions), ne sont pas concernées directement.
21 () Chiffres disponibles lors du salon annuel des véhicules de loisirs du Bourget (26 sept. / 4 oct. 2009)
22 () Cette refonte s’inscrit dans le cadre du vote de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite « Grenelle II ».
23 () Cette catégorie comprend les véhicules dont le poids total autorisé en charge est inférieur à 3,5 tonnes, soit la quasi-totalité du parc de camping-cars. Ce n’est que lorsqu’ils dépassent ce poids que les camping-cars entrent dans la catégorie « poids-lourds ».
24 () Arrêté du 12 avril 2000 modifiant l’arrêté du 11 janvier 1993 relatif au classement des terrains aménagés pour l’accueil des campeurs et des caravanes
25 () CE, 15 octobre 2007, FDHPA de Charente-Maritime contre Commune de Saint-Martin de Ré
26 () Cass.Crim, n°09-80192, 8 septembre 2009
27 () « Les monuments naturels ou les sites classés ne peuvent ni être détruits ni être modifiés dans leur état ou leur aspect sauf autorisation spéciale »
28 () Une taxe d’habitation spécifique pour ce type d’habitat, dont le montant est basée sur la superficie et dont la collecte est effectuée au niveau national, est officiellement entrée en vigueur le 1er janvier 2009 (article 1595 quater du code général des impôts). Son application effective semble néanmoins poser problème.
29 () Dans certains cas, le client ou l’une des personnes l’accompagnant peut toutefois en être exempté.
30 () Rapport d’information sur la taxe de séjour (n°3226), présenté par M. Michel Bouvard au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 11 juillet 2001 (Onzième législature).
31 () Les commissions départementales d’action touristiques sont également encore mentionnées dans les articles R. 331-8, D. 331-9, D. 325-21 et R. 325-23 du code du tourisme…
32 () Articles R. 325-9, R. 332-7 et R. 333-6 applicables respectivement aux villages de vacances, aux terrains de camping et aux parcs résidentiels de loisirs.
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