N° 1047 N° 454
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ASSEMBLÉE NATIONALE SÉNAT
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2007 - 2008
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Enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale Annexe au procès-verbal
Le 9 juillet 2008 de la séance du 9 juillet 2008
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OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION
DES CHOIX SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES
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sur l’amélioration de la sécurité des barrages et ouvrages hydrauliques
Par M. Christian Kert
Député
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Déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale Déposé sur le Bureau du Sénat
par M. Claude BIRRAUX, par M. Henri REVOL,
Président de l'Office Premier Vice-Président de l'Office
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Composition de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques
Président
M. Claude BiRRAUX
Premier Vice-Président
M. Henri REVOL
Vice-Présidents
M. Claude GATIGNOL, député M. Jean-Claude ÉTIENNE, sénateur
M. Pierre LASBORDES, député M. Pierre LAFFITTE, sénateur
M. Jean-Yves LE DÉAUT, député M. Claude SAUNIER, sénateur
DÉputés |
SÉnateurs |
M. Christian BATAILLE M. Claude BIRRAUX M. Jean-Pierre BRARD M. Alain CLAEYS M. Pierre COHEN M. Jean-Pierre DOOR Mme Geneviève FIORASO M. Claude GATIGNOL M. Alain GEST M. François GOULARD M. Christian KERT M. Pierre LASBORDES M. Jean-Yves LE DÉAUT M. Michel LEJEUNE M. Claude LETEURTRE Mme Bérengère POLETTI M. Jean-Louis TOURAINE M. Jean-Sébastien VIALATTE |
M. Philippe ARNAUD M. Paul BLANC Mme Marie-Christine BLANDIN Mme Brigitte BOUT M. Marcel-Pierre CLÉACH M. Roland COURTEAU M. Jean-Claude ÉTIENNE M. Christian GAUDIN M. Pierre LAFFITTE M. Serge LAGAUCHE M. Jean-François LE GRAND Mme Catherine PROCACCIA M. Daniel RAOUL M. Ivan RENAR M. Henri REVOL M. Claude SAUNIER M. Bruno SIDO M. Alain VASSELLE |
chapitre premier : Le patrimoine 13
b) Les barrages à contreforts 16
a) La production d'énergie électrique 26
b) L'alimentation en eau potable 26
c) L’irrigation des terres agricoles 26
d) L'alimentation des canaux de navigation. 27
f) Le tourisme et les loisirs aquatiques 27
g) La protection contre les crues. 27
h) Les canaux de navigation ou d’amenée d’eau. 27
i) L'alimentation des canons à neige 27
j) La décantation et/ou le stockage de résidus miniers ou industriels; la régulation des rejets. 27
1) Comment surveille-t-on un barrage ? 40
2) La nouvelle classification française des digues et barrages 45
a) L’inspection des ouvrages 47
b) Auscultation des barrages 49
c) Contrôle de la fonctionnalité des organes d'évacuation 50
d) L'auscultation en lien avec la métrologie 58
h) Principes de mesure en surveillance des barrages 60
Chapitre 2 : Les missions de votre rapporteur 63
a) Le barrage de Sainte Croix : un exemple de grande retenue en zone de montage 72
b) Les barrages du Rhin : barrages au fil de l’eau 75
a) Des besoins spécifiques aux digues 101
b) Historique du projet "SIRS digues" 102
c) Les associations de gestion des digues de grands fleuves 103
a) La mine de DAMREC Glomel 113
b) Les barrages de Cotillon 115
Chapitre 3 : Les barrages et ouvrages hydrauliques face aux risques naturels 119
1) Le point de vue français 119
2) Les travaux du Comité technique « aspects sismiques des projets de barrages » de la CIGB 120
Chapitre 4 : La recherche en matière de barrages et digues 127
b) Des innovations techniques expérimentales, en France, au barrage de Puylaurent 135
a) L’alcali-réaction, maladie du Chambon 138
b) La réaction sulfatique interne (RSI), maladie de Bimont 141
CHAPITRE 5 : LA REGLEMENTATION EST ELLE SUFFISANTE ? 143
I - L'enquete dans les grands pays de barrages 143
ii - LA LOI EST UNIQUE, MAIS L'APPLICATION EST LOCALE. 143
iii – L’APPLICATION DU DECRET DE DECEMBRE 2007 ET SES dÉfauts 144
Lorsque votre rapporteur a présenté devant les membres de l’Office son étude de faisabilité, il avait précisé avoir hésité à conclure à l’utilité de ce rapport. En effet, un certain nombre d’éléments, règlementaires ou techniques, venaient actualiser un dossier « sécurité des barrages » et semblaient répondre aux besoins alors exprimés, notamment par un rapport interne d’ingénieurs EDF, repris largement par le magazine « Capital ».
Aujourd’hui, votre rapporteur ne regrette pas d’avoir proposé à l’Office Parlementaire de poursuivre l’étude et d’en amplifier son périmètre. En effet, si les grands barrages hydroélectriques français posent moins de problèmes cruciaux et immédiats qu’il n’y paraissait en première analyse – et le projet de rénovation du patrimoine hydraulique « Sûreté et Performance de l’hydraulique » que nous appellerons dans la suite du rapport « plan SuPerHydro », voulu par la direction d’EDF, participe à cet « apaisement » - les petits barrages notamment, et un certain nombre de digues à travers la France, malgré une règlementation plus contraignante depuis le décret de décembre 2007 , ne répondent que très partiellement aux critères de maintenance et de sécurité que l’on pourrait attendre de tels ouvrages.
Quelques chiffres introductifs pour situer l’importance du sujet en France, un pays riche en barrages et digues. Soumis à une règlementation copiée par de nombreux pays à travers le monde mais dont l’application demeure imparfaite :
Le parc français des barrages a été récemment évalué : 744 ouvrages de plus de 10 mètres de haut et plusieurs milliers d’ouvrages de taille inférieure ! On dénombre 296 barrages de plus de 20 mètres de haut et 448 barrages compris entre 10 et 20 mètres. Parmi ces 296 barrages, il convient encore de distinguer les 99 ouvrages – dont 25 non hydroélectriques – ayant plus de 20 mètres de hauteur et une capacité de stockage supérieure à 15 millions de mètres cubes.
Au regard de l’énergie destructrice libérée en cas de rupture et des enjeux humains et économiques situés à l’aval, ces ouvrages nécessitent un entretien, une surveillance et un contrôle rigoureux.
La probabilité de rupture d’un barrage peut être considérée comme relativement faible, mais ce risque ne peut être négligé au regard des conséquences potentielles d’un tel évènement. Au cours du dernier siècle, on estime que près de 1% des grands barrages se sont rompus, dont celui de Malpasset à Fréjus, le 2 décembre 1959, qui fit 423 victimes. Depuis cette date, la politique de sécurité des barrages en France a été essentiellement fondée, d’une part sur un contrôle individuel par l’administration des plus hauts barrages (plus de 20 m) et des barrages intéressant particulièrement la sécurité publique et, d’autre part sur la responsabilisation des maîtres d’ouvrages.
Votre rapporteur s’est donc donné pour mission d’étudier les conditions dans lesquelles l’Etat a organisé et fait exécuter le contrôle de la sécurité des barrages. Il est allé visiter quelques uns des plus grands barrages français, a rencontré les propriétaires, les concessionnaires de ces ouvrages, examiné avec des agents des DRIRE – en charge de ces opérations – quel était le chemin parcouru par les contrôleurs. Et puis, chemins de visite faisant, il est allé sillonner les routes plus étroites qui conduisent aux petits barrages, cette myriade d’ouvrages, parfois perdus au fond d’une vallée dont on ne se souvient plus toujours bien qui les a réalisés et, a fortiori, qui se sent responsable de leur maintenance.
Avec les agents des Directions Départementales de l’Agriculture et des Forêts, il a arpenté des digues, rencontré ces maires de communes responsables de micro ouvrages mais financièrement incapables de faire face aux travaux nécessaires à la consolidation d’un ouvrage à risque. Bien entendu, le lecteur ne se trouve plus là dans une problématique de type Malpasset. Il n’en demeure pas moins que tel ouvrage vieillissant au bas duquel on a laissé s’implanter un camping, c’est un danger. De la même façon que ne pas prévoir, aménager, restaurer des digues de cours d’eau rebelles et dont on sait que leurs crues sont dangereuses, c’est aussi un problème.
Question de moyens ? Certes. Mais pas uniquement. Question de volonté aussi. Question d’éducation à la prévention.
Un décret récent, décembre 2007, vient mettre de l’ordre dans le foisonnement. Désormais, les ouvrages doivent être recensés d’après 4 classes dont les critères sont déterminés par un savant calcul qui tient compte de la hauteur, de l’importance de la retenue et de quelques autres paramètres dont votre rapporteur regrette que l’environnement immédiat des ouvrages n’y prenne pas une place plus importante.
Si l’ordre administratif règne désormais, sur le « terrain » certains évoquent les difficultés d’application, notamment avec la dernière classe, la D, dont on peut redouter qu’elle soit le « fourre tout » des ouvrages. Malgré l’extrême jeunesse de ce texte, né durant l’élaboration de ce rapport, il a donc fallu à votre rapporteur « revisité » sa mise en œuvre et ses premières applications. Et ce qui n’est déjà pas aisé avec les barrages l’est moins encore avec les digues.
Et puis, il est essentiel pour un tel rapport de se persuader que, malgré surveillance et contrôle, un barrage est un ouvrage à risque. Il peut affronter :
• des crues, ce qui implique pour des ouvrages en béton de dimensionner l’ouvrage pour une crue millénaire et pour les ouvrages en remblai de terre pour une crue déca millénaire ;
• des accidents de terrain, mouvements ou glissements : le problème de l’ancrage du barrage reste particulièrement sensible en fonction de la nature de la roche ;
• des séismes, le séisme de référence étant de 3,5 degrés de magnitude. Et votre rapporteur, élu d’une région sismique, auteur pour l’Office Parlementaire, d’un rapport sur la prévention sismique, est particulièrement sensibilisé à cette problématique.
Un barrage, on le verra dans le rapport peut également affronter le vieillissement des bétons et celui des organes métalliques. Ce sont d’ailleurs ces périls là que les ingénieurs EDF avaient voulu principalement stigmatiser.
Le lecteur sentira à ces propos que plus, que l’urgence pointée sur tel ou tel barrage signalé, ce rapport se donne pour vocation l’expertise de la très grande diversité des ouvrages réalisés et exploités. Ce rapport s’impose également par la nécessité d’homogénéiser les méthodes de contrôle et de surveillance et la formation des acteurs de ces contrôles.
Imaginons également que les transformations du climat qui opèrent une véritable surenchère de la valeur « eau » conduiront cette étude à envisager les choix à effectuer pour permettre que les retenues répondent à la demande croissante en besoins en eau ; des besoins qui pourraient nécessiter une politique plus active de « stockage » et conduire à des choix nouveaux. Sur ces chemins là, le rapporteur croisera à nouveau Météo France et ses services d’alerte.
Notons à cet égard que l’un des trois seuls déplacements à l’étranger, avec celui en Suisse et celui à Sofia, le déplacement au Maroc, a permis de juger de l’importance de cette valeur « eau » et de ce qu’elle implique dans un pays aussi exposé aux déficits hydriques ; chaque année le Maroc construit, en moyenne, deux grands barrages, ce qui est considérable ; et les techniques adoptées pour assurer leur sécurité, si elles s’inspirent pour partie des nôtres, méritent également notre attention, notamment lorsqu’il s’agit de rehausser un grand ouvrage.
La mise en sécurité des barrages aura ainsi conduit le rapporteur – et son lecteur – à une réflexion d’ensemble sur la politique de prévention à un risque technologique particulier, mais commune néanmoins à quantité d’ouvrages bâtis. Puisse l’actualité de ce sujet avoir valeur d’exemple.
CHAPITRE PREMIER :
LE PATRIMOINE
Il y a en France aujourd'hui 744 barrages dont la hauteur est supérieure à 10 m et des milliers dont la hauteur est comprise entre 2 m et 10 mètres. Il en est de même pour les digues dont le recensement non exhaustif laisse prévoir des milliers de kilomètres, de la simple digue de retenue d’un ruisseau à celles des grands fleuves, canalisés ou non. Comme dans tous les pays, les barrages ont diverses vocations : hydroélectricité, eau potable, soutien d'étiage, irrigation, écrêtement des crues, navigation, tourisme. Suivant leur classement, et leur concession ou non, ces barrages relèvent en matière de sécurité d’autorités différentes. Parmi les barrages hydroélectriques, on peut distinguer les barrages concédés lorsque la puissance dépasse 4 500 kW, leur contrôle étant alors du ressort du ministère chargé de l’énergie, et les barrages hydroélectriques non concédés ainsi que tous les autres qui, par contre, relèvent de la loi sur l'eau, avec un régime d'autorisation après enquête ou un régime de déclaration pour les très petits barrages, soumis au contrôle des services du ministère ayant en charge la police de l’eau. Au gré des gouvernements, les autorités de tutelle ont pu être le ministère de l’industrie, le ministère de l’environnement, le ministère de l’agriculture. Ceci complexifie encore la vision que nous pouvons avoir de la surveillance des barrages. Cependant, avec les réformes en cours, dans l’actuel gouvernement, une réorganisation des services permet le transfert du contrôle des barrages au seul ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire (MEEDDAT)
Un barrage est un « ouvrage artificiel coupant le lit d’un cours d’eau et servant soit à en assurer la régulation, soit à pourvoir à l’alimentation en eau des villes ou à l’irrigation des cultures, ou bien à produire de l’énergie" et une digue est un "ouvrage destiné à contenir les eaux, à élever leur niveau ou à guider leur cours. »
Ces termes de barrages et de digues ne sont pas sans ambiguïté ; le terme de digue est parfois utilisé pour de petits barrages réalisés en remblai. Les berges des canaux ou cours d’eau canalisés peuvent constituer des digues parfois assez hautes. Par ailleurs, il n’y pas de seuils uniformes caractérisant ces ouvrages, ce qui crée une large incertitude pour définir l’ensemble des ouvrages concernés par ce rapport.
Si les barrages sont généralement construits en barrant un cours d’eau, il existe également des ouvrages construits pour stocker de l'eau de ruissellement d'un talweg en créant une « retenue collinaire » ainsi que des ouvrages situés hors d'un lit majeur, et se remplissant par pompage ou par dérivation d'un cours d'eau. En principe, un barrage n'est jamais noyé ou a été conçu pour le rester ; ce n'est pas le cas des seuils qui peuvent être noyés ou dénoyés selon le débit de la rivière ou des digues, dont on dit alors qu’elles sont des digues submersibles.
Il existe des ouvrages qui sont prévus pour rester secs la plupart du temps, comme les ouvrages d'écrêtement des crues ou les digues de protection contre les crues. Ces ouvrages présentent néanmoins des risques ; mais un « talus » routier ou ferroviaire est "autre chose" qu'un barrage ou une digue.
On peut distinguer les ouvrages soit par type de construction soit par usage principal, bien que de nombreux ouvrages soient à vocation multiple.
On considère qu'il existe deux grandes familles de barrages : les barrages "voûte"et les barrages "poids". Les barrages en remblai sont des ouvrages "poids" bien particuliers.
Il s'agit de faire reporter sur les flancs de la vallée barrée, tout ou partie des efforts dus à la poussée de l'eau.
Ces ouvrages sont de conception plus récente ; les voûtes peuvent être plus ou moins minces. On citera également dans cette famille, les barrages à voûtes multiples dont les poussées des voûtes intermédiaires sont reprises par des contreforts.
Les barrages-voûtes sont des barrages généralement en béton dont la forme courbe permet un report des efforts de poussée de l’eau sur les rives rocheuses de la vallée. L'utilisation de l'effet d'arc bien connu des constructeurs de cathédrales est plutôt récent dans le domaine des barrages (encore qu'on en trouve des applications dès le XIIIème siècle en Iran ainsi que, sous une forme plus rustique, par les Romains). La réalisation d'une voûte est certainement la façon d'utiliser au mieux les capacités du béton à supporter les efforts de compression, de diminuer le volume du matériau à mettre en oeuvre.
Les barrages-poids-voûtes sont des barrages-poids dont la forme nettement arquée rend possible la création d'un véritable effet voûte et donc un report des efforts sur les appuis latéraux. Ce type de barrages convient bien lorsque la topographie permet de fermer la vallée par une forme arquée de longueur réduite sans pour autant avoir une qualité de rocher en fondation suffisante pour admettre des sollicitations ponctuelles fortes de type encastrement. Il s'agit en général de barrages construits dans la première moitié du XXèmesiècle. Le parement amont est en général vertical de manière à simplifier les coffrages.
Source :BETCGB
Le parement aval est souvent incliné mais il peut se présenter sous forme de marches d'escalier superposées pour simplifier l'exécution.
Précédées par des voûtes d'une trentaine de mètres de haut dans les années 1920, les grandes voûtes minces ont fait leur apparition au milieu du XXème siècle. Grâce à des méthodes et des moyens de calculs plus puissants, les formes se sont allégées de manière à économiser de la matière et à faire travailler la structure au maximum de ses possibilités. Les arcs circulaires sont devenus paraboliques, elliptiques ou en spirales logarithmiques. Les parements à double courbure ont été généralisés.
Les projeteurs ont poursuivi dans cette direction jusqu'à connaître les premiers déboires : fissuration de grandes voûtes trop minces, eu égard à leur fondation rocheuse très rigide, rupture de la voûte de Malpasset pour des raisons autres, géologiques notamment. Ils sont alors revenus à des formes moins allégées mais garantissant des coefficients de sécurité plus confortables.
Les barrages-voûtes sont construits par plots indépendants. Ceux-ci sont clavés en fin de construction de manière à rendre la voûte monolithique et à solliciter lors de la mise en eau à la fois les arcs et les consoles que sont les plots de construction. La stabilité de ces barrages dépend essentiellement de la capacité (de résistance, de rigidité) de leur fondation à supporter des efforts concentrés au droit des appuis, efforts liés à l'encastrement de la structure, à la poussée des arcs, mais aussi, pour les voûtes minces, aux fortes sollicitations hydrauliques dues à la finesse de la structure.
La présence de culées peut toutefois permettre un report plus aisé des efforts sur les rives.
Un barrage à contreforts comprend :
- une série de murs parallèles, généralement de forme triangulaire, plus ou moins épais et plus ou moins espacés (les contreforts) ;
- une bouchure entre contreforts transmettant à ceux-ci la poussée de l'eau.
La bouchure peut être constituée :
- d'une dalle plane en béton ;
- d'un élargissement du contrefort vers l'amont ;
- d'une voûte de faible portée.
Le nombre de contreforts peut varier de quelques unités pour les plus grands d'entre eux (barrage de Grandval ou de Calacuccia), à plusieurs dizaines comme sur les barrages de la Girotte, de Roselend et sur les barrages de type Considère (Vezins ou Rophémel).
Source : BETCGB
Pour ces derniers, l'audace des constructeurs est allée jusqu'à réduire l'épaisseur des voûtelettes à quelques dizaines de centimètres, nécessitant le recours au béton armé. Cette épaisseur augmente un peu en partie basse mais demeure réduite à l'approche de la fondation
Les parements amont sont en général fortement inclinés de manière à transmettre directement au pied des contreforts et donc à la fondation rocheuse une partie de la poussée de l’eau sur le parement amont.
Les barrages à contreforts sont bien adaptés aux vallées larges avec une fondation rocheuse de bonne qualité.
Il s'agit de barrer un cours d'eau par un obstacle qui résistera par sa géométrie et son poids à un certain nombre d'actions qui tendent à le faire basculer et/ou à le faire glisser. Il sont généralement réalisés en maçonnerie ou en béton.
Ces ouvrages sont étanches "dans la masse". Cependant les barrages en maçonnerie peuvent, avec le temps, nécessiter des étanchéités complémentaires.
Barrage de Sarrans - source : EDF division Production Ingénierie
Barrage poids en béton
construction 1929 – 1934 hauteur : 105 m longueur : 225 m épaisseur : 75 m à la base | |
La stabilité des barrages-poids sous l'effet de la poussée de l'eau est assurée par le poids du matériau. Ces ouvrages peuvent être en maçonnerie ou en béton, en maçonnerie hourdée à la chaux pour les plus anciens, en béton compacté au rouleau pour les plus récents. Ce type de barrage convient bien pour des vallées larges ayant une fondation rocheuse. Ils sont souvent découpés en plots à la construction, l'étanchéité entre plots étant assurée par un dispositif placé à l'amont des joints.
Les formes sont diverses, forme rectangulaire simple pour les plus petits, forme triangulaire de façon classique, formes audacieuses plus élancées dans la partie supérieure à la fois pour des raisons architecturales et de quantité de matériau mis en oeuvre. Au siècle dernier, les maîtres d'oeuvre ont cherché à économiser de la matière en raidissant progressivement les parements. Ils ont donné une forme légèrement courbe au tracé en plan du barrage, de manière à permettre les mouvements de la structure en évitant l'ouverture des joints, notamment en hiver.
Les ruptures successives du barrage de Bouzey ont amené les constructeurs à plus de prudence en mettant en évidence le rôle joué par les sous-pressions, tant dans les fondations que dans le corps du barrage. Les formes les plus fréquentes des barrages-poids modernes sont des profils triangulaires qui se redressent en partie supérieure pour supporter la route de couronnement. Le parement amont est souvent vertical ou avec un fruit très faible.
On peut distinguer les barrages pour lesquels les fonctions poids et étanchéité sont assurées de manière conjointe, comme les barrages en maçonnerie "homogène" (bien que le parement amont soit souvent mieux appareillé et/ou recouvert d'un enduit), et ceux pour lesquels les deux fonctions sont parfaitement séparées : barrage-poids à masque amont du type Lévy, barrage-poids en béton compacté au rouleau (BCR) avec membrane d'étanchéité ou masque amont.
La stabilité des barrages-poids repose essentiellement sur leur fruit et, si nécessaire, sur l'efficacité du drainage qui met le massif poids à l'abri des sous-pressions. Leur inconvénient majeur est de ne pas utiliser pleinement les capacités du matériau constituant la partie résistante du barrage (maçonnerie ou béton) à supporter des efforts importants de compression. Il est donc venu rapidement à l'idée des projeteurs de supprimer du béton superflu en allégeant la structure, en créant des arcades ou des niches sur le parement aval, en réduisant la surface d'assise au sol. Lorsque ces élégissements descendent jusqu'à la fondation, il en résulte une augmentation des contraintes appliquées au sol de fondation. Mais la réduction de la surface d'assise se traduit par un meilleur drainage de ce contact. Les sous-pressions dangereuses pour la stabilité de l'ouvrage sont alors limitées. Pour certains barrages en rivière, les vannes représentent une part importante du parement amont. La structure résistante est alors limitée au socle d'assise et aux contreforts entre vannes
ü Les barrages à masque amont
L’étanchéité de ces barrages est assurée soit en matériau imperméable soit par un matériel étanche posé sur leur talus amont "les masques". On parle de barrages en enrochement à masque amont. Les masques peuvent être de nature très différente: béton armé, matériel bitumineux, "bâche" et même tôle d'acier.
Source : BETCGB
Le masque qui constitue l’organe d’étanchéité amont est classiquement réalisé en béton, avec des produits bitumineux ou encore au moyen d’une géomembrane. Son épaisseur est limitée, ce qui lui permet de s'adapter aux déformations faibles mais inévitables du massif support (les géomembranes peuvent même accepter des déformations importantes). La présence du masque en parement amont présente le double avantage de permettre des réparations en cas de dégradation du masque, mais aussi d'autoriser des vidanges de retenue très rapides.
Le corps du barrage assurant la stabilité peut être en matériau quelconque pour autant qu'il soit peu déformable. De nombreux barrages à masque sont réalisés en enrochements. La qualité du compactage lors de la mise en oeuvre du matériau a une grande influence sur les déformations et tassements ultérieurs.
Pour améliorer la sécurité du barrage, il n'est pas rare de trouver dans les barrages à masque d'autres matériaux fonctionnels :
- un matériau de réglage ou de transition servant de support à l'étanchéité mince et la mettant à l'abri de tout poinçonnement par des éléments grossiers du massif support ;
- une cheminée drainante, un tapis drainant ou les deux pour évacuer les infiltrations éventuelles à travers le masque ;
- des matériaux de protection soit du parement aval (terre végétale engazonnée, enrochements, maçonnerie de pierre sèches, ...) soit du masque d'étanchéité comme des dalles de protection ou des pavés autobloquants mettant l'étanchéité mince à l'abri des agressions extérieures telles que la glace, les projectiles ou les chutes de blocs.
ü Les barrages mixtes
L'ingéniosité des bâtisseurs de barrages et leur souci constant de s'adapter au mieux aux conditions particulières du site expliquent l'existence d'ouvrages hybrides pouvant comporter plusieurs parties rattachées à l'un des grands types indiqués ci-dessus.
C'est par exemple le cas du barrage de Roselend constitué d'une grande voûte complétée par des parties en contreforts (ci-après).
Source : EDF division Production Ingénierie
Barrage mixte
construction 1957 – 1962 hauteur : 150 m (voûte) longueur : 804 m épaisseur : 22 m à la base de la voûte |
ü Les barrages zonés
Source : BETCGB
Les barrages zonés, comme le barrage de Serre-Ponçon, sont des barrages en remblai constitués de plusieurs types des matériaux disposés de façon à assurer séparément les fonctions de stabilité du barrage et d’étanchéité. Le découpage du corps du barrage en matériaux différents est appelé zonage. Il permet de faire de grandes économies dans les volumes mis en oeuvre et d'utiliser au mieux les matériaux disponibles sur le site. Il existe autant de types de zonages que de barrages dans la mesure où chaque ouvrage est conçu en fonction des matériaux trouvés sur le site ou immédiatement à proximité. Les plus classiques comportent :
- un noyau d'étanchéité constitué de terres argileuses, d'argile, de terres caillouteuses ou tout autre matériau terreux comportant une forte proportion de matériaux fins lui conférant une faible perméabilité. Lorsque ce matériau est introuvable sur le site, on peut avoir recours à des matériaux de substitution tels qu'une paroi moulée ou bien une superposition de couches de béton bitumineux ou d'asphalte ;
- une recharge amont en matériau drainant assurant la stabilité amont même après une vidange rapide ;
- une recharge aval stabilisatrice en matériau peu déformable ;
- une protection amont en enrochements, dalles ou autres dispositifs ;
- un drain interposé entre le noyau et la recharge aval, si celle-ci n'est pas suffisamment perméable, pour évacuer sans pression les écoulements parvenus sur la face aval du noyau ;
- des matériaux de transition (filtres) entre ces différents massifs lorsque leurs granulométries respectives le justifient de manière à éviter toute érosion interne par entraînement de particules d'un matériau vers le matériau adjacent.
Exemple de barrage en remblai : GRAND'MAISON
Source : EDF division Production Ingénierie
Digue en terre à noyau argileux
construction : 1981 – 1984 hauteur : 160 m longueur : 550 m épaisseur : 550 m la base |
ü Les barrages en terre
Les ouvrages en "matériaux terreux" ne peuvent résister ni à la submersion ni à la traversée de leur corps par l'eau. Ainsi l'eau doit être captée par des drains à l'intérieur de l'ouvrage avant son débouché sur le parement aval. Les drains sont protéges des entraînements terreux par des filtres. Un débouché d'eau sur un parement aval s'appelle un renard. L'apparition d'un renard est la conséquence de désordres internes de l'ouvrage et entraîne, sans mesures immédiates adaptées, la ruine rapide de l'ouvrage. Dans certains ouvrages, l’étanchéité est assurée par un noyau central en argile.
ü Les barrages en terre homogène
Source : BETCGB
Les barrages en terre homogène sont des digues en remblai constituées d'un seul matériau meuble suffisamment imperméable pour assurer à la fois l'étanchéité et la résistance. La terre est généralement mise en place par compactage. La plupart des barrages français très anciens, dont beaucoup servent à l'alimentation en eau des canaux, sont de ce type.
La structure des barrages est souvent complétée par des dispositifs de drainage tels que :
- une butée aval drainante ;
- un tapis drainant sous le tiers ou la moitié aval ;
- une cheminée drainante communiquant avec l'aval par un tapis ou des bretelles.
Des protections peuvent être disposées sur les faces extérieures : enrochements ou rip-rap sur le parement amont pour éviter l'érosion due aux vagues, terre végétale engazonnée ou enrochements sur le parement aval pour stabiliser la terre vis-à-vis du ruissellement de la pluie.
Ce type de barrages est bien adapté aux sites ayant une fondation déformable. De conception rustique, ils ont une grande emprise au sol, n'engendrent que peu de contraintes, s'accompagnent en fondation de faibles gradients d'écoulement et peuvent accepter des tassements de la fondation. Par contre, ils ne supportent pas bien les variations rapides du plan d'eau et ne supportent pas ou très peu la submersion par dessus la crête.
L'eau stockée derrière les barrages peut avoir de nombreux usages mais un ouvrage particulier avec ses vannes, a été souvent conçu pour répondre à un usage déterminé.
A chaque usage correspond une règle particulière de gestion de l'eau de la retenue. Dans ces conditions, une règle de gestion ne pourra pas satisfaire également, les buts multiples assignés avec le temps à des ouvrages. Certains usages sont même franchement incompatibles avec d'autres comme l'écrêtement des crues qui peut demander une retenue vide en tout temps ; le tourisme estival qui demande une retenue assez haute, etc.
On peut distinguer, sans exhaustivité, les finalités suivantes.
a) La production d'énergie électrique
Parmi les plus grands ouvrages, on peut citer le barrage de Tignes pour la hauteur (160 m) et pour le volume celui de Serre-Ponçon (1,2 milliard de m3) en France métropolitaine.
Il faut également citer les ouvrages au fil de l'eau comme ceux sur le Rhône et le Rhin, et les digues amont qui les accompagnent.
b) L'alimentation en eau potable
Les retenues pour l'alimentation en eau potable sont nombreuses là où les ressources en eau souterraines ne satisfont pas la demande: Massif armoricain, côte méditerranéenne, etc. On peut citer le barrage de Mervent dans le département de la Vendée (26 m de haut et 8,3 millions de m3).
c) L’irrigation des terres agricoles
Ce sont des ouvrages importants en particulier dans le sud de la France : ouvrages de la société du canal de Provence (SCP), de la compagnie des coteaux de Gascogne, etc.
On peut citer le barrage de Bimont de la SCP avec 86 m de hauteur, 180 m de longueur en crête et une capacité utile de 26 millions de m3 d'eau.
d) L'alimentation des canaux de navigation.
Il faut mentionner le barrage en maçonnerie de Saint Ferréol construit par Riquet au XVIIème siècle et pièce essentielle du canal du midi qu'il alimente en eau au point haut des deux bassins atlantique et méditerranéen.
e) La régularisation du débit des cours d'eau avec l'écrêtement des crues et le soutien des étiages.
Ce sont deux fonctions difficilement compatibles sur un même ouvrage.
On peut citer pour le soutien des étiages, le barrage de Mas-Chaban dans le département de la Charente avec 23 m de haut et 15,5 millions de m3de retenue.
f) Le tourisme et les loisirs aquatiques
Certains barrages ont été construits spécialement à cette fin mais c’est un usage "secondaire" important sur de nombreux ouvrages. C'est même l'usage qui a de plus en plus tendance à être considéré comme prioritaire pendant les quelques mois chauds de l'année à une période où les étiages sont les plus marqués et où les besoins d'eau pour tous les usages sont paroxysmiques : alimentation en eau potable, irrigation, soutien des étiages, dilution des pollutions thermiques, etc.
g) La protection contre les crues.
Le recensement de tous ces ouvrages n'est pas encore achevé. Leur longueur cumulée doit dépasser les quelques milliers de km.
h) Les canaux de navigation ou d’amenée d’eau.
Le fil de l'eau de ces ouvrages peut être au-dessus du terrain naturel et quelques fois à des hauteurs de plusieurs mètres. Ces ouvrages sont constitués par des digues
i) L'alimentation des canons à neige
Depuis quelques années, des réserves d’eau sont créées en altitude pour alimenter les canons à neige des stations de sports d’hiver. Les volumes stockés vont de quelques dizaines à une centaine de milliers de m3 et les hauteurs sont de l’ordre de la dizaine de mètres.
j) La décantation et/ou le stockage de résidus miniers ou industriels; la régulation des rejets.
Il existe dans des installations de mines et carrières, des bassins de décantation et/ou de stockage de résidus.
Il existe aussi des bassins de décantation importants dans certaines installations classées ; ces bassins peuvent contenir plusieurs centaines de milliers de m3 avec des digues d’une dizaine de mètres de haut.
Ainsi, les soudières près de Nancy gèrent des bassins de régulation de plusieurs millions de m3, pour réguler les rejets de chlorures dans la Meurthe.
Mais les stériles peuvent aussi avoir une origine agricole : c’est la cas des bassins de décantation des eaux issues du lavage des betteraves sucrières.
Les digues sont constituées des sédiments curés tous les ans et peuvent avoir des hauteurs de quelques dizaines de mètres au-dessus du sol.
III - LES ACCIDENTS LES PLUS GRAVES, DANS LE MONDE
DEPUIS LE XIXÈME SIÈCLE
Revenons un court instant sur ce que notre expert, M. Bernard Goguel, nous disait d’une voix contenant mal l’émotion :
« Malpasset 2 décembre 59, Vajont 9 octobre 1963 : deux coups de tonnerre dans l’ingénierie des barrages, deux voûtes minces.
La première, conçue par le grand ingénieur français André Coyne, trahie par sa fondation rive gauche où se sont conjugués divers phénomènes insoupçonnés à l’époque, mis en lumière par les développements de la Mécanique des Roches qui en reçoit un coup de fouet.
Catastrophe de Fréjus, balayée par les flots : 450 morts. J’avais 14 ans à l’époque, mon père fut l’expert géologue de la commission administrative d’enquête. La seconde, conçue par le grand ingénieur italien Carlo Semenza, 4 fois plus haute et record du monde à l’époque, a résisté à l’incroyable submersion d’une vague de 200 m de haut.
Mais Langarone, en dessous, a été rayée de la carte dans la nuit : 2000 morts, drame total. A posteriori, il y a de quoi être effaré par le comportement des ingénieurs italiens, de leurs donneurs d’ordres et de leurs autorités de contrôle. L’ampleur du glissement était connue depuis la première mise en eau partielle de 1960 qui l’avait mobilisé. Des travaux notables (galerie de dérivation du lac lorsqu’il serait bouché) avaient été effectués en 1961, la surveillance était constante, un creux de sécurité contre les vagues était admis. Mais nul n’a prévu la vitesse considérable soudain prise par la grande masse en reptation, venue d’un coup fermer la vallée et en expulser une partie du lac.
La sortie d’un film directement inspiré de ce drame m’a conduit à en revoir à fond le dossier disponible dans la littérature technique, et interroger des amis retraités experts dans les domaines concernés (Habib, Duffaut). Le développement de l’hypothèse Habib 1967 (vaporisation de l’eau le long de la surface de glissement) par Jean Goguel est un aspect qui me touche tout particulièrement ».
Nous reviendrons dans le chapitre des glissements de terrain sur cette catastrophe de Vajont
ü Les accidents les plus graves Entre 1959 et 1987, 30 accidents de rupture de barrages ont été recensés dans le monde, faisant 18 000 victimes. Seuls les accidents ayant causé plus de 100 morts sont répertoriés dans le tableau ci-dessous. Barrages Pays Date de rupture Hauteur du barrage (m) Volume de la retenue (hm3) Nombre de victimes Panshet Inde 1961 49 214 1 000 Sempor Indonésie 1967 60 56 200 Barrage en remblai, rupture durant la construction Dale Dyke Grande-Bretagne 1864 29 3,2 230 Barrage en remblai, rupture lors de la première mise en eau Iruhaike Japon 1868 28 18 1 200 Mill River États-Unis 1874 13 Inconnu 140 South Fork États-Unis 1889 21 18 2 200 Walnut Grove États-Unis 1890 33 11 129 Hyogiri Corée du Sud 1961 15 0,2 139 Nanak Sagar Inde 1967 16 210 100 Machu Inde 1979 26 101 2 000 Gotvan Iran 1980 22 Inconnu 200 Kantale Sri Lanka 1986 27 135 127 Barrage poids, rupture lors de la première mise en eau Puentes Espagne 1802 69 13 600 Saint Francis États-Unis 1928 62 47 450 Barrage poids, rupture en service Fergoug I Algérie 1881 33 30 200 Tigra Inde 1917 25 124 1 000 Malpasset France 1959 60 49 423 Khadakwasla Inde 1961 33 137 1 000 Barrage à contreforts et voûtes multiples Gleno Italie 1923 35 5 600 Vega de Terra Espagne 1959 33 7,3 140 Source : www.hydrocoop.org En considérant l'ensemble des ruptures postérieures à 1800 dans le monde, quelle que soit la hauteur du barrage, on compte 144 ruptures de barrage dont : • 71 sans victime • 31 avec moins de 10 morts • 17 avec 10 à 99 morts • 25 avec 100 morts et plus. Quelques photos de ruptures Rupture de barrage en béton. Le barrage de Shih-Kang (Taiwan, 1999) Rupture de barrage en terre. Le barrage de Teton (Idaho, États-Unis, 1976) ü Le cas français Deux accidents ont marqué les esprits sur le territoire français. En avril 1895, la rupture du barrage de Bouzey (Vosges), d'une hauteur de 18 mètres, a fait 87 morts. Il s'agissait d'une rupture brusque, mais qui avait été précédée par l'apparition de fissures et de déformations importantes. Rupture du barrage de Bouzey, en 1895 Les ruines et les dégâts Source : BETCGB |
En décembre 1959, le barrage de Malpasset (Var) d'une hauteur de 60 mètres cède, alors que des intempéries ont fait monter le niveau d'eau dans la retenue. Le barrage était implanté sur un bloc rocheux de grand volume reposant sur une faille ; la poussée de l'eau a déchaussé le bloc, qui est tombé vers l'aval. L'onde de submersion a atteint la ville de Fréjus située à une dizaine de kilomètres, avant de se jeter dans la mer. Il y aura 423 victimes et des dommages matériels importants : 155 immeubles détruits, 1 000 hectares de terres agricoles sinistrées, deux milliards de francs de dégâts.
Source : BETCGB
Source : BETCGB
Source : BETCGB
Ainsi que le décrivent Gérard DEGOUTTE et Paul ROYET dans la revue n°19 de l'AIGREF du 4èmc trimestre 2007, et que votre rapporteur vous livre ci après, le parc de barrages français est important et constitué en grande majorité de barrages anciens.
« La dernière rupture importante s'est produite il y a presque 50 ans et la précédente s'était produite un peu plus de 60 ans avant. Les leçons de ces accidents concernant des grands barrages ont été tirées, mais pour autant la vigilance doit rester constante. De plus, des ruptures de petits barrages sont parfois déplorées, plus fréquentes, même si les conséquences en restent minimes. La surveillance et le contrôle de tous ces ouvrages, petits et grands, sont donc un sujet important. Il est impératif de les mener pour chaque barrage avec toute la compétence nécessaire et en juste proportion de la taille de l'ouvrage. »
Vue d'ensemble de la retenue de la Verne. Le barrage, H = 42 m, 8 hm3,
dessert en eau potable la corniche des Maures
Source : AIGREF n°19
H ≥20 m et V ≥ 15 hm3 |
H≥ 20 m et V < 15 hm3 |
10 ≤ H ≤ 20 m et H2 ≥ 200 |
10 ≤ H ≤ 20 m et H2 < 200 |
Total H ≥ 10 m | |
Barrages hydroélectriques concédés |
74 |
90 |
108 |
57 |
329 |
Barrages loi sur l'eau |
25 |
107 |
119 |
164 |
415 |
Total |
99 |
197 |
227 |
221 |
744 |
Le nombre de barrages de hauteur inférieure à 10 m est nettement plus important. Il est moins bien connu, surtout pour les barrages de hauteur inférieure à 5 m. À titre d'exemple, les directions départementales de l'agriculture et de la forêt ont recensé 1368 barrages non concédés pour le département du Tarn, 568 pour le Tarn et Garonne et plus de 2 850 pour le Gers. Dans ces trois départements du Sud-Ouest de la France, il s'agit essentiellement d'ouvrages en terre destinés au soutien d'étiage et à l'irrigation, dont 98 % sont de hauteur inférieure à 10 m.
Depuis les années 1990-2000, le rythme de construction des barrages s'est sérieusement ralenti, pour des raisons économiques et environnementales. Mais l'on observe depuis environ 2005 une lente mais nette reprise des projets et des réalisations. Ce sont :
- les ouvrages de ralentissement dynamique, petits barrages ou bassins en dérivation destinés à ralentir la propagation des crues moyennes et à les écrêter ;
- les bassins pour l'irrigation ;
- les barrages d'altitude pour la production de neige de culture.
1) L'ALÉA DE RUPTURE DES BARRAGES...
Les barrages, quel qu'en soit l'usage, ont tous pour vocation de garder l'eau. Or l'eau a naturellement tendance à s'écouler malgré tout au travers de l'ouvrage ou par-dessus, ou bien même à détruire l'ouvrage pour mieux s'écouler. Un barrage est une structure s'opposant au passage de l'eau et résistant à sa poussée. On peut:
- utiliser le même matériau pour assurer ces deux fonctions d'étanchéité et de résistance : barrages homogènes en argile, barrages poids en béton ou en maçonnerie, barrages voûtes ou contreforts en béton ;
- ou bien spécialiser les matériaux : barrages en remblai grossier à noyau argileux ou à masque étanche artificiel, barrage en béton compacté au rouleau étanché par un masque artificiel...
L'eau dont on barre l'écoulement engendre plusieurs conséquences.
Si son débit dépasse les capacités d'évacuation de crue d'un barrage en terre, elle déverse sur sa crête et érode les remblais jusqu'à une rupture généralement totale.
Elle pousse vers l'aval les barrages poids en béton ou en maçonnerie, qui doivent être dimensionnés en conséquence. On vérifiera la stabilité d'ensemble de l'ouvrage supposé monolithique ainsi que la résistance du matériau. Pour les tout premiers barrages en maçonnerie, la résistance des matériaux étant médiocre, ce critère était prépondérant. Avec les progrès techniques, on a su fabriquer des matériaux, maçonnerie puis surtout béton de bien meilleure résistance. La stabilité d'ensemble est alors devenue l'élément prépondérant pour dimensionner ces ouvrages.
Barrage écrêteur de crue de la Rouvière (H = 18 m, 8,3 hm3) lors de la crue du
9 septembre 2002. Ce barrage, construit en 1970, a connu ce jour là une crue supérieure à sa crue de projet de sûreté et s'est malgré cela bien comporté.
Source : AIGREF n°19
Mais l'eau qui s'infiltre dans les matériaux maçonnerie, béton, rocher de fondation ou sols, provoque aussi des sous-pressions qui sont en quelque sorte des poussées vers le haut. Ce mécanisme de sous-pressions, bien connu aujourd'hui, est en fait très complexe. Pour preuve, il n'a été pleinement maîtrisé qu'au début du XXème siècle. On faisait pourtant des barrages bien avant, depuis des millénaires.
En France, le plus vieux parmi les grands barrages a été construit par Pierre-Paul Riquet à Saint-Ferréol ; achevé en 1672, il sert à alimenter le canal du Midi. Une double date importante dans l'histoire des barrages en maçonnerie se rapporte aux deux ruptures du barrage de Bouzey qui illustrent très bien les deux mécanismes susceptibles de conduire à la ruine de ce type de barrage, par défaut de stabilité d'ensemble :
1884 : glissement à la base du barrage sur sa fondation ;
1895 : fissuration et rupture par renversement dans le corps de la maçonnerie, alors que le barrage avait été conforté par une grosse bêche au pied aval s'opposant au glissement.
L'analyse de ces deux ruptures a permis à Maurice Lévy de mettre en évidence l'action des sous-pressions. Par la suite, la conception des nouveaux barrages poids a pu être améliorée, et de nombreux barrages anciens ont été confortés.
Toujours pour les barrages en maçonnerie ou en béton, l'eau en s'infiltrant peut lessiver les liants par dissolution chimique, et désorganiser le matériau en cas de gel. Le matériau se trouve alors à la fois moins étanche et moins résistant mécaniquement. Ce type de vieillissement a pour conséquence d'augmenter les sous-pressions et de diminuer la stabilité d'ensemble.
Source : AIGREF n°19
Les barrages en terre ne sont pas en reste, bien au contraire. L'eau s'infiltre dans les sols, même très bien compactés, avec deux types de conséquences :
• l'eau introduit des pressions interstitielles, que l'on peut également qualifier de sous-pressions, qui ont seulement été mises en évidence vers 1920 par Karl Terzaghi ; ces sous-pressions dégradent la stabilité au glissement rotationnel des talus ;
• les écoulements peuvent engendrer un mécanisme d'érosion interne. L'érosion interne arrache les particules fines d'un sol sous l'effet du gradient hydraulique. Elle peut se développer en aboutissant à la formation d'un conduit appelé « renard» qui relie la retenue et le pied aval et qui s'agrandit très rapidement jusqu'à la rupture totale. Ce mécanisme est particulièrement dangereux car, une fois initié, il est très rapide. Mais il est sournois car il peut survenir très longtemps après le remplissage de la retenue. Le petit barrage montré sur la photo ci-dessus s'est rompu par renard deux siècles après sa construction. Il n'y a pas eu de victimes grâce à ses petites dimensions mais aussi grâce à la présence d'esprit de l'exploitant qui a pu prévenir la gendarmerie, laquelle a demandé aux quelques personnes présentes dans la rue un dimanche matin de se mettre à l'abri.
Barrage des Ouches (H = 7 m, 49 000 m3), victime d'une rupture par érosion interne,
deux siècles après sa construction
Source : AIGREF n°19
En résumé, et sans prétendre à l'exhaustivité, l'eau peut détruire les barrages en remblai par érosion de surface ou par érosion interne. Elle peut conduire à la ruine les barrages poids du fait des sous-pressions. Les sous-pressions sont aussi intervenues dans la ruine du barrage voûte de Malpasset, cette fois-ci au niveau des discontinuités de la fondation rocheuse.
La conception des ouvrages doit intégrer ces mécanismes. Les barrages en remblai sont équipés de déversoirs dimensionnés pour des crues rares, entre millénales et décamillénales si la sécurité publique est en jeu. Ils disposent de drains destinés à maîtriser les inévitables écoulements internes de l'eau. Ces drains peuvent se colmater par érosion interne, et sont eux-mêmes protégés par des filtres. La conception et la réalisation des drains et des filtres doivent être particulièrement soignées. Signalons en particulier qu'un défaut très localisé dans un filtre suffit à mettre en péril tout l'ouvrage. La conception de ces organes essentiels pour la sécurité est délicate, et la surveillance du chantier nécessite une forte expérience.
Les barrages poids sont dimensionnés en tenant compte des sous-pressions, et on ne sait le faire que depuis le tout début du XXème siècle. Sauf pour les petits barrages, il est classique de forer des drains dans la fondation et dans le corps du barrage pour diminuer ces sous-pressions. Si la stabilité du barrage est vérifiée en tenant compte de la présence de ces drains, leur entretien est une affaire vitale.
Ce que l’on peut traduire dans le tableau suivant :
Rôle de l'exploitant ou du propriétaire
A |
B |
C |
D | |
H en m V en millions de m3 |
H S 20 |
H a 10 et H2.V°5>200 pas en A |
H>5met H2.V°5>20 pas A ou B |
H>2m pas A, B,C |
Examen CTPB du projet nouveau ou modification |
oui |
non |
non |
non |
Dossier de l'ouvrage |
oui |
oui |
oui |
oui |
Registre de l'ouvrage |
oui |
oui |
oui |
oui |
Visite technique approfondie (VTA) |
1 an |
2 ans |
5 ans |
10 ans |
Rapport exploitant |
1 an |
<5 ans |
<5 ans |
non |
Rapport auscultation |
2 ans |
< 5 ans |
<5ans |
non |
Revue sûreté dont examen complet |
10 ans |
non |
non |
non |
Consignes de surveillance et consignes de crue |
oui |
oui |
oui |
oui Pas d'approbation |
Etude de danger |
oui |
oui |
non |
non |
Mission du contrôle
Assiste à réception fouille |
conseillé |
conseillé |
possible |
non |
Assiste à réception ouvrage |
oui |
oui |
oui |
non |
Approbation des consignes et des périodicités des VTA et des rapports |
oui |
oui |
oui |
non |
Visite inspection périodique |
1 an |
1 à 5 ans |
1 à 10 ans |
non |
Visite inspection « décennale » |
oui |
non |
non |
non |
V - LA SURVEILLANCE DES BARRAGES
Votre rapporteur a rencontré à Sofia M. Luis BURGA, Président de la Commission Internationale des grands barrages (CIGB), qui lui a accordé un long entretien que le peut résumer ainsi :
« La CIGB n’a pas vocation à faire une législation, mais à aborder les conditions techniques de sécurité et de la sûreté des installations. Ceci se traduit par 4 grands points :
- l’application des recommandations techniques par les professionnels,
- la responsabilité incombant au propriétaire,
- l’organisation du contrôle de la sécurité par l’administration publique,
- les conditions financières du contrôle : qui paie ? l’Etat ou taxe des propriétaires, annuelle ou à chaque visite
Que doit faire l’inspection ?
Pour les grands barrages, tous les pays pratiquent une inspection
Pour les petits, cela est fort variable, ne serait-ce que pour définir un « petit » barrage. Les classifications sont fort différentes, la CIGB retient la hauteur de 15 m et 3 classes, la France a 4 classes définies par des combinaisons mathématiques
Comment imposer la sécurité ?
L’arsenal à disposition va de la loi (sur l’eau en général) à la réglementation ministérielle, en passant par le décret qui est certainement le mode le plus facile et le plus souple pour aller vite.
La diversité de la réglementation vient aussi du statut des États. Si l’on prend le cas du Canada, la réglementation est différente entre Québec et Ontario ! »
1) COMMENT SURVEILLE-T-ON UN BARRAGE ?
De toutes les réalisations humaines, les barrages sont parmi celles qui peuvent à certains égards induire un potentiel de risques très significatif. La construction d'ouvrages de retenue impose un risque aux populations avoisinantes, aux biens et à l'environnement naturel et humain.
Bien que les conséquences d'un dysfonctionnement ou d'une défaillance d'un barrage soient mesurables, quantifiables et bien souvent importantes, elles sont toutefois très hypothétiques. En effet, la probabilité de leur occurrence est très faible.
La surveillance des barrages vise à gérer ce risque et réduire au mieux ses probabilités d'occurrence, en mobilisant les moyens nécessaires à l'identification précoce d'événements indésirables susceptibles d'engendrer une éventuelle défaillance ou rupture. Toute organisation d'un processus de surveillance devrait donc viser à faire en sorte que l'on réduise au maximum les probabilités de défaillance par :
• l'identification des modes de rupture et leur prise en compte dans un programme de surveillance,
• la détection précoce de phénomènes avant-coureurs et évolutifs qui pourraient mener à ces mécanismes de rupture,
• la connaissance, via des paramètres physiques, du comportement du barrage et de ses composantes.
La protection des personnes et des biens est en règle générale une responsabilité sociale de l'État qui doit, par des mesures législatives contraignantes, être en mesure d'imposer et de contrôler une surveillance effective et efficace des barrages. Pour cette raison, la surveillance des barrages doit s'appuyer sur un cadre légal et réglementaire définissant précisément les rôles et responsabilités des différents intervenants.
Il reste que le propriétaire est le premier responsable pour tous les aspects de la sécurité du barrage, y compris les conséquences d'une rupture.
ü Élément de base d'un processus « Sécurité des barrages »
Assurer la sécurité d'un barrage, ou de tout autre ouvrage de retenue, nécessite un ensemble d'activités concomitantes, bien coordonnées et raisonnablement agencées. Ces activités doivent être :
• complémentaires dans une chaîne d'actions successives menant à une garantie de sécurité ou de sûreté,
• dotées d'une certaine redondance, afin d'offrir une garantie allant au-delà des aléas de fonctionnement.
On peut illustrer l'agencement de telles activités en un processus intégré et opérationnel qui prendrait la forme suivante :
Source : CIGB 2008
La surveillance des barrages est la pierre angulaire et principale d'un tel processus avec ses principales activités, à savoir:
• les inspections de diverses natures,
• l'auscultation avec des instruments (moyens topographiques et instruments de mesure),
• le contrôle de la fonctionnalité des organes d'évacuation quels qu'ils soient, qui vise à s'assurer de leur fiabilité au moment opportun,
• et le suivi du comportement.
L'évaluation périodique de la sécurité d'un barrage, comme élément d'un aménagement parfois plus complexe, exploité dans un bassin hydrographique déterminé, est la révision complète de sa sécurité et de sa pérennité. Ces études de remise à jour des analyses de sécurité structurale et fonctionnelle des ouvrages de retenue s'appuient bien évidemment sur des études hydrauliques et des évaluations particulières en cas de comportement atypique ou de déficience présumée ou identifiée de l'ouvrage.
La maintenance doit inclure tous les travaux d'entretien récurrents ou non, ainsi que des travaux majeurs de réfection, de réhabilitation ou de sécurité.
Le diagnostic et le rapport, en fin de processus, fournissent, suivant des méthodologies propres à chaque organisation :
• l'assurance requise pour la poursuite de l'exploitation,
• les recommandations requises pour le maintien ou l'amélioration de la sécurité,
• et des recommandations pour la pérennité de l'ouvrage étudié.
Bien entendu ces différents ensembles d'activités visent à réduire le risque en relation directe avec le barrage tel qu'il a été identifié ; le risque résiduel est, lui, couvert par la mise en place de mesures d'urgence appropriées, performantes et répondant aux exigences légales en vigueur, visant à réduire le dommage en cas d'incidents.
La surveillance des barrages prend donc une importance capitale, que l’on peut résumer ainsi :
• toutes ces activités se retrouvent sous une forme ou une autre dans un processus de travail défini avec précision (programme de sécurité des barrages, ensemble des consignes écrites de surveillance);
• la surveillance, quelle qu'en soit la forme, demeure une composante obligatoire et incontournable de tout effort de sécurité des barrages.
ü Cadre législatif et réglementaire
La nécessité d'un cadre législatif et réglementaire pour la surveillance des barrages est apparue au XIXème siècle, lorsque les premiers grands barrages liés à des centres industriels ont été construits, pouvant occasionner un dommage important aux populations et aux biens.
Depuis le début des années 1990, plusieurs initiatives ont visé à comparer les lois cadre régissant la surveillance des barrages dans les pays les plus expérimentés dans ce domaine. L'objectif a été de mettre en évidence les similitudes et de fournir ainsi aux autorités des différents pays une base pour développer une législation moderne et adaptée aux exigences actuelles de la surveillance des barrages.
J’ai ainsi demandé aux services économiques de nos ambassades de 15 pays parmi les plus importants au niveau de l’expérience et du nombre des barrages et digues de me fournir les textes en vigueur dans ces pays et de répondre à un questionnaire dont vous trouverez la synthèse en annexe 2.
L'analyse de ces lois et règlements met en évidence que deux thèmes essentiels doivent être traités :
• la surveillance des barrages,
• la sécurité des populations et des biens, en relation avec le risque résiduel qu'occasionnent les barrages.
1. La surveillance des barrages :
La responsabilité de la surveillance du barrage et de la garantie de la sécurité incombe au propriétaire de l'ouvrage, ou à son exploitant.
Le cadre législatif et réglementaire doit fixer précisément les points suivants :
• L'obligation du propriétaire ou de l'exploitant, et les limites de sa responsabilité,
• Le cadre normatif à respecter,
• La procédure de surveillance permanente et d'évaluation périodique de la sécurité,
• Le rôle et la compétence de l'organisme de contrôle,
• Le pouvoir de contrainte de cet organisme de contrôle.
2. La sécurité des populations et des biens
Même si il est correctement conçu et surveillé, le barrage représente un risque potentiel pour la population et les biens situés à l'aval. On peut qualifier ce risque résiduel de minime, mais en aucun cas d'inexistant ou de négligeable.
ü La surveillance des barrages : un ensemble d'activités complémentaires et redondantes
La surveillance des barrages est une activité ou une somme d'activités qui doivent aussi être :
• concomitantes en concourant au même but,
• complémentaires pour s'épauler mutuellement,
• suffisamment redondantes afin de pallier la non réalisation, pour quelque raison que se soit, d'une partie d'une autre activité.
On pourrait illustrer de bien des manières l'agencement des activités qui concourent à la surveillance des barrages. Le diagramme ci-dessous en propose une illustration la plus large possible.
Source : CIGB 2008
Des règles de conduite interne, des règlements ou des encadrements fixent l'ampleur, la nature et les modalités des activités qui doivent composer une surveillance bien organisée et pertinente. Ces règles s'appuient généralement sur les règles de l'art reconnues, édictées soit dans les bulletins de la CIGB soit dans les pratiques déjà établies par les États, les organismes, les propriétaires ou les maîtres d'ouvrage.
Les responsabilités pour les activités de surveillance doivent être bien définies. La surveillance doit être effectuée de façon professionnelle et continue (ou du moins périodiquement) à un niveau correspondant à celui de la classification en termes de risques.
2) LA NOUVELLE CLASSIFICATION FRANÇAISE DES DIGUES ET BARRAGES
Nous avons vu qu’en France, les barrages et ouvrages de retenue sont classés en catégories distinctes : le décret 2007 -1735 du 11 décembre 2007 relatif à la sécurité des ouvrages hydrauliques définit très précisément ces deux grandes catégories d’ouvrages : les barrages et les digues. Reprenons le texte sur la classification :
« Dispositions communes relatives à la sécurité et à la sûreté des ouvrages hydrauliques autorisés, déclarés et concédés
« Sous-section 1 - Classement des ouvrages
Art. R. 214-112. − Les classes des barrages de retenue et des ouvrages assimilés, notamment les digues de canaux, ci-après désignés “barrages”, sont définies dans le tableau ci-dessous :
Classe de l’ouvrage |
Caractéristiques géométriques |
A |
H ≥ 20 |
B |
Ouvrage non classé en A et pour lequel H2 x ≥ 200 Et H ≥ 10 |
C |
Ouvrage non classé en A ou B et pour lequel H2 x ≥ 20 Et H ≥ 5 |
D |
Ouvrage non classé en A, B ou C et pour lequel H ≥ 2 |
Au sens du présent article, on entend par :
“H”, la hauteur de l’ouvrage exprimée en mètres et définie comme la plus grande hauteur mesurée verticalement entre le sommet de l’ouvrage et le terrain naturel à l’aplomb de ce sommet ;
“V”, le volume retenu exprimé en millions de mètres cubes et défini comme le volume qui est retenu par le barrage à la cote de retenue normale. Dans le cas des digues de canaux, le volume considéré est celui du bief entre deux écluses ou deux ouvrages vannés.
Art. R. 214-113. − Les classes des digues de protection contre les inondations et submersions et des digues de rivières canalisées, ci-après désignées “digues”, sont définies dans le tableau ci-dessous :
Classe |
Caractéristiques de l’ouvrage et populations protégées |
A |
Ouvrage pour lequel H ≥ 1 et P ≥ 50 000 |
B |
Ouvrage non classé en A et pour lequel : H ≥ 1 et 1 000 ≤ P < 50 000 |
C |
Ouvrage non classé en A ou B et pour lequel : H ≥ 1 et 10 ≤ P < 1 000 |
D |
Ouvrage pour lequel soit H < 1, soit P < 10 |
Au sens du présent article, on entend par :
“H”, la hauteur de l’ouvrage exprimée en mètres et définie comme la plus grande hauteur mesurée verticalement entre le sommet de l’ouvrage et le terrain naturel du côté de la zone protégée à l’aplomb de ce sommet ;
“P”, la population maximale exprimée en nombre d’habitants résidant dans la zone protégée, en incluant notamment les populations saisonnières.
Art. R. 214-114. − Le préfet peut par décision motivée modifier le classement d’un ouvrage s’il estime que le classement résultant des articles R. 214-112 et R. 214-113 n’est pas de nature à assurer la prévention adéquate des risques qu’il crée pour la sécurité des personnes et des biens. »
3) LA PROGRAMMATION DES ACTIVITÉS DE SURVEILLANCE
La programmation des activités de surveillance dépend de la classification qui prédéfinit les activités de surveillance, leur nature, leur ampleur et leur fréquence pour chaque classe d'ouvrages. Cette programmation peut être également ajustée à l'état du barrage, tel qu'évalué par le diagnostic.
L'inspection visuelle constitue le moyen le plus important de surveiller les barrages. Son objectif premier consiste à détecter tous phénomènes importants susceptibles de les affecter, et à en suivre l'évolution. C'est une source de données pour le suivi du comportement du barrage et l'évaluation de sa sécurité ; elle doit suivre des procédures bien établies.
Le piézomètre - Source :EDF
Il importe que les personnes chargées de ces inspections connaissent parfaitement bien l'ouvrage et son comportement. Elles pourront ainsi déceler des changements ou dégradations sur quelques uns des points observés. La qualification du personnel effectuant ces inspections doit être établie et respectée. Elle peut être adaptée au type d'inspection ou au type d'ouvrage. Cette qualification est faite de formation, d'expérience, de pratique, et de remises à niveau.
L'inspection visuelle fournit des informations qualitatives sur l'état et le comportement du barrage et de ses fondations. Par ailleurs, l'auscultation fournit des mesures (quantitatives). Les deux, inspection et auscultation, sont réalisées de manière périodique et complémentaire, voire simultanée. Parfois cependant, des inspections spéciales sont nécessaires.
Pendule - Source :EDF
L'inspection implique des examens plus ou moins détaillés de points qui caractérisent l'état d'un barrage au moyen d'observations visuelles méthodiques.
Les inspections sont des examens généraux ou très détaillés par observation visuelle d'un barrage en vue de détecter les phénomènes les plus évidents pouvant affecter sa sécurité, et en suivre l'évolution.
L'inspection visuelle est particulièrement importante car certains défauts localisés, comme les fissures et les fuites ou zones humides, ne peuvent pas être facilement détectés par des instruments.
Il existe plusieurs types et niveaux d'inspections :
• Les tournées visuelles de routine ou suivi de niveau 1 (quasi continues, quotidiennes, hebdomadaires, mensuelles, annuelles),
• Les inspections périodiques de niveau 2 (tous les un ou deux ans ou sur demande spéciale, comprenant bilan des résultats d'auscultation, contrôle et essais des équipements, etc....),
• Les inspections plus formelles d'évaluation de la sécurité, au niveau 3 (tous les 5 à 10 ans ou sur demande spéciale; comprenant en plus des inspections détaillées et des investigations techniques autant qu'il est nécessaire),
• Les inspections particulières (sur une partie de l'ouvrage),
• Les inspections spéciales (pour des événements donnés) avec leurs modalités et leurs fréquences.
Les différents types d'inspections sont d'importances différentes et visent des buts différents. Les tournées de routine (très générales et réalisées plus rapidement, comme en conditions hivernales par exemple), puis les inspections régulières (à une périodicité définie) et finalement les inspections d'évaluation de la sécurité (en conjonction avec les réévaluations de la sécurité), forment le cœur d'une surveillance organisée.
Les inspections particulières ou spéciales sont déclenchées par des défauts identifiés sur l'ouvrage ou par des circonstances externes extraordinaires comme les crues ou les séismes.
Visite décennale du barrage de Cap de Long – descente du robot subaquatique (juin 2006)
Source : EDF
Dans le but de suivre et contrôler le comportement des barrages, on en réalise l'auscultation. Ceci consiste à mesurer certains paramètres physiques, afin d'en suivre l'évolution. Tout comme l'inspection, l'auscultation fournit des données pour étudier le comportement d'un barrage et évaluer sa sécurité.
L'auscultation est une action de contrôle basée sur des mesures physiques sur un barrage (ou sur des éléments d'un barrage) ou une zone de terrain.
On distingue deux types d'auscultation qui comportent des moyens, des méthodes et sont réalisés parfois par des intervenants différents :
• l'auscultation générale, de type géotechnique et structurale, au moyen d'équipements fixes installés dans le barrage et d'appareils de mesure mobiles. Il importe que l'opérateur qui effectue les mesures puisse valider lui-même les résultats obtenus, en disposant au préalable de valeurs de référence attendues;
• l'auscultation topographique, avec topométrie, nivellements de précision, etc....
Les modalités et fréquences à suivre pour les auscultations sont spécifiées habituellement dans les règles, règlements et directives.
Les principes qui sous-tendent cette activité doivent être également spécifiés.
Les outils de l’auscultation - Source : EDF
c) Contrôle de la fonctionnalité des organes d'évacuation
Le contrôle des organes d'évacuation ou de vidange constitue une activité primordiale pour la sécurité des barrages. Ces organes d'évacuation jouent le rôle vital de "soupapes de sûreté" pour les différents ouvrages de retenue auxquels ils sont rattachés. L'historique des incidents de barrages montre que le sous dimensionnement et/ou le mauvais fonctionnement des organes d'évacuation sont responsables d'une part prépondérante de ces incidents.
Cellules de pression - Source :EDF
Le contrôle des organes d'évacuation est constitué de deux activités majeures et complémentaires, qui peuvent se dérouler de manière simultanée ou en des périodes différentes. Il s'agit de l'inspection des organes d'évacuation, et des essais de fonctionnement; ces derniers étant partiels ou complets.
De plus, au-delà de leur fonctionnement propre, ces organes d'évacuation sont souvent munis de sources diverses d'alimentation afin d'avoir une redondance et une autonomie de fonctionnement adéquates. Ces sources d'alimentation alternatives doivent aussi être incluses dans les éléments de vérification lors des inspections et des essais des organes d'évacuation.
Il existe une multitude de types d'organes d'évacuation, comme les pertuis (de fond, de surface ou autre), les vannes (wagons, chenilles, segment, secteur, gonflables, clapets, toits, cylindriques, rouleaux,...), avec des grilles, des dispositifs de batardage, etc.
De même, les mécanismes de levage de ces vannes sont différents: certains sont à câbles ou à vis, munis de chariot-treuil (simple, fixe ou mobile) ou de grues portique. À ces différents mécanismes de levage sont associés des voies de roulement, des dispositifs de commande (local ou à distance), des voies d'accès, et des alimentations électriques.
Les différents éléments à considérer dans l'inspection et les essais, au-delà de l'aspect génie civil de l'ouvrage qui retient l'eau du réservoir, sont divers et habituellement très nombreux. On peut citer les vannes (avec membrures, plaques écrans, éléments chauffants, garnitures d'étanchéité...), les roues, les galets, les sabots latéraux, les câbles, les poulies, les tambours, les réducteurs de vitesse (moteur, engrenages, paliers), les vis, les poutrelles, les pièces fixes, etc.
ü Inspection des organes d'évacuation
L'inspection des organes d'évacuation, alliée à des essais de fonctionnement et à une évaluation (lors d'évaluation de sécurité par exemple) doit être menée de manière à déceler un dysfonctionnement éventuel et à conduire à leur garantie de fonctionnement lorsque requis.
La difficulté des inspections réside dans le fait qu'elles doivent s'assurer du fonctionnement (principalement mécanique et électrique) de composantes qui n'opèrent pratiquement jamais ou qu'en de très rares occasions.
Mesures de débit - Source :EDF
Il apparaît donc important, pour mener à bien les inspections des organes d'évacuation, d'établir au préalable une liste exhaustive des éléments à inspecter, à mesurer, à apprécier, à noter et à documenter.
Ces listes (ou procédures) d'inspection devront être adaptées :
• au type d'inspection à mener (ampleur, fréquence et contenu variable) ;
• au type d'organe d'évacuation visé par l'inspection ;
• au service attendu par l'organe d'évacuation (de l'utilisation très occasionnelle pour crues extrêmes, à l'utilisation récurrente pour les crues régulières des ouvrages au fil de l'eau).
Ces listes devront couvrir tous les éléments à inspecter :
• ceux relatifs à la fonction "ouvrages" à caractère principalement génie civil;
• ceux relatifs à la fonction "opérationnelle" à caractère structural, mécanique et électrique;
• ceux relatifs à la redondance de fonctionnement comme l'alimentation électrique principale, secondaire ou de secours et les moyens de télétransmission.
Les inspections pour les organes d'évacuation sont de divers types :
• les inspections de routine, qui ne visent que des éléments particuliers d'une installation, ou un but précis - vérification des éléments chauffants par exemple pour les ouvrages en zone froide ;
• les inspections limitées qui examinent des éléments susceptibles d'usure, de désajustement ou de dégradation. Ces inspections sont habituellement combinées à des actions de maintenance comme des travaux d'entretien mineur, de lubrification ou d'ajustement. Il s'agit de l'inspection des éléments mobiles de surface ou de fond ;
• les inspections formelles qui sont des examens approfondis des divers éléments, alliés habituellement à des essais de fonctionnement. L'ensemble de ces mesures et de ces observations permet de vérifier la conformité à des données pré établies et de juger de l'état et de la fonctionnalité des organes d'évacuation.
Mesures de débit - Source :EDF
Les différents types d'inspections ont des portées différentes, des fréquences différentes aussi et sont menées par du personnel aux qualifications adaptées au type d'inspection à réaliser.
Il est important d'effectuer des inspections visuelles à intervalles judicieusement rapprochés, sous peine de passer à côté de certaines anomalies. Des moyens d'accès spéciaux, des opérations de mise à sec ou le recours à des vidéos subaquatiques peuvent être requis.
Dans de nombreux pays, des règlements nationaux en prescrivent la réalisation ainsi que la nature et la fréquence. La planification de ces différentes inspections ainsi que leur nature sont définis par le propriétaire- exploitant, en accord avec l'autorité en charge du contrôle de la surveillance.
Il en est de même pour les essais.
ü Essais de fonctionnement
Les essais de fonctionnement visent à valider la sécurité fonctionnelle des organes d'évacuation. Ils s'adressent principalement aux parties mobiles de ces ouvrages ainsi qu'aux éléments annexes qui en garantissent le fonctionnement (comme les alimentations électriques en redondance, ou les commandes à distance).
Les essais de fonctionnement, tout comme les inspections, sont de nature, d'ampleur et de fréquences différentes. Ils vont des essais limités (fonctionnement partiel de certains éléments) aux essais complets. Certains essais sont réalisés pleine charge hydraulique ou bien après la pose de batardeaux d'étanchéité en amont. D'autres types d'essais sont pratiqués avec une ouverture partielle (10% par exemple) puis re-fermeture; ce qui permet de tester un domaine de fonctionnement habituellement le plus difficile.
Dans le cadre des contraintes d'exploitation, économiques et environnementales, les essais complets (c'est-à-dire en eau et sous pleine charge) sont préférables aux autres types d'essais.
Les essais de fonctionnement doivent donc être effectués :
• en différents types d'ampleurs différentes, et être bien déterminés à l'avance ;
• à des temps prédéterminés (fréquence établie à respecter) ;
• en spécifiant les données, mesures, limites ou appréciations qui devront être documentées, et comparées aux valeurs prévues ;
• avec des procédures précises et préétablies, adaptées au type d'organe d'évacuation à tester.
Les essais de fonctionnement, qui exigent des ouvertures même partielles et donc des lâchers d'eau, doivent être maîtrisés afin de :
• gérer les impacts éventuels en amont et en aval lors des ouvertures partielles ou complètes des vannes, les risques pour la population et l'environnement devant être pris en compte et suffisamment contrôlés ;
• respecter les ententes éventuelles, prises avec des tiers ou d'autres parties prenantes ;
• gérer l'impact des pertes hydrauliques et économiques engendrées par ces lâchers d'eau.
En dernier recours, des analyses fonctionnelles bien établies et documentées peuvent remplacer les essais si elles donnent l'assurance d'un fonctionnement correct.
On doit réaliser le suivi des barrages afin d'en évaluer l'état et le comportement, selon des modalités définies.
Le suivi du comportement est une activité d'analyse périodique des résultats d'inspections, des mesures d'auscultation, des investigations particulières et du journal des travaux de maintenance effectués.
Le suivi du comportement est fait par un professionnel, en général un ingénieur qualifié, afin d'apprécier le comportement réel du barrage par rapport à son comportement attendu (suite à sa conception et sa construction).
Il est important d'examiner les mesures inhabituelles (sortant des plages de valeurs attendues) et d'en trouver les raisons. Il faut aussi porter une attention spéciale aux mesures qui évoluent progressivement dans le temps : cela peut indiquer le développement d'un problème potentiel.
La comparaison avec d'autres ouvrages du même type, ou édifiés sur des fondations comparables, est également très utile.
Le diagnostic du comportement du barrage est le résultat de procédures formalisées, plus ou moins intégrées au programme de suivi du comportement du barrage.
Elles visent à évaluer les marges effectives de sécurité, et mettre à jour le degré requis de respect des consignes de sécurité (fonctionnalités des parties constituantes du barrage, cotes observées sur le niveau de la retenue...).
Le diagnostic doit être réalisé par un ingénieur convenablement qualifié et/ou compétent. Il doit comporter une évaluation sur l'état du barrage et des recommandations pour garantir le maintien de sa sécurité et son bon comportement dans le temps.
Il faut consigner, mettre à jour et conserver les données relatives aux barrages obtenues lors des activités de surveillance (inspections et auscultations), dans un système d'archivage reconnu, dédié et fiable. Les résultats de mesures, les relevés des activités d'inspection, d'auscultation, de suivi de comportement et de diagnostic doivent être consignés et conservés tout au long de la vie de l'ouvrage. Les procédures d'archivage doivent permettre un accès aisé pour analyses comparatives.
Il s'agit du "devoir de mémoire" que les maîtres d'ouvrage se doivent d'appliquer aux données issues de la surveillance de leurs structures.
Pratiquement, l'archivage bien ordonné doit couvrir toute la vie du barrage, depuis les premières études sur le site et l'ensemble du projet, la construction, la première mise en eau, ainsi que tous les événements marquants, crues ou vidanges prononcées de la retenue, ainsi que tous travaux de réparation ou transformation.
Tout barrage ou ouvrage de retenue est conçu puis construit et finalement exploité de manière à pouvoir faire face à diverses conditions particulières et bien définies.
Ces conditions prédéterminées sont élaborées pour différents modes d'exploitation dits normaux, avec des cotes d'exploitation, mais aussi pour des conditions extrêmes comme les crues, les séismes, les glaces, l'alluvionnement, les remplissages et les vidanges. Au-delà même de ces conditions extrêmes, le concepteur ou l'exploitant gardera une marge dans les facteurs de sécurité et/ou dans les réserves de matière constituante de l'ouvrage (épaisseur de rip-rap par exemple), afin de pallier les dégradations dans le temps après la construction. Les possibilités de dégradations doivent être sérieusement étudiées.
Chaque barrage possède des caractéristiques et des éléments particuliers dont la performance attendue est définie pour faire face et résister à ces conditions.
L'auscultation d'un barrage est une action de surveillance qui s'effectue en fonction de la performance attendue du barrage, face aux conditions de chargement, pour en assurer la sécurité et la pérennité.
Idéalement toute surveillance d'un barrage ou ouvrage de retenue devrait reposer sur la réponse aux quatre questions ou thèmes suivants :
• Pourquoi surveiller ? Que voulons-nous voir, suivre, mesurer qui justifie la surveillance requise ?
• Quoi surveiller ? Une fois le besoin cerné, identifié et bien précisé, on peut alors définir ce qu'il faut surveiller.
• Comment surveiller ? Le besoin étant identifié, on devrait déterminer comment surveiller l'objet de la surveillance, objet qui répond au besoin identifié dans une optique d'assurer la sécurité du barrage ou de l'ouvrage de retenue.
• Est-ce que la surveillance (et en particulier l'auscultation) prend en compte des modes de rupture potentiels identifiés ? Sinon, il faudra s'interroger sur le pourquoi d'une telle surveillance.
La surveillance des barrages vise à déceler, par observation visuelle et par auscultation, tout phénomène pouvant compromettre l'intégrité structurale et fonctionnelle d'un ouvrage ou de ses organes et équipements d'exploitation.
Elle commence par vérifier la conformité du comportement de l'ouvrage et de ses fondations aux hypothèses, explicites ou même seulement implicites, du projet. Cela peut passer par la comparaison à des modèles de calcul.
L'accent étant mis sur les mécanismes de rupture précisés pour chaque barrage, les activités de surveillance visent la détection des signes d'alarme précurseurs liés à ces mécanismes avant qu'ils ne deviennent incontrôlables.
L'inspection, l'auscultation et le suivi du comportement sont réalisés d'une manière appropriée à l'état de chacun et au degré de risque qu'il représente.
L'approche à privilégier et à retenir pour la surveillance, et principalement l'auscultation des barrages, repose sur :
• la place prépondérante accordée aux inspections visuelles dans le cadre d'un suivi régulier de comportement des barrages et de la détection précoce des phénomènes pouvant en compromettre la sécurité ;
• une surveillance et une auscultation ciblées toutes deux vers la détection des phénomènes indicateurs de mécanismes potentiels de dégradation ou de rupture. Le suivi régulier des autres paramètres de comportement, non reliés aux mécanismes de rupture, s'effectue sur une base «faible coût, grande valeur ajoutée» ;
• la prépondérance du suivi des paramètres de comportement à caractère global et évolutif par rapport au suivi de ceux à caractère local et statique ou à évolution lente ;
• une programmation des relevés qui permette une comparaison et une complémentarité adéquates de résultats requis simultanément (piézométrie - débits de fuites, ou pendule-température-réservoir par exemple).
La mise en œuvre de tels systèmes suit les critères suivants :
• le système d'auscultation mis en place à la construction est principalement axé sur la vérification des paramètres de conception et de construction, à la construction et au premier remplissage puis durant les premières années d'exploitation du barrage ;
• une évolution progressive graduelle vers un système axé sur les données nécessaires au diagnostic et à l'évaluation de la sécurité, les particularités spécifiques du barrage et la détection de phénomènes pouvant mener aux mécanismes de rupture.
Tout système d'acquisition automatique des données est installé dans le respect des principes suivants :
• l'intégrité des données est garantie, qu'il s'agisse de mesures ou de transfert vers un système d'archivage dédié,
• les données sont archivées de façon à ce qu'elles soient consultables en tout temps (même et surtout en période d'urgence),
• les limites de fonctionnement normal sont à définir à l'avance, pour la détection et le signalement des anomalies,
• un journal des alarmes à jour est disponible en tout temps.
Les faiblesses ou les déficiences d'un ouvrage peuvent être identifiées par des changements (signes avant-coureurs) dans le comportement du barrage, de sa fondation, de ses appuis ou par des venues d'eau.
Un comportement inhabituel, quelle qu'en soit l'importance, doit être identifié et enregistré, car n'importe quelle condition inhabituelle pourrait être annonciatrice du développement d'une situation potentiellement dangereuse.
La surveillance doit couvrir l'ensemble de l'aménagement et de la retenue.
Les inspections visuelles sont des moyens fondamentaux et fiables pour détecter des détériorations ou des mauvais fonctionnements.
La qualification, l'implication et l'engagement du personnel de surveillance sont très importants. Une personne démotivée, complaisante ou submergée face aux prises avec de volumineuses données récoltées ne devrait pas être assignée à une telle tâche.
L'analyse poussée de quantités de données, plutôt que de données de qualité, peut être attirante surtout avec les outils modernes de traitement de données... mais peut faire perdre la vision de conditions adverses évidentes qu'un examen simple et réaliste permettrait de détecter.
d) L'auscultation en lien avec la métrologie
Les principes et les règles gouvernant les activités d'auscultation d'un barrage en vue d'en assurer une surveillance suffisante, juste et pertinente doivent être définis.
Relevé de mesures sur un pendule dans la galerie d’un barrage hydraulique
Source : EDF
L'auscultation d'un barrage se fait, dans la mesure du possible, en fonction des principes généraux suivants:
• la prise de mesures directes, avec un minimum d'interfaces entre l'instrument et le composant à ausculter ;
• l'utilisation d'instruments et de capteurs simples, robustes et faciles à installer, à étalonner ; entretenir et utiliser ;
• la redondance, point essentiel : il faut suffisamment de recoupements pour tous les paramètres critiques mesurés.
Les systèmes d'auscultation sont manuels ou automatiques. Le recours à des systèmes d'acquisition automatique devrait être justifié. Ce pourrait être les cas suivants :
• comportement particulier (atypique) du barrage nécessitant des relevés à fréquence rapprochée,
• barrages d'accès difficile ou coûteux,
• barrages de valeur stratégique ou pour d'autres considérations économiques.
La conception d'un système d'auscultation repose sur les considérations suivantes :
• prise en compte du comportement du barrage réel ou prévu,
• ceci s'applique également à la ré-instrumentation d'un barrage ou au recours à un système d'acquisition automatique de données (SAAD),
• choix approprié d'instruments (familles et types) et du degré de redondance, en fonction du paramètre recherché,
• niveau de fiabilité adéquat, de même qu'une plage de mesures et un degré de précision compatibles avec le phénomène prévu,
• couverture adéquate des phénomènes liés au comportement du barrage, de ses fondations et appuis ainsi que de ses ouvrages annexes.
L'analyse des données doit permettre de saisir nettement la distinction entre le comportement de l'instrumentation et le comportement réel du barrage, à partir :
• des critères d'interprétation des données,
• de corrélations reposant sur les données chronologiques ou le comportement projeté,
• de limites préétablies de plausibilité des données.
h) Principes de mesure en surveillance des barrages
L'auscultation a pour objectif de mesurer certains paramètres physiques d'un barrage afin d'en suivre l'évolution.
Cette activité de surveillance est encadrée de plusieurs façons par la métrologie qui définit comment et avec quelle exactitude les mesures sont prises, et ce, en fonction d'un objectif de mesure établi lors de la conception, de la construction ou de l'évaluation de la sécurité d'un barrage.
L'application de la métrologie intervient principalement dans les cas suivants :
• lors de la vérification des systèmes et des équipements de mesure, par la définition des programmes de maintenance et des exigences d'étalonnage,
• lors de la prise de mesures, par l'élaboration de méthodes uniformes,
• lors de la validation des mesures, par l'élaboration de procédures de validation sur le terrain et par la détermination de l'erreur liée à chaque système de mesure.
Le contrôle de l’autorité de tutelle intervient donc, suivant la classification de l’ouvrage, à période déterminée. Cela donne lieu à une visite sur site des membres de l’inspection, qui vérifieront les données enregistrées journellement et accompagneront les exploitants responsables de la sécurité dans une vérification in situ de l’ensemble des galeries. Ceci donnera lieu à un volumineux rapport, qui mentionnera les réparations effectuées et analysera celles demandées antérieurement. La vie du barrage sera ainsi retracée.
CHAPITRE 2 : LES MISSIONS DE VOTRE RAPPORTEUR
Votre rapporteur a accompli un certain nombre de missions en France, et visité des barrages et digues de toutes tailles, de toute nature, de tous usages. Il aurait été utopique de faire un tour complet, de vouloir tout visiter. D’ailleurs, le recensement départemental qu’impose le décret du 11 décembre 2007 n’est pas terminé. Une grande disparité existe sur le territoire. Votre rapporteur a donc voulu, par sondage, se faire une idée de la situation sur le terrain et voir au moins un exemple de barrage ou d’ouvrage par catégorie : barrage concédé ou non, hydroélectrique ou pas, barrage voûte ou poids, digue de canal, digue de grand fleuve ou digue de rivière…..en bon état ou peu entretenu.
Parmi les grands barrages, votre rapporteur a privilégié, et on le comprendra aisément, un ouvrage de sa région.
1) UN GRAND BARRAGE NON HYDROÉLECTRIQUE, CELUI DE BIMONT
Source : Société du Canal de Provence
Et mieux encore de faire un compte rendu de cette visite, il m’a semblé utile d’avoir un point de vue très pointu. Afin de préparer la table ronde sur la résistance au séisme des barrages, j’avais demandé à la Société du Canal de Provence et d'aménagement de la région provençale de me fournir une note sur l’état du barrage de Bimont. Je vous livre, ci-après, cette note due au Bureau d'Ingénieurs Conseils « Coyne et Bellier », puisqu’elle émane d’un bureau mondialement reconnu pour sa qualité.
ü Présentation
Le barrage de Bimont est un barrage en béton de type voûte à double courbure de 87 mètres de hauteur, construit de 1947 à 1951. Son volume de béton de 120 000 m3 en fait un ouvrage relativement massif par rapport aux nombreuses réalisations contemporaines et ultérieures, françaises et étrangères. Sa construction a créé un réservoir de 39 hm3 dont l'objectif était de réguler les eaux du Verdon entre le canal de Provence et l’alimentation de la zone Marseille, et de sécuriser l'ensemble du réseau. Les apports du bassin versant propre ne représentent qu'une faible proportion (5 à 10%) des apports totaux qui transitent par le réservoir.
ü Exploitation et surveillance – Historique
L'ouvrage fut mis en service en 1952. Très vite, le réservoir s'est révélé largement dimensionné par rapport aux besoins réels d'exploitation, si bien que seuls 20 hm3 (la moitié) se trouvèrent mobilisés jusqu'en 1970, et 27 de 1970 à 1981. A partir de 1982, l'ajout de 2 microcentrales hydroélectriques a conduit à limiter encore plus les variations du niveau d'eau, avec seulement 14 hm3 stockés qui correspondent à une hauteur d'eau de 64 mètres seulement : le remplissage n’atteint que les 3/4 de sa hauteur totale (= 2/3 de la hauteur visible hors d’eau à l’aval).
Dès les années 60, l'attention fut attirée par un comportement singulier de 3 plots de la rive droite, où apparurent des fissures. Le dispositif d'auscultation fut ajusté comme il est d'usage en telle circonstance. La qualité de la fondation fut vérifiée, et finalement mise hors de cause. Des études détaillées (SCP, EDF, LCPC, Coyne et Bellier) identifièrent le gonflement du béton mis en oeuvre de mi-août à mi-septembre 1949, provoqué par un défaut des ciments utilisés sur cette courte période. Ce phénomène s'est atténué puis arrêté dans les années 90.
Le barrage de Bimont est régulièrement surveillé par son exploitant, et ausculté par un dispositif complet de mesures ; pendules (fils à plomb) dans les plots rive droite et central, repères topométriques contrôlés plusieurs fois par an, mesures de fuites, auxquels ont été ajoutés des appareillages de suivi de quelques fissures singulières. La fondation du barrage est auscultée par des piézométres. Ces mesures, régulièrement interprétées par Coyne et Bellier, sont destinées à contrôler le comportement du barrage au fil du temps. Les inspections annuelles sont menées sous l’autorité du service de contrôle, la DDAF appuyée par les experts du CEMAGREF. La dernière inspection réglementaire décennale a été réalisée en novembre 1999 avec vidange complète de la retenue.
Le barrage de Bimont a fait l’objet de procédures de "Révision Spéciale" (au sens de la circulaire 70-15 de 1975) en deux occasions, en 1970 et 1980, avec examens approfondis de son dossier technique par le Comité Technique Permanent des Barrages ; et d’un réexamen par le même Comité en 1998, dans le cadre de l’instruction du Plan Particulier d’Intervention (PPI). Á chacune de ces occasions, le Comité a exprimé sa confiance dans la bonne tenue de l’ouvrage.
ü Appréciation de l'état de sûreté du barrage
L'absence de préoccupation particulière sur l'état du barrage de Bimont est étayée par les faits suivants :
1. l'ouvrage est une voûte, un type de barrage qui a prouvé l'excellence de sa tenue par le grand nombre de réalisations à toutes échelles dans le monde entier (jusqu'à près de 300 m de hauteur, Xiaowan en Chine),
2. la fondation, en roche calcaire massive, est parfaitement compétente comme le prouve son comportement,
3. le dimensionnement du barrage est très confortable par rapport aux nombreuses réalisations contemporaines et ultérieures (sa finesse, mesurée par le coefficient de Lombardi, est d'environ 11,5, donc bien inférieure à la valeur de 20 qui serait considérée comme acceptable selon les critères d'aujourd'hui),
4. la charge statique supportée par le barrage est très inférieure à la charge de projet : avec une hauteur d'eau d'environ 3/4 de la valeur nominale, la poussée totale, proportionnelle au cube de la hauteur, n'est que de 42%,
5. la limitation du remplissage, combinée avec la relative modestie du bassin versant, lui confère une capacité d'amortissement des crues exceptionnelles.
Cette appréciation se trouve confirmée depuis de nombreuses années par le comportement du barrage tel qu'il apparaît à travers les mesures d'auscultation.
Un seul chargement échappe à ce raisonnement, c'est celui de la sollicitation sismique. Selon les errements de l'époque de la construction, celle-ci n'a pas été formellement considérée. L’ingénierie des barrages a beaucoup progressé depuis en ce domaine, notamment du fait de la construction de très grands barrages dans des régions fortement sismiques (Turquie, Iran, Chine).
D’une façon générale les barrages voûtes résistent très bien aux séismes : plusieurs ont été sérieusement secoués sans dommages importants, par exemple Pacoïma aux USA, en 1971 et 1994. L'expérience est confirmée par les analyses numériques régulièrement effectuées pour les projets de grandes voûtes en pays sismiques.
Le cas de Bimont est cependant particulier car il est maintenu partiellement vide en permanence. Or paradoxalement, une voûte résiste mieux lorsqu'elle est en pleine charge, les différents blocs restant solidarisés par la poussée de l'eau pendant la secousse. Des analyses numériques particulières ont donc été réalisées (en 1997, dans le cadre du dossier de PPI), par la méthode dynamique simplifiée "KINEBLOC". Ils ont permis de s'assurer de la stabilité des plots de la rive droite, jugés les plus vulnérables en raison de leur forme et aussi parce que ce sont ceux qui ont subi les effets du gonflement.
2) LES BARRAGES HYDROÉLECTRIQUES
Votre rapporteur a, bien entendu, reçu dès la saisine les responsables de la production et de la sûreté hydrauliques d’EDF. MM. Jean-François ASTOLFI, le Directeur de la division « Production et Ingénierie Hydraulique » et Philippe LEFEVRE, l’Inspecteur Sûreté Hydraulique, qui lui est rattaché.
Ils ont présenté à votre rapporteur cet extrait de la politique de sûreté hydraulique d'EDF : « La sûreté hydraulique recouvre l’ensemble des dispositions prises lors de la conception, l’exploitation ou la maintenance des aménagements hydroélectriques pour assurer la sécurité des personnes, des biens et de l’environnement contre les risques liés à l’eau et dus à la présence et à l’exploitation des ouvrages.… »
La politique de sûreté hydraulique d’EDF est structurée autour de trois lignes d'actions complémentaires :
- maîtriser les risques de rupture d'ouvrages ou parties d'ouvrages dont la défaillance pourrait mettre en cause la sécurité des personnes, des biens ou de l'environnement,
- maîtriser les risques liés à l'exploitation des ouvrages en période de crue,
- maîtriser les risques pour la sécurité des personnes, des biens et de l'environnement générés par les variations de débit résultant de l'exploitation normale des ouvrages (démarrages, arrêts de groupes).
L'organisation de la sûreté hydraulique à la DPIH.
Le Directeur de la Division « Production et Ingénierie Hydraulique » est responsable de la sûreté des aménagements hydroélectriques. Un « Inspecteur Sûreté Hydraulique »lui est directement rattaché. Ce dernier mène des inspections systématiques au sein des Unités et sous Unités ou sur des sujets définis à la demande.
Le Directeur Délégué de la Division est responsable de l'animation opérationnelle de la sûreté au sein de la Division. Une mission « Sûreté et Prévention » distincte de l'Inspecteur lui est rattachée. Cette dernière est chargée de l'élaboration, de la mise à jour et du contrôle de l'application de la politique de sûreté hydraulique au sein de la Division. La Mission S et P édite également un rapport annuel.
Le Directeur Délégué préside la Commission Nationale de Sûreté Hydraulique (CNSH), chargée de la validation des politiques et de leur déclinaison opérationnelle.
L'Inspecteur « Sûreté Hydraulique » préside le comité « Sûreté des aménagements hydroélectriques » (SAMHY), comité d'experts chargé d'examiner les projets présentant un enjeu de sûreté significatif.
Chaque Directeur d'Unité est responsable de la mise en œuvre de la politique de sûreté pour ce qui le concerne et de ses résultats.
ü La sûreté des ouvrages en fonctionnement normal
L’objectif est le fonctionnement normal des installations hydroélectriques, notamment « en éclusées » ou à la pointe ; cela peut générer des variations de débit importantes et rapides à l'aval des ouvrages.
Ces opérations ne doivent pas mettre en cause la sécurité des personnes et des biens. Un effort tout particulier a été porté à ce domaine depuis l'accident survenu sur le Drac en 1995, par la révision et adaptation des consignes d'exploitation, des campagnes d'information et de sensibilisation du public, la présence des « hydroguides » en aval des retenues, l’analyse systématique des risques à l'aval des ouvrages et la réalisation des travaux correctifs appropriés selon la « criticité » des sites et la mise en place et l’exploitation d'un système de collecte des « événements significatifs pour la sûreté hydraulique » ( ESSH).
ü L’exploitation des ouvrages en période de crue
Assurer le transit des débits de crue sans risque pour la tenue des ouvrages et sans aggravation des conséquences naturelles pour les populations à l'amont et à l'aval est un autre objectif.
Pour cela, EDF s’est donné les moyens par l’organisation adaptée des équipes de terrain (astreintes), en élaborant des consignes d'exploitation rigoureuses, en assurant une coordination exploitants de terrains/ Centres de conduite (CCH), en effectuant une exploitation permanente du « retour d'expérience », en améliorant de façon permanente les méthodes de prévision des événements hydrologiques extrêmes, en développant ou en améliorant les outils de simulation de la conduite des ouvrages en période de crue, en développant des études et des travaux d'amélioration des dispositifs d'évacuation de crue des barrages.
ü La sûreté des grands barrages : un enjeu majeur
Les risques de rupture d'ouvrages ou parties d'ouvrages concernent au premier chef les grands barrages et les barrages de moyenne importance (BMI). Ils constituent le risque majeur de l'exploitation hydroélectrique.
• Ces ouvrages font l'objet de dispositions réglementaires spécifiques et d'un contrôle régulier par les services de l'État
• EDF pratique une surveillance continue basée sur des visites régulières, sur l'exploitation de dispositifs d'auscultation performants et sur des essais périodiques des organes de sécurité. EDF établit un rapport annuel d'auscultation et de surveillance.
• Une visite décennale approfondie (avec vidange ou inspection sub-aquatique) est obligatoire pour les grands barrages.
ü Les événements importants pour la sûreté hydraulique
Depuis 2 000, la mise en œuvre par EDF d'un système de détection et de cotation des « Événements Significatifs pour la Sûreté Hydraulique » (ESSH) applicable à tous les aménagements permet le recensement et le classement selon leur gravité (niveau 0 à 6) de tous les événements susceptibles d'affecter la sûreté hydraulique, liée ou non à l'exploitation des ouvrages, y compris les « précurseurs » (niveau 0).
Depuis 2005, existe la mise en œuvre d'un système de déclaration des « Evénements Importants pour la Sûreté Hydraulique » (EISH) mis au point avec l'autorité de contrôle et dérivé de la pratique des ESSH
Le système des EISH ne s'applique qu'aux événements ayant eu des conséquences externes, quelle qu'en soit la cause, imputable ou non à EDF. Il s'apparente aux ESSH de niveau supérieur ou égal à 1, mais se limite aux ouvrages concédés.
Un code couleur (jaune, orange, rouge) qualifie les événements selon leur gravité ; 33 EISH ont été déclarés en 2005 (dont 3 orange) et 25 en 2006 (dont deux rouge et trois orange). Seul l'incident de Tuilières (rouge) est imputable à EDF
ü Sûreté hydraulique et maintien du patrimoine
Le risque de défaillance ne se limite pas aux barrages mais couvre de très nombreux composants importants pour la sûreté (conduites forcées, vannes charpentées, digues de canaux, automatismes..).
Les conditions de surveillance et de maintenance de ces équipements constituent un facteur clé de leur fiabilité
Ces ouvrages et matériels sont aujourd'hui de plus en plus sollicités du fait d'un recours accru à l'énergie hydroélectrique
Les politiques de maintien du patrimoine doivent être adaptées aux nouveaux enjeux et le parc doit faire l'objet d'une rénovation de certains composants.
Pour cela une analyse exhaustive de l'état et du degré de criticité du patrimoine selon 19 familles d'ouvrages et matériels a été lancée en 2005 avec « focus » sur les composants importants pour la sûreté.
La création de la DPIH au 1er juillet 2005 regroupant l'ensemble des compétences d'ingénierie, d'exploitation et de maintenance dédiées à l'hydraulique a fortement renforcé les effets de synergie, et l’évolution de l'organisation des Unités de Production a permis de mieux séparer les responsabilités de gestionnaire d'actifs et d'exploitant.
La généralisation de l'analyse de risques en préalable à toute décision relative au maintien du patrimoine est érigée en méthode, de même que l’introduction des facteurs socio organisationnels et humains (SOH) dans la démarche de sûreté.
Le lancement d'un programme de rénovation et modernisation des installations « Sûreté et Performance de l'hydraulique » soit SuPer Hydro a été nécessaire pour rattraper le retard en maintenance de la dernière décennie.
ü Le programme « Sûreté et Performance de l'Hydraulique »
Ses objectifs sont de maîtriser dans la durée les risques de défaillance d'ouvrages et d'équipements pouvant avoir des conséquences vis à vis de la sûreté, maîtriser les risques de défaillance d'ouvrages et d'équipements pouvant avoir un impact significatif en termes de perte de production et gagner 1 à 2 points de disponibilité notamment en réduisant le taux d'avaries.
Sur la base du diagnostic par familles en cours, le plan prévoit d’identifier les « points sensibles » en matière de sûreté et de production, de hiérarchiser les points sensibles en fonction de leur criticité, d’étudier les solutions techniques provisoires et définitives pour garantir un niveau de risque industriel acceptable à court comme à moyen et long termes, d’engager un programme de rénovation et modernisation des ouvrages et matériels les plus sensibles sur les toutes prochaines années et de redéfinir les politiques de maintenance et les budgets nécessaires au maintien du parc en bon état dans la durée
Ce programme doit être réalisé sur la période 2007 à 2011 ; c’est un programme de 560 M€, coûts d'ingénierie, qui nécessite de renforcer les moyens affectés aux études et au suivi de réalisation sur site (MOA/MOE) mais aussi aux achats.
Un point sensible réside cependant, compte tenu du marché marginal en France au cours des dernières années, en la capacité du tissu industriel notamment pour les conduites forcées et les vannes charpentées
a) Le barrage de Sainte Croix : un exemple de grande retenue en zone de montage
Source : EDF
EDF est présent dans les gorges du Verdon avec cinq barrages et centrales hydroélectriques qui se succèdent, trois grandes retenues, dont celle de Sainte-Croix.
Les aménagements hydroélectriques du Verdon ont été conçus avec des objectifs multiples :
• Produire de l’électricité,
• Assurer les besoins en eau de l’agriculture et des populations,
• Diminuer les effets de la sécheresse et des crues.
Par ailleurs, ces ouvrages contribuent à l’attractivité du site pour de très nombreux visiteurs venus d’Europe entière, grâce notamment à la création des lacs de retenues de Castillon ou Sainte-Croix.
L’histoire des aménagements hydroélectriques du Verdon
Pour faire face aux besoins croissants du littoral méditerranéen en énergie électrique et en eau, l’aménagement du Verdon est engagé dès le début du siècle dans le cadre d’une loi promulguée en 1923 qui prévoyait la création de plusieurs barrages hydroélectriques sur cette rivière. En 1982, la Société Hydroélectrique du Verdon (SHEV) lance les travaux de Castillon et de Chaudanne. Arrêtés en 1932 suite à la faillite de SHEV, les travaux sont repris temporairement en 1938 puis définitivement en 1942. Le barrage de Castillon est mis en eau au printemps 1949 et celui de Chaudanne en 1952 par EDF.
L’équipement du Bas Verdon est engagé à partir de 1963 avec la construction de la centrale de Vinon sur Verdon et du barrage de Gréoux, pour répondre à la nécessité de constituer une réserve d’eau pour alimenter le réseau de la Société du Canal de Provence, nouvellement créée en 1957.
Mais la pièce maîtresse de l’aménagement du Verdon est le projet de grand réservoir de Sainte Croix et de son bassin de compensation : le barrage de Quinson. Les premières reconnaissances datent de 1926. C’est en 1970 qu’est mis en chantier le barrage de Sainte Croix, dans les gorges de Baudinard. Le barrage de Quinson est achevé la même année, mettant un terme à l’aménagement hydroélectrique du Verdon.
La production des centrales hydroélectriques du Verdon atteint près de 600 millions de kWh par an, soit la consommation annuelle d’une ville comme Aix en Provence.
Les caractéristiques du barrage et de l’usine de Sainte Croix
Implanté dans les gorges de Baudinard, le barrage de Sainte-Croix retient un volume d’eau de 767 millions de m3 d’eau, pour la retenue normale fixée à la cote de 477 m NGF.
Le bassin versant de 1 591 km2 constitue un apport annuel de 1 000 millions de m3.
L’ouvrage est une voûte à double courbure, de 95 m de hauteur totale au-dessus de sa fondation et de 138 m de longueur développée à son couronnement. Elle est constituée de 55 000 m3 de béton.
L’usine de Sainte Croix a été mise en service en 1974.
L’emprise du lac a nécessité de reconstruire le village des Salles sur Verdon, de rétablir 25 km de route et de créer 2 ponts.
Elle dispose d’une puissance totale de 142 MW, pour un productible annuel de 170 millions de KWh.
Le lac formé par le barrage est, après Serre-Ponçon, la deuxième plus grande retenue artificielle de France (2 200ha).
L’eau turbinée à Sainte Croix est directement déversée dans la retenue de Quinson.
Pour valoriser le potentiel hydraulique, la centrale de Sainte Croix dispose d’une turbine réversible de 50MW capable de pomper 52 m3/sec dans la retenue de Quinson.
Une réserve indispensable à la sécurisation de l’alimentation en eau de la région et un pôle d’attractivité touristique
Le lac de Sainte Croix constitue la principale réserve assurant la sécurisation de l’alimentation en eau potable de la région.
Sur le Verdon, les barrages de Sainte Croix et Castillon servent à stocker l’eau pour les usages agricoles ; 140 millions de m3 sont réservés à l’agriculture.
Concernant l’alimentation en eau potable, sur les 760 millions de m3 d’eau stockés, 150 millions sont puisés chaque année par la Société du Canal de Provence (SCP) dans le Verdon pour alimenter en eau les départements du Var (dont la ville de Toulon), des Bouches du Rhône (agglomération d’Aix en Provence) et du Vaucluse (Lubéron et vallée du Calavon / Apt).
Les prélèvements de SCP sont garantis par une capacité de stockage totale sur le Verdon de 250 millions de m3, dans Castillon et Sainte Croix (EDF) et le barrage de Bimont (SCP) à proximité d’Aix en Provence.
Par ailleurs, les retenues du Verdon sont de réels pôles d’attractivité pour le tourisme et génèrent, de ce fait, une activité touristique importante : entre 30 et 40 000 visiteurs par jour autour des lacs du Verdon, plusieurs milliers de randonneurs chaque jour dans les gorges en été et de nombreuses activités nautiques et aquatiques proposées.
Un enjeu sûreté maîtrisé
Le barrage de Sainte-Croix est classé en catégorie A au titre de la nouvelle réglementation (décret de décembre 2007). A ce titre, il fera l’objet, d’ici 2010, d’une « étude de danger », transmise à la DRIRE.
La surveillance de l'ouvrage est basée sur :
- Des mesures d'auscultation comportant des paramètres mécaniques (mesures de déplacement issues de 3 pendules mesurés tous les 15 jours et de 32 cocardes de planimétrie mesurées tous les 6 mois) et hydrauliques (23 piézomètres, 19 points de fuite mesurés tous les 15 jours). Le contrôle du bon fonctionnement des systèmes de mesure est opéré tous les 2 ans par l'entité d'EDF experte en auscultation (DTG). Une analyse de ces mesures d'auscultation est réalisée en temps réel par la DTG. Par ailleurs, la DTG effectue un bilan de comportement biennal par analyse a posteriori de ces mesures.
- Des inspections visuelles mensuelles réalisées par l'exploitant et annuelles réalisées par les experts de génie civil d'EDF, le CIH dont on détaillera l’activité au chapitre 4.
Sur la base de cette surveillance, les experts de génie civil d'EDF concluent au bon état de l'ouvrage. Une inspection du Service de Contrôle (DRIRE PACA) a lieu annuellement sur l'ouvrage. D'autre part, un examen complet de l'ouvrage a lieu tous les 10 ans, et ce dans le cadre de la réglementation. Ce prochain examen, qui inclu par moyens subaquatiques l'inspection des parties submergées de l'ouvrage, est programmé le 14 octobre 2008. La dernière visite décennale a eu lieu en 1998.
Source : EDF
b) Les barrages du Rhin : barrages au fil de l’eau
Les centrales hydroélectriques « au fil de l'eau » sont principalement installées dans des zones de plaine, et présentant donc des retenues de faible hauteur mais sur des fleuves et des grandes rivières ayant un courant relativement rapide. Les turbines sont entraînées par le cours du fleuve qui fournit donc la force hydraulique. La différence de niveau entre les plans d'eau supérieurs et inférieurs étant réduites, la faible chute est compensée par le fort débit d'eau. L’oxygénation de l'eau qui en résulte favorise grandement la faune aquatique.
Lorsque le débit d’eau est peu élevé, ces aménagements sont souvent couplés avec une petite retenue (barrage, retenue ou éclusé) placé en amont, ce qui permet d’augmenter la hauteur de chute.
Les centrales au fil de l’eau avec turbines à axe vertical sont utilisées sur des rivières ayant un courant rapide, une haute chute d'eau et un débit assez faible. Celles à axe horizontal s’utilisent sur les fleuves ayant un fort débit et une faible chute.
D’une manière générale, ce type d’aménagement fonctionne en permanence lorsque l’énergie potentielle est disponible en suffisance. Cette disponibilité est souvent plus élevée en été qu'en hiver (fonte des neiges). Leur exploitation dépend donc des variations de débit du cours d'eau. Ce type de centrale fournit une énergie sous la forme d’un «ruban», à l’image des centrales nucléaires. Lorsque le barrage fait obstacle à la navigation fluviale, il est doté d'écluses permettant le passage des bateaux et des poissons, ce qui est le cas notamment du Rhin et du Rhône.
Dernière centrale entièrement française, Strasbourg est également la 8ème du Rhin. Mise en service en 1970, elle est précédée d'un bassin de compensation d'une superficie de 800 hectares, équilibrantle niveau du fleuve afin de garantir un débit régulier au port autonome de Strasbourg situé en aval. |
La centrale de Vogelgrun mise en service en 1959 est la dernière construite sur le Grand Canal d’Alsace. Située au centre de la plaine d'Alsace, Vogelgrun constitue un noeud important d'interconnexion électrique et routier avec l'Allemagne. |
Source : EDF
II - LA QUESTION DES RENOUVELLEMENTS DE CONCESSIONS
La libre concurrence va se manifester lors du renouvellement des concessions hydroélectriques, et si EDF s’est montrée une entreprise responsable, qu’en sera-t-il avec d’autres repreneurs puisqu’il semble impossible que l’ensemble du parc soit à nouveau concédé à cet exploitant ? Si de grands groupes comme Hydro Québec ou les filiales du groupe Suez ont déjà montré leur souci en matière de sûreté et la qualité de leurs équipes, qu’en serait il avec un fonds de pension extérieur à la filière hydroélectrique ?
Un projet de décret sur la mise en concurrence des concessions hydroélectriques et la sûreté des aménagements qu’a pu se procurer votre rapporteur, est quelque peu rassurant sur ce point.
Ce projet de décret modifiant les décrets relatifs à la concession et à la déclaration d’utilité publique des ouvrages utilisant l’énergie hydraulique est actuellement à l’examen du Conseil d’Etat. Ce projet a pour principal objet de définir les modalités du processus de mise en concurrence des concessions hydroélectriques.
Trois critères de sélection des offres sont explicitement cités, à savoir « l’efficacité énergétique d’exploitation de la chute », autrement dit le projet énergétique des candidats, « le respect du Code de l’Environnement », et « les conditions financières pour l’Etat », c’est à dire la redevance proportionnelle au chiffre d’affaires de la chute considérée proposée par les candidats.
Mais d’autres éléments entrent aussi en considération puisqu’ils font partie du dossier de demande de concession déposé par chacun des candidats : c’est, par exemple, le cas de la prise en compte des autres usages de l’eau et de la compatibilité avec le SDAGE et l’éventuel SAGE.
La sûreté des ouvrages est aussi un point spécifiquement abordé: les candidats doivent en effet fournir un « exposé des moyens de surveillance des ouvrages et des eaux, de détection d’anomalies et d’alerte et d’intervention en cas d’accident ou d’incident ainsi que de prévention en matière de sécurité en amont proche et en aval des ouvrages ».
Sur ce point, les candidats pourront s’appuyer sur le dossier fourni par le concessionnaire sortant et comprenant : « une note précisant l’état des ouvrages et équipements concédés et leur conformité aux normes en vigueur, ainsi qu’un exemplaire complet et à jour du dossier des barrages (…) et pour tout barrage de catégorie A ou B, un diagnostic sur les garanties de sûreté de l’ouvrage (…) ».
La sûreté des ouvrages et de leur exploitation est donc un élément essentiel des dossiers de renouvellement des concessions hydroélectriques dans le cadre de leur mise en concurrence. Il est d’ailleurs évident que les parties prenantes consultées tout au long du processus (de l’étape de la Conférence de l’eau à l’enquête publique) seront très attentives à la prise en compte de ces questions au moment du choix du nouveau concessionnaire.
La définition précise des dispositions reconduites en matière de sûreté et de sécurité, les propositions nouvelles faites en ce domaine par les candidats et leur expérience sur d’autres sites seraient dès lors des critères de sélection d’une grande pertinence.
III – LES VISITES SUR LE TERRAIN
Après avoir vu plusieurs grands barrages, exploités par des institutions aussi solides qu’EDF ou le Canal de Provence, votre rapporteur s’est intéressé aux autres types de barrages. S’il lui était impossible de visiter l’ensemble du territoire, votre rapporteur s’est résolu à sélectionner arbitrairement un certain nombre de départements. Le but n’était évidemment pas de distribuer des bons ou mauvais points des structures départementales, mais plutôt d’apprécier l’interprétation qui pouvait être faite d’un même texte en fonction de la réalité du terrain. Et qu’elle ne fut pas le plaisir de votre rapporteur de rencontrer partout des équipes extrêmement compétentes et soucieuses de remplir, malgré les difficultés et les contraintes, la lourde tâche de l’application du décret du 11 décembre 2007 !
Votre rapporteur a donc visité des ouvrages dans les départements de l’Aude, du Gers, des Côtes d’Armor, du Bas et du Haut Rhin, du Loiret et du Gard. Quelle ne fut pas sa surprise également d’y trouver des préfets très soucieux de cette sécurité des ouvrages hydrauliques.
C’est au service de la police de l’eau (SPE) qu’incomba dans la plupart des directions départementales de l’agriculture et de la forêt (DDAF) la tâche de guider votre rapporteur et de convoquer propriétaires et exploitants.
C’est donc le 11 décembre 2007 qu’était publié le décret n° 2007-1735 relatif à la sécurité des ouvrages hydrauliques et au comité technique permanent des barrages et des ouvrages hydrauliques. Ce décret et l'arrêté du 29 février 2008 fixant des prescriptions relatives à la sécurité et à la sûreté des ouvrages hydrauliques, définissent de façon précise les obligations des propriétaires et les éventuelles échéances qu'ils doivent respecter, notamment en matière d'obligation d'auscultation (pour certains ouvrages), de rédaction et de fourniture de documents, d'organisation d'examens techniques périodiques...
Les questions devaient donc s'articuler autour des thématiques suivantes :
• Y a-t-il un réel risque lié à la sécurité des ouvrages hydrauliques (risque de rupture essentiellement) ? Dans quelle mesure est-il connu, caractérisé ?
• Des moyens suffisants sont-ils mis en œuvre pour prévenir et/ou corriger ce risque pour informer les partenaires et les populations concernés?
• Les propriétaires et gestionnaires des ouvrages sont-ils en mesure d'honorer leurs obligations résultant du décret de décembre 2007, c'est à dire de suivre, vérifier, entretenir correctement leurs ouvrages ?
• Les services de contrôle (DDAF) sont-ils en mesure :
- de faire respecter ces obligations,
- de statuer sur l'état de sécurité des ouvrages
- d'en déduire et d'adopter la conduite à tenir vis-à-vis des propriétaires ou gestionnaires, notamment en termes d'exigences (arrêtés préfectoraux, mises en demeure,...) ?
En sus des réponses à ces questions, la DDAF de l’Aude avait programmé des visites de terrain, permettant de discuter avec les principaux acteurs, et de voir une digue (Alzonne) et deux barrages (Cenne Monestiés et Laprade).
Voici la situation, telle qu’elle a été présentée à votre rapporteur dans une salle très attentive et rassemblant toutes les parties prenantes à l’application du décret.
Le décret du 11 décembre 2007 classe les barrages en 4 classes (A, B, C, D) :
> classe A : (plus de 20 m de hauteur) : il y en a 5 dans l'Aude.
> classe B : 1 dans l'Aude (Lampy)
> classe C : d'après un recensement des barrages et retenues de toutes sortes effectué en 1995 et actualisé en 1999 par la DDAF, il y a 9 ouvrages de cette classe, plus un barrage écrêteur de crues en cours de projet.
> classe D : ils seraient au moins 65, sans compter les seuils en rivière de plus de 2 m, lesquels sont en cours de recensement par l'ONEMA, et quelques portions du Canal du Midi.
En tout, ce sont probablement entre 90 et 120 ouvrages qui sont concernés par le décret.
Aucun barrage de classe A ou B n'est situé en zone de risque sismique significatif (Montagne Noire pour tous sauf la Cavayère, près de Carcassonne, où le risque sismique est très faible).
La DDAF exerce depuis plusieurs décennies la mission de contrôle des barrages dits «intéressant la sécurité publique», c'est à dire de tous les barrages de la liste ci-dessous. Pour le barrage du Lampy, propriété de VNF, le contrôle n'a été transféré qu'en 2007 à la DDAF par VNF.
Nom de l'ouvrage |
Année création |
Hauteur |
Volume (000 m3) |
Classe |
Propriétaire |
Gestionnaire |
Auscultation par spécialiste |
Cavayère |
1988 |
26 |
1350 |
A |
Cté d'agglo Carcassonnais |
CAC |
O |
Cenne-Monesties |
1884 |
22 |
137 |
A |
Cne de Cenne Monesties |
Commune |
N |
Galaube |
2000 |
43 |
8000 |
A |
IIAHMN |
IIAHMN |
O |
Ganguise |
1979 |
34 |
35000 |
A |
BRL (concession région) |
BRL |
O |
Lampy |
1782 |
19 |
1673 |
B |
VNF |
VNF |
O |
Laprade |
1984 |
27 |
8800 |
A |
BRL (concession CG11) |
BRL |
O |
St Denis |
1840 |
10 |
304 |
C |
Cne de St Denis |
Commune |
En cours |
La mission de contrôle, jusqu'à l'entrée en vigueur du décret, consistait essentiellement, pour les barrages de la liste ci-dessus, à :
• effectuer une visite annuelle de l'ouvrage en présence du propriétaire et, le cas échéant, de l'exploitant, discuter des problèmes éventuels rencontrés, des opérations d'entretien,
• rédiger un compte-rendu post-visite ayant à la fois pour objet de statuer sur l'état de l'ouvrage, organe par organe, et de lister les obligations du propriétaire/ gestionnaire, avec parfois un échéancier,
• planifier et faire procéder à une inspection décennale (obligation réglementaire), presque systématiquement avec vidange complète et toujours en présence et avec l'appui technique du PATOUH (pôle d'appui technique sur les ouvrages hydrauliques) du CEMAGREF,
• réclamer et conserver les rapports d'auscultation des barrages lorsque ceux-ci étaient réalisés, c'est à dire dans le cas des barrages ayant un gestionnaire professionnel.
Depuis le début des années 2000, l'attention de la DDAF et du CEMAGREF s'est particulièrement portée sur deux barrages en maçonnerie de la seconde moitié du XIXème siècle en raison d'un risque identifié d'instabilité en période de crue exceptionnelle, d'un état général en voie de dégradation (mais non extrêmement dégradé) et de l'absence de dispositif d'auscultation pour donner des indications sur l'évolution des barrages. Il s'agit des barrages de Saint-Denis et de Cenne Monestiés, propriété des communes respectives. L'assistance du CEMAGREF a permis de prescrire et d'obtenir pour la commune de Saint-Denis l'abaissement du seuil du déversoir, la mise en place d'un dispositif d'auscultation. Des travaux d'étanchéité du parement amont sont de plus prévus en 2008. Pour la commune de Cenne Monestiés, un processus identique est en cours avec, suite à l'inspection décennale de 2006, la préparation par la DDAF d'un arrêté préfectoral de prescriptions complémentaires imposant à la commune l'abaissement du seuil de déversoir (pour garantir la stabilité - et donc la sécurité - de l'ouvrage pour une crue millénale) et la mise en place de dispositifs d'amélioration de la connaissance (pendule inversé, carottages, piézomètrie).
Seul le barrage du Lampy (1782) n'a pas encore fait l'objet d'une visite de la DDAF, mais le CETMEF qui assurait le suivi pour le compte de VNF a transmis les documents relatifs à l'ouvrage et à son suivi, y compris le programme d'entretien pour les années à venir.
La sécurité des barrages de Laprade et Galaube, gérés par BRL et l'HAHMN, organismes professionnels, est conforme, et ces ouvrages sont suivis de façon satisfaisante, tant en matière de surveillance, d'entretien, que de relevés et d'interprétation des dispositifs d'auscultation.
Le barrage de la Ganguise est le plus grand du département. Sa sécurité est optimale et son comportement suivi de près par l'exploitant BRL (dans le cadre d'une réhausse de 6m terminée en 2005 et selon les recommandations du comité technique permanent des barrages) ; le risque hydrologique est considéré comme nul (absence de bassin versant car alimentation ). Pour ce barrage, la préfecture de l'Aude élabore avec celle de la Haute Garonne un Plan Particulier d'Intervention.
Le barrage de la Cavayère (Communauté d'Agglomération du Carcassonnais) doit faire l'objet d'un élargissement conséquent de l'évacuateur de crues suite à un calcul en 2007 de la crue de dimensionnement, laquelle avait été sous-évaluée. Ces travaux interviendront en 2009 ou 2010. La crue de dimensionnement devra aussi être recalculée en 2008/9 pour le barrage de Laprade comme demandé lors de la visite décennale de 2001.
La DDAF vient d'informer les propriétaires / gestionnaires des 5 barrages de classe A de leurs obligations issues du décret de décembre 2007.
Depuis quelques années, la mission de contrôle est effectuée à la DDAF par un ingénieur de formation technique dans le domaine de l'eau appartenant au service de police de l'eau. Le temps qu'il consacre à la mission est inférieur à 5% d'Equivalent Temps Plein. La régularité des visites et l'attention ont été variables au cours des années : la priorité a été donnée aux ouvrages ayant présenté des problèmes par le passé ou pour lesquels il y avait connaissance d'un problème potentiel.
En présence d'un exploitant/propriétaire professionnel, la DDAF était moins présente sur le contrôle. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. L'appui du CEMAGREF a été, pour certains ouvrages et à certains moments, capital.
Globalement, nous estimons que l'action de contrôle sur les ouvrages de classe A et B se fait correctement. En revanche, l'intégration dans le champs de contrôle d'environ 120 ouvrages (dont environ 10 de classe C) et le respect de nouvelles procédures de contrôle des ouvrages concernés par le décret, requièrent des moyens humains nouveaux, de niveau technicien, dont le service de police de l'eau ne dispose pas actuellement.
Les synergies possibles, dans la logique de la fusion DDAF/DDE, pourraient permettre de compléter les effectifs nécessaires, sous réserve d'une formation technique appropriée.
Dans ce contexte, les priorités de la DDEA se porteront, outre sur les ouvrages de classe A et B, sur les barrages de classe C pour lesquels il y a des enjeux humains à l'aval proche, et dont la connaissance de l'état et du risque de rupture, mis à part quelques rares cas, est insuffisante à ce jour.
Comme pour les barrages, le décret du 11 décembre 2007 classe les digues en 4 types (A, B, C, D) en fonction de l'effectif de la population protégée.
Les digues de classe A font plus de 1 mètre de hauteur et protègent plus de 50 000 habitants permanents ou non. Il n'en existe pas dans l'Aude.
Les digues de classe B protègent une population comprise entre 1 000 et 50 000 habitants. L'intégralité (14,5km) est située dans les basses plaines en rive gauche de l'Aude, entre Sallèles d'Aude et Coursan.
Les digues de classe C qui protègent entre 10 et 1 000 habitants représentent environ 15 km qui sont répartis en plus de 50 tronçons sur tout le département.
Les ouvrages de classe D, c'est à dire toutes les autres digues, représentent plus de 40 km pour plus de 60 tronçons.
Ces chiffres, issus d'un recensement de 2002, comprennent les digues de cours d'eau (y compris des portions du Canal du Midi dans les basses plaines, qui font office de digue), ainsi que les ouvrages d'infrastructures (routes).
Á la demande de l'Etat, le bureau d'étude SOGREAH a réalisé en 2002 un recensement des digues du département et de leur maître d'ouvrage. D'après cet inventaire, le linéaire total de digues est de l'ordre de 73 kilomètres. Il présente des désordres localisés sur environ 35% des ouvrages. En quelques chiffres, l'état des ouvrages peut être caractérisé de la façon suivante :
- pour 63% des ouvrages, une occurrence de débit de surverse a pu être déterminée. 10% de cet échantillon a une occurrence de débit de surverse de 100 ans, 34% entre 10 et 100 ans. Pour le reste, on ne sait pas.
- 94 zones à enjeux ont été recensées, dont 85 abritant moins de 100 habitants et une seule plus de 1000 habitants (basses plaines de l'Aude).
L'état physique des digues existantes n'a été bien caractérisé que pour les basses plaines de l'Aude (le secteur le plus sensible, ayant connu des morts lors des crues de 1999). En effet, le diagnostic et les réparations prévues des digues en rive gauche de l'Aude entre Sallèles et Coursan constitue s'opère sous maîtrise d'ouvrage d'un syndicat mixte dans le cadre du PAPI de l'Aude, dont 50% des actions concernent les basses plaines de l'Aude.
Seuls deux projets de construction de nouvelles digues sont à l'étude. Il s'agit :
- d'une part des digues de ceinture rapprochées de Cuxac d'Aude et de ses écarts (dans le cadre du programme des basses plaines de l'Aude et en complément de la mise en transparence hydraulique, achevée en 2007, de deux remblais en lit majeur de l'Aude dont la rupture été en cause dans les dégâts de 1999),
- d'autre part de la reconstruction d'une digue de protection de la commune de Sigean (rivière la Berre).
Pour 66% des ouvrages existants, le propriétaire / maître d'ouvrage n'a pu être identifié, mais un gestionnaire de l'ouvrage a été identifié dans 85% des cas. Il ne s'agit pas d'un gestionnaire auquel le propriétaire (souvent inconnu) aurait juridiquement confié la gestion (notamment préventive), mais d'organismes (le plus souvent des syndicats d'aménagement hydraulique de bassins versants) qui sont des gestionnaires de fait occasionnels, notamment par des interventions de réparations de digues après de grosses crues. Ceci ne correspond pas à la notion de gestionnaire véhiculée par le décret de décembre 2007. L'absence fréquente de propriétaires mais aussi, celle de gestionnaires déclarés et assumés, rend la mission de contrôle délicate, en particulier d'un point de vue juridique et administratif.
La DDAF a entrepris dans les basses plaines de l'Aude, priorité affichée du travail sur les digues, une vérification et un complément du recensement SOGREAH de 2002 en s'adressant aux communes et aux syndicats hydrauliques. Ce complément, non encore totalement dépouillé, outre qu'il fait apparaître un certain nombre d'omissions, montre qu'il est nécessaire de vérifier sur le terrain la totalité des tronçons pour s'assurer de leur pertinence et les classer correctement au regard des critères de classification du décret de décembre 2007. Il convient de corriger les erreurs de tracé et de localisation, voire de supprimer des portions qui ne peuvent pas être réellement considérées comme des digues.
Compte tenu des difficultés pour identifier les propriétaires des ouvrages (propriétaire du fonds, maître d'ouvrage des travaux initiaux, maître d'ouvrage des travaux d'entretien), il paraît d'ores et déjà difficile de faire appliquer l'article 16 du décret du 11 décembre 2007 : faire effectuer, avant le 31 décembre 2009, au propriétaire ou l'exploitant des digues des classes B et C un diagnostic de sûreté.
De plus, se pose la question du financement à mobiliser pour assurer la sécurité des digues (35% des ouvrages présentent des désordres localisés) et la réalisation des diagnostics, lorsque le propriétaire n'est pas clairement identifié.
La DDAF ne s'est investie dans le contrôle des digues que depuis 2004, au moment où elle héritait de la mission de la DDE. Un technicien a été embauché pour cette mission, mais aussi pour la gestion quantitative et la police de l'eau sur le fleuve Aude (prélèvements, microcentrales électriques). Les efforts consacrés à cette mission ont en fait diminué, en raison notamment du caractère fastidieux de la recherche des propriétaires - tâche actuellement confiée au service d'ingénierie de la DDAF et parce que le décret sur la sécurité des ouvrages hydrauliques est sorti avec un an de retard, en décembre 2007, alors que sa parution était nécessaire pour substituer à la notion de « intéressant la sécurité publique » la nouvelle approche réglementaire. Toutefois, les secteurs les plus exposés (les basses plaines de l'Aude) font l'objet d'un programme complet d'aménagement intégrant le diagnostic et l'entretien des digues de classe B qui sera utilisé dans le cadre de la mission de contrôle.
Se pose enfin la question de la pérennisation, par le classement, de digues existantes qui ne protègent pas d'enjeux humains : il pourrait être plus judicieux de les araser pour favoriser la transparence hydraulique, notamment en lit majeur de cours d'eau.
La situation dans l’Aude est globalement satisfaisante : à une exception près (Cenne Monestiés qui est sur le point de se résoudre), la sécurité des barrages de classe A et B ne pose pas de problème majeur, tant en termes de sécurité que d'attitude des gestionnaires.
Pour les plus petits ouvrages (classes C puis D), le degré de connaissance technique de la DDAF est moindre. L'inventaire de 1995 doit être réactualisé, les archives de la DDAF (souvent impliquée dans la construction des retenues) seront examinées pour retrouver les documents afférents à la construction.
Mis à part le cas des digues de classe B des basses plaines de l'Aude pour lesquelles des travaux sont prévus et un gestionnaire envisagé, le chemin sera long pour parvenir à la situation souhaitée par le décret, à savoir des propriétaires ou gestionnaires qui connaissent leurs ouvrages, les auscultent, en informent l'administration et effectuent un entretien qui est à même de garantir la sécurité vis-à-vis des personnes et biens ; un travail de pédagogie sera nécessaire, qui est souvent peu compatible avec les indicateurs de la LOLF.
ü La mission de contrôle
Deux conditions doivent être réunies pour exercer correctement les missions de contrôles des digues et barrages :
• L'ingénieur responsable de la mission doit avoir une compétence technique régulièrement actualisée par une formation appropriée dans le domaine de l'eau (c'est le cas actuellement). Il doit disposer d'assez de temps pour dialoguer avec les responsables de ces ouvrages hydrauliques, et pouvoir notamment inciter à la création ou à la structuration de gestionnaires dûment mandatés dans le cas des digues.
• En raison du nombre élevé d'ouvrages dans le département, une méthodologie spécifique et précise doit être mise au point, sous forme d'un guide de procédures établi selon les principes de l'assurance qualité : il devra prévoir notamment les grilles d'observations, les indicateurs quantifiés, les documents d'enregistrement, les calendriers, les programmes de formation , les procédures d'informations et d'alertes.
• L'affectation et la spécialisation de techniciens compétents pour le suivi des plus petits ouvrages devra être organisée, notamment à partir des compétences existant dans les subdivisions de la DDEA, dans un premier temps pour assurer l'inventaire, le recueil et la validation de données technico-administratives (sur les barrages mais surtout sur les digues), puis pour prendre en charge le suivi et le contrôle technique stricto sensu.
• Le recours à des spécialistes (CEMAGREF, CETE..) et la participation à des groupes de travail consacrés à la sécurité des ouvrages hydrauliques doit pouvoir être pérennisé ; cela justifierait le développement, au niveau national, d'outils spécifiques (suivi, diagnostic, formation, ...).
• Enfin, compte tenu du nombre très important dans le département de l'Aude de très petites communes, ne disposant ni de compétences techniques ni de ressources financières, un dispositif d'assistance technique pourra être apporté par les équipes d'ingénierie publique de la future DDEA : cette démarche permettrait de mettre en cohérence les orientations nationales de la RGPP de recentrage de l'ingénierie publique vers ses missions régaliennes et de solidarité, avec les préoccupations d'amélioration de la sécurité des ouvrages.
Cenne Monestiés
Source : DDAF 11
Votre rapporteur après cette longue journée audoise s’est ensuite rendu dans le Gers, département retenu pour la présence de ses nombreux barrages de retenues. Les questions s'articulent autours des thèmes suivants :
• La sûreté des barrages de retenues et notamment l'évaluation du risque de rupture, dans quelle mesure est-il connu, caractérisé, apprécié ?
• Les moyens en personnel à disposition sont- ils en cohérence avec le risque, le nombre d'ouvrages à classer, l'information des propriétaires et gestionnaires et les populations impactées ?
• Le service de police de l'eau est-il en mesure de conduire correctement sa mission, notamment en terme d'exigence réglementaire ?
• Les propriétaires et gestionnaires des ouvrages sont-ils en mesure de répondre aux nouvelles obligations fixées par les nouveaux textes réglementaires et dans les délais impartis ?
Il existe d'après les données à disposition de la Mise, 2 879 barrages de retenues dans le Gers, toutes utilisations confondues (irrigation, loisirs, mixte). La création de ces barrages de retenues d'eau s'est principalement réalisée pour faire face au contexte hydraulique (le Gers est en zone de répartition des eaux) et à la demande liée à l'irrigation agricole suite au développement des cultures céréalières, notamment du maïs. Tous ces barrages sont des barrages réalisés en terre.
Là aussi la Direction Départementale de l'Agriculture et de la Forêt du Gers et son service départemental de police de l'eau et des milieux aquatiques sont en charge du suivi des ouvrages hydrauliques et de ceux relevant de la sécurité publique. Cette activité a été récemment réaffirmée lors de la création du service de police de l'eau et des milieux aquatiques en janvier 2007 et priorité a été donnée pour le suivi des barrages à enjeux de sécurité publique et des ouvrages sur lesquels il y a connaissance d'un problème particulier. Les missions de contrôle des barrages de retenues sont effectuées par deux techniciens du SPE de la DDAF dont un est spécialisé « Sécurité Publique ». La mission sécurité publique représente 0.2 Equivalent Temps Plein de technicien spécialisé. Les visites et l'attention de surveillance ont été variables ces vingt dernières années, mais depuis 2003 le technicien du GREF, affecté à cette mission et formé en conséquence en 2004 en suivant le stage spécifique, assure les visites annuelles et décennales.
Un partenariat étroit a été mis en place avec le CEMAGREF de Bordeaux.
Á noter que la plupart des barrages ont vingt ans et que jusqu'en 2003 les visites décennales n'avaient pas été effectuées à l'exception de la visite de 2001 pour le barrage de la Gimone. Les barrages à enjeux, soient actuellement 36 barrages, sont référencés dans le référentiel national « BarDigues » et priorités ont été données à l'information et au rappel des obligations des propriétaires, à la mise en conformité des ouvrages, à la réalisation des visites. Il reste cependant des mises à niveau de la connaissance acquise à transférer dans le logiciel national.
Parallèlement, et au titre de l'instruction des « dossiers loi sur l'eau », les barrages de retenues d'eau (irrigation pour l'essentiel) font l'objet d'une visite de contrôle de conformité et tous les barrages connus du SPE sont géo-référencés. Ces informations sont contenues dans une base de données locale et régulièrement amendée. Compte tenu du nombre très important de ces retenues et de leur ancienneté, les dossiers à disposition du SPE sont plus ou moins complets.
Les volets « loi sur l'eau » et sécurité publique des barrages de retenues à enjeux sont donc intégrés au sein du SPE.
En application de la circulaire interministérielle 70/15 du 14 août 1970 modifiée en 1983 et sur la base des conclusions de la mission d'expertise réalisée en 1994 par le CEMAGREF, pour le compte du MATE, 17 barrages sont aujourd'hui classés ISP «intéressant la sécurité publique», dans le Gers par arrêté préfectoral du 06 août 1997.
Dans cette liste, seul le barrage de la Gimone relève de la catégorie « grand barrage » et de l'obligation de consulter le Comité Technique Permanent des Barrages et des Ouvrages hydrauliques, conformément au décret du 13 juin 1966.
En 2001, ce barrage a fait l'objet d'une visite décennale et le rapport de visite a été rédigé par le CEMAGREF de Bordeaux en 2002. Suite à cette expertise, les travaux de sécurisation du déversoir se sont achevés récemment, en janvier 2008. Dans le cadre de l'application du Plan Particulier d'Intervention, adopté le 8 juillet 2003, un exercice de sécurité publique a été réalisé, avec évacuation du village de Simorre, situé en aval.
Les nouvelles contraintes réglementaires imposées par le récent décret du 11/12/2007 relatif à la sécurité et à la sûreté des ouvrages hydrauliques, ont été appliquées par anticipation pour ce barrage, seul du Gers à figurer en classe A du nouveau classement.
Depuis 2003, l'ensemble des barrages classés ISP fait l'objet d'un suivi régulier et les visites annuelles imposées réglementairement sont systématiquement réalisées par le service de police de l'eau.
Les visites ont notamment abouti à la réalisation de travaux de mise en conformité ou de réparation sur 4 ouvrages, à l'exemple de la retenue de Miélan. Neuf barrages ont fait également l'objet d'une inspection décennale, après vidange complète, ou par moyens subaquatiques vidéo et plongeurs.
Concernant la régularisation administrative du barrage de l'Uby, situé commune de Cazaubon, et suite à la visite décennale, un calcul d'onde de rupture a été exigé et fourni par le gestionnaire. Cette visite a également permis de reprendre le calcul de la crue de projet (prise en compte de la crue décamillénale), pour redimensionner les ouvrages évacuateurs de crues. Un chantier important de travaux de mise en conformité des déversoirs principal et secondaire devrait être engagé rapidement par la commune de Cazaubon. Le dossier est suivi en priorité par le SPE.
En synthèse, si les suivis sont réalisés par le SPE, il reste un important travail de mise en conformité pour 12 des 17 barrages actuellement classés ISP et donc à reclasser en priorité suite au décret 2007. La difficulté réside notamment dans la conception actuelle de l'évacuateur de crue qui est sous-dimensionné a priori pour la crue de référence désormais à prendre en compte suite à l'application des nouvelles normes. D'autre part, le SPE ne dispose pas encore aujourd'hui, de tous les plans de recollement effectués après travaux de création de ces barrages, ni des calculs d'onde de rupture.
Sans attendre la parution du décret 2007, un suivi a été déjà été réalisé par le SPE sur certains ouvrages jugés à enjeux, mais non classés ISP.
Ainsi, certains barrages, bien que non concernés par les anciennes réglementations et désormais à classer en application du décret 2007, font déjà l'objet d'une surveillance particulière et d'un suivi régulier avec remise d'un rapport annuel ou biannuel adressé par le gestionnaire à la DDAF.
Des travaux de sécurisation de certains ouvrages ont aussi été réalisés en fonction de constat de visite du service de police de l'eau ou de signalements de problèmes par les gestionnaires. Récemment, une retenue de 180 000 m3 située à Lamothe-Goas, propriété du Conseil Général, a connu un affaissement de la digue nécessitant une vidange partielle, avant que d'importants travaux de mise en sécurité ne soient entrepris à la demande des services de l'Etat.
Le cas du barrage de retenue de Lectoure est intéressant car il montre qu'un petit barrage, qui par application du décret 2007 relève de la catégorie D, nécessite en réalité un surclassement en raison de l'occupation du sol en aval de cet ouvrage (le calcul d'onde de rupture à disposition démontre le danger potentiel). Car si la loi du 22 juillet 1987 a instauré le droit des citoyens à une information sur les risques majeurs auxquels ils sont soumis sur tout ou partie du territoire, ainsi que sur les mesures de sauvegarde qui les concernent dès lors qu'un plan de prévention des risques (PPR) a été instauré, le décret 2007 ne permet pas en l'état la pleine prise en compte du danger potentiel et de la priorité à classer ce barrage sans délai.
Début juin de cette année, le SPE recrute pour deux mois un vacataire sur les crédits affectés par le MEEDDAT. L'objectif est d'analyser la grille de classement du décret afin de confirmer le programme de travail à mettre en place pour tenir les échéances. Un modèle numérique de terrain a été récemment acquis pour aider à la modélisation de l'expertise compte tenu du nombre important d'ouvrages a priori concernés.
Quoiqu'il en soit, les effectifs, disponibles actuellement, ne sont pas en adéquation avec la commande. L'application du décret va nécessiter de renforcer sensiblement les moyens en personnel du service de police de l'eau, notamment par l'augmentation de la capacité d'expertise et de contrôle qui requièrent des moyens humains de niveau technicien. Ce renforcement n'est pas évident dans un contexte de baisse régulière des effectifs.
De façon générale, et particulièrement pour le cas des petits barrages de retenues (cas très fréquent dans le Gers), le problème du coût financier engendré par les mesures imposées par le nouveau décret ne doit pas être négligé. Il est à craindre, que peu de propriétaires privés (agriculteurs majoritairement dans le Gers) ou de communes seront en mesure de supporter la charge financière de la réalisation des dossiers, des visites de sécurité et des travaux de mise en conformité. Dans le département du Gers, seuls 23 ouvrages sont en affermage ou en concession CACG. Les autres retenues sont la propriété d'ASA, de particuliers et très rarement de communes.
On peut également noter que lors de l'instruction des dossiers de création de retenue au titre de la loi sur l'eau, seule la partie investissement est prise en compte ; il faudra donc s'assurer que les coûts induits par le suivi des barrages soient affichés dès l'instruction du dossier et pris en compte dans le financement global de l'ouvrage.
Enfin, il convient d'avoir une réflexion départementale sur les règles d'urbanisme dès lors que les mesures de précaution peuvent conduire la collectivité à refuser les permis de construire à l'aval de l'ouvrage au motif que l'implantation de zones urbanisées accroît les risques pour les personnes et les biens.
ü Le barrage de Mielan
Votre rapporteur s’est ensuite rendu sur le terrain, et plus précisément au lac de MIELAN. Le réservoir de MIELAN est le premier barrage en terre conçu et réalisé par la CACG sur le département du Gers. Il est implanté sur le territoire de la commune de MIELAN, en barrage de la rivière Osse. Ce cours d'eau appartient au système Neste de réalimentation. Le bassin versant d'alimentation du plan d'eau est de 22,8 ce qui permet un remplissage acceptable x années sur 10. Il a été mis en service en 1969 pour un volume de 3,2 hm3 et une hauteur de la digue de 15 mètres.
C'est un ouvrage classé au titre de la sécurité publique par arrêté préfectoral du 06 août 1997. En application des critères du décret du 11/12/2007, il appartient à la classe B.
Sur ce site, 3 activités (irrigation, alimentation en eau potable et loisirs) cohabitent difficilement car les demandes respectives propres à chacun des usages se concentrent sur la période estivale.
La crue de projet retenue en 1967 était de fréquence millénale mais la conception initiale de l'aménagement ne permettait d'évacuer que 13 m3/s sur les 25 m3/s initialement prévus. L'évacuateur de crue, évacuateur latéral bétonné en partie droite, avait été modifié une première fois pour retrouver la capacité de 25 m3/s sans risque de submersion ni dégradations aux entonnements. Ce débit correspond à un débit de pointe exceptionnel de 80 m3/s laminé par l'ouvrage, cas d'une crue millénale.
En 1999 un audit conjointement diligenté par les Ministères de l'Agriculture et de l'Environnement sur l'état des ouvrages en concession CACG a conclu à la nécessité de lancer un programme de « mise aux normes » des ouvrages les plus anciens.
L'étude relative à la sécurisation du barrage de Miélan a été réalisée en 2004. Elle prend en compte l'actualisation de l'estimation des apports du bassin versant, l'actualisation du calcul de la crue de projet (crue décamillénale) et de l'adaptation de la capacité d'évacuation des ouvrages existants. Les nouvelles contraintes réglementaires intervenues en la matière depuis la réalisation de l'aménagement ont conduit au classement au titre de la sécurité publique en 1997. Les travaux de mise en conformité visaient donc également à rétablir le réseau de drainage de la digue et à réhabiliter le dispositif d'auscultations, en particulier le réseau piézométrique. En effet, les mesures piézométriques avaient été interrompues en 1971, puis reprises en 1997 suite au classement sécurité publique, mais le suivi des fondations du barrage n'était plus assuré que par un seul point de mesure. Les travaux entrepris fin 2007 se sont achevés en janvier 2008.
Le montant des travaux sur le lac de Miélan est estimé à 490 000 euros. Ils bénéficient d'une subvention par des crédits de l’État à hauteur de 80%. Mais il reste encore à la CACG à réaliser le calcul d'onde rupture et à déposer les dossiers d'autorisation pour permette au préfet du Gers la prise de l'arrêté modificatif du règlement d'eau et de l'arrêté complémentaire au titre du classement de l'ouvrage.
Dans le département du Gers sur les 153 ouvrages qui stockent plus de 100 000 m3, seuls 21 sont en affermage ou concession CACG. Les autres retenues sont la propriété d'ASA, de particuliers et quelquefois de communes. Ces ouvrages n'ont pas bénéficiés de l'audit de 1999 des ministères de l'Agriculture et de l'Environnement mais leur mise en sécurité s'impose en application du décret de 2007.
Or, aucun des barrages anciens n'est conçu avec des évacuateurs de crue dimensionnés pour la crue adaptée aux normes actuelles. Les services ne disposent ni des plans de recollement effectués après travaux, ni des calculs d'onde de rupture, même sur les ouvrages CACG.
Moins de 10 barrages disposent aujourd'hui d'un réseau piézométrique en état de fonctionner ou de dispositif de mesure de tassement ou de topométrie.
Outre le classement de l'ensemble des ouvrages, au titre du décret du 11/12/2007, nécessitant une expertise préalable des 2 800 plans d'eau, il y semble fort probable que les travaux de mise en conformité des ouvrages les plus importants (classes A, B et C) vont mobiliser d'importants moyens humains et financiers. Les propriétaires privés ou ASA vont connaître des difficultés pour conduire ces mises en conformité s'ils ne bénéficient pas de subventions de l'État ou des collectivités.
Par ailleurs, même en cas de défaillance des propriétaires, l'État ne pourra certainement pas s'engager dans des mises en conformité forcées par la procédure d'exécution d'office.
La retenue de Miélan constitue l'une des ressources de piémont du système NESTE. L'eau sert donc à différents usages : AEP, irrigation, loisirs et salubrité du cours d'eau en période d'étiage. 27% de la ressource soit 1 000 000 m3 sont réservés jusqu'au 31 août pour l'AEP et à l'activité touristique dans le cadre des conditions imposées lors de la réalisation de l'ouvrage. Une convention en date du 24 décembre 1994 régit les conditions d'exploitation du complexe touristique en rive gauche de la retenue.
En août, alors que la campagne d'irrigation était à son maximum, le niveau du lac avait déjà fortement baissé. Pendant ce mois, le camping et la base de loisirs sont également en période de forte fréquentation. Les touristes et le gestionnaire de la base de loisir se retrouvent autour d'une retenue au mieux à moitié pleine, avec un accès à la baignade par des plages envasées et une diminution de la surface utile du plan d'eau avec des conséquences sur les activités de navigation et la baignade. Pendant l'été, en raison de l'affluence touristique dans l'ensemble du département, la demande de production en eau potable est maximale pour satisfaire les consommations domestiques. Sur cet aménagement, à partir d'une hauteur d'eau inférieure à 4 mètres, le prélèvement pour l'AEP ne fonctionne plus correctement et il doit se faire directement sur les couches profondes du lac, d'où une eau de mauvaise qualité qui nécessite un traitement coûteux et l'utilisation d'importantes quantités de charbon actif, entraînant des problèmes de distribution d'eau non conforme et de pollution ponctuelle du cours d'eau, au charbon actif, dans l'attente de la mise en conformité de la gestion de ce déchet.
En raison des contraintes liées à la production d'AEP sur ce site une dérogation pour vidange totale afin d'effectuer la visite décennale fut sollicitée et obtenue auprès du MEDD. L'inspection de la conduite de vidange a été réalisée par des plongeurs équipés de moyens vidéo.
Après ce barrage de classe B, votre rapporteur s’est rendu à Lectoure sur un barrage de classe D, mais qui pose problème : celui du lac des 3 Vallées.
ü Le lac des 3 vallées
Le lac des 3 vallées stocke un volume de 80 000 m3 sur une surface de 4 ha derrière une digue en terre compactée de 80 m de long sur 7 m de haut. Il appartient à la SARL Valoisirs, gestionnaire d'une base de loisirs dont ce lac constitue le point central. Ce barrage autorisé par arrêté préfectoral n'est pas classé au titre de la sécurité publique au titre de la réglementation en vigueur avant le décret du 11/12/2007.
Il existe sur le site en amont un deuxième barrage en terre compactée, la retenue du Capirot d'une capacité de 51 400 m3, qui permet de maintenir le niveau du lac des 3 Vallées constant pendant l'été. Cette retenue a été autorisée par arrêté préfectoral en 1988.
En 2006 à l'occasion d'une visite de contrôle, il a été constaté que des travaux avaient été réalisés sur la digue sans autorisation au titre des articles L. 214-1 et suivants du code de l'environnement. Par ailleurs, des maisons se sont implantées à l'aval de l'ouvrage depuis sa création.
Dans le cadre d'une régularisation administrative des travaux entrepris par le gestionnaire, un calcul d'onde de rupture a été demandé par le service de police de l'eau. Ce document remis, en novembre 2007au SPE32, met en évidence un risque pour les personnes et les biens justifiant un classement de cet ouvrage au titre de la sécurité publique.
Du fait des caractéristiques de l'ouvrage et de l'application stricte du décret de 2007, ce barrage entre de fait dans la catégorie D.
L'occupation du sol à l'aval pourrait justifier un sur-classement en catégorie C voire B. Doit-on pour autant le surclasser de 2 classes alors que le décret, contrairement au classement des digues, ne prend pas en compte les victimes potentielles du fait de l'ouvrage ?
Après avoir délivré 3 CU positifs, la commune de Lectoure envisage maintenant de classer non constructible dans le cadre de la révision du PLU l'ensemble des terrains à l'aval de l'ouvrage.
Ouvrage non classé ISP au titre de la circulaire de 1970, il n'a fait l'objet d'aucune surveillance particulière de la part des services de l'État. L'exploitant pour sa part déclare faire une inspection annuelle de la digue pendant la période de basses eaux, En outre, du fait de l'activité de la base de loisirs, le propriétaire effectue régulièrement un nettoyage de la ligne anti-batillage, du déversoir ainsi qu'une tonte du parement aval de la digue. Il y a donc lieu de penser que des mesures d'entretien existent pour cet ouvrage.
Le tableau ci-après donne pour chaque profil en travers levé et pour chaque hypothèse de débit, les valeurs de :
- débit (l'étalement de l'onde de rupture conduit à un laminage de la crue),
- hauteur d'eau maximale atteinte par rapport au fond de vallée,
- cote NGF du niveau de l'eau,
- vitesse moyenne de l'écoulement,
- temps d'arrivée de l'onde par rapport au début de la rupture.
L'intervalle de confiance des résultats est défini à 50% pour le débit et la hauteur d'eau.
On compare les cotes maxima de l'eau avec les cotes de submersion des éléments sensibles de la vallée. Á l'aval du barrage, il existe 5 maisons d'habitation. Les cotes de seuils permettent d'évaluer la hauteur d'eau dans la maison.
On remarque la hauteur d'eau très importante dans la maison M5, habitation principale de la ferme de Larrieu comportant également des gîtes et un petit terrain de caravaning. Ces habitations anciennes et récentes sont directement vulnérables en cas de rupture de la digue du lac des 3 vallées. Elles seraient submergées une minute après la rupture du barrage par une lame d'eau de 2,35 m. Située au niveau de l'élargissement sur la vallée du Gers, les limites du profil sont éloignées et la hauteur est certainement surestimée. La digue du lac des 3 Vallées est située à environ 1 km de la confluence du ruisseau de Larrieu avec le Gers. La vallée, assez étroite dans les 300 premiers mètres (largeur autour de 100 mètres) s'ouvre ensuite sur la large plaine que constitue la rive droite du Gers.
Comment résoudre ce cas ?
Faut-il démolir les maisons et gîtes en aval du barrage ? Faut-il obliger le propriétaire du barrage à supporter des frais énormes pour mettre ces habitations en sécurité, alors qu’elles sont postérieures à la création de la retenue ?
Votre rapporteur a poursuivi son exploration dans les Côtes d'Armor où après une présentation de la DDAF et l’organisation du service de police de l'eau, lui ont été présentés quelques cas illustratifs des principales problématiques locales.
La présentation par le Directeur de l'usine DAMREC à GLOMEL de la problématique digue de retenue de matériaux stériles (andalousite) fera l’objet d’un paragraphe plus lointain.
Votre rapporteur s’est déplacé sur le barrage du Gouët où il a rencontré les gestionnaires et a visité l'ouvrage, avant de se rendre à St Gildas, pour rencontrer la municipalité et les gestionnaires de l’étang du Quélennec.
üLe barrage du Gouet
Source : DDAF 22 |
Le maître d’ouvrage est le Conseil Général des Côtes d’Armor, et le service de contrôle est la DDAF 22. Construit en 1978 sur le Gouet, ce barrage voûte à une hauteur de 37 mètres, pour une hauteur d’eau de 35 mètres environ. La longueur de la crête est de 200 mètres, pour une largeur en tête d’ouvrage de 2 mètres. La capacité de la retenue est de 7 900 000 m3, soit 81 hectares de superficie en eau, alimentée par un bassin versant de 195 km2. Compte tenu de ces caractéristiques, le barrage est en classe A. Les usages de la retenue sont l’alimentation en eau potable d’une partie du département et une production hydroélectrique.
Source : DDAF 22
Source : DDAF 22
Les gestionnaires de l’ouvrage procèdent régulièrement aux essais de vannes et de déversoirs de crue.
Source : DDAF 22
Source : DDAF 22
ü Le barrage de Quellennec
Le propriétaire et maître d’ouvrage est un particulier et le contrôle est également assuré par la DDAF 22. Ce barrage en terre et roche, construit en 1852, barre le ruisseau du Quélennec. Cet étang a une superficie en eau de 4,5 hectares et la hauteur de l’ouvrage terrain/crête est de 5 mètres, pour une hauteur d’eau de 2,7 mètres environ selon la cote plan d’eau. La longueur de la crête est de 100 mètres, la largeur en tête d’ouvrage étant de 8 mètres, pour une capacité de la retenue de 600 000 m3. Cette retenue, classée en D, a pour usage la pêche.
Dès 1995, la chaussée passant en crête de barrage présente des effondrements, la municipalité prend le 5 décembre 1995 une interdiction de circulation pour les véhicules de plus de 3,5 tonnes.
Á la suite d’une visite de l'ouvrage par le service de contrôle en 2003, un compte rendu de visite et un courrier ont été adressés au Maître d'Ouvrage avec les prescriptions nécessaires à la mise en sécurité du barrage, notamment un élagage pour permettre au déversoir de remplir son oeuvre.
En 2006, le service de contrôle a constaté des désordres sur la partie haute du barrage. Des affaissements localisés et une fuite en aval ont été détectés. Un arrêté municipal a été pris à nouveau, interdisant la circulation sur le barrage. Un état phytosanitaire des arbres plantés dans le corps de barrage (responsable DSF DDAF 22) a été suivi d’un envoi en recommandé avec AR, au maître d'ouvrage, demandant la vidange du plan d'eau au titre de l'art 34 (mesure d'urgence). Ce qui fut d’ailleurs réalisé en 2007, mais le propriétaire a refusé de faire les travaux. Un diagnostic géotechnique de la voie communale en couronnement (LRPC) a été réalisé, de même que les travaux de confortement du barrage au droit de l'aqueduc (DDE et CETE).
Source : DDAF 22
Une nouvelle visite du service de contrôle en 2007 provoqua l’envoi d'un courrier au maire de Saint Gildas pour un complément d'investigation et en avril 2007 fut effectuée une auscultation par méthode radar (CETE), une inspection caméra de l'aqueduc conclut à sa viabilité, bien que l’étanchéité ne fût pas parfaite.
Source : DDAF 22
Source : DDAF 22
L’abrogation de 1'arrêté municipal pris pour interdire la circulation sur le barrage fut alors votée. Une intervention d'un bureau d'étude (ISL) pour un diagnostic de l'ouvrage et avis sur une remise en eau conclut favorablement, sous réserve de la réalisation de travaux. Le plan d'eau est remis en eau en décembre mais des désordres subsistent sur cet ouvrage...vieillissant et dont la route en crête est toujours considérée comme instable.
Le devis des travaux réclamés est un obstacle majeur. L’étude réalisée en 2007 a déjà grevé le budget de cette petite commune (moins de 300 habitants), les travaux à réaliser se montent au moins à 16 000 €.
Le risque d’effondrement est faible, les conclusions d’ISL sont rassurantes sur le fait que cela ne se produira pas brutalement. Mais il est impossible de garantir la pérennité de l’ouvrage.
Le maître d’ouvrage refuse de participer financièrement à toute nouvelle opération de restauration, laissant la jouissance de l’étang à la société de pêche locale, une des seules activités de loisir offertes aux habitants de cette commune.
Source : DDAF 22
Mais, si les travaux ne sont pas effectués, les joints ne vont pas tenir plus de cinq ans. Les poids lourds en sont certes grandement responsables, mais la desserte locale est nécessaire, comme est nécessaire le passage du car de ramassage scolaire, le matin et le soir. Mais qui supporterait le risque d’un accident de car scolaire si un effondrement brutal se produisait ? L’interdiction de circulation des poids lourds n’est pas respectée, mais comment y remédier ? La municipalité ne dispose pas d’agent pour faire respecter cet arrêté municipal.
Que faut-il faire alors, puisqu’il n’est pas possible d’entreprendre les travaux de fond nécessaires. Abandonner le plan d’eau et les activités de pêche, en permettant le libre passage du ruisseau, mais ce serait aussi appauvrir le patrimoine rural.
Votre rapporteur a poursuivi ses missions dans d’autres départements où il a rencontré les autorités de contrôle et les exploitants ou leurs représentants.
Le département comprend 4 barrages en classe A, 6 en classe C. Le plus grand de ces barrages a 38 m de haut, mais les vallées concernées sont très peuplées. Un certain nombre de barrages, construits avant 1918, et gérés par le Conseil général font l’objet de travaux importants à cause d’erreurs de calcul à la conception. Plus de 5 millions d’euros ont été consacrés à reconstruire une recharge « aval » sur ces barrages en remblai de terre plus ou moins compactée.
Un barrage pose problème dans ce département, celui de Lembach. Construit en 1960, haut de 3 m, long de 100 m, il retient 12 000 m3. Une visite « PATOUH » en 2005 fait ressortir l’insuffisance du dimensionnement pour l’évacuateur de crues, ce que confirme l’étude menée par la SOGREAH en 2006. Le camping situé en aval, et géré par le syndicat d’initiative de la commune, serait inondé en cas de crue décennale. Après présentation de cette étude en mairie le 12 janvier 2007, un arrêté complémentaire a été pris le 27 avril 2007 pour une étude de mise en sécurité. Le décret du 11 décembre 2007 a provoqué des interrogations, mais le nouvel arrêté du 9 avril 2008 ordonne cependant la poursuite des études.
Si les premières prescriptions de l’arrêté sont appliquées, qu’en sera-t-il pour les travaux, dont la municipalité ne semble pas avoir les moyens financiers pour les entreprendre ? Ce plan d’eau n’a qu’une utilisation ludique pour les locataires du camping et la pêche, mais une crue centennale provoquerait un débit de 11 m3/s lors de la traversée du camping. La seule surveillance de cet ouvrage est visuelle, celle du gardien du camping.
Le terme « digue » est ambiguë, même dans sa définition ; suivant le dictionnaire, une digue est un remblai longitudinal, naturel ou artificiel, le plus souvent composé de terre. La fonction principale de cet ouvrage est d’empêcher la submersion des basses terres se trouvant le long de la digue par les eaux d'un lac, d'une rivière ou de la mer, de submerger.
Les digues les plus célèbres se trouvent aux Pays-Bas, dont la célèbre digue du Nord de l’Afsluitdijk barrant l’Ijsselmeer sur 30 km.
On peut distinguer :
• les digues de protection contre les inondations, situées dans le lit majeur d'un cours d'eau (ou le long du littoral maritime) parallèlement à la rive et destinées à contenir les eaux de celui-ci à l'extérieur des digues. Elles portent aussi le nom de « levées »,
• les digues de canaux (d'irrigation, hydroélectriques, ...) ; les canaux sont généralement alimentés artificiellement, les digues de canaux servent à contenir l'eau à l'intérieur du canal,
• les digues de type maritime (brise-lames ou jetées) qui n'ont pas vocation à être étanches, mais qui ont une simple fonction de protection contre les actions mécaniques de l'eau (vagues).
Les remblais composant des barrages sont parfois appelés digues (exemple : digue d'étang).
Votre Rapporteur s’est tourné une fois de plus vers le CEMAGREF où les équipes d’Aix en Provence sont pilotes en la matière.
Des entretiens ont été organisés par votre Rapporteur avec M. Paul ROYET puis MM. Patrice MERIAUX et Rémy TOURMENT ; votre Rapporteur se limitera aux digues de protection, à l’exclusion des digues du littoral maritime.
Les crues dramatiques de la dernière décennie ont cruellement mis en évidence les limites des digues de protection et les dangers que ces ouvrages peuvent engendrer lorsqu’ils sont déficients ou submergés. Les dégâts provoqués par de telles inondations sont considérables et sont encore plus mal acceptés dès lors que la défaillance d’un ouvrage de protection est en cause.
La question de la sécurité des digues - et de la façon de l'évaluer puis de l'améliorer - et des zones qu'elles protègent s'avère donc cruciale.
Dans ce contexte, le Ministère chargé de l’Environnement a engagé ou soutenu, depuis 10 ans, de nombreuses actions visant à remettre à niveau en France la sécurité des digues de protection contre les inondations : recensement national, modification de la réglementation, méthodologie de diagnostic, guide à l’usage des gestionnaires pour la surveillance, l’entretien et le diagnostic des digues, soutien actif à plusieurs actions de recherche.
Aujourd’hui, il est explicitement demandé aux gestionnaires de collecter, puis de communiquer à la Police de l’Eau, les principales données sur leurs digues dès lors qu’elles intéressent la sécurité publique, mais aussi de mettre en place un dispositif de gestion pérenne et performant qui permette de garantir sur le long terme la sécurité des ouvrages lors des crues.
Ainsi, les recherches sur les systèmes d’informations dédiés à la gestion des digues s’inscrivent pleinement dans l’émergence de ces nouveaux besoins des gestionnaires et autres acteurs impliqués à des échelles et titres divers dans la problématique de la sécurité des digues.
Le projet "SIRS Digues" s'inscrit dans une logique de meilleure connaissance des digues de protection contre les crues et d'un recensement national des ouvrages, engagé depuis 1999 sous la direction du MATE.
a) Des besoins spécifiques aux digues
Depuis une trentaine d'années, le CEMAGREF mène des travaux sur la sécurité des ouvrages hydrauliques. Ses connaissances sur les barrages sont aujourd'hui établies mais les digues ne présentent pas tout à fait les mêmes caractéristiques. Alors qu'un barrage est un ouvrage retenant l'eau de façon permanente, une digue ne le fait que transitoirement.
D'autre part, la longueur des digues atteint souvent plusieurs kilomètres, qu'il faut surveiller et entretenir régulièrement. Ces différences étant relevées, l'équipe de Patrice Mériaux a franchi le pas entre barrages et digues, en proposant l'étude d'un logiciel spécifique aux digues, capable d'enregistrer, gérer et cartographier toutes les informations nécessaires à la bonne connaissance de leur état.
Son unité de recherche s'est associée pour ce projet à celle de Pierre Maurel (UMR TETIS), spécialisée en analyse-conception de S.I.R.S (Systèmes d'Informations Géographiques). Très vite, les recherches se sont étendues de la digue à son environnement. Les chercheurs sont allés sur le terrain à la rencontre de tous les acteurs concernés : gestionnaires, décideurs publics, élus locaux… pour déterminer les besoins de chacun et établir un diagnostic stratégique. Trois échelles de travail ont été identifiées : la digue dans son ensemble, une échelle de détail et une échelle dite intermédiaire. De même, trois niveaux de gestion ont été décrits : la gestion de la digue et du lit du cours d'eau, celle des zones qu'elle protège et la gestion de la crise (interventions lors des crues).
b) Historique du projet "SIRS digues"
Les premiers travaux sur le « SIRS digues » ont commencé en 1998, tout d’abord à l’initiative du CEMAGREF, puis progressivement avec l’appui d’autres partenaires.
En se basant sur une démarche structurée d’analyse/conception de SIRS, le CEMAGREF a réalisé en 1998 une première étude - dite de diagnostic stratégique - en interrogeant des gestionnaires de la Loire et du Vidourle sur leurs pratiques actuelles et leurs attentes vis à vis d’un SIRS.
À l'issue de cette phase, il a été décidé de privilégier l’analyse d’un SIRS centré sur les digues et le lit fluvial endigué, à un niveau de précision adapté aux gestionnaires locaux (l’équivalent cartographique du 1/5000° au 1/10000°, avec la possibilité d’une gestion documentaire des informations à plus grandes échelles).
L’objectif a été ensuite de vérifier, d’un point de vue technique, l’intérêt des gestionnaires locaux pour un tel SIRS. Avec le soutien du Ministère chargé de l’Environnement, le CEMAGREF a alors développé une maquette générique de sensibilisation pour aider les gestionnaires à mieux cerner le potentiel de l’outil et ainsi, à affiner l’expression de leurs attentes. La maquette a été développée sur le val de Cisse en Loire Moyenne, en bénéficiant de la contribution des gestionnaires du val et des acteurs régionaux.
Les années 2001 et 2002 ont alors été consacrées à étudier la faisabilité technique, économique et organisationnelle du SIRS chez deux gestionnaires d’endiguements majeurs en France : le SYMADREM (Syndicat Mixte d’Aménagement des digues du Rhône et de la Mer) à Arles et l’AD-IDR (Association Départementale Isère Drac Romanche) à Grenoble, en charge respectivement des digues du delta de Camargue et de celles du département de l’Isère.
Les deux gestionnaires se sont ensuite associés pour financer en 2003 et 2004 le développement informatique de l’application confié à la société montpelliéraine Stratégis à la suite d’un appel d’offre restreint, le CEMAGREF assurant l’assistance technique à maîtrise d’ouvrage pour le suivi du développement et du déploiement de l’application.
Le développement a été achevé en juillet 2004 et la phase dite de « Vérification en Service Régulier » a pris fin 3 mois plus tard, à la suite de quoi la recette finale de l’application a été prononcée. L’application SIRS Digues a été déployée depuis chez ses deux propriétaires et le sera bientôt sur les 600 km de la Loire Moyenne.
c) Les associations de gestion des digues de grands fleuves
ü Le SYMADREN
Avec M. Rémy TOURMENT, du CEMAGREF, votre rapporteur a rencontré M. Jean-Luc MASSON, vice président du SYMADREN et M. Thibault MALLET, Directeur technique du SYMADREN au siège du syndicat en Arles.
Le SYMADREN (Syndicat Mixte Interrégional d’Aménagement des Digues du Delta du Rhône et de la Mer) est un syndicat regroupant 2 régions, 2 départements, 15 communes. D’abord syndicat intercommunal en 1997, la région PACA y adhère en 1999, avant qu’en 2005 la région Languedoc Roussillon et le département du Gard lui donnent sa forme actuelle.
Les inondations catastrophiques de décembre 2003 en Camargue ont fait suite à des déversements du Rhône, notamment au travers de brèches survenues dans les digues gardoises du delta du Rhône.
Et en Arles la réflexion s’amplifie. Les propos d’alors sont durs : « Cela fait des années qu’on dit qu’une catastrophe va arriver. C’est un scandale ! Non, à Arles, ce n’est pas une digue qui a rompu, mais un passage sous une voie ferrée. Oui, en revanche, il est temps de repenser le problème des digues du Rhône ».
Le maire d’Arles revendique un opérateur unique et public : « La preuve : les digues prises en charge par le syndicat mixte, le Symadren, c’est-à-dire les collectivités locales, ont tenu. Ce n’est pas le rôle de la SNCF ou d’associations d’agriculteurs de s’occuper de tels ouvrages ».
Ce sera donc l’aboutissement en 2005.
Le SYMADREN a pour mission l’entretien, la gestion et la surveillance des digues et leurs dépendances, la réalisation d’études et de travaux en vue d’assurer la protection des personnes et des biens contre les risques d’inondations du Rhône et de la mer.
Le CIADT du 12 juillet 2005 a validé le principe de l’élaboration d’un Plan Rhône comme projet global d’aménagement et de gestion du fleuve et de son environnement. Il constitue une charte définissant les grands principes d’un projet global de développement durable autour du fleuve Rhône.
Six grands axes stratégiques sont retenus : le patrimoine rhodanien, culture et identité, prévention des risques liés aux inondations, qualité des eaux, ressource et biodiversité, énergie, transports et tourisme. Son coût prévisionnel est évalué à 1,5 milliard d’euros sur dix ans dont 670 M€ pour le volet inondations, 450 M€ pour le volet transport et 250 M€ pour le volet qualité des eaux, ressource et biodiversité.
Le Contrat de Projets Interrégional Plan Rhône (CPIER) constitue l’outil opérationnel de mise en oeuvre du Plan Rhône sur la période 2007/2013 et intéresse 5 régions (Bourgogne, Franche-Comté, Rhône Alpes, Languedoc-Roussillon et Provence Alpes Côte d’Azur).
La dotation de l’État s’élève à 228,4 M€, celle des 5 Régions 200,44 M€ dont celle de PACA à près de 77 M€, la Compagnie Nationale du Rhône 185 M€, l’Union européenne 64,3 M€ dont 33,8 M€ de FEDER.
Six volets thématiques ont été retenus (culture, inondation, qualité des eaux, énergie, transport et tourisme) et 23 actions ciblées avec des engagements qui mettent en évidence les priorités des partenaires.
On constate les priorités concordantes pour l’Etat et la Région PACA sur les risques inondations et le transport fluvial, et des positionnements différenciés des Régions (tourisme pour la Région Franche-Comté, transport pour la Région Bourgogne, tourisme pour la Région Rhône Alpes.), les interventions de la CNR à hauteur de 185 M€ concernent principalement l’énergie et le tourisme,
La Région PACA consacre les deux tiers de son intervention au volet inondation avec 4 grands objectifs :
- la réduction des inondations impliquant l’exercice d’une solidarité d’action tant amont/aval que rive droite/rive gauche sur l’ensemble du bassin versant. La Région PACA est tout particulièrement sensible de par sa position géographique en aval du fleuve.
- l’appréhension et la prévention du risque qui nécessitent information et formations,
- la coordination des efforts sur les affluents,
- la réduction des vulnérabilités par diverses actions de maîtrise du développement urbain notamment.
Sur le volet inondations, le coût total estimé des travaux s’élève à 310,5 M€ dont la moitié se situe en région PACA, l’essentiel de cette somme étant consacré aux ouvrages de protection (pré-schéma aval de Beaucaire et confortement des digues) que l’on peut considérer comme des investissements de première urgence. Les engagements financiers consacrés à la prévention des crues (réduction de l’aléa et de la vulnérabilité) concernent plus les territoires en amont du Rhône et devraient s’intensifier dans l’avenir.
Des dotations des Régions PACA et Languedoc-Roussillon sont prévues dans ce contrat pour le fonctionnement du SYMADREN, principal maître d’ouvrage pour la mise en oeuvre du pré-schéma sud.
Le SYMADREN gère 210 km de digues fluviales et 30 km de digues de mer, - les plus anciennes datant du XIIème siècle, beaucoup d’autres de 1856 - et en 2007 le programme porte sur le confortement de 30 km, pour un montant de 30 M€. Toutefois, l’inquiétude persiste car, sur les 311 M€ prévus au budget du syndicat pour mener à bien ses missions, 182 M€ seulement sont contractualisés.
Pour le SYMADREN, l’important d’une bonne protection contre la rupture est de permettre en toutes circonstances l’accessibilité des intervenants, donc que la crête soit large afin que des engins lourds puissent circuler. La seconde condition est que la digue offre une bonne résistance aux animaux fouisseurs, et comporte donc un grillage des deux côtés de la pente.
ü Les digues de Loire
La Loire, plus long fleuve français, a connu des crues très dangereuses pour les populations. Son long cours nécessite la coordination de quatre zones : METZ pour sa traversée de la Bourgogne, Marseille pour sa naissance, Rennes pour la fin de son trajet, Bordeaux pour ses affluents rive gauche.
Votre rapporteur s’en est tenu à ce que l’on définit comme la Loire moyenne, allant de Nevers (Bec d’Allier) à Angers (pont de Montjean-sur-Loire). 300 000 habitants occupant 120 000 logements, et 14 000 entreprises employant 72 000 personnes sont ainsi concernées.
Un modèle a été réalisé en 1997, (à la demande de l’Etat - plan Loire grandeur nature, coordonné par le Préfet de la région Centre, de l’établissement public d’aménagement de la Loire et des ses affluents –EPALA- et de l’agence de l’eau Loire – Bretagne) sur l’inondabilité des vals et l’écrêtement des crues, ne tenant pas compte d’une rupture accidentelle de la levée en l’absence de surverse, ni de la remontée de la nappe dans le val.
Le volume de crue entrant au Bec d’Allier (confluent Allier et Loire) est le suivant :
Fréquence de crue |
Cinquantennale |
Centennale |
Cinq-centennale |
Débit maximal |
4 200 m3/s |
6 000 m3/s |
8 500 m3/s |
Volume total écoulé de la crue en 8oursj |
1,75 milliards m3 |
2,2 milliards m3 |
2,8 milliards m3 |
Volume écoulé au dessus de 1 250 m3/s |
0,9 milliard m3 |
1,4 milliards m3 |
1,9 milliards m3 |
Volume écoulé au dessus de 3 000 m3/s |
0,2 milliard m3 en 3 jours |
0,6 milliard m3 en 3 jours |
1,1 milliard m3 en 4 jours |
Volume écoulé au dessus de 6 000 m3/s |
0,3 milliard m3 en 2 jours |
Rappelons qu’au-delà de 9 000 m3/s, plus rien ne résiste dans le val de Loire et que chaque année, il y a une probabilité de 2% qu’une crue cinquantennale survienne, 1% qu’une crue centennale survienne et 0,2% qu’une crue cinq centennale survienne.
Les crues fortes en Loire moyenne ont des volumes d’eau très impressionnants, de l’ordre de 2 à 3 milliards de m3 écoulés en 5 jours. La vitesse de propagation de l’onde de crue de 6 000 m3 est de l’ordre de 3,3km/h. Il faut donc près de 8 jours pour une crue pour aller du Bec d’Allier aux Ponts – de – Cé, à l’entrée d’Angers. Les hauteurs d’eau maximales pour une forte crue sont comprises entre 5 et 7 m.
Pour tenter de remédier à cela, deux barrages ont été construits à Villerest dans la Loire et à Naussac dans la Lozère.
Le barrage de Villerest permet de réduire le débit jusqu’à 4 000 m3/s de moitié, et pour des débits supérieurs à 4 000 m3/s de 2 000 m3/s. Cela a permis en 2003, de réduire la hauteur de crue de 2 m à Roanne, d’1 m à Nevers, de 50 cm à Tours.
Si ces barrages permettent de réduire l’ampleur des crues, ils ne sont pas une assurance totale d’élimination de toute inondation.
Les constructions sont maîtrisées grâce aux plans communaux de sauvegarde depuis 1994, mais les élus d’aujourd’hui voudraient réviser les PPR à la baisse, alors qu’il serait normal de les durcir. Le développement se fait en zone inondable.
En annonce de crue, les services de la DDE disposaient de 350 personnes ; mais avec le transfert du personnel des routes au Conseil Général, il n’y a plus de réserve pour les services de l’Etat. Si le département du Maine et Loire peut être considéré comme pilote, au niveau de la formation et de la mobilisation des services départementaux en matière de services techniques et de sécurité civile, cela sera beaucoup plus difficile pour le Loiret et l’Indre et Loire. Il faut donc repenser la gestion de crise.
Par ailleurs, si la Loire peut connaître des crues dévastatrices, elle connaît aussi un étiage très sévère ; or, il y a huit tranches nucléaires sur la Loire et les besoins en eau sont énormes.
Votre rapporteur s’est ensuite rendu sur les bords de Loire, près du déversoir de Jargeau.
Source : DIREN Centre
Le val d'Orléans est un de ceux qui comprend le plus d'enjeux sur la Loire : 65 000 habitants dans 25 000 logements et 2 000 entreprises comptant 10 000 emplois.
Il débute à Bouteille et se termine à la confluence du Loiret. Il mesure 40 km de long et jusqu'à 7 km de large. Sa partie amont est rurale alors qu'à l'aval se trouve l'agglomération sud d'Orléans.
L'inondation du val se fait par remous et touche la commune de Saint Privé Saint Mesmin à partir de la crue de temps de retour 50 ans.
L'autoroute A71 est coupée pour une crue de 100 ans. L'agglomération est inondée par surverse en crue de retour 200 ans. Le déversoir de Jargeau fonctionne en crue de 500 ans.
En 2003 le mur du Cordon et les maisons situées en arrière ont été déstabilisés par un karst.
Les travaux de confortement du mur ont consisté à construire un mur neuf en « L » en béton armé supporté par des micros- pieux.
Compte tenu la qualité environnementale du site, le béton a été habillé par de la pierre pour rendre au mur son aspect initial.
Les maisons ont été considérées comme perdues, les propriétaires ont été indemnisés, elles devront être détruites.
Source : DIREN Centre
La même année, 200 m en amont un autre karst a provoqué un fontis qui s'est ouvert au sommet de la levée au niveau de la route, il s'est manifesté sous forme d'un trou circulaire d'un mètre de diamètre.
Des palplanches ont été fichées pour limiter le risque pour la levée
Source : DIREN Centre
Exécuté de 1878 à 1882 au droit d'une brèche de 1856, d'une longueur de 575 m, l'ouvrage est constitué d'un seuil arasé à 5m50 au dessus de l'étiage et surmonté d'une banquette fusible de lm50. Il fonctionne à partir de 6m50 à l'échelle d'Orléans (crue de temps de retour 500 ans, soit 8500 m3/s au bec d'Allier ; la crue de décembre 2003 a atteint 3m76 pour 3200 m3/s environ)
Source : DIREN Centre
ü Les digues de l’Ill
Si l’Ill canalisée peut avoir des similitudes avec les grands fleuves, les distances ne sont toutefois pas comparables, la très forte densité de population incline à classer ce syndicat parmi ceux des grands fleuves.
La partie nord, depuis le début du XXème siècle, est du domaine domanial, tandis que pour la partie sud, les digues sont gérées par un syndicat. Á l’ouest, les communes qui se sont substituées à un syndicat défaillant. Le premier syndicat des digues de l’Ill remonte à 1848, le nouveau est en place depuis début 2007, après deux ans de tractation pour sa création. Les protections sont érigées sur un domaine privé, et le sentiment de solidarité a été très difficile à faire partager. Certains propriétaires de digues ont été difficilement identifiés lors du recensement effectué en 2007 et de gros travaux pour les rendre carrossables ont du être entrepris. Ces travaux ont été pris en charge grâce à une subvention du conseil général (60% de la dépense), le reste faisant l’objet d’une clé de répartition entre les communes. Par ailleurs, le conseil général alloue une subvention pour travaux d’entretien à hauteur de 40% de ces travaux, confiés à trois entreprises.
La plus grande difficulté rencontrée par les organismes de contrôle pour ce type de digue est l’identification du gestionnaire, la confusion entre propriétaire et gestionnaire étant courante.
Lors de sa visite dans l’Aude, votre rapporteur avait tenu à voir une digue de rivière ; le Fresquel n’est en rien comparable au Rhône, mais l’utilité de cette digue n’en est pas moins importante.
Il s'agit de tronçons de digues situés le long du Fresquel en rive gauche et droite de l'agglomération d'Alzonne
Photo aérienne du secteur prise en 1999 - DDAF 11
Les digues constituées le long du Fresquel au droit d'Alzonne sont des digues en terre avec parfois enrochement des berges. La risberme est inexistante et les digues sont dans le prolongement direct des berges. Leur hauteur varie de 1 à 2,5 mètres ; le profil en long est irrégulier autant que l'on puisse en juger.
Vue de la digue depuis la station d'épuration - DDAF 11
Vue de la digue depuis le lotissement - DDAF 11
Les photos montrent l'absence d'entretien des digues et l'envahissement par la végétation herbacée, arbustive et arborée.
De faible hauteur ces tronçons de digues ont une occurrence de surverse variant de la crue décennale à la crue centennale. Les enjeux à l'aval sont la station d'épuration de la commune ainsi que des logements réalisés depuis 1999.
Vue de la station dépuration au pied de la digue – DDAF11
Pour que la digue soit efficace, il est souhaitable qu’elle soit dépourvue de végétation, et notamment de racines et de souches d’arbres. Or, dans le cas précis d’Alzonne, est-il possible de nettoyer cette digue, qui ne sera pas un obstacle réel en cas de crue vu son état, tout en respectant la loi sur l’eau ? Ne va-t-on pas faire disparaître la biodiversité de ces rives ?
Dès lors, la solution la plus rationnelle mais certainement pas la moins coûteuse, serait de créer une nouvelle digue, plus haute, à l’emplacement du chemin menant à la station d’épuration et de réaliser en crête une bande de roulement large de 3ou 4 m. Mais remonter cette digue à plus de 2 m de haut n’est pas financièrement actuellement possible pour la commune.
3) LE CAS PARTICULIER DES BARRAGES OU DIGUES DE STÉRILES
Votre rapporteur a rencontré à Saint Brieuc le Directeur de la société DAMREC exploitant la mine de GLOMEL ainsi que le représentant de la DRIRE chargé du contrôle de cette digue.
Source : DAMREC
L’andalousite est un minéral que l’on trouve exclusivement dans les roches métamorphiques. A Glomel, des schistes noirs, riches en alumines, subirent un métamorphisme de contact par l’intrusion d’un granite. L’andalousite apparaît sous forme de cristaux de 4 mm de section et 40 mm de long
Le corps minéralisé exploité par la société DAMREC à Glomel est tout à fait remarquable de par :
- la qualité des andalousites
- la teneur exceptionnel en andalousite (> à 25%)
Des campagnes de sondages sont régulièrement menées, les réserves prouvées sont supérieures à 10 ans.
L’extraction de l’andalousite se fait en mine à ciel ouvert. Des sondages de pré-exploitation à maille de 5 m. sont réalisés pour distinguer les zones minéralisées des zones stérile à l’intérieur du gisement. Le minage se fait à l’explosif par niveau de 10 mètres. Le ratio stérile / minerai est d’environ 0.65.
Le minerai extrait depuis deux fosses est transporté par Dumper jusqu’au concasseur à mâchoires.
Après concassage, le produit (< 0,3 m) est dirigé vers différents silos ou « stock pile » devant les usines.
La production d’Andalousite se fait avec de faible rendement : 8% en poids. Cela génère donc beaucoup de matériaux non utilisables (biotite, quartz, pyrites). D’où :
=> des stériles de carrière (400 000 tonnes/an), zones où la richesse en andalousite n’est pas suffisante pour être exploitées économiquement, ou teneur en fer et alcalin trop forte.
=> des stériles secs et humides provenant du process de traitement de l’usine (572 000 tonnes/an).
Les stériles de carrière et les stériles secs provenant de l’usine de traitement sont déposés sur des verses. Ces mêmes stériles peuvent également être placés dans d’anciennes fosses d’extraction.
L’eau en contact avec ces verses est recueillie pour être traitée du fait de son acidification au contact de la pyrite présente naturellement dans la roche.
Les stériles humides provenant de l’usine de traitement sont envoyés sous forme de pulpe à travers des conduites par motopompes dans un bassin réalisé artificiellement en construisant une digue de retenue. Les stériles fins contenus dans la pulpe vont sédimenter dans le bassin. Ce qui a été le cas sur le site de Damrec Glomel au départ de son activité jusqu’en 1998.
L’autre solution est de déposer ces stériles fins dans une ancienne fosse d’extraction en utilisant le trou comme réceptacle. Cependant, parfois il est nécessaire de réaliser des barrages en fonction de la topologie naturelle du périmètre de cette ancienne fosse. Ce qui est le cas actuellement sur le site de Damrec Glomel.
Les conséquences environnementales en cas de rupture sont multiples :
• rejet de stériles dans l’environnement
• pollution de l’eau (rivière, nappe phréatique…)
• pollution des sols (impact potentiel sur la faune et la flore)
Les ruptures des digues peuvent être dues à l’instabilité de talus (superficielle ou profonde) ou au débordement suite à une augmentation du niveau d’eau (tempête, système d’évacuation inapproprié, conduite obstruée…). La circulation d’eau sur la crête de remblai et la pente de talus aval provoquent une érosion de la pente puis une rupture globale.
Ceci peut être la conséquence d’une conception inappropriée, de l’instabilité superficielle ou profonde du talus, d’une érosion interne induite par des infiltrations d’eau (perméabilités différentes), ou d’un débordement (système d’évacuation sous-dimensionné, colmatage…).
L’inspection réalisée à ce jour à « Damrec » Glomel consiste en une inspection des pentes de talus. Le mouvement (surfaces de glissement, fissures) est observé, le risque d’instabilité (superficielle ou profonde) est vu chaque semaine. Des points topographiques fixes sont relevés annuellement.
L’inspection du système de drainage est mensuelle. Pour éviter le risque de débordement, les systèmes d’évacuation courante / évacuateur de crue font l’objet d’une surveillance pour empêcher toute obturation. De même, une inspection du système d’évacuation des eaux (intégrité et efficacité) est effectuée.
Pour cela, il a été procédé à une instrumentation par piézomètres, permettant l’inspection du niveau d’eau dans l’ouvrage et un système d’enregistrement (niveau piézos et points fixes)
L’inspection visuelle s’attarde sue les résurgences, les fissures, l’érosion de ruissellement, les débris, les trous provoqués par les animaux ou suite à une dépression
L’instrumentation se fait grâce au piézomètre au niveau de la surface phréatique, et le déplacement est enregistré par les balises de surveillance.
Mais tout ne semble pas aussi idyllique dans le monde des barrages de stériles miniers. Alerté par des collègues parlementaires de certaines situations, votre rapporteur ne pouvant s’y rendre faute de temps a saisi par écrit diverses autorités.
Le Préfet de l’Allier que j’avais saisi de la situation des barrages de Cotillon a longuement répondu à votre rapporteur sur un cas plus difficile de barrages contenant des stériles miniers. Voici donc quelques bonnes lignes sur ce problème qui peut devenir épineux.
« Ces barrages de Cotillon sont suivis actuellement par les services de la Direction départementale de l'agriculture et de la forêt de l'Allier depuis 1986.
Il s'agit d'un ensemble de cinq plans d'eau dont, en aval, un grand plan d'eau dit «Barrage du Cotillon ». Cet ensemble se situe sur la commune d'Echassières sur un petit ruisseau dit «Le Cotillon», affluent de la rivière La Bouble, elle-même affluent des rivières La Sioule et l'Allier.
Les quatre petits plans d'eau situés en amont ont une surface moyenne de 0,5 à 1 ha chacun. En revanche, le plan d'eau de Cotillon est composé d'une retenue de 4,5 ha et d'un barrage en remblai d'une hauteur de 22 mètres environ, en travers du thalweg sur une longueur de 100 mètres en crête. Son volume en eau est évalué à 50 000 m3 soit une hauteur d'eau moyenne de 1,10 mètre. Le volume total y compris les sédiments est estimé à 200 000 m3.
Compte tenu de ces caractéristiques, cet ouvrage a été classé en 1993 comme intéressant la sécurité publique (ISP) au titre de la circulaire n° 70-15 du 14/08/1970. En revanche, il n'existe pas d'enjeux majeurs de sécurité des biens et des personnes à proximité avale, en cas de rupture de cet ouvrage.
Le barrage relève désormais de la classe A du décret n°2007-1732 du 11 décembre 2007 (Art R214-112 du code de l'environnement).
Ces cinq plans d'eau sont issus d'une ancienne concession de mine de wolfram (minerai de tungstène) dite des Montmins instituée par décret du 02 juin 1917, au profit de la compagnie minière des Montmins, puis mutée en 1968 à la société minière et métallurgique PENNAROYA devenue METALEUROP S.A.. Ces ouvrages remblayés au fil des ans, avaient pour but de stocker les résidus fins de l'ancienne laverie à minerai.
L'exploitation a cessé en 1962 et le site a été acheté par un particulier pour en faire un lieu de détente. Depuis son décès en mars 1987, c'est son fils qui a hérité de cette propriété de 25 ha environ. Aucune prescription particulière au titre du code minier n'a été imposée à l'époque à l'ancien exploitant en ce qui concerne ces digues. Enfin, il a été donné acte par arrêté préfectoral du 08 avril 2003, à la société METALEUROP S.A., de l'arrêt définitif de l'ensemble des travaux miniers de cette concession.
En ce qui concerne la première intervention du Service police de l'eau de la DDAF, elle remonte à l'année 1975 et faisait suite à un procès verbal pour pollution établi par le Conseil Supérieur de la Pêche. Dès septembre 1978, la DDAF a sollicité l'appui technique du CTGREF (Centre Technique du Génie Rural des Eaux et des Forêts) devenu CEMAGREF pour expertiser ce site. Ce service est ensuite intervenu une nouvelle fois en novembre 1985 et février 1986. Suite à la mission d'inspection nationale du CEMAGREF en octobre 1990, et sur ses recommandations, cet ouvrage a été classé comme Intéressant la Sécurité Publique (ISP) par l'arrêté préfectoral n° 3109 du 21 juillet 1993.
Depuis cette date, ce classement a entraîné, au titre de la circulaire n° 70-15 du 14 août 1970, au moins une visite annuelle du service contrôle (DDAF). Ce suivi a d'ailleurs fait l'objet de nombreux courriers à l'attention du propriétaire des ouvrages.
Cependant, le propriétaire s'est montré peu enclin à mettre en œuvre les consignes de sécurisation et d'entretien des ouvrages en dépit de nombreuses relances. Il n'est finalement devenu réactif que suite à la mise en œuvre de procédures judiciaires ou de procédures administratives.
Quatre arrêtés préfectoraux de mise en demeure ont été pris au titre des articles L 216-1 et L 216-10 du code de l'environnement:
- le 28/01/1987, pour vidange totale des plans d'eau,
- le 11/06/1987, pour l'entretien du barrage du Cotillon,
- le 18/07/2000, pour l'entretien du barrage du Cotillon,
- le 17/06/2004, pour l'entretien des berges des étangs du Mazet et du Cotillon
En outre, un arrêté préfectoral du 12/04/2007 a engagé la procédure de consignation prévue à l'article L 216-1 du code de l'environnement pour un montant de 10 017,00 Euros répondant au coût des travaux énoncés à l'arrêté préfectoral du 17/06/2004. Une levée partielle de 50% des fonds a été autorisée le 5 mai 2007 compte tenu de la réalisation de l’essentiel des travaux à l'exception des abords de l’évacuateur de crues.
D'autre part, diverses infractions ont été relevées par les techniciens de la DDAF en relation avec la Brigade de Gendarmerie Nationale, à savoir :
Infraction relevée par |
Date |
Type d'infraction |
Suite donnée par le parquet |
Gendarmerie Nationale |
11/11/2000 |
Non respect de l'arrêté préfectoral du 18/07/2000 |
- Affaire jugée. - Propriétaire déclaré coupable, maisdispensé de peine. - Cette affaire a bénéficié de la loi d'amnistie de août 2002. |
DDAF |
09/09/2004 |
Non respect de l'arrêté préfectoral du 17/06/2004 |
- Le Procureur de la République décide - Suite à cette décision, la DDAF a rappelé fin juillet 2005, l'attention du Tribunal de Grande Instance surl'instabilité du barrage (cf. étude Coyne et Bellier de 1994 mentionnée plus bas). |
DDAF |
14/01/2005 |
Exploitation d'une installation sans être en règle. |
|
DDAF |
15/12/2006 |
Non respect de l'arrêté préfectoral- |
En mars 2008, le Procureur de la République transmet un avis de classement « régularisation sur demande du parquet ». La DDAF, écrit au Procureur de la République pour attirer son attention, une nouvelle fois, sur les risques et ce, suite à la lettre de la DDAF de fin juillet 2005. |
Il convient de noter enfin qu'un grave incident a affecté cet ouvrage, le 15 mai 1988.
En effet, suite à de fortes pluies (80 mm en 3 heures), une crue a entraîné rapidement la montée du niveau des eaux de la retenue en raison du sous dimensionnement de l’évacuateur de crue. Cette montée des eaux a provoqué un glissement d'une partie du parement aval (partie haute) mais sans créer de brèche dans l'ouvrage.
Du matériel de travaux publics a été réquisitionné (58 000 francs) pour élargir et approfondir l'évacuateur de crue et permettre l'abaissement du niveau des eaux de la retenue. Suite à cet incident et à l'initiative de la DDAF, une étude « diagnostic » a été réalisée. Ce rapport a préconisé des travaux de confortement par drainage et recharge avale pour un montant total de travaux estimé à 480 000 F en juillet 1994.
Depuis lors, et malgré l'action constante du service de contrôle, aucun confortement de cet ouvrage n'a été entrepris. Une végétation arbustive s'est même installée, ce qui a motivé la procédure de consignation décrite plus haut.
Par le procès-verbal de visite annuelle de février 2008 et par des courriers du 22 avril et du 19 juin 2008, les nouvelles dispositions réglementaires (décret du 11/12/2007 et arrêtés ministériels des 28 février et 19 juin 2008 ont été communiqués au maître d'ouvrage (Classe A).
Enfin, eu égard aux défauts de stabilité identifiés par l'étude précitée, il est prévu d'avancer la production de l'étude de danger visée à l'article R214-115 du code de l'environnement au 31 décembre 2009.
En conclusion de cette affaire, il semblerait que les difficultés rencontrées dans le suivi de ces ouvrages et la mise en œuvre par leur propriétaire des mesures d'entretien et de sécurisation adéquates pourraient tenir d'une part à la disparité du cadre réglementaire applicable aux barrages de retenue selon qu'ils relèvent du code minier, des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) ou de la police de l'eau et des milieux aquatiques et, d'autre part, à la capacité technique et financière d'un maître d'ouvrage privé.
En effet, cet ouvrage tombant dans le champ des dispositions très abouties du code de l'environnement, les contraintes applicables à son maître d'ouvrage privé apparaissent de fait, aujourd'hui, sans commune mesure avec le mode d'exploitation qui prévalait lors de l'exploitation minière ».
Ceci est exemplaire d’un travail sérieux de l’administration, mais révélateur de l’inadéquation d’une partie de la réglementation à la situation réelle d’un propriétaire qui ne peut faire face à ses obligations.
CHAPITRE 3 : LES BARRAGES ET OUVRAGES HYDRAULIQUES FACE AUX RISQUES NATURELS
I - LE RISQUE SISMIQUE ET LA SOLIDITÉ DES BARRAGES
Après avoir visité ces barrages, votre rapporteur s’est interrogé sur la réaction d’un barrage après un séisme et a décidé d’organiser une table ronde réunissant les meilleurs experts français sur le sujet. Et l’actualité a rattrapé cette préoccupation avec le séisme du 12 mai 2008 en Chine, dont vous trouverez ci-après de plus amples informations recueillies à Sofia.
Un barrage résiste normalement mieux aux séismes que d’autres constructions, car il est réalisé pour supporter des efforts horizontaux avec de fortes marges. Bien sûr, compte tenu du type d’ouvrage, des effets différents peuvent se produire.
21 barrages sont situés en zone sensible en France et font l’objet d’une réévaluation sismique. Pour les barrages en béton, le cas des charges sismiques n’est pas souvent pris en compte dans le dimensionnement mais ces barrages ont un bon comportement d’ensemble.
Le retour d’expérience sur les barrages qui ont connu des séismes dans le monde permet d’affirmer qu’il n’y a pas de rupture franche, mais les réservoirs ont pu subir des dégradations en partie supérieure seulement. Car, un séisme entraîne une poussée supplémentaire de la retenue sur l’ouvrage. L’ouvrage a un coefficient de sécurité en statique plus important. Les chargements sont brefs ; les ouvrages se déforment au cours d’un séisme (la crête se déforme) et peuvent provoquer l’ouverture de joints.
La résistance des barrages en remblai est moins évidente. Mais les techniques minières (comme pour le barrage de Sheffield) ne sont pas utilisées en France. Cependant, il faut veiller aux désordres qu’un séisme peut engendrer comme la création d’un barrage naturel par accumulation de débris, et la brusque rupture par submersion de ce barrage.
La France n’est pas une région fortement sismique, surtout en métropole, mais comme elle n’en est pas exempte pour autant, les chercheurs travaillent à la détermination de l’aléa pour un maximum de sécurité lors de la construction des barrages. Il faut néanmoins déterminer un zonage sismotectonique, or pour l’instant la carte de l’aléa sismique est insuffisamment précise, même si la base de donnée SISFRANCE est un premier pas.
Au cours du recensement de tous les petits et moyens barrages, il convient d’établir un inventaire intelligent des barrages à risque selon des critères déterminés, et accélérer la mise en place des PPI.
2) LES TRAVAUX DU COMITÉ TECHNIQUE « ASPECTS SISMIQUES DES PROJETS DE BARRAGES » DE LA CIGB
Lors de la participation de votre rapporteur à l’assemblée annuelle des grands barrages à Sofia, le comité technique « aspects sismiques des projets de barrages », que préside M. Martin Wieland, comité comptant des représentants de 28 pays à sismicité variable, a insisté sur la nécessaire révision des normes de construction des barrages, la plupart de ces normes étant périmées de nos jours, et le paradoxe qu’à ce jour on ne compte pas de rupture de grand barrage suite à un tremblement de terre.
L’actualité, avec le séisme du Sichuan, a fait l’objet d’une présentation par l’académicien Houqun CHEN, vice président du « China institute of water ressources and hydropower research ». Le 12 mai 2008, plusieurs barrages ont été affectés par le séisme de magnitude 8, le plus important enregistré en Chine depuis 30 ans, mais aucune rupture n’a été constatée. Or la province de Sichuan, là où se situe l’épicentre, est la région qui comporte le plus d’équipements hydroélectriques. La Chine compte plus de 20 000 grands barrages, et environ 50% des barrages du monde. 80% de ces barrages sont des barrages en remblais dont la capacité est inférieure à 5 millions de m3. Aucun barrage n’a relâché son réservoir, aucune brèche n’est apparue. 200 à 400 barrages sont à vérifier (y compris les digues), mais quatre très grands barrages ont été fortement secoués, 2 étant très proches de l’épicentre, 2 dans une zone d’intensité 7 (rappel Lambesc : magnitude 6.2).
Le plus grand, Zipingpu, est un barrage en enrochements de 156 m de haut. S’il y a eu tassement de l’ouvrage et compression vers l’intérieur, on a pu constater des déplacements jusqu’à 150 mm, les joints entre les dalles ont été écrasés, mais les fuites sont restées non significatives. Ces fuites enregistrées à 6 litres par seconde avant le séisme sont passées à 10/15 litres par seconde, et l’eau qui s’était troublée après le séisme est redevenue claire très rapidement. Les 3 générateurs alimentés par le réservoir dont la capacité est d’1,1 milliard de m3 sont en fonctionnement normal, le tunnel de dérivation est en service.
Suivant la formule des officiels chinois, « la structure du barrage est saine, les dommages n’affectent pas la stabilité du barrage. Et tous les barrages de la zone sont sous contrôle ».
Le barrage a été conçu avec la norme chinoise d’une accélération de 0,26 g. Pendant le séisme, les accélérations enregistrées ont été beaucoup plus importantes (jusqu’à 2 g).
Un autre barrage auquel il était impossible d’accéder au 3 juin 2008, les routes étant détruites, a bien résisté, l’observation par hélicoptère étant permanente. Ce barrage-voûte, en béton compacté, haut de 132 m, était plein au moment du séisme. Mais depuis, 35 lacs se sont constitués suite aux glissements de terrain : il a été nécessaire de creuser des brèches pour prévenir des dégâts par inondation, un canal artificiel étant creusé grâce à 40 machines amenées par voie aérienne, le canal devant être achevé avant le 10 juin, date de début de la saison des pluies.
La résistance des barrages au séisme est meilleure que celle d’autres ouvrages, puisque dans la région 10% des bâtiments ont été détruits, sans qu’aucun barrage ne le soit. C’est aussi la conclusion du Président Martin WIELAND et de Michel LINO, secrétaire du Comité technique « aspects sismiques des projets de barrages » de la CIGB. Le président WIELAND n’a connaissance d’aucune rupture brusque de barrage après séisme. Ces nouvelles de Chine, après le séisme du 12 mai, montrent que le risque "rupture" provient plus des barrages naturels créés par les glissements de terrains, - surtout dans un contexte de montagnes jeunes, donc aux pentes raides non encore trop rabotées par l'érosion - que des barrages conçus et construits par les hommes.
Toujours à Sofia, le vice président de la CIGB et Directeur du Japan Dam Engineering Center, M. Norihisa MATSUMOTO a indiqué à votre Rapporteur que les premiers barrages au Japon remontent à un peu plus de 2 000 ans, et le Japon en recense un peu plus de 3 000 d’importance. La géographie du Japon fait que les rivières ont généralement de fortes pentes, ce qui se traduit par des barrages « en cascades ». Deux grands dangers sont donc appréhendés pour le japon : le risque sismique et les glissements de terrain, suite à des pluies diluviennes.
Depuis 1945, le Japon n’a enregistré aucun incident grave sur un barrage. Toutefois, en cas de séisme, une visite est réalisée dans les 3 heures suivant la secousse, et si le moindre désordre est apparent, une seconde visite, plus approfondie, est déclenchée.
Á propos des derniers séismes touchant le Japon, il a pu être observé que, sur les barrages en terre, des fissures sur la crête pouvaient atteindre 50 cm, voire 1 m. Mais pour parer à l’effet de rochers tombant dans l’eau, le niveau d’eau dans le barrage est toujours limité, à 4 ou 5 m en dessous du niveau maximal. Par contre, sur les barrages en béton, il n’y a pas de fissures. Sur les barrages bien instrumentés, on peut observer un déplacement n’excédant pas 2cm.
En cas de pluies très intenses, les déversoirs permettent d’éviter toute submersion.
II - LES BARRAGES NATURELS ET LES CRUES EXCEPTIONNELLES
Ainsi que le rappelle Bernard GOGUEL, la France a eu à souffrir d'au moins une crue catastrophique par rupture de barrage naturel, derrière lequel s'était accumulé un lac de retenue qui s'est vidangé d'un coup lorsqu'il a débordé. Mais elle remonte à … 1219, les 14-15 septembre, connue sous le nom de catastrophe de Vizille, au sud de Grenoble (ref. Léon Moret, 1945. Les éboulements de terrains en montagnes - Editions de la Revue "Les Alpes". Grenoble)
Les torrents de la Vaudaine (en rive droite) et de l'Infernet (en rive gauche), encadrent la vallée de la Romanche au début de sa section encaissée au sortir de la plaine de Bourg d'Oisans (zone de surcreusement glaciaire en roches tendres, remplie d'alluvions lacustres). Ces deux torrents, remarquablement alignés, envoient leurs débris boucher la vallée. Une bonne crise de transports solides, sur orages ou avalanches rocheuses dans leurs couloirs, édifie un barrage fermant la vallée, et reconstituant le lac de retenue de la plaine de Bourg d'Oisans. Lorsque le lac est plein, il déborde et emporte tout à l'aval. Cela s'était déjà produit en 1191 au même endroit. Bourg d'Oisans s'appelait St Laurent du Lac en 1095.
C'est dans cette même vallée de la Romanche, à mi distance entre les 2 torrents et Vizille, que se trouve l'un des plus grands glissements potentiels actuels susceptible d'affecter la sécurité publique dans notre pays, celui de Séchilienne, pour lequel ont déjà été engagés des travaux de détournement de la route et de la rivière (déplacées vers la rive gauche) et des opérations de surveillance attentive du versant instable.
Ce glissement de terrain dit des « ruines de Séchilienne », pouvant entraîner un éboulement de 30 millions de m3 de roches, pourrait être de nature à provoquer un barrage naturel. Un second glissement provoquerait certainement une vague de submersion, dont les effets sont actuellement étudiés au laboratoire d’essais hydrauliques de la Compagnie nationale du Rhône, à la demande du Conseil général de l’Isère. Les premiers résultats (les essais continuent au moment de la rédaction de ce rapport), sont plutôt encourageants en termes de dégâts collatéraux à l’éboulement.
Les glaciers, avec leurs mouvements d'avancées et de reculs, peuvent aussi créer des barrages naturels à la stabilité aléatoire, qui entraînent des crues catastrophiques lors de leurs ruptures ; y sont assimilables aussi les ruptures de poches d'eau interglaciaires, dont la plus tristement célèbre (glacier de Tête Rousse) occasionna la catastrophe de St Gervais dans la nuit du 11 au 12 juillet 1892, avec plus d'une centaine de victimes. (Ref. L. LLIBOUTRY, Traité de Glaciologie, Masson 1965, p.665-671.)
III - LES GLISSEMENTS DE TERRAIN
Source : BETCGB
Quelques repères sur la catastrophe du 9 octobre 1963 à Vajont.
Le grand barrage voûte mince de Vajont en Italie au Nord de Venise, haut de 262 m, fut construit de 1957 à 1960 dans une gorge très étroite (L/H = 0,7). Il fut mis en eau par étapes, avec une connaissance insuffisante et encore discutée de l’instabilité en grand du versant dominant sa retenue en rive gauche. Après une phase de lents déplacements, tout un pan de montagne (estimé à 270 millions de m3) s’est brusquement accéléré, fermant la retenue d’un coup sur 2 km de long jusqu’à 50 m du barrage, qui a tenu malgré une submersion considérable. La localité de Longarone, au sortir de la gorge 500 m plus bas, et d’autres, ont été balayées dans la nuit par le débordement du lac, occasionnant près de 2000 morts.
Le film La folie des hommes traite de cette catastrophe. L’affaire a été jugée, et des peines infligées. En voici quelques éléments techniques.
La capacité de la retenue pleine (à la cote 722,50) aurait été de 169 millions de m3, elle était le jour de l’accident (à la cote 700) de 115 millions de m3… dont une partie a été brutalement expulsée de la gorge, pincée en quelques instants par le glissement. L’eau est montée jusqu’à la cote 935, plus de 200 m au dessus de la crête du barrage, arrachant la terre et les arbres ainsi que les superstructures de la voûte (pont sur l’évacuateur de surface à seuil libre en crête). Mais les appuis rocheux, et l’essentiel du barrage voûte lui-même, ont tenu.
Chronologie résumée :
- cote du lac 650 atteinte en 1960, avec mouvements notables à partir de la cote 635 (jusqu’à 8 ou 10 cm/jour localement), divers écroulements, ouverture d’une fissure périphérique délimitant les 2 km2 actifs, et un éboulement de 700 000 m3 dans le lac le 4 novembre 1960 ; premiers sondages dans la masse suspecte, baisse du plan d’eau,
- cote 600 non dépassée en 1961, le temps de percer une galerie de dérivation en rive droite de la retenue, pour contrôler la partie amont du lac si celui-ci venait à être comblé par le développement des effondrements ou éboulements au pied du glissement,
- études et investigations sur le glissement en 1960-61, d’où 4 piézomètres (Piézomètres difficilement interprétables, trop sommairement équipés ; 2 suivent le lac, et les 2 autres plus profonds témoignent d’un artésianisme mal compris, puis sont coupés par les mouvements et leurs niveaux rejoignent les premiers ; manque d’attention aux possibles relations avec la pluviométrie.) et développement progressif d’un réseau de piliers de surveillance topographique. Les données acquises ne sont convaincantes, les experts ne sont pas tous d’accord, le maître d’ouvrage SADE (Societa Adriatica di Elettricita) décide de mobiliser le glissement et d’en contrôler l’activité en ajustant vitesse de remplissage ou vidange et niveau du réservoir,
- cote 700 en décembre 1962, reprise des mouvements du versant, qui cessent avec l’abaissement du lac à la cote 650 en mars 63,
- cote 705 en juillet-août 1963, nouvelle reprise des mouvements,
- cote 710 atteinte mi-septembre, accélération des mouvements, on se décide à baisser,
- cote 700, le 9 octobre 1963 à 22h39, rupture en grand de tout le versant rive gauche sur 2 km de large et 1 km suivant la pente, fermant brutalement la gorge de retenue à une vitesse estimée de l’ordre de 20 à 30 m/s (env. 90 km/h).
La masse glissée sur le versant Nord du Mont Toc en rive gauche de la retenue, et comprimée dans son piémont, épaisse là d’environ 250 mètres, s’est déplacée en bloc de 300 à 400 m jusqu’à buter sur la rive opposée, et gonfler son pied de 140 m.
Dans les semaines précédentes, les vitesses de déplacement observées sur les repères topographiques étaient passées à 2-3 cm/jour, restant toujours inférieures aux valeurs maximales observées en 1960 (3,9 cm/jour). Les déplacements cumulés sur 3 ans (d’octobre 1960 à septembre 1963) atteignaient 3 à 3,8 m du côté ouest (le plus proche du barrage) de la masse en mouvement, et la moitié du côté est.
Dans les premiers jours d’octobre 1963, durant la baisse du lac, les vitesses de déplacement ont augmenté progressivement, jusqu’à environ 20 centimètres par jour dans la journée du 9 octobre. Il n’y a pas eu d’alerte ni d’évacuation des populations à l’aval.
Vajont avant (déjà 0,7 hm3 éboulés)
Source : Bernard Goguel
et après le glissement venu fermer le lac
Source : Bernard Goguel
CHAPITRE 4 : LA RECHERCHE EN MATIÈRE DE BARRAGES ET DIGUES
Fonctionnellement rattaché à la DRIRE Rhône Alpes, le Bureau d’Etude Technique et de Contrôle des Grands Barrages assure des missions d'assistance à la fois auprès des DRIRE, en donnant son avis sur les dossiers, en participant aux visites de barrages et auprès du Service Technique de l’Energie Electrique et des Grands Barrages en participant à la méthodologie, aux modules de formation des futurs contrôleurs d’ouvrages et en formulant des avis de synthèse sur le comportement des barrages.
Institut de recherche pour l’ingénierie de l’agriculture et de l’environnement, sous la double tutelle des ministères en charge de l’agriculture et de la recherche, le CEMAGREF est implanté sur neuf centres. Celui d’Aix-en-Provence est spécialisé sur la forêt méditerranéenne et le risque incendie, les risques liés à l’eau, les milieux aquatiques et l’impact de l’irrigation sur l’environnement. Il comprend trois unités de recherche, dont celle consacrée aux « ouvrages hydrauliques et hydrologie ».
Comme déjà mentionné, des milliers de barrages autorisés (dont quelque 300 intéressant la sécurité publique) et près de 10 000 km de digues de protection contre les inondations ont été construits sur le territoire national. Il s'agit d'ouvrages hydrauliques, anciens dans leur majorité, pour lesquels la sécurité doit être assurée sur le long terme. Les crues constituent pour ces ouvrages, comme pour les populations riveraines des cours d'eau, une source importante de risque. Dans un tel contexte, l'unité mène ses activités dans les domaines de la performance et de la sécurité des ouvrages hydrauliques (thème de recherche SECURE) et de l'hydrologie des crues et des étiages (thème de recherche TRANSFEAU). Elle est organisée en deux équipes :
L'équipe Ouvrages Hydrauliques travaille au sein du thème de recherche SECURE, sur la mise au point de méthodologies et de modèles pour le diagnostic et l'analyse de risques liés aux barrages et aux digues. La pathologie des ouvrages, l'étude de leurs processus de ruine (en particulier par érosion) et les moyens de prévention, sont au coeur des travaux de recherche ;
L'équipe Hydrologie traite du thème de recherche TRANSFEAU et s'intéresse à la connaissance régionale de la ressource en eau et à la prédétermination et à la prévision des crues.
Les activités sont fondées en grande partie sur des résultats d'essais et des mesures issus des deux laboratoires de l'unité (un laboratoire de mécanique des sols et un bassin versant de recherche expérimentale), ainsi que sur plusieurs systèmes d'information conçus et/ou administrés par cette même unité. Les travaux de recherche reposent aussi largement sur les expertises menées en appui au contrôle des ouvrages pour le ministère de l'Écologie.
L’activité du CEMAGREF se traduit aussi dans la production d’un certain nombre de guides techniques à destination des exploitants d’ouvrages ou des services de contrôle.
En matière de recherche, le CEMAGREF participe notamment au projet INTERREG III A FRAMEA (Flood forecasting using Radar in Alpine and Mediterranean Areas), en collaboration avec le CETP (CNRS, Vélizy), Météo - France et ARPA (région Piemonte, Italie) mais aussi au projet thématique du Conseil régional PACA sur la reconnaissance héliportée des digues (FLI-MAP), aux projets de l'Agence Nationale de la Recherche (ANR) tels que PIGE (Physique des Instabilités Gravitaires et ERINOH (Érosion Interne dans les Ouvrages Hydrauliques).
Il a participé au programme de recherche du MEDD :sur « Risque Décision Territoire 2003-2007 » concernant la sécurité des barrages d'altitude, et aux groupes de travail CFBR/CIGB sur la stabilité des barrages-poids/analyse de risques.
Enfin, le CEMAGREF est le noyau dur du PATOUH (Pôle d'Appui Technique OUvrages Hydrauliques) qui outre ses moyens (localisés essentiellement à Aix-en-Provence, mais aussi à Bordeaux, Grenoble et Lyon), associe des moyens du RST (réseau scientifique et technique) du MEEDDAT (une équipe du CETMEF et trois équipes dans les CETE). Il fait l'objet d'une convention signée en juin 2004, en cours de renouvellement et élargie à cette occasion au BETCGB, chargé par ailleurs d'une mission d'appui auprès des DRIRE concernant les barrages concédés.
Les missions du Pôle d'appui technique sont orientées vers les missions régaliennes de l'Etat, à savoir l'autorisation des ouvrages neufs et le contrôle de la sécurité des ouvrages en service intéressant la sécurité publique. Les interventions du Pôle s'exercent auprès des services déconcentrés (DDAF, DDE, Services de Navigation) pour des avis sur projets d'un ouvrage neuf ou de modification importante d'un ouvrage existant, pour des appuis techniques ponctuels sur tout point concernant la sécurité d'un ouvrage en service, pour des appuis aux différentes phases des revues décennales de sûreté, pour des parrainages d'agents nouvellement en charge du contrôle des ouvrages, et pour des appuis aux services lors de situations de crise entraînant des risques pour les ouvrages. Les interventions du Pôle s'exercent aussi au niveau national par la diffusion de guides et documents techniques, par l'animation de sessions ou journées de formation, par l'appui à la Direction de l'eau pour l'élaboration et l'évolution de la doctrine technique et de la méthodologie, en matière de conception, entretien, restauration, diagnostic et contrôle des ouvrages hydrauliques, notamment par l'élaboration et la diffusion de guides et documents techniques, par la gestion et l'exploitation de la base de données « BarDigues », recensant l'ensemble des barrages autorisés intéressant la sécurité publique et des digues de protection contre les inondations, par l'organisation de la collecte des données sur le vieillissement des ouvrages et la valorisation du retour d'expérience lors d'événements hydrologiques exceptionnels.
II - LES LABORATOIRES DES GRANDS EXPLOITANTS ET DES BUREAUX D’ÉTUDES
EDF développe dans ses laboratoires des recherches pour l’ensemble de son parc, qu’il soit thermique et nucléaire ou hydraulique. Les établissements sont situés à Aix en Provence et au Bourget du Lac. Le TEGG et au sein de la division Production Ingénierie Hydraulique (DPIH) la DTG et le CIH.
Le TEGG d’Aix en Provence a compétence dans trois domaines : le génie civil, la géologie – géotechnique, et le laboratoire d’essais intégré de génie civil. Il a pour missions les études, le conseil et l’assistance technique auprès des unités opérationnelles de la division Ingénierie et Services d’EDF.
Ces missions s’exercent dans toute la gamme des techniques et à tous les stades du processus d’ingénierie, des études à la réalisation et au retour d’expérience
La DTG, créée en 1946, est implantée sur 8 sites et regroupe 515 personnes. Elle interfère avec l’exploitant, apportant son appui sur les points les plus pointus. Elle assure le suivi en continu des auscultations des 447 centrales. La DTG participe à la politique de sûreté hydraulique, en définissant les principes de sûreté. Les estimations du risque d’après l’observation de 200 accidents en un siècle, font ressortir que 47% des ruptures interviennent lors de la phase de construction et de première mise en eau, 33% lors de submersion par crue, 20% par dégradation mécanique et vieillissement.
La DTG s’est dotée de deux centres d’Hydrométéorologie (est / ouest) pour la France, suite à l’accident du Drac. Elle apporte son appui en temps réel pour le risque « crue ». Si les événements climatiques sont considérés sans surprise, la modestie est de mise pour la connaissance des sciences de la terre.
Créé en 2000, le Centre d’Ingénierie hydraulique regroupe le Centre National d’Equipement hydraulique qui s’occupait des activités de premier équipement, et les Unités de Services et d’Ingénierie hydrauliques. Le CIH devient ainsi une ingénierie hydraulique intégrée, alliant une haute expertise à la création d’ouvrages neufs, à la connaissance pointue de la conduite et de la maintenance des ouvrages.
Le CIH compte 730 personnes en 2008, organisé en réseaux avec six antennes sur le territoire, permettant ainsi de répondre au mieux aux attentes des exploitants.
Le CIH pose le diagnostic de l’état des matériels et des ouvrages, en déterminant la méthodologie de cotation des matériels, et la réalisation des expertises mécaniques, en particulier sur les vannes et les conduites forcées ; il analyse et modélise les structures et les écoulements.
Il est aussi un des « bras armés » du programme SuPerHydro en maîtrisant dans la durée les risques et les défaillances d’ouvrages et d’équipements impactant la sûreté et les performances. Pour chaque famille et pour chaque risque de défaillance, il estime son occurrence.
Le CIH est notamment intervenu sur l’incident des Tuilières, le 29 janvier 2007.
Source : EDF CIH
Après l’effacement de la vanne centrale n°4, à 3 heures du matin, le CIH met en œuvre les travaux préparatoires de modification des nez de pile de barrage, la réfection des radiers, le confortement des piles, et la reconstruction de la passerelle supérieure.
Source : EDF CIH
En 2008, le CIH participe au montage des nouvelles vannes, et à la réalisation des alimentations électriques.
Le CIH participe aussi à la formation et au maintien des compétences des exploitants, grâce au simulateur de conduite en crue. Il participe activement à l’élaboration, l’optimisation et la vérification de consignes de crue des barrages mobiles en rivière. 19 sites ont été équipés en simulateur (SIMBA – BMR) en 2006-2007, le reste du parc - soit 71 aménagements concernés - doit voir son déploiement en 2008-2009.
Le CIH participe avec la DTG à l’organisation de journées de sensibilisation à la sûreté hydraulique et participe à la réflexion sur les études de danger. L’étude de dangers précise les risques auxquels le barrage peut exposer la population en cas d’accident, directement ou indirectement, que la cause soit interne ou externe à l’ouvrage.
Le laboratoire de la Compagnie Nationale du Rhône est installé à Lyon et travaille sur les modélisations de divers phénomènes. Votre rapporteur a déjà évoqué ses travaux sur la modélisation de l’éboulement de la Séchilienne.
3) LA PRISE EN COMPTE DES CHANGEMENTS CLIMATIQUES DANS LE RYTHME ET L’AMPLEUR DES CRUES
a) Une technique éprouvée : le barrage comme régulateur de crues, exemple de celui de Serre Ponçon
Source : EDF
Lorsque les media se sont fait l’écho de l’ouverture des vannes à Serre Ponçon le 28 mai, une certaine émotion s’est emparée des populations riveraines. Votre Rapporteur a fait le point avec Daniel PEPIN, le Directeur de l’unité d’exploitation Méditerranée.
C. Kert : Pourquoi EDF n'a-t-elle ouvert les vannes que le 28 mai? Aurait-on pu éviter de tels dégâts en aval de Serre-Ponçon? EDF se sent-elle responsable par rapport à cela?
D. Pépin : Cette crue a été d'une ampleur exceptionnelle puisque 500 millions de m³ sont rentrés dans Serre-Ponçon en 10 jours, ce qui représente plus du quart de la capacité de Serre-Ponçon. Comme vous le savez, nous gèrons nos ouvrages selon des consignes établies par avance par nos services et approuvées par les autorités préfectorales et la DRIRE. Dans nos consignes, la notion de crue est définie. C'est la conjugaison de plusieurs facteurs : l'atteinte d'une cote, d'un débit qui rentre, les prévisions météo, qui nous font basculer d'un état de routine d'exploitation de nos aménagements à un état de crue. On sait que l'on doit manoeuvrer telle vanne, à tel débit et à telle vitesse, en veillant à prévenir les autorités.
Avant le 28 mai, date du début du lâcher, la Durance était en crue mais le barrage en tant qu'ouvrage ne l'était pas. Le 28, on sentait qu'on ne pouvait plus contenir l'ensemble des débits qui rentraient. Une partie s'est retrouvée dans la rivière naturelle et l'autre dans le canal de Curbans.
L'état de veille a commencé dans la nuit du 25 au 26 mai. Cet état est fonction de la cote et du débit qui rentre. Là, on se concerte avec les mairies, les préfectures, les autorités. On vérifie que tout fonctionne au niveau des installations, on se réapproprie les consignes pour déterminer ce que chacun doit faire, on prévient les autorités qui se chargent d'alerter les habitants. On a une équipe qui collecte 24 h/24 toute l'information de Météo France et des experts, qui mesurent les débits afin de procéder à des ajustements au jour le jour. Bref, on sent qu'on doit ouvrir les vannes une douzaine d'heures à l'avance.
Les gens font le lien entre la crue et le barrage de Serre-Ponçon et ne font plus le lien entre la crue et l'épisode météo qu'on vient de subir. Nous ne sommes pas responsables de la crue, le barrage en absorbant la plupart des crues donne une fausse idée de sécurité. Nous-mêmes, EDF, sommes sinistrés. La route d'accès à l'usine d'Eygliers a été emportée par la crue du Guil, du matériel est mis en difficulté, des berges de nos canaux ont été attaquées par l'eau.
Source : EDF
C.K : N'auriez-vous pas dû ouvrir les vannes avant ?
D.P : Nos consignes ne nous le permettent pas et de toute façon, ça n'aurait rien changé parce qu'il aurait fallu un creux de 25 m pour encaisser la crue et c'est inimaginable fin mai. Pour respecter l'irrigation et la production électrique pour l'hiver et l'automne, nous sommes obligés de remplir le barrage au maximum en début d'été.
Au 16 mai, le niveau du lac se situait à la cote 775. On avait la place pour accueillir la fonte des neiges sans crue, laquelle était totalement imprévisible. Et puis, il y a eu ces précipitations et une fonte des neiges exceptionnelles. La cote maximum d’exploitation est à 780,50, la capacité maximum n’étant cependant pas atteinte afin d’éviter tout phénomène de submersion, 1 m de cote à ce niveau représente environ 25 millions de m3, et lorsque nous avons atteint la cote 780, il a fallu ouvrir les vannes. Le débit a été limité à 600 m³/s et nous n'évacuons pour l'instant que les deux tiers du débit entrant.
C .K : Pourtant, vous disposez d'appareils de mesures et des prévisions de Météo France...
D.P : Lors de situations perturbées, la météo nous donne une idée précise du temps quelques jours avant. Or, avec quelques jours d'avance, c'était trop tard pour réagir. Les prévisions de Météo France permettent d'obtenir au mieux des intensités de pluie, mais ça ne nous donne pas le débit. Nous disposons de toute une ingénierie qui permet de transformer cette prévision en un débit probable de rivières. On a ces prévisions à 8-10 jours. On est sur des phénomènes extrêmes, rares, donc improbables.
C .K : Sans barrage, que se serait-il passé ?
D.P : Les débits auraient été plus violents avec des pics plus importants. Nous avons obtenu un débit maîtrisé et amoindri par rapport au débit entrant. Au maximum des débits sortants, dans la nuit de jeudi à vendredi, jusqu'à 900 m³/s se sont retrouvés dans le lit naturel de la Durance. Sans le barrage, on aurait atteint une pointe de 1 200 m³/s à ce moment-là. Rappelons que le débit maximum prévu est de 3 440 m³/s. En ce moment, les débits sont à la baisse. Les vannes sont toujours ouvertes mais à un débit de 500 m³/s, nous allons continuer à baisser, et dès que les débits le permettront, les vannes seront refermées.
Les Haut Alpins et touristes s'arrêtent sur la route d'accès au Belvédère de Serre-Ponçon pour admirer le phénomène.
b) Des innovations techniques expérimentales, en France, au barrage de Puylaurent
Source : EDF
Capacité de stockage |
12 020 000 m3 |
Longueur de seuil |
31,2 m |
Nouvelle capacité du déversoir |
560 m3/s |
Nombre de hausses |
8 |
Hauteur des hausses |
1,1 / 2,6 m |
Largeur des hausses |
3,9 m |
Gain de stockage |
1er phase : 0 % 2ème phase : 12 % |
Gain de capacité du déversoir |
0 % |
Le barrage de Puylaurent est le dernier grand barrage construit en France.
Du type voûte en béton, sa hauteur maximale est de 73 m sur fond de fouilles. Le couronnement, d'une longueur totale de 220 m comporte en sa partie centrale le déversoir d'évacuation des crues en saut de ski. Une usine hydroélectrique est installée au pied du barrage sous le porte-à-faux du déversoir.
La retenue draine les eaux d'un bassin versant de 80 km2 de superficie. Sa capacité utile est de 12 000 000 m3 pour une surface totale de 60 hectares. L'évacuateur de crues permet d'évacuer la crue de projet fixée à 560 m3/s.
Initialement constitué de trois passes déversantes de 14 m de largeur à seuil libre, il a été modifié dans la perspective :
-d'une part de l'expérimentation du système HYDROPLUS;
-d'autre part, d'une augmentation à terme de la capacité de la retenue de 1 000 000 m3.
Deux phases de réalisation sont prévues :
- phase n° 1 : l'évacuateur est composé de 2 passes de 15,6 m de large ;
• le seuil du type CREAGER est dérasé de 1,1 m par rapport à la cote de retenue normale, son profil étant conservé ;
• 4 hausses « HYDROPLUS » de 1,1 m de haut sont installées sur chacune des deux passes.
- phase n° 2 : les hausses initiales sont remplacées par des hausses de 2,6 m de haut ;
• la conception du projet est telle qu'il n'y a pas de modification de génie civil ;
• la cote des plus hautes eaux est inchangée. L'alimentation des chambres des hausses n'est pas réalisée de manière classique à partir de puits intégrés aux hausses, mais par des conduits noyés dans le béton du barrage, débouchant vers des orifices de prise d'eau situés sous le niveau de la retenue lors du déversement.
Les hausses de la société Hydroplus
Source : Hydroplus
Source : Hydroplus
Plusieurs barrages présentent des signes de gonflement, et votre rapporteur en a visité deux : le barrage du Chambon et celui de Bimont. Pour un profane, les similitudes sont probantes, et pourtant ces deux barrages souffrent de maladies distinctes. Seule, l'analyse en laboratoire d'échantillons prélevés sur l'ouvrage permet de déterminer l'origine du gonflement. Le microscope électronique à balayage (MEB) est actuellement la seule technique permettant de caractériser, avec certitude, l'origine du gonflement : alcali-réaction ou/et réaction sulfatique (ettringite différée, l’ettringite étant un produit normal de l'hydratation des ciments).
En complément, il peut être nécessaire d'effectuer des analyses complémentaires, minéralogiques et chimiques ou des examens pétrographiques.
Ces examens permettent :
• d'obtenir des informations utiles sur la formulation du béton (nature des constituants, nature des granulats, type de ciment, dosage en ciment, teneur en alcalins, etc) ;
• de déterminer l'origine interne ou externe des sulfates.
Voici des exemples au microscope électronique à balayage
Source : LCPC
Le barrage de Chambon souffre de l’alcali-réaction, celui de Bimont souffre d’une réaction sulfatique interne.
Votre Rapporteur a donc rencontré les experts du Laboratoire central des Ponts et Chaussées qui mènent des études sur les pathologies du béton, et notamment M. Bruno Godart, qui a publié dans le rapport d’activité 2005 du LCPC un très intéressant article sur l’alcali-réaction. Je vous en livre ci-dessous quelques lignes.
a) L’alcali-réaction, maladie du Chambon
« Alcali-réaction ? Une réaction pathologique susceptible d'affecter le béton, et plus précisément une réaction chimique entre les alcalins du béton et certaines formes de silice ou de silicate pouvant être présentes dans les granulats, en présence de chaux. Elle provoque la formation d'un gel de réaction dont l'expansion peut engendrer un gonflement du béton, surtout en présence d'eau ou d'humidité. Les contraintes induites par la formation de ce produit de réaction créent des désordres dans le matériau : réseaux de fissures intra-granulaires, micro-fissurations autour des particules réactives, décollements à l'interface pâte de ciment-granulats. Le gonflement du matériau engendre à son tour une expansion de la structure, qui se fissure, et les contraintes internes générées au sein de la structure entraînent des surtensions dans les aciers passifs et actifs qui peuvent avoir des conséquences importantes sur la sécurité présentée par la structure ».
ü Un type de réaction connue depuis plus d'un demi-siècle
« Les premiers cas de ce type de dégradation du béton ont été identifiés en 1940 dans des chaussées en Californie. Puis, des cas ont été observés en Australie, en Nouvelle Zélande, en Afrique du Sud, en Chine, au Canada et au Japon. L'Europe n'a pas été épargnée, avec un premier cas au Danemark en 1950, suivi par l'Allemagne en 1965, la Grande-Bretagne à partir de 1975, et plus récemment l'Italie, la Belgique, la Norvège, l'Espagne et le Portugal. La France, elle, a identifié à la fin des années 1970 la présence d'alcali-réaction au sein de quelques barrages ».
ü La prévention, un objectif prioritaire
« À partir du moment où l'on savait qu'aucune solution de réparation fiable et pérenne n'existait, la priorité des recherches fut alors mise sur la prévention des désordres pour les ouvrages à construire.
En 1991, le LCPC publie des recommandations provisoires pour la prévention des désordres qui sont confirmées en 1994 et s'accompagnent alors de la publication de plusieurs normes et de méthodes d'essais LCPC pour pouvoir mettre en oeuvre les recommandations. Les recommandations du LCPC ont été un grand succès de la politique de prévention, car un peu plus de 10 ans après leur parution aucun nouveau cas d'alcali-réaction n'a été signalé parmi les nouveaux ouvrages construits. »
ü Les recherches sur le comportement du béton
« Une fois réglé le problème de la prévention, il fallait s'occuper des ouvrages malades sur lesquels les gestionnaires se posaient beaucoup de questions laissées sans réponse, notamment en matière d'évaluation de la capacité portante, d'évolution prévisible des désordres et d'actions de maintenance.
Une première opération de recherche a donc été lancée en 1992 afin de mieux comprendre les conditions de gonflement d'un béton victime d'alcali-réaction pour pouvoir modéliser son expansion, en se basant sur la mécanique des milieux poreux. Les principaux résultats de la recherche ont mis en évidence l'anisotropie et l'hétérogénéité intrinsèque du gonflement d'éprouvettes, l'absence de couplage de la mécanique sur le développement de la réaction chimique, l’importance de la porosité et de la fissuration qui constituent des vases d'expansion pour les gels gonflants et une cinétique de dégradation du matériau gouvernée par les apports d'eau extérieurs.
Source : LCPC
L'acquis le plus important est qu'un béton atteint d'alcali-réaction suit une loi de comportement sigmoïde (en forme de S) régie par trois paramètres indépendants : le gonflement asymptotique, le temps de latence, et le temps caractéristique ».
Expansion observée en laboratoire - Source : LCPC
Mais si l’on sait prévenir, aucune solution satisfaisante n’a été trouvée pour guérir, pour stopper le phénomène. La seule intervention possible sur un barrage semble la libération des contraintes par sciage des structures. Le comportement après gonflement pouvant empirer du fait du blocage de la structure, il peut être envisagé le sciage de certains éléments afin de libérer les contraintes nuisibles à cette dernière. Cette solution ne s'applique que dans des cas très particuliers et doit être reconduite au fur et à mesure de la poursuite de la réaction. Mais ceci ne peut se faire indéfiniment.
Réalisation d'une saignée par sciage à l'aide d'un fil diamanté. Source : LCPC
Les responsables de la filière hydraulique à EDF, et en premier lieu son Directeur M. Jean-François ASTOLFI, sont très attentifs à l’évolution du barrage du Chambon. De mémoire de rapporteur, il me semble avoir vu plus d’instruments de contrôle sur ce barrage que sur le reste des barrages visités. Des opérations très lourdes de maintenance, des carottages nombreux ont été faits l’an passé. Dès les résultats connus, une réflexion en profondeur sera menée s’il n’y a pas de fissurations trop importantes. Ce barrage a encore quelques dizaines d’années d’espérance de vie, de nouveaux sciages sont possibles, et même envisagés avant que l’on prenne plus en considération l’option Chambon 2, un nouveau barrage en aval, avec démolition de l’existant.
b) La réaction sulfatique interne (RSI), maladie de Bimont
La réaction sulfatique interne (RSI) peut être définie par la formation différée d'ettringite dans un matériau cimentaire, plusieurs mois voire plusieurs années après la prise du ciment, et sans apport de sulfate externe. Le terme « différée » signifie que l'ettringite n'a pas pu se former lors de l'hydratation du ciment, et ceci en raison d'un échauffement important du béton intervenant plusieurs heures ou plusieurs jours après son coulage.
Le phénomène de réaction sulfatique interne (RSI) résulte de la formation différée d'un minéral dénommé « ettringite ». Cette formation retardée de l'ettringite est susceptible de provoquer une expansion qui se manifeste par l'apparition à la surface du béton d'une fissuration multi-directionnelle à maille relativement large. Mais, l'ettringite n'est pas systématiquement délétère pour le béton puisqu'il s'agit d'un produit normal de l'hydratation des ciments.
Il faut distinguer le phénomène de réaction sulfatique interne (RSI), du phénomène de réaction sulfatique externe (RSE), connu depuis 1887, à la suite d'observations sur les mortiers des fortifications de Paris lorsqu'ils se trouvaient en contact avec des eaux gypseuses.
À ce jour, il a été constaté que les éléments en béton atteints de cette pathologie RSI :
• sont des pièces critiques, c'est-à-dire des pièces en béton pour lesquelles la chaleur dégagée n'est que très partiellement évacuée vers l'extérieur, ce qui conduit à une élévation importante de la température du béton ;
• ont été coulés en période estivale et ont subi une température estimée supérieure à 80 °C à cœur pendant le durcissement du béton ;
• ont été soumis à un environnement humide pendant plusieurs années.
Ces éléments peuvent être également des éléments préfabriqués ayant subi un traitement thermique très élevé.
Les causes, les mécanismes physico-chimiques et la cinétique de la réaction engendrant le phénomène de gonflement interne sulfatique, ainsi que l'incidence des divers paramètres intervenant lors de la réaction sulfatique, ne sont pas à ce jour parfaitement connus et font l'objet de nombreuses recherches. Néanmoins, il apparaît que la conjonction de plusieurs paramètres est indispensable pour amorcer et développer la RSI, ce qui explique vraisemblablement le faible nombre d'ouvrages actuellement recensés comme étant atteints par la RSI. Les paramètres primordiaux sont l'eau, la température et sa durée de maintien, les teneurs en sulfates et en aluminates du ciment, ainsi que la teneur en alcalins du béton.
Á ce jour, le seul traitement capable de ralentir cette progression est également le sciage des parties endommagées.
CHAPITRE 5 : LA REGLEMENTATION EST ELLE SUFFISANTE ?
I - L'ENQUETE DANS LES GRANDS PAYS DE BARRAGES
Afin de préparer sa participation au 76ème Congrès annuel de la Commission internationale des grands barrages, votre rapporteur a consulté, grâce au réseau de nos missions économiques dans les grands pays du monde, les responsables publics ou privés du monde des barrages et des digues. Une synthèse par pays de cette enquête figure en annexe.
Il en ressort que l’organisme de contrôle est souvent unique, que l’ouvrage soit concédé ou non, de grande taille ou non, à usage hydroélectrique ou non, ce qui incitera votre rapporteur à formuler une recommandation.
II - LA LOI EST UNIQUE, MAIS L'APPLICATION EST LOCALE.
Votre rapporteur a tenu à s'inspirer de l'exemple décentralisateur de la Suisse en matière de gestion des risques et, singulièrement, dans le contrôle et la surveillance des barrages, nombreux et très diversifiés en ce pays.
Entre l'échelon fédéral et le canton, la symbiose est totale puisque toutes les informations cantonales « remontent » à l'échelon fédéral doté d'un solide service de l'eau qui « inspire et promeut » toutes les politiques cantonales.
Les Suisses cherchent à être au plus près de la réalité de terrain et leur connaissance des barrages par une cartographie « en avance » sur celle de la France a de quoi séduire. Néanmoins, les problèmes de responsabilité s'y posent comme chez nous et les agents cantonaux consacrent par obligation une part importante de leur temps « sur le terrain ».
En revanche, c'est l'unicité des techniques et des moyens de contrôle qui peut nous interpeller, unicité qui permet aux équipes de travailler réellement en totale connaissance des dossiers. Les Suisses évitent ainsi les conflits de compétences. C'est ce critère là que nous pourrions le mieux transposer à nos méthodes.
Sur le plan strictement technique, étant observé que la Suisse n’a pas identifié d'exemple de barrages atteints de phénomènes de maladie du béton indiquant de « tailler » des espaces de « respiration », nos pratiques de contrôle sont assez proches, les matériels utilisés étant souvent identiques.
Ajoutons qu'une coopération étroite entre la France et la Suisse est constante, les équipes de barragistes des deux côtés de la frontière ayant des rencontres professionnelles fréquentes.
III – L’APPLICATION DU DECRET DE DECEMBRE 2007 ET SES DÉFAUTS
La classification doit elle être complétée ?
La définition des classes de barrage repose dans le monde sur la hauteur du barrage et le volume de la retenue, critères de la CIGB. La France combine ces critères avec une formule mathématique, plus complexe qui donne une meilleure approche du danger potentiel.
Toutefois, cette complexité ne permet pas d’envisager tous les cas. Dans le cas présenté du barrage des 3 Vallées, du fait des caractéristiques de l'ouvrage et de l'application stricte du décret de 2007, ce barrage entre de fait dans la catégorie D. Or, l'occupation du sol à l'aval pourrait justifier un sur-classement en catégorie C voire B.
Doit-on pour autant le surclasser de deux classes ? Le décret, sur la partie « barrages » contrairement à celle concernant les « digues », ne prend pas en compte les victimes potentielles du fait de l'ouvrage. C’est une libre appréciation des services, toujours susceptible de recours de la part des propriétaires de l’ouvrage. Ceci révèle aussi l’absence de plan de prévention des risques, puisque sur 17 064 communes où un risque inondation a été identifié, on ne compte que 3 724 communes avec un PPR inondation prescrit, 126 qui l’appliquent par anticipation et 5 690 communes où le PPR est approuvé.
Lors de la révision des PLU, l’attention des communes doit être attirée sur les terrains en aval d’ouvrage, quitte à les rendre non constructibles.
Rassurant en définitive, ce rapport ? Pas forcément.
Certes nous ne sommes pas dans l’hypothèse du risque immédiat d’une catastrophe aux dimensions imprévisibles et le spectre de Malpasset semble, heureusement, éloigné, en raison du renforcement de la réglementation, mais aussi des progrès techniques en matière de construction, de gestion de la maintenance et de contrôle des barrages.
Paradoxalement, c’est, à l’origine, en portant notre expertise sur les grands barrages que nous avons mis à jour les multiples problématiques environnementales et règlementaires posées par les milliers de petits barrages français que le nouveau décret ordonne – majoritairement – en classe D, et pour lesquels les solutions qui devront être apportées pour assurer leur sécurité ne pourront en aucun cas être uniformes et homogènes.
Car, au terme de son analyse, votre rapporteur n’a pas acquis la certitude que l’avenir ne serait pas susceptible de réserver quelques mauvaises fortunes. Il fonde ses doutes sur plusieurs éléments essentiels.
1) LES LEÇONS DE LA COMMISSION INTERNATIONALE DE SOFIA
Quarante-huit heures d’immersion dans la réflexion d’une Commission Internationale des Grands Barrages, rencontre planétaire annuelle sur ce thème, obligent à « ouvrir les yeux » sur certains dysfonctionnements internes que seuls des témoignages venus de l’étranger permettent de relever ou de confirmer.
. Les deux niveaux de contrôle
Ainsi en est-il du contrôle à double niveau : effectué par les DRIRE pour les grands barrages hydroélectriques, par les DDAF pour les autres barrages.
Certains des pays dont nous avons rencontré les représentants se sont dotés ou disposent, de longue date, d’un corps unique de contrôleurs, permettant probablement à ces derniers d’être mieux aguerris à toutes les techniques. Certes, les agents des DDAAF bénéficient désormais d’une formation de qualité, le plus souvent dispensée par le CEMAGREF, dont on peut penser qu’elle les met au niveau des techniciens des DRIRE. On peut néanmoins réfléchir à l’unicité du contrôle, notamment dans le cas de barrages « moyens » dont l’impact environnemental est loin d’être négligeable.
Votre rapporteur doit avoir l’honnêteté de dire que les techniques françaises de surveillance paraissent faire référence pour un nombre important de pays adhérents à la Commission Internationale des Grands Barrages. Mais disons également que ces appréciations se nuancent pour la gestion et le contrôle des petits barrages, même si les rencontres de Sofia n’avaient pas mission d’aborder ce niveau technique.
. Le risque sismique au prisme de l’expérience chinoise.
La délégation chinoise présente à Sofia a apporté un éclairage intéressant à l’une des préoccupations de votre rapporteur : le lien entre sismicité et dangerosité – ou fragilité – des barrages. Bien que le chef de cette délégation nous ait assuré que la situation était « parfaitement sous contrôle », votre rapporteur a bien compris que, dans un contexte d’intensité sismique, exceptionnelle certes, les barrages étaient probablement les structures bâties les plus préoccupantes. L’hypothèse selon laquelle un barrage est une structure qui, par essence, résisterait mieux que d’autres à un séisme ne trouve que partiellement sa vérification. Certes les barrages chinois ne se sont, effectivement et heureusement, pas effondrés, mais des dégâts probablement importants y ont été recensés. On sait que la Chine, pays hautement sismique, se doit de « préparer » tous ses ouvrages à la survenue potentielle d’un séisme. Il y a fort à parier que, dans la France des années soixante et soixante-dix, au cours desquelles bon nombre de nos barrages hydroélectriques ont été réalisés, la préoccupation sismique n’était pas perçue avec la même acuité. Ce n’est pas un hasard si votre rapporteur a tenu à organiser, en parallèle à ses visites « sur le terrain », une table ronde sur ce sujet ; il l’a fait en songeant aux barrages construits et exploités dans les zones sismiques de la région alpine et bas alpine, des Pyrénées et même du bassin rhénan.
2) LA MOSAÏQUE DES PETITS BARRAGES
Il n’y a pas un cas unique d’école pour traiter la thématique des petits barrages sur le territoire français. Redisons-le : le seul département du Gers compte 2 850 barrages dont, bien sûr, certains sont de petites retenues collinaires ; mais ce seul chiffre laisse bien percevoir l’extrême variété des situations que l’on peut rencontrer à travers le pays. Votre rapporteur pense avoir clairement décrit cette situation dans son rapport. Cette diversité expose les décideurs à plusieurs inconnues ou incertitudes.
. La classification élaborée par le décret du 11 décembre 2007 permet- elle de faire face à toutes les situations ?
La classe D des barrages ne tient pas compte explicitement des personnes exposées au risque de rupture. On peut donc envisager de classer un barrage de classe D présentant un risque pour les populations en classe C, voire B, sans que cela ne soit de droit. Cette latitude devrait être plus explicite, à l’instar de ce qui est fait pour le classement des digues.
. La question du financement
Si le recensement des petits barrages effectué laisse apparaître un certain nombre de cas préoccupants d’obsolescence, les aménagements en leur aval pouvant être affectés par des désordres sur le bâti, quel opérateur disposera des financements nécessaires pour faire face aux situations les plus criantes ? Votre rapporteur s’est entretenu avec des maires, des conseillers généraux, des propriétaires privés ou même de petits syndicats d’aménagement qui ne disposent pas, en l’état, de la capacité à financer des travaux que l’on pourrait exiger d’eux. Certains de ces ouvrages servent de régulateurs de crues. Comment faire l’économie de leur maintenance ?
. La compatibilité entre les textes
Certains propriétaires ou simples exploitants envisagent de financer leurs travaux de réhabilitation par des aménagements hydroélectriques et donc par le turbinage des eaux de leur retenue. Le plus souvent, ce turbinage se trouvera en contradiction avec la loi sur l’eau qui protège la biodiversité.
Dans le cas de Cenne Monestiés, l’action volontaire du maire pourrait être exceptionnellement soutenue par le fait que depuis fort longtemps les aménagements d’une turbine ont été prévus dans l’ouvrage. Mais, pour un exemple où le recours à l’hydroélectricité sera probablement rendu possible – aux dires même des représentants de la DDAF- combien d’autres se verront opposer un refus en vertu de la loi sur l’eau ?
Même interrogation sur la compatibilité des textes en ce qui concerne l’aménagement de digues. « Une bonne digue – nous a-t-on affirmé – est une digue sans aucune arborescence, sans végétation ». Et c’est effectivement ainsi que les ouvrages du Bas Rhône ou de la Loire sont conçus. Mais tel n’est pas le cas d’aménagements de digues le long de cours d’eau, de dimensions plus modestes, sur lesquelles les opérateurs veillent, en vertu du principe de respect des biodiversités, à laisser les talus - digues plantés d’arbres parfois denses et élevés. Or, à l’évidence, il ne peut y avoir deux textes qui s’affrontent sur une même problématique : la végétation avec racines profondes constitue un handicap pour la solidité d’une digue, où qu’elle soit et de quelque dimension qu’elle soit.
. La mise en cohérence de la gestion des digues
Il en est des digues comme des barrages. Ce ne sont plus – ou quasiment plus – les grands aménagements de digues qui posent problème. Désormais, de puissants syndicats d’aménagement ont pris le relais des collectivités locales pour donner cohérence à des « plans digues », seuls capables de dresser des ouvrages solides, uniformes, surveillés, entretenus.
Mais tel n’est pas le cas de la myriade de tentatives d’aménagement de digues le long de cours d’eau, de petite et moyenne importances, pour lesquelles les DDAF doivent affronter une multiplicité de propriétaires riverains, parfois même, se heurtent à la difficulté de connaître ces propriétaires, et pour lesquelles toute tentative de coordination apparaît comme une « main mise » de l’Etat sur les territoires. D’où l’importance des rapports élus - administration.
. Le dialogue entre les élus et l’administration départementale
Pour avoir participé – ou assisté – à des échanges entre élus locaux et représentants des DDAF, votre rapporteur a acquis la conviction que si, globalement, ces échanges sont fructueux et courtois, certains points constituent des pierres d’achoppement et d’incompréhension. Il est des cas où seule la bonne volonté personnelle des protagonistes permet de poursuivre un dialogue et un échange salvateurs. En l’état, il ne peut en être autrement lorsque l’administration contraint les élus sans apporter de solutions pratiques ni financières.
Dans les zones particulièrement concernées par la présence de multiples barrages, nous avons noté l’implication personnelle des préfets de ces départements.
. L’environnement des barrages
Le recensement porte donc sur l’état de santé de tous les barrages français. Mais, l’une des données nouvelles qui doit être traitée, concerne « l’environnement » de ces barrages. En effet, au cours des années de l’après guerre, la France rurale a beaucoup changé : routes départementales, zones de loisirs, lotissements, petites zones d’activités se sont implantés au gré des évolutions en aval des barrages et sans qu’une coordination territoriale n’ait toujours été assurée. Votre rapporteur a visité, ahuri, un camping situé sous un barrage et dont les propriétaires exercent une petite surveillance de l’ouvrage. Il a sillonné les travées d’un village de vacances (600 bungalows) doté de deux retenues étagées ! Les barrages sont en bon état. Mais quid d’une crue brutale et de caractère exceptionnel comme un été pluvieux dans la région concernée peut en produire ?
Il faut envisager rapidement de coordonner recensement et programme de travaux, en prenant en considération la présence d’activités humaines dans le périmètre des ouvrages.
3) LA RECHERCHE SE POURSUIT, LA FORMATION DES AGENTS S’INTENSIFIE. MAIS, CHEZ CERTAINS, LE CULTE DU MYSTÈRE PERSISTE
Malgré une tentation naturelle à considérer que « les choses vont pour le mieux » et confortée dans cette certitude par l’élaboration et la mise en pratique du plan « SuPerHydro », évoqué dans ce rapport, EDF, consciente néanmoins que son patrimoine de grands barrages constitue, par sa nature même, un danger potentiel, poursuit ses recherches et ses formations dans un certain nombre de directions :
- la géologie, pour les fondations des barrages et la résistance des sols aux séismes,
- la maladie des bétons, terminologie que les techniciens préfèrent à la dénomination plus journalistique de « cancer du béton ». L’application la plus probante de ces recherches pourra être réalisée sur le barrage isérois du Chambon, considéré comme un cas très particulier, puisqu’il a fallu « cisailler » le béton pour que les entailles ainsi créées servent de « dilatation » à la poussée boursoufflante du béton.
L’initiative peut également venir du privé. Il nous a été donné de rencontrer les représentants d’une société française qui propose des aménagements permettant à un barrage de résister à une crue exceptionnelle susceptible de le submerger. Il s’agit de « blocs culbuto » dont nous n’avons pas eu à vérifier l’efficacité sur un terrain déterminé mais dont la conception paraît intéressante pour des cas déterminés d’ouvrages de dimensions moyennes.
Les formations
Longtemps demandeurs de formations identiques, les agents des DRIRE et des DDAF disposent désormais d’outils et d’espaces de formation pour toutes les opérations à conduire dans le suivi des barrages. Tant le Bureau d’Etude Technique et de Contrôle des Grands Barrages que le CEMAGREF proposent ce type de formations, avec des outils autorisant une mise à niveau permanente. Ce qui « évacue » le vieux grief, exprimé à l’encontre des Directions Départementales de l’Agriculture et de la Forêt, selon lequel le niveau de formation en la matière des agents de celles-ci était trop hétérogène.
Nous sommes donc entrés désormais dans une période de progrès, sur les plans technologique et règlementaire. Mais, dans ce domaine, votre rapporteur a noté la grande réticence tant des exploitants que du contrôle à « montrer ce qui ne va pas ou va moins bien ». L’épisode où, afin d’identifier les travaux à mener en urgence, nous avons constaté, dans l’Ariège, une grande mare invisiblement turbinée retenue par un mur, ouvrage pour lequel l’accord entre EDF et la DRIRE semblait parfait devant les caméras de télévision, montre bien la volonté de conserver cette part de mystère qui va si bien à l’être humain et…si mal aux ouvrages qu’il construit !
C’est donc à la fois pour vaincre cette part de mystère et pour répondre à un certain nombre d’inconnues pointées tout au long de ce rapport, qu’au nom de l’Office Parlementaire, votre rapporteur a hiérarchisé dix recommandations qui lui paraissent déterminantes pour assurer l’avenir de la sécurisation dans la gestion des barrages et ouvrages hydrauliques français.
Le rapporteur, après avoir rappelé que la saisine de l’office avait été consécutive à la publication d’un article de « Capital » en février 2007 stigmatisant des insuffisances dans le contrôle et la maintenance des installations de sécurité dans les grands barrages hydrauliques français, a indiqué que, dès l’étude de faisabilité, il avait fait part de ses doutes quant à la nécessité d'entreprendre une étude à ce sujet, tant les assurances apportées par EDF et l'annonce de la publication d'un décret sur la sécurité de l'ensemble des barrages en France apparaissaient de nature à apaiser les inquiétudes suscitées par cet article.
Cependant, le rapporteur a observé que, si les grands barrages hydroélectriques posaient moins de problèmes qu'il n'y paraissait, l'infinie variété de petits barrages présentait, elle, sous certains aspects, de véritables risques auxquels venaient s'ajouter ceux des digues dont la politique d'entretien, jusque là très hétérogène, suscitait bien des interrogations.
Le décret du 11 décembre 2007 est venu mettre de l'ordre dans la classification des digues et des barrages et dans les mesures à prendre pour assurer leur contrôle, leur mise en sécurité et leur maintenance.
Alors même que le rapporteur travaillait sur l'une des thématiques du risque d'effondrement des barrages, le risque sismique, l'énorme séisme chinois dans la région du Sichuan, est venu par ailleurs jeter une actualité particulière à ce sujet.
Le rapporteur, rappelant que la France est un pays à sismicité modérée, a toutefois souligné que la plupart des grands barrages de classe A se situait dans les zones les plus sismiques.
Enfin, dès les premières rencontres sur le terrain, s'est dégagée une nouvelle thématique : le statut de certaines digues et de certains barrages, les régimes de contrôle et de responsabilité y afférents, les relations entretenues entre l’administration et les élus locaux dans ce domaine et la faisabilité financière des opérations de mise aux normes de certains ouvrages, tels que certaines retenues d'eau surplombant des centres de vacances, des campings ou des zones d'habitat.
Qu'il s'agisse d'un « mastodonte » de 100 mètres de haut ou d'un ouvrage de 8 mètres, tout barrage peut être exposé à 4 types de risques :
- les défauts de maintenance et de contrôle, eu égard à l'obsolescence des matériaux,
- les crues,
- les accidents de terrain, mouvements ou glissements,
- les séismes, celui de référence se situant à 3,5 sur l'échelle de Richter.
Selon le rapporteur, l'exposition au premier risque constituera toujours une circonstance aggravante pour les trois autres et à la question « Peut-on encore, depuis Malpasset et la mise en place d'une politique de sécurité des barrages, craindre la rupture d'un barrage ? », le rapporteur a répondu que si cette probabilité était relativement faible, on ne pouvait l'exclure, au regard des conséquences potentielles d'un tel événement. Au cours du 20ème siècle, 1% des barrages à travers le monde se sont rompus. Dans la seule période de 1959 à 1987, 30 accidents de rupture de barrages ont été recensés faisant 18 000 victimes.
Après avoir examiné les différents stades de contrôle des barrages et ouvrages de toutes classes, le rapporteur a rendu compte de visites sur le terrain où des situations parfois ubuesques lui ont été présentées. Il a souligné aussi la nécessité d’unifier les instances de contrôle et de poursuivre les études sur les maladies du béton.
Á la suite de la présentation du rapport, un débat s’est engagé.
M. Claude Birraux, député, président, après avoir félicité le rapporteur pour la qualité de ses travaux et la présentation pédagogique de ceux-ci, a posé une question sur les compétences exercées par le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) dans le domaine étudié.
M. Christian Kert, député, rapporteur, a indiqué que le champ d’intervention de cet organisme se limitait à l’examen des fondations des barrages et aux risques sismiques, l’essentiel des compétences en matière de sécurité des barrages et ouvrages hydrauliques étant exercées par le CEMAGREF (Institut de recherches pour l’ingénierie de l’agriculture et de l’environnement) et le Bureau d’études techniques et de contrôle des grands barrages (BETCGB), qui est un service ministériel.
M. François Goulard, député, a formulé plusieurs observations :
Des outils performants de surveillance à distance et d’investigation sont aujourd’hui utilisés, qui donnent des garanties en matière de sécurité.
Les maladies du béton, pour lesquelles on manque de recul et qui affectent la résistance de l’ouvrage, sont un sujet de préoccupation à prendre au sérieux.
Le rapprochement des DRIRE et des DRAF risque d’affaiblir l’efficacité des contrôles car on assiste à une raréfaction inquiétante des ingénieurs des services techniques extérieurs de l’État, conduisant au dépérissement d’une culture technique de bon niveau, qu’un rapprochement des corps ne pourra pas compenser ; celui-ci n’est pas une garantie de la compétence technique des personnels, dont les effectifs doivent être suffisants, eu égard à l’éparpillement des petits barrages.
Le niveau de compétences des techniciens français est encore reconnu à l’étranger, mais il serait opportun de faire évaluer le système français de contrôle par des experts étrangers, notamment européens.
M. Christian Kert, député, rapporteur, a répondu que les recherches sur les maladies du béton devaient se poursuivre, que l’unicité des formations était souhaitable pour améliorer le niveau des compétences, et que chaque année, au sein de la commission internationale des grands barrages, des échanges fructueux avaient lieu sur les différentes méthodes utilisées, sans que cela ne concerne le contrôle externe, lequel est pratiqué en Suisse.
M. Henri Revol, sénateur, premier vice-président, après avoir souligné le niveau de haute technicité mis en œuvre pour assurer la sécurité des grands barrages d’EDF, a observé que la mise en conformité des petits barrages se heurtait à l’insolvabilité de certains propriétaires.
M. Christian Kert, député, rapporteur, a alors observé que le renouvellement des concessions actuellement dévolues à EDF était susceptible de poser la question de la sécurité des grands barrages en des termes nouveaux.
Mme Marie-Christine Blandin, sénatrice, a abordé plusieurs questions :
En ce qui concerne la « bétonite », qui a affecté les États qui furent placés sous l’autorité coloniale de la France, l’apparition de défauts dans les constructions, notamment celles soumises aux attaques du climat tropical, est susceptible de susciter une forte demande d’aide technique auprès des services français censés avoir trouver les solutions adéquates pour lutter contre les maladies du béton.
D’autres endroits que les digues peuvent constituer des refuges pour préserver la biodiversité, mais on peut se demander si la végétation présente réellement un risque pour la sécurité des petits ouvrages hydrauliques.
Lors du Grenelle de l’environnement, des syndicats agricoles ayant réclamé la confection de retenues d’eau en milieu rural, on doit s’interroger sur les conditions techniques à exiger de telles réalisations.
M. Christian Kert, député, rapporteur, a précisé que si la digue de protection devait être exempte de végétation, car les racines pouvaient constituer des points de faiblesse, les talus pouvaient sans risque être arborés.
M. Jean-Claude Etienne, sénateur, a estimé qu’il convenait de garder une approche critique des études réalisées sur les « maladies du béton », car la définition elle-même de ces maladies reste très imprécise et les traitements opérés, dont il conviendra de démontrer leur efficacité, semblent encore rudimentaires.
Après que M. Christian Kert, député, rapporteur, eut indiqué qu’une des recommandations proposait de poursuivre les recherches sur ces « maladies », l’office a adopté le rapport.
LES GRANDS BARRAGES HYDROÉLECTRIQUES
1.- Obtenir d’EDF, l’assurance d’un suivi et d’une maintenance ne nécessitant plus un nouveau plan « SuPerHydro ».
Le travail de réflexion des ingénieurs d’EDF, qui a servi de base aux articles de presse et a alimenté la polémique de 2007, faisait référence à des dysfonctionnements sur certains des barrages relevant de ce Plan et à certaines autres installations y échappant. Ledit plan était en gestation au moment où cette analyse critique interne était publiée, laquelle intégrait des éléments qui ne figurent pas dans « SuPerHydro ».
Il faut donc veiller à ce qu’il n’y ait pas de « SuPerHydro 2 », mais bien l’intégration dans le budget d’EDF d’une enveloppe suffisante pour faire une maintenance appropriée et de qualité, et donc maintenir l’entretien à un point d’équilibre.
2.- Un décret à paraître prochainement doit modifier les décrets antérieurs relatifs à la concession et à la déclaration d’utilité publique des ouvrages utilisant l’énergie hydraulique. Son objet principal est de définir les modalités du processus de mise en concurrence des concessions hydroélectriques. Ce texte doit impérativement considérer que la sécurité des ouvrages et de leur exploitation constitue un élément essentiel des dossiers de renouvellement. Nous devons être certains de la qualité des éventuels repreneurs de l’exploitation des sites EDF.
3.- Sitôt le recensement en 4 classes, tel que prévu par le décret de 2007, réalisé, il faudra exiger des services de l’État un audit de l’environnement humain des barrages les plus exposés à un risque ou dont la densité démographique ou d’activités est telle qu’elle peut constituer un péril naturel en cas d’incident sur le barrage. Il appartiendra aux préfets des départements concernés de prendre toute mesure de prévention en fonction de ce double « tableau de bord » : état « sanitaire » du barrage, situation de l’environnement humain de l’ouvrage.
4.- Dans le cadre de leur « politique de l’eau », les conseils généraux des départements les plus exposés à un risque « barrages » devront prendre en charge financièrement les ouvrages de collectivités territoriales dont le recensement mettra à jour la dangerosité et dont, à l’évidence, ces collectivités locales - compte tenu de leur surface démographique et financière - ne pourront assumer les investissements nécessaires à une mise en sécurité.
5.- Pour les barrages appartenant à des propriétaires privés ou a des associations privées, il appartiendra à l’autorité de contrôle d’exiger, après recensement, la réalisation des travaux de confortement, sécurisation, maintenance, dans un délai de 5 ans maximum. Au-delà de ce délai, il appartiendra au Préfet du département concerné d’exiger la réalisation des travaux ou de prononcer la mise en péril de l’ouvrage et sa démolition.
6.- Il est nécessaire d’impulser une nouvelle politique d’aménagement des digues en France. Si les exemples des syndicats d’aménagement du Rhône ou de la Loire sont de nature à rassurer, ils ne doivent pas obérer la carence d’une politique d’ensemble sur un réseau « chevelu » de digues le long de cours d’eau de petites et moyennes dimensions.
Les Directions Départementales de l’Agriculture et de la Forêt ont besoin d’indications précises sur la conduite à tenir dans la mobilisation des collectivités et des propriétaires riverains privés. Elles ont également besoin d’un véritable « code de bonne conduite environnementale » quant aux équilibres à tenir entre la réalisation de digues solides et efficaces et le respect d’une écologie territoriale.
7.- La recherche doit se poursuivre dans le domaine de la résistance sismique des ouvrages hydroélectriques et, plus largement, pour l’ensemble du parc de barrages français. On ne peut pas se satisfaire de l’affirmation selon laquelle un barrage résiste mieux au séisme que toute autre structure bâtie. La France n’est pas un pays à forte sismicité certes mais à sismicité modérée (le dernier séisme meurtrier en France, celui de Lambesc en 1909, le long de la faille de la Trévaresse, était de 6,2 sur l’échelle de Richter) ; cependant, quatre grandes régions sont identifiées comme sismiques et les grands barrages y sont les plus nombreux. Des équipes travaillent sur cette problématique ; elles doivent être soutenues, car l’exemple récent de la Chine nous montre que nous ne savons pas tout du comportement des barrages en cas de tremblement de terre.
8.- La maladie du béton.
Elle avait affecté un barrage à vocation de retenue agricole dans le sud de la France, au sortir de la guerre. Elle affecte un certain nombre de grands barrages, dont celui du Chambon en Isère, qui « bouge » sous la poussée de « l’épidémie ». L’évolution des techniques n’empêche pas, pour l’instant, que des ouvrages récents puissent être atteints d’alcali - réaction ou d’une réaction sulfatique interne. Il est donc indispensable que les laboratoires qui travaillent sur ces maladies poursuivent leurs recherches et que la communauté des « barragistes » soit tenue informée des progrès de ces recherches. En d’autres termes, ces progrès ne doivent pas rester le secret des inventeurs et des seuls opérateurs qui leur passent commande.
9.- Profiter de la préfiguration de la Direction Générale de Prévention aux Risques, pour créer une dynamique d'unité des moyens et des méthodes de contrôle et de surveillance.
Parce que la nouvelle direction de la prévention des risques (DGPR) se met en place au sein du Ministère de l'Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire, il est légitime d'exiger que, sur le fondement de cette création et de sa mission, notamment dans la mise en oeuvre des politiques de sécurité industrielle, cette direction s'attache à créer les conditions d'un contrôle unifié sur tout le territoire en ce qui concerne tant les équipes en place que les moyens dont elles disposeront.
Le rapprochement envisagé des DRIRE et des DIREN, et celui des DDAF et des DDE, doit aider à la réalisation de cet objectif indispensable.
10.- Devant la perte de savoir possible suite au ralentissement de la construction de nouveaux barrages en France, il serait souhaitable de bénéficier de l’expertise étrangère.
Votre rapporteur suggère que la CIGB qui est un outil efficace pour la confrontation des idées, la présentation des innovations, l’exploitation des retours d’expérience, se dote d’un corps d’experts internationaux pour effectuer chez les membres de cette organisation des inspections approfondies, du type visite décennale ou après incident important.
Quelques définitions et leur application au monde des barrages et ouvrages hydrauliques.
Appui : partie latérale de la vallée contre laquelle le barrage est construit. Un appui artificiel (ou culée) est parfois construit en béton pour reprendre la poussée d’un barrage-voûte quand il n’y a pas d’appui naturel.
Auscultation : mise en œuvre d'appareils de mesures installés dans ou auprès d’un barrage pour évaluer le comportement et les performances d’une structure.
Barrage : ouvrage artificiel construit en travers d’une vallée et qui permet de retenir de l’eau ou tout matériau transporté par l’eau, ceci dans le but de créer une retenue d’eau et d’en contrôler le débit.
Barrage à contreforts : barrage dont le mur amont repose sur une succession de contreforts. Ces barrages peuvent notamment comporter une dalle plane amont ou des contreforts élargis à l’amont ou des voûtes entre les contreforts.
Barrage de dérivation : barrage construit pour faire dériver l’eau d’un cours d’eau dans une autre direction.
Barrage en béton compacté au rouleau : barrage-poids construit avec un béton peu humide, amené sur le chantier et compacté sur place, à l’aide de gros engins tractés à rouleaux vibrants.
Barrage en enrochements : barrage en remblai dont plus de 50% du volume total comprend des blocs compactés ou déversés, des rochers, des fragments rocheux ou de la roche de carrière de dimension généralement supérieure à 10 cm.
Barrage en maçonnerie : barrage construit principalement en pierres ou briques avec des joints en mortier. Ce terme ne s’applique pas aux barrages n’ayant qu’une façade en maçonnerie.
Barrage en remblai : barrage construit en matériaux naturels trouvés et extraits sur place ; il s’agit des barrages en terre ou en enrochement.
Barrage en terre : barrage en remblai formé de plus de 50 % de terre compactée.
Barrage-poids : barrage construit en béton et/ou en maçonnerie et dont la stabilité est due à son propre poids.
Barrage-voûte : barrage en béton ou en maçonnerie incurvé vers l’amont afin que la plus grande partie de la poussée de l’eau se transmette sur les rives.
Barrage à voûtes multiples : barrage à contreforts présentant plusieurs voûtes en amont.
Bassin de tranquillisation : bassin construit à l’aval d’un barrage pour dissiper l’énergie de l’eau, provenant par exemple d’un évacuateur, afin de protéger le lit de la rivière de l’érosion.
Bassin hydrographique : zone drainée jusqu’à un point particulier d’une rivière ou d’un cours d’eau (exprimée en km²).
Bassin versant : le bassin versant est, pour un barrage, la zone située en amont du barrage (souvent exprimée en km²). Les précipitations tombants dans le bassin versant d’un barrage ont vocation à ruisseler et couler jusqu’au barrage
Batardeau : structure temporaire réalisée pendant les chantiers afin que la construction des ouvrages définitifs puisse se faire à sec. Un batardeau de diversion permet de faire dévier un cours d’eau dans une conduite, un canal, un tunnel…
Berges de la retenue : limites de la surface de l’eau de la retenue.
Capacité des évacuateurs : débit maximum qui peut passer par les évacuateurs de crues d’un barrage quand le réservoir est à son plus haut niveau (exprimé en mètres cubes par seconde)
Chenal d’évacuation : chenal ouvert ou conduite fermée permettant le passage de l’eau de l’évacuateur jusqu’à la rivière en aval.
Compactage : action mécanique qui consiste à accroître la densité d’un matériau en réduisant les vides.
Conduite : un passage fermé qui permet de faire passer l’eau à travers, autour ou au dessous du barrage.
Conduite forcée : conduite amenant l’eau sous pression depuis le réservoir jusqu’à la centrale hydroélectrique.
Couronnement : haut d’un barrage en béton ou en maçonnerie.
Crue : montée temporaire des eaux d’une rivière ou d’un fleuve suite à des pluies importantes dans le bassin versant. Cela entraîne l’inondation de zones habituellement hors d’eau.
Crue de projet : crue de calcul utilisée pour procéder au dimensionnement d’un barrage et ses ouvrages annexes tels que les évacuateur de crues t les organes de restitution, et pour déterminer la capacité maximum de stockage, la hauteur du barrage et les revanches nécessaires.
CMP : crue maximum possible qui peut être attendue suite à des conditions météorologiques et hydrologiques très sévères dans le bassin hydrographique étudié.
Débit de pointe : débit maximum qui se produit pendant une crue ; il st exprimé en mètres cubes par seconde.
Ecrêtement des crues : le fait de stocker ou de retarder les crues par le biais d’une opération planifiée comme dans le cas des réservoirs, ou par le remplissage temporaire de zones de débordement, comme le fait de faire dériver l’eau dans un canal d’écoulement naturel.
Erosion : usure progressive d’une surface, que ce soit une rive, un lit de cours d’eau, un remblai ou toute autre surface provoquée par l’écoulement de l’eau, les vagues des réservoirs, le vent ou tout autre processus naturel.
Evacuateur de crues : structure au-dessus de laquelle ou à travers laquelle le débit est libéré pendant les crues. Si le débit est contrôlé à l’aide de vannes par exemple, il s’agit d’un évacuateur vanné ; dans le cas contraire, il s’agit d’un évacuateur à seuil libre.
Gestion intégrée des ressources en eau : processus par lequel l’eau stockée dans les réservoirs et le débit quotidien libéré sont gérés dans le bassin pour assure une quantité adéquate et fiable d’eau. Chaque barrage du bassin comprend un système de contrôle qui calcule les quantités d’eau du réservoir à relâcher à l’aval sur la base des débits entrants et des besoins en aval. Tous les systèmes de contrôle du bassin sont coordonnés entre eux.
Hauteur de chute : distance verticale entre deux niveaux d’eau (exprimée en mètres) ; il s’agit d’un paramètre important de la puissance des centrales hydroélectriques.
Hm3 : un million de m3
Hydrologie : science qui étudie la répartition dans le temps et dans l’espace des précipitations, des écoulements, des sécheresses, des crues…
Hydrométéorologie : science qui étudie les interactions entre les phases atmosphérique et terrestre du cycle hydrologique ainsi que les conséquences de ces interactions sur les ressources en eau.
Levées de béton : épaisseur des couches successives de béton délimitées par des joints de construction horizontaux.
Longueur de la crête : longueur du sommet du barrage d’une rive à l’autre.
Longueur du barrage : longueur le long du haut du barrage.
MW ou Mégawatt : unité de puissance, notamment en production électrique. Equivaut à un million de watts.
Niveau aval : niveau de l’eau qui se retrouve immédiatement en aval du barrage. Le niveau aval varie selon les débits relâchés depuis le barrage et selon les influences des autres barrages et structures situés à l’aval.
Niveau minimal d’exploitation : niveau le plus bas que le réservoir peut atteindre dans des conditions normales d’exploitation ; il correspond au niveau inférieur de capacité active de stockage.
Noyau : zone de matériau imperméable dans un barrage en remblai. On parle parfois de noyau central, de noyau incliné, de noyau en glaise ou en argile.
Organe de restitution : ouverture à travers laquelle l’eau peut être libérée d’un réservoir dans une rivière.
Ouvrages annexes : autres équipements d’un aménagement hydraulique qui peuvent être la salle de commande, les conduites d’évacuation, les organes de restitution, les conduites forcées, la centrale hydroélectrique…
Pied du barrage : intersection du parement aval avec le terrain ; on parle aussi de pied aval. L’intersection avec le parement amont s’appelle talon ou pied amont.
PMP : précipitations maximales probables correspondant, en théorie, au niveau le plus fort de précipitations possible sur une durée donnée qui est matériellement possible en cas d’orage pour un lieu précis à une certaine époque de l’année.
Prise d’eau : située à l’entrée des organes de restitution, la prise d’eau fixe le niveau ultime de vidange du réservoir. Il peut s’agir de tours verticales ou inclinées, ou de structures immergées. Le niveau des prises fixe les débits souhaités, en tenant compte de la sédimentation et du niveau souhaité de vidange.
Renard : le renard hydraulique apparaît préférentiellement sur une digue encharge, en pied d’ouvrage ou le long des lignes d’écoulement, provoqué par des hétérogénéités (conduits traversants, terriers et racines)
Revanche : distance verticale entre le niveau maximale d’une retenue et le haut du barrage.
Seuil des évacuateurs : niveau inférieur des évacuateurs ; correspond au niveau minimum de la retenue permettant le passage de l’eau par les évacuateurs.
Stabilité : condition d’une structure capable de supporter des forces et des pressions instantanées ou sur une longue durée sans connaître de déformation significative.
Surface de la retenue : surface couverte par un réservoir rempli à un niveau donné (exprimée en km²).
Vanne : barrière mobile qui permet de contrôler les débits d’eau.
Vanne segment : vanne munie d’un tablier incurvé vers l’amont et pivotant autour de deux axes.
Vanne plate : vanne qui peut s’ouvrir et se fermer par un système de glissement.
Vidange de fond : organe de restitution en bas du réservoir habituellement utilisé pour vider la retenue ou évacuer les sédiments et parfois pour permettre l’irrigation.
Volume du réservoir : volume d’eau retenu et stocké par le barrage.
Volume d’écrêtement : volume de la tranche au-dessus du volume utile entre le niveau de retenue normal et le niveau maximal de l’eau.
Volume mort : tranche d’eau située sous la prise d’eau la plus basse et qui ne peut donc pas être évacuée du réservoir sauf par pompage.
Volume utile : volume du réservoir qui est disponible pour des usages comme la production d’énergie, l’irrigation, le contrôle des crues, l’alimentation en eau. Le niveau le plus bas de la retenue est le niveau minimal d’exploitation, le niveau le plus haut est le niveau de retenue normal.
Volume inactif : volume entre l’organe de restitution le plus bas et le niveau minimal d’exploitation.
Capacité du réservoir : volume total d’eau dans le réservoir ; somme du volume mort et du volume actif.
Volume du barrage : volume total de la structure du barrage du niveau de fondation à la crête du barrage et de l’appui droit à l’appui gauche.
Zone inondable : terres voisines d’une retenue ou d’un cours d’eau qui peuvent être recouvertes d’eau. Ce terme est également utilisé pour décrire la zone en aval qui serait inondée ou affecté par des crues importantes, voire en cas de rupture du barrage.
ANNEXE 1 :
PERSONNALITÉS AUDITIONNÉES
I. Personnalités entendues à l’Assemblée nationale
31 juillet 2007
M. Jean-Marc KAHAN, Directeur du service technique de l’énergie électrique et des grands barrages (STEGB), direction de la demande et des marchés énergétiques (DIDEME), direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP)
19 septembre 2007
M. Noël GODARD, Sous-Directeur, Direction de l’eau, ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire (MEEDDAT)
M. Nicolas MONIÉ, Chargé de mission, direction de l’eau, (MEEDDAT)
M. Jean-François ASTOLFI, Directeur division Production et Ingénierie Hydraulique, EDF
M. Philippe LEFEVRE, Inspecteur Sûreté Hydraulique, division Production et Ingénierie Hydraulique, EDF
M. Bertrand LE THIEC, Chef du département Relations Parlementaires, direction des affaires publiques, EDF
21 novembre 2007
M. Michel de VIVO, Secrétaire général de la Commission internationale des grands barrages (CIGB)
M. Bernard TARDIEU, Président-Directeur général, COYNE et BELLIER, vice président de la CIGB
M. Bernard GOGUEL, Expert, Maintenance et Réhabilitation de barrages, COYNE et BELLIER
13 mars 2008
M. Philippe LEFEVRE, Inspecteur Sûreté Hydraulique, EDF
M. Bertrand LE THIEC, Chef du département Relations Parlementaires, EDF
1er avril 2008
M. Patrick LE DELLIOU, Chef du Bureau d’Etude Technique et de Contrôle des Grands Barrages, MEEDDAT
8 avril 2008
M. Laurent MICHEL, Directeur de la prévention des pollutions et des risques, (MEEDDAT)
M. Jean-Marc KAHAN, Directeur du service technique de l’énergie électrique et des grands barrages (STEGB)
M. Nicolas MONIÉ, Chargé de mission, direction de l’eau, MEEDDAT
15 avril 2008
M. Robert GERENTON, syndicat CGT Energie, chargé de l’hydraulique
M. Sébastien MENESPLIER, syndicat CGT Energie
16 avril 2008
M. Gregory BOITARD, US Engineering Solutions
M. Sébastien LACROIX, Responsable géographique d’HYDROPLUS, groupe VINCI
M. Martin LE BLANC, Responsable technique d’HYDROPLUS
M. Marc DAUMAS, Directeur général de SOLEFIM, groupe LEVAUX
7 mai 2008
M. Claude GIRARD, Directeur général de la Société Hydro Electrique du Midi (SHEM), groupe SUEZ
M. Mathieu BONNET, Directeur général de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR)
M. Bruno MATHEX, Directeur du patrimoine fluvial et industriel à la CNR
M. Christian HEIMBURGER, Responsable du département Audit interne – Gestion des Risques et Qualité à la CNR
Mme Valérie ALAIN, Directrice des relations institutionnelles du groupe SUEZ
27 mai 2008 : table ronde « effet d’un séisme sur un barrage »
M. Jean-François ASTOLFI, Directeur Production hydraulique EDF
M. Pierre Yves BARD, Sismologue LCPC
M. Eric BOURDAROT, Sismologue EDF – CIH, ouvrages en béton et ciments
M. François BRELLE, Directeur technique du Canal de Provence
M. Gilbert CASTANIER, Chef du service géologie, EDF
M. Philippe CRUCHON, Président du Comité technique permanent des barrages et ouvrages hydrauliques
M. Michel de VIVO, Secrétaire général de la CIGB – ICOLD
M. Daniel DEVELAY, Directeur général de COYNE et BELLIER
M. Christophe DUROUCHOUX, Sismologue EDF - TEGG
M. Jean-Jacques FRY, Sismologue EDF – CIH, ouvrages en terre
M. Bernard GOGUEL, Ingénieur COYNE et BELLIER
M. Jean-Marc KAHAN, STEGB, MEDAD
M. Pierre LABBE, Président de l’Association Française du génie ParaSismique (AFPS)
M. Patrick LE DELLIOU, Directeur du BETCGB
M. François LEMPERIERE, Président d’HYDROCOOP
M. Michel LINO, Président d’ISL
M. Hormoz MODARESSI, Directeur de la sismologie au BRGM
M. Pierre MOUROUX, Consultant
M. Marc NICOLAS, Sismologue au LDG - CEA
M. Paul ROYET, Ingénieur au CEMAGREF
12juin 2008
M. François TOUTLEMONDE, Chef de la section « Fonctionnement et ingénierie des ouvrages d’art » du Laboratoire central des Ponts et Chaussées (LCPC)
M. Bruno GODART, Directeur technique des ouvrages d’art du LCPC
II. Personnalités entendues lors de missions en France
º Á Aix-en-Provence, le 6 décembre 2007
- au CEMAGREF
M. Gérard DEGOUTTE, Ingénieur ENGREF, unité de recherche "Ouvrages hydrauliques et hydrologie"
M. Paul ROYET, Ingénieur ENGREF, unité de recherche "Ouvrages hydrauliques et hydrologie"
- au barrage de Bimont
M. Robert-Jacques CHAUVET, Ingénieur, Canal de Provence
M. Gérard DEGOUTTE, Ingénieur ENGREF, unité de recherche "Ouvrages hydrauliques et hydrologie"
M. Paul ROYET, Ingénieur ENGREF, unité de recherche "Ouvrages hydrauliques et hydrologie"
M. Dominique PORTEHAULT, Ingénieur divisionnaire de l’agriculture et de l’environnement, DDAF service de contrôle
- puis au Tholonnet
M. Bernard ABRIAL, Directeur régional du CEMAGREF
- au barrage du Réaltort
M. Gérard DEGOUTTE, Ingénieur ENGREF, unité de recherche "Ouvrages hydrauliques et hydrologie"
M. Dominique PORTEHAULT, Ingénieur divisionnaire de l’agriculture et de l’environnement, DDAF service de contrôle
M. Alain PONCET, Directeur de l’Agence de Marseille, service des Eaux de Marseille
M. HERADES, Chef d’exploitation des barrages de Réaltort et Saint Christophe
M. CAVALAN, Direction de l’eau et de l’assainissement, CUMPM
º à Aix-en-Provence, le 6 décembre 2007
- à EDF - CEIDRE, département TEGG
M. Claude DUVAL, Docteur Ingénieur, chef du département TEGG
M. Jean-Charles PERFUMO, Adjoint au Chef du département TEGG, chef du service CEMETE
M. Gilbert CASTANIER, chef du service « géologie - géotechnique »
M. Laurent LEVEQUE, Ingénieur géologue, chef d’équipe « géologie »
M. Joël OLIVIER, Chef du service « génie civil »
M. Frédéric COPPEL, Ingénieur, service « génie civil »
M. Alain BEAUDOUX, Directeur, groupe exploitation hydraulique Durance
M. Alban SCHULTZ, Chargé de mission Pôle Parlement, direction des affaires publiques
- au CEMAGREF
M. Patrice MERIAUX, Chef de l’unité de recherche "Ouvrages hydrauliques et hydrologie"
M. Rémy TOURMENT, Ingénieur divisionnaire des travaux ruraux, unité de recherche "Ouvrages hydrauliques et hydrologie"
- au SYMADREN en Arles
M. Rémy TOURMENT, CEMAGREF
M. Jean-Luc MASSON, Vice-Président du SYMADREN, adjoint au maire d’Arles
M. Thibault MALLET, Directeur technique du SYMADREN
º Dans les Alpes, du 23 au 25 janvier 2008
M. Alban SCHULTZ, Chargé de mission Pôle Parlement, direction des affaires publiques
- aux barrages à Serre-Ponçon et à Sainte-Croix, le 23 janvier 2008
M. Daniel PEPIN, Directeur de l'Unité de Production Méditerranée
M. Alain BEAUDOUX, Directeur du Groupement d'Exploitation Hydraulique Méditerranée (GEH- Méditerranée)
- à la Division Technique Générale d’EDF, à Grenoble le 24 janvier 2008
M. Michel POUPART, Directeur-adjoint de la DTG
M. Marc PEREZ, Attaché technique, Mission Production Hydraulique
M. Christophe LE VERGER, Chargé d’affaires Senior, Centre d’auscultation de Grenoble
M. Philippe BRYLA, Expert matériels mécaniques
M. Christophe AURORI, Chef de service, contrôle matériaux et mécanismes
M. Olivier FLAMBARD, Chef de service du Centre hydrométéorologique des Alpes
- au Centre d'Ingénierie Hydraulique d’EDF, à Savoie Technolac, BOURGET du LAC
M. Vincent CHARLET, Directeur-adjoint du CIH
M. Michel FLEURY, Chargé de mission
M. Alain PETITJEAN, Chef du département risques et développement durable
M. Marc PEREZ, Attaché technique, Mission Production Hydraulique
M. Jean BOULET, chef de service GC-ED
M. Eric BOURDAROT, Ingénieur -expert, GC-ED
M. François LAIGLE, Ingénieur -expert GC-ED
M. Denis AELBRECHT, Ingénieur -expert GC-ED
- au barrage du CHAMBON, le 25 janvier
M. Marc GAUCHER, Directeur de l'Unité de Production Alpes
M. Denis VILLET, Directeur maintien du patrimoine, UP Alpes
M. Marc PEREZ, attaché technique, Mission Production Hydraulique
º Á Orléans, à la DIREN et sur les digues du Val de Loire, le 13 février 2008
M. Nicolas FORRAY, Directeur régional de l’Environnement, DIREN Centre
M. José RUIZ, Directeur adjoint, DIREN Centre
M. Jean MAURIN, Chef de la maîtrise d’ouvrage générale (MOG), DIREN Centre
M. Fabien PASQUET, Division études et systèmes d’information, DIREN Centre
M. René SIMON, Directeur adjoint à la direction départementale de l’équipement du Loiret
M. Jean-Luc ROY, Directeur de l’eau et de l’exploitation à l’établissement public Loire
ºEn Alsace, les 24 et 25 avril 2008
- dans le Haut Rhin le 24 avril, pour la journée :
M. Pierre SCHERRER, Sous-Directeur de l'environnement de la DDAF du Haut Rhin
Mme Dominique CHATILLON, Responsable du pôle eau et risques de la DDAF 68
- au Conseil général du Haut Rhin et au barrage de Kruth Wildenstein
M. Georges WALTER, Directeur de l’Environnement et du cadre de vie, au Conseil général
M. Michel-André BRICE, Chef du service Lacs et Barrages
- au barrage de Michelbach
M. Bernard FINCK, Directeur général du Syndicat mixte du Barrage de Michelbach
M. KLEIBEF, Responsable du site
- à la Préfecure
M. Michel FUZEAU, Préfet du Haut Rhin
- dans le Bas Rhin le 25 avril, pour la journée:
M. Emmanuel BRAUN, Chef de la division eau, environnement, aménagement du territoire de la DRDAF Alsace- Bas Rhin
- à Matzenheim
M. Christophe KIMMEL, DEEAT, DRDAF Alsace- Bas Rhin
Mme Stéphanie MADIER, Ingénieure, DEEAT, DRDAF Alsace- Bas Rhin
M. Eric LOUIS, Service de l’Ill
M. Raymond FENDER, Président du Syndicat des digues de l’Ill
M. Michel KOCHER, Vice- Président du SyndIll, maire de Matzenheim
- à Strasbourg, à l’usine hydraulique EDF, au barrage et à l’écluse
M. Michel VOSGIEN, Directeur de la Production Ingénierie, Unité de Production Est
M. René HENGEL, Chef de la division Contrôles techniques et Energie à la DRIRE Alsace
M. Pierre GRIGNON, Directeur du Groupement Rhin, EDF
M. Olivier VIDALINC, Responsable du groupement Strasbourg – Gerstheim, EDF
M. Jean-Marc MEHR, Cadre d’exploitation du groupement Strasbourg – Gerstheim, EDF
M. Paul-Emmanuel SCHOELLER, Cadre EDF
M. Alban SCHULTZ, Chargé de mission Pôle Parlement - EDF
º Dans les Côtes-d’Armor le 29 avril 2008
- pour la journée
M Christian SCHWARTZ, Directeur de la DDAF des Côtes d’Armor
M. Nicolas AMPEN, responsable du bureau « Eau et milieux aquatiques »
M. Hervé MAILLE, responsable des barrages EEMA
- à Saint Brieuc, à la DDAF
Mme Florence TOURNAY, Ingénieure, responsable du pôle « Environnement »
M. Jean-Pierre DHUMERELLE, Chef de groupe de subdivisions des Côtes d’Armor, DRIRE Bretagne
M. David SECRET, Directeur de l’usine DAMREC, Mine de Glomel
- au barrage du Gouët
Rencontre des gestionnaires et visite de l'ouvrage
- à la mairie de St Gildas et à l’étang du Quélennec
Mme Annie SIMON, Maire de Saint Gildas
M. Jean-Claude LOZAC, Président de l’association de pêche, et représentant le propriétaire du barrage
º Dans l’Aude le 22 mai 2008
- pour la journée
M. Jean-Luc DAIRIEN, Directeur DDAF Aude
M. Pierrick FRAVAL, Chef de Service SERE, DDAF Aude
M. Pierre CADORET, Ingénieur DDAF Aude
- à la préfecture de Carcassonne
M. Jean-Christophe CHOLLEY, Chef du Service Environnement Risques, DDE Aude
M. Roland COMBETTES, Président de la communauté d’agglomération carcassonnaise (CAC)
M. Thierry ALESSIO, Vice-Président CAC
M. Patrick LEDOUX, Expert PATOUH, Centre d’Etude Technique Méditerranée
M. Olivier FULLY, Directeur de l’Institut interdépartemental pour l’Aménagement hydraulique de la Montagne Noire (IIAHMN)
Mme Amandine ESCANDE, Responsable Aménagement IIAHMN
M. Claude LACROIX, Directeur honoraire de l’IIAHMN
M. Jacques CHABAUD, Directeur du Syndicat Mixte des Milieux Aquatiques et Rivière (SMMAR)
M. Gérard AVAL, Directeur Syndicat Mixte du Delta de l’Aude (SMDA)
M. Michel BROUSSE, Vice-Président du Conseil Général Aude
Mme Catherine LUCIANI, Direction Eau et Environnement du CG Aude
Mme Nathalie MINICUCCI, Bureau d’études du Bas Rhône - Languedoc (BRL)
M. Jean-Noël RAVAILLE, BRL Exploitation
M. Bernard GRANIER, Président du SIAH bassin du Fresquel
M. Raymond SENTENAC, Maire de Saint Denis
M. Gérard BONNAFOUS, Adjoint au Maire de Saint Denis
M. Augustin RIU, Maire de Cenne Monestiés
M. Jean-Marie SALLES, Maire d’Alzonne
Mme Virginie POLIDORE, Mairie d’Alzonne
Mme Brigitte VIEU, Mairie d’Alzonne
M. Joseph COLOMBO, Chef du Service interministériel de défense et de protection civiles, à la préfecture de l’Aude
- puis
Monsieur Bernard LEMAIRE, Préfet de l’Aude
- à Alzonne : visite de digues du secteur du Fresquel
M. Jean-Marie SALLES, Maire d’Alzonne
Mme Virginie POLIDORE, Mairie d’Alzonne
Mme Brigitte VIEU, Mairie d’Alzonne
M. Bernard GRANIER, Président du SIAH bassin du Fresquel
- à Laprade : visite du barrage
Mme Catherine LUCIANI, Direction Eau et Environnement du CG Aude
Mme Nathalie MINICUCCI, BRL
M. Jean-Noël RAVAILLE, BRL Exploitation
- à Cennes Monestiés : visite du barrage
M. Augustin RIEU, Maire de Cenne Monestiés
º Dans le Gers le 23 mai 2008
- Pour la journée
M. Eric JEUFFRAULT, DDAF Gers, responsable du service de police de l’eau
- à Miélan, visite du barrage
M. Francis DAGGUZAN, Vice-Président du Conseil général du Gers
M. Daniel BOUBEE, Directeur de l’Aménagement Hydraulique, CG Gers
M. André GODET, Responsable de l’agence d’exploitation, CG Gers
M. Jérôme GAUTHIER, DDAF Gers, service de police de l’eau
M. Philippe BARRIEU, DDAF Gers, service de police de l’eau
M. Eric BOURSIN, DDAF du Gers
M. Gérard DUTEAU, Chef du service départemental de l’Office national de l’Eau et des Milieux Aquatiques (ONELMA)
Mme Barbara DOUBRERE, Mairie de Miélan
- à la préfecture d’Auch
M. Denis CONUS, Préfet du Gers
M. Sébastien JALLET, Secrétaire général de la Préfecture
M. Michel LABORIE, Directeur de cabinet du Préfet
M. Michel TUFFERY, Directeur DDAF Gers
M. Olivier GONDRAN, Directeur DDE Gers
- à Lectoure, visite du barrage des 3 Vallées
M. Denis CONUS, Préfet du Gers
Mme Laurence CALVET, Secrétaire générale de la sous préfecture de Condom
Mme Maryse ESCRIBE, Directeur général des services de la mairie de Lectoure
M. Claude DUMAS, Président du Lac des 3 Vallées, premier adjoint au maire de Lectoure
M. Michel UHLMANN, Ingénieur divisionnaire, DDE Gers
M. Emmanuel ALONSO, CEMAGREF Bordeaux
III. Personnalités entendues lors de missions à l’étranger
º Au Maroc, du 18 au 19 mars 2008
Pour l’ensemble du séjour, M. Jean-Alexandre EGEA, mission économique près l’Ambassade de France à Rabat
- Mardi 18 mars : barrages
- au barrage de Kroema
M. Abderahim EL GHISSASSI, secrétaire général du Comité marocain des Grands Barrages (CMGB)
M. M’hammed EL RHAZ, chef de la division réalisation et maintenance, direction des aménagements hydrauliques (DAH), Secrétariat d’Etat chargé de l’eau et de l’environnement (SEEE)
M. Aziz LABRAIMI, chef de la division des petits et moyens barrages, DAH, SEEE
- au barrage de Sidi Mohamed Ben Abdellah (SMBA)
M.B. AKALAY, Directeur des aménagements hydrauliques, Secrétariat d’Etat chargé de l’eau et de l’environnement
M. Lhassan BOUFOUS, Président du Comité marocain des Grands Barrages, conseiller spécial du Secrétaire d’Etat chargé de l’eau et de l’environnement
M. Khalid EL GHOMARI, chef d’aménagement de la surélévation du barrage SMBA, DAH, SEEE
M. Kamal ELMOUEDDEN, Ingénieur, LPEE
M. Mohamed AMAHDOUK, Ingénieur, DAH SEEE
- Mercredi 19 mars : digues
- à Ben Slimane
M. Lhoussaine OUKBAB, Directeur de l’Agence du bassin hydraulique du Bouregreg et de la Chaouia Ben Slimane
º En Suisse les 8 et 9 mai 2008
Pour l’ensemble du séjour, M. Vincent de LAUBADERE, attaché à la Mission économique de Berne
- Jeudi 8 mai, à Berne
- au siège de l'OFEN (Office fédéral de l'énergie) :
M. Alain GALLIANO, Chef de la Mission économique
Dr Georges DARBRE, Chargé de la sécurité des barrages à l’Office fédéral de l’énergie
Mlle Milaine CÔTÉ, Chargée de la Haute surveillance des barrages (OFEN)
M. Olivier OVERNEY : Chef de la section des cours d'eaux à l’Office fédéral de l'environnement (OFEV)
- Vendredi 9 mai, dans le canton de Vaud
- à Lausanne au Département de la sécurité et de l'environnement (DES)
Mme Huguette Allard, Adjoint du Chef de la Mission économique
Dr Jean-François JATON, chef du service des eaux, sols et assainissement (SESA)
Dr Ingénieure Stéphanie ANDRE, Chef de Service,
º Á Sofia, du 3 au 5 juin 2008, 76ème réunion annuelle de la CIGB
Pour l’ensemble du séjour, M. Michel de VIVO, secrétaire général de la CIGB
En assemblée plénière puis individuellement :
M. Przemyslaw Andy ZIELINSKI, Manager d’Ontario Power Generation (Canada), président du Comité technique « sécurité des barrages » de la CIGB
M. Norihisa MATSUMOTO, Président du Comité japonais, Directeur de Japan Dam Engineering Center, Vice-Président de la CIGB
Mme Maria BARTSCH, présidente du Comité suédois, directrice de Svenska Kraftnat, vice président de la CIGB
M. Martin WIELAND, Vice-Président du Comité suisse, président du Comité technique « aspects sismiques des projets de barrages » de la CIGB
M. Michel LINO, Président d’ISL, secrétaire du Comité technique « aspects sismiques des projets de barrages » de la CIGB
M. Houqun CHEN, Académicien, Vice-Président de « China institute of water ressources and hydropower research » (IWHR), vice président du Comité technique « aspects sismiques des projets de barrages » de la CIGB
M. Bernard GOGUEL, Ingénieur COYNE et BELLIER, président du Comité technique « surveillance des barrages » de la CIGB
M. Cassio Baumgratz VIOTTI, Président honoraire du Comité brésilien, président honoraire de la CIGB
M. Edilberto MAURER, Président du Comité brésilien, vice président de la CIGB
M. Luis BERGA, Président du Comité espagnol, président de la CIGB
M. Dimiter TOSCHEV, Président du Comité bulgare
M. Dimitar POPOV, Directeur d’Energoproekt hydropower, Bulgarie
M. Philip CUMMINS, Vice-Président du Comité australien, président du Comité technique « exploitation, entretien et réhabilitation des barrages » de la CIGB
M. Evgeny N. BELLENDIR, Vice-Président du Comité russe, Directeur du Bureau d’études Vedeneev VNIIG HYDROOGK
M. Giovanni RUGGERI, Président du Comité italien, Directeur ENEL, vice président du Comité technique « énergie hydroélectrique » de la CIGB
M. Gérard VERZINI, Directeur « barrages et environnement » d’Hydro Québec
M. Christo ABADJIEV, Président honoraire du Comité bulgare, vice président du Comité technique « barrages et dépôts de stériles » de la CIGB
ANNEXE 2 : SYNTHESE DE L’ENQUETE DANS QUINZE PAYS
|
Organisation du contrôle de sécurité |
Existence cartographie/inventaire |
Australie |
Responsabilité des Etats(comité ANCOLD). Pas de législation spécifique sauf 5: NSW, Queensland, Victoria, Tasmanie, capitale |
Pas au niveau national. Niveau des Etats |
Autriche |
Responsables nommés pour contrôler application des règlements |
Annuaire digues/murs. Pas de carte; reste non communiqué |
Brésil |
Cadre dispersé, fonction domanialité/usage. Norme nationale spécifique en projet |
Inventaire en cours si h>15m et risques en cas de rupture. Cartographie par imagerie satellitaire si retenue d'eau >20ha |
Chine |
Système législatif relativement complet. Base:"loi des eaux"/prévention des inondations. |
Cartographie détaillée de l'ensemble des barrages à h>30m |
Espagne |
Régi par décret royal si h>15m ou si >10m et>1hm3 d'eau. Barrages classés en fonction du risque potentiel |
Législation: inscription barrages/ retenues/ bassins dans un registre |
Etats-Unis |
FEMA(federal emergency management agency). Coordonne la sécurité indépendamment de h/V. Plan national NDSP |
National Inventory of dams(NID): inventaire des barrages sur le territoire national, avec condition de hauteur/stockage. Classement en fonction du risque potentiel |
Italie |
Grands barrages:RID. Autres : régions compétentes pour le contrôle(<15m,<1million m3) |
"grands" barrages: <=> cartographie nationale: 542. Pas de perception globale pour les autres |
Japon |
Cadre de la réglementation relative aux fleuves. Barrage>15m. Responsabilité:exploitant ; surveillance/contrôle : MLIT |
Oui. Recensement exhaustif (caractéristiques techniques, liste des exploitants). Pas pour les digues. |
Mexique |
Responsabilité:propriétaire. Pas de norme mais projet rendant analyse risques obligatoire. Commission nationale de l'eau. classification CIGB |
Registre national des barrages: 4300 retenues principales. Plus petits pas inventoriés. |
Nlle-Zélande |
Secteur électrique géré par les entreprises. Conseils régionaux veillent application plans de sécurité. barrages catégorisés/risques. pas de normes: recommandations. |
Dernier recensement: 1993. Building Act 2004 impose aux conseils régionaux de recenser les barrages d'ici 2/3 ans |
Pays-Bas |
Réseau principal(loi pour contrôles réguliers et obligatoires)/réseau régional (<=>conseils de l'eau) |
Distinction réseau principal/régional. Cartographie des niveaux de sûreté en fonction des zones du territoire. |
Roumanie |
cadre législatif/réglementaire précis. Commission Nationale pour la Sécurité des Barrages et Ouvrages Hydrotechniques. Contrôle à la charge du ministère de l'environnement/ ministère des travaux publics |
Registre national des barrages de Roumanie (REBAR); comprend inventaire petits barrages (actualisation 2006). |
Suède |
Propriétaire responsable. Préfectures vérifient conformité aux textes ; agence indépendante publique vérifie le réseau électrique; municipalités=protection des civils |
Répertoriés: classement selon les conséquences potentielles d'une défaillance technique (RIDAS) |
Suisse |
grands barrages:Confédération (Office Fédéral de l'énergie, OFEN); petits cantons (partage des compétences précisées par ordonnances) |
Oui |
Turquie |
Classification par risque potentiel. Direction générale des travaux hydrauliques de l'Etat. Aucune législation spécifique |
Base de donnée DSI |
Organisation du contrôle(privé/public) |
Décision travaux si problèmes | |
Australie |
NSW (comité de surveillance des barrages); Queensland (régulateur public vérifie) ; Victoria (opérateurs privés gestionnaires avec licence) |
Dépend des Etats. Intervention publique en général si refus. |
Autriche |
responsable barrage, instance compétence de la surveillance des eaux; cas particuliers: commission chargée des réservoirs. |
Obligation générale de maintenance par les entreprises. Autorité compétente peut imposer des mesures. |
Brésil |
Aucune loi spécifique. Contrôle par propriétaire (sauf si bien public) |
Propriétaires décident. Pas de sanction en cas de refus. |
Chine |
Niveau national: ministère des ressources en eau. Niveau local: collectivités locales. |
Plupart des barrages en mauvais état. Programme de renforcement des principaux à risque mis en place par le gouvernement. |
Espagne |
Administration publique: Etat compétent pour barrages intercommunautaires/ communautés autonomes pour les ouvrages intracommunautaires. |
Calendrier par administrations compétentes. Refus par le propriétaire sanctionné. |
Etats-Unis |
Inspection des barrages fédéraux du ressort des Etats. |
Les Etats suggèrent les travaux. La plupart n'ont pas assez de pouvoir pour faire face en cas de refu du propriétaire. |
Italie |
Concessionnaires (généralement privés) suivis par les autorités publiques (régions/RID) |
Ministère compétent peut imposer les travaux. RID peut diminuer le volume d'eau pour contraindre le propriétaire. |
Japon |
Contrôle par la puissance publique (bureaux régionaux du MLIT: ministry of land infrastructure and transports). |
Décision travaux: exploitant. Refus(pas de cas enregistré): retrait autorisation d'exploitation. |
Mexique |
Aucune loi: propriétaire. Intervention si menace pour la population/infrastructures |
Si propriété fédérale: réparations exigées par la CONAGUA(agence fédérale). Si ouvrage concédé à un tiers: propriétaire/ utilisateurs. |
Nlle-Zélande |
Propriétaires; pas d'autorité de régulation publique. |
Conseil régional demande l'application d'un"plan de gestion des déficiences". Sanction si refus. |
Pays-Bas |
Public (Etat/collectivités) |
Conseils de l'eau généralement |
Roumanie |
Organe qui coordonne contrôle : Inspection d'Etat des Eaux du ministère en charge de l'environnement/gestion des eaux. Détenteurs barrages = obligation installation équipement nécessaire au bon suivi |
Délais établis de commun accord avec ministères (environnement/travaux publics). 2 ans max. Refus peut entraîner des restrictions voire désaffection du barrage |
Suède |
Propriétaire responsable contrôle. Conseils d'administration régionaux supervisent contrôles |
Propriétaire. Autorités régionales qui supervisent le contrôle peuvent forcer la prise de mesures nécessaires. |
Suisse |
L'OFEN sous-traite certaines missions au secteur privé. |
Décision: instance en charge de la surveillance. En cas de refus, contrainte à un abaissement partiel ou total du niveau de retenue |
Turquie |
Organe : DSI (direction gale des travaux hydrauliques de l'Etat). Inspections périodiques par organes décentralisés. |
DSI : « feuille de route » |
Plan national pour les "grands" barrages? |
Etude<=>prévention risques sismiques? |
Responsabilité contrôle des barrages destinés à l'irrigation/ hydroélectriques | |
Australie |
Non (obligation de chaque Etat) |
Faible risque. Information de géoscience Australie et institut de recherche sismologique |
Mêmes normes de sécurité pour tous |
Autriche |
Inspection tous les 5 ans par une commission |
Guide de la commission des réservoirs:barrages existants=expertise technique |
Pas d'installations à des fins d'irrigation. Pour autres réservoirs: même réglementation |
Brésil |
Non (plan/opérateurs calqués sur les normes internationales |
Risque pris en compte dans la construction des nouveaux barrages |
Pas les mêmes organismes de tutelle. Irrigation rarement sous responsabilité organisme agricole |
Chine |
Centre de supervision de la sécurité des grands barrages (1985). Comité national chinois sur les grands barrages (1973) |
Oui pour les plus récents |
Pas de différence d'expertise irrigation/ hydroélectriques |
Espagne |
Oui pour ceux dont l'Etat est titulaire |
études en fonction des risques sismiques/région |
Pas de distinction/usage |
Etats-Unis |
Distinction en fonction du risque (pas taille). Pas de plan national grand barrage mais national dam safety progr. |
Oui. Prise en compte dans la construction. |
Pas de différence. Nécessaire conformité au féderal guidelines for dam safety |
Italie |
Non |
RID évalue les risques (en incluant le risque sismique) |
Identiques |
Japon |
Notion "grand barrage" non utilisée |
Oui pour l'ensemble des barrages |
In fine: MLIT |
Mexique |
Non mais plans des principaux opérateurs |
Législation n'impose pas l'inspection suite à un séisme |
pas de distinction/ destination |
Nlle-Zélande |
Non |
Guide de recommandation<=>normes. Cartes zones de séismes, tests pour les barrages les plus importants. |
Propriétaire responsable quelque soit le barrage |
Pays-Bas |
Programme de maintenance établi au niveau régional |
Non. Risques faibles |
Pas de grand barrage pour l'hydroélectricité |
Roumanie |
Majorité détenue par Hidroelectrica/ administration nationale des eaux roumaines: système bien structuré d'exploitation |
Oui. Tous les grands barrages. Pays à risque sismique |
Ces barrages sont administrés par l'Administration Nationale d'Améliorations Foncières. Même expertise que barrages hydroélectriques |
Suède |
Non. Projet pilote en cours d'élaboration |
Etude en 2006 ELFORSK AB. Sud: aucune risque; reste: risque faible |
Tous les barrages: mêmes autorités, mêmes réglementations |
Suisse |
Non. La maintenance est laissée à la libre appréciation des exploitants. |
OFEN a demandé le réexamen du risque sismique d'ici 2012 |
Pas de distinction de contrôle en fonction de la destination de l'ouvrage. |
Turquie |
Non |
Etude DSI/ONG turque |
Hydro : société nationale de production d'électricité. Irrigation: collectivités/usagers |
|
Existence d'un inventaire de l'état des digues dans le pays? |
Organisme de surveillance des digues? Suivi par rapport à la végétation environnante? |
Australie |
Non |
Gestion par les autorités locales |
Autriche |
Rapport sur l'état des barrages érigés en tant que digues. |
Cas par cas sur les bases de l'autorisation administrative d'exploitation ou la loi sur l'eau,1959 |
Brésil |
Non (diversité des situations) |
Surveillance mal assurée à l'heure actuelle |
Chine |
Non trouvé |
Autorités des bassins/ département de l'administration de l'eau des provinces. Tout cela sous la tutelle du gouvernement. |
Espagne |
Non. Que pour les grands barrages |
Maintenance à prévoir<=>normes d'exploitation spécifiques à chaque digue. |
Etats-Unis |
Pas d'inventaire précis des digues |
Nombreux acteurs publics chargés de la surveillance. La plus grande partie de l'entretien consiste à contrôler la végétation environnante. |
Italie |
Oui si associées à des cours d'eaux classifiés comme à risque |
Régions compétentes. Autorités des bassins. |
Japon |
Non. Trop nombreuses, problème de définition |
Bureaux régionaux. Suivi de l'état de l'eau, flore, faune. |
Mexique |
Digues dont h<5m, <0,1hm3 d'eau pas inventoriées |
Propriétaires/utilisateurs responsables de la maintenance |
Nlle-Zélande |
Non (pas d'inventaire national des digues) |
Gestion par les conseils régionaux. Digues entretenues selon les spécificités locales. |
Pays-Bas |
Oui (1/3 territoire sous le niveau de la mer) |
Maintenance intensive. Programme d’élimination des animaux souterrains |
Roumanie |
Pas encore. En projet. |
Organisme: Commission Nationale pour la Sécurité des Digues (auprès ministère. Environnement). Peut déléguer des compétences à des commissions territoriales. |
Suède |
Peu de digues |
Peu de digues |
Suisse |
Suivi et inventaire des digues latérales des cours d'eaux assuré pour l'Office fédéral de l'environnement. |
Maintenance de la responsabilité des cantons. Celles situées en bordure du Rhin sont gérées conjointement avec d'autres pays |
Turquie |
Responsabilité: DSI. Un de leurs départements s'occupe de l'inventaire précis de l'état des digues. |
Entretien annuel: DSI |
Traitement des retenues d'eau polluées |
Déroulement phases de l'annonce de crues | |
Australie |
NSW:comité de sécurité des barrages en partenariat avec régulateurs environnementaux; Queensland: agence de protection de l'environnement;Victoria: licence<=> obligation de conformité. |
Les trois Etats étudiés disposent de plans d'action d'urgence pour les barrages classés. |
Autriche |
Conformité à la loi sur l'exploitation des minerais |
Pas compétence organes chargés de la surveillance des barrages. Risque traité dans le cadre des plans généraux de prévention des risques et catastrophes naturelles(compétence Länder). |
Brésil |
Contrôle dépend du type de produis: miniers: ministère des mines/énergie; aucun texte relatif aux métaux lourds/produit type Seveso. |
Agence nationale de l'eau coordonne annonces de crues avec organismes régionaux. Articulation avec ministère de la défense/services météo Phases annonce spécifiques à chaque Etat |
Chine |
NC |
Bureau d'Etat pour le contrôle des crues |
Espagne |
Normes relatives aux retenues d'eau d'exploitation minière<=>ministère de l'industrie et de l'énergie. |
Protocoles avec phases d'annonces. Salles d'urgence, alarmes. |
Etats-Unis |
Retenues polluées traitées comme des sites industriels<=>tout déversement de polluant est interdit(Clean water Act) |
Information sur risque de crue(moyennes). Surveillance quotidienne par une agence gouvernementale. Crues classées en 5 niveaux ; 3 niveaux d'alerte pour les citoyens. Annonces radios/TV parfois renforcées par des initiatives locales. |
Italie |
Régions: mesures<=>traitement des eaux utilisées pour production hydroélectrique :"projets de gestion" <=>critères environnementaux/ techniques=>feuille de route pr chaque barrage |
Loi 1998, compétences régions. Réseau de centres de surveillance des crues. Mise en place de service pour intervention rapide. Un système d'alerte nationale lié aux crues s'appuie sur des indicateur pour chaque typologie de risque. |
Japon |
réglementation du ministère de l'environnement. Traitement en conformité |
Agencemétéorologique:alertes// informations=>administrations=> habitants/médias.Annonces graduelles |
Mexique |
Déversement produit miniers autorisé qu'après traitement. Normes restreignent l'usage de l'eau provenant de retenues contaminées. |
Déclaration quand niveau d'eau max atteint. Si risque pour pop : CONAGUA prévient protection civile=> mesures d'alerte/prévention débordement |
Nlle-Zélande |
Resource management act, 1991: oblige propriétaires de sources de pollution à minimiser les effets. |
Rivières principales constamment surveillées. Conseils régionaux (responsables)/propriétaires informés du niveau. Conseils émettent alertes/ gèrent réponse avec la défense civile. Possibilité déclaration état d'urgence/imposer évacuation par forces de police. Propriétaires de barrages à risque doivent avoir un plan d'action d'urgence. |
Pays-Bas |
Si pollution accidentelle:plan d'urgence <=>régulation flux rivières<=> évacuation substances toxiques |
Si crise : autorités de l'eau informent Maires responsables gestion crise. |
Roumanie |
retenues contenant stériles miniers:travaux sécurisation et suivi permanent. Programme d'inspection technique/ contrôle des accumulations d'eau minières par ministère. Environnement achevé en 2007 |
Première Stratégie Nationale de Gestion des Risques d'Inondations: mesures à prendre en cas de crue. Plan national pour la prévention des crues approuvé. 2006: loi des Eaux complétée: aspects<=> prévention crues. |
Suède |
Question relative à la protection de l'eau |
Municipalités compétentes. Prévision, confirmation, information presse,pop. Projet de coordination des plans d'action en cours d'élaboration |
Suisse |
Pas de retenues d'eau répondant aux critères de la question |
Seul le Valais a un système: projet "Minerve" (outil d'aide à la décision à intégrer dans un système plus général des plans d'alarme à terme) |
Turquie |
Contrôle qualité de l'eau dépend de la réglementation "contrôle de la pollution de l'eau", 2004. Traitement en amont/aval des barrages |
Cellule de gestion des crues à la DSI: plans régionaux de contrôle; coordination avec gendarmerie |
ANNEXE 3 : DÉCRET DU 11 DECEMBRE 2007
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