N° 4126
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 octobre 2016.
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2017,
TOME X
SPORT, JEUNESSE ET VIE ASSOCIATIVE
Par M. Patrick VIGNAL,
Député.
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Voir les numéros :
Assemblée nationale : 4061, 4125 (annexe n° 46).
SOMMAIRE
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Pages
INTRODUCTION 5
I. LES CRÉDITS DE LA MISSION 7
A. UNE CROISSANCE IMPORTANTE DES CRÉDITS DE LA JEUNESSE 8
1. Service civique : un budget qui concentre l’ensemble de la hausse 8
2. La baisse modérée des crédits de la jeunesse et de l’éducation populaire 10
3. Des crédits dédiés au développement de la vie associative en nette diminution 11
B. UN BUDGET DU SPORT EN HAUSSE POUR LA PREMIÈRE FOIS DEPUIS QUATRE ANS 12
1. Une augmentation des crédits du sport pour tous essentiellement due à des mesures techniques 12
2. Une légère augmentation des ressources du sport de haut niveau 14
3. La légère hausse des crédits affectés à la protection des sportifs et à la promotion des métiers du sport 16
II. UNE AMBITION POUR UN MONDE ASSOCIATIF FRAGILISÉ : METTRE EN PLACE UNE POLITIQUE DE COHÉRENCE ET DE MAILLAGE ASSOCIATIF 19
A. REDESSINER LE PAYSAGE ASSOCIATIF AUTOUR DE RELATIONS PARTENARIALES AVEC LES POUVOIRS PUBLICS 20
1. Le risque d’une véritable rupture de confiance entre les pouvoirs publics et les associations malgré une mobilisation gouvernementale sans précédent 20
2. Réinstaurer un dialogue efficace entre le monde associatif et les institutions 21
a. Les relations entre pouvoirs publics et associations doivent passer par une concertation et une contractualisation renforcées 22
b. Des efforts de simplification administrative à poursuivre 24
c. Développer les points d’appui aux associations 26
d. Favoriser la mutualisation 27
B. CONSOLIDER LE FINANCEMENT DES ASSOCIATIONS POUR ASSURER LEUR DÉVELOPPEMENT 29
1. Un contexte budgétaire préjudiciable au dynamisme associatif 29
2. Des mesures pragmatiques existent pour redonner des marges de manœuvre aux associations 31
a. Donner de la visibilité : favoriser des financements justes et pérennes 31
b. Diversifier le financement : le privé peut faire plus 33
c. Accompagner l’embauche avec un renforcement du FONJEP 34
d. Donner des moyens suffisants aux associations sportives avec le CNDS 35
e. Pérenniser et renforcer les dispositifs fiscaux et sociaux existants 36
C. REVALORISER L’ENGAGEMENT EN ACCOMPAGNANT L’ÉLÉVATION DES COMPÉTENCES 38
1. Des salariés qualifiés mais un bénévolat parfois en inadéquation avec les besoins des entreprises 39
2. Les nombreux dispositifs existants doivent être sanctuarisés voire renforcés 40
a. Le service civique, un dispositif qui monte en puissance 40
b. Les emplois d’avenir, un modèle à pérenniser pour qu’il soit approprié par le monde associatif 41
c. Des crédits pour la formation sous-utilisés alors qu’ils sont insuffisants au regard des besoins réels 42
d. Des mécanismes de valorisation du travail bénévole méconnus et complexes 43
TRAVAUX DE LA COMMISSION 47
ANNEXE N° 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS 65
ANNEXE N° 2 : CONTRIBUTION ÉCRITE ADRESSÉE AU RAPPORTEUR POUR AVIS 66
En 2017, les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » seront en hausse pour la deuxième année consécutive. En deux ans, la mission est en effet passée de 495 millions d’euros à 738 millions d’euros en crédits de paiement, soit une croissance de 49 %.
En y ajoutant les crédits des autres missions budgétaires, on observe que l’État consacrera en 2017 au total 1,19 milliard d’euros aux politiques du sport, de la jeunesse et de la vie associative, contre 1,11 milliard en 2016.
Au-delà des mesures techniques qui expliquent en partie cette croissance, le rapporteur sait gré au gouvernement d’avoir su trouver des moyens supplémentaires pour cette mission essentielle à la construction du lien social et de notre avenir.
Fort d’une expérience de dirigeant associatif et d’élu local, le rapporteur a choisi de s’intéresser, dans le cadre de la partie thématique de ce rapport, à un sujet transversal et primordial pour notre démocratie : le devenir de nos associations. Le désintérêt des Français pour l’action publique en général, l’abandon ressenti par notre jeunesse qui peut dériver jusqu’à la radicalisation, l’affaiblissement du lien social exigent que les hommes politiques renouvellent leur vision excessivement verticale de la société.
Certain que le monde associatif peut répondre à des besoins sociaux toujours plus nombreux tout en favorisant l’engagement de tous, le rapporteur est convaincu que son épanouissement constitue l’un des prérequis à cette révolution citoyenne, indispensable à notre pays. Cette transformation très profonde de notre façon d’appréhender les problèmes politiques suppose de faire un pari : celui de la confiance dans le monde associatif, qui prend des initiatives partout sur le territoire.
L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe au 10 octobre la date butoir pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 96 % des réponses étaient parvenues.
Les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » seront en forte augmentation pour la deuxième année consécutive en 2017, puisque les plafonds d’autorisations d’engagement passeront de 610 à 734 millions d’euros et les crédits de paiement de 617 à 738 millions d’euros, soit une augmentation respective de 20,3 % et de 19,2 % des plafonds de crédit par rapport à la loi de finances initiale pour 2016. Ce montant est assez éloigné de ce qu’avait prévu la loi de programmation des finances publiques 2014-2017, laquelle anticipait un budget en 2017 à 544 millions d’euros. Cet écart provient principalement de la mise en place de mesures nouvelles liées au développement du service civique ou qui résultent du conseil interministériel du 6 mars 2015 consacré à l’égalité et à la citoyenneté.
Contrairement à l’année précédente, l’augmentation constatée des crédits de la mission repose sur une hausse significative du programme 163 regroupant les crédits affectés à la jeunesse et à la vie associative mais aussi du programme 219 regroupant les crédits affectés au sport. Les premiers croissent en effet de 392 à 477 millions d’euros, soit une hausse de 21,7 % des crédits et les seconds de 218 à 225 millions d’euros, soit une hausse de 17,9 % des crédits de paiement.
Le rapporteur ne peut que se féliciter de voir que des enjeux aussi essentiels pour notre pays bénéficient chacun d’un engagement financier global aussi important de la part de l’État.
La jeunesse et la vie associative se voient ainsi attribuer 85 millions supplémentaires, après une première augmentation très importante en 2016. Il s’agit principalement d’une montée en charge du service civique qui doit passer de 110 000 engagés visés en 2016 à 150 000 en 2017. Au total, les crédits dévolus à ce dispositif, qui est au cœur de la politique du gouvernement sur la jeunesse, ont plus que triplé sur la durée du quinquennat (122 millions en 2012 contre 390 millions prévus en 2017).
Le sport connaîtra également une hausse importante de ses crédits en 2017. Celle-ci résulte toutefois principalement de mesures modifiant le périmètre du programme, lequel doit assurer le financement de la compensation des exonérations de charges sociales accordées au titre des rémunérations des arbitres et juges sportifs (1). À périmètre constant, cette augmentation se limite à 4,2 % en autorisations d’engagement et à 2,7 % en crédits de paiement et implique des efforts financiers notamment pour le Centre national de développement du sport (CNDS) en vue de participer à l’effort de rétablissement des comptes publics.
Le CNDS participera ainsi, malgré un budget global en augmentation, à hauteur de 14,45 millions d’euros, dont 9,90 millions d’euros déjà prévus par la loi de programmation des finances publiques, à l’effort de maîtrise des dépenses publique, sous la forme d’un plafonnement de la taxe affectée sur la Française des jeux dont il bénéficie.
ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION « SPORT, JEUNESSE ET VIE ASSOCIATIVE »
(en millions d’euros)
Mission « Sport, jeunesse et vie associative » |
Crédits ouverts en LFI pour 2016 |
Crédits demandés pour 2017 |
Variation LFI 2016/ | |||
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP | |
Programme 219 « Sport » |
218,02 |
224,67 |
257,32 |
260,97 |
+ 18,02 % |
+ 16,20 % |
Action 1 – Promotion du sport pour le plus grand nombre |
13,32 |
44,05 |
230,7 % | |||
Action 2 – Développement du sport de haut niveau |
158,32 |
164,95 |
166,18 |
169,83 |
4,96 % |
+ 2,96 % |
Action 3 – Prévention par le sport et protection des sportifs |
18,77 |
19,13 |
1,92 % | |||
Action 4 – Promotion des métiers du sport |
27,62 |
27,951 |
+1,19 % | |||
Programme 163 « Jeunesse et vie associative » |
392,21 |
476,72 |
21,55 % | |||
Action 1 – Développement de la vie associative |
26,10 |
17,51 |
– 33,91 % | |||
Action 2 – Actions en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire |
71,48 |
69,21 |
– 3,18% | |||
Action 4 – Développement du service civique (1) |
294,63 |
390,00 |
+ 32,37% | |||
Total |
610,23 |
616,88 |
734,04 |
737,69 |
20,29 % |
+ 19,20 % |
(1) Le libellé a été modifié par rapport à 2016, l’action 4 étant précédemment intitulé « Actions particulières en direction de la jeunesse ». Source : Projet annuel de performance de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » annexé au projet de loi de finances pour 2017. |
Le rapporteur constate que le budget dédié à la jeunesse et à la vie associative est globalement en hausse, témoignant de l’engagement sans précédent de ce Gouvernement. Toutefois, le renforcement considérable du service civique masque des diminutions inquiétantes dans d’autres actions, notamment le développement de la vie associative. Si le rapporteur admet que le service civique doit rapidement monter en puissance pour devenir une norme et un facteur de mixité au sein de notre jeunesse, il estime que ce dispositif ne saurait se substituer aux autres outils au service de la jeunesse.
Institué par la loi n° 2010-241 du 10 mars 2010 relative au service civique, le dispositif qui mobilise une part toujours plus importante (82 % en 2017 contre 77 % en 2016) des crédits du programme 163 permet à des jeunes de 16 à 25 ans de réaliser une mission d’intérêt général, pendant une durée maximale de douze mois, auprès d’une association, d’un établissement public ou d’une collectivité territoriale. Véritable levier d’engagement citoyen, le service civique assure également aux jeunes une certaine autonomie, puisqu’il est indemnisé à hauteur de 467 euros nets par mois, auxquels peuvent s’ajouter 106 euros nets de majoration sur la base de critères sociaux.
Ayant vocation, depuis le 1er juin 2015, à être accessible à tout jeune qui en fait la demande, le service civique a connu une importante montée en charge au cours de deux années précédentes L’objectif est de passer de 110 000 engagés en 2016 à 150 000 en 2017.
Pour y arriver, l’Agence du service civique, qui assure la mise en œuvre du dispositif, disposera en 2017 d’une augmentation de 5 ETP en plus des 5 décidées pour l’année précédente, ainsi que 50 ETP supplémentaires dans les services déconcentrés.
Au total, le programme bénéficie d’une hausse de 32,4 % de ses moyens, passant de 294,6 à 390 millions d’euros entre 2016 et 2017.
ÉVOLUTION DU NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES DU SERVICE CIVIQUE ENTRE 2010 ET 2017
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
2014 |
2015 |
2016 |
2017 | |
Nombre de volontaires en mission dans l’année |
6 008 |
19 133 |
29 883 |
33 723 |
34 831 |
53 000 |
110 000 (*) |
150 000 (*) |
(*) objectif. Source : réponse au questionnaire budgétaire. |
Il est en effet prévu, pour l’année 2017, de doter l’action 4 du programme 163 de 95,4 millions d’euros supplémentaires par rapport à l’année 2016, sous la forme d’une subvention pour charges de service public attribuée à l’Agence du service civique. Cette augmentation notable des crédits dédiés au service civique traduit l’objectif ambitieux de permettre en 2017 à 150 000 jeunes de bénéficier de ce dispositif.
Pour réaliser ses missions, l’Agence du service civique disposera, en 2017, de 81 équivalents temps plein travaillé (ETPT), dont 30 ETPT hors plafond, financés par le programme européen Erasmus.
En 2016, 1,7 million d’euros ont été consacrés dans le budget de l’agence à la communication autour du dispositif ; 0,9 million d’euros à l’animation territoriale, contrôle et évaluation du service civique ; 0,9 million au développement quantitatif et qualitatif de l’offre de missions de service civique ; enfin, 3,1 millions d’euros ont été consacrés aux fonctions support et 281,2 millions à l’indemnisation des volontaires et de leurs structures d’accueil.
La montée en charge du service civique semble ne pas avoir eu d’incidence significative sur l’âge moyen, la répartition des volontaires par niveau de formation ou encore sur le nombre d’engagés demandeurs d’emploi ou bénéficiaires de la majoration sur critères sociaux.
Le rapporteur, attaché à l’enjeu du brassage de tous les milieux sociaux, ne peut que se satisfaire de ce résultat dès lors que le service civique a vocation à être l’outil d’engagement de toute la jeunesse sans exception et non un énième outil déguisé d’insertion sociale.
Les crédits de l’action 2 du programme 163, qui portent la politique de l’État en matière de jeunesse et d’éducation populaire, sont presque stables, puisqu’ils atteindront 69,21 millions d’euros en 2017 contre 71,46 en 2016.
Ces crédits sont principalement destinés à soutenir :
– les projets associatifs Jeunesse Éducation populaire (JEP) à travers le Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (FONJEP) et les subventions du ministère aux associations dans le cadre de ses politiques partenariales locales à hauteur de 44,34 millions d’euros, soit un budget en très légère hausse par rapport à 2016 (44,08 millions) ;
– le financement des structures labellisées « information jeunesse » et des sites dédiés pour 6,34 millions d’euros en 2017 ;
– des échanges internationaux de jeunes, à hauteur de 13,88 millions d’euros en 2017 ;
– le développement d’une offre de loisirs éducatifs de qualité : 2,49 millions d’euros de subventions seront attribués aux colonies de vacances qui proposent des activités de qualité accessibles à tous et un projet pédagogique fort et lisible pour les parents ; le budget est néanmoins en baisse par rapport à 2016 (3,36 millions d’euros) ;
– le dispositif « Sésame vers l’emploi pour le sport et l’animation dans les métiers de l’encadrement » (SESAME), qui doit accompagner vers un emploi d’éducateur sportif ou d’animateur des jeunes âgées de 16 à 25 ans en difficulté d’insertion ainsi que l’organisation des examens de certifications et la valorisation des acquis de l’expérience dans le domaine de l’animation ; le programme 163 contribue de manière renforcée en 2017 au développement des métiers de l’animation à hauteur de 1,36 million d’euros, à comparer au million dégagé à cet effet en 2016.
Enfin, les crédits affectés aux activités de jeunesse, d’éducation populaire et de vie associative s’élèveront en 2017 à 0,8 million d’euros. Il s’agit du financement d’études et d’observation de l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP) ainsi que du soutien logistique à des frais liés aux activités de l’administration centrale.
L’action 1 du programme 163 regroupe les crédits dédiés au développement de la vie associative. Ceux-ci sont en baisse dans des proportions importantes puisqu’ils passeront en 2017 de 26,1 à 17,51 millions d’euros.
Ainsi, le Fonds de développement de la vie associative (FDVA), destiné à soutenir le développement de la vie associative par le financement d’actions de formation à destination des bénévoles associatifs voit ses crédits diminuer à 8,15 millions d’euros, à comparer avec les 9,63 millions d’euros ouverts en loi de finances pour 2016. Ce niveau reste toutefois supérieur au niveau d’exécution pour l’année 2016, seuls 7,9 millions d’euros ayant été utilisés.
Les crédits destinés aux associations nationales agréées de jeunesse et d’éducation populaire, qui bénéficiaient en 2015 de 8,63 millions d’euros au titre de l’action 2 et de 7,9 millions d’euros en 2016 au titre de l’action 1, voient leurs crédits diminuer pour atteindre 7,26 millions d’euros en 2017.
Les crédits attribués aux délégués départementaux à la vie associative (DDVA) pour couvrir les frais d’animation et de communication des missions d’accueil et d’information des associations sont stables à 0,26 million d’euros en 2017, contre 0,27.
De la même façon, les crédits alloués aux fédérations nationales et régionales actives en matière de développement du bénévolat et de l’engagement citoyen s’établissent en forte hausse, passant de 0,38 million d’euros en 2016 à 0,67 million d’euros en 2017.
Les crédits assurant le fonctionnement des centres de ressources et d’information des bénévoles (CRIB), qui aident les dirigeants bénévoles d’associations dans leurs démarches administratives, connaissent une légère augmentation, et atteignent en 2017 1,19 million d’euros, contre 1,25 million d’euros en 2016.
Si l’enjeu du développement de la vie associative est davantage à l’étude dans la seconde partie du rapport, le rapporteur pour avis estime que la diminution de cette part du budget dans des proportions loin d’être négligeables est difficilement compréhensible au regard des objectifs affichés par l’État dans le cadre du « New Deal associatif » annoncé. Il s’inquiète du déséquilibre entre les efforts possibles pour développer le service civique et des contraintes parfois très fortes qui s’exercent sur les autres actions du programme. Il salue néanmoins les efforts faits pour certaines activités essentielles comme les CRIB ou le soutien aux fédérations pour développer le bénévolat, qui sont parfaitement en ligne avec les préconisations présentées en seconde partie.
Le budget du sport pour 2017 poursuit l’effort de reconduction des crédits menés en 2016, auquel viennent s’ajouter des mesures de périmètre. Le rapporteur ne peut que se féliciter de cette sanctuarisation hors année olympique.
L’action 1 du programme « Sport » a vocation à promouvoir la pratique d’activités physiques et sportives auprès du plus grand nombre, notamment auprès des publics scolarisés et des personnes les plus éloignées de la pratique sportive. Cette politique est financée par des crédits budgétaires, à hauteur de 44 millions d’euros, ainsi que par le fonds de concours du CNDS, à hauteur de 19,5 millions d’euros, montant inchangé par rapport à 2016.
Au total, il apparaît que les crédits de ce programme connaissent un quasi-triplement en raison d’un élargissement du périmètre issu de l’inscription en action 1 de la compensation auprès de l’ACOSS des exonérations de charges sociales accordées au titre de la rémunération des arbitres et juges sportifs. Hors mesure de périmètre et de transfert, les crédits alloués à cette action sont en légère hausse (+ 0,34 million d’euros) par rapport en 2016.
Comme en 2016, la majorité des crédits de cette action, soit 21,05 millions d’euros, dont 1,55 million d’euros de crédits budgétaires, sont alloués aux fédérations sportives pour financer les actions nationales destinées à promouvoir le sport pour tous.
Les crédits restants financent plusieurs actions :
– le fonctionnement du Musée national du sport pour un budget identique à celui de 2016, soit 2,84 millions d’euros ;
– le fonctionnement des trois pôles ressources nationaux implantés au sein des CREPS, à hauteur de 1,01 million d’euros, en légère baisse par rapport à 2016 ;
– diverses actions de coopération internationale au bénéfice des fédérations et associations pour la mise en œuvre d’actions entrant dans le champ des relations bilatérales et accords intergouvernementaux ; au total, ces actions mobiliseront 0,58 million d’euros ;
– des projets relevant de programmes multilatéraux à hauteur de 0,41 million d’euros ;
– la participation de la France aux prochains jeux de la Francophonie en Côte d’Ivoire (0,4 million d’euros) ;
– le soutien aux projets sportifs prenant en compte les sports de la nature, le développement durable et la préservation de l’environnement (0,12 million d’euros) ;
Toutefois, la politique de l’État en faveur du sport pour tous est principalement financée, cette année encore, par les fonds issus du Centre National de Développement du Sport (CNDS).
Cet établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre chargé des sports a pour principale mission de contribuer au développement de la pratique sportive par l’attribution de concours financiers, qui prennent la forme de subventions d’équipement ou de fonctionnement versées aux associations sportives et aux collectivités territoriales.
Le budget de cet opérateur devrait représenter en 2017 260 millions d’euros bruts. Ces ressources sont issues de quatre taxes affectées :
– le prélèvement sur les paris sportifs en ligne de la Française des jeux et des nouveaux opérateurs agréés dont le plafond a été fixé pour 2017 à 34,6 millions d’euros contre 32,3 millions d’euros en 2016 ;
– le prélèvement sur les jeux exploités par la Française des jeux hors paris sportifs sous un plafond de 159 millions d’euros en 2017 contre 163,4 millions en 2016 ;
– le prélèvement complémentaire temporaire 2011-2015 « UEFA Euro 2016 » sur les jeux exploités par la FDJ hors paris sportifs qui devrait rapporter 27,6 millions d’euros en 2016 (estimation) et 25,5 millions d’euros en 2017 (plafond), désormais affectés à la construction des stades et à la candidature de Paris à l’organisation des Jeux Olympiques 2024 ;
– la contribution sur la cession à un service de télévision des droits de diffusion des manifestations ou de compétitions sportives sous un plafond inchangé de 40,9 millions d’euros en 2017 ;
La réforme du CNDS entamée en 2014 sera amplifiée en 2017 en vue de concentrer les moyens vers les besoins les plus importants et de mettre en œuvre les mesures décidées par le comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté (professionnalisation des clubs, déploiement du programme « J’apprends à nager »).
Le budget 2017 du CNDS est marqué par une dotation en hausse, malgré la poursuite du plan d’économies, grâce à la reconduction de certaines ressources et le déploiement d’un nouveau plan pour les outre-mer :
– le CNDS continuera ainsi d’assumer le renforcement du plan « Citoyens du sport » en 2017 ;
– la mesure exceptionnelle de 10 millions d’euros obtenue en 2016 pour le soutien à la candidature de la ville de Paris aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 est également reconduite en 2017 et sera financée par le prélèvement complémentaire sur les jeux hors paris sportifs de la Française des jeux ;
– le CNDS s’engagera enfin dans de nouvelles actions comme un plan spécifique de rattrapage des équipements sportifs pour l’outre-mer de 10 millions d’euros, financé par un relèvement exceptionnel du plafond du prélèvement principal sur la Française des jeux par rapport à la loi de programmation des finances publiques de juillet 2014 (2).
Les crédits dédiés au sport de haut niveau sont regroupés au sein de l’action 2 du programme 219, qui représente cette année 60 % des crédits du programme, soit un net recul par rapport à 2016 où sa part dépassait 75 %. Cette modification tient essentiellement à la mesure de périmètre retenue dans l’action 1, car les crédits dévolus à cette action sont quasiment stables et les autorisations d’engagement en légère hausse.
Ces crédits s’établissent en 2017 à 169,84 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 169,83 millions d’euros en crédits de paiement, sont néanmoins en augmentation par rapport aux crédits ouverts par la loi de finances initiale pour 2016, qui représentaient respectivement 158,32 et 169,95 millions d’euros.
Si les autorisations d’engagements, qui s’établissent en 2017 à 169,84 millions sont en hausse par rapport au montant de 158,32 millions d’euros prévu en 2016, les crédits de paiement sont en légère baisse, passant de 169,95 millions d’euros en 2016 à 169,83 millions d’euros en 2017.
Parmi les choix opérés pour l’année 2017, on observe de nombreuses reconductions de budget ainsi que quelques augmentations significatives.
L’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (INSEP) qui avait supporté une légère baisse de crédits en 2016 (– 0,8 million d’euros), voit son budget de fonctionnement hors Partenariat-Public-Privé (PPP) remonter à hauteur de 22,60 millions d’euros pour 2017, soit un retour au niveau de 2015.
Les centres de ressources, d’expertise et de performance sportives (CREPS) bénéficieront en 2017 d’une subvention de fonctionnement de 60,51 millions d’euros, soit une hausse de 5,8 % par rapport aux crédits ouverts en 2016, dont 55,68 millions d’euros au titre des personnels, 4,68 millions d’euros au titre de la mission relative au sport de haut niveau et 0,15 million pour la formation des personnels.
Il convient toutefois de préciser que ces augmentations s’expliquent par l’impact financier des titularisations des contractuels dans le cadre de la loi « Sauvadet » et de la revalorisation du point d’indice de la fonction publique, et non par des recrutements.
Une part importante des crédits de l’action 2 est consacrée à l’action des fédérations sportives en matière de sport de haut niveau. Les 45,92 millions d’euros alloués en 2016, année olympique, seront maintenus en 2017, ce qui constitue un effort financier notable.
Les crédits de l’action 2 destinés à l’accompagnement social et professionnel des sportifs de haut niveau sont également maintenus au même niveau que l’année passée : le versement des aides personnalisées aux sportifs de haut niveau inscrits sur la liste ministérielle pour 8,27 millions d’euros ; les conventions d’insertion professionnelle des sportifs, à hauteur de 0,5 million d’euros au niveau national et de 0,32 million d’euros au niveau local ; le financement d’actions décentralisées de formation et d’insertion sociale et professionnelle pour 1,71 million d’euros.
Par ailleurs, si les crédits destinés à financer la prise en charge des cotisations retraite des sportifs de haut niveau s’inscrivent en baisse
– 2,50 millions d’euros contre 4 millions d’euros –, cela correspond comme en 2016 à une meilleure anticipation du coût du dispositif.
L’action 2 finance également le dispositif de couverture des accidents du travail et maladies professionnelles des sportifs de haut niveau, qui atteindra en 2017 la somme de 3,77 millions d’euros correspondant au premier exercice d’application du dispositif.
Les investissements dans les établissements de sport en nette hausse s’agissant des autorisations d’engagement (4,74 millions d’euros contre 1,20 million d’euros en 2016) mais en baisse pour les crédits de paiement (6,23 millions d’euros en 2017 contre 6,55 millions en 2016) ;
L’accompagnement des « parcours de l’excellence sportive » (PES) voit ses crédits accrus (9,42 millions d’euros en 2017) ;
Les autres dispositifs sont stabilisés :
– Le soutien aux fédérations sportives est reconduit intégralement à hauteur de 45,92 millions d’euros ;
– les loyers du PPP à l’INSEP pour 13,66 millions d’euros en crédits de paiement ;
– l’accompagnement socioprofessionnel des sportifs de haut niveau, avec 10,8 millions d’euros.
3. La légère hausse des crédits affectés à la protection des sportifs et à la promotion des métiers du sport
Les crédits de l’action 3, consacrés à la prévention par le sport et à la protection des sportifs, comme ceux de l’action 4, dédiés à la promotion des métiers du sport, sont en légère hausse par rapport à la loi de finances initiale pour 2016, et s’établiront respectivement, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, à 19,13 et 27,95 millions d’euros en 2017.
L’action 3 regroupe les crédits de plusieurs politiques conduites par l’État.
Ainsi, près de la moitié des crédits de cette action sont consacrés à la lutte contre le dopage et renforcent le financement tant de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), qui reçoit cette année une subvention de fonctionnement de 8,5 millions d’euros contre 7,8 millions d’euros l’année précédente, que de l’Agence mondiale antidopage (AMA), à laquelle la France contribue à hauteur de 0,69 million d’euros contre 0,56 million d’euros en 2016.
Les crédits de l’action 3 financent également :
– les fédérations sportives à hauteur de 6,85 millions d’euros ;
– les actions nationales de prévention de la santé par le sport et le programme de recherche de portée nationale pour 0,38 million d’euros ;
– les actions déconcentrées de promotion des activités physiques et sportives et de suivi médical des sportifs à hauteur de 1,46 million d’euros ;
– les actions de prévention et lutte contre les incivilités et la violence dans le sport à hauteur de 0,74 million d’euros.
Enfin, l’action 4 regroupe les crédits visant à former le personnel d’encadrement de la pratique sportive. Une part importante de ces dotations correspond aux subventions pour charges de service public destinées à trois écoles nationales (école nationale des sports de montagne (ENSM), école nationale de voile et des sports nautiques (ENVSN) et institut français du cheval et de l’équitation (IFCE)). Elles représenteront 19,67 millions d’euros en 2017 contre 19,21 millions d’euros en 2016 pour tenir compte de l’impact financier du dispositif « loi Sauvadet » de titularisation.
Le reste des crédits soutient :
– les actions de formation menées au niveau national dans les écoles et à l’INSEP pour un total de 1,12 million d’euros en 2017, identique à celui de 2016, ainsi que le plan de formation continue des agents des écoles nationales (0,14 million pour l’IFCE, l’ENSM, l’ENVSN et l’INSEP) sous forme de subventions pour charge publique ;
– les actions menées par les fédérations sportives pour un montant reconduit en 2017 à 4,88 millions d’euros ;
– les rémunérations des stagiaires de l’INSEP relevant de la formation professionnelle continue (0,17 million d’euros) et les études de conception des certifications (0,17 million d’euros).
II. UNE AMBITION POUR UN MONDE ASSOCIATIF FRAGILISÉ : METTRE EN PLACE UNE POLITIQUE DE COHÉRENCE ET DE MAILLAGE ASSOCIATIF
Le rapporteur a choisi, dans le cadre de son avis budgétaire, d’étudier le maillage associatif et la politique mise en place pour en assurer le soutien. Dans cette perspective, il a pris l’initiative de conduire en plus des habituelles auditions de hauts fonctionnaires et d’experts, d’autres modes d’échange, plus directs, avec les hommes et les femmes qui s’investissent pour leur territoire. Ce sont ainsi près de 3 000 associations qu’il a sollicitées par la voie d’un questionnaire. Les réunions publiques organisées dans plusieurs communes (3) de sa circonscription ont rassemblé près de 800 associations, qui ont pu aussi partager leurs espoirs et leurs craintes, dans un contexte politique et financier difficile.
Le rapporteur a pu constater par lui-même lors de ces rencontres les inquiétudes profondes et légitimes qui traversent l’ensemble du milieu associatif. L’engagement sans précédent du gouvernement, notamment au travers de sa politique en faveur de la jeunesse, n’a pas réussi à le rassurer pleinement. Ce contraste entre les actions annoncées et mises en œuvre au niveau ministériel et le ressenti des personnes engagées sur le terrain résulte directement d’un manque de vision d’ensemble quant à ce que peut être une politique en faveur des associations.
Une telle politique est nécessairement portée par une ambition : on peut demander aux associations de faire plus et mieux à condition de leur allouer l’ensemble des outils dont elles ont besoin, à savoir :
– de la confiance dans les relations nouées avec les pouvoirs publics ;
– des moyens financiers suffisants et pérennes ;
– et un renforcement des compétences à disposition.
Le présent rapport ne se contente donc pas de faire un constat alarmiste de la situation ni d’énumérer les mesures positives prises par la majorité depuis quatre ans : il entend démontrer qu’il existe des pistes, dans chacun de ces grands axes, capables de redonner au monde associatif suffisamment de marge de manœuvre pour continuer à innover et à dynamiser nos territoires.
Le rapporteur a pu constater auprès des personnes rencontrées un risque de rupture entre les associations et leurs partenaires naturels que sont l’État et les collectivités territoriales. Ces différends peuvent être surmontés si tout est mis en œuvre pour créer un véritable dialogue entre le monde associatif et les pouvoirs publics, notamment au niveau local.
1. Le risque d’une véritable rupture de confiance entre les pouvoirs publics et les associations malgré une mobilisation gouvernementale sans précédent
L’inquiétude très profonde, qui justifie pleinement ce rapport volontariste, est remontée directement des associations et de leurs têtes de réseau auditionnées par le rapporteur : au-delà des questions budgétaires, c’est le manque de dialogue et de confiance avec l’État et les collectivités territoriales qui constitue la plus grande menace pour le tissu associatif.
En effet, en France comme dans le reste de l’Europe, le monde associatif évolue nécessairement dans une forme de partenariat avec l’État, contrairement aux États-Unis où les associations sont perçues comme concurrentes des services offerts par l’administration et les entreprises. Dans ce mode de fonctionnement associatif dit « continental », il dépend très largement des financements publics en échange d’une participation directe ou indirecte aux missions de service public.
Au niveau européen, comme le rappelait en 2014 notre collègue Françoise Dumas (4), la « terrible machine bureaucratique des financements européens » rend pourtant quasiment inaccessibles les fonds liés aux projets de développement (fonds social européen et fonds européen de développement régional) aux associations les plus modestes. La complexité des dossiers, la longueur des délais de paiement, la lourdeur des contrôles étaient notamment pointés par le rapport, qui appelait à une simplification des procédures qui reste encore à mettre en place.
Au niveau national, l’État est perçu depuis longtemps comme un producteur excessif de normes, qui viennent se sédimenter au détriment des associations, notamment les plus petites, qui n’ont ni le personnel ni le temps pour les intégrer. Ainsi, les procédures administratives sont souvent jugées très complexes, notamment pour les petites structures qui ne sont pas en situation de pouvoir gérer la réglementation fiscale ou sociale. Une étude réalisée en 2008 (5) montrait ainsi que 33 % des associations sondées ressentaient des difficultés dans les démarches à effectuer, notamment lors de l’apparition de difficultés financières pour obtenir une aide financière publique ou pour réaliser une démarche de demande d’agrément auprès d’un ministère. Plus grave encore, les associations ont attiré l’attention du rapporteur sur les risques bien réels que constituent ces normes, lorsqu’elles conduisent des dirigeants associatifs de bonne foi devant des tribunaux.
Le gouvernement s’est engagé depuis dans un « New deal » à la suite de l’inscription de l’engagement associatif comme grande cause nationale en 2014 et de réels progrès ont été constatés. Une relation de confiance a notamment pu se créer entre les grandes « têtes de réseau » nationales et la direction de jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative (DJPEVA) grâce à un meilleur dialogue autour de réunions périodiques.
Toutefois, l’enjeu associatif se situe principalement au niveau local dans les relations de proximité avec les collectivités territoriales. Or, les associations auditionnées ont souligné le fait qu’il n’existe pas toujours d’interlocuteur fixe, informé et bienveillant pour les accueillir. Les relations sont souvent variables d’une collectivité à l’autre, quand elles ne sont pas personnalisées ou politisées. Certaines grandes fédérations d’associations ont insisté sur l’absence de formation des fonctionnaires territoriaux à ces enjeux et signalé que, lorsque cette formation existe, elle est conçue en interne par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) sans concertation avec les premiers concernés, c’est-à-dire les milieux associatifs.
La tendance de certaines collectivités à traiter les associations comme de simples prestataires qu’elles ne financent qu’à condition qu’elles remportent des marchés publics a également participé à une incompréhension toujours plus accusée entre les associatifs et leurs financeurs jugés court-termistes.
Pire, les associations ont l’impression d’être considérées comme une variable d’ajustement des budgets nationaux et locaux et sont parfois les victimes des alternances des politiques, indépendamment de la qualité des actions qu’elles mènent sur le terrain. De nombreuses associations rencontrées ont rapporté leur désespoir face à des collectivités qui suppriment du jour au lendemain leurs subventions. Il n’est pas normal que des petites structures attachées à certaines valeurs et à des projets d’intérêt public soient stigmatisées parce qu’elles ont été aidées financièrement par de précédentes majorités.
Il s’agit donc de trouver une méthode pour créer une relation de confiance entre tous les acteurs.
Le rapporteur souhaite développer un modèle de gouvernance multilatéral qui passe par une contractualisation des relations administration-associations en vue de restaurer un climat de confiance. C’est dans ce cadre à la fois souple et clarifié que la démarche d’engagements réciproques voulue par le Gouvernement prend tout son sens : les pouvoirs publics doivent apporter un soutien plus poussé aux petites associations et avoir le souci de la simplicité dans l’édiction des normes tandis que le monde associatif doit se préparer à davantage de coopération en son sein pour mutualiser des moyens.
a. Les relations entre pouvoirs publics et associations doivent passer par une concertation et une contractualisation renforcées
Le Gouvernement a ouvert une voie intéressante à la contractualisation en signant une Charte d’engagements réciproques (6) avec les associations, qui inclut pour la première fois les collectivités territoriales. Le Premier ministre a souhaité donner corps à cette charte dans une circulaire du 29 septembre 2015 (7). Le rapporteur s’associe pleinement à l’ensemble des engagements invoqués par la charte, qui doivent devenir les principes directeurs de cette nouvelle relation entre les pouvoirs publics et les associations.
Les ambitions de la charte d’engagements réciproques
et de la circulaire du 29 septembre 2015
La charte d’engagements réciproques du 14 février 2014 renouvelle la charte de 2001, élaborée pour le centenaire de la loi sur la liberté d’association.
Dans cette charte, l’ensemble des partenaires partage le souhait de construire une relation de confiance fondée sur des bases conventionnelles durables, transparentes et évaluables, la conviction que le bénévolat est le fondement de la vie associative et que les associations contribuent au développement économique, social, culturel, citoyen et durable.
L’État et les collectivités territoriales s’engagent à promouvoir l’engagement, à favoriser des soutiens publics dans la durée, à rendre plus transparents les critères de sélection et d’attribution des subventions, à respecter les compétences de chaque collectivité, à prendre en compte les spécificités du monde associatif, à privilégier la concertation, à distinguer le contrôle de légalité et l’évaluation, à former les agents publics à une meilleure connaissance de la vie associative, à associer l’ensemble des acteurs dans des projets territoriaux, à soutenir les regroupements d’associations, à promouvoir les principes de la loi de 1901 et à soutenir la libre association à l’international.
L’État s’engage à donner de la cohérence et de la visibilité à la politique associative, à favoriser les conventions pluriannuelles d’objectifs ; à maintenir la désignation d’associatifs au CESE et au CESE européen ; à améliorer les outils de connaissance de la vie associative ; à adapter le régime fiscal au caractère désintéressé des associations, à encourager la reconnaissance des associations européennes.
Les collectivités territoriales s’engagent à conduire une politique associative cohérente, à favoriser la création de lieux d’accueil pour les associations et à mettre en œuvre des formes transparentes de soutien matériel aux associations.
Les associations s’engagent notamment à répondre aux attentes des publics dans le cadre de projets, à défendre une éthique du financement des activités, à respecter les principales règles de la gestion des ressources humaines et à développer des méthodes d’évaluation permettant de rendre compte de leur action.
Il est néanmoins utile de préciser que la charte n’a aucune valeur juridique.
La circulaire du 29 septembre 2015 a quant à elle donné un cadre juridique aux subventions aux associations afin de les distinguer des aides d’État. Elle indique les modalités d’instruction des demandes de subvention et propose des modèles de convention. Elle précise également le rôle du délégué régional ou départemental à la vie associative (8).
Toutefois, les résultats concrets de l’application de la charte deux après sa signature et de la circulaire de septembre 2015 sont encore difficilement visibles sur le terrain, faute d’une déclinaison plus concrète.
C’est pourquoi le rapporteur estime que la démarche nationale de clarification doit s’accompagner sur le terrain de la généralisation d’un outil de conventionnement renforcé qui conduirait tous les partenaires à se rencontrer régulièrement autour de projets pour le territoire, d’autant que la loi NOTRe (9) maintient la compétence de l’ensemble des niveaux de collectivités territoriales en matière de soutien aux associations (10).
Cette nouvelle relation partenariale devra en effet passer par un conventionnement à l’image des contrats de territoire, sur le modèle « un projet, un contrat, un territoire » (11), qui ont montré plusieurs avantages dans la gestion des projets impliquant différentes collectivités. Des volets « vie associative » dans les contrats existants ou des contrats spécifiques, en fonction de ce qui s’adapte le mieux au territoire concerné, pourront ainsi réunir utilement l’ensemble des parties prenantes autour d’un milieu de vie, indépendamment de la répartition des rôles classiques entre collectivités.
Cet instrument souple, facilement modifiable par des avenants, doit être le produit d’une concertation qui permet d’établir un diagnostic sur un territoire donné qui identifie les besoins de la population et la capacité des associations existantes à y répondre. Conçus comme autant de projets, les contrats se donneraient des objectifs qui permettraient d’évaluer objectivement des résultats, construisant ainsi une relation de confiance entre les décideurs territoriaux et les associations qui bénéficient de leurs dotations.
Le rapporteur insiste sur la puissance d’un tel outil pour transformer en profondeur la situation actuelle. Il s’agit d’échapper à de nombreux écueils qui handicapent tous les jours le travail des associations : le fait de mettre l’ensemble des parties autour de la table doit permettre de dépasser les vis-à-vis parfois délétères entre des dirigeants politiques communaux et des associations. En associant l’ensemble des parties prenantes autour de diagnostics et de projets partagés, il sera possible de dépasser les clivages politiques qui n’ont pas lieu d’être dans des rapports avec des entités qui sont d’abord et avant tout des coopératives d’intérêt général.
Ce cadre serait également porteur de simplification pour les associations qui pourraient alors réaliser dans ce cadre des demandes uniques de subventions. Les collectivités pourraient s’accorder sur un partage des responsabilités financières en fonction des projets. Cette méthode sera également plus propice à la pérennisation des financements à travers des conventions d’objectifs et de moyens multipartites.
Simplifier les relations entre les associations et les différentes administrations avec lesquelles elles échangent constitue une autre clef d’une politique partenariale réussie.
Des mesures importantes ont été prises par le Gouvernement ces dernières années et doivent continuer à être promues pour que les associations se les approprient.
L’ordonnance du 23 juillet 2015 (12), inspirée par les préconisations de notre collègue Yves Blein (13), a permis de simplifier certaines démarches comme la création d’association et de fondations, les demandes d’agréments et de subventions, le financement privé ainsi que les obligations comptables des associations cultuelles. L’impact net de ces mesures sur les finances des associations est évalué par le ministère à 32,348 millions d’euros d’économies réalisées grâce à l’allégement ou à la suppression de procédures, aux déplacements évités et à la rationalisation des démarches.
Des efforts ont également été menés notamment pour dématérialiser les démarches. La direction de l’information légale et administrative (DILA) a mis en place, en partenariat avec la direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative et le ministère de l’intérieur, un site dédié aux associations : service.public.asso.fr qui a remplacé le site compteasso.service-public.fr le 1er juillet 2016 comme support multifonctionnel :
– il permet de réaliser une vingtaine de démarches administratives dont la création, la dissolution ou encore les demandes de subvention ;
– il fait état des démarches en cours et permet de dialoguer avec l’administration qui traite la demande ;
– il contient un espace de stockage des données et des démarches qui favorise la réitération des demandes et le remplissage des dossiers qui se fait quasiment automatiquement grâce à l’application du principe « dites-le nous une fois ».
Le ministère a également créé en mars 2016 un guide d’usage de la subvention qui présente en une trentaine de pages les informations essentielles à connaître : définition de la subvention, les « bonnes raisons » de la demander, les « bonnes pratiques » entre associations et collectivités, les différentes formes de subvention, les règles comptables et fiscales, etc.
Si les progrès liés à ces mesures récentes devraient être rapidement perçus par les associations dans les années à venir, il s’agit de ne pas relâcher l’effort de simplification. Lors des réunions publiques qu’il a conduites, le rapporteur n’a pas pu constater des progrès perceptibles pour les petites associations locales, qui ne se sont pas encore approprié les dispositifs dématérialisés. Un effort de communication sur ces nouveaux dispositifs doit être conduit pour assurer une meilleure diffusion.
Une vigilance particulière doit aussi être portée sur les dispositifs nouveaux dont la complexité n’a pas été éprouvée. Ils viennent parfois s’ajouter à d’autres éléments existants au risque de rendre inutilement confuse l’offre administrative.
On peut donner l’exemple des différents dispositifs de congé susceptibles d’être pris dans le cadre de l’engagement associatif. Le Haut Conseil à la vie associative (HCVA) rappelait dans un avis du 10 mars 2016 sur le projet de loi dit « Égalité et citoyenneté » (14) en cours de discussion au Parlement que « les différents congés destinés aux bénévoles des associations pourraient être regroupés sous une même appellation : congé d’engagement associatif ». Il est vrai qu’il existe dans le droit actuel cinq modalités pour prendre un congé afin de s’engager dans une association : le congé individuel de formation, le congé de formation économique et sociale et de formation syndicale, le congé de formation de cadres et d’animateur pour la jeunesse, le congé de représentation et le congé de solidarité internationale, auxquels il faudrait ajouter le congé pour formation ou participation aux activités de direction prévu par l’article 8 du projet de loi. Une réflexion sur un congé unique qui pourrait être décliné à différentes situations mérite d’être menée.
De même, si la création du compte personnel d’activité est de nature à créer un véritable « double dividende » pour notre société en permettant aux associatifs de valoriser leur engagement et aux travailleurs de se donner les moyens de devenir des bénévoles formés, l’efficacité du dispositif dépendra beaucoup de sa lisibilité.
Le compte personnel d’activité : un dispositif qui reconnaît et accompagne l’engagement associatif
La loi du 8 août 2016 (15) a prévu la mise en place du compte personnel d’activité (CPA), dont le nom avait déjà été acté par la loi du 17 août 2015 (16) à compter du 1er janvier 2017. Il comprendra le compte personnel de formation (CPF), le compte personnel de prévention de la pénibilité (CPPP) et le compte d’engagement citoyen (CEC).
Ce dernier recensera les activités bénévoles ou de volontariat de son titulaire en vue d’accumuler des heures sur le compte personnel de formation dans la limite d’un plafond de soixante heures et des jours de congés payés pour permettre l’exercice de ces activités. Ces droits seront consultables et utilisables à partir d’un portail numérique commun aux trois comptes développé en ce moment par la Caisse des dépôts et consignations. Des décrets sont en préparation pour en définir les modalités de fonctionnement.
Le rapporteur insiste sur le fait qu’une administration qui assume une relation partenariale avec les associations doit leur offrir un accompagnement administratif adéquat.
Cet accompagnement est assuré aujourd’hui par trois types de structures :
– Les maisons des associations sont des équipements municipaux qui fournissent des conseils et des formations pour les associatifs en vue d’accompagner les projets, aider à la gestion des locaux, appuyer les structures pour les problèmes de logistique, de communication, d’embauche, faire mieux connaître les financements et les modalités d’attribution des subventions et soutenir les associations qui emploient un faible nombre de salariés ;
– Les centres de ressources et d’information pour les bénévoles (CRIB) accompagnent plus particulièrement le bénévolat et orientent les volontaires vers les associations ;
– les dispositifs locaux d’accompagnement (DLA) créés en 2002 par l’État et la Caisse des dépôts et consignations (CDC) assurent l’accompagnement des structures d’utilité sociale employeuses dans leurs démarches de création, de consolidation et de développement de l’emploi. En 2015, il s’est agi principalement d’appuyer les projets ou les stratégies de consolidation et de conseiller les structures sur leur organisation interne et la gestion des ressources humaines. Les DLA participent ainsi au développement de l’emploi et à une amélioration de sa qualité. La spécificité des DLA tient au financement à hauteur de 10 % par des fonds européens (17) en plus de la CDC et des autres collectivités. Ils sont présents dans l’ensemble des départements et des régions de France.
Ces différentes modalités d’accompagnement ont chacune leur intérêt propre, cependant il conviendrait de s’assurer que les différents dispositifs se connaissent pour mieux se compléter, échangent, co-construisent des projets d’accompagnement de jeunes et/ou de petites et moyennes associations. Il s’agit aussi de s’assurer que tout le territoire est effectivement couvert par ces antennes de proximité.
Ce travail de réflexion sur l’ensemble du dispositif d’accompagnement doit être l’occasion de favoriser une offre souple, accessible, complémentaire et innovante au service des associations. Il s’agit d’un sujet clef pour la création d’un point d’entrée lisible et accessible pour toutes les associations.
Le rapporteur y ajoute la possibilité encore sous-utilisée pour les associations d’adhérer à une organisation d’employeurs qui peut leur apporter un soutien très important, notamment en matière de droit du travail, pour le prix très raisonnable d’une adhésion.
Au-delà de la légitime question des moyens qui est abordée plus loin dans ce rapport, le rapporteur a pu constater lors des rencontres qu’il a organisées qu’il existait au préalable un problème de déperdition des financements et des énergies dû à la fragmentation du paysage associatif.
La variété de ce dernier est évidemment le reflet des différents besoins et des différents centres d’intérêt de nos concitoyens et il n’est pas question de remettre en cause la vitalité et la diversité de notre tissu associatif. Cependant, ces associations, souvent de taille modeste (18), sont installées sur un territoire avec un rayonnement essentiellement communal, parfois départemental. Elles doivent, pour mieux se consacrer à titre principal à leur projet, pouvoir prendre attache avec des associations proches par leur localisation ou par leur centre d’intérêt pour partager certains moyens (locaux, personnels administratifs lorsqu’il y en a voire dirigeants).
Il est à noter que la mutualisation des personnes peut participer à la résolution du problème de la précarité des emplois associatifs qui prennent souvent la forme de contrats à temps partiel subis, alors que des emplois à temps plein peuvent être créés pour travailler auprès de plusieurs associations.
La mutualisation peut prendre différentes formes en fonction du degré d’intégration possible et souhaité :
– le conventionnement ou contrat de partenariat pour partager un salarié, des coûts d’investissement, un service d’achat ; la convention doit alors prévoir les modalités de répartition des coûts, des responsabilités mais aussi les modalités de sortie ou de séparation ;
– la création d’un nouvel organisme ayant lui-même une forme associative : union d’association, groupement d’employeurs associatifs (19), groupement d’intérêt économique, groupement de coopération sanitaire voire une société coopérative d’intérêt collectif ou une union d’économie sociale ;
– la fusion, si elle n’est pas toujours possible, peut constituer une solution dans certains cas ; l’activité et le patrimoine de l’association disparue sont transférés vers l’association maintenue, dans un cadre juridique et fiscal clarifié par la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire précitée.
Le droit existant offre donc des possibilités intéressantes qui sont encore trop méconnues des responsables associatifs. Renforcer la mutualisation suppose donc à la fois :
– de favoriser les rencontres entre associations, par exemple au sein des maisons des associations ou de locaux repensés en espaces de coworking, pour qu’elles puissent échanger et constater, le cas échéant, le besoin de se regrouper ou de mutualiser certaines fonctions ;
– de maintenir voire de renforcer les dispositifs permettant une meilleure connaissance des dispositifs juridiques existants car ils peuvent paraître trop complexes aux structures qui en ont le plus besoin, à savoir les plus petites.
Le rapporteur est également favorable à la création d’un nouveau type de groupement d’employeurs qui permette non seulement de partager un salarié qui assure un même métier pour les différentes associations, mais aussi de partager un emploi qui assure plusieurs métiers. Cette évolution est rendue nécessaire par les modalités d’exercice de certaines professions associatives, notamment dans le domaine du sport. Ainsi, encadrer une activité sportive n’est possible que sur des plages horaires limitées liées au temps extrascolaire (soir, mercredi après-midi, week-end). Il s’agit donc de permettre au groupement d’employeur de proposer pendant le reste du temps de travail d’autres tâches à accomplir. En effet, si les salariés associatifs aspirent à un emploi à plein temps, il est nécessaire de donner la possibilité d’élargir l’éventail des métiers dans lesquels il peut travailler.
Une telle évolution compléterait la réponse que peut apporter la mutualisation des ressources humaines à la précarité de l’emploi associatif, tout en tenant compte d’une évolution tendancielle de notre société qui touche l’ensemble du monde du travail. Le rapporteur souhaite insister sur le fait qu’elle est attendue par les associatifs eux-mêmes qui ont indiqué à 88,4 % être favorables à cette mutualisation dans les réponses au questionnaire du rapporteur (20).
Le rapporteur estime qu’il faut changer de perspective à propos des associations qui sont trop souvent perçues comme des charges pour les collectivités. Ces coopératives d’intérêt public que forment les associatifs rendent un véritable service à la société, qui mérite d’être soutenu et valorisé financièrement. C’est pourquoi les financeurs publics doivent donner des gages d’objectivité et de pérennité dans leurs choix, malgré le contexte budgétaire contraint dans lequel sont placées toutes les politiques publiques.
La crise économique puis des finances publiques a fragilisé un monde associatif qui a connu un effet de ciseau important dû à une augmentation du nombre de personnes à prendre en charge, notamment dans le domaine de la santé et du social, et à une baisse des financements publics. D’après la chercheuse Viviane Tchernonog, l’impact de la crise sur les associations a été significatif pour environ 20 % des associations qui ont dû diminuer leur activité (21). Les représentants de la Convention nationale des associations de protection de l’enfant (CNAPE) ont également alerté le rapporteur sur le fait que cette incertitude sur les financements se double d’un surinvestissement des associatifs sur cette question, au détriment de la vocation principale des associations concernées.
Il est également à regretter que certaines régions, à la suite des élections du 13 décembre 2015, aient décidé de supprimer des moyens importants aux associations. Ainsi, le conseil régional d’Île-de-France a décidé de ne plus financer la partie « accompagnement » de la garantie jeune en expérimentation sur son territoire, au risque de créer de futurs assistés qu’elle ne manquera pas de dénoncer. La région Rhône-Alpes-Auvergne et la région des Hauts-de-France ont également considérablement diminué les moyens des associations.
Au-delà de la question des volumes, les modes de financement ont également beaucoup évolué ces dernières années au détriment des subventions pour privilégier des marchés publics et des appels à projet de plus en plus restrictifs, qui ne laissent aux associations ni visibilité sur le financement, ni marge d’innovation dans la mise en place d’actions sur le terrain.
La question des subventions est pourtant primordiale pour le monde associatif qui a toujours privilégié ce mode de financement. Or, elles sont en net recul puisqu’elles représentaient 34 % des ressources des associations en 2005 contre 24 % en 2011. Ce mouvement de fonds est porteur de défiance, de déperdition d’énergie pour les associations qui finissent par renoncer à se porter candidates à ces marchés au profit du secteur lucratif et accrédite l’idée que les collectivités publiques contraintes budgétairement délèguent aux associations une partie de l’action publique pour qu’elles la mettent en œuvre à moindre coût.
Il existe en effet un avantage économique objectif à confier certaines missions au secteur associatif, qui recourt beaucoup aux emplois précaires et peut s’appuyer sur des bénévoles. Les experts indiquent ainsi que seuls 8 % des salariés du secteur associatif sont couverts par une convention collective. Le risque de cette tendance est de rentrer dans une « gouvernance quasi-marchande » décrite par des sociologues dans le domaine du social (22) et qui se manifeste par un fort recours aux appels d’offres et aux délégations de service public au détriment de la coproduction et de la contractualisation.
La diminution de la part des subventions s’expliquant en partie par la crainte, dont les fondements étaient en réalité discutés sur le plan juridique, que la subvention puisse être considérée dans certaines circonstances comme contraire au droit européen de la concurrence, le Gouvernement a entendu clarifier la situation sur le plan juridique.
Ainsi, l’article 59 de la loi n° 2014-856 relative à l’économie sociale et solidaire du 31 juillet 2014 lui a donné une définition : il s’agit d’une contribution allouée par les autorités administratives ou par des organismes chargés de la gestion d’un service public industriel et commercial dans un objectif d’intérêt général à des personnes morales de droit privé pour la réalisation d’une action, d’un projet d’investissement, le développement d’une activité ou le financement global de l’activité d’un organisme bénéficiaire qui en est à l’origine.
Cette définition inclut donc tant le versement d’une somme d’argent (subvention directe) que la mise à disposition de moyens matériels ou humains (aides indirectes).
Toutefois, il n’est pas certain que cette clarification suffise à faire reculer la progression de la commande publique et à restaurer la subvention comme mode normal de financement par la puissance publique. En tout état de cause, elle ne répond pas à l’inquiétude des associations qui voient non seulement la part des subventions diminuer dans le montant global de leurs ressources mais aussi une distorsion au sein de ces subventions : aux subventions de fonctionnement qui visent à financer le budget normal de l’association se sont substituées les subventions exceptionnelles ou liées à une action ou un projet spécifique, souvent très restrictif, qui ne donnent aucune visibilité aux associations sur leur avenir.
Les pistes d’amélioration que privilégie le rapporteur entendent éviter deux écueils quant à l’amélioration de la situation financière des associations :
– le rapporteur souhaite valoriser les nombreux dispositifs qui existent déjà et qui ont fait leurs preuves dans la limite des moyens dont ils disposent ; mieux aider les associations doit passer par une consolidation ambitieuse de l’existant plutôt que par la création de nouveaux dispositifs aux résultats incertains et qui risquent d’ajouter à la complexité actuelle ;
– si les associations ne sont pas des personnes privées comme les autres, il ne faut pas s’engager sur des voies qui risquent, au prétexte de leur spécificité, de dénaturer ce qui est au cœur de l’engagement associatif. Aussi, le rapporteur écarte des dispositions fiscales et sociales excessivement dérogatoires au droit commun, car il est normal que les associations soient soumises à certaines obligations, ou encore la rémunération des bénévoles, qui est contraire à l’idée que l’on doit se faire de l’engagement.
Il s’agit ici de permettre à des associations de se projeter sur quelques années afin qu’elles puissent donner leur pleine mesure aux très nombreux projets qu’elles portent.
Le rapporteur souhaite donc que la politique associative mette en œuvre des mesures concrètes pour donner de la visibilité sur le moyen et long terme.
Le rapporteur estime qu’il manque dans certains cas un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) pour certaines associations qui assurent des missions très proches des politiques publiques. Ceux-ci existent dans le domaine de la santé et du médico-social où les associations participent directement à l’exécution d’un service public. Cet horizon temporel de deux ou trois ans n’est pas moins utile pour d’autres types d’associations. Elles pourraient ainsi plus aisément s’engager dans certaines décisions lourdes comme une embauche ou l’investissement dans un équipement.
Cette démarche d’objectifs et de moyens ne s’oppose pas à des adaptations ponctuelles pour faire face à des contraintes financières imprévues, car ces contrats ne sont pas juridiquement contraignants. Il s’agit d’adopter une démarche de confiance dans laquelle il n’est pas illégitime que le financeur puisse attendre certains résultats de l’association financée en échange d’un engagement moral à maintenir des moyens suffisants.
Cette logique contractuelle, qui doit redonner de l’attractivité aux subventions, doit s’accompagner d’un retour à la diversification du type de subventions, en faveur des subventions de fonctionnement qui ont quasiment disparu du paysage associatif ces dernières années.
Les critères permettant d’attribuer les subventions, tels qu’ils existent aujourd’hui, tendent à exclure la présence d’un fonds de roulement important au sein d’une association. Or, d’une part, l’existence d’une telle marge financière dans une entité qui, par définition, n’a pas de but lucratif devrait être considérée comme le témoignage de la qualité de la gestion de l’association et, d’autre part, peut être une nécessité pour une association qui doit financer des opérations de grade envergure. Il n’existe donc aucune corrélation inverse entre fonds de roulement et besoin de financement public.
Le rapporteur propose donc que le Gouvernement invite par voie réglementaire les administrations qui pratiquent cette incompatibilité à la lever, partant du principe que la subvention a vocation à privilégier une association en fonction de son utilité sociale et non de ses besoins de trésorerie.
Les retards de paiement sont souvent cités par les associations comme l’une des difficultés financières auxquelles elles sont confrontées. Il semble regrettable que ces structures, déjà fragilisées par la relative précarité de leurs employés et par leur dépendance aux fonds publics, soient les variables d’ajustement de la politique de trésorerie de certaines collectivités.
C’est pourquoi le rapporteur propose de favoriser le versement des subventions sur un mode trimestriel afin de normaliser les rapports financiers.
Le financement privé des associations représente actuellement une part infime de leurs ressources : 3,8 % d’entre elles viennent des particuliers et 0,8 % des entreprises.
La France s’est dotée d’un des systèmes les plus généreux de déduction fiscale en matière de dons aux associations, et il ne serait pas raisonnable, voire même contre-productif d’aller plus loin. La démarche de don se fait d’ailleurs souvent sans connaître les avantages fiscaux qui y sont liés, puisqu’un nombre important des donateurs privés ne font pas jouer les systèmes de déduction.
La fiscalité française en matière de dons aux associations
En 2016, les particuliers peuvent déduire 66 % des sommes versées aux œuvres d’intérêt général ou d’utilité publique de leur impôt sur le revenu dans la limite de 20 % de leur revenu imposable et 75 % des sommes versés jusqu’à 530 euros pour un montant maximal de 398 euros pour les organismes d’aide aux personnes en difficulté. Lorsque le montant déductible dépasse le plafond, l’excédent peut être reporté les cinq années suivantes dans les mêmes conditions.
Les entreprises peuvent déduire 60 % du don à une œuvre d’intérêt général de leur impôt sur les sociétés dans la limite de 0,5 % de leur chiffre d’affaires annuel hors taxe. En cas de dépassement du plafond, le montant versé peut être reporté sur les cinq exercices suivants.
Une vigilance doit cependant être portée sur le vieillissement des donateurs et sur la stagnation de leur nombre chez les particuliers.
Des progrès sont également envisageables auprès des petites et moyennes entreprises (PME) qui ne connaissent pas nécessairement les associations de leurs territoires. L’Association pour le Développement du Mécénat Industriel et Commercial (ADMICAL) estimait, dans son baromètre pour 2015 (23), que 14 % des entreprises comptant au moins un salarié pratiquent le mécénat, 6 % l’ont fait mais ont cessé et 80 % n’ont jamais été mécènes. Chez les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises, on compte 47 % de taux de mécénat contre 12 % chez les très petites entreprises (TPE) et 23 % chez les petites et moyennes entreprises (PME). Dans le cadre des contrats de territoire préconisés par le rapporteur, des entreprises volontaires pourraient être associées pour financer certains projets d’associations de proximité.
Des réticences existent dans le monde associatif à ce sujet. Le rapporteur souhaite insister sur le fait qu’il ne s’agirait pas majoritairement de très grandes entreprises mais de petites et moyennes structures implantées sur le territoire et qui recherchent dans le cadre d’une politique de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) à donner du sens à leur action. Même en augmentant significativement la part du financement privé, les autres formes de financement (financements publics, les cotisations et la participation des usagers) resteraient très largement majoritaires, éloignant ainsi toute idée d’une prise de contrôle des associations par le secteur marchand.
Enfin, si ces garanties ne rassuraient pas pleinement les associations, il leur serait évidemment loisible de refuser des financements privés.
Le FONJEP a été créé en 1964 conjointement par l’État et les associations, ce qui explique son mode de gouvernance original. La gouvernance partagée entre l’État et les associations reste tout à fait pertinente pour le rapporteur, qui estime que ces dernières ne doivent plus simplement subir mais participer aux politiques publiques qui les concernent.
Longtemps soutenu financièrement par différents ministères (ministère de l’Environnement, de la Justice ou du Sport), le FONJEP n’est plus subventionné depuis 2007 que par le ministère de la Jeunesse et du Sport.
La principale mission du FONJEP est de financer entre 5 000 et 6 000 postes chaque année à hauteur de 7 000 euros par poste, ce qui représente entre 10 et 20 % de la rémunération moyenne au sein des associations. Il est à regretter que le gel des montants qui peuvent être mobilisés pour chaque poste ne dénature la vocation du fonds qui est bien de cofinancer des emplois et non de « saupoudrer » les embauches, comme peut le faire le Gouvernement lorsqu’il distribue la prime à l’embauche (24).
Le fonds assure également, en partenariat avec le ministère des Affaires étrangères, le financement du volontariat international pour 1 700 jeunes et adultes qui partent en mission souvent humanitaire.
Le FONJEP cherche à diversifier ses actions de financement en développant actuellement un dispositif innovant de « don avec droit de reprise » en coordination avec la Caisse des dépôts et consignations (CDC) qui permet d’avancer des montants importants pour des projets d’associations qui donnent des gages de qualité dans leur activité.
Enfin, le fonds joue un rôle intéressant de relais sur les territoires avec ses délégués régionaux qui organisent des réunions deux à trois fois par an pour établir un diagnostic de terrain. Ces réunions pourraient constituer d’utiles exemples pour les concertations préalables à la réalisation des contrats de territoire que le rapporteur souhaite développer, le délégué du FONJEP pouvant jouer le rôle d’animateur neutre du réseau des associations et des financeurs en partenariat avec le délégué départemental à la vie associative (DDVA).
Le FONJEP, parfois critiqué comme un dispositif obsolète, a bénéficié d’un effort financier du ministère qui a tenu compte de l’excellence de sa gestion et de son utilité dans le paysage associatif. Il constitue en effet l’un des outils de subventionnement dont les coûts de gestion sont les plus faibles puisqu’ils représentent moins de 1 % de l’enveloppe globale qui est gérée par à peine 9 salariés.
Cet organisme encore trop discret a un rôle important à jouer dans une animation des territoires, dans la coordination des financeurs et dans un soutien à l’embauche dans le secteur associatif, appelé à devenir important en raison de la pyramide des âges (25), à condition de lui donner les moyens d’une véritable agence.
Le Centre national de développement du sport (CNDS) constitue l’un des mécanismes les plus intéressants de redistribution associative au niveau des territoires dont la France s’est dotée.
Outil important de la réduction des inégalités territoriales, le CNDS a dans ses premières années vu ses fonds captés par le financement des grandes infrastructures sportives. Le Gouvernement a entendu depuis 2012 recentrer son action autour du « sport pour tous ».
Le CNDS est moteur pour favoriser des projets intercommunaux afin de dépasser les différends locaux et d’éviter de créer des équipements redondants dans une démarche partenariale telle que la souhaite le rapporteur.
Les subventions du CNDS s’inscrivent pleinement dans la logique de recentrage des crédits portée par le Gouvernement, le seuil de versement des subventions ayant été relevé de 450 à 1 500 euros.
Le centre a également rationnalisé la politique de subvention en créant une matrice permettant d’identifier les associations sportives qui doivent recevoir des financements en fonction de leur territoire.
Cette nette amélioration du fonctionnement du CNDS serait contrariée si de nouvelles contraintes devaient encore peser sur son budget.
C’est pourquoi le rapporteur souscrit pleinement à la proposition faite par les députés Pascal Deguilhem et Régis Juanico (26) de pérenniser les ressources issues du prélèvement exceptionnel de 0,3 % sur la Française des jeux qui devait servir au financement des stades en vue de l’Euro 2016 et d’augmenter celles issues du prélèvement sur les paris sportifs en ligne qui sont actuellement plafonnées (27). Cette préconisation est en partie mise en place pour le budget de l’année 2017 (cf. supra I. B).
Le rapporteur a rapidement acquis la conviction au cours des travaux menés qu’aider financièrement les associations supposait de mettre à leur disposition des outils simples sans prétendre déroger à l’ensemble du droit fiscal et social dans notre pays. Ces dispositifs ont notamment le mérite d’être plus objectifs que les subventions ou que les marchés publics, puisqu’ils touchent directement les associations sans qu’elles aient à être choisies par une collectivité publique.
• Un choc fiscal nécessaire : le dégrèvement de taxe sur les locaux et le crédit de taxe sur les salaires
Si certaines associations se voient mettre des locaux à disposition par les collectivités, il serait intéressant d’engager une réflexion sur un dégrèvement de la taxe foncière afin d’alléger les coûts pour les associations. Celles-ci ne sont pas des propriétaires comme les autres, puisqu’elles mettent toujours ces locaux à disposition ou, à tout le moins, au service du public.
On peut rappeler à titre d’exemple que conformément au 1° de l’article 1382 du code général des impôts, les immeubles qui appartiennent à l’État, aux collectivités territoriales (communes et départements, régions), aux établissements publics de coopération intercommunale, aux syndicats mixtes, aux pôles métropolitains, aux ententes interdépartementales ainsi qu’aux établissements publics scientifiques, d’enseignement et d’assistance sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties lorsqu’ils sont affectés à un service public ou d’utilité générale et non productifs de revenus.
Un tel dégrèvement rendrait plus intéressant financièrement la propriété personnelle ou mutualisée de locaux par les associations, les mettant ainsi à l’abri de l’arbitraire qui commande parfois la mise à disposition des locaux publics ou la fixation du loyer.
L’idéal, pour le rapporteur, serait que certaines associations puissent acquérir et partager des locaux conçus sur le modèle des espaces de co-working afin qu’elles puissent mutualiser les coûts mais aussi échanger plus facilement entre elles avec l’aide et la bienveillance des pouvoirs publics.
Le rapporteur porte également depuis le début de ses travaux une autre mesure fiscale qui n’est pas dérogatoire mais de justice pour le monde associatif.
En effet, à la suite de la mise en place crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) qui ne bénéficiait pas aux associations dans la mesure où elles ne sont pas concernées par l’imposition sur les bénéfices, le ministère de la jeunesse et des sports a obtenu une première mesure-miroir pour les associations. C’est ainsi que l’abattement de la taxe sur les salaires a été relevé de 7 000 à 20 000 euros dans le projet de loi de finances rectificatif pour 2012 (28).
Cette piste d’abattement était intéressante mais encore trop timide alors qu’elle représente un coût modéré pour les finances publiques. Il semble en effet plus cohérent de tenir compte du caractère spécifique de l’action associative, et notamment de sa contribution aux politiques publiques nationales et à l’intérêt général au niveau de la fiscalité plutôt que de toucher aux cotisations sociales qui permettent aux salariés associatifs de toucher des prestations différées comme dans n’importe quelle collectivité.
Par ailleurs, il convient de prendre en considération le fait que l’instauration du CICE, très partiellement compensée par la mesure de relèvement de seuil précitée, a introduit une inégalité entre le secteur lucratif et le secteur non-lucratif dans les domaines où ils sont en concurrence.
Enfin, le secteur associatif est la cible idéale pour un dispositif fiscal créateur d’emplois, puisqu’il lui est impossible de redistribuer des bénéfices. En l’absence d’effet d’aubaine ou d’éviction, l’efficacité de la mesure sur le chômage si important dans notre pays serait donc maximale.
Le rapporteur souhaitait donc que s’ajoute à la mesure d’abattement un véritable crédit d’impôt sur le modèle du CICE pour les associations. Or, le Premier ministre a annoncé le 7 octobre la création d’un crédit d’impôt pour les associations intitulé « crédit d’impôt de taxe sur les salaires ». Conformément au souhait de nombreux collectifs comme le comité national des employeurs d’avenir (CNEA) rencontré par le rapporteur, il s’agit de mettre en place un crédit de taxe sur les salaires qui s’élèverait à 4 % de la masse salariale entre 1 et 2,5 SMIC. La mesure devrait représenter une baisse de charges de 600 millions d’euros, ce qui constitue un montant considérable au regard des masses financières que représentent les crédits publics de soutien aux associations.
En outre, cette solution a le mérite de toucher directement toutes les associations employeuses et ne dépendra pas, contrairement à des marchés publics ou à des subventions, du bon vouloir des politiques.
Le rapporteur ne peut donc que se féliciter de l’annonce d’une mesure aussi massive pour soutenir les associations, et sera particulièrement vigilant sur les modalités de sa mise en œuvre.
• Favoriser le dispositif « impact emploi » pour le paiement des cotisations sociales
Il existe actuellement deux dispositifs permettant aux associations de gérer leur personnel de manière simplifiée :
– le dispositif « impact emploi », créé en 2008 par le réseau des Urssaf, permet à de petites associations de déléguer une partie de la gestion des ressources humaines (déclaration d’embauche, contrat de travail, paye, déclaration des cotisations sociales) à une « association tiers de confiance » qui réalise, après signature d’une convention, les formalités pour le compte de l’employeur ;
– le « chèque emploi associatif » permet à des associations de moins de 20 salariés d’accomplir par un seul acte de paiement toutes les formalités liées à l’emploi.
Le rapporteur estime que la coexistence des deux systèmes est confuse et inutile puisqu’ils poursuivent le même objectif.
Il s’agit donc de faire le choix de développer davantage « impact emploi » qui permet à l’association de se décharger complètement des fonctions ressources humaines grâce à un dispositif qui peut prendre en charge informatiquement l’ensemble des conventions collectives applicables, ce qui n’est pas le cas du « chèque emploi associatif ». Ce dernier a également le défaut d’être limité à de très petites associations alors qu’ « impact emploi » peut être utilisé par toutes les associations au-delà d’un certain seuil, qui pourrait être abaissé dans le cadre d’un rapprochement des deux dispositifs.
Il s’agira vraisemblablement d’un effort financier pour l’ACOSS, car « impact emploi » est plus coûteux à gérer, mais il faut prendre en considération les gains d’efficience qui résulteront du rapprochement des dispositifs pour l’administration et surtout le gain d’énergie et de temps pour les associations.
Les compétences au sein des associations viennent à la fois des salariés et des bénévoles. S’agissant de ces derniers, on entend souvent parler d’une « crise de l’engagement » mais, en consultant des chercheurs et en sondant sur le terrain, le rapporteur a pu constater que le problème était plus complexe et tenait davantage à un problème qualitatif que quantitatif, qui tient à la fois à la professionnalisation du monde associatif et à un changement dans les modes d’engagement.
Le rapporteur estime que les dispositifs actuels doivent être adaptés et renforcés pour faire face à cette transformation très profonde du rapport au travail associatif.
1. Des salariés qualifiés mais un bénévolat parfois en inadéquation avec les besoins des entreprises
Les associations s’appuient traditionnellement sur un salariat important qui représente aujourd’hui 1,8 million de personnes, soit 7 % de l’ensemble de l’emploi privé ainsi que sur le bénévolat qui représente 15 à 16 millions de personnes, soit l’équivalent d’un million d’emplois à temps plein.
L’emploi associatif prend souvent des formes précaires (temps partiel, CDD, emplois aidés…) mais les études sociologiques montrent qu’il est, d’une part, plus gratifiant pour les salariés qui se disent en moyenne plus heureux que ceux du secteur privé en raison de la nature des missions assurées et, d’autre part, hautement qualifiant car les associations réalisent un important effort de formation des salariés dont les compétences ne sont pas toujours en parfaite adéquation avec les besoins de la structure.
Le monde associatif a connu ces dernières années une forte professionnalisation à tel point que les salariés employés dans les associations sont aujourd’hui en moyenne plus qualifiés que l’ensemble des salariés du secteur privé. Cette évolution était nécessaire dès lors que les missions assurées par les associations nécessitent de plus en plus des compétences importantes, parfois comparables à celles de cadres dans une entreprise.
Il est à noter que le monde associatif présente, de l’avis de nombreuses personnes auditionnées, un gisement d’emplois potentiels très important, qu’il serait absurde de négliger dans le contexte économique actuel. Il s’agit donc de réussir une véritable transition générationnelle au niveau associatif pour permettre aux jeunes de prendre des responsabilités et de trouver une situation dans ce cadre.
Les associations comptent aussi traditionnellement sur le bénévolat. Il n’existe pas de consensus parmi les chercheurs en sciences sociales (29) sur la réalité d’une crise de l’engagement, aucun chiffre fiable ne montrant une baisse importante du nombre de bénévoles comme l’a rappelé le chercheur Lionel Prouteau dans une note adressée au rapporteur. En revanche, celui-ci explique qu’il y a une tendance de fond dans le monde associatif de professionnalisation qui se traduit par un « effet-substitution » entre travail salarié et bénévolat et un « effet-volume », la croissance de l’activité et des besoins nécessitant toujours plus d’engagés. Les associations exigent de plus en plus de ces engagés des compétences diverses, le risque étant à terme que la sélectivité dans le bénévolat conduise à une nouvelle éviction sur des bases sociales alors que le propre du monde associatif est de créer du lien.
Il s’agit donc de travailler sur les deux difficultés incontestables auxquels font face ceux qu’il faut bien appeler les « candidats » au bénévolat :
– la première tient à ce que les volontaires ne savent pas toujours à qui s’adresser, ce qui rend indispensable une meilleure visibilité de l’offre au sein de véritables guichets d’orientation que peuvent être les maisons des associations, en plus de ce que font actuellement les centres de ressources et d’information pour les bénévoles (CRIB) ;
– la seconde est que les bénévoles ne possèdent pas toujours les qualifications recherchées par les associations, soit pour exercer des missions spécifiques au sein de la structure, soit pour assurer des fonctions de direction et de gestion.
Les associations sur le terrain ont souvent raconté au rapporteur leurs difficultés à trouver des dirigeants capables de prendre la relève générationnelle.
Le rapporteur s’est forgé au cours des auditions une double-conviction :
– la coexistence d’un salariat associatif et du bénévolat est la condition même de la réussite collective et il s’agit de promouvoir une véritable mixité. Cette coexistence suppose donc d’admettre que le principal motif de l’engagement d’un bénévole reste d’ordre moral et civique et qu’il ne pourra y avoir de statut du bénévole sans risque de « formatage » ;
– la situation actuelle est encore insatisfaisante malgré une multitude de dispositifs mal connus et sous-utilisés par les associations ; il s’agit donc de donner de la visibilité mais aussi une véritable force de frappe financière à ces outils afin de mieux accompagner la période de transition dans laquelle se trouve le monde associatif.
La montée en puissance du service civique constitue l’une des grandes mesures prises en faveur de la jeunesse par le Gouvernement. Il permet l’engagement volontaire d’un jeune de 16 à 25 ans sans condition de diplôme qui est indemnisé (30) pour effectuer sur une période allant de 6 à 12 mois un travail au sein d’une association, d’un établissement public ou d’une collectivité territoriale dans un des neuf domaines d’intervention prévus par la loi (31).
La montée en charge prévue du service civique est très importante, puisqu’il s’agit de passer de 53 000 jeunes en 2015 à 350 000 en 2018, soit la moitié d’une classe d’âge.
Le service civique apporte un « double-dividende » particulièrement appréciable dans le milieu associatif : les associations bénéficient d’un soutien précieux, les jeunes volontaires obtiennent une rémunération, un contact avec un collectif qui leur permet de retrouver le marché du travail avec davantage de confiance et la satisfaction de se rendre utile.
Toutefois, le rapporteur souhaite attirer l’attention sur le risque que le caractère très ambitieux de ce dispositif coûteux conduise à une réduction des moyens des autres outils. Il ne faudrait pas que le service civique, qui n’est qu’une réponse partielle aux problématiques de la jeunesse aujourd’hui, ne devienne une solution unique absorbant tous les moyens de l’État au détriment du sport, de l’éducation populaire, etc.
Le rapporteur souhaite également insister sur le caractère encore trop insatisfaisant d’un dispositif proche : la réserve citoyenne. Celle-ci, qui se distingue par le fait qu’elle ne concerne pas que des jeunes, est en effet en l’état du droit limitée à une intervention dans les établissements de l’Éducation nationale. Or, il a été constaté que les volontaires qui se sont engagés dans la réserve civique sont sous-utilisés par les écoles. Il conviendrait d’élargir le champ d’action de cette réserve qui pourrait mener des actions éducatives dans des environnements extrascolaires en partenariat avec des associations sportives ou d’éducation populaire par exemple.
Le projet de loi « Égalité et citoyenneté » précité doit refondre entièrement le dispositif dans le cadre de la réserve citoyenne (32), donnant ainsi l’occasion de repenser un système plus souple.
Ce contrat spécial créé en 2012 associe trois parties : un jeune particulièrement éloigné de l’emploi, un employeur et les pouvoirs publics. Le jeune est suivi par un référent au sein d’une mission locale ou par un référent « Cap emploi » s’il est en situation de handicap. Il bénéficie d’un suivi par un tuteur au sein de l’entreprise. L’employeur perçoit une aide financière variable en fonction du secteur d’activité (33) et est exonéré de certaines taxes ou cotisations sociales.
Ce dispositif, parfois injustement critiqué, s’avère particulièrement pertinent dans le milieu associatif où la transmission entre générations est très importante.
Le rapporteur a pu constater son efficacité dans le cas concret d’une étude menée par VVF Villages Vacances qui a eu recours à 160 emplois d’avenir ces dernières années. Il a tiré plusieurs leçons de cette étude :
– il convient de pérenniser le dispositif, les employeurs ayant besoin de temps pour tenter et reproduire l’expérience ;
– la durée du contrat fixée à deux ou trois ans doit être maintenue ; tout raccourcissement du dispositif le viderait de tout intérêt pour l’employeur qui prend sur lui la charge de former le jeune travailleur, rarement efficace avant un an de travail et de formation ;
– la coordination entre les missions locales et Pôle Emploi pourrait être revue afin d’assurer une meilleure répartition du travail d’appariement entre les offres d’emplois et les compétences des jeunes candidats à un emploi d’avenir ;
– le dispositif exclut en l’état actuel du droit des jeunes qui exercent un travail « alimentaire » pendant quelques mois et qui ne sont plus suffisamment éloignés de l’emploi pour être éligibles au dispositif alors que ce type de profil pourrait tirer un grand bénéfice de ce tremplin vers l’emploi qualifié.
c. Des crédits pour la formation sous-utilisés alors qu’ils sont insuffisants au regard des besoins réels
La formation des salariés relève des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) de la branche professionnelle dans laquelle se situe l’association. Ces crédits ne sont pas toujours pleinement utilisés par les associations. La faute en revient peut-être à un système très complexe et peu lisible pour les salariés et les employeurs associatifs.
Le Conseil national des employeurs d’avenir (CNEA) a ainsi illustré le problème au rapporteur en prenant l’exemple de la branche du sport dans laquelle les formations qualifiantes se révèlent peu articulées entre elles ainsi qu’avec celles d’autres branches qui emploient souvent les mêmes personnes (par exemple, la branche de l’animation). Les certifications offertes dans les branches professionnelles sont trop restrictives, notamment dans des professions réglementées comme le sport.
Le rapporteur estime qu’il faut engager une réflexion d’ensemble afin de créer davantage de passerelles entre branches (sport et animation, éducation et animation, animation et aide à domicile…) en favorisant les blocs de compétence et de formations qualifiantes dans plusieurs secteurs d’activité, sur le modèle des certificats de qualification professionnelle interbranche (CQP).
S’agissant des bénévoles, le Fonds de développement de la vie associative (FDVA) créé en 2011 (34) soutient à hauteur de 9 millions d’euros les programmes de formation au sein des associations (35). Les actions financées concernent à la fois des formations dites spécifiques, c’est-à-dire celles qui permettent d’assurer les missions de l’association, et des formations dites transversales, qui concernent davantage les fonctions « support » des associations (gestion juridique, financière, ressources humaines…). Le rapporteur insiste sur l’importance de maintenir ces deux volets.
Environ 180 000 personnes sont concernées en dehors des associations sportives qui bénéficient de financement du CNDS. Les projets de formation sont sélectionnés par le ministre chargé de la vie associative ou par le préfet de région en sa qualité de représentant de l’État après avis formulés par le comité consultatif du fonds et les commissions régionales concernées.
Le budget du fonds est à l’évidence insuffisant compte tenu des besoins des associations et au regard des gains d’efficience qu’il peut engendrer. En effet, des bénévoles mieux formés sont susceptibles de faire mieux fonctionner l’association et permettent donc de mieux utiliser les fonds publics. Paradoxalement, ce budget est actuellement sous-exécuté. Ainsi, en 2016, seuls 7,9 millions d’euros des crédits fournis par l’État ont été effectivement utilisés. Ces dernières années, le budget n’a cessé de diminuer pour s’ajuster à cette sous-exécution chronique.
Le rapporteur budgétaire ne peut se satisfaire de ce raisonnement circulaire qui ne peut déboucher à terme que sur un affaiblissement du dispositif, sans rapport avec les besoins croissants en la matière. Le fonds doit être utilisé et même renforcé, y compris dans la communication qui est faite autour de son utilisation. Si les critères utilisés s’avéraient excessivement restrictifs, ils devraient être revus.
Le rapporteur ne partage pas l’idée selon lequel le bénévolat serait contradictoire avec toute forme de reconnaissance y compris matérielle de son utilité sociale. Il estime que valoriser ce travail bénévole, indispensable à l’existence et au dynamisme de nos associations, doit permettre de créer un climat favorable à l’engagement de tous, et particulièrement des jeunes.
Or, l’acquisition des compétences au sein des associations, qui constitue un facteur d’engagement significatif, n’est pas suffisamment reconnue, notamment pour les bénévoles. Les dispositifs existants sont en effet trop complexes ou inconnus des intéressés.
Le code du travail et le code de l’éducation prévoient que le bénévolat, d’une durée minimale de 3 ans, peut permettre d’obtenir le titre, certificat ou diplôme souhaité dans un secteur en rapport avec l’activité exercée. La validation est organisée par un jury. Un passeport « orientation et formation » recense depuis 2009 les activités prises en compte.
Ces dossiers de valorisation des acquis de l’expérience (VAE) sont aujourd’hui trop complexes à remplir pour être véritablement utiles aux associations et aux bénévoles qui préfèrent le plus souvent y renoncer, comme le rappelait le Haut conseil à la vie associative dans un avis de novembre 2013 (36). En effet, la VAE a vocation à valoriser des parcours méritoires pour des publics difficiles pour lesquels il est parfois difficile d’identifier les compétences acquises, de les décrire par écrit dans une « fiche de mission », puis de défendre leur candidature devant un jury parfois exclusivement académique.
Le modèle de la VAE est donc à repenser avec l’ensemble des parties prenantes (ministères certificateurs, régions, universités, Pôle Emploi, les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), les chambres consulaires, les partenaires sociaux) pour que celle-ci soit simplifiée et mieux accompagnée, afin d’amener le candidat vers le diplôme et le titre le plus utile pour la suite de sa carrière professionnelle.
Mis en place à l’initiative du Conseil national de la jeunesse (CNJ) en 2008 (37), le certificat de formation à la gestion associative (CFGA) a pour objectif de valoriser la prise de responsabilité par des jeunes dans le milieu associatif.
Il s’agit d’un certificat délivré aux personnes qui ont suivi une formation théorique de 30 heures minimum et une formation de 20 jours minimum dans une association en vue de l’exercice de responsabilités administratives, financières ou de gestion des ressources humaines dans une association.
Le rapporteur a pu constater que ce dispositif était inconnu des grandes organisations avec lesquelles il a pu échanger et qu’aucune étude n’a été faite pour évaluer son impact dans la montée en responsabilité de jeunes dirigeants associatifs.
Il invite donc la direction de la vie associative à se saisir du sujet pour réaliser cette étude. Si le dispositif est insatisfaisant, il conviendra de le modifier car il s’agit d’une initiative intéressante au regard du vieillissement des dirigeants associatifs. Si le dispositif se révèle positif là où il est appliqué, le ministère doit en assurer une promotion renforcée auprès des jeunes et des associations.
• Une reconnaissance du bénévolat étudiant à inventer
Lors des réunions qu’il a organisées sur le terrain, le rapporteur a vu régulièrement remonter une inquiétude quant à un désengagement des jeunes bénévoles et une difficulté à assurer la transition générationnelle.
Cette inquiétude doit être prise au sérieux d’autant qu’elle concerne l’avenir des associations qui recherchent les bénévoles de demain.
Le rapporteur estime qu’il faut s’engager dans la voie d’une valorisation spécifique de l’engagement étudiant au niveau de l’université. Aujourd’hui, il n’existe aucun dispositif national et ce sont les universités qui décident de reconnaître cet engagement.
L’article 14 du projet de loi « Égalité et citoyenneté » adopté par l’Assemblée nationale prévoit d’octroyer des crédits universitaires reconnaissant les compétences acquises dans le cadre de l’engagement étudiant (activité bénévole, participation à réserve militaire, service civique, volontariat militaire et engagement comme sapeur-pompier).
Le rapporteur trouve ce dispositif très intéressant : il souhaite son adoption et sera très attentif à sa mise en œuvre dans les universités.
La commission des Affaires culturelles et de l’Éducation procède à l’examen du rapport pour avis de M. Patrick Vignal, sur les crédits pour 2017 de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », lors de sa séance du mercredi 19 octobre 2016.
M. le président Patrick Bloche. Patrick Vignal a centré son rapport sur la construction d’une politique de cohérence et de maillage associatif. Outre la conduite traditionnelle des auditions, il a eu à cœur d’impliquer directement à sa préparation les acteurs associatifs de terrain, en organisant plusieurs réunions publiques dans sa circonscription.
M. Patrick Vignal, rapporteur pour avis sur les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Fort d’une expérience de dirigeant associatif et d’élu local, j’ai choisi de consacrer la partie thématique de mon rapport aux associations. Ce dernier s’appuie sur la contribution à la fois d’experts nationaux et aussi, en effet, d’acteurs du monde associatif. Nous avons entendu pas moins de 800 associations, et, aux 3 373 questionnaires que nous avons envoyés au monde associatif, nous avons obtenu 1 178 réponses.
Ce rapport repose sur une conviction : le monde associatif peut répondre à des besoins sociaux toujours plus nombreux, tout en favorisant l’engagement de tous. Développer nos associations est l’un des prérequis de cette révolution citoyenne indispensable à notre société, dont les événements des derniers jours tendent à confirmer qu’elle se fracture. Cette transformation très profonde de notre façon d’appréhender les problèmes politiques suppose de faire un pari qui n’est pas toujours facile, y compris pour la classe politique : faire davantage confiance aux associatifs qui prennent des initiatives sur notre territoire.
Une façon de mettre en œuvre cette conviction a été, pour moi, de conduire, en plus des habituelles auditions « parisiennes », d’autres modes d’échange. Ceux-ci m’ont permis de constater les nombreuses inquiétudes de l’ensemble du milieu associatif. Mon rapport entend donc répondre à cette question simple : comment aider les associations à mieux fonctionner, à en faire plus, à créer plus de lien, à accompagner davantage les politiques publiques ?
Une telle politique est nécessairement portée par une ambition. On peut demander aux associations de faire mieux et plus seulement si on les dote de tous les outils dont elles ont besoin : relations de confiance avec les pouvoirs publics, actuellement très déficientes ; moyens financiers suffisants et pérennes ; renforcement des compétences à leur disposition.
Le rapport ne se contente pas de faire un constat de la situation ni d’énumérer les mesures positives prises par notre majorité depuis quatre ans. Il entend ouvrir, pour chacun des trois grands axes que je viens de citer, des pistes de nature à donner à notre tissu associatif suffisamment de marge de manœuvre pour continuer à innover et à dynamiser notre pays.
Le premier axe consiste en la création d’une vraie relation partenariale sur nos territoires pour redonner de la confiance. Dans toutes les réunions que j’ai conduites, j’ai ressenti de la part du monde associatif de la défiance envers un État qui crée toujours plus de normes, toujours plus de charges, mais aussi vis-à-vis des collectivités, notamment des communes, de toute couleur politique, avec lesquelles le dialogue est compliqué. Je comprends ce ressenti. Le Gouvernement fait depuis quatre ans des efforts de simplification, mais la tâche est immense. J’ai également eu certains échos sur des collectivités qui procèdent à des coupes de crédits massives envers le monde associatif.
Or si l’on croit, comme moi, qu’une association est une coopérative d’intérêt public, qui crée du lien, qui répond à des besoins sociaux vitaux comme la culture, le sport, la santé ou encore le social, alors il faut lui apporter un cadre dans lequel elle pourra nouer une relation de confiance avec les cofinanceurs. C’est pourquoi je propose quatre actions concrètes pour faire vivre une véritable relation partenariale entre les associations et les différents acteurs.
La première action consiste à mettre en place de véritables contrats de territoire associatifs, qui permettent d’associer l’ensemble des parties prenantes. Il s’agit de mettre tout le monde autour de la table pour identifier les besoins sur un territoire donné, de voir comment les associations peuvent les satisfaire et d’attribuer des financements en fonction de ce diagnostic partagé par toutes les collectivités et tous les acteurs de terrain. De cette façon, nous pourrons éviter deux problèmes : la multiplication des interlocuteurs pour les associations et la politisation excessive des relations entre les pouvoirs publics et les associations.
La deuxième action doit être de poursuivre l’effort de simplification déjà engagé par le Gouvernement. À cet égard, je n’ai pas l’impression que le programme « Dites-le nous une fois » pour les échanges de données avec l’administration soit suffisamment promu.
La troisième action vise à consolider l’appui aux associations. Les dispositifs positifs existants doivent être renforcés. Les associations ayant des salariés doivent recourir davantage qu’elles ne le font aux organisations d’employeurs qui peuvent leur offrir un conseil précis pour un coût raisonnable. À titre d’exemple, le Conseil national des employeurs d’avenir (CNEA) propose un suivi juridique aux associations moyennant une adhésion de 40 euros par an. J’ai rencontré beaucoup de présidents qui ont « rendu leur tablier » après avoir été l’objet de procédures de la part de leurs salariés ou de leurs membres. Il faut les protéger.
La quatrième action est de favoriser la mutualisation. Sur un même territoire, beaucoup d’associations peuvent être complémentaires, mais, par méconnaissance des dispositifs dont elles peuvent bénéficier ou par peur de démarches administratives compliquées, elles ont trop souvent tendance à garder le peu de moyens dont elles disposent plutôt que de demander une mise en commun des locaux, des salariés ou des dirigeants qualifiés. Pourtant, les retours à mes questionnaires montrent que 85 % du monde associatif seraient prêts à mutualiser locaux, moyens humains et matériel.
Le deuxième axe a trait à la question très importante des financements. Outre l’aspect des montants, les associations ont insisté sur la dégradation des modalités de financement. Elles ont le sentiment que les pouvoirs publics leur transfèrent certaines missions, par le moyen de marchés publics, afin qu’elles les assurent au moindre coût et sans visibilité financière.
Je propose de consolider les nombreux dispositifs de financement existants, mais aussi d’en favoriser de nouveaux : des conventions pluriannuelles sur deux ou trois ans, qui donneraient un peu de confiance à moyen et long terme ; du financement privé, encore trop faible – 5 % seulement –, issu surtout des PME et TPE, rarement sollicitées.
Il m’est également rapidement apparu que le monde associatif n’avait pas bénéficié des efforts fiscaux du Gouvernement. C’est pourquoi je me réjouis de l’annonce du Premier ministre de la mise en place d’un équivalent au CICE pour les associations, à travers un crédit de taxe sur les salaires qui pourrait aller jusqu’à 4 % de la masse salariale, ce qui représente un effort considérable de 600 millions d’euros. En 2012, le monde associatif bénéficiait d’un abattement de taxe à hauteur de 7 000 euros, relevé à 20 000 euros en 2014. Pour certaines associations qui emploient aujourd’hui plus de cent salariés, cela représentera une manne importante. Qui plus est, cette réduction de taxe sur les salaires retournera dans l’économie en permettant d’augmenter les salaires et de créer de l’emploi, mais pas dans les dividendes des associés. Je serai très vigilant sur la mise en place de ce dispositif.
Le troisième axe essentiel pour une nouvelle politique de cohérence associative est l’accompagnement de la montée en compétences de nos associations. De plus en plus, le secteur s’est professionnalisé ; il faut lui donner les moyens humains et les formations nécessaires pour soutenir ses salariés et ses bénévoles.
La montée en puissance du service civique amènera aux associations les jeunes motivés, qualifiés ou non, dont elles ont besoin. Elle permettra aussi de créer en France une véritable culture de l’engagement dans notre jeunesse dont sortiront les dirigeants associatifs de demain. J’ai eu la chance d’être président du contrat urbain de cohésion sociale du Grand Montpellier, par lequel on essayait d’amener les jeunes – qu’ils aient un bac+5 ou qu’ils soient issus de quartiers difficiles sans avoir eu la chance de faire des études – à faire ensemble pour plus tard vivre ensemble. J’espère que le service civique permettra cette mixité sociale dans l’espace associatif et l’espace public.
Les emplois d’avenir doivent être pérennisés, car ils sont utiles aux employeurs du monde associatif pour former des jeunes et leur donner une chance de s’insérer dans le marché du travail.
Je souhaiterais également que les crédits alloués à la formation des bénévoles soient renforcés et davantage utilisés. Il est trop facile de ne pas valoriser ce qui existe déjà, pour expliquer ensuite que c’est sous-utilisé. Il faut une meilleure communication autour du Fonds de développement de la vie associative pour former les bénévoles à leurs missions et à la gestion. C’est un investissement certes, mais une association mieux gérée utilise mieux les subventions publiques.
Enfin, il faut davantage valoriser l’engagement bénévole, sans pour autant l’enfermer dans des statuts ou le dévoyer, pour pouvoir dire à ceux qui s’engagent que nous reconnaissons l’utilité de ce qu’ils font. À cet égard, il faudrait pousser l’université à s’engager. Comme maître de conférence associé à la faculté des sports, j’avais tenté de mettre en place une UV « Étudiant citoyen » qui, grâce à une attestation de la Croix-Rouge ou des Restos du cœur, aurait été utile aux étudiants à qui il manquait un point en fin d’année. Malheureusement, le doyen de la faculté m’a fait comprendre que les choses ne fonctionnaient pas ainsi. Les normes et les castes, voilà bien ce qui freine l’évolution de notre société !
En conclusion, ces mesures pourraient avoir trois effets indispensables. Le premier serait de redonner confiance à notre jeunesse en lui montrant qu’elle peut s’engager et se rendre utile. C’est bien de faire des zones de sécurité prioritaire, mais il serait temps d’inventer des zones de « jeunesse prioritaire ». Comme l’a dit un grand président de la République aujourd’hui disparu, ceux qui frappent la jeunesse n’ont jamais raison. Le deuxième effet serait de renforcer le lien social et la cohésion citoyenne, ce qui est le rôle et la principale réussite du milieu associatif. Le troisième, serait de permettre à tous les citoyens de co-construire la France de demain en leur donnant le pouvoir d’agir.
Aujourd’hui, le monde associatif est l’outil le plus efficace pour faire vivre notre contrat social, face au repli identitaire et au développement du communautarisme sur notre territoire national. C’est pourquoi je salue l’augmentation des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour l’année 2017. L’État consacrera à ce portefeuille 1,19 milliard l’année prochaine, contre 1,11 milliard en 2016.
Cela dit, je veux bien qu’on augmente les crédits dédiés au service civique de 100 millions, que l’on passe les emplois d’avenir de 110 000 à 150 000, mais je ne peux me satisfaire que l’on diminue de 2 millions les crédits alloués aux actions de formation à destination des bénévoles associatifs via le Fonds de développement de la vie associative, alors que ces actions constituent le ciment du monde associatif. Je voterai donc ce budget à condition que nous soyons capables de faire un effort supplémentaire sur la formation. C’est pour moi un point essentiel. Ce n’est pas seulement avec l’armée et la police que nous redresserons la société, c’est avec ces 16 millions de bénévoles qui n’attendent qu’une chose : de la considération.
Mme Sylvie Tolmont. Au nom du groupe Socialiste, écologiste et républicain, je félicite notre rapporteur pour ce rapport ambitieux. J’ai à cœur de saluer la démarche singulière qu’il a adoptée puisque, dans un souci de proximité et de connexion à la réalité de nos territoires, il a organisé de nombreuses auditions et réunions publiques décentralisées. Cette pratique inédite s’est accompagnée de la distribution de 3 000 questionnaires à des acteurs du monde associatif. Le résultat de ce travail est assurément la transcription d’un réel ressenti de terrain et la prise en compte sérieuse des enjeux locaux en matière de vie associative.
D’un point de vue général, nous nous réjouissons de la forte augmentation des crédits « Sport, Jeunesse et vie associative » décidée par le Gouvernement pour la deuxième année consécutive, dans un contexte budgétaire toujours contraint. Ce budget confirme une nouvelle fois la priorité accordée à la jeunesse par le Président de la République depuis 2012.
Source d’engagement citoyen, rempart indispensable contre le repli sur soi, garant de notre cohésion sociale et du vivre-ensemble, le monde associatif est moteur dans la construction de la vie collective, tout en participant à l’économie de notre pays. C’est pour cette raison que, cette année encore, l’État poursuit son soutien au monde associatif. J’en veux pour preuve l’annonce du Premier ministre, le 7 octobre dernier, de la création au 1er janvier 2017 d’un crédit d’impôt qui permettra d’alléger le coût du travail au sein des associations, sur le modèle du CICE. Ce soutien correspondra à 600 millions d’euros de baisses de charges supplémentaires qui s’ajouteront à la prime à l’embauche PME ouverte aux associations de moins de 250 salariés, dont 10 000 associations sont déjà bénéficiaires.
Dans la continuité de cette mobilisation, le Parlement s’attache aussi à proposer sans cesse de nouvelles mesures pour favoriser le rayonnement de nos associations. En ce sens, dans votre rapport, vous formulez, monsieur le rapporteur, des préconisations cohérentes et ouvrez de nouvelles réflexions pour encourager et consolider le monde associatif.
Face à la complexité des procédures administratives auxquelles sont encore confrontées certaines associations, vous recommandez de poursuivre les efforts déjà bien engagés sur ce sujet par le Gouvernement. Nous sommes également sensibles à votre proposition de voir se développer des espaces collaboratifs, qui permettraient aux acteurs associatifs de bénéficier de la mutualisation de moyens comme de certaines fonctions.
Sur la question du financement des associations, avec vous, nous nous inquiétons de la diminution de la part des subventions au profit de la commande publique et des appels à projet, qui retire aux associations la visibilité qui les rassurait. Pour y remédier, vous proposez de lever l’incompatibilité entre subvention et fonds de roulement afin de considérer une association sur la base de son utilité sociale plus que sur ses besoins de trésorerie, et la mise en place de contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) par lesquels le financeur peut attendre certains résultats de l’association financée en échange d’un engagement moral à maintenir des moyens suffisants. Cette dernière mesure pourrait d’ailleurs remédier à la politisation excessive des relations entre les associations et les pouvoirs publics, qui conduisent certaines collectivités à prendre des décisions arbitraires ou à mener une gestion politicienne des dotations aux associations.
Nous partageons, enfin, les réflexions du rapport pour valoriser l’engagement, en particulier celui de la jeunesse. Au-delà du succès incontestable du service civique, l’engagement des jeunes peut être encore plus valorisé et soutenu dans le cadre universitaire. Par ailleurs, la validation des acquis de l’expérience (VAE), dans ce contexte, et le certificat de formation à la gestion associative, qui s’appuie sur la prise de responsabilité par des jeunes dans le milieu associatif, doivent être davantage reconnus, valorisés et accessibles.
Ce rapport soulève un des enjeux majeurs pour l’engagement dans la vie associative : celui de la formation, en particulier, celle des dirigeants. Certains bénévoles, doutant de leurs compétences, hésitent à s’engager notamment sur des postes à responsabilité. S’ajoute à cette difficulté le renouvellement générationnel, le recrutement de jeunes dirigeants étant particulièrement difficile.
Si l’État réserve chaque année des crédits à la formation via le Fonds de développement de la vie associative, force est de constater qu’ils ne sont pas totalement utilisés. Aussi, monsieur le rapporteur, je souhaite connaître vos préconisations pour conférer davantage de visibilité à la formation des dirigeants associatifs, pour valoriser son sens et sa cohérence afin qu’elle puisse être pleinement encouragée.
M. Frédéric Reiss. J’associe à mon propos M. Guénhaël Huet qui sera l’orateur du groupe Les Républicains sur cette mission en commission élargie et dans l’hémicycle.
Merci à Patrick Vignal qui a choisi de s’intéresser aux moyens publics à mettre en œuvre pour renforcer le monde associatif. J’ai appartenu à la commission d’enquête sur les difficultés du monde associatif, qui a rendu son rapport en novembre 2014.
Le manque de confiance entre les acteurs et les incertitudes sur les subventions en fonction des alternances politiques fragilisent le réseau associatif. On ne peut que regretter la baisse, depuis plusieurs années, des crédits en faveur du monde associatif qui pâtit, par effet de cascade, de la baisse globale des dotations aux collectivités. On note aussi la demande de renforcement du FONJEP, quand les documents budgétaires se félicitent déjà de la simple sanctuarisation de ses moyens. Il est évident aussi que la loi NOTRe, en enlevant la clause de compétence générale aux départements, a tari d’importantes sources de subventionnement.
L’une des propositions du rapport consiste en la mise en œuvre d’une contractualisation entre les pouvoirs publics d’un territoire et les associations, avec une logique de projet. C’est une perspective intéressante, mais l’idée d’un engagement pluriannuel, un peu plus loin dans le rapport, amène à une gouvernance calquée sur celle des opérateurs publics. Attention à ne pas alourdir considérablement les modes de gestion des associations ! Entre la gouvernance à vue et les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, peut-être faut-il trouver une voie médiane.
Monsieur le rapporteur, vous estimez aussi que cette démarche de contractualisation doit mener à un mouvement de simplification des démarches pour les associations. Vous parlez à la fois du renforcement de certains dispositifs, comme Impact emploi ou les emplois d’avenir, et de votre souhait de lancer une réflexion sur un congé de formation unique. Nous regrettons que le projet de loi Égalité et citoyenneté ne se focalise que sur le congé pour participation aux activités de direction plutôt que de réfléchir à un congé unique. Attention aussi à l’équité d’un tel dispositif qui ne doit surtout pas décourager les bénévoles ! Le bénévolat joue un rôle irremplaçable dans notre société, tant au regard du lien social que de l’apport aux économies de nos collectivités.
Le congé initialement pensé pour les dirigeants associatifs concerne maintenant les personnes exerçant des responsabilités de direction, de représentation ou d’encadrement, sans aucune étude d’impact par définition, puisqu’il s’agit de modifications issues d’amendements. Nous sommes tous désireux de soutenir les associations, mais cela nécessite de la mesure et non de demander demain aux employeurs de quelque 3 millions potentiels de nos concitoyens de gérer les absences ou les modalités de rémunération par accord pouvant résulter de ce nouveau droit.
Vous souhaitez que le privé s’engage plus fortement dans le secteur associatif : c’est aussi l’un des souhaits que nous avions émis dans le cadre de la commission d’enquête rapportée par Mme Dumas. C’est aussi à nous, législateurs, de créer les conditions de la confiance entre les acteurs, et cela passe par des lois raisonnables qui évitent des procédures judiciaires, véritables épées de Damoclès sur la tête des responsables associatifs.
Enfin, nous avons noté l’annonce du Premier ministre de la mise en place d’un crédit de taxe sur les salaires, supposé compenser l’absence de CICE pour les associations, c’est-à-dire d’une baisse de charges de près de 600 millions d’euros sur les salaires, qui touchera toutes les associations employeuses. Je ne suis pas aussi ravi que vous, je suis plutôt dubitatif sur cette mesure au parfum électoraliste et très opportunément annoncée à la veille d’une importante année électorale. Nous attendons de voir le dispositif qui sera discuté lors des débats sur les articles non rattachés, mais la ficelle qui consiste à sortir du chapeau des mécanismes séduisants et non financés, ou dont le financement est renvoyé à une prochaine majorité, nous paraît particulièrement irresponsable.
Mme Gilda Hobert. Monsieur le rapporteur, votre présentation détaillée nous a éclairés sur des projets à venir. Nous constatons avec plaisir votre engagement vis-à-vis de la vie associative, qui s’est traduit par une consultation très nourrie des associations.
C’est également un plaisir de constater la détermination politique du Gouvernement en matière de sport, de jeunesse et de vie associative, illustrée par un budget de la mission en hausse de 49 % en deux ans. Au sein du budget, la jeunesse concentre les efforts les plus notables, avec des crédits jeunesse et vie associative en augmentation de 85 millions d’euros. L’accent est porté sur le service civique, dispositif qui remporte un vif succès, d’autant que désormais tous les jeunes peuvent y aspirer, et non plus les seuls étudiants. Comme vous l’avez souligné, il convient de faire en sorte que, dès cet engagement, toutes les catégories sociales, jeunes décrocheurs comme étudiants, s’y côtoient.
Le sport voit les autorisations d’engagement qui lui sont allouées augmenter de 4,2 %. Une majorité des crédits accordés sont à destination des fédérations sportives et des associations nationales agréées de jeunesse et d’éducation populaire, qui portent un message d’universalité plus que jamais indispensable à notre société. La démocratisation de la pratique sportive est l’un des combats menés par les ministres Patrick Kanner et Thierry Braillard. Des opérations comme « Citoyens du sport » ou « J’apprends à nager » attestent d’une volonté d’accompagner, aux côtés des pratiques de haut niveau, l’ouverture à tous du sport, grâce aux associations dont l’apport à l’enjeu de société qu’est la cohésion sociale n’est plus à prouver.
Par essence, le sport est porteur de valeurs humanistes, de fair play, d’entraide et d’abnégation à travers la compétition. Aussi ne peut-on qu’approuver la lutte contre le dopage, ventilée aux crédits de l’action 3 consacrée à la prévention par le sport et à la protection des sportifs. Le financement de l’AFLD est largement abondé, pour atteindre 8,5 millions d’euros. Après les récentes affaires qui ont encore frappé le sport olympique, l’intransigeance fait loi pour que le sport français à tous ses niveaux soit exemplaire.
L’exemplarité, voilà un terme qui pourrait qualifier le travail des associations. Or, malgré un soutien sans faille du Gouvernement, celles-ci souffrent, nous le voyons dans nos circonscriptions, qu’elles soient rurales ou urbaines. Nous devons leur témoigner toute notre attention et leur renouveler sans cesse notre confiance.
Les associations dépendent beaucoup des financements publics. Même si la baisse des dotations de l’État impacte leurs moyens d’action, reconnaissons la valeur ajoutée de certains dispositifs d’aide, telle la bienvenue prime à l’embauche. Ce dispositif remporte un succès certain, mais est-il à même, et le FONJEP avec lui, de permettre la pérennisation des emplois ainsi créés ?
Les difficultés sont nombreuses à ponctuer la vie du monde associatif, auquel je suis personnellement très attachée. C’est grâce à son engagement que nos quartiers, nos communes, nos territoires sont animés. La loi NOTRe a d’ailleurs renforcé la compétence des collectivités locales en matière de soutien aux associations, compétence qui mériterait d’être soutenue par des efforts concrets. Notre appui est primordial pour pallier la stagnation, voire l’érosion des inscriptions aux activités proposées par l’éducation populaire, et cela en dépit d’une tarification au quotient familial ou des possibilités de règlements échelonnés. Tout a un coût et ce coût-là peut peser lourd dans le porte-monnaie des plus précaires.
Par ailleurs, je vous rejoins, monsieur le rapporteur, lorsque vous exhortez à la simplification des démarches administratives pour les associations. En dépit de leur bonne volonté, chacun peut constater qu’elles manquent souvent de moyens pour embaucher ou pour développer des projets. Ne pensez-vous pas qu’il faille limiter le nombre d’appels à projet, dont la complexité administrative et la technicité pénalisent les petites associations ? Alors qu’elles sont le relais des territoires et des citoyens et, à ce titre, sont porteuses d’idées, ne doit-on pas les laisser être force de proposition de manière à renouer la confiance avec les collectivités ?
Le bénévolat est très souvent gratifiant, parfois épanouissant ; il joue un rôle indispensable pour le vivre ensemble, et il faut le lui reconnaître. Mais en se complexifiant, ce rôle risque de voir s’étioler les bonnes volontés. Aussi devons-nous nous montrer vigilants et entendre leur fatigue.
Je peux témoigner que lorsque la mutualisation se pratique au moins sur certaines actions, ça marche ! Alors oui, il faut la stimuler.
Le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste ne va pas bouder son plaisir devant les efforts considérables qui marquent le budget de la mission, un budget cohérent, en hausse et plein de promesses et d’initiatives.
M. Laurent Degallaix. Au nom du groupe Union des démocrates et indépendants, je salue le travail du rapporteur. Je regrette cependant, alors que la France est candidate à l’accueil des Jeux Olympiques de 2024, que le rapport thématique n’accorde pas une attention particulière aux crédits alloués au sport, ne se concentrant que sur un aspect de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Ce rapport nous offre néanmoins un éclairage très intéressant sur un secteur ô combien important pour la cohésion sociale : la vie associative. Dans le précédent projet de loi de finances, le groupe UDI avait salué l’augmentation des crédits consacrés au développement de la vie associative et à la formation. Aujourd’hui, à l’instar du rapporteur, nous regrettons la baisse de près de 2 millions d’euros, d’autant plus que les baisses successives des dotations ne permettent plus aux collectivités territoriales de garantir, comme elles l’ont fait par le passé, un soutien financier aux associations. Pourtant, la capacité des associations à produire du lien et à garantir la cohésion sociale doit être confortée.
La simplification des démarches et du fonctionnement quotidien des associations est une initiative louable, mais le dispositif manque de visibilité. Je salue les 16 millions de bénévoles qui ont beaucoup de courage face à la lourdeur et aux difficultés administratives qu’ils rencontrent dans leurs tâches au quotidien.
Les 1,3 million d’associations ont également besoin d’être soutenues financièrement. C’est le sens de l’annonce du Premier ministre, le 7 octobre dernier, de la création d’un crédit d’impôt pour les associations afin d’alléger le coût du travail pour ces structures qui ne bénéficient pas du CICE. Pouvez-vous, monsieur le rapporteur, nous en dire un peu plus sur cette mesure, notamment sur les conditions de sa mise en œuvre et la date d’application ?
M. le président Patrick Bloche. Le rapporteur devait traiter un thème, et il a fait un choix. Celui-ci ne traduit en rien un quelconque désintérêt pour notre candidature aux JO de 2024.
M. Jean-Pierre Allossery. Monsieur le rapporteur, je vous remercie pour la qualité et la densité de votre travail. Je partage votre avis que le service civique ne saurait se substituer aux autres outils au service de la jeunesse. On peut se réjouir que les crédits dévolus au service civique aient triplé sur la durée du quinquennat – 150 000 engagés sont attendus en 2017, conformément à la promesse du Président Hollande –, mais il mobilisera alors 82 % des crédits du programme 163 dédié à la jeunesse, à l’éducation populaire et au développement de la vie associative. Ce déséquilibre mérite discussion au regard des inquiétudes de l’ensemble du milieu associatif que vous relevez dans votre rapport.
Le désengagement de certaines collectivités dans les domaines de la vie associative ou de la jeunesse fragilise effectivement ces associations qui manquent cruellement de stabilité pour projeter leur action d’intérêt général dans le temps, celui des projets et non pas celui de la prestation. Aussi, l’annonce récente de la création du crédit de taxe sur les salaires pour les associations est-elle une réponse pertinente. Cette mesure représente un soutien équivalent à 600 millions d’euros de baisses de charges supplémentaires.
Vous consacrez la dernière partie de votre rapport à la revalorisation de l’engagement. Vous indiquez qu’aucun chiffre fiable ne montre une baisse importante du nombre de bénévoles. Permettez-moi d’ajouter à l’appui les chiffres du dernier baromètre jeunesse diffusé par l’INJEP : l’engagement des jeunes connaît une forte augmentation de 9 %, passant en un an de 26 % à 35 % ; l’engagement régulier, hebdomadaire est celui qui a le plus progressé cette année
– de 9 % à 14 %. C’est là un signe assez encourageant face aux difficultés sur le terrain pour trouver des dirigeants associatifs capables de prendre la relève générationnelle. Je partage donc tout à fait votre conviction sur la nécessité de mieux accompagner l’actuelle période de transition.
En même temps, je suis convaincu que cette progression de l’engagement bénévole des jeunes est issue de différentes mesures que nous avons prises
– réserve citoyenne, conseils citoyens, reconnaissance de l’engagement étudiant –, particulièrement à travers la loi Égalité et citoyenneté. La question est de veiller à la bonne articulation de ces nouveaux outils pour répondre à la préoccupation de renouvellement des dirigeants associatifs.
Mme Julie Sommaruga. Monsieur le rapporteur, merci d’avoir consacré votre rapport au soutien au monde associatif, un choix excellent car notre pays fonctionne grâce aux associations.
Beaucoup de ces associations sont demandeuses d’un soutien plus appuyé, par exemple pour des projets éducatifs spécifiques ayant vocation à compléter l’action de l’éducation nationale, qui ne peut pas tout faire, tels l’accompagnement à la scolarité, le soutien à la parentalité ou des activités culturelles ou artistiques. Quelle serait la philosophie des contrats d’objectifs et de territoire que vous proposez ? Comment permettre aux associations de garder leur autonomie dans le cadre de ce dispositif ?
Mme Brigitte Bourguignon. Je félicite le rapporteur pour l’originalité de sa démarche qui l’a amené à réaliser un très important travail de terrain auprès de 800 associations de son département.
Je voudrais m’arrêter sur sa proposition consistant à prolonger l’action engagée par le Gouvernement avec la charte d’engagement réciproque en 2014 : une série de devoirs et d’obligations mutuels, contractualisés et consentis par le monde associatif et les collectivités. Cette proposition très intéressante, tout en répondant aux préoccupations des associations, permettra d’assurer l’attractivité des territoires, notamment en zone de ruralité, et sera une opportunité pour coconstruire des services adaptés.
Vous soulignez également, monsieur le rapporteur, que l’établissement de diagnostics partagés permettrait de dépasser les clivages politiques. Dans un contexte politique inquiétant, il me semble nécessaire, en effet, de sécuriser la pérennité de l’action du milieu associatif. Élue d’un département confronté à la montée de l’extrême droite, je peux témoigner que sont apparus, çà et là en France, un certain nombre d’actes hostiles et d’incidents ciblés vis-à-vis d’associations ayant pour vocation l’intérêt général, à qui l’État délègue une mission de service public, par exemple en matière de lutte contre la grande pauvreté, d’aide alimentaire ou d’information aux droits des femmes, comme le Planning familial. Cette situation inédite s’éloigne de l’esprit républicain de tolérance, issu des Lumières, qui a permis jusqu’à présent, quelles que soient les étiquettes politiques, au terrain associatif d’assurer l’existence d’une pluralité d’opinions, fidèle au principe de Voltaire. Notre devoir est de le préserver.
À cet effet, le Haut Conseil à la vie associative a rendu, en mai dernier, un rapport sur la notion d’intérêt général attachée aux associations, dans le but de sécuriser leurs activités dans un cadre concurrentiel. Parmi ses préconisations figure la mise en place d’une commission départementale ou régionale composée de façon plurielle, notamment avec différentes administrations, associations, collectivités, dont les avis s’imposeraient à tous. Ne pensez-vous pas que cela pourrait compléter votre proposition et, en quelque sorte, consolider les digues face à l’arbitraire ?
M. Pascal Demarthe. Monsieur le rapporteur, j’ai lu votre rapport avec beaucoup d’intérêt et je tiens à vous féliciter pour votre travail. Une étude récente du Centre de recherche sur les conditions de vie a rappelé que, depuis les attentats du 13 novembre dernier, les jeunes s’engagent de plus en plus dans la vie associative. C’est fort de cette information optimiste que j’aborde mon intervention.
Cette année, comme l’an dernier, les crédits du budget sport, jeunesse et vie associative sont en hausse, avec 738 millions d’euros en crédits de paiement. C’est là la traduction de la priorité donnée à la jeunesse par le Président de la République dès 2012, réaffirmée avec constance depuis, et des réponses apportées, notamment lors du comité interministériel du 6 mars 2015 relatif à l’égalité et à la citoyenneté. Ainsi, l’engagement de la jeunesse dans la vie citoyenne, l’action associative dans les quartiers sensibles, le sport comme facteur d’intégration pour les Français les plus fragiles et de rayonnement pour la France sont bien des priorités pour notre gouvernement.
Le service civique concentre, selon votre analyse, une part très importante de la hausse du budget. Dans le projet de loi Égalité et citoyenneté actuellement en discussion au Parlement, le service civique est pensé comme une incitation à l’engagement des jeunes de tous horizons sociaux. Or vous pointez les limites du brassage social de ce type de dispositif et le risque qu’il devienne « une solution unique » qui absorberait tous les moyens de l’État au détriment du sport ou de l’éducation populaire. Quelles solutions pourraient éviter ces deux écueils ?
De plus, si le service civique est un succès et connaît un développement exponentiel, le manque de missions permet difficilement de satisfaire l’ambition affichée que chaque jeune puisse trouver une mission. Aujourd’hui encore, 75 % des missions proposées relèvent de l’associatif ; or l’objectif est de les développer dans les organismes publics nationaux et locaux. L’un des obstacles est, pour l’organisme d’accueil, de créer la mission, d’organiser les tâches du volontaire et de l’encadrer. Comment développer le service civique dans le service public pour donner un véritable sens de l’intérêt général ?
Mme Régine Poveda. Merci, monsieur le rapporteur, pour votre rapport et la conviction avec laquelle vous l’avez présenté.
Je me réjouis des investissements au profit du service civique qui, dans les collectivités et les associations, permettent à des jeunes de se former et de poursuivre leur apprentissage citoyen. Les crédits de cette mission sont en hausse : c’est une bonne chose. Il faut toutefois conserver l’esprit du service civique et éviter qu’il ne se transforme systématiquement en une sorte de stage, notamment pour les étudiants.
Je m’inquiète cependant, comme vous, de la baisse des crédits dédiés au développement de la vie associative. Dans nos territoires, les associations animent la vie de nos concitoyens ; elles sont le socle de notre vivre ensemble et de notre faire ensemble. Vous proposez des pistes. Il y a urgence à mettre en œuvre des méthodes d’accompagnement pour les associations et les bénévoles. Vous avez apporté une partie de la réponse, mais comment, encore, faire converger les bonnes initiatives dans tout le pays et mettre en relation les associations qui, bien souvent, ne se connaissent pas ?
Je profite de la parole qui m’est donnée pour féliciter tous les bénévoles engagés et impliqués dans la vie de tous les jours pour aider, accompagner, soigner, sauver, élever, encourager, entraîner, valoriser, remplacer et, tout simplement faire ensemble et vivre ensemble. Selon le proverbe, seul, on va plus vite, ensemble, on va plus loin. Allons plus loin dans notre république démocratique ouverte aux autres en aidant les bénévoles !
M. Stéphane Travert. Monsieur le rapporteur, je vous félicite pour le travail d’investigation que vous avez mené. Par la voie d’un questionnaire, mais aussi de réunions publiques, vous avez pu sonder l’état d’esprit des acteurs associatifs et rapporter leurs inquiétudes sur trois points : la confiance dans leurs relations avec les pouvoirs publics ; leurs moyens ; le renforcement de leurs compétences. Je souhaite vous interroger sur des dispositifs qui pourraient, à terme, répondre à certaines inquiétudes du monde associatif.
Le Gouvernement a annoncé la création dans le cadre du PLF 2017 d’un crédit d’impôt pour les associations. Ce CICE associatif, qui sera porté par amendement, concernera les structures associatives employant de nombreux salariés qui n’étaient jusque-là pas concernées par les précédentes avancées. Les associations bénéficieront d’un abattement de 4 % de la masse salariale sur la taxe sur les salaires inférieurs à 2,5 SMIC. Comme pour le CICE, les structures pourront également solliciter un préfinancement auprès de la BPI dès 2017. Quel regard portez-vous sur ce nouveau dispositif ?
S’agissant des modes de reconnaissance par l’État de l’engagement associatif bénévole, le compte engagement citoyen prévu par la loi travail permet de retracer les engagements pour la validation des acquis de l’expérience et d’acquérir des heures de formation supplémentaires. Que pensez-vous de l’idée de prendre en compte les années passées par des personnes impliquées dans les associations pour le calcul de leur droit à la retraite ?
M. Pascal Deguilhem. Monsieur le rapporteur, merci pour votre rapport qui souligne les atouts et les difficultés du monde associatif. Il est difficilement imaginable de vivre sans les structures associatives, vu la place qu’elles occupent aujourd’hui.
Merci également d’avoir cité dans votre rapport les députés Deguilhem et Juanico à propos des crédits du Centre national de développement du sport (CNDS) et de la pérennisation des ressources issues du prélèvement exceptionnel de 0,3 % au profit du secteur associatif sportif le plus fragile.
Je voudrais m’arrêter sur la valorisation des parcours et de l’engagement. Dans un rapport récent au Premier ministre sur la promotion des « activités physiques et sportives (APS) tout au long de la vie dans l’école et hors de l’école », Régis Juanico et moi-même avons formulé plusieurs préconisations – je pense que vous les partagez. La préconisation n° 15 consiste à valoriser les expériences « sportives » acquises par l’élève, à l’école et en dehors de l’école dans les associations et clubs dans un livret citoyen unique et numérique, l’accompagnant tout au long de la vie. La préconisation n° 26 consiste à valoriser la pratique sportive et/ou l’engagement des étudiants par l’obtention de crédits ECTS.
Enfin, il est difficile de savoir quelles sont les limites de la valorisation de l’engagement des bénévoles. Nous avons fait un focus sur l’Union sportive des écoles primaires (USEP), qui repose aujourd’hui très majoritairement sur l’engagement bénévole des professeurs des écoles et qui, de ce fait, ne peut pas se développer partout. C’est pourquoi notre préconisation n° 12 consiste à rendre obligatoire la création d’une association USEP dans chaque école. Enfin, notre préconisation n° 14 vise à favoriser la rémunération des intervenants USEP par les collectivités et valoriser l’engagement des professeurs des écoles au sein de l’USEP par l’attribution d’heures supplémentaires enseignant. C’est une vraie question que de savoir comment soutenir l’engagement bénévole par le biais de dispositifs financiers.
M. Christophe Premat. Monsieur le rapporteur, merci pour votre rapport, unanimement salué.
Je tiens à vous féliciter pour la méthode participative que vous avez adoptée, avec auditions ciblées et questionnaire. Elle est tout à fait dans l’esprit souhaité par le président de l’Assemblée nationale, qui a organisé plusieurs consultations numériques. Un petit bémol cependant : on aurait aimé que votre rapport en dise un peu plus sur l’exploitation des résultats de vos consultations, ne serait-ce que pour prolonger cette méthode. Vous êtes d’ailleurs coutumier du fait, puisque vous consultez énormément vos concitoyens sur votre territoire en amont de certains projets de loi.
Vous évoquez une baisse des crédits sur certaines enveloppes, que l’on peut regretter. L’éducation populaire a été phagocytée par la commande publique, ce qui est dommage. Les MJC que nous avons connues appartiennent à un monde disparu dans les années 1980, et ce n’était pourtant pas faute de moyens financiers. La nécessité de retrouver de la solidarité sociale dans notre pays doit nous inciter à imaginer une jonction entre service civique et associations.
L’association, c’est du bénévolat, mais c’est aussi du temps organisé. Tous les pays qui nous entourent ont davantage réussi le pari de la formation continue. La professionnalisation des associations renvoie aux aspects financier et juridique – un grand nombre de contrats associatifs sont très précaires, avec beaucoup d’abus au regard du droit du travail. Vous avancez quelques pistes très intéressantes car adossées à une vision. Je pense, cette fois-ci, à la jonction entre validation des acquis de l’expérience (VAE) et compte personnel d’activité (CPA). Les bénévoles devraient pouvoir valoriser leur investissement associatif dans le cadre de la formation continue. Serait-il possible d’intégrer la VAE dans le CPA pour l’avenir ? Nous le souhaitons, et je crois que votre rapport tend à démontrer la validité de cette thèse.
M. le rapporteur pour avis. Aujourd’hui, 80 % des citoyens ne croient plus à la parole politique. J’ai démarré ma démarche en 2012, malgré la réprobation de mes assistants qui me traitaient de fou. Comme adjoint à la démocratie et à la cohésion sociale à Montpellier, j’avais proposé de faire installer des tentes en bas des immeubles pour aller à la rencontre des gens. Ces maisons pour tous, avec des cahiers de doléances, ont été un formidable succès. J’ose le dire, souvent, les élus ont peur de la foule ; c’est notre faiblesse.
Le présent rapport ne porte pas tant sur le monde associatif que sur la question de savoir si la cohésion sociale doit être le ciment de la société de demain. Quand on a la chance d’avoir 16 millions de bénévoles, on ne peut plus leur dire, comme le faisait Georges Frêche, que le salaire du bénévole, c’est la reconnaissance. Le monde du bénévolat a besoin de formations. Dans le cadre des conseils consultatifs que j’ai mis en place, nous avons offert un téléphone et un ordinateur à chaque président de comité de quartier et leur avons proposé de suivre des formations avec l’éducation populaire, les CEMEA : aucun n’a manqué et, à l’issue de leur formation, un certificat leur a été délivré, qui valorisait ce qu’ils avaient appris non pas simplement en faisant venir des intervenants, urbanistes ou sociologues, mais en faisant projet commun avec eux. Dans ma circonscription, les gens se sont connus, donc reconnus. C’est là ma philosophie de vie.
Vous avez raison, monsieur Reiss, en période électorale, on rase gratis, et depuis toujours. Malheureusement, les gens ne croient plus aux promesses. Proposons-leur plutôt un projet de société. Nous avons la chance d’avoir 16 millions de bénévoles qui sont prêts à venir autour de la table. Les rapports entre les gens sont complètement différents quand ils se sentent associés. Les maisons associatives traditionnelles où chacun a son bureau ne peuvent plus exister : inspirons-nous du monde de l’entreprise, de l’espace co-working, où il y a une machine à café, une tireuse à bière, où les gens se croisent dans le hall d’entrée. Ainsi, les gens ne seront plus en concurrence, ils seront en partenariat. Voilà ce qu’il faut développer.
L’année derrière, vous avez voté 10 millions de crédits à la formation des bénévoles ; pour l’année 2017, ce sera 8 millions. Nous ne sommes pas dupes, c’est de l’argent récupéré dans les caisses de l’État. Peut-être faudrait-il développer une vision nouvelle de la société, permettre aux gens d’apprendre toute la vie, de pouvoir échanger – à l’inverse de l’entre-soi qui prévaut dans les universités. Le monde associatif, le partenariat devrait permettre aux gens de se rassembler. À Montpellier, j’avais mis en place, dans onze quartiers, des coordinateurs de territoire qui étaient tous des directeurs de maison pour tous, de l’éducation populaire. Je ne sais pas pourquoi nous avons tous abandonné l’éducation populaire, qui est pourtant la générosité, l’échange, le partage. Ces coordinateurs pouvaient identifier un projet structuré, ce qui permettait de s’engager sur trois ans, voire un mandat, avec le monde associatif. C’est cela que demandent les citoyens : des contrats d’objectifs partagés, coproduits, qui préfigurent une nouvelle forme de démocratie.
Il n’est plus possible de financer le club de foot qui fait du soutien scolaire avec 1 000 euros de plus. Chacun doit pouvoir intervenir dans son art précis. Que ce soit le club de foot ou le soutien scolaire, à chacun sa priorité. Mais il est très difficile pour le monde associatif d’entrer dans les écoles. Avec les contrats locaux de sécurité prioritaires, on a tout cloisonné dans notre société. Notre chance est que 16 millions de bénévoles ont envie de participer à l’aventure, sans regarder la couleur politique.
J’ai eu la chance d’être responsable stadier de la coupe du monde de foot en 1998. Il nous fallait 500 volontaires. Nous avons été les seuls à mettre en place un dossier d’inscription avec un entretien obligatoire : 1 490 personnes se sont présentées, et nous avons valorisé leurs compétences. Dans la même logique, l’organisation de formations, l’intervention de spécialistes ne peut que nourrir leur idéal, leur passion, leur envie.
Pour les Jeux Olympiques, 10 millions d’euros supplémentaires ont été rajoutés. Je voudrais tout de même vous alerter : ce sont les athlètes qui osent parler de dopage parce que l’État n’est pas capable de faire le ménage !
Je prépare actuellement un rapport parlementaire sur les arts martiaux mixtes (MMA) en vue d’une reconnaissance officielle. Je suis allé dans des caves à Marseille où des hommes complètement drogués se tapent dessus. Si l’on n’est pas capable d’organiser, de fédérer, d’éduquer nos gamins, d’autres le feront. C’est la porte ouverte au communautarisme. L’éducation populaire est vraiment le ciment de la société ; chacun a sa part de responsabilité dans son abandon, tout parti confondu, y compris la gauche.
La valorisation du bénévolat peut passer par le CPA, mais aussi par le chèque associatif. Beaucoup aimeraient que les gens qui donnent du temps à la société puissent accéder par ce biais à des spectacles sportifs ou culturels – nous l’avons fait dans notre commune où nous avions un contingent de 300 places gratuites. J’aimerais aussi qu’un jeune qui s’investit à la Croix Rouge ou au Secours populaire puisse l’inscrire dans son CV de sorte que l’entreprise comprenne qu’il est plus qu’un salarié, qu’il a envie de participer au bien commun. Voilà des pistes à développer.
J’avais pensé envoyer le questionnaire à tous les parlementaires, de gauche comme de droite, mais je n’ai pas osé. Je le regrette, car ils auraient pu voir ce qu’ils peuvent initier dans leur circonscription. Donc je le ferai. La France est fragilisée. Je suis meurtri de voir que des lycées sont attaqués, que des lycéens agressent leur proviseur, que les policiers se retrouvent à manifester. Il y a un besoin de sens et de cohérence, et notre devoir politique est d’y répondre. Bien sûr, les élections seront prétextes à des joutes, mais il faudra dépasser les clivages.
Pour moi, l’aventure continuera puisque le 26 novembre, nous recevrons à Montpellier quatre personnes auditionnées au niveau national, dont le président de l’Agence nationale du service civique, le préfet Yannick Blanc, qui interviendra sur la réserve citoyenne. À ce sujet, pour répondre aux difficultés sur mon territoire, avec des fondamentalistes qui sont en train de corrompre notre jeunesse, j’aurais aimé récupérer la réserve citoyenne – 385 personnes affectées à l’éducation –, mais on m’a dit : « ce sont les nôtres, pas les vôtres ». Je suis fatigué d’entendre « ce n’est pas vous, c’est nous » ! On a fragmenté à tel point qu’on n’est plus capable de réunir des gens autour d’un projet commun. Pour revenir au 26 novembre, outre le préfet, nous recevrons Viviane Tchernonog, spécialiste du monde associatif, et les représentants du Conseil national des employeurs d’avenir (CNEA). Et c’est Patrick Bloche qui assurera la clôture de ces magnifiques assises.
Je conclus en disant qu’il n’y a pas de liberté sans éducation et sans culture.
M. le président Patrick Bloche. Il était difficile de résister à cette invitation de Patrick Vignal, qui nous a confirmé aujourd’hui l’homme de conviction qu’il est. Nous l’en remercions.
La commission des Affaires culturelles et de l’Éducation procède le vendredi 28 octobre 2016, en commission élargie à l’ensemble des députés, dans les conditions fixées à l’article 120 du Règlement, à l’audition de M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, sur les crédits pour 2017 de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » (38).
À l’issue de la commission élargie, la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation examine, pour avis, les crédits pour 2017 de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
M. le président Patrick Bloche. La commission n’étant saisie d’aucun amendement, je mets aux voix les crédits pour 2017 de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », qui ont reçu un avis favorable du rapporteur M. Patrick Vignal.
La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
ANNEXE N° 1 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS
(par ordre chronologique)
Ø Mme Viviane Tchernonog, chercheuse au CNRS, spécialiste du monde associatif
Ø Ministère de la ville, de la jeunesse et des sports – Direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative (DJEPVA) – M. Jean-Benoît Dujol, directeur, et M. Charles-Aymeric Caffin, chef du bureau « développement de la vie associative, volontariat et bénévolat »
Ø Centre national pour le développement du sport (CNDS) – Mme Béatrice Barbusse, présidente du conseil d’administration, et M. Jean-François Guillot, directeur général
Ø Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (FONJEP) – Mme Nouria Messaoudi, déléguée générale
Ø Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d’éducation populaire (CNAJEP) – M. Daniel Fredout, président, Mme Françoise Dore, trésorière, et Mme Audrey Baudeau, déléguée générale
Ø Agence du service public – M. Yannick Blanc, président
Ø Conseil national des employeurs d’avenir (CNEA) – M. David Cluzeau, délégué général, M. Sébastien Busine, membre du CNEA en charge du sport, Mme Marie Lebec, conseillère du CNEA (agence EURALIA), et M. Aristide Lucet, stagiaire EURALIA
Ø VVF Villages – M. Didier Rembert, directeur général adjoint, et Mme Rebecca Meyer Szlamowicz, directrice des relations institutionnelles
ANNEXE N° 2 :
CONTRIBUTION ÉCRITE ADRESSÉE AU RAPPORTEUR POUR AVIS
Ø Contribution de M. Lionel Prouteau, chercheur en économie à l’université de Nantes