N° 422 - Rapport d'information de Mme Estelle Grelier et M. Marc Laffineur déposé par la commission des affaires européennes sur le cadre financier pluriannuel 2014-2020




No 422

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 novembre 2012.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES(1)

sur le projet de cadre financier pluriannuel pour 2014-2020,

ET PRÉSENTÉ

PAR Mme Estelle GRELIER et M. Marc LAFFINEUR,

Députés

——

La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Danielle AUROI, présidente ; Mmes Annick GIRARDIN, Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Pierre LEQUILLER, vice-présidents ; MM. Christophe CARESCHE, Philip CORDERY, Mme Estelle GRELIER, M. André SCHNEIDER, secrétaires ; MM. Ibrahim ABOUBACAR, Jean-Luc BLEUNVEN, Alain BOCQUET, Emeric BREHIER, Jean-Jacques BRIDEY, Mme Nathalie CHABANNE, M. Jacques CRESTA, Mme Seybah DAGOMA, M. Yves Daniel, MM. Charles de LA VERPILLIÈRE, Bernard DEFLESSELLES, Mme Sandrine DOUCET, M. William DUMAS, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FROMION, Hervé GAYMARD, Mme Chantal GUITTET, MM. Razzy HAMMADI, Michel HERBILLON, Marc LAFFINEUR, Mme Axelle LEMAIRE, MM. Christophe LÉONARD, Jean LEONETTI, Arnaud LEROY, Michel LIEBGOTT, Mme Audrey LINKENHELD, MM. Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Jean-Claude MIGNON, Jacques MYARD, Michel PIRON, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Arnaud RICHARD, Mme Sophie ROHFRITSCH, MM. Jean-Louis ROUMEGAS, Rudy SALLES, Gilles SAVARY, Mme Paola ZANETTI.

SOMMAIRE

___

Pages

I. LE CADRE FINANCIER PLURIANNUEL EN DISCUSSION APPARAÎT COMME LE RÉVÉLATEUR DES TENSIONS QUI PARCOURENT L’UNION 11

A. L’ENJEU INSTITUTIONNEL : PARVENIR À UN ACCORD À 27 ET OBTENIR L’APPROBATION DU PARLEMENT EUROPÉEN 11

1. Le cadre financier pluriannuel 2014-2020 est le premier à s’inscrire dans le cadre de la procédure prévue par le traité de Lisbonne 12

a) Le règlement fixant le cadre financier pluriannuel 12

b) L’accord interinstitutionnel sur la coopération en matière budgétaire et la bonne gestion financière 15

c) Les textes sur les ressources propres 15

d) Les actes législatifs sectoriels 17

2. Le calendrier des négociations s’accélère 20

B. L’ENJEU ÉCONOMIQUE : FAIRE PRIMER L’INTÉRÊT EUROPÉEN SUR LES INTÉRÊTS NATIONAUX POUR RÉPONDRE AUX DÉFIS EN MATIÈRE DE CROISSANCE 23

1. Les raisonnements purement comptables montrent leurs limites 23

a) Les contributions brutes sont trop souvent appréciées sans tenir compte de la richesse relative des États membres 23

b) La notion de solde net, qui présente de nombreux biais, fait apparaître des résultats divergents selon les modes de calcul retenus 25

2. Il est impératif de s’affranchir de la logique du « juste retour » et de faire primer l’intérêt européen 29

II. UN ACCORD SUR LE VOLET « DÉPENSES » DU CADRE FINANCIER PLURIANNUEL 2014-2020 NE PEUT INTERVENIR SANS UNE REMISE À PLAT DU SYSTÈME DE FINANCEMENT DU BUDGET EUROPÉEN 33

A. LE CADRE FINANCIER PLURIANNUEL 2014-2020 DOIT PERMETTRE À L’UNION DE RÉPONDRE AUX DÉFIS PRÉSENTS ET À VENIR 33

1. Premier défi : donner à l’Union les moyens de mener ses priorités politiques 34

a) La Commission européenne présente sa proposition de budget comme « ambitieuse et responsable » 34

b) Le Parlement européen juge cette enveloppe insuffisante pour mener à bien les politiques de l’Union 40

c) Malgré les divisions en son sein, le Conseil s’oriente vers un budget plus resserré 41

2. Deuxième défi : donner la priorité aux politiques en faveur de la croissance et de l’emploi 44

a) Croissance intelligente et inclusive (rubrique 1) 47

(1) Croissance et compétitivité 47

(a) Un nouveau cadre stratégique commun pour la recherche et l’innovation 48

(b) Le soutien à la compétitivité et aux PME 49

(c) Le nouveau programme « Europe éducation » 50

(d) Les grands projets 50

(e) Le mécanisme pour l’interconnexion en Europe 51

(2) Cohésion 54

(a) La création d’une nouvelle catégorie de régions 55

(b) La concentration des moyens sur les régions les plus pauvres et la stratégie Europe 2020 56

(c) Un nouveau cadre de gestion 57

b) Croissance durable : ressources naturelles (rubrique 2) 61

(1) La politique agricole commune 63

(a) Une redistribution des soutiens 64

(b) Une prise en compte accrue des exigences en matière de développement durable 66

(c) Des cofinancements revus à la baisse 67

(d) La recherche d’une plus grande efficacité dans l’attribution des aides 68

(2) La politique maritime et de la pêche 68

(3) La protection du climat et de l’environnement 70

c) Sécurité et citoyenneté (rubrique 3) 70

(1) Affaires intérieures 71

(2) Protection des personnes 72

(3) Citoyenneté 72

(4) Culture 73

d) L’Europe dans le monde (rubrique 4) 73

(1) Les instruments de mise en œuvre des politiques extérieures spécifiques 75

(2) Les instruments destinés à faire face aux crises 77

e) Administration (rubrique 5) 77

3. Troisième défi : régler la question des restes à liquider 79

4. Quatrième défi : accroître la souplesse du budget, pour assurer sa réactivité 81

B. LE FINANCEMENT DU BUDGET EUROPÉEN DOIT FAIRE L’OBJET D’UNE ÉVOLUTION EN PROFONDEUR QUI REPOSE SUR LA SUPPRESSION DES RABAIS ET LA MISE EN PLACE DE « VÉRITABLES RESSOURCES PROPRES » 82

1. Le système de financement est dépassé 83

a) Un dispositif qui repose principalement sur une ressource au mode de calcul théorique 83

b) Des mécanismes de correction complexes et inéquitables 85

2. Si les propositions de la Commission vont dans le bon sens, elles pourraient être plus ambitieuses et gagneraient à ce que leurs modalités de mise en œuvre soient approfondies 88

a) Le rééquilibrage de la structure de financement du budget 88

b) La nouvelle ressource TVA 91

c) La taxe sur les transactions financières 91

d) La révision des mécanismes de correction 93

TRAVAUX DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES 99

ANNEXES 111

RÉSUMÉ DU RAPPORT

Les négociations sur le cadre financier pluriannuel pour 2014-2020 s’inscrivent dans un contexte empreint de nouveauté. C’est en effet le premier à devoir être adopté, sous l’empire du traité de Lisbonne, qui en consacre l’existence, à l’unanimité de vingt-sept États membres et avec l’approbation du Parlement européen. C’est par ailleurs la première fois que les discussions s’engagent dans un environnement marqué à la fois par des difficultés économiques persistantes et des interrogations profondes sur les contours et la nature même de l’Union. La conjugaison de ces facteurs conduit à une radicalisation des positions, faisant des négociations sur le cadre financier pour 2014-2020 la caisse de résonnance des difficultés de l’Union européenne.

La proposition de la Commission européenne, incluant les instruments spéciaux, s’élève à 1 061 milliards en euros constants 2011 (1 197 milliards en euros courants), soit des progressions de, respectivement, 5 et 17 % par rapport aux perspectives financières pour 2007-2013. La priorité est accordée à la croissance et à l’emploi, en particulier la recherche et l’innovation ainsi que le mécanisme pour l’interconnexion en Europe, qui voient leurs moyens fortement progresser. Les efforts en faveur de la politique de cohésion sont poursuivis avec, notamment, la création de la catégorie des « régions en transition », la mise en place d’un filet de sécurité pour les régions sortant de l’objectif « convergence », une concentration accrue des interventions et le renforcement de la place du Fonds social européen. Le budget de la politique agricole commune et de la politique commune de la pêche serait stabilisé en euros courants et complété par une réserve mobilisable en cas de crise agricole.

En complément de ses propositions sur le cadre financier pour 2014-2020, la Commission européenne suggère de revoir le mode de financement du budget européen, en y affectant une nouvelle ressource propre fondée sur la taxe sur les transactions financières et en modifiant la ressource fondée sur la TVA. Elle propose également de réformer les mécanismes de correction avec la suppression du « chèque britannique », des « rabais sur le rabais » dont bénéficient aujourd’hui l’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas et la Suède, et des rabais forfaitaires suédois et néerlandais. Des mécanismes de correction temporaire des déséquilibres excessifs, qui prendraient la forme de réductions brutes forfaitaires, seraient mis en place en faveur de l’Allemagne, des Pays-Bas, du Royaume-Uni et de la Suède. Ils seraient financés par tous les États en fonction de leur part dans le revenu national brut.

Le Parlement européen juge que, pour atteindre les objectifs déjà fixés à l’Union, une progression d’au moins 5 % par rapport aux plafonds de 2013 est nécessaire. Il souligne la nécessité d’accroître l’effort en faveur de la recherche et de l’innovation ainsi que les investissements dans les infrastructures, la politique étrangère et l’élargissement. Les dépenses en faveur de la cohésion et de l’agriculture doivent être au moins maintenues à leur niveau actuel.

Critique sur le système de financement, le Parlement européen appelle de ses vœux la mise en place d’un système fondé sur des « ressources propres véritables », tout en soulignant que la réforme ne doit ni affecter la taille du budget, ni augmenter la charge fiscale globale. Il appuie l’idée d’affecter tout ou partie de la taxe sur les transactions financières au budget européen et exige la suppression des rabais, dérogations et mécanismes de correction.

Au sein du Conseil, les divergences sont fortes entre les pays dits « amis de la politique de la cohésion » emmenés par la Pologne et les contributeurs nets, qui se présentent comme les « amis du mieux dépenser ». Des clivages apparaissent en outre au sein même de ces deux groupes. Malgré ces divisions, le Conseil s’oriente vers un budget plus resserré. Le président du Conseil européen a ainsi soumis aux États membres, le 13 novembre 2012, une proposition à hauteur de 984 milliards d’euros. Par ailleurs, le Conseil n’a pas approfondi les sujets relatifs au système des ressources propres.

Alors qu’elles semblent se concentrer sur des raisonnements purement comptables et des objectifs principalement appréciés en termes de « juste retour », les négociations sur le cadre financier pour 2014-2020 doivent au contraire permettre l’affirmation d’un budget véritablement européen, qui dépasse les égoïsmes nationaux pour consacrer l’intérêt européen. Cela suppose de mettre en œuvre deux objectifs indissociables.

Le premier objectif est l’adoption d’un cadre budgétaire qui apporte des réponses aux inquiétudes des citoyens européens et leur redonne confiance. Il doit être doté de telle sorte que la mise en œuvre des priorités politiques de l’Union européenne soit assurée. Compte tenu du contexte économique mondial, la première de ces priorités doit être la mise en place d’un environnement favorable à la croissance et à l’emploi. Il convient par ailleurs, afin d’asseoir la crédibilité et l’efficacité des interventions européennes, de régler la question des restes à liquider. Enfin, pour permettre à l’Union de réagir rapidement aux nouveaux défis qui se poseront, il est impératif d’accroître la flexibilité de son budget.

Le second objectif est la réforme du mode de financement du budget européen qui, caractérisé par une accumulation de rabais et la prépondérance de la ressource fondée sur le revenu national brut, apparaît dépassé. Il convient de revenir à l’esprit des traités et de doter ce budget de véritables ressources propres, afin de restituer au cadre financier pluriannuel sa finalité : définir des priorités politiques et en garantir la mise en œuvre. La piste de la taxe sur les transactions financières doit en particulier être approfondie.

Mesdames, Messieurs,

Alors que la pratique des perspectives financières a vu son existence consacrée par le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, le cadre financier prévu pour couvrir la période 2014-2020 serait-il, paradoxalement, le premier à ne pouvoir être adopté depuis 1988, année du lancement de ce dispositif ?

Une telle hypothèse ne peut être exclue, même s’il convient de garder à l’esprit que l’élaboration des perspectives financières constitue une négociation longue et particulièrement complexe, nécessitant souvent, cela été le cas en 1999 et en 2005, deux sommets européens pour réussir.

Si la Commission européenne a présenté ses propositions en juin 2011, le débat a, dans les faits, commencé dès 2010, avec le réexamen budgétaire intervenu à mi-parcours du cadre financier pour 2007-2013 et le lancement de la stratégie « Europe 2020 » destinée à relancer l’économie européenne. Chacun des acteurs a en effet souhaité prendre position très tôt.

Ainsi, les députés européens, qui entendent exercer pleinement les pouvoirs qui leur sont confiés par le traité de Lisbonne, ont constitué, dès juillet 2010, une Commission spéciale sur les défis politiques et les ressources budgétaires pour une Union européenne durable après 2013, dont les travaux ont conduit le Parlement européen à souligner, dans sa résolution du 8 juin 2011, l’impératif d’une hausse d’au moins 5 % des ressources affectées au prochain cadre financier et fixé l’objectif de 1,11 % du revenu national brut (RNB).

De leur côté, les chefs d’État et de gouvernement ont souligné, dès le Conseil européen du 29 octobre 2010, combien il était important que « le prochain cadre financier pluriannuel reflète les efforts d’assainissement déployés par les États membres pour ramener le déficit et la dette sur une trajectoire plus viable. Tout en respectant le rôle des différentes institutions et la nécessité d’atteindre les objectifs poursuivis par l’Europe (…), [il y a lieu] de faire en sorte que les dépenses au niveau européen contribuent de manière appropriée à ce processus ».

Forte de ces orientations, la Commission européenne a suggéré, dans sa proposition modifiée du 6 juillet 2012, de doter le cadre financier pluriannuel de 1 061 milliards en euros constants, ce qui représente une progression de plus de 5 % par rapport aux perspectives financières actuelles. Au sein des politiques de l’Union, l’accent serait plus particulièrement mis sur celles en faveur de la croissance.

Cette proposition s’accompagne d’un vaste projet de réforme du système de financement du budget européen reposant sur la remise à plat des mécanismes de correction, la révision en profondeur de la ressource fondée sur la TVA et l’affectation d’une nouvelle ressource propre qui prendrait la forme d’une taxe sur les transactions financières.

Les positions de l’ensemble des acteurs de la négociation tendent aujourd’hui à se radicaliser dans une logique de surenchère, à tel point que l’on juge plus prudent de dissocier de la négociation relative au cadre financier pluriannuel la réflexion lancée par le président Van Rompuy sur la création d’une capacité budgétaire propre à la zone euro. Si son objet même n’est pas encore précisément défini – il pourrait faciliter les réformes structurelles ou contribuer à absorber les chocs asymétriques et jouer ainsi un rôle contra-cyclique –, ce nouvel instrument ne peut pourtant être conçu comme un dispositif concurrent du budget européen, qu’il doit au contraire compléter.

Alors que l’échéance de 2014 approche et que les interrogations sur les contours et la nature même de l’Union se multiplient, deux exigences, étroitement liées, s’imposent. Il s’agit de doter l’Union d’un cadre financier qui lui permette de relever les défis auxquels elle est confrontée, en particulier celui de la croissance, et de porter un projet mobilisateur. Il faut également remettre à plat le mode de financement du budget européen, afin de le doter d’un véritable système de ressources propres.

Tels sont les véritables enjeux sur lequel doivent se concentrer les discussions, plutôt que sur des logiques purement comptables, et contestables, de « juste retour ».

I. LE CADRE FINANCIER PLURIANNUEL EN DISCUSSION APPARAÎT COMME LE RÉVÉLATEUR DES TENSIONS QUI PARCOURENT L’UNION

Les négociations sur le cadre financier pluriannuel pour 2014-2020 s’inscrivent dans un contexte marqué par plusieurs nouveautés.

C’est tout d’abord le premier cadre financier négocié par vingt-sept États membres, avec, en outre, la perspective de l’adhésion d’un vingt-huitième État, la Croatie, au 1er juillet 2013.

Il s’agit ensuite du premier cadre à devoir être adopté sous l’empire du traité de Lisbonne, ce qui emporte trois conséquences :

– la consécration, par le traité même, de l’existence du cadre financier pluriannuel ;

– l’évolution des relations entre les institutions européennes. Outre la volonté affichée du Parlement européen d’utiliser pleinement ses pouvoirs, il convient de souligner l’affirmation du rôle du président du Conseil européen dans les discussions. C’est ainsi Herman Van Rompuy, et non la présidence chypriote, qui a formulé la dernière proposition de compromis soumise au Conseil ;

– la prise en compte, par le budget européen, des nouvelles prérogatives confiées à l’Union en matière d’action extérieure, de changement climatique, d’espace, d’énergie, de tourisme, de protection civile et de sport.

C’est, enfin, la première fois que les discussions s’engagent dans un cadre marqué à la fois par des difficultés économiques persistantes et des interrogations profondes sur les contours et la nature même de l’Union.

Alors que la conjugaison de ces facteurs conduit à une radicalisation des positions des acteurs, les négociations ont un double enjeu, institutionnel et économique.

Le cadre financier pluriannuel n’est pas un budget pluriannuel. Il s’agit d’un cadre de référence qui traduit, dans le respect d’un plafond de ressources et à travers des plafonds de dépenses, des ambitions politiques et une conception de l’intérêt général européen. Précédant la négociation des budgets annuels, il exprime ainsi les orientations politiques majeures auxquelles chaque budget de la période couverte doit ensuite se conformer. Cette programmation à moyen terme est en effet juridiquement contraignante, tant au stade de l’élaboration des budgets qu’au cours de leur exécution.

Destiné à « assurer une évolution ordonnée des dépenses de l’Union dans la limite de ses ressources »2, le cadre financier pluriannuel fixe les montants des plafonds annuels des crédits pour engagements (CE) par catégorie de dépenses et du plafond annuel des crédits pour paiements (CP). Il prévoit également toute disposition utile au bon déroulement de la procédure budgétaire annuelle.

Depuis sa mise en place en 1988, cette procédure – consacrée par le traité de Lisbonne – a fait la preuve de son utilité pour améliorer les relations entre les institutions parties prenantes à la procédure budgétaire et pour assurer un financement régulier des grandes politiques.

Les premières perspectives financières (1988-1992) ont ainsi permis de surmonter les crises budgétaires interinstitutionnelles des années 1980 et de lancer les politiques structurelles liées à l’élargissement de 1986. Le cadre financier pour 1993-1999 s’est caractérisé par la préparation de la mise en place de l’euro, le passage de 1,20 % à 1,27 % du PNB pour le plafond des ressources propres, une progression de 41 % des fonds structurels, et le passage des dépenses agricoles sous la barre des 50 % du budget. Les perspectives financières pour 2000-2006 ont, pour leur part, constitué un revirement, avec une stabilisation des crédits, l’économie ainsi dégagée étant utilisée pour préparer l’élargissement. Enfin, le cadre financier pour 2007-2013, le premier négocié à 25, a été marqué par les conséquences du plus important élargissement de l’Union européenne depuis sa création.

Le cadre financier pluriannuel pour 2014-2020 est donc le cinquième à faire l’objet d’une négociation. Il s’inscrit toutefois dans un cadre juridique nouveau puisque, consacré par le traité de Lisbonne, il doit être fixé par un règlement établi selon une procédure spéciale, alors que les précédents cadres financiers pluriannuels faisaient l’objet d’accords interinstitutionnels entre le Conseil, le Parlement et la Commission.

L’article 312 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne précise en effet, en son alinéa 2, que le cadre financier pluriannuel est fixé par un règlement adopté à l’unanimité par le Conseil3, après approbation du Parlement européen.

Le schéma suivant retrace la procédure d’adoption du règlement fixant le cadre financier pluriannuel.

PROCEDURE D’ADOPTION DU CADRE FINANCIER PLURIANNUEL

Source : Conseil de l’Union.

Si l’équilibre des pouvoirs n’est pas fondamentalement bouleversé, des infléchissements apparaissent.

Ce n’est plus le Conseil européen, mais le Conseil de l’Union qui est compétent pour adopter le texte fixant le cadre financier, dans le prolongement de l’interdiction faite au Conseil européen d’exercer toute fonction législative (article 15 du traité). Il appartient en revanche aux chefs d’État et de gouvernement de définir les orientations et les priorités politiques générales avec, dans les faits, un rôle moteur joué par le président du Conseil européen. L’unanimité demeure requise.

Pour sa part, le Parlement européen doit se prononcer à la majorité de ses membres, et non des seuls suffrages exprimés. Il peut approuver ou rejeter le texte, mais pas l’amender. Un éventuel échec dans les négociations n’inquiète pas outre mesure les députés européens, comme l’a indiqué à la mission d’information Mme Jutta Haug, présidente de la Commission spéciale sur les défis politiques et les ressources budgétaires pour une Union européenne durable après 2013 : les plafonds du budget pour 2013 seraient reconduits et le budget annuel adopté selon la procédure prévue par le traité de Lisbonne, qui affermit les pouvoirs du Parlement.

Le Parlement européen entend pleinement faire valoir ses droits. Il souligne ainsi, dans sa résolution du 23 octobre 2012, « qu’un accord politique conclu au niveau du Conseil européen ne constitue rien d’autre qu’un mandat de négociation confié au Conseil ; [il] insiste sur le fait qu’après que le Conseil européen soit parvenu à un accord politique, de véritables négociations doivent avoir lieu entre le Parlement et le Conseil avant que ce dernier ne soumette officiellement ses propositions relatives au règlement fixant le cadre financier pluriannuel à l’approbation du Parlement. »

Par ailleurs, en application du paragraphe 5 de l’article 312 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne qui vise à faciliter l’adoption du cadre financier4, le président du Parlement européen, actuellement Martin Schulz, est invité au début du Conseil européen.

Compte tenu du caractère strict des règles d’adoption du cadre financier pluriannuel, la tentation est forte, au sein du Conseil, d’y inclure des dispositions qui auraient plutôt vocation à figurer dans les règlements sectoriels (cf. infra d.).

La proposition de règlement fixant le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020 s’accompagne d’un projet d’accord interinstitutionnel sur la coopération en matière budgétaire et la bonne gestion financière (COM (2011) 403 final), qui apporte des compléments précieux sur les règles relatives à la mise en œuvre du cadre financier (comme le maintien de l’usage des marges sous plafonds), mais également sur les instruments spéciaux qui ne figurent pas dans le cadre financier (comme la réserve d’aide d’urgence, le fonds de solidarité, l’instrument de flexibilité ou encore le fonds européen d’ajustement à la mondialisation), l’amélioration de la collaboration interinstitutionnelle en matière budgétaire et, enfin, la bonne gestion des fonds de l’Union.

Contrairement au cadre financier pluriannuel, ce projet de texte fait toujours l’objet de la procédure d’adoption relative aux accords interinstitutionnels.

Le train de mesures relatives au cadre financier pluriannuel 2014-2020 ne peut être dissocié des cinq propositions de textes relatifs aux ressources propres que la Commission européenne a présentées en 2011, afin de revoir en profondeur le mode de financement du budget européen.

La Commission utilise ainsi pleinement les possibilités ouvertes par l’article 311 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Ce dernier prévoit, en son troisième alinéa, qu’il est possible d’établir de nouvelles catégories de ressources propres ou d’abroger une catégorie existante, ce qui ne semblait pas interdit auparavant mais n’était pas explicité. Surtout, il introduit, en son quatrième alinéa, une plus grande souplesse en autorisant le renvoi à un règlement d’exécution la définition des mesures techniques liées au système des ressources propres, dans les limites fixées par la décision qui les régit.

Sur cette base et celle du réexamen du budget de l’Union européenne, la Commission européenne a présenté cinq textes.

Il s’agit tout d’abord de la proposition de décision relative au système des ressources propres de l’Union européenne présentée le 29 juin 2011 (COM (2011) 510 final) et modifiée le 9 novembre 2011 (COM (2011) 739 final). L’article 311 du traité de Lisbonne a, en l’espèce, maintenu la procédure précédemment en vigueur, qui est une procédure lourde, similaire à celle relative à la révision des traités. Les États membres disposent ainsi d’une maîtrise quasi absolue dans l’adoption de cette décision, le Parlement européen n’ayant qu’un rôle consultatif. Le Conseil statue à l’unanimité, ce qui réserve à chaque État membre un droit de veto, et la décision est soumise à ratification selon les modalités propres à chaque État. La procédure est retracée dans le schéma ci-dessous.

PROCEDURE D’ADOPTION DE LA DECISION RELATIVE AU SYSTEME DES RESSOURCES PROPRES

Source : Conseil de l’Union.

La proposition de décision relative au système des ressources propres s’accompagne d’une proposition de règlement portant mesures d’exécution du système des ressources propres (COM (2011) 511) présentée le 29 juin 2011 et modifiée le 9 novembre 2011 (COM (2011) 740), qui doit être adoptée selon une procédure plus souple puisqu’elle requiert la majorité qualifiée au Conseil et l’approbation du Parlement européen.

Compte tenu des modalités d’adoption différentes de ces textes, la Commission européenne a eu tendance à restreindre le champ de la décision relative aux ressources propres pour renvoyer un maximum de dispositions au règlement d’exécution, dont les modalités d’adoption sont moins strictes.

Viennent enfin trois propositions de règlements relatifs à la manière de mettre à disposition les différentes ressources propres5, qui doivent être adoptées par le Conseil à la majorité qualifiée, après consultation du Parlement européen.

Parallèlement au débat sur le cadre financier pluriannuel se déroulent toute une série de négociations relatives aux textes de mise en œuvre des programmes européens.

La Commission européenne a ainsi présenté plus de cinquante propositions sectorielles qui visent la plupart de ses champs d’action : agriculture, cohésion, recherche, formation, développement, action extérieure, etc. Ces textes définissent le contenu et les objectifs de tous les programmes sur la période 2014-2020 ; ils fixent des règles portant, par exemple, sur les critères d’admissibilité et de répartition des fonds et mettent en place des instruments dans chaque domaine.

Ces actes juridiques relèvent, d’une manière générale, de la procédure législative ordinaire de la codécision, où le Conseil et le Parlement européen décident ensemble, le Conseil statuant à la majorité qualifiée, selon le schéma ci-dessous.

PROCEDURE D’ADOPTION DES ACTES LEGISLATIFS SECTORIELS

Source : Conseil de l’Union.

Alors que c’est la première fois que les règlements sectoriels sont soumis au Parlement européen et au Conseil selon la procédure de codécision, force est de constater que plusieurs questions, qu’il serait plus logique d’aborder dans les règlements sectoriels, sont débattues dans les discussions relatives au cadre financier. Le Parlement européen a ainsi été conduit à rappeler, dans sa résolution du 23 octobre 2012, que « les organes législatifs sont le Parlement et le Conseil, le Conseil européen n’exerçant pas le rôle de législateur » et à insister sur le fait que « les négociations concernant les propositions législatives relatives aux programmes pluriannuels se poursuivront dans le cadre de la procédure législative ordinaire ».

QUELLES SERAIENT LES CONSEQUENCES D’UN ACCORD TARDIF

OU D’UNE ABSENCE D’ACCORD ?

– S’agissant du cadre financier pluriannuel, cette hypothèse est prévue par le traité de Lisbonne.

Il stipule en effet, en son article 312 paragraphe 4, que, « lorsque le règlement du Conseil fixant un nouveau cadre financier n’a pas été adopté à l’échéance du cadre financier précédent, les plafonds et autres dispositions correspondant à la dernière année de celui-ci sont prorogés jusqu’à l’adoption de cet acte ».

En revanche, le traité n’apporte aucune précision sur les modalités de la prorogation, en particulier sur la prise en compte ou non de l’inflation, alors que l’accord interinstitutionnel entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission sur la discipline budgétaire et la bonne gestion financière du 17 mai 2006 stipule qu’» à défaut de la conclusion, par les deux branches de l’autorité budgétaire, d’un accord sur un nouveau cadre financier, et sauf dénonciation expresse du cadre financier existant par l’une des institutions, les plafonds pour la dernière année couverte par le cadre financier existant seront ajustés […] de façon à ce que les plafonds pour 2013 soient maintenus à prix constants ».

– En l’absence d’accord sur les ressources propres, le rabais britannique et les « rabais sur le rabais » continueraient à exister. En revanche les réductions de taux d’appel pour la ressource TVA qui profitent à l’Allemagne, à l’Autriche, aux Pays-Bas et à la Suède ainsi que les rabais forfaitaires dont bénéficient les Pays-Bas et la Suède disparaîtraient, car ces mécanismes correcteurs sont expressément prévus pour la période 2007-2013 dans la décision du Conseil du 7 juin 2007 relative au système de ressources propres des Communautés européennes.

– Concernant les actes législatifs sectoriels associés au cadre financier pluriannuel, l’ensemble des règlements, à l’exception notable de celui relatif aux aides directes de la politique agricole commune, viennent à échéance à la fin de l’année 2013. Afin de ne pas donner de signal négatif, ces règlements pourraient toutefois être prorogés.

Au total, un accord tardif, voire une absence d’accord, n’entraînerait pas, à proprement parler, une situation de blocage pour le budget européen. Toutefois, outre le signal très négatif ainsi envoyé, la mise en œuvre des grands projets et des ambitions de l’Union serait freinée. A cet égard, lors de son audition par votre Commission, le président de la Banque européenne d’investissement, Werner Hoyer, a adressé une mise en garde très claire : « Faute d’accord, il sera impossible de s’attaquer à de grands projets, car, lors de l’adoption du budget, la question du financement de la croissance et de l’innovation se posera chaque année de la même façon. ».

Les réflexions sur le cadre financier pluriannuel 2014-2020 ont été lancées dès 2010, avec le réexamen budgétaire intervenu à mi-parcours du cadre financier pluriannuel actuel. Il s’agissait ainsi, conformément à la demande du Conseil européen de décembre 2005 d’examiner « tous les aspects des dépenses communautaires, y compris la politique agricole commune, et des ressources, y compris le rabais britannique ». À l’issue d’une vaste consultation publique, la Commission européenne a dégagé plusieurs principes qu’elle propose de mettre en œuvre dans le cadre financier pluriannuel 2014-2020 :

– se concentrer sur la valeur ajoutée de l’Union européenne ;

– mettre en œuvre les priorités d’action fondamentales ;

– orienter les dépenses selon leurs incidences et leurs résultats ;

– produire des avantages mutuels dans l’ensemble de l’Union ;

– accroître la capacité de réaction du budget européen et simplifier ses modalités de mise en œuvre.

La même année, la Commission européenne a présenté « Europe 2020 », sa nouvelle stratégie destinée à relancer l’économie européenne. Elle a pour objectif de développer une croissance « intelligente, durable et inclusive » fondée sur une plus grande coordination entre les politiques nationales et européennes. Les grands axes de cette stratégie sont la promotion des industries sobres en carbone, l’investissement dans le développement de nouveaux produits, l’exploitation des possibilités de l’économie numérique et la modernisation de l’éducation et de la formation. Cinq objectifs sont fixés : atteindre un taux d’emploi supérieur à 75 % ; consacrer 3 % du produit intérieur brut à la recherche et au développement ; confirmer les objectifs en matière de lutte contre le changement climatique (dits « 20-20-20 »6) ; réduire le taux de pauvreté de 25 % ; améliorer les niveaux d’éducation en réduisant le taux d’abandon scolaire à 10 % et en portant à 40 % la proportion des personnes de 30 à 34 ans ayant obtenu un diplôme de l’enseignement supérieur ou atteint un niveau d’études équivalent.

C’est sur la base de ces éléments que la Commission européenne a adopté, le 29 juin 2011, sa communication au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative à un « budget pour la stratégie Europe 2020 », composée d’une présentation générale et d’une série de fiche thématiques et présenté la proposition de règlement fixant le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020 ainsi que le projet d’accord interinstitutionnel sur la coopération en matière budgétaire et les propositions de textes relatifs aux ressources propres.

Toutefois, bien en amont de la présentation de sa proposition par la Commission, le Parlement européen et le Conseil ont souhaité donner des lignes directrices à cette dernière.

Ainsi, le Parlement européen, qui entend exercer pleinement les pouvoirs qui lui sont confiés par le traité de Lisbonne, a constitué, en juillet 2010, une Commission spéciale sur les défis politiques et les ressources budgétaires pour une Union européenne durable après 2013, présidée par Jutta Haug et dont le rapporteur est Salvador Garriga Polledo. Cette commission spéciale a proposé des orientations dès le 28 mai 2011, sur la base desquelles le Parlement européen a adopté, à une large majorité, le 8 juin 2011, la résolution intitulée « Investir dans l’avenir : un nouveau cadre financier pluriannuel pour une Europe compétitive, durable et inclusive » qui :

– propose de revoir la maquette budgétaire et d’accroître la flexibilité et l’efficacité du cadre financier ;

– souligne la nécessité d’augmenter de 5 % au moins le montant des ressources affectées au prochain cadre financier par rapport au niveau de 2013 ;

– définit ses priorités politiques, en particulier la croissance et l’emploi ;

– affirme sa volonté de voir évoluer le mode de financement du budget européen avec la suppression de l’ensemble des réductions et mécanismes de correction et l’introduction de véritables ressources propres.

Ces orientations ont, depuis, été réaffirmées et précisées à deux reprises par le Parlement européen. A la veille de la présentation par la présidence danoise au Conseil européen de juin 2012 du « cadre de négociation », le Parlement a ainsi adopté, à une large majorité, sa résolution du 13 juin 2012 sur le cadre financier pluriannuel et les ressources propres. Il a ensuite, sur le fondement du rapport intérimaire de la commission des budgets et des avis des commissions sectorielles, voté, de nouveau à une large majorité, sa résolution du 23 octobre 2012 visant à favoriser un résultat positif de la procédure d’approbation du cadre financier pluriannuel 2014-2020.

De leur côté, les chefs d’État et de gouvernement ont souligné, dès le Conseil européen du 29 octobre 2010, combien il importait que « le prochain cadre financier pluriannuel reflète les efforts d’assainissement déployés par les États membres pour ramener le déficit et la dette sur une trajectoire plus viable. Tout en respectant le rôle des différentes institutions et la nécessité d’atteindre les objectifs poursuivis par l’Europe (…), [il y a lieu] de faire en sorte que les dépenses au niveau européen contribuent de manière appropriée à ce processus ».

En outre, en marge du Conseil européen de décembre 2010, les chefs d’État et de gouvernement de cinq États membres « contributeurs nets » (France, Allemagne, Royaume-Uni, Finlande et Pays-Bas) ont adressé un courrier au président de la Commission européenne relatif à l’évolution du budget de l’Union pour les dernières années du cadre financier 2007-2013 et pour le prochain cadre financier pluriannuel, demandant une stabilisation du volume des dépenses communautaires.

À la suite de la publication de la proposition de la Commission européenne, la présidence polonaise de l’Union a organisé, tout au long du second semestre 2011, des réunions techniques sur le cadre financier pluriannuel. Au cours du premier semestre 2012, la présidence danoise a élaboré un « cadre de négociation », aussi dénommé « boîte de négociation », qui expose l’ensemble des points soumis à la négociation avec les différentes options possibles. Ce document est mis à jour au fur et à mesure que les discussions avancent et doit constituer la base de l’accord au niveau du Conseil européen.

Fin août 2012, la présidence chypriote a ainsi présenté une proposition de cadre de négociation révisé mais ne comportant toujours aucun chiffre, sur laquelle les États membres ont vivement réagi lors du Conseil du 24 septembre. Les discussions ont confirmé l’opposition forte entre les pays « amis de la politique de la cohésion », qui ont d’ailleurs constitué un groupe spécifique emmenés par la Pologne, et les contributeurs nets ou « amis du mieux dépenser » (dont l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Autriche, la Suède, le Danemark et les Pays-Bas), et mis en évidence des divergences au sein même de ces deux groupes.

Une nouvelle version du cadre de négociation, chiffrée cette fois, a été soumise au Conseil par la présidence chypriote le 29 octobre dernier. La diminution de l’ordre de 50 milliards d’euros des crédits d’engagement par rapport à la proposition de la Commission européenne a reçu un accueil globalement défavorable, les uns étant d’avis que la proposition était encore d’un montant trop élevé, les autres déplorant les coupes opérées, la plupart étant mécontents des postes de dépenses ainsi réduits.

Le président du Conseil européen Herman Van Rompuy a alors demandé à l’ensemble des États membres de réfléchir à un scénario privilégiant une baisse de 75 milliards d’euros par rapport au schéma de la Commission européenne et conduit une série de réunions bilatérales, qui ont abouti, le 13 novembre dernier, à la proposition qui constitue une première base pour les discussions du Conseil européen des 22 et 23 novembre.

Ce sommet européen intervient dans un contexte de radicalisation des positions au sein du Conseil, avec une menace de veto brandie par le Royaume-Uni, et surtout, du côté du Parlement européen. L’échec de la procédure de conciliation relative au projet de budget rectificatif no 6 pour 2012, dans lequel la Commission européenne demande d’ouvrir 9 milliards d’euros, et au projet de budget pour 2013 en témoigne.

CONTRIBUTION DES ÉTATS MEMBRES

AU FINANCEMENT DU BUDGET EUROPEEN EN 2011

     

État membre

Contribution brute
(en million d’euros)

Part dans le total

(en %)

Allemagne

23 127,1  

19,27

Autriche

2 688,7  

2,24

Belgique

4 926,5  

4,11

Bulgarie

395,2  

0,33

Chypre

184,8  

0,15

Danemark

2 448,3  

2,04

Espagne

11 046,3  

9,21

Estonie

158,6  

0,13

Finlande

1 955,2  

1,63

France

19 617,2  

16,35

Grèce

1 903,0  

1,59

Hongrie

937,4  

0,78

Irlande

1 338,7  

1,12

Italie

16 078,0  

13,40

Lettonie

182,3  

0,15

Lituanie

302,0  

0,25

Luxembourg

293,1  

0,24

Malte

66,5  

0,06

Pays-Bas

5 868,9  

4,89

Pologne

3 580,4  

2,98

Portugal

1 734,4  

1,45

République tchèque

1 682,5  

1,40

Roumanie

1 225,9  

1,02

Royaume-Uni

13 825,2  

11,52

Slovaquie

693,7  

0,58

Slovénie

401,1  

0,33

Suède

3 333,6  

2,78

TOTAL

119 994,6  

100,00

Source : Rapport financier 2011 de la Commission européenne.

Il en ressort que les contributions globales de certains pays sont plus élevées que leur part dans le RNB de l’Union.

C’est le cas notamment de la France, qui contribue à hauteur de 16,3 %, alors que sa part dans le RNB de l’Union s’élève à 16,1 %, mais également, dans des proportions plus fortes, de l’Espagne (9,2 % contre 8,3 %), de l’Italie (13,4 % contre 12,4 %) ou encore de la République tchèque (1,4 % contre 1,1 %).

En revanche, il convient de souligner que plusieurs contributeurs parmi les plus riches participent moins au financement du budget que leur part relative dans le RNB. Il en va ainsi du Royaume-Uni (11,5 % contre 13,9 %), de l’Allemagne (19,3 % contre 20,7 %) et de la Suède (2,8 % contre 3,1 %).

Ces écarts s’expliquent notamment par les différents mécanismes de correction, au premier rang desquels le chèque britannique, dont la France, l’Italie et l’Espagne sont les principaux financeurs avec des contributions s’élevant à, respectivement, 966, 718 et 488 millions d’euros (cf. annexe 2).

Il ressort de cette approche, paradoxalement, des transferts de l’Est et du Sud de l’Europe vers le pays du Nord.

Le raisonnement en termes de solde net doit, de même, être appréhendé avec prudence. En effet, celui-ci, qui reflète l’écart entre ce qu’un État membre verse au budget communautaire au titre des ressources propres et ce qu’il reçoit grâce aux dépenses de l’Union européenne effectuées sur son territoire, peut être calculé selon au moins trois méthodes, qui conduisent à des résultats différents.

Ces modes de calcul révèlent les divergences d’approche entre les États membres et au sein des institutions européennes, s’agissant notamment du traitement des ressources propres traditionnelles et de la nature des dépenses à répartir.

Ainsi, selon la méthode dite « comptable », le solde net est la différence entre, d’une part, la contribution d’un État membre au budget de l’Union européenne au titre de l’ensemble des ressources propres, y compris les ressources propres traditionnelles (nettes des frais de perception) et, d’autre part, le montant des dépenses communautaires effectuées dans cet État, y compris les dépenses administratives.

En revanche, la méthode dite « du rabais britannique » – car elle sert au calcul de son montant – prévoit que le solde net est calculé en faisant abstraction du montant des ressources propres traditionnelles, c’est-à-dire des droits de douane et des prélèvements agricoles qui sont versés au budget européen par l’État membre dont les services douaniers réalisent le prélèvement. Il s’agit ainsi d’éviter le gonflement, sans autre justification que comptable, des contributions de certains États membres, comme les Pays-Bas et la Belgique, dont les ports constituent des points de passage importants.

Enfin, la Commission européenne calcule le solde net en excluant les ressources propres traditionnelles et les dépenses administratives.

Le tableau suivant détaille les résultats pour chaque État membre, selon chacune des méthodes.

SOLDES NETS DES ÉTATS MEMBRES EN 2011

 

Solde net comptable

Solde net

selon la méthode britannique

Solde net

selon la méthode de la Commission européenne

 

en millions d’euros

en % du RNB

en millions d’euros

en % du RNB

en millions d’euros

en % du RNB

Belgique

1 870

0,50

3 018

0,80

– 1 370

– 0,36

Bulgarie

712

1,90

716

1,91

725

1,94

République tchèque

1 347

0,93

1 377

0,95

1 455

1,01

Danemark

– 975

– 0,39

– 923

– 0,37

– 837

– 0,34

Allemagne

– 10 994

– 0,42

– 10 200

– 0,39

– 9 003

– 0,34

Estonie

346

2,28

350

2,31

350

2,31

Irlande

301

0,24

352

0,28

384

0,31

Grèce

4 634

2,23

4 546

2,18

4 623

2,22

Espagne

2 553

0,24

2 438

0,23

2 995

0,29

France

– 6 455

– 0,32

– 7 227

– 0,36

– 6 406

– 0,31

Italie

– 6 492

– 0,41

– 6 614

– 0,42

– 5 933

– 0,38

Chypre

– 1

– 0,01

3

0,02

7

0,04

Lituanie

729

3,61

731

3,62

731

3,62

Lettonie

1 351

4,57

1 362

4,61

1 368

4,63

Luxembourg

1 255

4,10

1 234

4,03

– 75

– 0,24

Hongrie

4 394

4,65

4 386

4,64

4 418

4,67

Malte

69

1,18

72

1,23

67

1,15

Pays-Bas

– 3 805

– 0,63

– 2 400

– 0,39

– 2 214

– 0,36

Autriche

– 813

– 0,27

– 962

– 0,32

– 805

– 0,27

Pologne

10 860

3,07

10 796

3,05

10 975

3,10

Portugal

2 981

1,81

2 908

1,76

2 984

1,81

Roumanie

1 434

1,06

1 400

1,04

1 451

1,08

Slovénie

446

1,27

478

1,36

490

1,40

Slovaquie

1 091

1,61

1 135

1,68

1 161

1,71

Finlande

– 662

– 0,34

– 745

– 0,38

– 652

– 0,34

Suède

– 1 577

– 0,40

– 1 497

– 0,38

– 1 325

– 0,33

Royaume-Uni

– 7 255

– 0,41

– 6 738

– 0,38

– 5 566

– 0,32

Source : Rapport financier 2011 de la Commission européenne.

Il en ressort des résultats très différents. Par exemple, la méthode employée par la Commission, qui exclut les dépenses administratives, rend le Luxembourg et la Belgique, qui bénéficient de la présence des institutions européennes sur leur territoire, contributeurs nets. Ce qu’ils ne sont pas dans les deux autres méthodes de calcul. L’Allemagne voit sa contribution nette passer de 0,34 % de son RNB dans la méthode de la Commission à 0,42 % dans la méthode comptable et celle des Pays-Bas oscille entre 0,36 % dans la première méthode et 0,63 % dans la seconde.

Quant à la France, si sa position parmi les principaux contributeurs nets est confirmée par toutes les méthodes de calcul, son classement varie fortement : elle est 4e contributeur net selon la méthode comptable (7e lorsque les données sont rapportées au RNB), 2e avec les méthodes du rabais britannique et de la Commission européenne en données absolues, mais respectivement 8e et 9e en données rapportées au RNB.

Toutefois, malgré la diversité des approches possibles, qui doit conduire à la plus grande prudence, une rapide analyse des soldes nets7 montre que les principaux bénéficiaires nets en volume et en pourcentage du RNB sont les nouveaux États membres mais aussi la Grèce, le Portugal et, dans une moindre mesure, l’Espagne, ainsi que, compte tenu du mode de calcul retenu, le Luxembourg et la Belgique. Depuis l’élargissement de 2004, on constate une diminution des soldes nets d’anciens États membres bénéficiaires nets, particulièrement de l’Espagne et de l’Irlande.

Le détail est retracé dans le graphique suivant.

SOLDES NETS EN 2011

(calculés selon la méthode dite de la « correction britannique »)

(en milliards d’euros)

Source : rapport financier 2011 de la Commission européenne.

Le solde net des nouveaux États membres s’améliore globalement. De fortes disparités demeurent toutefois : la Lettonie a un solde net égal à 4,61 % du RNB tandis que Chypre est faiblement bénéficiaire net en 2010.

L’Allemagne demeure le premier contributeur net en volume, mais son solde net s’améliore tant en volume qu’en pourcentage du RNB : il passe de – 10,4 milliards (– 0,41 %) en 2010 à – 10,2 milliards (– 0,39 %) en 2011. En revanche, la situation de l’Italie se dégrade : de – 5,15 milliards (– 0,38 %) en 2010, son solde net s’établit à – 6,6 milliards (– 0,42 %) en 2011, ce qui fait de l’Italie le premier contributeur en pourcentage du RNB.

Le détail est retracé dans le graphique suivant.

PARTS DES SOLDES NETS DANS LE RNB EN 2011

(calculés selon la méthode dite de la « correction britannique »)

(en % du RNB)

Source : rapport financier 2011 de la Commission européenne.

Quant à la France, elle se place, en 2011, au deuxième rang des contributeurs nets en volume (- 7,23 milliards d’euros), derrière l’Allemagne (- 10,2 milliards), mais devant le Royaume-Uni, derrière lequel elle se situait encore l’an dernier. La contribution nette de la France a ainsi augmenté de près d’1 milliard, son solde net passant de - 6,37 milliards en 2010 à - 7,23 milliards en 2011. Sa contribution nette rapportée au RNB s’est également dégradée, puisqu’elle est passée de 0,32 % en 2010 à 0,36 % en 2011. Elle recule toutefois au huitième rang des contributeurs nets en pourcentage du RNB, derrière l’Italie, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Suède, le Royaume-Uni, la Finlande et le Danemark, alors qu’elle se situait au sixième rang en 2010.

Sur le long terme, la France se caractérise par une dégradation progressive de son solde net, comme le montre le graphique suivant.

EVOLUTION DU SOLDE NET FRANÇAIS ENTRE 1998 ET 2011

(calculé selon la méthode dite de « la correction britannique »

Source : Commission européenne.

Il apparaît ainsi qu’au cours des douze dernières années, le solde net de la France, constamment négatif, s’est progressivement dégradé. Inférieur à - 0,15 % de son RNB jusqu’au début des années 2000, il dépasse les - 0,25 % depuis 2008 et - 0,30 % depuis 2010, alors même que les nouveaux États membres ne bénéficient pas encore totalement du niveau de retour que leur appartenance à l’Union européenne leur permet d’escompter. La France est, jusqu’ici, parvenue à contenir le niveau de son solde net, en se maintenant parmi les premiers bénéficiaires des dépenses communautaires entre 2006 et 2011. Cependant, l’élargissement de l’Union européenne, l’encadrement des dépenses agricoles résultant des perspectives financières 2007-2013 ainsi que l’entrée en vigueur de la décision ressources propres du 7 juin 2007 contribuent à sa dégradation.

Toutefois, il convient de dépasser ces divers raisonnements, dont les fondements sont, on le voit, fragiles. Afin d’éviter la prévalence des égoïsmes nationaux, il faut non seulement remettre à plat le système des ressources propres du budget européen (cf. infra partie II.B.), mais également s’affranchir de la logique du « juste retour ».

Les négociations en cours montrent qu’en dépit de leur caractère contestable, les soldes nets nationaux et la logique du « juste retour » qui y est associée continuent de jouer un rôle majeur dans le positionnement des États membres.

La prévalence du raisonnement fondé sur les soldes nationaux depuis trente ans résulte de trois facteurs.

Tout d’abord, alors qu’il était initialement alimenté par des ressources propres, le budget européen a progressivement recouru aux contributions nationales, avec une place croissante accordée à la ressource fondée sur le RNB, s’exposant ainsi à des exigences de « juste retour ».

C’est ce qui s’est passé avec le Royaume-Uni, qui a osé, le premier, franchir le pas en contestant ouvertement le principe de solidarité financière sur le fondement d’un calcul de contribution nette. Le célèbre « I want my money back » de Mme Margareth Thatcher a ainsi conduit, lors du Sommet européen de Fontainebleau en 1984, à la mise en place du « chèque britannique », mécanisme destiné à remédier au déséquilibre entre les versements effectués par le Royaume-Uni et les dépenses de l’Union sur son sol. Son corollaire immédiat a pris la forme d’« un rabais sur le rabais » en faveur de l’Allemagne, revu et étendu à l’Autriche, les Pays-Bas et la Suède lors du Conseil européen de Berlin en mars 1999, et qui a aujourd’hui pour conséquence que ces contributeurs nets ne paient que le quart de leur part normale dans le financement de la correction britannique. S’y sont ajoutés, lors du Conseil européen de décembre 2005 relatif aux perspectives financières 2007-2013, de nouveaux mécanismes de correction qui prennent la forme de réductions du taux d’appel pour la ressource TVA accordées à ces mêmes quatre États membres pour la période 2007-2013 et de deux rabais dont bénéficient les Pays-Bas et la Suède pour 2007-2013. Le détail figure en annexe 2.

Enfin, la logique même de l’élargissement favorise ce type de raisonnement. Les élargissements de 1981 (Grèce), 1986 (Espagne et Portugal) et 2004 (Pays d’Europe centrale et orientale, Chypre et Malte), qui ont fait entrer des pays dont le niveau de développement économique était nettement inférieur à la moyenne, ont contribué à renforcer l’attention portée aux soldes nets. En effet, ces nouveaux entrants bénéficient davantage de certaines dépenses, comme les fonds structurels et le fonds de cohésion, et versent moins que les autres au budget européen, compte tenu du mode de calcul des contributions nationales.

Ainsi, au fur et à mesure, les négociations sur les perspectives financières ont été le théâtre d’affrontements basés sur une importance croissante accordée au solde net, qui ont conduit à une surenchère en matière de mécanismes correcteurs, dont témoigne aujourd’hui le « mille-feuille » de rabais et autres ristournes en place. Comme l’a souligné M. Serge Guillon, conseiller du premier ministre pour les affaires européennes, à vos Rapporteurs, l’acceptation, par la Commission européenne, d’un raisonnement fondé sur les soldes nets a constitué une véritable révolution dans l’appréhension des perspectives financières.

Or, les soldes nets sur lesquels s’appuie la logique du « juste retour » présentent deux défauts majeurs, qui ont notamment été mis en évidence, au lendemain de l’échec du Conseil européen de juin 2005 consacré aux perspectives financières pour 2007-2013, par Jacques Le Cacheux, dans une étude intitulée « Le budget européen : les mirages du juste retour » publiée par le think tank Notre Europe en juin 2005.

L’absence de véritable étalon commun, dont témoigne la diversité des méthodes de calcul des soldes nets constitue une première faiblesse. Les conventions sur lesquelles reposent les soldes nets sont en réalité très arbitraires et des modifications, même mineures, des critères d’imputation conduisent à des variations sensibles de ces soldes, rendant très délicate toute interprétation. Ainsi, chacun use, au moment le plus opportun, de la méthode la plus avantageuse, sans aucune logique d’ensemble (cf. supra partie I.B.1.).

Le second défaut, plus fondamental d’un point de vue économique, réside dans le fait que cette approche comptable ne peut rendre compte des relations économiques et financières entre les États membres d’un marché unique qui conduisent des politiques communes.

Il est ainsi impossible de répartir certaines dépenses entre États membres, comme celles effectuées au titre de la politique extérieure de l’Union européenne et les dépenses de préadhésion.

Il existe par ailleurs de multiples gains économiques qui ne sont pas directement évaluables, tels que ceux entraînés par le marché unique ou ceux résultant, pour un État membre, de l’utilisation de fonds européens dans un autre État membre.

Ainsi que le souligne Jacques Le Cacheux, « c’est le raisonnement économique sous-tendant de telles évaluations qui est fautif : les effets induits par les prélèvements et, plus encore, par les dépenses se transmettent dans les économies des États membres, de sorte que la localisation des bénéfices et des coûts des politiques communes est, dans une union économique et monétaire, loin d’être conforme à ce que suggère l’apparence des soldes nets ».

Privilégier la notion de solde net, qui retrace uniquement les flux financiers entre un État membre et l’Union, sans rendre compte des bénéfices – ni d’ailleurs des coûts – de l’Europe, conduit donc à une impasse. Compte tenu de ses défauts majeurs et des biais qu’il introduit, le solde net, qui favorise beaucoup l’Allemagne, ne doit pas être l’unique référent à l’aune duquel les négociations sur le cadre financier se concluent.

Il convient ainsi d’abandonner cette notion et son corollaire, la logique du « juste retour », ou à tout le moins, de n’y faire référence que de manière marginale et avec beaucoup de précaution, afin de cesser de faire prévaloir les intérêts nationaux. C’est indispensable pour rendre aux négociations sur le cadre financier pluriannuel leur rôle : définir ensemble des politiques communes et les moyens de les mettre en œuvre.

Cela apparaît d’autant plus nécessaire que l’Union européenne doit aujourd’hui relever trois défis essentiels : l’accélération de sa croissance, l’affermissement de sa compétitivité et la lutte contre le chômage.

L’Union et la zone euro doivent en effet faire face, depuis 2008, à des taux de croissance faibles, voire négatifs certaines années, comme cela été le cas en 2009, avec un épisode récessif supérieur à – 4 %. Il risque d’en aller de même en 2012, le PIB de la zone euro étant susceptible de se contracter de 0,3 %.

Dans ce contexte, et en complément des différentes politiques mises en place aux niveaux européen et nationaux, le budget de l’Union, qui est à plus de 90 % un budget d’investissement, apparaît comme un outil pertinent pour permettre à l’Europe de sortir de la crise actuelle en stimulant les investissements dans la croissance et l’emploi et en aidant les États membres à relever les défis structurels actuels, en particulier la perte de compétitivité et l’augmentation du chômage et de la pauvreté.

Cela repose sur un postulat essentiel : les dépenses européennes doivent avoir une réelle valeur ajoutée, comme l’a souligné la Commission européenne dans son document de travail rendu public le 29 juin 2011. L’objectif principal du budget européen doit ainsi être de créer une valeur ajoutée européenne, en regroupant les ressources, en jouant un rôle de catalyseur – grâce à la mobilisation de sources complémentaires de financement privé et public – et en offrant des économies d’échelle, des effets d’entraînement et des retombées transfrontalières.

Tel est le véritable enjeu sur lequel devraient se concentrer les discussions en cours, plutôt que sur des indicateurs discutables de solde net et de prétendu « juste retour » pour chacun des États membres raisonnant individuellement.

II. UN ACCORD SUR LE VOLET « DÉPENSES » DU CADRE FINANCIER PLURIANNUEL 2014-2020 NE PEUT INTERVENIR SANS UNE REMISE À PLAT DU SYSTÈME DE FINANCEMENT DU BUDGET EUROPÉEN

Les négociations en cours doivent permettre l’affirmation d’un budget véritablement européen, qui dépasse les égoïsmes nationaux pour consacrer l’intérêt européen. Cela suppose de mettre en œuvre deux objectifs indissociables.

Le premier est l’adoption d’un cadre budgétaire qui apporte une réponse aux inquiétudes des citoyens européens et leur redonne confiance. Dans cette perspective, il doit être axé sur la croissance et l’emploi, en cohérence avec la stratégie Europe 2020 pour une croissance intelligente, durable et inclusive et les conclusions du Conseil européen des 28 et 29 juin 2012.

Le second est la réforme du mode de financement du budget européen qui, caractérisé par son « mille-feuille » de rabais et la faible part prise par les ressources propres, apparaît dépassé. Il convient de revenir à l’esprit des traités et de doter ce budget de nouvelles ressources propres, afin de sortir le cadre financier pluriannuel de la logique de « marchands de tapis » qui prévaut actuellement et de lui restituer sa finalité : définir des priorités politiques et en garantir la mise en œuvre.

À cet égard, il convient de souligner que, si le Parlement européen a déjà mis en garde le Conseil à plusieurs reprises sur l’impossibilité d’un accord sur les dépenses sans évolution du dispositif des recettes, les discussions au Conseil se sont, jusqu’à présent, davantage concentrées sur les dépenses.

Dans sa proposition du 29 juin 2011, la Commission européenne met en avant la recherche d’un point d’équilibre entre le souhait du Parlement européen de porter les crédits d’engagement à 1,11 % du RNB, exprimé dans sa résolution du 8 juin 2011, et celui de plusieurs États membres de ne pas dépasser le seuil de 1 % du RNB, c’est-à-dire peu ou prou le pourcentage actuel.

Elle présente ainsi une stabilisation de la part des crédits d’engagement dans le RNB de l’Union à 1,05 % et avance que les engagements qu’elle propose pour l’ensemble de la période du cadre financier pluriannuel, soit 1 025 milliards d’euros, correspondent à sept fois le plafond de la dernière année de l’actuel cadre financier pluriannuel 2013. En paiements, la Commission propose 972 milliards d’euros sur la période, soit 1 % du RNB.

Le détail de la proposition de la Commission européenne est retracé dans le tableau suivant.

CADRE FINANCIER 2014-2020

(Proposition du 29 juin 2011)

en engagements et en millions d’euros – prix 2011

 

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Total

2014-

2020

1. Croissance intelligente et inclusive

64 696

66 580

68 133

69 956

71 596

73 768

76 179

490 908

dont : cohésion économique, sociale et territoriale (y.c. MIE)

50 468

51 543

52 542

53 609

54 798

55 955

57 105

376 020

2. Croissance durable : ressources naturelles

57 386

56 527

55 702

54 861

53 837

52 829

51 784

382 927

dont : dépenses relatives au marché et paiements

42 244

41 623

41 029

40 420

39 618

38 831

38 060

281 825

3. Sécurité et citoyenneté

2 532

2 571

2 609

2 648

2 687

2 726

2 763

18 535

4. L’Europe dans le monde

9 400

9 645

9 845

9 960

10 150

10 380

10 620

70 000

5. Administration

8 542

8 679

8 796

8 943

9 073

9 225

9 371

62 629

dont : dépenses administratives des institutions

6 967

7 039

7 108

7 191

7 288

7 385

7 485

50 464

6. Compensations

27

0

0

0

0

0

0

27

Total crédits d’engagement

142 556

144 002

145 085

146 368

147 344

148 928

150 718

1 025 000

en % du RNB

1,18 %

1,07 %

1,06 %

1,06 %

1,05 %

1,04 %

1,03 %

1,05 %

Total crédits de paiement

133 851

141 278

135 516

138 396

142 247

142 916

137 994

972 198

en % du RNB

1,01 %

1,05 %

0,99 %

1,00 %

1,01 %

1,00 %

0,94 %

1,00 %

Source : Commission européenne.

Pour autant, la démonstration est quelque peu faussée dans la mesure où elle ne peut être menée qu’au prix de débudgétisations. En effet, deux grands projets scientifiques, ITER (réacteur thermonucléaire expérimental) et GMES (surveillance spatiale pour l’environnement et la sécurité), pour lesquels 8,5 milliards d’euros sont prévus, sont présentés hors du budget général au motif qu’ils ne concernent pas uniquement les acteurs de l’Union européenne et que l’évolution des besoins associés à ces projets est trop incertaine. Une telle exclusion ne peut être justifiée : il s’agit de politiques communautaires, qui ont, en outre, été financées sous plafond jusqu’à présent. Aussi, en application du principe d’unité budgétaire, le financement de ces projets doit-il être assuré par le budget général.

Cette démonstration ne tient pas non plus compte des instruments financiers utilisables en cas d’urgence ou pour faire face à des imprévus budgétaires, qui sont traditionnellement placés hors du cadre financier pluriannuel en raison du caractère incertain de leur mobilisation. D’un montant total de près de 20 milliards d’euros dans la proposition de la Commission européenne, ces instruments spéciaux sont prévus dans le projet d’accord interinstitutionnel. Il s’agit de :

– la réserve d’aide d’urgence aux États tiers, mobilisable notamment en cas de catastrophe humanitaire. Cette réserve voit son montant annuel limité pour toute la période à 350 millions d’euros, ce qui représente une hausse de plus de 50 % par rapport à l’actuel cadre financier pluriannuel qui prévoyait un plafond de 221 millions d’euros en prix constants 2004 ;

– le Fonds de solidarité de l’Union européenne (FSUE), destiné à subvenir aux besoins d’un État membre confronté à une catastrophe majeure. Le montant maximal pouvant être mobilisé s’élève à 1 milliard d’euros par an, soit le même montant qu’actuellement ;

– le Fonds européen d’ajustement à la mondialisation (FEM), qui a pour objectif de faciliter l’accès au marché du travail des personnes licenciées à la suite des mutations du commerce mondial. Il est proposé un montant limité à 429 millions d’euros par an, contre 500 millions d’euros actuellement, et de modifier ses critères d’attribution ;

– l’instrument de flexibilité, qui permet de dépasser, dans la limite de 500 millions d’euros (contre 200 millions d’euros aujourd’hui), les plafonds fixés par le cadre financier pluriannuel afin de financer des dépenses non prévues et précisément identifiées ;

– un nouvel instrument proposé par la Commission européenne : une réserve en cas de crise dans le secteur agricole, qui peut être mobilisée jusqu’à 500 millions d’euros par an.

La démonstration de la Commission européenne écarte également le Fonds européen de développement, constitué à partir de clés de financement différentes de celles du budget européen, et, en ce qui concerne plus particulièrement la France, abondé à partir du programme budgétaire de la mission « Aide publique au développement » qui relève du ministère des Affaires étrangères. 30 milliards d’euros sont proposés pour 2014-2020, contre 23 milliards d’euros actuellement.

Si l’on tient compte de l’ensemble de ces éléments, la proposition de la Commission européenne représente 1,11 % du RNB, se rapprochant ainsi de la demande du Parlement européen.

Le 6 juillet 2012, la Commission a modifié sa proposition, afin de tenir compte :

– de l’adhésion de la République de Croatie (+ 13,7 milliards d’euros en engagements, dont près de 10 milliards au titre de la cohésion et 4 milliards au titre de la PAC ; + 9,9 milliards d’euros en paiements) ;

– de la nécessaire actualisation des hypothèses économiques sur lesquelles repose le cadre financier8. Cela conduit, d’une part, à une baisse de l’enveloppe de la cohésion de 5,5 milliards d’euros en engagements et, d’autre part, à une progression globale de 5,3 milliards d’euros des paiements, compte tenu de l’évolution des paiements et des restes à liquider.

Ces révisions aboutissent donc à une hausse de 8,2 milliards d’euros du plafond total des engagements, le portant à 1 033 milliards d’euros (1,08 % du RNB de l’Union), et à un relèvement du plafond des paiements de 15,4 milliards d’euros, qui s’établit donc à 988 milliards d’euros (1,03 % du RNB).

Le tableau suivant retrace la proposition de la Commission telle que revue le 6 juillet 2012.

CADRE FINANCIER 2014-2020

(Proposition révisée du 6 juillet 2012)

en engagements et millions d’euros – prix 2011

 

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Total

2014-

2020

1. Croissance intelligente et inclusive

64 769

67 015

68 853

70 745

72 316

74 386

76 679

494 763

dont : cohésion économique, sociale et territoriale (y.c. MIE)

50 464

51 897

53 177

54 307

55 423

56 474

57 501

379 243

2. Croissance durable : ressources naturelles

57 845

57 005

56 190

55 357

54 357

53 371

52 348

386 472

dont : dépenses relatives au marché et paiements

42 363

41 756

41 178

40 582

39 810

39 052

38 309

283 051

3. Sécurité et citoyenneté

2 620

2 601

2 640

2 679

2 718

2 757

2 794

18 809

4. L’Europe dans le monde

9 400

9 645

9 845

9 960

10 150

10 380

10 620

70 000

5. Administration

8 622

8 755

8 872

9 019

9 149

9 301

9 447

63 165

dont : dépenses administratives des institutions

7 047

7 115

7 184

7 267

7 364

7 461

7 561

51 000

6. Compensations

27

0

0

0

0

0

0

27

Total crédits d’engagement

143 282

145 021

146 400

147 759

148 690

150 195

151 888

1 033 235

en % du RNB

1,10 %

1,09 %

1,08 %

1,08 %

1,07 %

1,06 %

1,06 %

1,08 %

Total crédits de paiement

133 976

141 175

144 126

138 776

146 870

144 321

138 356

987 599

en % du RNB

1,03 %

1,06 %

1,06 %

1,01 %

1,06 %

1,02 %

0,96 %

1,03 %

Source : Commission européenne.

Si l’on retient le périmètre élargi comprenant les projets ITER et GMES ainsi que les instruments spéciaux, la proposition modifiée de la Commission européenne s’élève à 1 061 milliards d’euros en engagements ; 1 091 milliards d’euros en tenant compte du FED.

En euros courants, c’est-à-dire après prise en compte de l’inflation annuelle – ce qui permet de mieux apprécier la proposition de la Commission, les montants proposés s’élèvent à 1 165 milliards pour le cadre financier au sens strict, 1 197 milliards pour le cadre financier au sens large (périmètre élargi aux grands projets et aux instruments spéciaux) et à 1 231 milliards si l’on inclut également le FED.

Le tableau suivant retrace le détail de la proposition de la Commission, en euros constants et en euros courants.

CADRE FINANCIER PLURIANNUEL POUR 2014-2020

EXPRIME EN EUROS CONSTANTS ET EN EUROS COURANTS

(PROPOSITION DU 6 JUILLET 2012)

(en engagements et en milliards d’euros)

Rubrique

Plafonds 2014-2020
en euros constants 2011

Plafonds 2014-2020
en euros courants

1. Croissance intelligente et inclusive

494,8

558,8

dont compétitivité

115,5

130,7

dont mécanisme pour l’interconnexion en Europe

40,2

45,7

dont cohésion sociale

339,0

382,4

2. Croissance durable : ressources naturelles

386,5

435

dont dépenses relatives au marché et paiements directs

283,1

318,6

dont développement rural

92

103,5

3. Sécurité et citoyenneté

18,8

21,2

4. Europe dans le monde

70

79

5. Administration

63,2

71,3

TOTAL Cadre financier pluriannuel

1033,2

1165,4

ITER

2,7

3

GMES

5,8

6,6

Réserve pour les crises dans le secteur agricole

3,5

3,9

Fonds européen d’ajustement à la mondialisation (FEM)

3

3,4

Fonds de solidarité de l’Union européenne (FSUE)

7

7,9

Réserve d’aide d’urgence (RAU)

2,5

2,8

Instrument de flexibilité

3,5

3,9

TOTAL Périmètre large

1061,2

1196,9

Fonds européen de développement (FED)

30,3

34,3

TOTAL Périmètre large + FED

1091,5

1231,2

Source : Commission européenne.

Une rapide comparaison avec l’actuel cadre financier montre une progression de l’enveloppe du cadre financier élargi de 53 milliards d’euros – soit plus de 5 %, pour atteindre 1 061 milliards d’euros. En euros courants, l’augmentation est de l’ordre de 17 %.

Le tableau suivant donne le détail de cette évolution.

EVOLUTION DU CADRE FINANCIER PLURIANNUEL

ENTRE 2007-2013 ET 2014-2020

(en engagements et en milliards d’euros)

Rubrique

Plafonds 2007-2013

Plafonds 2014-2020

Proposition de la Commission européenne

Montant

(en euros constants 2011)

Evolution par rapport à 2007-2013

(en %)

Montants (en euros courants)

Evolution par rapport à 2007-2013

(en %)

Croissance intelligente et inclusive

444

495

+ 11 %

559

+ 26 %

dont croissance et emploi

81

116

+ 43 %

131

+ 62 %

dont infrastructures (MIE)

8

40

+ 400 %

46

+ 475 %

dont cohésion

355

339

– 5 %

382

+ 8 %

Croissance durable

421

386

– 8 %

435

+ 3 %

dont aides directes

304

283

– 7 %

319

+ 5 %

dont développement rural

98

92

– 6 %

103

+ 5 %

Sécurité et citoyenneté

12

19

+ 58 %

21

+ 75 %

Action extérieure

57

70

+ 23 %

79

+ 39 %

Administration

57

63

+ 11 %

71

+ 25 %

TOTAL CADRE FINANCIER

991

1 033

+ 4 %

1 165

+ 18 %

ITER et GMES

2

9

+ 350 %

10

+ 400 %

Instruments spéciaux hors budget

14

19

+ 36 %

22

+ 57 %

TOTAL PERIMETRE LARGE

1 008

1.061

+ 5 %

1 197

+ 19 %

FED

23

30

+ 30 %

34

+ 48 %

TOTAL PERIMETRE + FED

1 031

1.092

+ 6% 

1 231

+ 19 %

Source : Ministère délégué chargé du Budget.

En crédits de paiement, la proposition de la Commission européenne, telle que révisée le 6 juillet 2012, s’élève à 988 milliards en euros constants (1 114 milliards en euros courants) selon le périmètre restreint retenu par la Commission ; 1 021 milliards en euros constants pour le périmètre élargi (1 151 milliards en euros courants). Par rapport à l’actuel cadre financier, pour lequel le plafond des crédits de paiement est fixé à 926 milliards d’euros, la progression est de plus de 25 %, et même de plus de 36 % par rapport à la prévision d’exécution (846 milliards d’euros).

Au total, selon la direction du Budget, la proposition de la Commission européenne aurait pour conséquence, à système de ressources inchangé, un ressaut du prélèvement sur recettes de l’ordre de 5 milliards d’euros par rapport au prélèvement inscrit dans le projet de loi de finances pour 2013 (19,6 milliards d’euros) pour 2013, pour atteindre 25 milliards d’euros en 2020.

Si les propositions de la Commission européenne en termes de ressources étaient adoptées, la contribution française moyenne s’élèverait à 22,4 milliards d’euros sur 2014-2020, ce qui représenterait une hausse de 4,6 milliards d’euros en moyenne sur la période par rapport à 2007-2013.

Le Parlement européen estime que, pour atteindre les objectifs déjà fixés pour l’Union, une progression par rapport aux plafonds de 2013 est absolument nécessaire. Il a souligné, dans sa résolution du 8 juin 2011, l’impératif d’une hausse d’au moins 5 % des ressources affectées au prochain cadre financier et fixé l’objectif de 1,11 % du RNB, mais n’a plus jamais évoqué de chiffre depuis.

Il a en revanche constamment répété que la proposition de la Commission ne suffirait pas à financer les priorités politiques actuelles liées à la stratégie européenne pour une croissance intelligente, durable et inclusive, les nouvelles missions confiées par le traité de Lisbonne à l’Union et les objectifs et engagements politiques fixés par le Conseil européen.

Il a en outre, à plusieurs reprises, mis en garde le Conseil devant la tentation de réduire le niveau des dépenses de l’Union par rapport à la proposition de la Commission et affirmé son opposition catégorique à « toute demande de réductions linéaires générales qui menaceraient la mise en œuvre et l’efficacité de toutes les politiques de l’Union ». Il a également mis en demeure le Conseil, au cas où ce dernier proposerait des réductions de plafonds, de préciser clairement quels priorités et projets politiques il convenait d’abandonner en conséquence.

L’exigence d’une progression des crédits d’au moins 5 % a été confirmée de manière très ferme par la présidente de la Commission spéciale sur les défis politiques et les ressources budgétaires pour une Union européenne durable après 2013, Mme Jutta Haug, lors du déplacement de la mission à Bruxelles.

La radicalisation des positions dont témoigne l’échec de la procédure de conciliation sur les projets de budget rectificatif pour 2012 et de budget pour 2013 semble d’ailleurs aller dans ce sens.

Pour autant, il convient de souligner que, M. Reimer Böge, chargé avec M. Ivailo Kalfin des négociations pour le Parlement sur le cadre financier pluriannuel, a, de son côté, laissé entrevoir la possibilité d’un accord sur la proposition de la Commission européenne, voire à un niveau de crédits inférieur, à condition que des avancées significatives soient faites sur les autres sujets du « paquet de négociation », en particulier en matière de flexibilité et de souplesse du budget. Il a notamment insisté sur la nécessité d’ouvrir la possibilité de reporter sur le budget de l’exercice suivant les marges inutilisées ainsi que les crédits dégagés et non mobilisés.

Au sein du Conseil, les divergences sont fortes entre les pays dits « amis de la politique de la cohésion » (quinze États parmi lesquels la Pologne, le Portugal, la Grèce, la Slovénie, la Hongrie, l’Estonie…) et les contributeurs nets, qui se présentent comme les « amis du mieux dépenser » (Allemagne, Royaume-Uni, Pays-Bas, Suède, Danemark, Autriche, Finlande). Des clivages apparaissent en outre au sein même de ces deux groupes.

Les tenants de la cohésion se sont, jusqu’à présent, montrés globalement partisans d’une enveloppe globale d’un niveau au moins équivalent à celui proposé par la Commission, soit 1 061 milliards d’euros selon le périmètre élargi, et refusent, en tout état de cause, que l’enveloppe en faveur de la cohésion soit remise en cause. Il semblerait toutefois qu’ils pourraient, au fil des négociations, se rapprocher de 1 000 milliards, voire 980 milliards d’euros.

Du côté des contributeurs nets, les positions des États s’établissent toutes en-dessous de 1 000 milliards d’euros. Certains, à l’instar du Royaume-Uni, de la Suède et des Pays-Bas se montrent très durs dans les discussions, tandis que d’autres, comme l’Allemagne, apparaissent davantage à la recherche d’un compromis.

Le Royaume-Uni défend ainsi de manière constante un gel en termes réels par rapport au budget pour 2011 – le Parlement britannique adoptant même une position plus dure le 31 octobre dernier. La ligne rouge britannique est la remise en cause de son chèque – certains étant tentés par un retour sur les concessions faites sur son rabais en 2005. Alors que son objectif premier est de minimiser sa contribution et, par conséquent de réduire les dépenses – une baisse de l’ordre de 200 milliards d’euros a été évoquée, la répartition entre les différentes rubriques n’étant qu’un objectif second, le Royaume-Uni brandit la menace d’un veto. Toutefois, il n’est pas exclu que, s’il obtenait l’assurance du maintien de son « chèque », le Royaume-Uni accepte un niveau de dépenses proche de celui défendu par l’Allemagne.

Celle-ci prône, depuis le début des négociations, le principe d’une limitation du budget à 1 % du RNB et propose un montant global de l’ordre de 960 milliards d’euros. Lors du déplacement de la mission à Bruxelles, la Représentation permanente de la République fédérale d’Allemagne auprès de l’Union européenne a très nettement indiqué que cette enveloppe incluait le Fonds européen de développement (FED). Cette position impliquerait ainsi une révision à la baisse de la proposition de la Commission européenne de 130 milliards d’euros. Toutefois, selon certains interlocuteurs de la mission, l’inclusion ou non du FED dans cette enveloppe pourrait représenter un volant de négociation.

Le Danemark, qui menace de son veto s’il n’obtient pas une réduction de sa contribution annuelle, défend également un plafonnement du cadre financier à 1 % du RNB, tout comme la Finlande et la République tchèque. Les Pays-Bas défendent une ligne plus dure, à mi-chemin entre le Royaume-Uni et l’Allemagne.

Le président de la République française a affirmé, à la veille du Conseil européen des 22 et 23 novembre, sa volonté « que le budget de l’Union européenne, tout en restant compatible avec la maîtrise de nos finances publiques, contribue à la croissance et à l’investissement par le financement des politiques communes, en premier lieu la PAC dont les crédits doivent être préservés, la politique de cohésion ainsi que par de nouveaux instruments consacrés à la recherche et à l’innovation, aux grands projets et aux infrastructures. » Jusqu’à présent, la France, contributeur net mais également ardent défenseur de la PAC, a privilégié une enveloppe globale de l’ordre de 960 milliards d’euros, n’incluant pas le FED.

La présidence chypriote a formulé, le 29 octobre 2012, une proposition visant à réduire d’au moins 53 milliards d’euros le scénario de la Commission européenne tout en laissant ouverte l’option d’une réduction supplémentaire des dépenses administratives, non concernées par les baisses à ce stade. L’enveloppe totale proposée s’élève ainsi à 1 008 milliards d’euros (1 038 milliards d’euros avec le FED), soit le montant de l’actuel cadre financier au sens large. Les diminutions touchent surtout les dépenses en faveur de la compétitivité (- 18 milliards d’euros, soit - 11 %), puis celles de cohésion (- 12 milliards d’euros, soit - 3,7 %) et, enfin, celles de la politique agricole commune (- 2,8 %).

À la suite du tollé général provoqué par cette proposition, les uns déplorant l’insuffisance de la baisse générale, les autres critiquant le ciblage même des réductions opérées, le président Van Rompuy, en collaboration étroite avec le président Barroso, a soumis aux États membres, le 13 novembre dernier, une nouvelle proposition qui réduit de 77 milliards d’euros le scénario de la Commission européenne pour le porter à environ 984 milliards.

PROPOSITION DE CADRE FINANCIER PLURIANNUEL POUR 2014-2020

FAITE PAR LE PRESIDENT VAN ROMPUY LE 13 NOVEMBRE 2012

Rubrique

Plafonds 2007-2013
(en euros 2011)

Proposition de la Commission européenne
(en euros 2011)

Evolution par rapport à 2007-2013
(en %)

Proposition
du président Van Rompuy

(en euros 2011)

Evolution par rapport à 2007-2013
(en %)

Proposition de la Commission européenne
(en euros courants)

Evolution par rapport à 2007-2013

Proposition
du président Van Rompuy
(en euros courants)

Evolution par rapport à 2007-2013
(en %)

Croissance intelligente et inclusive

446

504

+ 13 %

462

+ 4 %

568

+ 27 %

521

+ 17 %

dont croissance et emploi (incluant ITER et GMES)

83

125

+ 51 %

116

+ 40 %

141

+ 70 %

131

+ 58 %

dont infrastructures (MIE)

8

40

+ 400 %

36

+ 350 %

45

+ 464 %

41

+ 407 %

dont cohésion

355

339

– 5 %

309

– 13 %

382

+ 8 %

348

– 2 %

Croissance durable

421

390

– 7 %

364

– 14 %

440

+ 4 %

410

– 3 %

dont aides directes

304

283

– 7 %

270

– 11 %

319

+5 %

304

dont développement rural

98

92

– 6 %

84

– 14 %

104

+ 6 %

95

– 3 %

dont réserve pour crise agricole

4

3

5

3

Sécurité et citoyenneté

12

19

+ 58 %

18

+ 50 %

21

+ 78 %

20

+ 69 %

Action extérieure

59

72

+ 22 %

66

+ 12 %

81

+ 38 %

74

+ 26 %

dont réserve pour aide d’urgence

2

2

2

2

+ 13 %

2

Administration

57

63

+ 11 %

63

+ 11 %

71

+ 25 %

71

+ 25 %

TOTAL CADRE FINANCIER

995

1 048

+ 5 %

973

– 2 %

1 181

+ 19 %

1 097

+ 10 %

Instruments spéciaux hors budget (FSUE, FEM, flexibilité)

12

13

+ 8 %

11

– 8 %

15

+ 22 %

12

+ 3 %

TOTAL PERIMETRE LARGE

1 008

1 061

+ 5 %

984

– 2 %

1 196

+ 19 %

1 109

+ 10 %

FED

23

30

+ 30 %

27

+ 17 %

34

+ 47 %

30

+ 32 %

TOTAL PERIMETRE LARGE + FED

1 031

1 092

+ 6%

1 011

– 2 %

1 231

+ 19 %

1 140

+ 11 %

Source : Conseil européen.

Si cette proposition pourrait constituer un point d’équilibre pour les États membres, la répartition des coupes proposées est vivement contestée, notamment par la France.

Votre Rapporteure soutient la proposition de la Commission européenne, soit 1 061 milliards d’euros, car cette enveloppe correspond à une évaluation juste des besoins, comme les interlocuteurs rencontrés à la Commission européenne l’ont réaffirmé. Il convient en effet de donner au budget européen les moyens nécessaires pour lui permettre d’aider l’Europe à sortir de la crise en stimulant les investissements dans la croissance et l’emploi et en aidant les États à relever, de manière collective et concertée, les défis structurels, en particulier la perte de compétitivité et l’augmentation du chômage et de la pauvreté. La proposition de la Commission européenne permet ainsi de mettre l’accent sur la compétitivité et d’accroître fortement les moyens en faveur des grands projets d’infrastructures européens, tout en assurant un montant suffisant pour la cohésion et la politique agricole commune. Cela doit, bien entendu, s’accompagner du développement des ressources propres.

Votre Rapporteur est d’avis différent (cf. observations).

Avant d’aborder le détail du cadre financier pluriannuel, il convient de souligner que la Commission européenne suggère, dans un souci de flexibilité et de clarté, quelques modifications de maquette budgétaire et de ventilation des crédits, qui vont moins loin que ne le suggérait le Parlement européen qui proposait de diviser le budget en trois rubriques : la première intitulée « Europe 2020 » regroupant les relatives aux anciennes rubriques 1, 2 et 3, la deuxième dénommée « L’Europe en tant qu’acteur mondial » et la troisième comprenant les dépenses administratives.

La Commission européenne se contente de mettre fin à la distinction en sous-rubriques et veille à ce que les objectifs de la stratégie Europe 2020 soient pris en compte. Elle opère par ailleurs plusieurs transferts entre rubriques, notamment le rattachement du programme européen aux plus démunis à la rubrique 1 et celui des crédits de sécurité alimentaire à la rubrique 3.

La répartition des crédits pour l’ensemble du cadre financier 2014-2020 comparée à la ventilation pour 2007-2013 montre que la rubrique « Croissance durable : ressources naturelles », qui porte la politique agricole commune, demeurerait le premier poste budgétaire, bien que connaissant la plus forte baisse relative, puisqu’elle passerait de 42 à 37 % du total. Viendrait ensuite la politique de cohésion, qui verrait sa part dans le total diminuer de 36 % aujourd’hui à un peu plus de 32 %. La politique de croissance et de compétitivité, incluant les infrastructures et grands projets, enregistrerait en revanche la progression la plus importante, représentant près de 16 % du total en 2014-2020, contre 9 % actuellement. Cette hausse s’explique notamment par la mobilisation des moyens en faveur du mécanisme pour l’interconnexion en Europe. La part des crédits destinés à la politique extérieure augmenterait légèrement de 5,7 à 6,7 %, de même que celle des dépenses administratives, qui passeraient de 5,7 à 6 %. Davantage de moyens seraient enfin mobilisés pour la rubrique « Sécurité et citoyenneté », dont la part dans le budget total progresserait légèrement de 1,2 à 1,8 %.

L’évolution de la répartition des plafonds entre les deux cadres financiers est retracée dans les graphiques ci-après.

Les dépenses en faveur de la « Croissance intelligente et inclusive » – tenant compte d’ITER et de GMES – seraient plafonnées à 504 milliards en euros constants, 569 milliards en euros courants, contre 446 milliards dans le cadre financier actuel. Même en neutralisant les transferts opérés entre rubriques, les progressions seraient ainsi supérieures à 12 % en euros constants et 25 % en euros courants.

A la fin de la période du cadre financier, les plafonds de la rubrique 1 atteindraient le seuil emblématique de 50 % du budget, contre 46 % en 2014.

De son côté, le président Van Rompuy a soumis aux États membres une proposition de plafonnement des dépenses sur ce même périmètre à hauteur de 462 milliards en euros constants, 521 milliards en euros courants, soit des progressions de l’ordre de, respectivement, 3,5 % et 16 %. Il est toutefois à craindre qu’une telle proposition ne permette pas d’atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020, ni de répondre aux ambitions en matière de soutien à la croissance et à l’emploi annoncées lors du Conseil européen des 28 et 29 juin 2012.

Le Parlement européen a d’ailleurs souligné, dans sa résolution du 23 octobre 2012, que « l’un des objectifs premiers de la stratégie Europe 2020 (…) ne sera atteint que si les investissements nécessaires dans l’éducation, en faveur d’une société de la connaissance, ainsi que dans la recherche et l’innovation, les PME et les technologies nouvelles et vertes, tout en favorisant l’inclusion sociale, ont lieu dès maintenant sans atermoiement ».

Deux grandes priorités sont identifiées au sein de cette rubrique : la stratégie en faveur de la croissance et la compétitivité, qui inclut les grands projets et infrastructures, et la politique de cohésion.

Dans la logique de la stratégie Europe 2020, la Commission européenne propose une forte augmentation des moyens destinés au soutien de la croissance et de l’emploi (incluant GMES et ITER), supérieure à 80 %, pour les porter à 165 milliards d’euros. En euros courants, l’enveloppe serait plus que doublée, pour atteindre 186 milliards.

Elle représenterait ainsi 16 % du budget sur 2014-2020, contre 9 % sur 2007-2013 et suivrait une progression continue tout au long du cadre financier, passant de 14 % du budget en 2014 à près de 28 % en 2020.

C’est justifié. Il s’agit ainsi, notamment, de promouvoir la hausse des investissements dans la recherche et le développement dans l’Union européenne, afin d’atteindre l’objectif d’y consacrer 3 % du PIB d’ici à 2020. Les moyens consacrés à la recherche et à l’innovation progresseraient ainsi de 20 milliards d’euros. L’accent est également mis sur les réseaux de transport, avec une dotation de 40 milliards d’euros pour le mécanisme pour l’interconnexion en Europe (+ 32 milliards d’euros), qui recevrait en outre 10 milliards d’euros du Fonds de cohésion.

Le scénario soumis par le président Van Rompuy aux États membres – parmi lesquels l’Allemagne et le Royaume-Uni, mais également la France, défendent les dépenses de croissance mais à des niveaux inférieurs à ceux proposés par la Commission européenne – revient à limiter les moyens en faveur des politiques de croissance et de compétitivité à 153 milliards d’euros, dont 36 milliards pour le mécanisme pour l’interconnexion en Europe (toujours complétés par 10 milliards du Fonds de cohésion). Ce n’est ni cohérent avec les objectifs affichés dans la stratégie Europe 2020 et le Pacte pour la croissance et l’emploi, ni suffisant au regard des besoins de soutien à la croissance et à la compétitivité en Europe, alors que la croissance intelligente et inclusive correspond à un domaine dans lequel l’action de l’Union apporte une forte valeur ajoutée.

Dans un souci de plus grande efficacité, la Commission suggère de fusionner, au sein d’un cadre stratégique commun pour la recherche et l’innovation, les dépenses du programme-cadre pour la recherche et le développement (PCRD) avec celles inscrites dans la partie innovation du programme pour la compétitivité et l’innovation (PIC) et celles de l’Institut européen d’innovation et de technologie. Intitulé « Horizon 2020 », ce cadre stratégique devrait bénéficier d’une dotation en forte progression. Une enveloppe de 80 milliards d’euros (90 milliards en euros courants) lui serait en effet réservée, contre un peu moins de 60 milliards dans les deux programmes actuels.

Ce financement devrait en outre être complété par un important soutien à la recherche et à l’innovation provenant des fonds structurels, d’un niveau au moins équivalent à celui de la période actuelle (60 milliards d’euros), ainsi que par un recours accru aux instruments financiers novateurs – deux tiers du budget du cadre stratégique devraient ainsi pouvoir être mis en œuvre par des intervenants extérieurs, comme la Banque européenne d’investissement, contre la moitié aujourd’hui.

Dans un double objectif de clarté et d’efficacité, le cadre stratégique commun établira les objectifs stratégiques de toutes les actions de financement de la recherche et de l’innovation dans l’Union. Il sera simplifié par rapport aux programmes de financement actuels et mis en œuvre selon des règles et procédures harmonisées. Ainsi, la cohérence des activités de recherche et d’innovation devrait être renforcée et l’impact des financements de l’Union amélioré. Il s’agit également d’atteindre une masse critique de ressources, garantissant ainsi la valeur ajoutée des interventions de l’Union.

Trois blocs seront identifiés au sein du cadre stratégique :

– « l’excellence dans la base scientifique », qui a pour objet de favoriser le développement des talents et d’attirer les meilleurs chercheurs, grâce, notamment, à un soutien renforcé à la recherche exploratoire, à la formation et à l’évolution des carrières (actions Marie Curie) et à la mise en réseau des infrastructures de recherche prioritaire ;

– « relever les défis de société », en soutenant toutes les activités de la recherche à la mise sur le marché, grâce à des actions menées sur le terrain de l’innovation, des approches interdisciplinaires et des activités de recherche dans le domaine socioéconomique et les sciences humaines. La priorité sera donnée à la santé, l’évolution démographique et le bien-être, la sécurité alimentaire, les énergies sûres et propres, les transports intelligents, verts et intégrés, l’approvisionnement en matières premières, l’utilisation efficace des ressources et la lutte contre le changement climatique. L’Institut européen d’innovation et de technologie devrait ainsi bénéficier de moyens accrus ;

– « développer une prépondérance industrielle et des cadres compétitifs », afin de stimuler les investissements du secteur privé dans le domaine de la recherche et du développement et résoudre les problèmes spécifiques des PME. Un soutien particulier sera apporté aux technologies de l’information et de la communication, à la nanotechnologie, aux matériaux avancés, aux systèmes de fabrication avancés, à la biotechnologie industrielle, au secteur spatial, aux technologies à faible intensité de carbone et, enfin, aux technologies d’adaptation. Des mesures spécifiques encourageront par ailleurs l’innovation dans les PME dotées d’un fort potentiel de croissance.

Le soutien à la compétitivité de l’industrie et aux PME est l’une des priorités de la stratégie Europe 2020. Favoriser le développement des PME est en effet un enjeu clé, dans la mesure où ces dernières, qui représentent plus de 67 % des emplois du secteur privé et plus de 58 % du chiffre d’affaires total de l’Union, constituent une source importante de croissance et d’emplois.

Dans ce cadre, le budget européen doit intervenir de manière ciblée, afin de faciliter l’accès des PME au financement et de garantir qu’elles peuvent tirer pleinement profit des possibilités offertes par le marché unique européen. Le budget européen serait abondé à hauteur de 2,2 milliards d’euros au titre du programme pour la compétitivité et les PME, contre 1,3 milliard actuellement. Il devrait ainsi favoriser l’accès aux financements sous forme de fonds propres ou d’emprunts, à l’aide d’instruments financiers novateurs, et soutenir des activités destinées à promouvoir le développement des PME au niveau européen.

Les instruments prévus dans le programme pour la compétitivité et les PME incluraient :

– des mécanismes de collecte de fonds propres destiné aux investissements en phase de croissance, qui fourniraient aux PME un financement par prise de participation remboursable à vocation commerciale, principalement sous la forme de capital-risque, via des intermédiaires financiers ;

– un mécanisme de prêt, qui proposerait des services de partage des risques directs ou avec des intermédiaires financiers pour couvrir les prêts destinés aux PME. Ce mécanisme devrait avoir un effet de levier important et ouvrir la voie aux prêts transfrontaliers ou multi-pays, qui sont difficilement accessibles par l’intermédiaire des instruments nationaux.

15,3 milliards d’euros sont prévus pour le programme « Europe éducation », qui regroupe les programmes « Éducation et formation tout au long de la vie », les programmes internationaux dans le domaine de l’enseignement supérieur, comme Erasmus Mundus, et « Jeunesse en action ». Un volet spécifique sera consacré au sport, domaine dans lequel le traité de Lisbonne prévoit de nouvelles compétences pour l’Union.

La forte progression des crédits consacrés au programme « Europe éducation », reflet de la priorité qui doit être accordée aux investissements dans le capital humain et dans la modernisation des systèmes d’éducation et de formation, devrait s’accompagner d’une plus grande efficacité dans la mise en œuvre des programmes, en particulier grâce aux synergies permises par leur regroupement.

La Commission européenne propose de continuer à assurer le financement du projet de Galileo au sein du budget européen, en le dotant de 7 milliards d’euros – contre 3 milliards actuellement.

En revanche, elle en exclut les projets ITER (réacteur thermonucléaire expérimental) et GMES (surveillance spatiale pour l’environnement et la sécurité) – pour lesquels elle prévoit 8,5 milliards d’euros – au motif que « leur dimension importante, les défis technologiques qu’ils impliquent et le fait qu’ils ne concernent pas seulement les acteurs de l’Union européenne seraient une source d’incertitude pour le budget de l’Union ».

Cette présentation n’est pas recevable : il s’agit de politiques communautaires, qui ont, en outre, toujours été financées sous plafond du cadre financier. La Commission opère, en réalité, à bon compte deux débudgétisations. Vos Rapporteurs contestent cet artifice budgétaire et rappellent leur attachement au principe d’unité budgétaire en vertu duquel le financement de ces projets doit être assuré par le budget général.

L’une des grandes novations proposées par la Commission européenne est le « mécanisme pour l’interconnexion en Europe » (MIE), destiné à soutenir l’investissement en faveur des interconnexions de transport, d’énergie et de technologie numérique sur le territoire européen.

Alors que les besoins de financement pour l’aménagement des infrastructures sont estimés par la Commission européenne à 200 milliards pour le secteur de l’énergie, 1 500 milliards pour les transports et 180 à 270 milliards pour la généralisation du haut débit rapide d’ici à 2020, il s’agit ainsi de créer un environnement favorable aux investissements privés.

C’est, à n’en pas douter, un projet phare pour 2014-2020. Il va « doper » la compétitivité en Europe à moyen et long termes dans un contexte économique difficile, répondre à l’attente forte des populations, contribuer à l’achèvement du marché unique et participer à l’atteinte des objectifs de l’Union en matière de croissance durable, tels qu’exposés dans la stratégie Europe 2020, et de l’objectif « 20-20-20 » fixé dans le domaine de la politique énergétique et climatique.

Doté de 40 milliards d’euros (45,5 milliards en euros courants), l’instrument destiné aux infrastructures serait complété à hauteur de 10 milliards (11 milliards en euros courants) grâce à la mobilisation de moyens prévus pour les investissements connexes dans les infrastructures de transport au sein du Fonds de cohésion. Une part, non encore chiffrée, des crédits du Fonds européen de développement régional devrait également être destinée au financement d’infrastructures. Ainsi, au moins 50 milliards d’euros seraient mobilisés au titre du mécanisme pour l’interconnexion en Europe, contre 8 milliards actuellement.

Des taux de cofinancement différents seraient appliqués en fonction du secteur, de la situation géographique et de la nature des projets, avec comme objectif d’optimiser les effets de levier et les modalités de mise en œuvre des projets.

La répartition des financements européens serait la suivante.

MECANISME POUR L’INTERCONNEXION EN EUROPE

(en millions d’euros – euros constants 2011)

Mécanisme pour l’interconnexion en Europe

40 000

Énergie

9 121

Technologies de l’information et de la communication

9 185

Transports

21 694

Montant affecté aux infrastructures de transport dans le Fonds de cohésion

10 000

TOTAL

50 000

Source : Commission européenne.

A l’appui de sa proposition, la Commission européenne a élaboré une liste préliminaire de projets susceptibles de bénéficier d’un financement dans le cadre de ce nouvel instrument.

Pourraient ainsi être concernés les projets français suivants :

– pour les transports : les lignes ferroviaires Perpignan-Montpellier et Lyon-Turin (corridor méditerranéen), Bayonne-Bordeaux (corridor Atlantique), les lignes à grande vitesse Paris-Le Havre, Paris-Strasbourg et la liaison ferroviaire Strasbourg-Kehl (corridor Seine-Danube), la ligne à grande vitesse Provence-Côte d’Azur, le doublement de la ligne à grande vitesse Paris-Lyon, le canal Seine-Escaut (corridor Dublin-Londres-Paris-Bruxelles), la voie de navigation intérieure Dunkerque-Lille ainsi que le canal Saône-Moselle et les transports multi-modaux entre Strasbourg, Mulhouse et Bâle (corridor Anvers-Lyon-Bâle) ;

– pour les corridors énergétiques : le réseau d’électricité en mer dans les mers septentrionales et les interconnexions électriques dans le sud-ouest de l’Europe entre les États membres et les pays tiers ainsi que le corridor gazier méridional et le corridor gazier nord-sud en Europe occidentale.

Les projets en matière de haut débit et de corridors européens d’infrastructures de services numériques viseraient notamment à déployer le haut débit rapide et très rapide, permettre l’accès aux ressources numériques du patrimoine européen (Europeana), développer l’identification et l’authentification électroniques sécurisées et interopérables dans toute l’Europe, favoriser l’interconnexion des capacités en matière de passation de marchés en ligne dans l’ensemble du marché unique, mettre en place des procédures électroniques permettant la création d’une entreprise dans un autre pays européen, favoriser les échanges de dossiers médicaux et soutenir le développement de services de télémédecine, favoriser l’accès aux données publiques et mieux protéger les enfants des dangers que peut présenter l’Internet.

Les modalités de mise en œuvre envisagées reflètent la volonté de la Commission européenne d’une centralisation de la gestion des projets, y compris de ceux relevant actuellement de la politique de cohésion. L’instrument d’interconnexion serait en effet géré par la Commission elle-même, avec l’appui d’une agence exécutive et d’intermédiaires financiers.

En complément des moyens publics, des modes de financement innovants seront mobilisés, à l’instar du mécanisme mis en place dans le cadre de la phase pilote relative aux « project bonds », qui consistent en des émissions privées d’emprunts obligataires bénéficiant notamment de la garantie de la Commission européenne et de la Banque européenne d’investissement.

Selon M. Philippe de Fontaine-Vive, vice-président de la Banque européenne d’investissement auditionné par votre Commission le 7 novembre 2012, l’effet multiplicateur permis par ce dispositif devrait être fortement acccru : alors qu’il est de 1 à 3 dans le cas des prêts, il pourrait atteindre 1 à 18 dans le cas des « project bonds ».

LA PHASE PILOTE DES « PROJECT BONDS »

Le lancement d’une phase pilote de financement de projets par émissions d’obligations, connue sous le nom de « project bonds initiative », a été confirmé par le Conseil européen le 29 juin 2012 dans le pacte pour la croissance et l’emploi.

Il s’agit d’obligations émises par un porteur de projet et qui sont souscrites par des investisseurs institutionnels, du fait qu’elles bénéficient d’un rehaussement de crédit, une garantie fournie conjointement par la Banque européenne d’investissement et la Commission européenne.

L’objectif est d’attirer des investisseurs institutionnels, tels que les compagnies d’assurance ou les fonds de pension, pour qu’ils affectent une partie de leurs ressources à long terme au financement de grands projets d’infrastructures européens, dans le secteur des transports, de l’énergie et des réseaux à haut débit.

Cette phase pilote repose sur la mobilisation de 230 millions d’euros au sein du budget européen, dont 100 millions en 2012 et 130 millions en 2013, issus des programmes suivants : 200 millions d’euros du budget du réseau transeuropéen de transport, 20 millions d’euros du programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (PIC) et 10 millions d’euros du budget du réseau transeuropéen de l’énergie.

Le montant total devrait être complété par un financement apporté, à hauteur de 700 millions d’euros, par la Banque européenne d’investissement (BEI), qui pourrait, à son tour, attirer jusqu’à 3,5 milliards d’euros en émissions d’obligations. Au total, près de 4,5 milliards d’euros pourraient ainsi être mobilisés.

Selon M. Philippe de Fontaine-Vive, vice-président de la BEI, une dizaine de projets, d’un montant maximal de 200 millions d’euros chacun, devraient ainsi pouvoir être soutenus pour l’ensemble de l’Union européenne. Ils interviendront principalement dans le secteur des transports. Concernant plus particulièrement la France, deux projets autoroutiers sont en cours d’instruction ainsi que deux initiatives régionales de déploiement de réseaux à haut débit dans le Limousin et en Auvergne.

Le président de la Banque européenne d’investissement M. Werner Hoyer a justifié la sélectivité ainsi opérée : « comme il nous faut toucher un nouveau groupe d’investisseurs, la qualité de nos projets doit être exceptionnelle. Nous ne pouvons nous permettre un échec ».

En cas de succès, l’initiative d’emprunts obligataires ferait partie de la palette des instruments financiers innovants envisagés pour le mécanisme pour l’interconnexion en Europe.

Vos Rapporteurs soutiennent pleinement cette diversification des modes de financement, qui apparaissent comme mieux à même de permettre la réalisation de grands projets d’infrastructures européens. Ils appellent l’attention des responsables européens sur l’impératif de réussite de la phase pilote et, surtout, d’un accord sur le cadre financier pluriannuel, faute de quoi, la mise en œuvre de grands projets ne pourra être lancée.

La Commission européenne propose de doter la politique de cohésion de 339 milliards en euros constants, soit 382 milliards en euros courants, contre 355 milliards dans le cadre financier actuel. Ainsi, alors que l’évolution est à la baisse (de l’ordre de – 5 %) en euros constants, elle serait à la hausse en euros courants (+ 7 % environ). Cette analyse doit toutefois être mise en perspective : certes, la dotation tient compte de l’adhésion de la Croatie, mais le cadre financier 2007-2013 était marqué par l’entrée de douze nouveaux États, pour la plupart d’Europe de l’Est, avec des niveaux de développement économique nettement inférieurs et le rapprochement des niveaux de vie des régions européennes est désormais bien engagé.

Au cours du cadre financier 2014-2020, la politique de cohésion verrait ses moyens croître régulièrement, puisqu’ils passeraient de 46,6 milliards en 2014 à près de 50 milliards en 2020.

La cohésion demeurerait le deuxième poste de dépenses du budget communautaire, mais ses crédits se rapprocheraient fortement des dotations prévues pour la politique agricole commune, qui passeraient de 56,3 milliards d’euros en 2014 à 50,7 milliards en 20209.

En complément de l’enveloppe prévue dans le cadre financier, 3 milliards d’euros pourraient être mobilisés dans le cadre du Fonds européen d’ajustement à la mondialisation et 7 milliards grâce au Fonds de solidarité de l’Union européenne. Si la dotation du FSUE est consolidée à hauteur d’1 milliard d’euros par an maximum, celle du FEM passe de 500 millions d’euros par an actuellement à 429 millions, compte tenu de l’usage qui en a été fait pendant le cadre financier 2007-2013.

La Commission européenne propose par ailleurs de revoir profondément la politique de cohésion, en se fondant sur le constat que cette politique a certes fortement contribué à améliorer le niveau de vie de tous les citoyens de l’Union, mais a également souffert d’une définition insuffisante de ses priorités, d’une certaine dispersion et de difficultés d’absorption des fonds10.

Sur la base de ces suggestions, les discussions au Conseil ont fait apparaître une fracture très nette entre les États « amis de la cohésion », emmenés par la Pologne dans un combat pour une dotation, au minimum, égale à celle proposée par la Commission européenne, et les contributeurs nets « amis du mieux dépenser » et partisans d’efforts supplémentaires sur le budget de la cohésion. Le président Van Rompuy a ainsi élaboré un scénario prévoyant 309,5 milliards d’euros pour la politique de cohésion, la diminution de 30 milliards d’euros concernant à titre principal les régions les plus favorisées et les régions en transition. Il a par ailleurs proposé d’abaisser l’enveloppe du Fonds européen d’ajustement à la mondialisation à 1,85 milliard d’euros et celle du Fonds de solidarité de l’Union européenne à 5,25 milliards d’euros.

Pour sa part, le Parlement européen avait indiqué, dès sa résolution du 8 juin 2011, que les montants consacrés à la politique de cohésion dans la programmation financière actuelle devaient « à tout le moins être maintenus ».

Les principales évolutions de la politique de cohésion, qui sont négociées lors des discussions sur le cadre financier 2014-2020, sont les suivantes.

La Commission européenne propose de créer une nouvelle catégorie de régions : celle des régions en transition, qui regrouperait les régions dont le PIB par habitant est compris entre 75 % et 90 % de la moyenne communautaire. Elle concernerait :

– les régions qui sortent de l’objectif de convergence. Ces régions conserveraient, comme « filet de sécurité », les deux tiers de leur dotation 2007-2013. L’objectif est de limiter la baisse des aides en principe appliquée si elles relevaient immédiatement de l’objectif de compétitivité. Seraient notamment concernés les Länder de l’ex Allemagne de l’Est et plusieurs régions en Grèce. La proposition du président Van Rompuy vise à ramener ce filet de sécurité à 57 %, soit un niveau plus bas que celui défendu par l’Allemagne (63 %) ;

– les régions qui, bien que actuellement non éligibles au titre de l’objectif de convergence, affichent un PIB par habitant compris entre 75 % et 90 % de la moyenne de l’Union à 27. Elles bénéficieraient d’une aide dégressive en fonction de leur richesse relative.

Selon les informations obtenues auprès du conseiller du président de la République pour les affaires européennes, Philippe Léglise-Costa, la France compterait dix régions en transition : l’Auvergne, la Picardie, le Limousin, la Lorraine, la Basse-Normandie, le Nord-Pas-de-Calais, la Franche-Comté, Poitou-Charentes, le Languedoc-Roussillon et la Corse.

Vos Rapporteurs soutiennent la création de la catégorie des régions en transition. Ils se félicitent que cette proposition reçoive le soutien du Parlement européen et soit confirmée dans la proposition du président Van Rompuy.

Tout d’abord, la répartition des 339 milliards d’euros destinés à la politique de cohésion privilégierait les régions les plus pauvres avec :

– 164 milliards pour les régions relevant de l’objectif de convergence ;

– 36 milliards pour les régions en transition ;

– 55 milliards pour les régions relevant de l’objectif de compétitivité ;

– 12 milliards pour la coopération territoriale ;

– 71 milliards pour le Fonds de cohésion ;

– 900 millions d’euros comme dotation supplémentaire pour les régions ultrapériphériques et septentrionales.

La proposition du président Van Rompuy à 309,5 milliards d’euros s’emploie à faire porter la charge de l’ajustement en priorité sur les régions en transition et les plus développées, avec :

– 156 milliards pour les régions relevant de l’objectif de convergence ;

– 29 milliards pour les régions en transition ;

– 48 milliards pour les régions relevant de l’objectif de compétitivité ;

– 10 milliards pour la coopération territoriale ;

– 66 milliards pour le Fonds de cohésion ;

– 900 millions d’euros comme dotation supplémentaire pour les régions ultrapériphériques et septentrionales.

Afin d’accroître l’efficacité des dépenses de cohésion, les interventions seraient par ailleurs concentrées sur un nombre limité d’objectifs définis dans la stratégie Europe 2020, conformément aux souhaits exprimés par le Parlement européen.

Les régions en transition et celles relevant de l’objectif de compétitivité devraient ainsi consacrer la totalité de leur dotation en faveur de la cohésion (à l’exception de la dotation FSE) à l’efficacité énergétique et aux énergies renouvelables, ainsi qu’à la compétitivité des PME et à l’innovation. Dans ces régions, les investissements dans l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables devraient s’élever à 20 % au moins. Les régions relevant de l’objectif de convergence pourraient consacrer leurs interventions à un champ plus large de priorités, compte tenu de leurs besoins.

Une attention accrue devrait par ailleurs être accordée au Fonds social européen (FSE), en raison du rôle essentiel qu’il est amené à jouer en matière de cohésion économique et sociale en soutenant la promotion de l’emploi, l’investissement dans les compétences, l’éducation et l’apprentissage tout au long de la vie, l’inclusion sociale et la lutte contre la pauvreté. Ainsi, une part minimale devrait être prélevée sur les fonds structurels en faveur du FSE pour chaque catégorie de régions :

– 25 % pour les régions relevant de l’objectif de convergence ;

– 40 % pour les régions en transition ;

– 52 % pour les régions relevant de l’objectif de compétitivité.

Au total, le FSE devrait représenter au moins 25 % du budget alloué à la politique de cohésion, soit 85 milliards d’euros environ, ce dont se félicitent vos Rapporteurs.

En revanche, vos Rapporteurs sont inquiets de l’évolution de l’enveloppe destinée à l’aide alimentaire en faveur des plus démunis. En application de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 12 avril 2011, République fédérale d’Allemagne contre Commission européenne, la Commission européenne propose en effet que l’aide alimentaire aux plus démunis figure désormais dans la rubrique 1, au sein du Fonds social européen. Mais c’est une enveloppe de 2,5 milliards d’euros qui est prévue pour 2014-2020, réduite à 2,1 milliards dans le scénario du président Van Rompuy, alors que le montant du programme européen d’aide aux plus démunis est actuellement de 500 millions d’euros par an. Compte tenu du contexte actuel particulièrement difficile, la réduction des moyens destinés aux plus démunis n’est pas recevable.

La Commission européenne propose tout d’abord de conclure avec chaque État membre un contrat de partenariat, qui préciserait l’engagement des partenaires nationaux et régionaux de consacrer les fonds alloués à la mise en œuvre de la stratégie Europe 2020 et définirait un cadre de performance qui permettrait de juger de l’état d’avancement des engagements. Les contrats reposeraient ainsi sur des objectifs et des indicateurs précis, dont il serait rendu compte par les États dans leur rapport annuel sur la politique de cohésion.

La Commission européenne suggère également de renforcer la conditionnalité des fonds, afin d’améliorer la gestion des programmes mis en place. La conditionnalité prendrait la forme, d’une part, de conditions ex ante qui devraient être remplies avant le versement des fonds et, d’autre part, de conditions ex post, relatives aux performances, dont dépendrait le versement de tranches supplémentaires.

Une place particulière serait accordée à la « conditionnalité macro-économique » qui vise à ce que l’efficacité des dépenses ne soit pas compromise par des politiques macro-budgétaires contraires aux engagements pris par les États dans le cadre des procédures de surveillance budgétaire et économique.

Une telle procédure n’est pas nouvelle : elle existe déjà pour le Fonds de cohésion. Elle a ainsi été mise en œuvre pour la Hongrie cette année. Au printemps 2012, les ministres des finances de l’Union ont en effet gelé 30 % des 1,7 milliard d’euros de fonds de cohésion auxquels la Hongrie est éligible en 2013, compte tenu de l’insuffisance des efforts de redressement des finances publiques menés. Ce gel a été levé en juin, le Conseil jugeant que les économies prévues devaient permettre de ramener le déficit à 2,5 % du PIB.

Elle serait toutefois étendue à l’ensemble des fonds et sa mise en œuvre reposerait sur une plus grande automaticité, même si la suspension des fonds ne serait décidée qu’en dernier recours, pour sanctionner l’échec d’actions correctives11. Toute décision de suspension devrait néanmoins être « proportionnée et efficace » au regard de la situation économique et sociale de l’État membre concerné. Le président Van Rompuy, dans sa proposition du 13 novembre 2012, souligne que la procédure doit concerner en priorité les engagements, la suspension des paiements ne devant être envisagée que dans les cas les plus graves ou urgents. Il soumet par ailleurs la suspension des engagements à la « méthode du double plafonnement », qui prévoit des plafonnements différenciés et progressifs prenant pour référence les fonds relevant du cadre stratégique commun et le PIB de l’État concerné.

Le dispositif de conditionnalité macro-économique proposé par la Commission fait l’objet d’un refus catégorique du Parlement européen et du Comité des régions. Le président de l’Association des régions de France, Alain Rousselet, a ainsi indiqué à vos Rapporteurs sa vive opposition à ce mécanisme qui aboutirait à « pénaliser des régions à cause d’une mauvaise gestion de l’État ».

Votre Rapporteure est fermement opposée au principe même de cette « conditionnalité », qui présente le risque d’aboutir à un accroissement des déséquilibres macro-économiques dans l’Union, alors que l’objet même de la politique de cohésion est de les réduire. Surtout, il n’est pas justifié de suspendre des paiements destinés aux structures régionales au motif que l’autorité nationale ne remplit pas ses obligations et présente une dette publique, un déficit ou un déséquilibre économique excessifs.

Votre Rapporteur est d’avis différent (cf. observations).

Par ailleurs, la Commission européenne propose de constituer une « réserve de performance », afin de mettre davantage l’accent sur les résultats et la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020. 5 % du budget de cohésion seraient ainsi gelés en début de cadre financier puis distribués, à l’issue d’un examen à mi-parcours du cadre financier, aux États membres et aux régions dont les programmes auraient atteint leurs objectifs. Ce mécanisme existe déjà, mais il est de moindre ampleur (3 %) et simplement facultatif au niveau national. En tout état de cause, l’efficacité du nouveau dispositif dépendra du choix des indicateurs et du niveau d’exigence qui sera requis auprès de chaque État pour définir les objectifs à atteindre.

Des mesures sont également avancées pour mieux tenir compte des capacités d’absorption des fonds, mais également des situations budgétaires nationales.

Il s’agit tout d’abord de la réforme du mécanisme d’écrêtement des transferts financiers entre l’Union et les États membres. Sur une assiette limitée aux fonds structurels et au Fonds de cohésion, le taux plafond s’élèverait à 2,5 % du PIB des États, contre un taux variable (situé entre 3,23 et 3,78 %) et dégressif en fonction du PIB des États membres aujourd’hui. Le principe même de l’abaissement de ce plafonnement est parfaitement justifié par le rattrapage opéré par les nouveaux États membres et l’augmentation corrélative de leur PIB, d’autant plus que certains d’entre eux peinent actuellement à consommer les fonds qui leur sont alloués. Il s’agit ainsi de limiter les ressauts d’enveloppe que connaîtraient notamment la Pologne (+ 20 milliards d’euros), mais aussi la Roumanie. Alors que la proposition chypriote avait ramené le taux à 2,36 %, le président Van Rompuy suggère 2,4 %, sous la pression de la Pologne. L’Allemagne et la France défendent des niveaux inférieurs – plus proches de 2 % – qui apparaissent davantage justifiés à vos Rapporteurs.

Ce mécanisme d’écrêtement serait utilement complété par le dispositif de « filet de sécurité inversé », qui a pour objet de plafonner le ressaut des enveloppes nationales de cohésion entre les deux cadres financiers et d’éviter, ainsi, des situations paradoxales où les États membres qui ont connu une croissance positive durant la période recevraient davantage de crédits au titre de la prochaine programmation. Ce dispositif, ardemment défendu par les contributeurs nets, est inscrit dans la proposition du président Van Rompuy.

Vient ensuite, parmi les mesures destinées à faciliter l’absorption des fonds, la possibilité d’un relèvement temporaire du taux de cofinancement de 5 à 10 points pour les pays les plus touchés par la crise, c’est-à-dire ceux qui bénéficient d’une assistance financière au titre du mécanisme européen de stabilité (pour les membres de la zone euro) ou au titre du mécanisme de soutien à la balance des paiements (hors zone euro). Cela permettrait de limiter l’effort pesant sur les budgets nationaux en période d’assainissement budgétaire et de remédier aux situations rencontrées en Grèce et en Espagne.

Enfin, des conditions relatives à l’amélioration des capacités administratives seraient fixées dans les contrats de partenariat.

Les taux de cofinancement seraient différenciés selon le niveau de richesse des régions. Un taux de cofinancement distinct et croissant (50, 60 ou 80 %) serait respectivement prévu pour les régions les plus développées, les régions en transition et les régions les moins développées. Les régions ultrapériphériques, le Fonds de cohésion et les régions les moins développées des États les plus pauvres bénéficieraient d’un taux différent, de 85 %. Enfin, un cinquième taux (75 %) concernerait les régions sortant de la convergence ou les programmes relevant de l’objectif de coopération territoriale.

Dans sa proposition du 13 novembre 2012, le président Van Rompuy durcit globalement le dispositif. Il réduit le nombre de taux à trois, selon une typologie assez proche de celle proposée par la Commission européenne :

– 75 % pour les régions ultrapériphériques, le Fonds de cohésion et les régions les moins développées des États les plus pauvres (contre 85 % dans la proposition de la Commission européenne) ainsi pour les autres régions les moins développées et les programmes relevant de l’objectif de coopération territoriale ;

– 60 % pour les régions en transition ;

– 50 % pour les régions les plus développées.

Regroupant l’ensemble des dépenses relatives à la gestion des marchés agricoles (aides directes et mesures de soutien de marché), au développement rural, au secteur de la pêche et à l’environnement, la rubrique 2, aujourd’hui intitulée « Conservation et gestion des ressources naturelles », est rebaptisée « Croissance durable : Ressources naturelles » dans le cadre financier pluriannuel 2014-2020.

Si le périmètre de cette rubrique ne subit pas de changements profonds, il convient toutefois de souligner que la Commission européenne propose quelques aménagements qui ont pour objet de recentrer la politique agricole commune et de dégager des marges de manœuvre pour soutenir de nouvelles activités. En conséquence, les fonds consacrés à la sécurité alimentaire (2,2 milliards d’euros) devraient être inscrits sur la rubrique 3 « Sécurité et citoyenneté » et l’aide alimentaire en faveur des populations les plus défavorisées (2,5 milliards d’euros) financée au titre de la rubrique 1 « Croissance intelligente et inclusive » car elle s’inscrit davantage dans le cadre de l’objectif de réduction de la pauvreté relevant de la stratégie Europe 2020.

Au titre de la rubrique 2, la Commission européenne propose un montant de 386 milliards en euros constants, soit 435 milliards en euros courants, contre 421 milliards d’euros actuellement. Les baisses seraient donc, respectivement, de l’ordre de 8 % et 3 %. Les dotations passeraient de 40 à 34 % du total du budget.

4,5 milliards d’euros sont par ailleurs inscrits sur la rubrique 1 pour la recherche et l’innovation dans le domaine de la sécurité alimentaire, de la bioéconomie et de l’agriculture durable, dans le cadre stratégique commun pour la recherche et l’innovation. Il s’agit d’un effort non négligeable par rapport à l’actuel cadre financier, ainsi que l’a souligné M. Rudolf Mögele, directeur général adjoint à la direction générale de l’agriculture de la Commission européenne, à la mission d’information.

Cette enveloppe de 390 milliards d’euros serait complétée par deux instruments en dehors du cadre financier pluriannuel, qui seraient soumis à la même procédure accélérée que la réserve pour aides d’urgence :

• une réserve pour les crises dans le secteur agricole serait créée et dotée de 3,5 milliards d’euros. Son montant annuel serait plafonné à 500 millions en euros constants. Il s’agirait d’un mécanisme d’urgence destinés à réagir aux situations de crise (qui pourraient résulter d’un problème de sécurité alimentaire ou d’évolutions soudaines des marchés) en fournissant un soutien immédiat aux agriculteurs par une procédure accélérée ;

• le champ d’application du Fonds européen d’ajustement à la mondialisation serait élargi afin d’y inclure une aide aux agriculteurs dont les moyens de subsistance risquent d’être mis à mal par la mondialisation. Le Fonds serait doté de 2,5 milliards d’euros sur la période12.

Vos Rapporteurs soutiennent tout particulièrement ces deux propositions, à même d’aider l’agriculture européenne à faire face à la nécessité de réagir à des circonstances imprévisibles, qui ont une incidence brutale sur les revenus agricoles, et de faciliter les adaptations requises par les accords internationaux sur le commerce.

Il ressort de la proposition de la Commission européenne que les moyens en faveur de la politique agricole commune seraient gelés en valeur, ce qui entraînerait une baisse de 3 % des aides directes pour les agriculteurs français. En outre, il apparaît que, à la fin du cadre financier pluriannuel, la France serait contributrice nette à la PAC.

Compte tenu des efforts ainsi demandés et des enjeux, notamment en termes de croissance, liés à la politique agricole, vos Rapporteurs sont opposés à tout effort supplémentaire sur cette rubrique. En particulier, la réduction de 25 milliards d’euros proposée par le président Van Rompuy le 13 novembre dernier, qui aurait pour conséquence de plafonner la rubrique 2 à 364 milliards d’euros (dont 2,8 milliards pour la réserve agricole), n’est pas recevable : elle entraînerait une diminution des moyens de 14 % par rapport au cadre financier actuel et aurait pour conséquence une baisse des paiements de 19 %, qui ne pourrait être supportée par les agriculteurs français.

Il n’est donc pas possible d’aller plus loin dans les efforts. Le Parlement européen avait d’ailleurs souligné, dans sa résolution du 8 juin 2011, que « les sommes allouées à la PAC au titre du budget de 2013 devraient au moins être maintenues au même niveau au cours la prochaine période de programmation financière ».

Pourtant, au sein du Conseil, aucun « front commun » en faveur de la PAC n’a pu être constitué à l’instar de celui des « amis de la cohésion ». Si la France a trouvé des appuis auprès de l’Irlande, de l’Espagne, de l’Autriche et de la Finlande, les autres pays qui défendent la politique agricole, comme la Pologne, la Hongrie ou la Roumanie, ont préféré faire de la cohésion leur priorité. En outre, parmi les défenseurs de la PAC, les intérêts divergent : pour les uns, c’est le premier pilier, pour les autres, le second pilier ; il n’y a pas unanimité sur la convergence des aides directes, etc.

La Commission européenne propose d’allouer 375 milliards (422 milliards en euros courants) à la politique agricole commune, dont :

– 283 milliards en euros constants (319 milliards en euros courants) pour le premier pilier, qui regroupe les paiements directs et les dépenses relatives au marché agricole, contre 299 milliards dans le cadre financier actuel ;

– 92 milliards en euros constants (103 milliards en euros courants) pour le second pilier de la PAC, qui comprend, au sein du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), les dotations en faveur du développement durable, contre 97 milliards actuellement.

Ces moyens devraient permettre de poursuivre les grands objectifs que la Commission européenne fixe à la PAC pour 2014-2020, à savoir accroître la productivité agricole, garantir un niveau de vie équitable à la population agricole, stabiliser les marchés, assurer la disponibilité des produits et veiller à ce qu’ils soient vendus aux consommateurs à des prix raisonnables, mais aussi assurer la gestion durable des ressources naturelles et la lutte contre le changement climatique, contribuer à un développement territorial équilibré, et, dans tous les cas, tenir compte des trois volets de la stratégie Europe 2020 (croissance intelligente, durable et inclusive).

La future PAC devrait donc contenir un premier pilier plus écologique et réparti plus équitablement, et un second pilier davantage axé sur la compétitivité et l’innovation, la lutte contre le changement climatique et l’environnement.

Au-delà des transferts proposés, comme celui des outils de gestion des risques du premier vers le second pilier, une plus grande flexibilité entre les deux piliers serait encouragée. Alors que la modulation de base13 serait supprimée et que les montants correspondants seraient transférés ex ante dans le second pilier, deux possibilités seraient ouvertes aux États membres. La première aurait pour objet de permettre à tous les États de transférer jusqu’à 10 % de leur enveloppe nationale du premier pilier vers leur enveloppe de développement rural. La seconde autoriserait les seuls pays concernés par la convergence des enveloppes de paiements directs14 à transférer jusqu’à 5 % des crédits du second vers le premier pilier. Le président Van Rompuy suggère d’une part, que les montants concernés par la modulation volontaire passent de 10 à 15 % des aides directes et d’autre part, que cette modulation soit applicable dans les deux sens.

Les propositions de la Commission européenne s’inscrivent dans le cadre des orientations souhaitées par le Parlement européen, qui a rappelé, dans sa résolution du 8 juin 2011, que la PAC doit être conçue, dans ses deux piliers, pour contribuer à la réalisation des objectifs de la Stratégie Europe 2020 et a invité la Commission à présenter des propositions de réforme de la PAC « visant à assurer une affectation et une utilisation plus efficaces et réelles du budget de la PAC, notamment via une distribution équitable des paiements directs entre les États membres, les régions et les agriculteurs ».

Pour ce faire, la Commission européenne présente ses réformes dans sept projets de règlements relatifs aux thèmes suivants : paiements directs, OCM unique, développement rural, financement de la PAC, mesures transitoires 2013, régime de paiement unique et soutien aux viticulteurs, fixation de certaines aides et restitutions.

Les grandes lignes de ces réformes débattues dans les négociations sur le cadre financier pluriannuel sont les suivantes.

Afin de garantir une répartition plus équitable des aides directes, le principe de la « convergence des paiements » entre États membres serait encouragé. Pour des raisons historiques, les agriculteurs reçoivent en effet des aides de montants très différents selon qu’ils sont ressortissants de tel ou tel pays : selon la Commission européenne, le paiement direct moyen par hectare s’élève à 95 euros en Lettonie, contre plus de 457 euros aux Pays-Bas, pour une moyenne de l’ordre de 269 euros en 2013.

Aussi, au cours de la période considérée, tous les États membres dont le niveau des paiements directs est inférieur à 90 % de la moyenne, après achèvement de la phase de rattrapage, devraient réduire d’un tiers l’écart entre leur niveau actuel et ce niveau. Cette convergence serait financée, de manière proportionnelle, par tous les États dont le niveau des paiements directs est supérieur à la moyenne de l’Union. La proposition du président Van Rompuy confirme ce mécanisme.

Parmi les pays les plus pénalisés par cette mesure figureraient l’Italie, la Belgique et les Pays-Bas, tandis que plusieurs États, comme le Royaume-Uni, le Portugal ou encore l’Espagne y gagneraient.

En tout état de cause, il n’est pas possible, pour la France, d’aller au-delà. L’effort demandé devrait déjà entraîner une baisse des retours de 250 millions d’euros pour les agriculteurs, soit une diminution de 3 % de l’enveloppe, contre 7 % pour les Pays-Bas. Le ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt Stéphane Le Foll a d’ailleurs été très clair lors de son audition par votre Commission le 17 octobre dernier : « Nous sommes disposés à faire l’effort de solidarité nécessaire, mais nous refusons que notre contribution soit plus élevée que celle de l’Allemagne. Il est hors de question que la France se trouve pénalisée du fait de sa surface agricole. Avec un taux moyen d’aide d’environ 300 euros l’hectare, elle se situe dans la moyenne européenne. Mais comme elle a une surface agricole utile plus vaste que les autres pays, elle reçoit logiquement davantage au titre du premier pilier ».

Parallèlement, une autre forme de convergence, qualifiée de « convergence interne », non prévue dans le cadre financier pluriannuel mais non dénuée de lien, serait encouragée au sein même des États. En effet, la Commission propose que, dès 2014, 40 % de l’enveloppe de paiement direct de chaque État soient versés aux agriculteurs à un niveau forfaitaire, indépendamment des références historiques. Ce pourcentage serait progressivement augmenté chaque année de telle sorte qu’il y ait un montant forfaitaire de paiement unique par hectare au sein de chaque État au niveau national ou régional dès 2019. Cette proposition inquiète de nombreux États membres, quinze d’entre eux ayant émis de sérieuses réserves.

En France, cela aurait pour conséquence des baisses d’aides très importantes dans certaines régions, en particulier le grand Ouest, selon les données transmises par le directeur adjoint du cabinet du ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt Stéphane Le Moing et le directeur général des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires Eric Allain à la mission d’information.

Une telle hypothèse n’est pas envisageable. M. Stéphane Le Foll a ainsi indiqué à votre Commission que : « Nous n’accepterons pas que le processus de convergence aboutisse à moins de moyens pour notre élevage et notre polyculture-élevage : leur défense est une priorité. Il ne s’agit ni de privilégier ni de stigmatiser une production par rapport à une autre. Nous avons besoin de grandes productions céréalières mais nous avons aussi besoin de transformer nos céréales pour garder la valeur ajoutée en France, et la production animale en est un moyen ».

Aussi, la France défend-elle l’idée de majorer le montant de l’aide sur les premiers hectares, ce qui permettrait de protéger les exploitations les plus riches en emplois car ce sont les premiers hectares qui y contribuent le plus.

Par ailleurs, la Commission européenne propose de plafonner le niveau des paiements directs. En limitant le niveau de base du soutien direct au revenu dont peuvent bénéficier les grandes exploitations agricoles, tout en tenant compte des économies d’échelle réalisées par les structures plus vastes et de l’emploi direct qu’elles génèrent. La Commission européenne suggère que les « économies » ainsi réalisées soient reversées dans la dotation budgétaire dédiée au développement rural de l’État concerné. Cette proposition ne toucherait la France qu’à la marge, quelques exploitations seulement seraient visées. La proposition du président Van Rompuy mentionne la possibilité, pour les États qui le souhaitent, de recourir à ce dispositif.

S’agissant des fonds alloués au titre du développement durable, leur répartition serait réexaminée sur la base de critères territoriaux et économiques objectifs reflétant les buts des politiques économique, sociale, environnementale et territoriale, et des performances passées. Il s’agirait ainsi de garantir un traitement plus équitable des agriculteurs exerçant des activités identiques. L’enjeu, pour la France, est d’améliorer son taux de retour sur le second pilier, qui s’élève à 8 % actuellement (cf. annexe 3).

Afin d’assurer que la PAC contribue à atteindre les objectifs de l’Union en matière de protection de l’environnement et de lutte contre le changement climatique au-delà des exigences d’éco-conditionnalité prévues par la législation actuelle, 30 % de l’aide directe seraient subordonnés à un « verdissement ». Cela signifie que tous les agriculteurs devraient adopter des pratiques favorables à l’environnement, définies dans la législation et contrôlables. Ce verdissement aurait pour effet de réorienter sensiblement le secteur agricole pour le rendre plus durable. La proposition du président Van Rompuy confirme ce principe.

Si la France s’est clairement prononcée en faveur des propositions de la Commission pour le verdissement des aides du premier pilier (et contre un « programme à la carte »), il apparaît que les modalités de mise en œuvre doivent être améliorées, comme l’ont souligné Stéphane Le Moing et Eric Allain à la mission d’information. Parmi les trois critères posés (maintien de prairies permanentes, diversification des cultures, préservation de surfaces d’intérêt écologique dont la Commission souhaiterait qu’elles atteignent 7 % des surfaces totales), il convient donc de préciser les règles. Ainsi, que peuvent recouvrir exactement les surfaces d’intérêt écologique ? Les cultures de légumineuses et de protéagineux peuvent-elles être incluses ? De même, pour les prairies permanentes, la gestion à la parcelle proposée par la Commission européenne n’apparaît pas comme la plus pertinente. En tout état de cause, les représentants du ministère chargé de l’agriculture ont mis en évidence la nécessité de ne pas alourdir outre mesure les charges de contrôle.

La question des cofinancements dans le cadre du Fonds européen agricole pour le développement rural est essentielle, compte tenu de l’impact direct sur les finances publiques nationales qu’entraîne toute baisse de la part financée par l’Union.

La Commission européenne prévoit un taux de cofinancement unique pour toutes les mesures d’un même programme, à fixer par l’État membre au maximum à 50 % (85 % dans les régions de convergence et les régions ultrapériphériques). Seules certaines mesures feraient l’objet d’un taux majoré : 80 % pour la formation, l’installation, la création de groupements de producteurs, la coopération et Leader ; 100 % pour les projets particulièrement innovants et financés à partir d’un transfert de crédits du premier pilier.

Ces taux seraient donc globalement en diminution par rapport à la période actuelle : 55 % pour les mesures de l’axe 2, voire 75 % dans le cadre des nouveaux défis ; 75 % pour les mesures de gestion des risques.

Le président Van Rompuy va plus loin que la Commission européenne : il confirme le taux général de 50 %, mais prévoit un taux de 75 % pour les régions ultrapériphériques, les régions les moins développées et les régions en transition classées parmi les moins développées en 2007-2013 et de 60 % pour les autres régions en transition. Il suggère 75 % pour les opérations contribuant à atteindre les objectifs en matière d’environnement. Par ailleurs, il propose 100 % pour les montants transférés à partir du premier pilier au titre du soutien supplémentaire relevant du développement rural, ce qui constituerait une exception notable aux principes de la politique agricole commune.

La France demande que le taux général puisse aller jusqu’à 55 % au lieu de 50 %, que le taux pour les mesures en faveur du climat et de l’environnement soit porté à 75 % et que le taux actuel de 75 % pour les outils de gestion des risques soit maintenu. Ces positions reçoivent le soutien de vos Rapporteurs.

Afin d’optimiser les synergies entre la politique de développement rural et les autres ressources de développement territorial de l’Union, le Fonds européen agricole pour le développement rural serait inclus dans les contrats de partenariat conclus entre la Commission européenne et chaque État membre, comme cela a été indiqué précédemment par vos Rapporteurs. La mise en avant de la dimension territoriale du développement socio-économique et le regroupement de tous les fonds européens disponibles au sein d’un contrat unique devraient ainsi permettre de soutenir plus efficacement le développement économique des zones rurales sur l’ensemble du territoire de l’Union. Le second pilier de la PAC devrait donc respecter les mêmes dispositions en matière de conditionnalité, liées aux performances dans le cadre de la stratégie Europe 2020, que les autres fonds structurels.

Par ailleurs, pour garantir une utilisation efficace des ressources de la PAC, le bénéfice des aides directes serait désormais réservé aux agriculteurs actifs.

Enfin, un régime simplifié d’octroi des aides directes serait mis en place au profit des petits agriculteurs, ce qui devrait réduire la charge administrative pour les États membres et les agriculteurs tout en étant neutre pour le budget de l’Union.

Une enveloppe de l’ordre de 6,9 milliards d’euros (7,8 milliards en euros courants) serait destinée à la politique maritime et de la pêche, notamment le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP), les accords de pêche durable (APD) et les contributions obligatoires aux organisations régionales de gestion des pêches (ORGP).

Il s’agit ainsi d’accompagner la réforme de la politique commune de la pêche, lancée sur la base du livre vert que la Commission européenne a rendu public le 21 avril 2009. Ses propositions de réforme, présentées le 13 juillet 2011, reposent sur deux règlements sur la politique commune de la pêche et sur l’organisation commune des marchés des produits de la pêche et de l’aquaculture, dont les points clés sont la préservation des stocks à un niveau durable, la mise en place de parts de capture individuelles transférables, une meilleure information des consommateurs et un soutien financier limité aux initiatives respectueuses de l’environnement.

Dans le cadre de cette réforme, la Commission européenne a également suggéré, le 2 décembre 2011, la mise en place d’un nouveau Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP), qui a vocation à remplacer le Fonds européen pour la pêche (FEP) et tous les autres instruments financiers qui participaient au financement de la politique commune de la pêche et de la politique maritime intégrée.

Les propositions de la Commission européenne vont dans le sens des orientations prônées par le Parlement européen dans sa résolution du 8 juin 2011.

Le FEAMP devrait contribuer à la réalisation des objectifs établis dans la stratégie Europe 2020 grâce à trois initiatives phares : une Europe efficace dans l’utilisation des ressources, une Union pour l’innovation et une stratégie pour les nouvelles compétences et les nouveaux emplois. Il s’agirait ainsi de :

– promouvoir une pêche et une aquaculture durables et compétitives ;

– favoriser l’élaboration et la mise en œuvre de la politique maritime intégrée de l’Union ;

– promouvoir le développement territorial équilibré et solidaire des zones tributaires de la pêche (y compris de l’aquaculture et de la pêche dans les eaux intérieures) ;

– contribuer à la mise en œuvre de la politique commune de la pêche.

Le FEAMP ferait partie du cadre stratégique commun, à l’instar des fonds de la politique de cohésion et du FEADER.

Lors de sa réunion des 22 et 23 octobre 2012, le Conseil des ministres de la pêche de l’Union européenne est parvenu à un accord sur les mesures qui pourront bénéficier du soutien financier du FEAMP. Il s’est notamment prononcé en faveur du renforcement des aides publiques à la flotte, en particulier des aides à la modernisation des navires, à capacité de pêche constante. Il a par ailleurs souhaité le maintien des aides à la sortie de flotte, jusqu’au 31 décembre 2017 et la pérennisation des arrêts temporaires, ainsi que l’affermissement des aides à l’installation des jeunes pêcheurs et aquaculteurs.

Vos Rapporteurs estiment que, compte tenu du statut de bien public indispensable que représentent les ressources de pêche et du rôle essentiel joué par les secteurs de la pêche et de l’aquaculture, qui sont souvent la principale source de revenus et d’emplois dans les régions côtières, la politique commune de la pêche appelle un besoin de ressources financières estimé au plus juste par la Commission européenne, qui ne saurait, par conséquent, être remis en cause.

Au-delà de la prise en compte, par l’ensemble des grandes politiques de l’Union, des priorités de la politique environnementale conduite par l’Union, la Commission européenne propose de doter de 3,2 milliards en euros constants (3,6 milliards en euros courants) le programme LIFE+, dont 2,4 milliards pour le sous-programme « Environnement » et 800 millions environ pour le sous-programme « Action pour le climat ».

Le sous-programme « Action pour le climat » se verrait assigné trois objectifs :

– la lutte contre le changement climatique, avec un soutien apporté à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. L’accent serait plus particulièrement mis sur les projets pilotes, qui peuvent servir à tester des approches innovantes, en particulier au niveau des PME, afin d’enrichir et de mettre en application le savoir dans ce domaine ;

– l’adaptation au changement climatique, avec un appui aux actions destinées à renforcer la résilience au changement climatique ;

– la gouvernance et l’information, avec des campagnes de sensibilisation sur les mesures prises en faveur du climat et la nécessité de modifier les comportements.

Le sous-programme « Environnement » serait plus particulièrement axé sur trois priorités. « LIFE biodiversité » porterait sur Natura 2000 et sur les défis plus vastes liés à la biodiversité, conformément à l’objectif de la stratégie Europe 2020. « LIFE Environnement » appuierait la mise en œuvre de la politique environnementale de l’Union par les secteurs public et privé, notamment la législation environnementale en matière d’utilisation efficace des ressources. « LIFE Gouvernance » favoriserait la création de plateformes pour l’échange des meilleures pratiques en matière de respect des priorités environnementales de l’Union et porterait le soutien aux ONG environnementales.

Enfin, la Commission européenne souhaite désormais privilégier une approche descendante pour la sélection des projets, ce qui lui permettrait de renforcer son contrôle sur les grandes orientations stratégiques, et mettre en place un nouveau type de projets, les « projets intégrés », qui visent à améliorer la mobilisation coordonnée d’autres fonds de l’Union en faveur d’objectifs environnementaux et climatiques.

La Commission européenne propose de regrouper au sein d’une seule rubrique les actuelles rubriques 3a « Liberté, sécurité et justice » et 3b « Citoyenneté », et de revoir en profondeur la structure des différents programmes dans un souci de simplification et d’efficacité.

Elle suggère en outre d’augmenter fortement les moyens destinés aux politiques en faveur de la sécurité et de la citoyenneté, en les faisant passer de 12,2 milliards actuellement à 18,8 milliards en euros constants (+ 54 %), 21,2 milliards en euros courants (+ 74 %). Hors transfert de 2,5 milliards depuis la rubrique 2 au titre de la sécurité alimentaire, les progressions s’établiraient à 34 % en euros constants, et à plus de 50 % en euros courants.

Sur cette enveloppe, plus de 3 milliards d’euros seraient destinés aux agences.

Dans sa proposition du 13 novembre 2012, le président Van Rompuy suggère d’abaisser légèrement le plafond de la rubrique 3 à 18,3 milliards en euros constants, soit 20,6 milliards en euros courants ; ce qui garantirait toujours une progression significative des moyens. Le détail des efforts à réaliser n’est toutefois pas précisé.

La forte augmentation du plafond de cette rubrique, qui doit être saluée, est parfaitement justifiée, compte tenu du renforcement de l’espace de liberté, de sécurité et de justice prévu par le traité de Lisbonne et des défis à relever. Toutefois, on peut se demander, à l’instar du Parlement européen, si l’ampleur des défis à relever dans ce domaine ne nécessiterait pas davantage de moyens.

Les autres dotations volets de la rubrique 3 devraient bénéficier de dotations suffisantes, même s’il convient d’être attentif aux forts taux d’exécution constatés sur certains programmes, comme ceux relatifs à la culture et aux médias.

Enfin, la revue en détail de la rubrique 3 montre des efforts en faveur d’une efficacité et d’une lisibilité accrues qui doivent être salués.

La Commission propose d’allouer un budget de l’ordre de 8,2 milliards d’euros aux politiques relatives aux affaires intérieures et de simplifier la structure des instruments de dépenses en réduisant à deux le nombre des programmes de financement : le fonds de gestion des flux migratoires et le fonds pour la sécurité intérieure.

Ces fonds devraient comporter une forte dimension extérieure et permettre une réaction rapide dans les situations d’urgence.

Il s’agirait également, dans un souci d’efficacité, de passer d’une gestion directe à une gestion partagée lorsque c’est possible et, dans les cas de gestion partagée, de privilégier une programmation pluriannuelle.

Le fonds « Migrations et asile », qui soutiendrait les actions relatives à l’asile et les migrations, l’intégration des ressortissants de pays tiers et le retour, résulterait de la fusion des actuels Fonds européen pour les réfugiés, Fonds européen d’intégration des ressortissants de pays tiers et Fonds européen pour le retour. Il serait doté d’environ 3,4 milliards en euros constants, 3,9 milliards en euros courants sur la période.

Le fonds « Sécurité intérieure », qui apporterait un appui financier aux initiatives relatives aux frontières extérieures et à la sécurité intérieure, regrouperait le fonds « Frontières extérieures », aujourd’hui inclus dans la ligne « fonds de gestion des flux migratoires », ainsi que les programmes « Prévenir et combattre la criminalité » et « Prévenir, préparer et gérer les conséquences du terrorisme ». Ce fonds serait abondé de 4,3 milliards en euros constants, 4,9 milliards en euros courants sur la période.

734 millions d’euros seraient par ailleurs inscrits au titre des systèmes d’information à grande échelle, tels que SIS II et VIS.

La Commission européenne entend que la protection des personnes soit assurée dans des secteurs diversifiés, parmi lesquels la sécurité alimentaire, la santé, la protection des consommateurs et la protection civile.

Il est ainsi proposé d’allouer 2,2 milliards d’euros à la politique en faveur de la sécurité alimentaire, jusqu’à présent rattachée à la rubrique agricole.

Un nouvel élan doit également être apporté aux politiques de santé et de protection des consommateurs par la voie des programmes « Santé en faveur de la croissance», « Santé animale et végétale et sécurité des denrées alimentaires » et « Protection des consommateurs » avec une dotation totale de 600 millions d’euros.

Partant du principe que l’accroissement du nombre et de l’intensité des catastrophes naturelles et d’origine humaine appellent une action systématique au niveau européen, la Commission souhaite aussi mettre l’accent sur la protection civile au travers, notamment, de la création d’une capacité européenne de réaction aux situations d’urgence, qui s’appuierait sur un instrument financier pour la protection civile modernisé. 247 millions d’euros seraient prévus au titre de la protection civile interne sur l’ensemble de la période.

En complément des moyens inscrits dans le cadre financier, le Fonds de solidarité de l’Union européenne, destiné à subvenir aux besoins d’un État membre confronté à une catastrophe majeure, pourrait être mobilisé, chaque année, jusqu’à 1 milliard en euros constants.

Le plafond de la rubrique 4 « L’Europe dans le monde » serait porté à 70 milliards en euros constants (79 milliards en euros courants), contre un peu moins de 60 milliards dans le cadre financier 2007-2013.

Cette progression de 23 % en euros constants et 39 % en euros courants est justifiée. D’une part, la politique extérieure est l’un des grands domaines d’action de l’Union, dont l’importance a été renforcée par le traité de Lisbonne. D’autre part, l’Union doit respecter les engagements qu’elle a déjà pris, notamment celui de consacrer, au titre des objectifs du Millénaire, 0,7 % de son RNB à l’aide publique au développement d’ici à 2015. Au cours du cadre financier à venir, la politique extérieure passerait donc de 6,5 à 7 % du total du budget entre 2014 et 2020.

A ces moyens prévus dans le cadre financier pluriannuel s’ajoute la réserve pour aides d’urgence aux pays tiers, inscrite à titre de provision. Cet instrument de flexibilité ferait également l’objet d’une progression notable : la réserve pourrait être sollicitée jusqu’à 350 millions en euros constants chaque année, contre 221 millions en euros constants 2004 dans le cadre financier 2007-2013. Son enveloppe totale s’élèverait donc à 2,45 milliards d’euros. Serait en outre ouverte la possibilité d’utiliser l’année suivante la part non utilisée du montant annuel maximal. Sa portée serait enfin étendue pour couvrir les cas de pression migratoire aux frontières extérieures de l’Union.

Au total, 72,5 milliards d’euros pourraient être mobilisés au titre de la politique extérieure de l’Union européenne.

Dans son scénario présenté le 13 novembre 2012, le président Van Rompuy suggère d’abaisser le plafond de la rubrique 4 à un peu moins de 66 milliards en euros constants (74 milliards en euros courants) et d’y inclure la réserve d’aide d’urgence qui serait dotée d’un peu moins de 2 milliards d’euros. Le montant annuel maximum de la réserve d’aide d’urgence serait ainsi fixé à 280 millions en euros constants. Le détail des efforts à réaliser n’est toutefois pas précisé.

Comme dans les autres domaines de l’action européenne, la Commission souhaite aller vers plus de simplicité et d’efficacité. Aussi propose-t-elle la mise en place d’un règlement cadre commun à tous les instruments, la publication d’un rapport annuel unique et une programmation sur sept ans (au lieu de trois actuellement) avec une révision à mi-parcours.

La modernisation du dispositif passe également par la réduction des chevauchements entre les instruments et la simplification des règles et des procédures encadrant la fourniture de l’aide de l’Union pour améliorer son articulation avec l’action des États membres.

La gamme des instruments de financement est par ailleurs complétée par les possibilités de recours aux instruments financiers novateurs (en particulier les facilités d’investissement régionales), afin de mobiliser des fonds supplémentaires pour couvrir les besoins d'investissement des pays partenaires.

Le graphique suivant retrace la répartition des crédits entre les instruments financiers destinés aux relations extérieures.

INSTRUMENTS FINANCIERS DE RELATIONS EXTERIEURES

En matière de coopération, l’instrument de financement de la coopération au développement se verrait alloué 20,6 milliards d’euros (23,3 milliards en euros courants).

A ces moyens s’ajouteraient les 30 milliards d’euros (34 milliards en euros courants) proposés au titre du Fonds européen de développement (FED) destiné à la coopération avec les pays ACP (Afrique, Caraïbes et Pacifique) et les pays et territoires d’outre-mer, enveloppe que le président Van Rompuy suggère de ramener à 27 milliards d’euros.

Bien que le FED soit le principal instrument de la politique communautaire d’aide au développement, il n’est toujours pas proposé de l’inscrire dans le prochain cadre financier.

LE FONDS EUROPEEN DE DEVELOPPEMENT

Le FED fonctionne par renouvellement périodique des conventions qui le régissent. Il n’est pas inscrit au budget général mais alimenté par des contributions des États membres déterminées selon une clé de répartition ad hoc.

La proposition faite par la Commission européenne de revoir la clé de contribution pour la rapprocher de la « clé RNB » du budget de l’Union européenne conduit à s’interroger sur l’opportunité de budgétiser ce fonds.

D’ailleurs, alors qu’elle avait proposé, sans succès, un projet en ce sens dans le cadre des négociations sur les perspectives financières 2007-2013, elle a de nouveau l’intention de proposer une intégration du FED dans le budget européen, mais à compter de 2021. Le Parlement européen s’est déjà prononcé en faveur de cette perspective.

Les États qui sont proportionnellement moins mis à contribution pour le FED que pour le budget général s’y opposent, mais la France y aurait plutôt intérêt.

Plusieurs raisons plaident en ce sens :

– l’application du principe d’unité budgétaire ;

– l’imbrication des liens entre le FED et le budget général : un titre du budget est réservé à ce fonds ; le FED est alimenté par les contributions des États membres mais aussi par une participation du budget général ;

– la part prépondérante des financements du FED aux interventions extérieures de la Communauté en faveur des pays en voie de développement ;

– les conditions d’exécution du FED, qui font l’objet d’un contrôle par la Cour des comptes européenne et donnent lieu à l’octroi d’une décharge par le Parlement européen, à l’instar du budget général ;

– le signal fort qui serait ainsi envoyé aux pays ACP, avec la sécurisation du financement du Fonds. L’exclusion du FED du champ du budget en rend en effet incertaine chaque reconstitution.

Un instrument de préadhésion intégré unique est proposé pour jouer le rôle de pilier financier de la stratégie d’élargissement. Doté de 12,5 milliards d’euros (14,1 milliards en euros courants), ses modalités de fonctionnement seraient inspirées de celles des fonds structurels.

L’instrument européen de voisinage, qui a pour objet d’aider les pays voisins de l’Union en soutenant l’intensification de la coopération politique, le renforcement de l’intégration économique et une transition efficace et durable vers la démocratie, se verrait, pour sa part, alloué 16 milliards d’euros (18,2 milliards en euros courants). Cette coopération reposerait sur le principe du « more for more », qui signifie que les pays les plus ambitieux dans la mise en œuvre des réformes bénéficieraient d’un soutien plus important.

Il est par ailleurs proposé de créer un instrument de partenariat, destiné à soutenir ponctuellement la coopération avec l’ensemble des pays tiers, en ciblant les partenaires stratégiques et les économies émergentes. Doté d’1 milliard d’euros (1,1 milliard en euros courants) sur la période, il remplacerait les programmes actuellement mis en œuvre dans les pays industrialisés et émergents.

Enfin, l’instrument européen pour la démocratie et les droits de l’homme (IEDDH) serait porté à 1,4 milliard d’euros (1,6 milliard en euros courants), soit environ 500 millions d’euros de plus que dans le cadre financier actuel.

Les instruments qui ont pour objet de permettre à l’Union de faire face aux crises bénéficieraient de moyens renforcés.

Destinés à assurer solidarité et aide aux populations victimes de catastrophes naturelles ou d’origine humaine, l’instrument d’aide humanitaire, qui sert à financer des interventions d’organisations spécialisées, devrait recevoir 6,4 milliards d’euros (7,2 milliards en euros courants) et le mécanisme de protection civile, qui vise à coordonner les efforts des agences de protection civile des États membres, se verrait alloué 0,2 milliard d’euros.

En matière de prévention et de gestion des crises, l’instrument de stabilité serait doté de 2,5 milliards d’euros (2,8 milliards en euros courants). Son intervention serait concentrée sur la prévention des conflits, la consolidation de la paix et le renforcement de l’État. L’aide macro-financière (AMF), qui constitue une réponse aux besoins de financement à court terme des pays soumis aux programmes de stabilisation et d’ajustement, bénéficierait de 0,6 milliard d’euros (0,7 milliard en euros courants). Moyen de promotion de la sécurité nucléaire, l’instrument relatif à la coopération en matière de sûreté nucléaire (ICSN) recevrait 0,56 milliard d’euros (0,6  milliard en euros courants). Enfin, le budget consacré à la politique étrangère et de sécurité commune serait plafonné à 2,5 milliards d’euros (2,8 milliards en euros courants).

Le plafond prévu pour les dépenses administratives (rubrique 5) s’élèverait à 63,2 milliards d’euros, suivant une progression régulière de 8,6 milliards en 2014 à 9,4 milliards en 2020. Il s’élèverait à 71,3 milliards en euros courants. Pour mémoire, le montant maximal d’engagements autorisés s’établit à 55,5 milliards d’euros dans le cadre financier actuel.

Sur l’enveloppe de 63 milliards d’euros, 25 milliards d’euros environ sont destinés à la Commission, 13 milliards au Parlement, 11 milliards aux autres institutions (Cour de justice, Service européen pour l’action extérieure, Médiateur…), 11 milliards aux pensions et 1,5 milliard aux écoles européennes.

Le plafond proposé s’inscrit dans un contexte marqué par l’adhésion de la Croatie (avec un impact de l’ordre de 540 millions d’euros), l’extension des compétences confiées à l’Union, mais également la proposition de la Commission de réduire le personnel de toutes les institutions de 5 % d’ici à 2018 par rapport à 2012, en ne remplaçant pas la totalité des départs à la retraite et en limitant la conclusion de nouveaux contrats, ainsi que la réforme du statut des fonctionnaires des institutions européennes. Pour autant, les dépenses enregistreraient une augmentation nette, de 14 % en euros constants et de plus de 25 % en euros courants.

LA PROPOSITION DE REFORME DU STATUT DU PERSONNEL

Les évolutions proposées portent notamment sur les points suivants :

– la méthode d’ajustement des salaires et des pensions : la Commission suggère de faire dépendre l’adaptation des salaires et des pensions de l’évolution du pouvoir d’achat des fonctionnaires nationaux d’un panel de dix États membres contre huit actuellement (la Pologne et la Suède seraient ajoutées à l’échantillon). L’indice international de Bruxelles pris en compte pour mesurer l’évolution du coût de la vie serait en outre remplacé par l’inflation nationale en Belgique et au Luxembourg ;

– le prélèvement spécial, qui deviendrait « prélèvement de solidarité », verrait son taux maintenu à 5,5 % du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2020, alors qu’aujourd’hui il augmente chaque année ;

– la durée de travail hebdomadaire passerait de 37,5 heures à 40 heures sans compensation salariale ;

– les pensions : l’âge de départ à la retraite serait porté de 63 à 65 ans et celui de départ à la retraite anticipée de 55 à 58 ans. La possibilité de départ anticipé à la retraite sans décote serait maintenue, mais limitée à 5 % des départs à la retraite contre 10 % actuellement. Enfin, des mécanismes d’incitation au maintien en activité jusqu’à 67 ans seraient mis en place.

Par ailleurs, la durée maximale des contrats des agents contractuels serait portée de 3 à 5 ans.

Les discussions sur le calibrage du plafond de la rubrique 5 suscitent des réactions « épidermiques », alors que les négociations relatives au statut du personnel sont en cours. La plupart des États membres considèrent et que les institutions communautaires ne peuvent se dispenser des efforts que les administrations nationales doivent conduire. De nombreux députés européens prennent prétexte d’une demande de baisse des crédits pour enfourcher leur cheval de bataille : le choix d’un siège unique, sis à Bruxelles.

La plupart des interlocuteurs de la mission d’information ont pourtant confirmé qu’il existait des marges de manœuvre sur cette rubrique.

Le président Van Rompuy s’est montré prudent dans sa proposition du 13 novembre 2012 en fixant le plafond de la rubrique 5 à 62,6 milliards d’euros, soit environ 600 millions d’euros de moins que dans le scénario de la Commission. Il a précisé, sans donner de chiffres, que ce plafond tiendrait aussi compte de la baisse des effectifs et des économies réalisées par l’ensemble des institutions. Dans le cadre de la réforme du statut des fonctionnaires, des économies devront notamment résulter des mesures relatives à l’augmentation du temps de travail à 40 heures sans compensation salariale, au prélèvement de solidarité, au report de l’âge de départ à la retraite, à l’évolution de carrière ainsi qu’à celle des coûts liés aux pensions.

Vos Rapporteurs renouvellent l’alerte qu’ils avaient lancée dans leur rapport d’information sur le projet de budget pour 2013. Il est certes logique d’avoir des restes à liquider (RAL), c’est-à-dire des engagements qui n’ont pas encore donné lieu à paiement, compte tenu du caractère pluriannuel de la plupart des programmes européens, qui connaissent par conséquent un décalage temporaire entre engagements et paiements. Toutefois, l’ampleur prise par ceux-ci et leur niveau sans cesse croissant, qui résultent notamment des retards et difficultés de la programmation actuelle15, suscitent de profondes inquiétudes chez vos Rapporteurs.

Ainsi, il ressort du rapport annuel de la Commission européenne sur la gestion budgétaire et financière concernant l’exercice 2011, que le RAL représentait, à la fin de l’année 2011, 194,4 milliards d’euros, soit 13 milliards de plus que fin 2010 (+ 7 %). Les deux tiers (139 milliards d’euros) concernaient la seule politique de cohésion. En outre, 6,7 % du RAL total trouvaient leur origine dans les budgets du précédent cadre financier pluriannuel, donc antérieurs à 2007.

Les dernières estimations de la Commission européenne font apparaître un RAL de 207,3 milliards d’euros à la fin de l’année 2013, ce qui représenterait encore une augmentation de plus de 20 milliards en deux ans. Ce RAL constitue une source de rigidité forte pour le prochain cadre financier pluriannuel, puisque 18 % de l’enveloppe des paiements 2014-2020 devraient y être consacrés selon la Commission européenne. Il va contribuer à la constitution d’un pic des paiements en 2015-2016.

En effet, les paiements vont devoir couvrir, dans les premières années du cadre financier 2014-2020 :

– les paiements sur engagements pris avant le 31 décembre 2013, donc un peu plus de 200 milliards d’euros de restes à liquider, qui relèvent principalement de la politique de cohésion. Selon la Commission européenne, 40 % des paiements devraient être consacrés au RAL en 2014, 38 % en 2015 et 25 % en 2016 ;

– les avances des fonds structurels et du fonds de cohésion ;

– les paiements sur engagements pris après le 1er janvier 2014, importants dès 2014 pour les dépenses du premier pilier de la PAC et les dépenses administratives, et en progression à compter de 2015 pour les autres types de dépenses, compte tenu de la mise en œuvre des nouveaux programmes pluriannuels.

Continuer à pousser cette « boule », qui porte préjudice à la crédibilité des projets que soutient l’Union et n’est pas de bonne gestion, n’est donc plus possible.

Toutes les pistes pour y remédier doivent être étudiées, en particulier :

– tenter de limiter la progression du RAL avant 2014, ce qui suppose notamment de mobiliser davantage de paiements en 2012 et 2013 ;

– fixer à un niveau approprié les niveaux des engagements ainsi que celui des paiements pour 2014-2020 ;

– appliquer de manière rigoureuse les règles de dégagement d’office, selon lesquelles les crédits engagés sont « dégagés », et donc perdus, s’ils n’ont pas été couverts par un préfinancement ou par une demande de paiement au cours des deux années suivant leur engagement16 ;

– revoir les dispositifs d’avances. Ainsi, pour le FEADER, la Commission européenne propose un taux de préfinancement de 4 % et le président Van Rompuy un taux de 2 %, contre 7 % actuellement. Toutefois, il convient d’être prudent dans le recours à cette option et ses modalités de mise en œuvre, car la possibilité d’obtenir un préfinancement dès le début des programmes garantit aux États membres les moyens nécessaires pour accorder, dès le départ, leur soutien aux bénéficiaires.

Tant l’expérience que l’ampleur des défis que l’Union doit désormais relever plaident pour une flexibilité accrue du budget, à l’intérieur des rubriques et entre celles-ci. Les négociations relatives au cadre financier pluriannuel 2014-2020 et à l’accord interinstitutionnel sur la coopération et la bonne gestion financière offrent l’occasion de trouver un juste équilibre entre cette nécessaire souplesse et les principes de discipline budgétaire et de transparence des dépenses de l’Union.

À cet égard, vos Rapporteurs se félicitent des propositions que la Commission européenne formule dans le projet d’accord interinstitutionnel sur la coopération et la bonne gestion financière.

En effet, au-delà des modifications apportées aux instruments spéciaux (réserve d’aide d’urgence, Fonds européen d’ajustement à la mondialisation, Fonds de solidarité de l’union européenne, réserve pour crise agricole), qui ont déjà été abordées dans le présent rapport, la Commission européenne suggère d’amplifier la portée de l’instrument de flexibilité, dont l’objectif est de financer des dépenses imprévues et clairement définies. Pour cela, sa dotation maximale serait portée de 200 à 500 millions d’euros et la part non utilisée de l’instrument de flexibilité pourrait être mobilisée jusqu’à l’année « n+3 », contre « n+2 » aujourd’hui. Cette proposition doit être saluée, car le recours à l’instrument de flexibilité, très utile, ne doit pas être freiné par une insuffisance de fonds. En 2012, l’instrument de flexibilité a ainsi été mobilisé à hauteur de 153,3 millions d’euros au titre de la politique européenne de voisinage.

Par ailleurs, la Commission propose de mettre en place, au-delà des plafonds fixés par le cadre financier pour la période 2014-2020, une marge pour imprévus pouvant atteindre 0,03 % du revenu national brut de l’Union. Elle constituerait une sorte de dernier recours pour faire face à des circonstances imprévues. Sa mobilisation ne pourrait excéder, au cours d’une année donnée, le montant maximal après ajustement technique annuel du cadre financier et devrait être compatible avec le plafond des ressources propres. Elle devrait en outre être accompagnée d’une proposition de réaffectation dans le cadre du budget existant. La décision de recourir à cette marge serait prise conjointement par les deux branches de l’autorité budgétaire, le Conseil statuant à la majorité qualifiée et le Parlement européen à la majorité des membres qui le composent et des trois cinquièmes des suffrages exprimés.

Le principe même de cette marge pourrait recueillir l’assentiment du Parlement européen et du Conseil (bien que certains États, comme l’Allemagne, y soient opposés), mais ceux-ci seraient, à ce stade, divisés sur les modalités de mise en œuvre. Le Parlement européen a en effet souligné, dans sa résolution du 23 octobre 2012, que la mobilisation de la marge pour imprévus ne devait pas entraîner une compensation obligatoire des plafonds. De son côté, le président Van Rompuy, dans sa proposition du 13 novembre 2012, a précisé que « les montants rendus disponibles par la mobilisation de la marge pour imprévus sont entièrement prélevés sur les marges indiquées dans une ou plusieurs rubriques du cadre financier pour l’exercice financier en cours ou les exercices futurs. Les montants ainsi prélevés ne sont pas mobilisés au titre du cadre financier. Le recours à la marge pour imprévus n’occasionne pas de dépassement du total des plafonds de crédits d’engagement et de paiement qui y sont fixés pour l’exercice financier en cours et les exercices futurs ».

Il est également proposé de porter de 5 à 10 % le niveau de flexibilité législative, c’est-à-dire la possibilité de s’écarter d’un montant donné pour la durée totale du programme concerné, ce qui emporte l’adhésion du Parlement européen.

Au regard de l’expérience passée et des révisions qui ont concerné les accords interinstitutionnels, il apparaît toutefois utile d’aller plus loin, par exemple en prévoyant une flexibilité pour les plafonds des rubriques. La suggestion du Parlement européen de la fixer à hauteur de 5 % pourrait ainsi être utilement retenue.

Vos Rapporteurs souhaiteraient plus particulièrement que les marges du plafond des crédits d’engagement d’un exercice donné soient reportées sur l’exercice suivant et considérées comme constituant une marge globale du cadre financier.

Enfin, vos Rapporteurs soulignent la nécessité de mettre en œuvre l’engagement pris par les institutions européennes de réviser le règlement financier, afin de permettre le report des crédits non utilisés et du solde budgétaire.

Partant du constat que « le système de financement de l’Union européenne est dépassé », bilan partagé par vos Rapporteurs, la Commission européenne accompagne ses propositions relatives au volet « dépenses » du budget européen d’un projet de réforme du système de ressources propres, reposant sur l’affectation au budget européen d’une taxe sur les transactions financières et d’une ressource TVA profondément modifiée ainsi que sur la révision de l’ensemble des mécanismes de rabais.

Ses propositions ont reçu un soutien appuyé du Parlement européen. Ce dernier, ardent défenseur de la mise en place d’un « véritable système de ressources propres », a en effet réaffirmé à plusieurs reprises – dans ses résolutions du 8 juin 2011, du 13 juin 2012 et du 23 octobre 2012 – qu’il n’approuverait pas le règlement fixant le cadre financier pluriannuel si un accord n’était pas trouvé sur la réforme du système des ressources propres conformément aux propositions de la Commission européenne.

Il insiste par ailleurs sur le fait que le nouveau système doit mettre fin aux rabais et que, le cas échéant, un éventuel mécanisme de compensation ne peut qu’être provisoire et justifié par des critères économiques objectifs.

Il invite même la Commission européenne à présenter de nouvelles propositions relatives à l’introduction de nouvelles ressources propres s’il s’avérait que la mise en œuvre de ses projets actuels ne conduisait pas à une diminution importante de la part des contributions des États membres fondées sur le RNB dans le budget de l’Union.

Au Conseil, les discussions ont peu avancé sur le sujet, compte tenu des réticences de plusieurs États membres.

Le financement de l’Union a considérablement évolué depuis 1957. Après avoir reposé sur les contributions des États membres, le dispositif de financement s’est appuyé, à partir de 1970, sur un système de ressources propres garantissant l’autonomie du financement de l’Union. Si ce dispositif était au départ fondé principalement sur des ressources propres traditionnelles liées aux politiques communautaires – les prélèvements agricoles, les cotisations sur le sucre et les droits de douane, le développement progressif de ressources fondées sur la TVA puis, de plus en plus, sur le RNB a marqué un glissement vers un financement principalement basé sur des agrégats statistiques dépourvus de lien avec les priorités politiques de l’Union.

L’évolution de la composition des recettes du budget communautaire depuis 1958 est retracée ci-dessous.

EVOLUTION DE LA STRUCTURE DE FINANCEMENT DU BUDGET EUROPEEN DEPUIS 1958

Ainsi, aujourd’hui, les ressources propres traditionnelles17, constituées des droits de douane et des cotisations sur le sucre, ne représentent que 14 % environ du total des recettes du budget communautaire, tandis que les ressources TVA18 et RNB19 en représentent près de 85 %  la ressource RNB représentant près des ¾ des recettes, le solde étant constitué de diverses ressources dont le report du solde de l’exercice précédent.

Le graphique suivant montre la prépondérance de la ressource RNB.

STRUCTURE DE FINANCEMENT DU BUDGET EUROPEEN

Source : Commission européenne, projet de budget pour 2013.

En outre, l’actuelle ressource TVA est complexe et nécessite de remplir de nombreuses formalités administratives pour parvenir à une assiette harmonisée.

Au-delà de la complexité du système de financement, qui nuit à sa clarté et à sa compréhension, la prépondérance de la ressource RNB, qui est la ressource d’équilibre du budget, soulève plusieurs difficultés en ce qu’elle favorise un raisonnement en termes de retour et de solde net et qu’elle est totalement déconnectée des politiques menées par l’Union.

Parallèlement à l’évolution de la composition des ressources propres, des mécanismes de correction ont progressivement été mis en place en application des principes définis lors du sommet européen de Fontainebleau en juin 1984, et plus particulièrement de celui selon lequel « tout État membre supportant une charge budgétaire excessive au regard de sa prospérité relative est susceptible de bénéficier, le moment venu, d’une correction ». Ils constituent un ensemble de mesures résultant de négociations successives qui ont visé à ajouter de nouveaux éléments aux corrections existantes.

Il en résulte un dispositif particulièrement complexe qui prévoit :

– un rabais britannique : par dérogation au régime de droit commun des ressources propres, les deux tiers du déséquilibre budgétaire constaté entre les versements de recettes effectués par le Royaume-Uni (hors ressources propres traditionnelles) et les dépenses de l’Union sur le sol britannique lui sont remboursés. Cette charge, de l’ordre de 4 milliards d’euros en 201320, est assurée par les autres États membres, avec une exception accordée à quatre contributeurs nets qui bénéficient d’un « rabais sur le rabais ». L’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas et la Suède ne paient que 25 % de leur part normale dans le financement de la correction britannique. Aucune limitation dans le temps n’est prévue pour ces mécanismes ;

– une réduction du taux d’appel pour la ressource TVA accordée à quatre États membres pour la période 2007-2013 : l’Allemagne (0,15 %, le gain net sur la période est estimé à 7,4 milliards d’euros), l’Autriche (0,225 %, gain estimé à 2,7 milliards), les Pays-Bas et la Suède (0,10 % chacun, gain évalué à 200 millions d’euros) ;

– deux rabais, correspondant à une réduction brute de leurs contributions RNB et valables pour la période 2007-2013, bénéficient aux Pays-Bas à hauteur de 605 millions en euros constants 2004, et à la Suède à hauteur de 150 millions d’euros. À la différence du rabais britannique, ces deux pays participent au financement de leur propre chèque, ce qui réduit le montant net du chèque qui leur est effectivement versé ;

– un « mécanisme de correction caché » relatif aux frais de perception des ressources propres traditionnelles, qui sont établis sur la base d’un pourcentage fixe de l’ensemble des ressources propres traditionnelles perçues. Ce pourcentage, fixé à 10 % au début des années 1970, a été porté par le Conseil européen de Berlin de 1999 à 25 %. Les montants retenus ne correspondent ainsi pas aux frais de perception réels et peuvent donc être considérés comme un mécanisme de correction caché. Cette mesure profite aux États ayant des échanges internationaux développés, comme le Pays-Bas ou la Belgique.

Cette complexité s’accompagne d’un manque de lisibilité : le système actuel masque certains chèques réellement perçus par certains États, comme ceux résultant des taux réduits de TVA et de l’augmentation des frais de perception.

Surtout, ces dispositifs exceptionnels, au premier rang desquels le rabais britannique, s’avèrent injustes et injustifiés : ils n’ont plus lieu d’être.

En effet, le rabais britannique, accordé en 1984, intervenait dans un contexte marqué par plusieurs facteurs qui « pénalisaient » le Royaume-Uni : la part prépondérante de la PAC dans les dépenses communautaires (69 %) et de la ressource TVA dans les ressources de l’Union (57 %) ainsi que le fait que sa prospérité relative était inférieure à la moyenne européenne (93 % de la moyenne communautaire).

La situation a profondément changé depuis : en 2011, la PAC constitue 44 % des dépenses communautaires et la ressource TVA 11 % des ressources, tandis que le Royaume-Uni fait partie, avec un niveau de prospérité bien supérieur à la moyenne communautaire (plus de 110 %), des États les plus riches. Il se situe ainsi devant la France et l’Italie.

Certes, des aménagements ont été apportés au mécanisme de correction britannique par la décision ressources propres du 7 juin 2007, qui conduisent à une remise en cause progressive et marquent un infléchissement favorable.

Les modalités de calcul de la compensation britannique ont ainsi été révisées afin de prendre en compte la nécessité pour le Royaume-Uni d’apporter sa juste part au financement de l’élargissement dont il est l’un des plus ardents défenseurs. Le principe a été posé d’une exclusion de l’assiette de calcul du rabais britannique des dépenses d’élargissement, à l’exception de la politique agricole commune de marché et du développement rural. L’effort britannique sur la période 2007-2013 est gradué : de 20 % en 2009, la part des dépenses relatives à l’élargissement exclues du calcul du chèque a été progressivement augmentée pour atteindre 100 % à partir de 2011. En contrepartie de cet effort, la contribution supplémentaire du Royaume-Uni a été plafonnée à 10,5 milliards d’euros (prix 2004) sur la période 2007-2013.

Néanmoins, il convient désormais d’aller plus loin et de tirer pleinement parti de l’évolution engagée il y a cinq ans qui ouvrait une perspective de remise en cause pérenne du rabais britannique.

Si le rabais britannique est le mécanisme qui apparaît à première vue comme le plus contestable, il est loin d’être le seul. Ainsi, la Commission européenne a mis en évidence, dans le cadre des négociations sur le cadre financier pluriannuel, que plusieurs États membres étaient « sur-compensés » par rapport à leur richesse relative. Il en va ainsi de l’Autriche, du Danemark et des Pays-Bas.

M. Serge Guillon, conseiller du Premier ministre pour les affaires européennes, a ainsi souligné devant la mission d’information le paradoxe qui veut que l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Autriche et la Suède contribuent moins que leur part dans le RNB, alors que la France, l’Italie et l’Espagne sont des « sur-contributeurs », cette situation conduisant à des transferts des pays du Sud vers les pays du Nord.

Dès lors, il convient de revoir, si ce n’est de supprimer ces mécanismes de correction, au premier rang desquels le chèque britannique, qui suscite une cascade de demandes de rabais et autres ristournes. En témoigne la menace de veto brandie par le Danemark s’il n’obtient pas un chèque annuel de 150 millions d’euros.

Cela permettrait en outre de remédier à cette anomalie qui veut que la France soit le premier contributeur aux différents chèques avec, notamment, une contribution de 27 % au chèque britannique. Le coût annuel pour la France s’élève ainsi à près de 2,1 milliards d’euros, dont 1 milliard au titre des rabais et rabais sur le rabais, 423 millions pour les taux réduits de TVA, 133 millions pour les deux rabais forfaitaires et 540 millions pour l’augmentation des frais de perception.

Le système actuel est opaque, complexe et inéquitable. Le financement de l’Union ne peut en outre être considéré comme un mécanisme purement comptable dont les deux objectifs consistent à assurer un financement suffisant des dépenses et à prendre en compte un nombre croissant de mécanismes de correction. Il est tant d’envisager autrement le financement de l’Union.

S’appuyant sur les conclusions du réexamen intervenu à mi-parcours du cadre financier pluriannuel actuel, qui avait pour objectif, conformément à la demande du Conseil européen de décembre 2005, d’étudier « tous les aspects des dépenses communautaires, y compris la politique agricole commune, et des ressources, y compris le rabais britannique »21, la Commission européenne a présenté, en 2011, cinq textes visant à revoir le système des ressources propres.

Elle propose ainsi de mettre en place de nouvelles ressources propres au cours de la période 2014 – 2020, avec l’affectation au budget :

– d’une taxe sur les transactions financières ;

– d’une nouvelle ressource TVA, reposant sur la suppression de plusieurs exonérations et exceptions existantes.

La Commission européenne suggère également de réformer les mécanismes de correction.

En revanche, le plafond des ressources propres resterait fixé à 1,23 % du RNB pour les crédits de paiement et à 1,29 % pour les crédits d’engagement.

 

Projet de budget 2012

2020

 

Montant

(en milliards d’euros)

Part dans les ressources propres (en %)

Montant

(en milliards d’euros)

Part dans les ressources propres (en %)

Ressources propres traditionnelles

19,3

14,7

30,7

18,9

Contributions nationales existantes

dont ressource propre TVA

dont ressource propre RNB

111,8

14,5

97,3

85,3

11,1

74,2

65,6

65,6

40,3

40,3

Nouvelles ressources propres

dont nouvelle ressource TVA

dont taxe sur les transactions financières

66,3

29,4

37,0

40,8

18,1

22,7

TOTAL

131,1

100,0

162,7

100,0

Source : Commission européenne.

Sur le fond, vos Rapporteurs sont favorables au rééquilibrage de la structure de financement grâce à la mise en place de nouvelles ressources propres. Il faut en effet restaurer le lien qui doit exister entre les ressources et les politiques menées par l’Union et affermir le budget européen. Surtout, il est impératif de sortir de la logique des « retours » qui, non seulement exacerbe les positions des États membres, mais surtout dévoie le sens même des négociations budgétaires qui n’ont plus pour objet de définir des priorités politiques et d’en garantir la mise en œuvre mais s’apparentent à une « discussion de marchands de tapis ».

En outre, la mise en place de nouvelles ressources propres doit permettre de réduire les contributions des États membres, ainsi que l’a mis en évidence M. Manfred Bergmann, directeur chargé de la fiscalité indirecte à la Commission européenne, lors du déplacement de la mission d’information à Bruxelles. Elle devrait offrir aux gouvernements nationaux une marge de manœuvre supplémentaire et, ainsi contribuer à l’effort général d’assainissement budgétaire.

Si les objectifs sont partagés, on peut toutefois s’interroger sur les choix faits par la Commission européenne.

Avec la révision en profondeur de la ressource TVA, la Commission affirme poursuivre comme principal objectif la simplification des contributions des États membres, mais le dispositif pourrait se révéler être d’une complexité redoutable (cf. infra b.).

L’introduction d’une nouvelle ressource propre répond à d’autres exigences, détaillées dans le document sur le réexamen du budget.

CITERES DEFINIS DANS LE DOCUMENT SUR LE REEXAMEN DU BUDGET POUR LA MISE EN PLACE DE NOUVELLES RESSOURCES PROPRES

1. Elles devraient être plus étroitement liées à l’acquis et aux objectifs de l’Union concernant le renforcement de la cohérence et de l’efficacité de l’ensemble du budget dans la réalisation des priorités politiques de l’UE.

2. Elles devraient être de nature transfrontalière et se fonder sur un système couvrant l’ensemble du marché intérieur.

3. Elles devraient être calculées sur la base d’une assiette harmonisée, de manière à garantir une application uniforme de la ressource dans l’ensemble de l’Union.

4.  Les recettes d’une nouvelle ressource devraient, dans la mesure du possible, être perçues directement par l’Union en dehors des budgets nationaux.

5. Elles devraient être appliquées de manière équitable et ne pas exacerber la question des corrections.

6. Leur impact cumulé sur certains secteurs devrait être pris en compte.

7. Elles devraient veiller à ne pas imposer une nouvelle et lourde responsabilité administrative à l’Union en matière de perception.

La Commission européenne a examiné, au regard de ces critères, plusieurs pistes : une taxe sur les activités financières, une taxe sur les transactions financières, une nouvelle ressource TVA, des recettes tirées de la mise aux enchères dans le cadre du système d’échanges de quotas d’émission de l’Union européenne, une taxe liée au transport aérien, une taxe sur l’énergie et, enfin, un impôt de l’Union sur le revenu des sociétés.

Hors le sujet spécifique de la TVA, le choix a porté sur la taxe sur les transactions financières car elle est apparue comme la mieux à même de répondre aux critères définis ci-dessus, et surtout, ainsi que l’a souligné M. Manfred Bergmann, à l’objectif de rendement et à la condition d’une harmonisation suffisante.

Pour autant, vos Rapporteurs sont d’avis que l’étude des autres pistes ne doit pas être abandonnée, notamment celle relative au système d’échanges de quotas d’émission. Ainsi que l’a souligné M. Philippe Léglise-Costa, conseiller du président de la République pour les questions européennes, cette option apparaît comme la plus logique et une des plus simples à affecter au budget de l’Union. Pour autant, la Commission européenne, devançant les réticences de la Pologne et de l’Allemagne, n’a pas approfondi cette piste.

La Commission propose de mettre en place une nouvelle ressource TVA qui, à la différence de la précédente, ne serait pas une contribution des États membres ayant pour base de calcul l’assiette TVA, mais un prélèvement à un taux fixe n’excédant pas 2 % de la valeur nette des biens et services, des acquisitions intracommunautaires de biens et des importations de biens soumis à un taux normal de TVA dans chaque État membre.

Elle devrait s’accompagner de la suppression de plusieurs exonérations et exceptions qui nuisent au bon fonctionnement du marché intérieur et aux mesures destinées à réduire la fraude à la TVA.

La Commission européenne estime que cette nouvelle ressource pourrait permettre d’abonder le budget européen de plus de 29 milliards d’euros, contre 15 milliards d’euros environ pour l’actuelle ressource TVA.

Cette proposition présente le triple avantage d’assurer un lien avec les politiques de l’Union en donnant un nouvel élan au développement du marché intérieur via une harmonisation accrue des régimes nationaux de TVA, de garantir une égalité de traitement et, enfin, d’aller dans le sens d’un allègement des charges administratives des États.

Toutefois, ses modalités de mise en œuvre doivent être approfondies, en particulier la méthodologie proposée, qui demeure trop complexe. Le président Van Rompuy suggère ainsi que le Conseil européen demande la poursuite des travaux, avec comme objectifs la mise en place d’un mécanisme simple et transparent, un renforcement du lien entre la politique de l’Union en matière de TVA et les recettes de TVA réelles et l’égalité de traitement entre les contribuables dans tous les États membres.

Au-delà de son caractère d’« usine à gaz », selon le qualificatif employé par le Représentant permanent de la France auprès de l’Union européenne Philippe Etienne, la nouvelle TVA présente l’inconvénient majeur de ne pas être versée directement au budget de l’Union. Or, l’esprit des traités veut que les ressources du budget européen l’abondent directement, sans transiter par les budgets nationaux.

Il est d’ailleurs révélateur que, le Parlement européen, dans sa résolution du 23 octobre 2012 adoptée sur le fondement du rapport de M. Jean-Luc Dehaene22, tout en approuvant la proposition de la Commission européenne, invite celle-ci à déposer des propositions concrètes pour la poursuite de la réforme de la ressource propre TVA afin qu’elle soit directement versée au budget de l’Union dès la période 2014-2020 ou lors d’une révision ultérieure du système des ressources propres.

Dans sa proposition de juin 2011, modifiée en novembre 2011, la Commission européenne suggère de mettre en place une ressource propre fondée sur une taxe sur les transactions financières, dont elle a défini les contours juridiques, le 28 septembre 2011, dans sa proposition de directive du Conseil établissant un système commun de taxe sur les transactions financières et modifiant la directive 2008/7/CE (COM (2011), 594 final).

LES PRINCIPALES CARACTERISTIQUES DE LA TAXE SUR LES TRANSACTIONS FINANCIERES DEFINIES DANS LA PROPOSITION DE DIRECTIVE DU 28 SEPTEMBRE 2011

● Une assiette large, qui vise l’ensemble du marché secondaire des actions et des obligations ainsi que l’intégralité des produits dérivés. Seraient toutefois exclues les transactions réalisées avec la Banque centrale européenne et les banques centrales nationales afin d’éviter toute incidence négative sur les possibilités de refinancement des établissements financiers ou sur les politiques monétaires en général.

● Des taux faibles et différenciés : si chaque État membre fixe le taux de la taxe, celui-ci ne peut être inférieur à 0,1 % pour les actions et les obligations et à 0,01 % pour les autres transactions financières.

● L’application du principe de résidence : pour qu’une transaction financière soit imposable dans l’Union, l’une des parties à la transaction doit être établie sur le territoire d’un État membre. Il s’agirait ainsi de réduire les risques de fraude, d’évasion et d’abus.

La Commission, qui évalue le produit de cette nouvelle taxe à 57 milliards d’euros, suggère que deux tiers de ce produit, soit 38 milliards d’euros, abondent le budget de l’Union. Elle souhaite en outre que la taxe sur les transactions financières soit, dès sa mise en œuvre, partiellement utilisée comme ressource propre.

Devant les réticences exprimées par plusieurs États membres au sujet de cette nouvelle taxe et l’impossibilité d’obtenir un consensus, onze pays23, soit davantage que les neuf que requiert le traité, ont exprimé le souhait de la mettre en œuvre dans le cadre d’une coopération renforcée.

Sur la base de cette demande, la Commission a présenté, le 23 octobre 2012, une proposition de décision du Conseil autorisant une coopération renforcée dans le domaine de la taxe sur les transactions financières, laquelle devra recueillir l’approbation du Conseil à la majorité qualifiée et celle du Parlement européen. Ensuite, les onze États membres participant à la coopération renforcée seront saisis d’une proposition spécifique visant à la création de la taxe sur les transactions financières.

La coopération renforcée n’offre que deux précédents et celle qui s’engage est la première en matière de fiscalité, domaine où les avancées butent sur la règle de l’unanimité. Son succès revêt donc une importance particulière.

À cet égard, la stratégie du Royaume-Uni pose question, puisque, au-delà de son refus de participer à la coopération renforcée, il devrait se battre contre l’adoption, à la majorité qualifiée, de la coopération renforcée, selon les informations recueillies auprès de M. Philippe Etienne, Représentant permanent de la France auprès de l’Union européenne, et confirmées par M. Manfred Bergmann, qui a indiqué qu’» il n’était pas certain que la majorité qualifiée soit obtenue au sein du Conseil ».

En tout état de cause, il convient de souligner que la question de la création de la taxe sur les transactions financières est abordée de manière distincte de celle de son affectation au budget. Si un accord semble possible à moyen terme sur le premier point, il n’en va pas de même sur le second, plusieurs États y étant résolument opposés. C’est notamment le cas de l’Allemagne, dont le responsable de ces questions à la Représentation permanente de la République fédérale d’Allemagne auprès de l’Union européenne, M. Alexander Schoenmakers, a clairement indiqué à la mission d’information que son pays était favorable à la création de la taxe, mais opposé à ce qu’elle constitue, en tout ou en partie, une ressource propre du budget.

Pour autant, il convient de souligner que la proposition du président Van Rompuy indique que, dès son entrée en vigueur, le système commun relatif à la taxe sur les transactions financières sert de base à une nouvelle ressource propre pour le budget de l’Union, la nouvelle ressource abondant le budget à hauteur des deux tiers des montants perçus par les États membres. La ressource fondée sur le RNB des États participants serait réduite en conséquence. Il précise très clairement que la disposition n’aura pas d’incidence sur les États non participants, ni sur le calcul de la correction en faveur du Royaume-Uni.

Royaume-Uni

3,6

Allemagne

2,5

Pays-Bas

1,05

Suède

0,35

Source : Commission européenne.

Par ailleurs, les frais de perception au titre des ressources propres traditionnelles seraient ramenés de 25 à 10 %, comme cela était le cas jusqu’en 2000.

Les membres du Conseil sont très divisés sur ce sujet. Les États bénéficiaires de chèque, au premier rang desquels le Royaume-Uni qui refuse toute discussion, sont réticents à revoir le système. S’y ajoute le Danemark, qui exige un chèque annuel de 150 millions d’euros. Au contraire, la majorité des autres États sont favorables à une évolution de ce système, au premier rang desquels la France, l’Italie, l’Espagne et la Pologne, qui sont les principaux contributeurs au chèque britannique. Plusieurs États demandent que les futurs rabais ne soient pas calculés sur les plafonds du cadre financier mais sur les budgets réels.

Le président Van Rompuy propose d’exclure de l’assiette du rabais britannique les dépenses de développement rural, de prévoir des corrections forfaitaires temporaires pour l’Allemagne (2,8 milliards d’euros), les Pays-Bas (1,15 milliard) et la Suède (325 millions), de préciser que tous les États membres doivent participer à l’ensemble des corrections à proportion de leur RNB et de ramener la part des frais de perception des ressources propres traditionnelles de 25 à 15 %. Ainsi, tous les États membres seraient appelés à cofinancer tous les rabais, y compris le leur.

Compte tenu du caractère inéquitable, complexe et opaque du « mille-feuille correctif » actuel, vos Rapporteurs prônent une suppression des mécanismes de correction, corollaire logique de la mise en place d’un système de financement reposant sur de véritables ressources propres.

À défaut d’une suppression immédiate, une remise à plat complète s’impose allant dans le sens d’une plus grande équité, d’une limitation à la durée d’un cadre financier et permettant, autant que possible, de sortir d’une logique de « retour ». S’agissant des frais de perception, le retour au taux de 10 % tel que proposé par la Commission européenne apparaît comme le plus pertinent.

ADDENDUM

Postérieurement à la réunion de votre Commission le 20 novembre 2012, le président Van Rompuy a soumis aux chefs d’État et de gouvernement, lors du Sommet européen des 22 et 23 novembre 2012, une nouvelle proposition qui n’a toutefois pas emporté l’adhésion du Conseil européen.

En l’état des informations transmises à vos Rapporteurs, les grandes lignes de cette proposition seraient les suivantes.

Le montant global serait maintenu à 984 milliards en euros constants, 1 010 milliards en incluant le FED, mais la répartition entre rubriques serait légèrement revue au profit des politiques agricole et de cohésion.

Le tableau ci-dessous met en regard la première proposition du président Van Rompuy, celle du 13 novembre 2012, et la dernière en date, celle du 23 novembre, dont le détail n’a pu être transmis aux Rapporteurs.

(en engagements et en milliards d’euros constants 2011)

Proposition du 13 novembre 2012

Proposition du 23 novembre 2012

Croissance intelligente et inclusive

dont croissance et compétitivité

dont cohésion

463

153

309

460

140

320

Croissance durable : ressources naturelles

365

373

Sécurité et citoyenneté

18,5

17

L’Europe dans le monde

65,5

62,5

Administration

62,5

62,5

Total cadre financier

973

973

Instruments spéciaux

11

11

Total

984

984

OBSERVATIONS DE M. MARC LAFFINEUR,

CO-RAPPORTEUR

Il est nécessaire de dépasser les égoïsmes nationaux dans la négociation du cadre financier ; à défaut c’est le projet européen même qui est remis en cause.

Toutefois, le budget européen doit refléter un équilibre entre, d’une part, les défis que l’Union européenne doit relever en matière de croissance économique, de compétitivité et de solidarité et, d’autre part, les contraintes budgétaires qui pèsent sur les États membres. Dès lors, la proposition de la Commission européenne qui revient à augmenter le prélèvement sur recettes français de 25 % pour le porter de 20 milliards d’euros en 2013 à plus de 25 milliards d’euros en 2020 – ce qui est difficilement conciliable avec un objectif de réduction et de maîtrise des déficits publics – doit être revue à la baisse, en veillant à ce que les grands équilibres du budget soient respectés.

Aussi, un montant total de l’ordre de 960 milliards d’euros, entendu sur le périmètre large du cadre financier, semble à même de garantir à la fois le financement des priorités européennes et la limitation de la progression du prélèvement sur recettes autour de 22-23 milliards d’euros en 2020.

Cela apparaît d’autant plus prudent que, si la France s’engage actuellement sur un montant de dépenses, elle n’a aucune assurance sur l’évolution du système de ressources propres.

À cet égard, il convient de souligner que, si une nouvelle décision relative aux ressources propres était effectivement adoptée – et ce quel que soit son contenu final (modification du nombre ou du champ des rabais, réforme de la ressource fondée sur la TVA, révision des frais de perception, mise en place d’une nouvelle ressource propre fondée sur une taxe sur les transactions financières), elle ne pourrait entrer en vigueur, au plus tôt, qu’en 2016, compte tenu des délais nécessaires à sa ratification par l’ensemble des États membres. Un certain retard risque en outre d’être pris, car le volet « ressources propres » du budget européen est celui sur lequel les négociations ont, pour l’instant, le moins avancé. Par conséquent, la réforme du système des ressources propres, malgré son probable effet rétroactif, ne pourrait avoir d’impact sur le prélèvement sur recettes payé au titre des années 2014 et 2015, qui doivent être consacrées au redressement des finances publiques de la France.

La révision de la proposition de la Commission européenne à 960 milliards d’euros apparaît possible sans remise en cause des priorités de l’Union européenne. Le schéma de la Commission affiche en effet des rythmes de progression des engagements très – sans doute trop – élevés s’agissant des politiques nouvelles d’infrastructures, dont la dotation progresserait de 8 à 40 milliards en euros constants (50 milliards en incluant le Fonds de cohésion), 45 milliards en euros courants, et de recherche et d’innovation, dont l’enveloppe augmenterait de 20 milliards d’euros pour atteindre 80 milliards en euros constants (90 milliards en euros courants). Il semblerait qu’il existe aussi quelques marges de manœuvre sur la politique de cohésion, qui doit davantage tenir compte de l’enrichissement relatif des États membres et des régions. Les dépenses administratives, qui connaissent une progression soutenue, de plus de 10 %, pour atteindre 63 milliards en euros constants, doivent également être réexaminées, à la lueur, en particulier, de la réforme du statut du personnel des institutions européennes. Le juste calibrage des dépenses administratives ne doit, de toute manière, pas être prétexte à la remise en cause du siège du Parlement européen à Strasbourg. Par ailleurs, les instruments spéciaux, placés hors des plafonds du cadre financier, pourraient estimés de manière plus juste. En tout état de cause, ce n’est pas la politique agricole commune, dont la Commission européenne propose déjà de geler les moyens en valeur, qui doit servir de variable d’ajustement.

S’agissant plus particulièrement de la mise en place d’un cadre commun stratégique commun qui regrouperait le FEDER, le FSE, le Fonds de cohésion, le FEADER et le FEAMP, cette mesure destinée à améliorer la cohérence entre les sources de financement, va dans le bon sens. Compte tenu des dérives dénoncées par la Cour des comptes européenne dans la gestion des fonds, la mise en place des contrats de partenariat et le renforcement de leur conditionnalité apparaissent justifiés. Il en va ainsi de la conditionnalité macro-économique, qui vise à ce que l’efficacité des dépenses ne soit pas compromise par des politiques macro-budgétaires contraires aux engagements pris par les États dans le cadre des procédures de surveillance budgétaire et économique. Sous réserve d’une mise en œuvre éclairée, caractérisée par la prise en compte de l’ensemble des données nationales et régionales et par le principe de proportionnalité, le dispositif peut en effet constituer une mesure incitative en faveur d’une bonne gestion.

C’est pourquoi des propositions de conclusions prônant d’une part, une limitation à 960 milliards d’euros de l’enveloppe comprenant le cadre financier pluriannuel, les projets ITER et GMES et les instruments spéciaux et, d’autre part, le renforcement de la conditionnalité macroéconomique, ont été soumises par votre Rapporteur à la commission des Affaires européennes.

TRAVAUX DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

La Commission s’est réunie le 20 novembre 2012, sous la présidence de Madame Danielle Auroi, Présidente, pour examiner le présent rapport d’information.

L’exposé des rapporteurs a été suivi d’un débat.

« Mme Estelle Grelier, co-rapporteure. S’agissant du projet de conclusions qui vous est soumis, Marc Laffineur et moi-même divergeons sur deux points. Tout d’abord, sur le montant global du cadre financier pluriannuel, j’estime que la Commission européenne a évalué au plus juste les besoins et que nous devons suivre sa proposition à 1 061 milliards d’euros, alors que Marc Laffineur propose de limiter le montant du cadre financier pluriannuel à 960 milliard d’euros. Ensuite, sur la conditionnalité macroéconomique, nous ne sommes pas du tout d’accord. Je pense en effet qu’il n’y a aucune raison de pénaliser les régions d’un pays en ne leur versant pas leurs fonds structurels au motif que l’État ne respecte pas les engagements qu’il a pris en matière de politique budgétaire et économique.

M. Marc Laffineur, co-rapporteur. Pour ma part, je pense que la généralisation de la conditionnalité macroéconomique est une bonne chose : il est nécessaire de poser des contraintes pour être sûrs que les États respectent leurs engagements. Le retrait du triple A de la France par l’agence Moody’s hier soir en témoigne.

Mme la Présidente Danielle Auroi. Dans l’ensemble, je suis en phase avec vos conclusions : il est nécessaire de doter l’Union européenne d’un budget suffisant pour répondre aux demandes ; il est paradoxal de lui demander davantage et de lui accorder moins de moyens.

J’éprouve toutefois des réserves à propos d’ITER, évoqué aux points 2 et 6 de vos conclusions. Mettre un coup d’arrêt à ce programme de recherche permettrait d’économiser les 650 millions d’euros votés en avril dernier. De plus en plus de questions se posent après la catastrophe intervenue au Japon et le passage de l’ouragan Sandy, qui a causé l’apparition de microfissures sur nombre de centrales nucléaires américaines. Il faut privilégier d’autres types de recherches, notamment en regardant du côté des énergies renouvelables. Et les 650 millions libérés pourraient être utilisés pour conforter les fonds de cohésion. Je ne soutiendrai donc pas les dispositions concernant ce programme.

M. Lionnel Luca. Je m’associe aux propos de Marc Laffineur : même si l’on souhaite toujours que l’Europe soit efficace, la réalité s’impose aux États membres ; il est impossible de leur demander d’accomplir des efforts budgétaires et de faire comme si l’Union européenne pouvait s’en abstenir.

Il serait impossible de rayer d’un trait de plume les 650 millions d’euros de crédits d’ITER, avec toutes les conséquences néfastes que cela aurait sur les territoires, notamment en matière d’emploi. Mme la Présidente a sans doute voulu lancer une boutade.

Pourriez-vous nous donner quelques précisions sur le dossier Erasmus, à propos duquel, quotidiennement, nous lisons des informations et nous entendons des prises de position du Gouvernement ?

M. Philip Cordery. À la veille de cette réunion du Conseil européen, je suis assez inquiet. Les propositions de conclusions vont dans la bonne direction, elles sont de nature à redonner des marges de manœuvre à l’Union.

Il faut rompre avec une vision purement comptable du budget européen, qui est aussi porteur de croissance, de solidarité et de bénéfices indirects.

Sur le point 14, je partage la position d’Estelle Grelier puisque les fonds structurels permettent aussi de soutenir la croissance et contribuent par conséquent à la sortie de crise. Il ne faut pas infliger une double peine aux États concernés en les privant de fonds structurels.

Quant au point 2, il ne concerne pas seulement ITER mais l’enveloppe budgétaire globale.

La position de la Commission européenne mérite d’être soutenue car le Gouvernement s’est engagé à promouvoir une politique de croissance ambitieuse au niveau européen, à maintenir la politique de cohésion et la politique agricole commune. Je ne vois pas comment un budget en baisse permettrait de concilier tous ces objectifs ; il faudrait que M. Laffineur nous explique.

Mme Chantal Guittet. Il faut effectivement doter l’Union européenne de crédits suffisants pour soutenir la croissance et la cohésion.

Un accord à vingt-six, sans le Royaume-Uni, est-il envisageable ? Quelles en seraient les conséquences ?

Parmi les ressources propres possibles, outre la taxe sur les transactions financières, pense-t-on à une fiscalité écologique ?

M. Jérôme Lambert. Je remercie les rapporteurs pour ce travail bien structuré et très compréhensible. La question du cadre budgétaire est au cœur de tous les enjeux des années à venir ; elle conditionne les politiques sur la base desquelles l’action de l’Europe sera jugée. Nous vivons donc un moment crucial.

La question des ressources propres de l’Union, en particulier, est essentielle. Il ne s’agit pas d’accroître indéfiniment les dépenses européennes mais de donner une lisibilité à son budget, à travers divers impôts européens, afin que les citoyens ressentent l’intérêt et aussi le poids de l’Europe. De gros problèmes restent à accomplir en la matière ; nous le disons depuis des années et c’est le moment de le réaffirmer.

S’agissant du point 14 des conclusions, un État en difficulté est déjà sanctionné par les marchés financiers, bon nombre de pays européens le vivent actuellement. Ajouter une couche en supprimant des fonds structurels serait incorrect. Je partage, moi aussi, la position d’Estelle Grelier sur ce sujet.

M. Arnaud Richard. Vous avez très rapidement évoqué la rubrique 1 A. Quel degré d’importance prêtez-vous à l’enjeu de la compétitivité ?

C’est effectivement du projet européen dont il est question et pas uniquement d’un document financier.

D’une certaine façon, votre analyse confirme que, si l’opération du pacte pour la croissance et l’emploi a suscité beaucoup d’enthousiasme fin juin, tout devient plus compliqué quand il s’agit de négocier le budget.

Je ne comprends pas que les crédits non consommés soient ainsi réinjectés globalement alors qu’ils obéissent en principe à des règlements spécifiques.

La PAC, qui consiste principalement en des subventions directes aux agriculteurs, est-elle encore une politique de croissance ?

Si les États ne sont pas en mesure de trouver un accord, les investissements seront-ils interrompus ? Serait-ce compatible avec la volonté affichée dans le pacte pour la croissance et l’emploi ?

M. Marc Laffineur, co-rapporteur. L’accord sur ce texte doit se faire à l’unanimité. Les projets de budget rectificatif pour 2012 et de budget pour 2013 font l’objet d’une nouvelle proposition de la Commission européenne. La réflexion sur la fiscalité écologique n’a, pour l’instant, pas semblé prioritaire aux yeux de la Commission européenne. S’agissant d’ITER, je suis en désaccord avec la présidente de notre commission car la satisfaction des objectifs de lutte contre le réchauffement climatique passe par l’énergie nucléaire. Mme Estelle Grelier et moi avons des divergences sur le budget communautaire car je considère que le respect de nos engagements implique une gestion rigoureuse. L’annonce de l’abaissement de la notation de la France, hier soir, vient illustrer ce point. Aussi, je refuse l’idée d’une augmentation de 25 % de la contribution française au budget de l’Union européenne.

Mme Estelle Grelier, co-rapporteure. Le prélèvement sur recettes aurait dû faire l’objet d’un débat parlementaire. ITER résulte d’un mécanisme international complexe et nous n’avons pas les moyens de sortir de ce projet. S’agissant du débat sur le montant de 1 061 ou 960 milliards d’euros, la commission connaît les flux nécessaires au financement des programmes. Nous devons également réfléchir à la part de la taxe sur les transactions financières qui devrait être affectée au budget de l’Union européenne, car cet impôt repose sur une base dynamique. La politique de cohésion ambitieuse, la politique agricole commune à laquelle nous ne devons pas toucher et la politique de croissance exigent une enveloppe de 1 061 milliards d’euros. Je note que M. Alain Lamassoure, président de la commission du budget du Parlement européen, a utilisé le programme Erasmus comme exemple de la nécessité d’aller au bout du bout du financement européen. Il s’agit avant tout d’une opération de communication et je n’ai aucune inquiétude réelle sur le financement d’Erasmus et du fonds social européen. Il voulait surtout montrer que les demandes financières du Parlement européen pour 2012 étaient fondées. S’agissant de la taxe sur les flux financiers et de l’attitude des Britanniques, je crois que cela illustre le nécessaire assouplissement des modes de gouvernance. Une fiscalité écologique pourrait faire partie, effectivement, d’un nouveau système de ressources propres. J’espère que lorsque Mme Merkel est allée à Londres elle n’a pas obtenu l’accord des Britanniques sur le cadre financier, en échange du maintien de leur rabais, dont plus personne ne comprend le bien fondé. Il est nécessaire de réorienter les dépenses de l’Union européenne et je note que l’enveloppe en faveur de la recherche et de l’innovation passerait de 56 à 80 milliards d’euros et le soutien aux PME de 1,3 à 2,4 milliards d’euros. La politique agricole commune est-elle une politique de croissance ? Cela est un bon sujet. Je pense que c’est une politique importante, qui génère de la croissance mais parallèlement constitue un élément de fossilisation du projet européen. L’absence de cadre financier pluriannuel posera surtout un problème lorsque les bases légales des politiques engagées arriveront à expiration. Mais nous comptons sur les talents de négociateur du Gouvernement.

Mme Sandrine Doucet. Erasmus a servi de produit d’appel mais il ne représente que 1 % des 9 milliards d’euros qui manquent au budget européen. La situation est très différenciée selon les pays. La France est en capacité d’assurer le paiement des bourses jusqu’en septembre 2013. Cette question soulève des interrogations néanmoins sur le projet Erasmus pour tous. Si en France les facultés ont annoncé des difficultés de paiement, ces dernières sont sans doute liées à des considérations locales.

La Présidente Danielle Auroi. Je mets au vote les points 2 et 4 des conclusions sur le cadre financier pluriannuel 2014-2020 où nos rapporteurs présentent des propositions différentes. »

La Commission a ensuite adopté les conclusions sur les perspectives financières pluriannuelles, dans la version proposée par Mme Estelle Grelier, dont le texte figure ci-après.

Sous réserve des observations formulées dans les conclusions, la Commission a approuvé la proposition de règlement du Conseil fixant le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020 présentée par la Commission européenne le 29 juin 2011 (COM (2011) 398 final ; E 6401) et sa modification en date du 6 juillet 2012 (COM (2012) 388 final, E 7509) ; le projet d’accord interinstitutionnel entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission sur la coopération en matière budgétaire et la bonne gestion financière présenté par la Commission européenne le 29 juin 2011 (COM (2011) 403 final, E 6402) ; la proposition de décision du Conseil relative au système des ressources propres de l’Union européenne présentée par la Commission européenne le 29 juin 2011 (COM (2011) 510 final, E 6405) et sa modification en date du 9 novembre 2011 (COM (2011) 739 final, E 6826) ; la proposition de règlement du Conseil portant mesures d’exécution du système des ressources propres de l’Union européenne présentée par la Commission européenne le 29 juin 2011 (COM (2011) 511, E 6406) et sa modification en date du 9 novembre 2011 (COM (2011) 740, E 6832) ; la proposition de règlement du Conseil relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition des ressources propres traditionnelles et de la ressource propre fondée sur le RNB et aux mesures visant à faire face aux besoins de trésorerie présentée par la Commission européenne le 29 juin 2011 (COM (2011) 512 final, E 6407) et sa modification du 9 novembre 2011 (COM (2011) 742, E 6827) ; la proposition de règlement du Conseil relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition de la ressource propre fondée sur la taxe sur la valeur ajoutée présentée le 9 novembre 2011 par la Commission européenne (COM (2011) 737, E 6805) ; la proposition de règlement du Conseil relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition de la ressource propre fondée sur la taxe sur les transactions financières présentée le 9 novembre 2011 par la Commission européenne (COM (2011) 738, E 6806).

CONCLUSIONS ADOPTEES PAR LA COMMISSION

La Commission,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu les articles 311 et 312 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la proposition de règlement du Conseil fixant le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020 présentée par la Commission européenne le 29 juin 2011 (COM (2011) 398 final) et sa modification en date du 6 juillet 2012 (COM (2012) 388 final),

Vu le projet d’accord interinstitutionnel entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission sur la coopération en matière budgétaire et la bonne gestion financière présenté par la Commission européenne le 29 juin 2011 (COM (2011) 403 final),

Vu la proposition de décision du Conseil relative au système des ressources propres de l’Union européenne présentée par la Commission européenne le 29 juin 2011 (COM (2011) 510 final) et sa modification en date du 9 novembre 2011 (COM (2011) 739 final),

Vu la proposition de règlement du Conseil portant mesures d’exécution du système des ressources propres de l’Union européenne présentée par la Commission européenne le 29 juin 2011 (COM (2011) 511) et sa modification en date du 9 novembre 2011 (COM (2011) 740),

Vu la proposition de règlement du Conseil relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition des ressources propres traditionnelles et de la ressource propre fondée sur le RNB et aux mesures visant à faire face aux besoins de trésorerie présentée par la Commission européenne le 29 juin 2011 (COM (2011) 512 final) et sa modification du 9 novembre 2011 (COM (2011) 742),

Vu la proposition de règlement du Conseil relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition de la ressource propre fondée sur la taxe sur la valeur ajoutée présentée le 9 novembre2011 par la Commission européenne (COM (2011) 737),

Vu la proposition de règlement du Conseil relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition de la ressource propre fondée sur la taxe sur les transactions financières présentée le 9 novembre 2011 par la Commission européenne (COM (2011) 738),

Vu les résolutions du Parlement européen du 8 juin 2011, du 13 juin 2012 et du 23 octobre 2012 relatives au cadre financier pluriannuel et au système des ressources propres,

Vu les conclusions du Conseil européen des 28 et 29 juin 2012,

Considérant que l’Union européenne doit se doter des moyens nécessaires pour atteindre ses objectifs et mener à bien ses politiques,

Considérant que l’article 311 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dispose que le budget de l’Union européenne est intégralement financé par des ressources propres,

Considérant que les interventions budgétaires de l’Union doivent être réservées aux domaines où l’action communautaire se révèle plus efficace que les interventions nationales et apporte une réelle valeur ajoutée,

Considérant qu’il ne faut pas réduire les négociations sur le cadre financier pluriannuel à des considérations nationales en termes de « juste retour » et qu’il convient, au contraire, d’affirmer la dimension européenne du budget de l’Union faite d’ambition et de solidarité ;

Considérant que le budget communautaire est un instrument du gouvernement économique européen au même titre que le renforcement de la coordination des politiques économiques nationales,

Considérant que l’Union ne saurait s’exonérer de l’effort de maîtrise des dépenses publiques auquel les États membres doivent se plier,

Considérant que le budget européen doit respecter les principes budgétaires d’unité et de sincérité ainsi que les principes de bonne gestion financière, alliant efficacité et efficience,

1. Souligne l’impératif d’un cadre financier pluriannuel responsable, tenant compte, d’une part, des défis que l’Union européenne doit relever en matière de croissance économique, de compétitivité et de solidarité ainsi que des nouvelles compétences qui lui ont été confiées par le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et, d’autre part, des contraintes budgétaires qui pèsent sur les États membres ;

2. Soutient la proposition de la Commission européenne d'un montant de 1 061 milliards d'euros pour l'enveloppe comprenant le cadre financier pluriannuel, les projets ITER et GMES et les instruments spéciaux ;

3. Rappelle que le budget européen, qui est à titre principal un budget d’investissement, constitue un outil pertinent de soutien à la croissance et à l’emploi, en particulier dans un contexte économique difficile. En conséquence, soutient la priorité donnée, conformément aux objectifs de la stratégie Europe 2020, aux rubriques « Croissance intelligente » et « Croissance durable : ressources naturelles » mais demande à ce que les moyens destinés à la rubrique « Croissance intelligente », en particulier ceux destinés au mécanisme pour l’interconnexion en Europe, soient réalistes et évalués au plus juste ;

4. Encourage le recours à des instruments financiers innovants comme les « project bonds » mais insiste sur la nécessité d’assurer le contrôle parlementaire de ces outils qui se développent en dehors du cadre financier classique ;

5. Invite, compte tenu de la priorité qui doit être accordée au soutien à la croissance et à la compétitivité, à réaliser un effort particulier en faveur du soutien à la recherche et à l’innovation mais également à faciliter l’accès des chercheurs, en particulier français, aux programmes européens ;

6. Demande que le financement de deux projets majeurs pour l’avenir industriel de l’Union, celui de réacteur thermonucléaire expérimental (ITER) et celui de surveillance spatiale pour l’environnement et la sécurité (GMES) soient maintenus dans le cadre financier pluriannuel, conformément aux principes d’unité et de sincérité budgétaires ;

7. Soutient l’augmentation des crédits proposée par la Commission européenne pour le nouveau programme en matière d’éducation, de formation, de jeunesse et de sport « Erasmus pour tous » ;

8. Considère que la politique de cohésion doit concerner toutes les régions de l’Union européenne ; en conséquence, appuie la création de la catégorie des régions en transition ;

9. Soutient la proposition de la Commission européenne de consacrer 25 % du montant total des crédits de la politique de cohésion au Fonds social européen ;

10. Appuie la proposition de constitution d’une réserve de performance à hauteur de 5 % du budget de la cohésion, libérable à la suite d’un examen à mi-parcours de l’atteinte des objectifs fixés aux États membres et aux régions, car elle vise à ancrer la stratégie Europe 2020 dans la mise en œuvre des projets de cohésion et s’inscrit dans une logique de performance ;

11. Suggère de revoir à la baisse le plafonnement à 2,5 % du PIB proposé par la Commission européenne au titre des versements opérés au profit d’un État membre dans le cadre de la politique de cohésion, afin de tenir compte de l’enrichissement des États récemment entrés dans l’Union et de leur capacité d’absorption des fonds européens ;

12. Soutient le mécanisme du « filet de sécurité inversé » qui vise à plafonner la progression relative, d’une programmation sur l’autre, des aides reçues par les États membres au titre de la politique de cohésion, afin d’éviter les risques d’augmentation automatique des fonds ;

13. Appuie la proposition de la Commission européenne de relever, de manière temporaire, le taux de cofinancement de la politique de cohésion de 5 à 10 points lorsqu’un État bénéficie d’une aide financière de l’Union, afin de limiter l’effort pesant sur les budgets nationaux en période d’assainissement budgétaire ;

14. S’oppose à la généralisation de la conditionnalité macroéconomique à l’ensemble des fonds structurels ;

15. Rappelle qu’il est impératif d’étudier toutes les pistes afin de mieux appréhender l’évolution des paiements et de résoudre la question du reste à liquider ;

16. Insiste sur la nécessité de maintenir une ligne budgétaire suffisante au profit de l’aide alimentaire et matérielle aux plus démunis, d’autant plus importante en temps de crise ;

17. Rappelle son attachement à la politique agricole commune, qui, déjà revue à la baisse dans la proposition de la Commission européenne, ne doit pas constituer la variable d’ajustement des négociations, et soutient la création d’une réserve en cas de crise agricole ainsi que l’ouverture du bénéfice du Fonds européen d’ajustement à la mondialisation aux agriculteurs. Il s’agit de soutenir les agriculteurs dans un contexte économique difficile, de contribuer à la sécurité alimentaire de l’Union, au développement durable et équilibré des territoires et à l’emploi en zone rurale ;

18. Estime que la convergence des aides directes dans l’Union doit avoir lieu progressivement, afin de tenir compte des différences de situation entre États membres ;

19. Appuie la proposition de « verdir » 30 % du budget des aides directes, afin d’encourager les exploitations agricoles à adopter des pratiques favorables à l’environnement ;

20. Souligne la nécessité de tenir compte dans le cadre financier 2014-2020 des nouvelles compétences confiées à l’Union européenne par le traité de Lisbonne, en matière d’action extérieure, de sport, d’espace, de changement climatique, d’énergie, de tourisme et de protection civile ;

21. Appelle à resserrer les dépenses administratives et à une réforme ambitieuse du statut des fonctionnaires ;

22. Propose, compte tenu de la nécessité d’accroître la flexibilité du cadre financier pluriannuel, que les marges du plafond des crédits d’engagement d’un exercice donné soient reportées sur l’exercice suivant et considérées comme une marge globale du cadre financier ;

23. Insiste sur la nécessité de revoir en profondeur le système des ressources propres, avec un objectif de simplification et d’» autonomisation ». Il s’agit d’asseoir le financement du budget européen majoritairement sur des ressources propres et de permettre ainsi, une baisse de la part des contributions nationales ainsi que la disparition de la logique du « juste retour » ;

24. Considère que le rabais britannique a perdu toute raison d’être ; demande par conséquent qu’il y soit mis fin ainsi qu’aux différentes corrections qu’il entraîne ;

25. Est favorable à la proposition de la Commission européenne en faveur d’une nouvelle ressource TVA, reposant sur la suppression de plusieurs exonérations et exceptions existantes. De manière plus générale, soutient la mise en place de nouvelles ressources propres, telle que la création de la taxe sur les transactions financières dont une partie des recettes devrait être allouée au budget de l’Union européenne ; se félicite en particulier du projet de coopération renforcée relative à la taxe sur les transactions financières, dont la France est l’une des initiatrices.

ANNEXES

Annexe 1 : Liste des personnes entendues par les rapporteurs

I. A Paris :

– M. Philippe Léglise-Costa, conseiller du président de la République pour les affaires européennes ;

– M. Serge Guillon, conseiller du premier ministre pour les affaires européennes ;

– M. Stéphane Le Moing, directeur-adjoint du cabinet du ministre de l’Agriculture et M. Eric Allain, directeur général des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires ;

– M. Alain Rousset, président de l’Association des régions de France ;

II. A Bruxelles :

– M. Philippe Etienne, ambassadeur à la Représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne ;

– M. Alexander Schoenmakers, attaché budgétaire à la Représentation permanente de la République fédérale d’Allemagne auprès de l’Union Européenne ;

– Mme Jutta Haug, vice-présidente de la commission des budgets et présidente de la commission spéciale sur les défis politiques au Parlement européen ;

– M. Reimer Böge, rapporteur du rapport intérimaire sur le cadre financier pluriannuel 2014-2020 à la Commission des budgets du Parlement européen ;

– M. Rudolf Mögele, directeur général adjoint à la direction générale de l’agriculture de la Commission européenne ;

– M. Manfred Bergmann, directeur chargé de la fiscalité indirecte à la direction générale « Fiscalité et Union douanière » de la Commission européenne.

annexe 2 : financement du budget général par type de ressources et par État membre en 2011

États membres

Ressources propres traditionnelles nettes (75 %)*

(en millions €)

Ressources propres « TVA » et « RNB », ajustements compris**

Total ressources propres

(en millions €)

Part dans le total des ressources propres

(en %)

Ressource propre « TVA »
(en millions €)

Ressource propre
« RNB »
(en millions €)

Réduction en faveur des Pays-Bas et de la Suède
(en millions €)

Correction britannique
(en millions €)

Part dans le total des contributions nationales

(en %)

Belgique

1 581,0

516,5

2 627,3

24,2

177,5

3,24

4 926,5

4,11

Bulgarie

49,1

51,2

274,1

2,4

18,4

0,34

395,2

0,33

Rép. tchèque

220,6

207,7

1 170,3

9,3

74,6

1,42

1 682,5

1,40

Danemark

327,6

291,3

1 701,3

16,1

112,1

2,05

2 448,3

2,04

Allemagne

3 456,0

1 671,5

17 610,4

170,9

218,3

19,06

23 127,1

19,27

Estonie

21,9

22,9

106,8

1,0

6,0

0,13

158,6

0,13

Irlande

199,8

193,5

884,4

8,3

52,7

1,10

1 338,7

1,12

Grèce

141,0

278,6

1 376,1

14,2

93,1

1,71

1 903,0

1,59

Espagne

1 170,2

1 964,4

7 355,1

69,0

487,7

9,57

11 046,3

9,21

France

1 566,3

2 916,6

14 035,3

133,0

965,9

17,49

19 617,2

16,35

Italie

1 741,7

1 811,8

11 703,4

103,1

717,9

13,89

16 078,0

13,40

Chypre

24,6

27,0

123,5

1,2

8,5

0,16

184,8

0,15

Lettonie

22,6

15,9

133,7

1,2

9,0

0,15

182,3

0,15

Lituanie

44,6

27,9

213,7

1,9

14,0

0,25

302,0

0,25

Luxembourg

14,3

46,7

215,1

2,1

15,0

0,27

293,1

0,24

Hongrie

101,0

116,6

666,4

6,4

47,0

0,81

937,4

0,78

Malte

10,1

9,5

43,5

0,4

2,9

0,05

66,5

0,06

Pays-Bas

1 935,7

290,3

4 217,2

– 625,0

50,7

3,81

5 868,9

4,89

Autriche

189,5

306,1

2 150,0

19,1

24,0

2,42

2 688,7

2,24

Pologne

352,6

527,0

2 494,6

23,5

182,7

3,13

3 580,4

2,98

Portugal

135,0

299,3

1 207,7

10,8

81,6

1,35

1 734,4

1,45

Roumanie

109,9

138,8

902,2

8,2

66,9

1,08

1 225,9

1,02

Slovénie

74,2

54,7

251,9

2,4

17,9

0,32

401,1

0,33

Slovaquie

117,4

60,0

474,9

4,5

36,9

0,56

693,7

0,58

Finlande

152,4

266,9

1 436,1

12,6

87,1

1,75

1 955,2

1,63

Suède

466,9

173,1

2 798,9

– 138,3

33,0

2,78

3 333,6

2,78

Royaume-Uni

2 551,8

2 513,1

12 240,1

116,2

– 3 595,9

10,92

13 825,2

11,52

Total

16 777,7

14 798,9

88 414,0

– 1,4*

5,4

100,00

119 994,7

100,00

* Les frais de perception représentent 25 % des ressources propres traditionnelles brutes.

** Afin de simplifier la présentation, la ressource propre RNB inclut l’ajustement JAI.

**** Le total des paiements des corrections n’est pas égal à zéro, compte tenu des différences de taux de change.

annexe 3 : répartition des dépenses de l’union européenne en 2011

(en millions d’euros)

 

Compétitivité

Cohésion

Ressources naturelles

Liberté, sécurité, justice

Citoyenneté

L’UE, acteur mondial

Administration

Total des dépenses

Pologne

234,0

9 633,3

4 293,0

122,8

119,7

10,1

27,7

14 440,6

 

2,4 %

22,8 %

7,7 %

14,9 %

13,5 %

5,3 %

0,4 %

12,3 %

Espagne

903,1

5 428,1

7 092,4

62,3

27,8

0,0

85,2

13 599,0

 

9,1 %

12,8 %

12,7 %

7,6 %

3,1 %

0,0 %

1,2 %

11,6 %

France

1 312,7

1 772,6

9 541,5

62,5

130,4

0,0

342,6

13 162,3

 

13,3 %

4,2 %

17,1 %

7,6 %

14,7 %

0,0 %

4,6 %

11,2 %

Allemagne

1 576,7

  447,5

  836,9

40,1

47,6

0,0

184,2

12 133,0

 

15,9 %

8,2 %

12,2 %

4,9 %

5,4 %

0,0 %

2,5 %

10,3 %

Italie

826,7

2 341,0

  993,5

67,8

107,1

0,0

249,7

9 585,9

 

8,4 %

5,5 %

10,7 %

8,2 %

12,0 %

0,0 %

3,4 %

8,2 %

Belgique

1 041,6

286,8

713,5

59,1

92,7

0,0

4 603,1

6 796,7

 

10,5 %

0,7 %

1,3 %

7,2 %

10,4 %

0,0 %

62,2 %

5,8 %

Royaume-Uni

1 187,2

1 211,9

3 961,4

49,1

31,8

0,0

128,6

6 570,0

 

12,0 %

2,9 %

7,1 %

6,0 %

3,6 %

0,0 %

1,7 %

5,6 %

Grèce

219,9

3 331,7

2 894,7

44,0

8,9

0,0

37,7

6 536,9

 

2,2 %

7,9 %

5,2 %

5,3 %

1,0 %

0,0 %

0,5 %

5,6 %

Hongrie

111,5

3 637,1

1 500,0

10,8

33,3

16,5

21,7

5 330,9

 

1,1 %

8,6 %

2,7 %

1,3 %

3,7 %

8,7 %

0,3 %

4,5 %

Portugal

184,9

3 108,1

1 333,4

21,3

39,4

0,0

28,1

4 715,3

 

1,9 %

7,4 %

2,4 %

2,6 %

4,4 %

0,0 %

0,4 %

4,0 %

République tchèque

75,1

1 774,8

1 132,8

4,4

24,9

0,3

16,8

3 029,1

0,8 %

4,2 %

2,0 %

0,5 %

2,8 %

0,2 %

0,2 %

2,6 %

Roumanie

68,0

700,1

1 693,6

10,7

39,3

128,5

19,3

2 659,5

 

0,7 %

1,7 %

3,0 %

1,3 %

4,4 %

67,9 %

0,3 %

2,3 %

Pays Bas

578,8

307,0

940,4

131,4

17,6

0,0

89,1

2 064,3

 

5,8 %

0,7 %

1,7 %

16,0 %

2,0 %

0,0 %

1,2 %

1,8 %

Autriche

283,0

218,8

1 312,4

32,8

9,7

0,0

19,1

1 875,8

 

2,9 %

0,5 %

2,3 %

4,0 %

1,1 %

0,0 %

0,3 %

1,6 %

Slovaquie

40,9

1 056,0

647,9

4,8

24,4

0,5

10,7

1 785,1

 

0,4 %

2,5 %

1,2 %

0,6 %

2,7 %

0,3 %

0,1 %

1,5 %

Suède

295,7

357,8

996,2

12,8

65,4

0,0

29,2

1 757,0

 

3,0 %

0,8 %

1,8 %

1,6 %

7,4 %

0,0 %

0,4 %

1,5 %

Lituanie

93,0

977,1

536,2

31,7

3,1

1,1

10,6

1 652,8

 

0,9 %

2,3 %

1,0 %

3,9 %

0,3 %

0,6 %

0,1 %

1,4 %

Irlande

170,5

155,1

1 257,2

3,7

10,3

0,0

42,5

1 639,5

 

1,7 %

0,4 %

2,3 %

0,4 %

1,2 %

0,0 %

0,6 %

1,4 %

Luxembourg

134,5

21,6

53,3

2,8

9,8

0,0

1 326,6

1 548,5

 

1,4 %

0,1 %

0,1 %

0,3 %

1,1 %

0,0 %

17,9 %

1,3 %

Danemark

189,7

131,7

1 088,1

2,4

10,2

0,0

50,9

1 473,1

 

1,9 %

0,3 %

1,9 %

0,3 %

1,1 %

0,0 %

0,7 %

1,3 %

Finlande

153,9

303,6

794,6

9,6

6,3

0,0

25,0

1 293,0

 

1,6 %

0,7 %

1,4 %

1,2 %

0,7 %

0,0 %

0,3 %

1,1 %

(en millions d’euros)

 

Compétitivité

Cohésion

Ressources naturelles

Liberté, sécurité, justice

Citoyenneté

L’UE, acteur mondial

Administration

Total des dépenses

Bulgarie

68,1

539,4

443,7

7,3

4,3

31,3

13,1

1 107,1

 

0,7 %

1,3 %

0,8 %

0,9 %

0,5 %

16,5 %

0,2 %

0,9 %

Lettonie

28,1

560,8

302,7

5,2

4,5

0,0

9,5

911,0

 

0,3 %

1,3 %

0,5 %

0,6 %

0,5 %

0,0 %

0,1 %

0,8 %

Slovénie

 

64,9

524,9

227,0

6,7

14,7

0,2

8,7

847,0

0,7 %

1,2 %

0,4 %

0,8 %

1,7 %

0,1 %

0,1 %

0,7 %

Estonie

19,2

268,1

201,0

3,1

3,8

0,7

8,7

504,7

 

0,2 %

0,6 %

0,4 %

0,4 %

0,4 %

0,4 %

0,1 %

0,4 %

Chypre

18,5

85,3

66,0

6,6

1,0

0,0

6,2

183,6

 

0,2 %

0,2 %

0,1 %

0,8 %

0,1 %

0,0 %

0,1 %

0,2 %

Malte

18,9

84,7

15,3

7,1

1,1

0,0

8,2

135,2

 

0,2 %

0,2 %

0,0 %

0,9 %

0,1 %

0,0 %

0,1 %

0,1 %

TOTAL UNION A 27

9 899,1

42 265,0

55 868,8

823,0

889,3

189,2

7 402,7

117 336,9

HR

11,7

0,0

0,0

0,0

2,5

97,6

1,3

113,2

Pays tiers

914,5

0,3

161,2

4,9

14,9

5 077,3

152,1

6 325,1

Autres

890,9

113,3

8,6

1,7

4,3

1 557,4

363,7

2 939,8

Recettes affectées

636,9

0,0

1 335,9

41,5

45,3

180,7

439,6

2 679,9

TOTAL

12 353,0

42 378,5

57 374,5

871,1

956,2

7 102,2

8 359,3

129 394,9

Annexe 4 : détail de la proposition de la commission européenne du 6 juillet 2012

relative au cadre financier pluriannuel 2014-2020

En engagements en millions d’euros – prix 2011

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2014-2020

RUBRIQUE 1 Croissance intelligente et inclusive

               

Galileo

1 100

1 100

900

900

700

900

1 400

7 000

Sûreté nucléaire + déclassement

134

134

134

134

55

55

55

702

CSC pour la recherche et l’innovation

10 142

10 595

11 047

11 500

11 953

12 406

12 856

80 498

Nouvelle compétitivité/PME

213

248

284

319

354

389

425

2 233

Education unique, formation, jeunesse et sports

1 432

1 683

1 935

2 186

2 438

2 689

2 941

15 305

Agenda social

122

122

122

122

122

122

125

855

Douane – Fiscalis – Lutte contre la fraude

121

121

121

121

121

121

121

845

Agences

237

291

290

291

265

326

331

2 030

Autres

292

292

291

292

291

292

292

2 042

Marge

513

533

553

573

593

613

633

4 009

Energie

979

1 241

1 039

1 180

1 311

1 512

1 915

9 178

Transport

2 313

2 515

2 917

3 118

3 521

3 722

3 723

21 829

TIC

646

787

1 189

1 451

1 521

1 723

1 925

9 242

Mécanisme pour l’interconnexion en Europe

3 938

4 542

5 146

5 750

6 353

6 957

7 563

40 249

Convergence régionale

22 106

22 645

23 100

23 454

23 794

24 090

24 370

163 561

Régions en transition

5 185

5 207

5 210

5 213

5 216

5 218

5 221

36 471

Compétitivité

7 917

7 917

7 917

7 917

7 917

7 917

7 917

55 419

Coopération territoriale

1 697

1 697

1 697

1 697

1 697

1 697

1 697

11 878

Fonds de cohésion

9 488

9 757

9 974

10 144

10 314

10 462

10 601

70 740

Régions ultrapériphériques et à faible densité de population

132

132

132

132

132

132

132

925

Politique de cohésion

46 526

47 355

48 031

48 558

49 070

49 517

49 939

338 994

TOTAL

64 769

67 015

68 853

70 745

72 316

74 386

76 679

494 763

RUBRIQUE 2 Croissance durable : ressources naturelles

               

Sous-plafond PAC (paiements directs + dépenses de marché)

42 363

41 756

41 178

40 582

39 810

39 052

38 309

283 051

Développement rural

13 931

13 658

13 390

13 128

12 870

12 618

12 371

91 966

Pêche

969

983

990

990

994

993

993

6 912

Environnement et action pour le climat (Life +)

392

418

443

468

493

518

488

3 220

Agences

49

49

49

49

49

49

49

344

Marge

140

140

140

140

140

140

139

979

TOTAL

57 845

57 005

56 190

55 357

54 357

53 371

52 348

386 472

RUBRIQUE 3 Sécurité et citoyenneté

               

Fond de gestion des flux migratoires

494

494

494

494

494

494

496

3 458

Sécurité intérieure

606

569

589

609

629

649

669

4 318

Technologies de l’information

105

105

105

105

105

105

106

734

Justice

44

50

55

60

65

70

72

418

Droits fondamentaux et citoyenneté

41

45

50

55

60

65

71

389

Protection civile

35

35

35

35

35

35

35

247

Citoyens pour l’Europe

29

29

29

29

29

29

29

204

Sécurité alimentaire

332

325

319

313

307

301

295

2 191

Santé publique

57

57

57

57

57

57

54

398

Protection des consommateurs

25

25

25

25

25

25

25

176

Programme pour une Europe créative

183

198

213

228

244

259

275

1 600

Agences

431

431

431

431

431

431

431

3 020

Autres

107

107

107

107

107

107

107

748

Marge

130

130

130

130

130

130

129

909

TOTAL

2 620

2 601

2 640

2 679

2 718

2 757

2 794

18 809

RUBRIQUE 4 L’Europe dans le monde

               

Instrument d’aide de préadhésion

1 789

1 789

1 789

1 789

1 789

1 789

1 789

12 520

Instrument européen de voisinage et de partenariat

2 100

2 213

2 226

2 265

2 340

2 439

2 514

16 097

IEDDH

200

200

200

200

200

200

200

1 400

Instrument de stabilité

359

359

359

359

359

359

359

2 510

Sécurité (PESC)

359

359

359

359

359

359

359

2 510

Instrument de partenariat

126

130

135

141

148

156

164

1 000

Instrument de financement de la coopération au développement

2 560

2 682

2 808

2 938

3 069

3 202

3 338

20 597

Aide humanitaire

930

925

920

915

910

905

900

6 405

Protection civile

30

30

30

30

30

30

30

210

EVHAC

20

22

25

29

33

38

43

210

Instrument de coopération en matière de sûreté nucléaire

80

80

80

80

80

80

80

560

Aide macrofinancière

85

85

85

85

84

84

85

593

Fonds de garantie relatif aux actions extérieures

236

231

226

195

157

128

84

1 257

Agences

20

20

20

20

20

20

20

137

Autre

134

134

189

134

134

134

134

995

Marge

374

388

396

422

439

458

523

3 000

TOTAL

9 400

9 645

9 845

9 960

10 150

10 380

10 620

70 000

RUBRIQUE 5 Administration

               

Dépenses de retraite et écoles européennes

1 575

1 640

1 687

1 752

1 785

7 839

1 886

12 165

Dépenses administratives des institutions

6 892

6 945

7 000

7 067

7 150

7 232

7 315

49 600

Marge

155

170

185

200

215

230

247

1 400

TOTAL

8 622

8 755

8 872

9 019

9 149

9 301

9 447

63 165

RUBRIQUE 6 Compensations

27

           

27

TOTAL

143 282

145 021

146 400

147 759

148 690

150 195

151 888

1 033 235

en % du RNB

1,10 %

1,09 %

1,08 %

1,08 %

1,07 %

1,06 %

1,06 %

1,08 %

1 () La composition de cette Commission figure au verso de la présente page.

2 Alinéa premier de l’article 312 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

3 Toutefois, le Conseil européen peut, à l’unanimité, adopter une décision autorisant le Conseil à statuer à la majorité qualifiée lors de l’adoption du règlement fixant le cadre financier pluriannuel.

4 « Tout au long de la procédure conduisant à l’adoption du cadre financier, le Parlement européen, le Conseil et la Commission prennent toute mesure nécessaire pour faciliter cette adoption ».

5  Proposition de règlement du Conseil relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition des ressources propres traditionnelles et de la ressource propre fondée sur le RNB et aux mesures visant à faire face aux besoins de trésorerie (COM (2011) 512 final) présentée le 29 juin 2011 et modifiée le 9 novembre 2011 (COM (2011) 742) ; proposition de règlement du Conseil relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition de la ressource propre fondée sur la taxe sur la valeur ajoutée présentée le 9 novembre 2011 (COM (2011) 737) ; proposition de règlement du Conseil relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition de la ressource propre fondée sur la taxe sur les transactions financières présentée le 9 novembre 2011 (COM (2011) 738).

6 20 % d’émissions de gaz à effet de serre en moins, 20 % d’énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie de l’Union européenne, 20 % d’efficacité énergétique en plus d’ici à 2020.

7 La méthode de calcul dite du « rabais britannique », la plus cohérente d’un point de vue économique et la plus consensuelle parmi les États membres sera retenue ici.

8 Plusieurs opérations ont ainsi été réalisées : l’actualisation des données relatives au produit intérieur brut régional et au revenu national brut, qui conduit à une révision des dotations régionales et nationales au titre de la politique de cohésion ; la prise en compte des prévisions macroéconomiques les plus récentes, dont il est tenu compte pour calculer le montant maximal des dotations nationales des États membres dont les enveloppes « cohésion » sont écrêtées, ainsi que pour exprimer les plafonds du tableau du cadre financier pluriannuel en pourcentage du RNB de l’Union ; l’intégration des dernières informations relatives à l’exécution des budgets pour 2011 et 2012 et au projet de budget pour 2013.

9 Si l’on privilégie la présentation de la Commission qui considère le mécanisme pour l’interconnexion en Europe comme un élément de la politique de cohésion, il apparaît que sa dotation totale dépasserait les moyens prévus pour la PAC dès 2017 et en ferait le premier poste du budget européen.

10 Les propositions de réforme du cadre réglementaire de la politique de cohésion présentées par la Commission européenne en octobre 2011 prennent la forme d’un paquet législatif de six textes : une proposition de règlement général établissant les règles communes applicables au Fonds européen de développement régional (FEDER), au Fonds social européen (FSE), au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) ; trois propositions de règlement spécifique sur chacun des trois fonds relevant de la politique de cohésion (FEDER, FSE et Fonds de cohésion) ; et, enfin, deux textes consacrés à la coopération territoriale : une proposition de règlement relatif à l’objectif de coopération territoriale et une proposition de modification du règlement 1082/2006 sur le groupement européen de coopération territoriale.

11 Au premier stade, celui des recommandations du Conseil, la Commission pourrait demander à un État de revoir son contrat de partenariat et ses programmes opérationnels, puis elle pourrait suspendre tout ou partie des paiements si la réponse de cet État membre ne lui convenait pas. Au second stade, lorsqu’une décision du Conseil prendrait acte d’un comportement défaillant de l’État membre, la Commission devrait alors suspendre tout ou partie des paiements. La mesure de suspension serait levée dès qu’une décision du Conseil constaterait que l’État membre s’est conformé à ses obligations.

12 La réduction de 500 à 429 millions d’euros du montant annuel mobilisable pour ce fonds tient compte de l’usage qui en a été fait dans l’actuel cadre financier pluriannuel.

13 La modulation de base consiste aujourd’hui en un transfert obligatoire de 10 % des aides du premier vers le second pilier.

14 Il s’agit des États membres dans lesquels le montant moyen d’aide par hectare est inférieur à 90 % de la moyenne de l’Union européenne.

15 En particulier, le montant cumulé des crédits de paiement du FEDER et du FSE est, en moyenne, en retard d’un an par rapport aux précédentes perspectives financières.

16 A l’exception de la première année de la période de programmation qui bénéficierait d’un allongement d’une année. A noter que, dans le cas des programmes de coopération territoriale, le délai serait de trois ans.

17 Les montants sont recouvrés par les administrations nationales pour le compte de l’Union et directement reversés au budget européen, après un prélèvement de 25 % correspondant, en théorie, aux frais de perception. Il n’en est donc pas tenu compte dans le prélèvement sur recettes au titre de la contribution de la France au budget communautaire.

18 Le montant de la ressource TVA dû par chaque État membre est obtenu par application d’un taux de 0,30 % à l’assiette de la TVA. Ce pourcentage est réduit pour quatre États membres (Allemagne, Autriche, Pays-Bas et Suède) pour 2007-2013. L’assiette ne peut dépasser 50 % du RNB de chaque État membre.

19 Le montant de la ressource RNB est obtenu par application d’un taux fixé au cours de la procédure budgétaire à une assiette constituée du RNB de chaque État membre. Cette ressource est la ressource d’équilibre du budget. Son taux est donc fixé de manière financer la différence entre le montant des dépenses de l’année et le produit des autres ressources et recettes. Le financement de cette ressource est réparti entre les États membres au prorata de leur part dans le RNB de l’Union.

20 Sur la base de la proposition faite par la Commission européenne pour le projet de budget pour 2013.

21 Communication de la Commission européenne du 19 octobre 2010 sur le réexamen du budget de l’Union européenne, COM (2010) 700.

22 Résolution législative du Parlement européen du 23 octobre 2012 sur la proposition de règlement du Conseil relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition de la ressource propre fondée sur la taxe sur la valeur ajoutée.

23 France, Allemagne, Espagne, Italie, Slovaquie, Estonie, Belgique, Portugal, Slovénie, Autriche et Grèce.