No 3233
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 novembre 2015
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
EUROPÉENNE
sur la gouvernance de la zone euro
(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement)
PRÉSENTÉE,
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPEENNES,
par M. Christophe CARESCHE,
Rapporteur,
PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE
L’Assemblée nationale,
Vu l’article 88-4 de la Constitution,
Vu le traité sur l’Union européenne,
Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,
Vu le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire, signé à Bruxelles le 2 mars 2012,
Vu le protocole sur le rôle des parlements nationaux dans l’Union européenne,
Vu le rapport du 22 juin 2015 intitulé « Compléter l’Union économique et monétaire européenne » présenté par le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker en collaboration avec le président du Conseil européen Donald Tusk, le président de l’Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem, le président de la Banque centrale européenne Mario Draghi et le président du Parlement européen Martin Schulz,
Vu la communication du 21 octobre 2015 de la Commission européenne au Parlement européen, au Conseil européen et à la Banque centrale européenne relative aux mesures à prendre pour compléter l’Union économique et monétaire COM(2015) 600,
Vu la recommandation du 21 octobre 2015 de recommandation du Conseil sur la création de conseils nationaux de la compétitivité dans la zone euro COM(2015) 601,
Vu la décision du 21 octobre 2015 de la Commission européenne établissant un comité budgétaire européen consultatif indépendant C(2015) 8000,
Vu la résolution du Parlement européen du 24 juin 2015 sur l’examen du cadre de gouvernance économique,
Vu la contribution franco-allemande du 22 mai 2015 sur l’Union économique et monétaire,
Considérant que les objectifs de l’Union économique et monétaire sont, à moyen et long terme, une union bancaire et financière complète, une coordination approfondie des politiques économiques, y compris dans leur dimension sociale, la mise en place d’une capacité budgétaire jouant un rôle contra-cyclique, la possibilité d’émettre de la dette en commun, la création d’un Trésor européen et, afin d’assurer la légitimité démocratique de la gouvernance de la zone euro, la mise en place, à partir des parlements nationaux, d’un Parlement propre à la zone euro,
Considérant que, dans l’attente d’une révision des traités, la succession des crises rencontrées par la zone euro exige, à court terme, l’adoption de mesures à même d’améliorer la gouvernance de la zone euro,
1. Soutient la création, au sein de chaque État membre de la zone euro, d’un conseil indépendant chargé d’analyser la compétitivité de l’économie nationale et de formuler un avis sur les réformes à mener ; estime que ces conseils de la compétitivité doivent fonctionner en réseau afin de coordonner leur action ; insiste sur la nécessité que les membres des conseils de la compétitivité puissent être entendus par les parlements nationaux ; souhaite que l’appréciation de la compétitivité tienne compte de l’ensemble des indicateurs concourant au développement durable, notamment à la protection sociale et à la qualité environnementale ;
2. Considère que la création du comité budgétaire européen ne doit pas résulter d’une décision unilatérale de la Commission européenne mais du processus législatif européen ; demande que le mandat de ce comité soit précisé, de telle sorte que lui soit assignée une mission technique d’évaluation, centrée sur quelques enjeux budgétaires précis, comme la soutenabilité des trajectoires budgétaires ; juge que les règles de nomination de ses membres et de fonctionnement doivent être revues dans le sens d’une plus grande indépendance et d’une meilleure efficacité et que celles relatives à la collaboration entre le comité européen et les comités nationaux doivent être précisées ; estime que les parlements nationaux et le Parlement européen doivent pouvoir auditionner les membres du comité budgétaire européen ;
3. Juge nécessaire de simplifier et de rendre plus cohérents les dispositifs européens de suivi budgétaire et macroéconomique ainsi que la procédure de coordination des politiques économiques dite « du semestre européen » et suggère à cet effet de les fusionner ;
4. Insiste sur la nécessité de compléter la surveillance des déséquilibres macroéconomiques et des déficits publics excessifs par une surveillance des déséquilibres sociaux, sur la base d’indicateurs et de tableaux de bord sociaux ;
5. Considère que les règles de surveillance budgétaire doivent être interprétées de telle sorte qu’elles ne conduisent pas à la mise en place de politiques budgétaires pro-cycliques, qu’elles ne freinent pas l’investissement, en particulier en matière de transition énergétique, et qu’elles n’aboutissent pas à des sanctions financières contreproductives ;
6. Estime que l’analyse des déséquilibres macroéconomiques doit être simplifiée grâce à la mise en exergue d’un indicateur synthétique comme la valeur absolue du solde extérieur courant rapportée au produit intérieur brut et que la procédure pour déséquilibres macroéconomiques doit être mise en œuvre de manière symétrique, que les déséquilibres excessifs constatés soient négatifs ou positifs ;
7. Invite le Conseil européen à définir, dès le mois décembre, des lignes directrices pour la conduite des politiques économiques au sein de la zone euro axées sur le renforcement du potentiel de croissance et une convergence économique, fiscale et sociale par le haut ; estime que cette coordination doit reposer sur un diagnostic affiné de la politique économique au sein de la zone euro et des États membres, établi sur la base d’un rapport unique de la Commission européenne mettant en évidence les enjeux propres à la zone euro ; souhaite que les recommandations par pays soient concentrées sur un nombre limité de priorités et prennent davantage en considération les spécificités de chaque État ; rappelle à la Commission européenne qu’elle doit veiller à ce que la formulation de ces recommandations respecte la liberté souveraine d’appréciation des États concernés quant au calendrier et aux moyens à mettre en œuvre ;
8. Défend l’idée de nommer un président des sommets européens de la zone euro distinct du président du Conseil européen, afin de donner une visibilité plus forte à la zone euro ; considère que ces sommets doivent se réunir au moins six fois par an ; souligne la nécessité d’affermir l’Eurogroupe en le dotant de règles de vote à la majorité et de moyens humains et matériels renforcés ; soutient la mise en place d’un Eurogroupe social ;
9. Souligne que la Conférence interparlementaire sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union européenne a pour objectif d’assurer la responsabilité démocratique dans le domaine de la gouvernance économique et des politiques budgétaires de l’Union ; considère qu’elle doit intervenir dans le semestre européen en débattant et en se prononçant sur la définition des grandes orientations de politique économique et sur les recommandations par pays ; juge utile qu’elle puisse auditionner les membres du comité budgétaire européen ;
10. Insiste sur la nécessité que l’Assemblée nationale soit présente à toutes les étapes du semestre européen ; demande au Gouvernement d’associer des représentants des commissions chargées des finances et des affaires européennes aux échanges avec la Commission européenne en amont de la présentation des programmes de stabilité et de réforme ; rappelle au Gouvernement l’impérieuse nécessité, pour l’Assemblée nationale, de pouvoir se prononcer par un vote sur les programmes de stabilité et de réforme et réaffirme sa volonté de pouvoir les amender.
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