N° 1150
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 juin 2013.
PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Philippe GOMES et Mme Sonia LAGARDE,
députés.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Les communes de la Nouvelle-Calédonie peuvent recourir à des référendums locaux depuis la promulgation de l’ordonnance n° 2007-1134 du 25 juillet 2007 portant extension et adaptation à la Nouvelle-Calédonie de diverses dispositions relatives aux communes et aux sociétés d’économie mixte locales. L’article 17 de cette ordonnance a en effet créé les articles L. 125-1 à L. 125-9 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie, afin de reproduire les articles L. 1112-15 à L. 1112-22 introduits dans le code général des collectivités territoriales par la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.
Cette possibilité de recourir à des référendums locaux n’existe toutefois ni pour la Nouvelle-Calédonie ni pour les provinces, alors qu’en métropole et dans les DOM, les régions et les départements le peuvent en application de la loi organique n° 2003-705 du 1er août 2003 relative au référendum local. On peut noter également qu’en Polynésie, l’assemblée du territoire peut également recourir à des référendums locaux, depuis l’adoption de la loi organique n° 2007-1719 du 7 décembre 2007 tendant à renforcer la stabilité des institutions et la transparence de la vie politique en Polynésie française.
Il n’existe pas non plus en Nouvelle-Calédonie de droit de pétition, permettant aux citoyens de faire inscrire une question à l’ordre du jour du congrès ou d’une assemblée de province, à l’instar de ce qui existe en ce sens à Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon (cf. articles L.O. 6231-1, L.O. 6331-1 et L.O. 6431-1 du CGCT).
La présente proposition de loi vise à combler ces deux lacunes. Elle est constituée d’un article unique, qui introduit dans la loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie un titre nouveau, intitulé « Démocratie locale » et composé de deux chapitres.
Le chapitre 1er définit les conditions et procédures applicables au référendum local. Il reprend pour l’essentiel les dispositions applicables en Polynésie française (article 159 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française).
Toutefois, afin de respecter l’accord de Nouméa, les propositions et projets de lois du pays sont exclus du champ d’application du référendum. En effet, l’accord de Nouméa impose que les lois du pays puissent être soumises au contrôle du Conseil Constitutionnel (point 2.1.3 de l’Accord), et ledit Conseil a, par deux fois (décision n° 62-20 DC du 6 novembre 1962 et décision n° 92-313 DC du 23 décembre 1992) refusé d’étendre son contrôle aux lois adoptées par référendum. Transposée en Nouvelle-Calédonie pour les lois du pays adoptées par référendum, cette jurisprudence empêcherait le Conseil constitutionnel de vérifier leur conformité à la Constitution et pourrait donc faire obstacle à l’application de l’Accord de Nouméa.
Le chapitre 2 définit le droit de pétition. Il reprend directement les dispositions des trois articles précités du CGCT.
PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE
Après le titre VII de la loi organique modifiée n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, il est inséré un titre VII bis ainsi rédigé :
« TITRE VII BIS
« DÉMOCRATIE LOCALE
« Chapitre Ier
« Référendum local
« Section 1
« Dispositions générales
« Art. 209-26. – Le congrès peut soumettre à référendum local tout projet ou proposition de délibération tendant à régler une affaire de sa compétence, à l’exception des projets ou propositions de lois du pays, des avis qu’il est appelé à rendre sur les projets et propositions de loi et sur les projets d’ordonnance et des résolutions qu’il peut adopter dans le cadre des articles 89 et 91.
« Art. 209-27. – Le gouvernement peut soumettre à référendum local, après autorisation du congrès, tout projet d’acte réglementaire relevant de ses attributions.
« Art. 209-28. – Les assemblées de province peuvent soumettre à référendum local tout projet ou proposition de délibération tendant à régler une affaire de leur compétence.
« Art. 209-29. – Le président d’une assemblée de province peut seul proposer à cette assemblée de soumettre à référendum local tout projet d’acte relevant de ses attributions propres, à l’exception des projets d’acte individuel.
« Art. 209-30. – Dans les cas prévus aux articles 209-26 à 209-29, le congrès, le gouvernement ou l’assemblée de province détermine par une même délibération ou un même arrêté, selon le cas, les modalités d’organisation du référendum local, fixe le jour du scrutin, qui ne peut intervenir moins de deux mois après la transmission de la délibération au haut-commissaire de la République, convoque les électeurs et précise le projet d’acte ou de délibération soumis à l’approbation des électeurs.
« Le président du congrès, du gouvernement ou de l’assemblée de province transmet au haut-commissaire, dans un délai maximum de huit jours, la délibération ou l’arrêté décidant d’organiser un référendum local.
« Le haut-commissaire dispose d’un délai de dix jours à compter de la réception de la délibération ou de l’arrêté pour le déférer au Conseil d’État s’il l’estime illégal. Il peut assortir son recours d’une demande de suspension.
« Le juge des référés du Conseil d’État statue dans un délai d’un mois, en premier et dernier ressort, sur la demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l’un des moyens invoqués paraît, en l’état de l’instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l’acte attaqué ou du projet de délibération ou d’acte soumis à référendum.
« Lorsque la délibération ou l’arrêté organisant le référendum local ou le projet de délibération ou d’acte soumis à référendum est de nature à compromettre l’exercice d’une liberté publique ou individuelle, le juge des référés du Conseil d’État en prononce la suspension dans les quarante-huit heures.
« Art. 209-31. – La délibération ou l’arrêté visé au premier alinéa de l’article 209-30 est, dans les quinze jours à compter de sa réception, notifié par le haut-commissaire aux maires de la Nouvelle-Calédonie ou, le cas échéant, aux maires des communes dont le territoire est situé sur la province concernée, sauf s’il a été fait droit à sa demande de suspension.
« Les maires organisent le scrutin. Si un maire refuse de procéder à cette organisation, le haut-commissaire, après l’en avoir requis, y procède d’office.
« Art. 209-32. – Les dépenses liées à l’organisation du référendum décidé par le congrès ou par le gouvernement constituent une dépense obligatoire de la Nouvelle-Calédonie.
« Les dépenses liées à l’organisation du référendum décidé par une assemblée de province constituent une dépense obligatoire de la province.
« Les dépenses résultant des assemblées électorales tenues dans les communes pour l’organisation d’un référendum décidé par le congrès, par le gouvernement ou par une assemblée de province leur sont remboursées de manière forfaitaire par la Nouvelle-Calédonie ou par la province concernée, au moyen d’une dotation calculée en fonction du nombre des électeurs inscrits dans la commune et du nombre des bureaux de vote qui y sont installés. Les tarifs de cette dotation sont fixés par décret.
« Art. 209-33. – Il ne peut être organisé de référendum local :
« 1° À compter du premier jour du sixième mois précédant celui au cours duquel il doit être procédé au renouvellement général du congrès et des assemblées de province ;
« 2° Pendant la campagne ou le jour du scrutin prévus pour
« – l’élection du Président de la République ;
« – un référendum décidé par le Président de la République ;
« – la consultation visée à l’article 216 de la présente loi organique ;
« – le renouvellement général des députés ;
« – le renouvellement des sénateurs élus en Nouvelle-Calédonie ;
« – l’élection des membres du Parlement européen ;
« – le renouvellement général des conseillers municipaux.
« La délibération organisant un référendum local devient caduque dans les cas prévus au présent article ou en cas de dissolution du congrès ou de l’assemblée de province concernée, de démission de tous ses membres ou d’annulation définitive de leur élection.
« L’arrêté organisant un référendum local devient caduc dans les cas prévus au présent article ou en cas de démission du gouvernement ou d’adoption d’une motion de censure.
« Le congrès, le gouvernement ou l’assemblée de province ne peuvent organiser un nouveau référendum local portant sur un même objet dans un délai inférieur à un an.
« Art. 209-34. – Le projet ou la proposition soumis à référendum local est adopté si la moitié au moins des électeurs inscrits a pris part au scrutin et s’il réunit la majorité des suffrages exprimés.
« Le texte adopté par voie de référendum est soumis aux règles de publicité et de contrôle applicables aux délibérations du congrès ou de l’assemblée de province ou aux arrêtés du gouvernement.
« Section 2
« Information des électeurs, campagne électorale et opérations de vote
« Art. 209-35. – Un dossier d’information sur l’objet du référendum décidé par le congrès, le gouvernement ou l’assemblée de province est mis à disposition du public dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Art. 209-36. – La campagne en vue du référendum local est ouverte le deuxième lundi précédant le scrutin à zéro heure. Elle est close la veille du scrutin à minuit.
« Elle est organisée par le congrès, le gouvernement ou l’assemblée de province concernée dans les conditions définies au chapitre V du titre Ier du livre Ier du code électoral, à l’exception de l’article L. 52-3. Pour l’application de ces dispositions, il y a lieu de lire : “groupe, parti ou groupement habilité à participer à la campagne” au lieu de : “candidat” et de : “liste de candidats”.
« Les interdictions prévues par l’article L. 50-1, le troisième alinéa de l’article L. 51 et l’article L. 52-1 du code électoral sont applicables à toute propagande relative au référendum dès l’adoption par le congrès, le gouvernement ou l’assemblée de province de la délibération ou l’arrêté visé à l’article 209-30.
« Les dispositions de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d’opinion sont applicables aux référendums locaux.
« Art. 209-37. – I. – Sont habilités à participer à la campagne en vue d’un référendum mentionné aux articles 209-26 et 209-27 :
« – les groupes d’élus visés à l’article 79 ;
« – les partis et groupements politiques dont les listes de candidats ont obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés lors du dernier renouvellement du congrès et des assemblées de province.
« Chaque élu ou candidat ne peut se rattacher qu’à un seul parti ou groupement politique.
« II. – Sont habilités à participer à la campagne en vue du référendum mentionné aux articles 209-28 et 209-29 les partis et groupements politiques dont les listes de candidats ont obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés lors du dernier renouvellement de l’assemblée de province concernée.
« Chaque élu ou candidat ne peut se rattacher qu’à un seul parti ou groupement politique.
« Art. 209-38. – En Nouvelle-Calédonie, les antennes de la société nationale chargée du service public de la communication audiovisuelle outre-mer sont mises à la disposition des groupes d’élus, partis et groupement politiques visés à l’article 209-37 dans les conditions suivantes :
1° Une durée d’émission de trois heures à la télévision et de trois heures à la radio est mise à la disposition de ces groupes, partis et groupement politiques.
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel détermine le temps attribué à chaque groupe, parti ou groupement politique en fonction des suffrages exprimés lors du dernier renouvellement du congrès et des assemblées de province.
Les groupes, partis et groupements politiques peuvent décider d’utiliser en commun leur temps de parole ;
2° Le Conseil supérieur de l’audiovisuel accorde également une durée maximale d’émission de trente minutes à la télévision et de trente minutes à la radio aux partis et groupements politiques qui ne sont pas représentés au sein, selon le cas, du congrès ou de l’assemblée de province. Elle est répartie également entre chaque parti ou groupement politique et ne peut excéder cinq minutes à la télévision et cinq minutes à la radio ;
3° Les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions sont fixées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Celui-ci adresse des recommandations aux exploitants des autres services de communication audiovisuelle autorisés en Nouvelle-Calédonie.
« Art. 209-38. – Seuls peuvent participer au scrutin les électeurs inscrits sur la liste électorale spéciale visée à l’article 188.
« Art. 209-39. – Les opérations préparatoires au scrutin, les opérations de vote, le recensement des votes et la proclamation des résultats sont effectués dans les conditions prévues par le chapitre VI du titre Ier du livre Ier du code électoral, à l’exception des articles L. 56, L. 57, L. 58, L. 66, L. 68 (deuxième alinéa) et L. 85-1.
« Pour l’application du troisième alinéa de l’article L. 65 du même code, il y a lieu de lire : “les réponses portées sur les bulletins sont relevées” au lieu de : “les noms portés sur les bulletins sont relevés” ; “des feuilles de pointage” au lieu de : “des listes” ; “des réponses contradictoires” au lieu de : “des listes et des noms différents” ; “la même réponse” au lieu de : “la même liste ou le même candidat”.
« Les bulletins de vote autres que ceux fournis par le congrès, le gouvernement ou la province concernée, les bulletins trouvés dans l’urne sans enveloppe ou dans une enveloppe non réglementaire, les bulletins ou enveloppes portant des signes intérieurs ou extérieurs de reconnaissance, les bulletins ou enveloppes portant des mentions quelconques n’entrent pas en compte dans le résultat du dépouillement. Ils sont annexés au procès-verbal ainsi que les enveloppes non réglementaires et contresignés par les membres du bureau de vote. Chacun des bulletins ou enveloppes annexés porte mention des causes de l’annexion.
« Art. 209-40. – Sont applicables au référendum local les dispositions du chapitre VII du titre Ier du livre Ier du code électoral, à l’exception des articles L. 88-1 et L. 95 et des 1° à 5° des I, II et III de l’article L. 113-1.
« Pour l’application de ces dispositions, il y a lieu de lire : “groupe politique habilité à participer à la campagne” au lieu de : “candidat” et de “liste de candidats”. »
« Art. 209-41. – Les dispositions du code électoral mentionnées au présent article sont applicables dans les conditions fixées aux articles L. 386, L. 390, L. 391 et L. 392 dudit code.
« Art. 209-42. – La régularité du référendum local peut être contestée dans les conditions, formes et délais prescrits pour les réclamations contre l’élection des membres de l’assemblée de province et du congrès.
« Art. 209-43. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent chapitre.
« Chapitre 2
« Droit de pétition
« Art. 209-44. – Le congrès et les assemblées de province peuvent être saisis, par voie de pétition, de toute question relevant de leur compétence.
« Art. 209-45. – La pétition peut être présentée à titre individuel ou collectif. Elle doit être établie par écrit, sous quelque forme que ce soit, rédigée dans les mêmes termes et signée par 5 % au moins des électeurs inscrits sur les listes électorales de la Nouvelle-Calédonie ou de la province concernée. Elle doit être datée et comporter le nom, le prénom, l’adresse de chaque pétitionnaire et le numéro de son inscription sur la liste électorale.
« La pétition est adressée au président du congrès ou au président de l’assemblée de province concerné. Le bureau du congrès ou de l’assemblée de province concernée se prononce sur la recevabilité de la pétition par une décision motivée, qui est publiée au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie et qui peut faire l’objet d’un recours devant le tribunal administratif.
« Lorsque la pétition est recevable, le président du congrès ou le président de l’assemblée de province concerné en fait rapport à la plus prochaine session. »
La présente loi sera exécutée comme loi de l’État.
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