N° 1367 - Proposition de loi de M. Jean-Charles Taugourdeau visant à garantir la supériorité des accords d'entreprise sur le code du travail



N° 1367

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 septembre 2013.

PROPOSITION DE LOI

visant à garantir la supériorité des accords d’entreprise
sur le code du travail,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Jean-Charles TAUGOURDEAU, Olivier MARLEIX, Yannick MOREAU, Alain MOYNE-BRESSAND, Thierry MARIANI, Jean-Marie SERMIER, Jean-François MANCEL, Isabelle LE CALLENNEC, Fernand SIRÉ, Thierry LAZARO, Olivier DASSAULT, Alain MARTY, Jean-Pierre DOOR, Philippe Armand MARTIN, Laurent FURST, Jean-Pierre VIGIER, Yannick FAVENNEC, Alain CHRÉTIEN, Véronique BESSE, Jean-Pierre GORGES, Guy TEISSIER, Valérie BOYER et Lucien DEGAUCHY,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’article L. 2251-1 alinéa 1 du code du travail dispose : « une convention ou un accord peut comporter des stipulations plus favorables aux salariés que les dispositions légales en vigueur ».

À la lecture de ce texte, on comprend aisément que les dispositions légales sont l’alpha et l’oméga du droit du travail.

La loi, qui ne peut évidemment pas adopter une approche casuistique, ne doit pas non plus freiner, sinon empêcher, l’adaptation de nos entreprises à l’économie mondialisée afin que la surprotection de l’emploi ne nuise pas au travail.

Il est aujourd’hui vital d’adapter nos efforts afin de permettre aux entreprises de prendre toutes les mesures nécessaires à l’ajustement des conditions de travail.

L’idée est donc de permettre à une majorité de salariés, après accord, de décider de leur durée de travail, de privilégier l’emploi sur le salaire ou le salaire sur l’emploi.

En effet, le tourisme, l’agriculture, l’afflux ou la perte de commandes dans le domaine de l’industrie, sont autant de domaines qui, en raison de leur spécificité, nécessitent une grande flexibilité.

À l’heure actuelle, il n’est pas envisageable qu’un responsable de complexe hôtelier ou qu’un agriculteur, alors même qu’ils peuvent réaliser l’essentiel de leur activité sur une période déterminée et parfois courte, puissent déroger au code du travail quand bien même, après accord au sein de leur entreprise, les circonstances économiques et spécifiques de l’entreprise l’exigeraient.

Les dispositions du code du travail et les procédures d’autorisation auprès de l’inspection du travail peuvent constituer des entraves importantes au maintien des emplois et aux capacités d’action des entreprises.

En outre, le principe de faveur consistant, dans l’hypothèse d’un conflit de normes (dispositions légales / accords de branches / accords d’entreprise…), à appliquer systématiquement la règle la plus favorable au salarié, porte préjudice au marché du travail en freinant la compétitivité de nos entreprises et en mettant en péril le maintien des emplois.

Ce principe, fortement suivi en jurisprudence, est aujourd’hui contesté, non seulement par les entreprises, mais également par les auteurs de doctrine.

Le régime des accords d’entreprise a certes été substantiellement modifié par les lois des 4 mai 2004 (n° 2004-391) et 20 août 2008 (n° 2008-78), mais cette évolution est insuffisante.

D’une part, la loi du 4 mai 2004 accorde davantage d’autonomie à la négociation d’entreprise. Une convention ou un accord collectif d’entreprise peut ainsi déroger, y compris dans un sens moins favorable aux salariés, aux dispositions d’une convention ou d’un accord conclu à un niveau supérieur (branche, professionnel, interprofessionnel), dès lors que cette dérogation n’a pas été explicitement exclue.

D’autre part, la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail autorise désormais les entreprises à fixer elles-mêmes le contingent d’heures supplémentaires ainsi que les contreparties (uniquement en repos) pour les salariés. Pour ce faire, il suffit d’un accord signé avec des organisations syndicales représentant au moins 30 % des salariés.

Si les entreprises peuvent désormais, après accord conjoint de la direction et des représentants des salariés, aménager les conditions de travail dans certains domaines, cette faculté est encore trop restreinte.

Dans le prolongement de cette dynamique, il est donc nécessaire d’accroître encore les possibilités de négociation entre la direction et les représentants des salariés afin que toute entreprise, chaque fois que nécessaire, puisse adapter les conditions de travail en fonction de ses besoins ; les entreprises ne devant plus être subordonnées à la loi en dépit de toute considération factuelle.

En ouvrant la voie à la véritable flexibilité et au pragmatisme, cette mesure, gage d’une plus grande liberté pour les entreprises, leur permettraient enfin d’être compétitives, de créer du travail, et donc des emplois.

Il est temps d’affirmer que la meilleure protection pour un salarié est d’avoir toujours du travail dans une entreprise capable de répondre dans l’instant à la demande du client. Ce qui n’empêche pas ensuite le temps de la discussion paritaire sur le traitement social du travail.

Lors de la discussion de cette proposition de loi, il appartiendra, en outre, au législateur de définir les modalités d’expression de cet accord dans l’entreprise (à savoir qu’il pourrait s’agir d’un vote à bulletin secret de l’ensemble des salariés. En cas de présence d’un comité d’entreprise, il pourra être opportun que le comité d’entreprise s’exprime avant le vote. En cas de présence de syndicats, ceux-ci seront naturellement consultés).

Tels sont, Mesdames, Messieurs, les objectifs de la présente proposition de loi pour donner la parole à l’ensemble des salariés d’une entreprise qui maîtriseraient ainsi directement leurs conditions de travail en fonction de la spécificité de leur entreprise.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

L’article L. 2251-1 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 2251-1. – Les conventions ou accords d’entreprises priment sur les dispositions légales en vigueur. »


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