N° 2076 - Proposition de loi de M. Frédéric Reiss visant à étendre le champ de l'article L. 541-10-6 du code de l'environnement aux vendeurs transfrontaliers



N° 2076

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 juillet 2014.

PROPOSITION DE LOI

visant à étendre le champ de l’article L. 541-10-6 du code
de l’environnement aux vendeurs transfrontaliers,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire,
à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Frédéric REISS, Jean-Pierre BARBIER, Jacques Alain BÉNISTI, Sylvain BERRIOS, Jean-Claude BOUCHET, Philippe BRIAND, Guillaume CHEVROLLIER, Marie-Christine DALLOZ, Jean-Pierre DECOOL, Lucien DEGAUCHY, Nicolas DHUICQ, Virginie DUBY-MULLER, Daniel FASQUELLE, Marc FRANCINA, Laurent FURST, Claude de GANAY, Annie GENEVARD, Charles-Ange GINESY, Philippe GOSSELIN, Arlette GROSSKOST, Michel HEINRICH, Michel HERBILLON, Antoine HERTH, Patrick HETZEL, Francis HILLMEYER, Christian KERT, Jean LASSALLE, Alain LEBOEUF, Dominique LE MÈNER, Véronique LOUWAGIE, Gilles LURTON, Alain MARC, Patrice MARTIN-LALANDE, Philippe Armand MARTIN, Alain MARTY, Jean-Claude MATHIS, Alain MOYNE-BRESSAND, Jacques PÉLISSARD, Bernard PERRUT, Bérengère POLETTI, Didier QUENTIN, Laure de LA RAUDIÈRE, Jean-Luc REITZER, Sophie ROHFRITSCH, Fernand SIRÉ, Éric STRAUMANN, Claude STURNI, Lionel TARDY, Guy TEISSIER, Philippe VITEL et Michel ZUMKELLER,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’article L. 541-10-6 du code de l’environnement, relatif à la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) des éléments d’ameublement, s’applique à l’ensemble des personnes mettant sur le marché national des éléments d’ameublement.

Toutefois, certains vendeurs transfrontaliers, notamment lors de ventes par communication à distance et établis hors du territoire national, peuvent s’estimer exonérés de leur obligation au titre de l’article L. 541-10-6. Le développement de ce type de vente est susceptible de porter atteinte à l’équilibre financier de la filière et de créer des distorsions de concurrence au détriment des metteurs sur le marché établis sur le territoire national.

Une affaire rendue en matière de copie privée et récemment portée devant la Cour de Justice de l’Union Européenne (C-462/09, 16 juin 2011, Stichting de Thuiskopie c/ Opus Supplies Deutschland GmbH et autres, à propos de vente par communication à distance entre l’Allemagne et la Hollande) a montré que certains vendeurs à distance contournaient aisément leurs obligations de metteur sur le marché par des montages contractuels.

En l’espèce, le vendeur allemand proposait des contrats de vente aux particuliers, disposant que l’utilisateur final était mis en possession du bien acheté en Allemagne et que les marchandises étaient expédiées d’Allemagne vers les Pays-Bas pour le compte et au nom du client hollandais. Le vendeur agissait contractuellement en tant qu’agent du consommateur final, bien qu’en réalité, le transporteur ait été engagé par le vendeur. L’avocat général près la CJUE a qualifié ce montage de « construction inhabituelle … visant à priver d’effet le droit de l’Union ».

Par cette construction purement contractuelle, c’est l’utilisateur final et non le vendeur à distance qui procède à un mouvement de bien intracommunautaire, synonyme de mise sur le marché, fait générateur de l’obligation de la REP. Or il est impossible de récupérer l’éco-contribution auprès de milliers d’utilisateurs finaux.

Il est donc nécessaire d’écarter ce type de montage contractuel en soumettant à la REP, et par dérogation à l’article L. 541-10-6° dans sa rédaction actuelle, tout vendeur d’éléments d’ameublement à des utilisateurs finaux établis sur le territoire national. La règle générale continue à s’appliquer pour les ventes à des personnes qui ne sont pas utilisateurs finaux des éléments d’ameublement, tels que des intermédiaires dans la distribution d’éléments d’ameublement.

Il est nécessaire de limiter l’effet du nouvel article L. 541-10-6-II aux seuls vendeurs qui « dirigent » leurs activités vers la France, au sens du règlement du règlement n° 44/2001/CE. Il s’agit d’éviter qu’un vendeur établi hors du territoire national soit soumis inopportunément à la REP française des éléments d’ameublement, bien que ne prospectant pas de clientèle résidant en France, du seul fait que des résidents français s’adresseraient à ce vendeur de manière épisodique ou imprévisible.

Le vendeur transfrontalier devrait désigner un mandataire établi en France en vue d’accomplir et veiller au respect des obligations du vendeur.

L’extension du champ de l’article L. 541-10-6 aux vendeurs transfrontaliers est donc un moyen de mettre un terme à une situation discriminante pour les produits français, en traitant de manière identique et proportionnée des biens se trouvant, à tout point de vue, dans une situation identique.

Il serait en effet inéquitable de laisser à la charge des consommateurs d’entreprises françaises collectant l’éco-contribution, le poids financier du traitement des déchets générés des produits dont la vente était hors du champ du dispositif de financement.

La situation actuelle ne maintient pas les produits nationaux et les produits d’autres États membres dans une situation identique. Elle place au contraire les produits français face à une concurrence déloyale.

L’objectif de la soumission des ventes transfrontalières au système de financement de la collecte et du traitement des déchets générés par les éléments d’ameublement ne peut donc s’analyser comme une discrimination des produits issus d’autres États membres mais doit, au contraire, se comprendre comme un moyen de rétablir une égalité de traitement de produits identiques.

Un dispositif tendant à assurer l’assujettissement au versement de l’éco-participation des produits commercialisés directement par des vendeurs établis à l’extérieur du territoire français auprès d’utilisateurs finaux résidant en France n’est donc pas contraire aux dispositions des traités européens, mais constitue au contraire une juste et correcte application de ces derniers.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Après le premier alinéa de l’article L. 541-10-6 du code de l’environnement, il est inséré l’alinéa suivant :

« Doit également satisfaire à l’obligation ci-dessus tout vendeur professionnel établi hors du territoire national, dirigeant ses activités vers le territoire national, au sens du règlement n° 44/2001/CE, et vendant des éléments d’ameublement directement à un utilisateur final établi sur le territoire national. Dans ce cas, un mandataire établi en France est désigné par le vendeur pour satisfaire au présent article. »


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