N° 3529
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 1er mars 2016.
PROPOSITION DE LOI
visant à assurer une égalité de traitement entre salariés
et non-salariés en matière de protection sociale,
(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par Mesdames et Messieurs
Yves CENSI, Sophie ROHFRITSCH, Élie ABOUD, Marie-Jo ZIMMERMANN, Franck RIESTER, Jean-Michel COUVE, Sylvain BERRIOS, Bernard GÉRARD, Valérie LACROUTE, Bernard PERRUT, Patrick HETZEL, Marc FRANCINA, Arlette GROSSKOST, Philippe BRIAND, Jean-Claude BOUCHET, Jean-Claude MATHIS, Jean-Charles TAUGOURDEAU, Michel VOISIN, Alain MARTY, Alain MOYNE-BRESSAND, Yves ALBARELLO, Jean-Luc REITZER, Michel HEINRICH, Lionel TARDY, Jean-Pierre BARBIER, Laurence ARRIBAGÉ, Luc CHATEL, Alain CHRÉTIEN et Marcel BONNOT,
députés.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La présente proposition de loi a pour objectif de moderniser le régime des Contrats Madelin institué en 1994. Elle vise à assurer une égalité de traitement des travailleurs indépendants vis-à-vis notamment des salariés.
Vingt ans après sa création, le contrat Madelin a bien résisté aux usages du temps. Son succès en est la meilleure preuve mais des modifications sont néanmoins nécessaires afin de conforter l’égalité de traitement entre salariés et non-salariés. En outre, les contrats Madelin n’ont pas bénéficié de certaines avancées législatives et réglementaires dont ont bénéficié le plan d’épargne retraite populaire (PERP), le plan d’épargne retraite collectif (PERC) ou l’article 83. Au nom de l’égalité de traitement, une harmonisation est indispensable, d’autant qu’elle s’impose au nom du principe constitutionnel d’égalité devant les charges publiques. La règle des 19 % (article 83 du code général des impôts) en vigueur pour les salariés est, en effet, inspirée du souci d’harmonisation du statut social des travailleurs du secteur privé avec celui des fonctionnaires. Enfin, il convient de corriger certaines lacunes ou certains vides pouvant, compte tenu de la jurisprudence, remettre en cause les fondements mêmes des contrats Madelin.
I. – Les principes fondateurs des contrats Madelin toujours d’actualité
À la sortie de la Seconde Guerre Mondiale, il était admis que l’avenir était au salariat et en particulier au salariat au sein de grandes structures. Cette prévision s’est révélée exacte durant les Trente Glorieuses et un peu au delà. Le poids des non-salariés est passé de plus de 14 % de la population active en 1948 à moins de 9 % en 2000.
Le développement des grandes entreprises, le recul de l’emploi agricole, la diminution du petit commerce au profit des super et hypermarchés ont provoqué cette évolution. Il était admis que les petites et moyennes entreprises devaient également à terme disparaître au nom d’une concentration jugée alors inévitable.
Depuis une dizaine d’années, nous constatons un retournement de tendance qui est d’autant plus net si nous excluons la population agricole.
Le monde du travail s’est transformé notamment en raison du rôle accru des techniques de l’information et de la communication. Le travail est de moins en moins physique et de plus en plus intellectuel. Il s’exerce de moins en moins dans le secteur secondaire et de plus en plus dans le secteur tertiaire.
Le passage de la civilisation de l’usine à celle du savoir explique la progression du nombre des indépendants. Par simplicité organisationnelle et afin de contourner les rigidités du droit du travail, les entreprises ont également externalisé une partie de leurs activités au profit de travailleurs non-salariés.
La France comptait, ainsi, en 2013, 2,9 millions de non-salariés occupant 11,2 % des emplois. Pour mémoire, il y avait, toujours en 2013, 22,8 millions de salariés. Avec la création du statut d’autoentrepreneur, le nombre d’indépendants s’accroît chez les actifs les plus âgés comme chez les jeunes. Actuellement parmi les actifs occupés âgés de 50 ans ou plus, 16 % sont non-salariés. Chez les moins de 30 ans, ce taux est de 4,5 % en progression de 1,5 point depuis 2005.
Source : INSEE
Pour un droit du travail centré sur « les travailleurs » et non sur les statuts
Dans les prochaines années, les frontières entre travail salarié et non-salarié ont vocation à s’estomper voire à disparaître. L’augmentation de la mobilité professionnelle et l’allongement des carrières en relation avec celui de l’allongement de la durée de cotisation pour les retraites nous obligent à revisiter le droit du travail. Ce dernier doit être phase avec la civilisation du savoir qui se dessine. Ce droit doit être celui de l’activité professionnelle en relation avec le droit de l’activité économique qui supplante peu à peu celui de l’entreprise. Il convient donc de mettre un terme à l’opposition stérile entre salariés et indépendants assortie d’une différence de protection conçue de manière manichéenne, au profit des premiers. Le droit de l’activité professionnelle ne peut que se caractériser par le fait qu’il concerne tous les travailleurs, du plus subordonné au totalement indépendant, les différences de protection, et donc de statut, ne se concrétisant pas par l’appartenance à une catégorie mais par le degré d’autonomie, donc de responsabilité. Au demeurant, le classement en deux catégories et la construction d’un arsenal protecteur au bénéfice exclusif des travailleurs appartenant à l’une d’elles est une source d’inégalité et de frustrations comme en témoigne l’arrêt du Conseil d’État, Dame Barbin, adopté dans la séance du 9 septembre 2014.
Cette jurisprudence doit amener à repenser le droit du travail et à amorcer l’indispensable création d’un droit de l’activité professionnelle avec la prise en compte de la dépendance économique comme facteur de déséquilibre contractuel nécessitant une protection (Jacques Barthélémy « Du droit du travail au droit de l’activité professionnelle » Les cahiers du DRH – éditions Lamy – juin 2008 n° 146 ; Paul Henri Antonmattei et Jean-Christophe Sciberras « Le travailleur économiquement dépendant : quelle protection ? » - rapport de novembre 2008 pour le ministre du travail).
La notion d’indépendance et donc de non subordination avait comme corollaire une moindre couverture sociale. La possession de l’outil de travail qui est toute relative valait protection sociale. Le fonds de commerce constituait un patrimoine supposé mobilisable en cas de difficultés. Or, bien évidemment que cette couverture était dès l’origine virtuelle. Elle l’est devenue de plus en plus avec la révolution du commerce que nous avons connue depuis soixante ans et avec l’allongement de l’espérance de vie. Un commerçant, un artisan est autant en situation de vulnérabilité sociale qu’un salarié en cas de retournement de conjoncture. La vente du fonds de commerce constituait tout à la fois la couverture chômage, prévoyance et retraite. Aujourd’hui, tel n’est plus le cas. Les indépendants se sont rendu compte qu’il fallait mettre en place une protection sociale adaptée à leurs besoins.
Les régimes de base et complémentaires se sont étoffés sans pour autant corriger les inégalités de traitement. Ainsi, le risque chômage n’est toujours pas traité par les régimes de base des indépendants.
Les avancées de la loi de 1994
La loi de 1994 a créé les groupements Madelin permettant d’apporter aux travailleurs non sédentaires des revenus de substitution à ceux d’activité en cas de perte d’emploi subie. Ils ont ouvert également l’accès aux travailleurs non sédentaires à une couverture santé, prévoyance et retraite supplémentaire.
Le 13 janvier 1994, Alain Madelin, ministre des entreprises et du développement économique, chargé des petites et moyennes entreprises et du commerce et de l’artisanat, présentait ainsi devant l’Assemblée nationale, son projet de loi relatif à l’initiative et à l’entreprise individuelle, « la protection sociale des « non-non » - les « non-salariés - non agricoles » - est très en retrait par rapport à celle des salariés, des dirigeants de sociétés affiliées au régime général. C’est ce qui explique le recours à la formule des SARL… Les entrepreneurs individuels ne disposent ni d’une couverture obligatoire pour le risque chômage ni d’indemnités journalières en cas de maladie. Leur retraite complémentaire ou leur régime de prévoyance sont peu développés en ce qui concerne la partie obligatoire. Il y a, à cela, une raison très simple : les cotisations versées pour les régimes facultatifs par les entrepreneurs individuels ne sont pas déductibles de l’impôt sur le revenu, contrairement à ce qui existe pour les salariés des entreprises ou pour les fonctionnaires. II y a là un paradoxe extraordinaire : un entrepreneur individuel peut déduire fiscalement l’assurance de ses machines, mais ne peut pas déduire ses assurances personnelles. Revendication ancienne, revendication principale du rapport Barthélemy, revendication d’équité, revendication, justifiée. Aujourd’hui, avec ce projet de loi, nous accordons la même déduction fiscale des cotisations d’assurances volontaires aux entrepreneurs individuels qu’aux autres actifs. Nous introduisons aussi des souplesses dans la gestion des droits à la retraite de l’entrepreneur individuel ». Les objectifs qui avaient été assignés à la loi ont été, en grande partie, atteints.
II. – Le régime actuel des contrats Madelin
Les contrats Madelin s’adressent aux personnes soumises à l’impôt sur le bénéfice industriel et commercial (BIC) ou sur le bénéfice non commercial (BNC) et affiliées au régime obligatoire maladie et vieillesse des travailleurs non-salariés (non agricoles). La loi de finances rectificative pour 1995 a étendu ces dispositions aux conjoints collaborateurs.
La souscription d’un contrat Madelin suppose l’adhésion à une association qui souscrit un contrat de groupe auprès d’une compagnie d’assurance. Ce mode opératoire rattache les contrats Madelin à des contrats collectifs et donc au deuxième pilier de la couverture sociale. Il ne s’agit pas d’un produit d’assurance individuelle contrairement à ce qui est fréquemment mentionné.
Les cotisations doivent présenter un caractère régulier dans leur montant et dans leur périodicité. Cette régularité souligne également l’appartenance du contrat Madelin aux produits de retraite et de prévoyance du deuxième pilier. Pour bénéficier d’un contrat Madelin, le travailleur indépendant doit, par ailleurs, être à jour de ses cotisations obligatoires.
Pour l’assurance retraite et prévoyance, il est précisé que les cotisations doivent être versées au moins une fois par an. Pour l’assurance retraite, un montant minimal de cotisation est fixé à la souscription. Chaque année, ce montant de base varie proportionnellement au plafond de la Sécurité sociale et l’adhérent peut, s’il le souhaite, faire évoluer sa cotisation entre le montant minimal de base fixé à la souscription et un maximum de quinze fois ce montant.
Les adhérents peuvent verser des cotisations supplémentaires en vue de se constituer une retraite supplémentaire facultative pour les années comprises entre la date de leur affiliation au régime obligatoire d’assurance vieillesse et la date de leur adhésion au contrat de groupe. Le montant de la cotisation supplémentaire versée au cours d’une année est égal au montant total de la cotisation périodique versée au titre de la même année.
La loi prévoit, s’agissant des garanties retraite, la finalité sociale (qui les distingue d’un simple produit d’épargne) qui induit la sortie en rente et l’impossibilité de rachat avant terme du capital déjà constitué. Toutefois, un déblocage anticipé est prévu dans plusieurs situations :
– une situation qui le justifie selon le président du tribunal de commerce auprès duquel est instituée une procédure de conciliation ;
– l’expiration des droits de l’assuré aux allocations chômage prévues par le code du travail en cas de licenciement ;
– l’absence de contrat de travail ou de mandat social depuis deux ans au moins à compter du non-renouvellement du mandat social ou de la révocation pour les assurés qui ont exercé des fonctions d’administrateur, de membre du directoire ou de membre de conseil de surveillance, et n’ont pas liquidé leur pension dans un régime obligatoire d’assurance vieillesse ;
– une cessation d’activité non salariée pour cause de liquidation judiciaire (sur présentation du jugement du tribunal de commerce) ;
– une invalidité de deuxième ou troisième catégorie de l’assuré, c’est-à-dire une invalidité constatée de 80 % au moins et qui l’empêche d’exercer une activité professionnelle ;
– le décès du conjoint ou du partenaire de pacs ;
– la situation de surendettement de l’assuré, sur demande adressée à l’assureur, soit par le président de la commission de surendettement des particuliers, soit par le juge lorsque le déblocage des droits individuels résultant de ces contrats paraît nécessaire à l’apurement du passif de l’intéressé.
En matière de prévoyance, la règle est aussi la sortie en rente, ce qui n’a de pertinence que pour l’invalidité, d’autant plus que la sortie en capital est admise pour les salariés en cas de décès.
Du fait de leur rattachement à la couverture sociale des travailleurs non-salariés, les cotisations versées par les travailleurs indépendants au titre de contrats groupe de retraite, de prévoyance complémentaire et de garantie perte d’emploi peuvent être déduites de leur revenu imposable dans la limite d’un plafond fiscal. La loi de 1994 a de la sorte contribué à une meilleure égalité de traitement en étendant aux travailleurs non-salariés le bénéfice de la règle de neutralité fiscale sous plafond des contributions alimentant des garanties collectives de prévoyance et de retraite supplémentaire (article 154 bis du code général des impôts).
Les détenteurs de contrats « Madelin » peuvent donc déduire du BIC ou BNC avant impôt les cotisations versées à condition que leurs versements présentent un caractère régulier dans leur montant et leur périodicité, sous peine d’une reprise de l’avantage fiscal.
Les plafonds de déductibilité sont les suivants :
– pour la retraite, 10 % du bénéfice imposable dans la limite de huit fois le plafond annuel de sécurité sociale (PASS), majoré de 15 % sur la fraction de ce bénéfice imposable entre un et huit PASS ou de 10 % du PASS ;
– pour la prévoyance, 3,75 % du bénéfice imposable majoré de 7 % du PASS, le tout plafonné à 3 % de huit PASS ;
– pour la perte d’emploi subie, 1,875 % du bénéfice imposable dans la limite de huit PASS ou 2,5 % du PASS.
Ces taux n’ont pas été fixés par hasard ; ils sont l’expression de la transposition, aux travailleurs non-salariés, des règles concernant les salariés, en prenant en compte la spécificité de leurs régimes.
En contrepartie de la déductibilité, les indemnités journalières versées sont à réintégrer dans le revenu professionnel de l’année si l’activité professionnelle se poursuit. En cas d’arrêt de l’activité professionnelle, les indemnités journalières sont imposables à l’impôt sur le revenu après abattement de 10 %.
À la sortie, la rente est soumise au même régime que les pensions de retraite. Elle bénéficie de l’abattement de 10 % et est soumise aux contributions sociales (CSG, CRDS et 1 % maladie, 0,3 % de contribution de solidarité pour l’autonomie).
Pour l’impôt de solidarité sur la fortune, les contrats Madelin obéissent aux mêmes règles que les PERP (créés plus tard mais dont le régime en est inspiré même s’il s’agit ici de garanties relevant du troisième pilier).
– Pendant la phase de cotisation, le capital constitué n’est pas assujetti à l’ISF dans la mesure où l’adhérent ne peut pas en disposer.
– Au moment de la retraite, la valeur de capitalisation de la rente viagère perçue sera exonérée d’impôt de solidarité sur la fortune à condition qu’elle ait été constituée par le versement régulier de primes pendant une durée d’au moins quinze ans.
Plus d’un million de contrats ont été souscrits
Les contrats Madelin qui reposent sur des contrats d’assurance de groupe souscrits auprès d’un assureur, après des débuts laborieux, ont rencontré dans la dernière décennie 2000 un réel succès.
Au 30 juin 2014, plus d’un million de contrats de retraite « Madelin » sont en cours de constitution auprès des compagnies d’assurances. Le taux d’équipement des travailleurs non-salariés dépasse 58 %.
À la fin juin 2014, le montant des provisions mathématiques des contrats en phase de constitution s’élève à 24,0 milliards d’euros.
À la fin 2013, les cotisations versées au titre des contrats de retraite « Madelin » s’élevaient à 2,8 milliards d’euros et les prestations ont dépassé 1 milliard d’euros.
III. – Les améliorations proposées au contrat Madelin
La présente proposition de loi vise à modifier sur plusieurs points le régime juridique des contrats Madelin avec comme objectif, l’égalité de traitement entre les différentes catégories d’actifs en France.
1. Autoriser les versements complémentaires dans le cadre des contrats Madelin
Depuis la loi de 2010 sur les retraites, les salariés peuvent effectuer des versements individuels facultatifs (VIF) si le contrat souscrit l’autorise. Les sommes versées entrent dans l’enveloppe fiscale de l’épargne retraite individuelle.
Cette faculté n’a pas été étendue aux contrats Madelin. Il s’agit soit d’un oubli, soit d’une mauvaise interprétation de la part du législateur de la nature du contrat Madelin qui n’est pas un produit d’épargne individuel. Le contrat Madelin relève, comme les contrats article 83, du deuxième pilier de la protection sociale, celui des garanties collectives tandis que le versement volontaire relève du troisième pilier, celui de l’assurance individuelle.
Par souci de parallélisme, l’article 1er de la présente proposition de loi vise à autoriser les versements individuels sur les contrats Madelin.
2. Garantir la transférabilité des différents produits retraite
Compte tenu de la mobilité croissante des actifs, il est important de garantir la portabilité des droits en matière de produits de retraite et de prévoyance surtout quand ces produits obéissent aux mêmes principes. Un actif peut, en effet, être soumis durant sa carrière professionnelle à plusieurs statuts, fonction publique, salarié, travailleurs non-salariés... Par souci de simplicité et d’efficacité, il est important de permettre le transfert des droits accumulés sur un article 83 par exemple vers un contrat Madelin et inversement.
Cette transférabilité a été admise par la circulaire DSS/5B n°2009-32 du 30 janvier 2009. Ce droit est parfois malaisé à faire respecter. L’article 2 de la présente proposition de loi autorise la portabilité des contrats Madelin vers un plan d’épargne retraite populaire, vers un PERCO ou vers un article 83.
3. Permettre une sortie en capital à hauteur de 20 %
Une sortie en capital pour la garantie retraite pourrait être instituée. Certes un produit retraite est un produit avec une sortie en rente. Le législateur ayant prévu une sortie à hauteur de 20 % pour le PERP et les produits assimilés, il serait souhaitable d’élargir cette possibilité au contrat Madelin. Actuellement, un travailleur non-salarié ayant souscrit à un contrat Madelin pour bénéficier de cette sortie en capital est contraint de le transférer sur un PERP. Tel est l’objet de l’article 3 de la présente proposition de loi.
4. Harmoniser les règles pour la sortie en capital entre contrat Madelin et article 83
Au nom de l’égalité de traitement, une harmonisation des modes de sortie entre les régimes « salariés » et les contrats Madelin est indispensable.
– Pour les contrats de prévoyance décès souscrits par les entreprises au profit de leurs salariés, la sortie en capital est possible. En revanche, les cotisations des travailleurs non-salariés finançant des prestations décès en capital ne sont pas admises à déduction.
– En matière de prévoyance, l’article L. 132-23 du code des assurances prévoit des sorties en capital exonérées d’impôt sur le revenu notamment en cas de décès du conjoint ou du partenaire d’un pacte civil de solidarité.
L’article 4 prévoit donc d’aligner l’article L. 144-1 du code des assurances sur celui de l’article L. 132-23 et de modifier en conséquence l’article 154 bis du code général des impôts, d’autant que c’est par une interprétation littérale de ce texte et non de son esprit que l’administration fiscale a volontairement introduit cette différence.
5. Conforter la couverture de tous les travailleurs indépendants
Compte tenu de la jurisprudence, certaines professions pourraient se voir privées de l’accès aux contrats Madelin. Il convient de conforter le principe que tous les travailleurs non-salariés peuvent souscrire quelle que soit leur activité à un tel contrat.
En effet, récemment, ce droit a pu sembler être remis en cause pour les agents d’assurance qui disposent (en vertu de l’article 93 ter du code général des impôts) de la faculté d’opter, en matière d’impôt sur le revenu, pour le régime applicable aux salariés.
La raison de cette exception se trouve dans le fait que si l’agent général d’assurances est un travailleur indépendant en raison de son indépendance technique conséquence de sa qualification de professionnel libéral, il est, malgré l’absence de subordination juridique, en état de dépendance économique à l’égard d’une compagnie d’assurance à laquelle il est lié par un mandat.
Ceci étant, l’option pour la détermination du montant de l’impôt sur le revenu ne remet pas en cause la qualification juridique de travailleurs non-salariés, au cas précis de professionnel libéral relevant de droit du statut de travailleur indépendant.
Pourtant, le conseil d’État vient de dénier à ces professionnels libéraux le bénéfice de l’article 154 bis du code général des impôts dans un arrêt Dame Barbin, adopté dans la séance du 9 septembre 2014.
L’article 154 bis du code général des impôts a pour objectif de compléter la protection sociale de base des non-salariés dont relève l’agent général d’assurances malgré l’option. L’exercice de l’option, née de l’article 93 ter du code général des impôts, ne devrait donc pas faire obstacle à son application.
Au demeurant, la position du conseil d’État conduit à ce que les agents généraux d’assurance ayant opté pour le régime fiscal des salariés soient les seuls travailleurs (de droit privé) ne pouvant pas bénéficier de la neutralité fiscale sous plafond des contributions destinées à alimenter des garanties collectives de retraite supplémentaire et de prévoyance, puisque cette option n’est prévue que pour cette profession ! L’article 5 vise donc à clarifier leur situation en confirmant les principes qui avaient été énoncés au moment de l’adoption du régime des contrats Madelin.
De façon plus générale, on peut observer que d’autres professionnels libéraux relèvent de la qualification sociale de travailleurs non-salariés tout en étant considérés comme des salariés au point de vue fiscal : c’est le cas, par exemple, des associés de sociétés d’exercice libéral, qui sont imposables dans la catégorie des traitements et salaires, bien qu’affiliés au régime au régime social des travailleurs non-salariés (Rép. min. éco. n° 39397 à M. Bertrand Cousin : JOAN Q 16 sept. 1996, p. 4930, reprise au BOI-RSA-GER-10-30-20120912, n° 510).
Il convient donc de clarifier dans la loi que tous les professionnels libéraux relevant de la catégorie sociale des travailleurs non-salariés doivent être traités de façon identique au regard de la loi fiscale, quelle que soit la catégorie d’imposition dont ils relèvent.
6. La question de la déductibilité sociale
La présente proposition de loi aurait pu également traiter la question de la déductibilité sociale des primes versées dans le cadre des contrats Madelin.
Les contributions alimentant des garanties collectives de retraite et de prévoyance pour les salariés sont non seulement fiscalement neutres mais la part de ces contributions acquittée par l’employeur n’entre pas dans l’assiette des cotisations de Sécurité sociale en vertu de l’article L. 242-1 alinéas 6 à 8 du code de la Sécurité sociale. Cette disposition fait suite à la loi du 29 décembre 1979 et au décret du 23 juillet 1985 par souci d’alignement des droits de la Sécurité sociale et du droit fiscal.
Compte tenu de la nature des contrats Madelin, il serait logique que la contribution versée dans le cadre de ces contrats soit déductible de l’assiette du régime social des indépendants et pour les professions libérales de celle de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL). En raison de l’hostilité des administrateurs de la Caisse autonome nationale de compensation de l’assurance vieillesse artisanale (CANCAVA), de l’Organisation autonome nationale de l’industrie et du commerce (ORGANIC), de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) et de la Caisse nationale d’assurance maladie des professions indépendantes (CANAM), cette mesure n’avait pas pu être adoptée en 1994.
Compte tenu des difficultés des régimes sociaux, les auteurs y ont renoncé tout en soulignant que cette déductibilité serait logique au regard de la pratique en vigueur pour les salariés.
Telles sont les considérations pour lesquelles je vous demande, Madame, Monsieur de bien vouloir adopter la présente proposition de loi.
PROPOSITION DE LOI
Le 1 du I de l’article 163 quatervicies du code général des impôts est complété par un d ainsi rédigé :
« d) aux contrats prévus à l’article L. 144-1 du code des assurances »
L’article L. 144-1 du code des assurances est complété par un 3° et un 4° ainsi rédigés :
« 3° Les adhérents aux contrats mentionnés ci-dessus peuvent transférer en valeur de rachat avant leur liquidation sur un plan d’épargne retraite populaire, sur un contrat d’assurance-retraite à cotisations définies défini à l’article L. 311-2 du code de la sécurité sociale ou sur un plan d’épargne retraite collectif.
« Un décret précise les modalités d’application de la portabilité des contrats Madelin vers les autres produits retraite et inversement.
« 4° Les contrats peuvent également prévoir le paiement d’un capital à cette même date, à condition que la valeur de rachat de cette garantie n’excède pas 20 % de la valeur de rachat du contrat. »
I. Le 2° du même article est complété par l’alinéa ainsi rédigé :
« En cas de décès de l’adhérent aux contrats mentionnés ci-dessus, la prestation versée au bénéficiaire ou aux bénéficiaires librement désignés peut s’effectuer sous forme de capital ou de rente.
II. Au deuxième alinéa du I de l’article 154 bis du code général des impôts, après le mot : « facultatifs », sont insérés les mots : « pouvant comporter des possibilités de rachat en capital, ».
Au premier alinéa du I du même article, les mots : « professions non commerciales », sont remplacés par les mots : « revenus d’activité des professions non commerciales, imposables au titre des bénéfices non commerciaux ou des traitements et salaires » et le mot : « bénéfice » est remplacé par le mot : « revenu ».
La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
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