N° 3676
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 avril 2016.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement
présentée par
M. Jean LASSALLE,
Député.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La perception du peuple français à l’égard de la justice de notre pays est particulièrement préoccupante. Nos concitoyens ne considèrent plus leurs libertés et droits fondamentaux suffisamment garantis. La justice est suspectée de proximité avec le pouvoir et apparaît comme une administration partisane au service des puissants et non au service du peuple souverain. Régulièrement, notre pays est sanctionné pour violation de la Convention européenne des droits de l’Homme. Cette situation n’est pas acceptable pour une démocratie comme la nôtre, car elle fragilise le principe d’indépendance de la justice qui assure la stabilité de notre État de droit.
En outre, la justice est perçue par nombre d’entre eux comme un domaine marquant l’emprise de l’État sur leur vie, en disposant d’eux parfois pour de longues années dans un contexte d’incertitude. En effet, chaque année, nombreuses sont les personnes qui finissent par être acquittées aux assises ou relaxées devant les tribunaux correctionnels. Autant d’individus sur lesquels la machinerie judiciaire s’est abattue arbitrairement et pendant de longues années. Aussi, ce n’est pas tant la question de la délinquance qui est en jeu sur la scène du tribunal : c’est la condition de sujet politique.
Nous avons du mal à imaginer d’autres manières de rendre la justice. Pourtant, réagir autrement n’a rien de chimérique. L’exemple de la justice transitionnelle est intéressant : dans des contextes lourds - après des crimes de guerre et des génocides - certains États ont mis en place une nouvelle scène judiciaire à partir de préoccupation éthiques et politiques. On a ainsi inventé une justice originale qui définit différemment le rôle du juge, la fonction de la sanction, la place de l’émotion. Dans le même ordre d’idées, la justice restaurative, (encore appelée « justice réparatrice ») est celle qui réunit l’auteur, la victime et la collectivité pour impliquer toutes les parties dans la réinsertion et la réparation d’une infraction, en donnant aux acteurs la possibilité de définir eux-mêmes ce que rendre la justice veut dire. Le droit serait alors placé au service des justiciables et ne serait plus perçu comme une injonction qui s’impose à eux, victimes comme auteurs, de l’extérieur.
Cette forme de justice ne constitue pas un modèle, mais la preuve qu’une autre manière de répondre à ces atteintes aux valeurs sociales est possible, sans que l’État décide seul de la procédure et de la sanction, uniformisant les manières de rendre la justice.
Je crois dès lors qu’il est indispensable de repenser le système afin de rapprocher la justice des citoyens et tenter de restaurer l’image de cette institution. Aussi, il est urgent d’engager une réflexion nationale et des débats publics entre les politiques, les professionnels du droit, les justiciables et plus largement la société civile, à partir des conclusions d’une commission d’enquête ad hoc. Ce n’est qu’ainsi que la confiance en notre justice pourra être rétablie.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
Conformément aux articles 137 et suivants du Règlement, il est créé une commission d’enquête de trente membres chargée d’investiguer sur la situation de la justice française.
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