N° 4651
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 30 mai 2017.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
invitant le Gouvernement à prendre en compte la situation
des « Américains accidentels » vis à vis de l’Internal Revenue Service (IRS)
et de Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA)
et à dégager des pistes de réflexion afin de répondre à leurs attentes,
présentée par
M. Frédéric LEFEBVRE,
député.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
En vertu du droit du sol applicable aux États-Unis et du principe de l’extraterritorialité de la législation américaine en matière de droit de la nationalité, les Français, ayant au moins un parent français, nés dans ce pays par hasard ou par accident, sont considérés comme bi-nationaux, bien que n’y ayant que très peu vécu.
À cause du Foreign Account Tax Compliance Act de 2010, visant en théorie à lutter contre la fraude fiscale, ces binationaux risquent d’être poursuivis par l’Internal Revenue Service (IRS), l’administration fiscale américaine, qui peut leur réclamer des impôts. Devenus contribuables américains, où qu’ils résident dans le monde, ils sont désormais dans l’obligation de déclarer chaque année leurs revenus à l’IRS et se voient parfois demander le paiement d’impôts américains.
Ce phénomène peu connu qui concerne des dizaines de milliers de Français, et qui se transforme souvent en un véritable cauchemar, a récemment été mis en lumière par une grande chaîne de télévision française dans une de ses éditions de 13 heures.
Cette loi FATCA a également des conséquences bancaires majeures pour ces « Américains accidentels », puisqu’elle impose aux banques étrangères de relayer toutes les informations sur les comptes de leurs clients « Américains ».
Dès novembre 2013, les États-Unis ont signé un accord avec notre pays pour que soit appliquée cette législation en France. Depuis septembre 2014, les banques adressent des courriers à leurs clients présentant un indice d’« américanité », leur demandant de communiquer leur numéro d’identification fiscale américain ou d’apporter la preuve qu’ils avaient renoncé à la nationalité, voire décident de manière unilatérale de fermer les comptes bancaires.
Avant que les banques ne les informent, les « Américains accidentels » n’étaient pas au fait de leurs obligations fiscales vis-à-vis de l’IRS, et ne possédaient pas d’identifiant administratif et n’avaient alors pas conscience d’être des contribuables américains. Leur surprise fut d’autant plus grande, que ni l’IRS, ni la DGFIP ne les avaient alertés.
Les « Américains accidentels » sont aujourd’hui contraints de rentrer dans le système fiscal américain pour éventuellement en sortir. À cette fin ils doivent obtenir un numéro de sécurité sociale américain (SSN) et avoir recours à des avocats pour effectuer les démarches déclaratives, ce qui coûte plus de 20 000 euros, nonobstant les impôts éventuellement dus. Une fois la situation régularisée, ceux qui souhaitent mener une procédure de renonciation à leur nationalité américaine doivent dépenser en sus 2 100 euros.
L’auteur de la présente proposition de résolution avait pourtant alerté le Gouvernement Français des conséquences néfastes de cette législation et de la ratification de l’accord permettant de l’appliquer en France dès le 28 janvier 2014 dans une question écrite déposée au journal officiel.
Si lors des débats relatifs à la loi Macron, les arguments sur la situation des « Américains accidentels » avaient pu être entendus afin de garantir leur droit au compte, le Gouvernement avait été sourd aux objections défendues dans l’hémicycle le 18 septembre 2014 par l’auteur de la présente proposition de résolution dans une motion d’ajournement du projet de loi de ratification de l’accord d’application de FATCA.
En vertu de cet accord, ratifié par l’Assemblée nationale - en dépit des démarches de l’auteur de la présente proposition de résolution - les États-Unis s’étaient engagés à fournir à la France des informations sur leurs ressortissants évadés fiscaux aux États-Unis. À ce jour les États-Unis n’ont rien fait pour assurer ces échanges d’information ce qui, en vertu de l’article 55 de notre constitution, devrait faire échec à l’application même de la législation FATCA par nos institutions financières.
Cette législation fait d’ailleurs débat au sein même du Congrès américain, puisque le Sénateur Républicain du Kentucky Rand Paul, saisi notamment par l’Association des Expatriés Américains de France, a déposé le 6 avril 2017 une proposition de loi visant à abroger la loi FATCA.
Notre pays doit prendre en compte la situation des « Américains accidentels » français et dans cette perspective il conviendrait :
– d’assurer le droit au compte bancaire des « Américains accidentels » ;
– de garantir la réciprocité dans la mise en œuvre de l’accord bilatéral relatif à FATCA
– d’informer les Français vivant aux États-Unis des conséquences fiscales attachées à leur expatriation.
Tels sont, Mesdames, Messieurs, les objectifs de la présente proposition de résolution.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
L’Assemblée nationale,
Vu l’article 34-1 de la Constitution,
Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,
Invite le Gouvernement à veiller à ce que soit prise en compte la situation vis-à-vis de l’IRS et de FATCA des « Américains accidentels » et à dégager des pistes de réflexion visant à répondre à leurs attentes notamment en ce qui concerne :
– le droit au compte bancaire des « Américains accidentels » ;
- la garantie de la fin des discriminations de traitement par les banques françaises ;
– la réciprocité dans la mise en œuvre de l’accord bilatéral relatif à FATCA ;
– l’information des Français vivant aux États-Unis des conséquences fiscales attachées à leur expatriation ;
– la mise en œuvre d’une action diplomatique forte favorisant le vote d’une disposition législative américaine ad hoc, afin d’obtenir un traitement dérogatoire pour les « Américains accidentels » leur permettant, soit de renoncer à la citoyenneté américaine par une procédure simple et gratuite, soit d’être exonérés d’obligations fiscales américaines.
© Assemblée nationale