N° 3174
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 28 octobre 2015.
RAPPORT D’INFORMATION
DÉPOSÉ
en application de l’article 145 du Règlement
PAR LA MISSION D’INFORMATION
sur les oies cendrées
AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
ET PRÉSENTÉ PAR
M. Philippe PLISSON,
Rapporteur
Député.
——
SOMMAIRE
___
Pages
INTRODUCTION 7
I. LES CONNAISSANCES SCIENTIFIQUES SUR LES OIES CENDRÉES SE SONT AMÉLIORÉES 9
A. L’ABONDANCE DES CONNAISSANCES LAISSE CEPENDANT DES INTERROGATIONS, CE QUI A CONDUIT À MENER UN NOUVEAU PROGRAMME D’ÉTUDES 9
1. L’oie cendrée Anser anser 9
2. Un nouveau programme d’études pour lever les interrogations 12
B. LES PRINCIPAUX RÉSULTATS DES ÉTUDES LES PLUS RÉCENTES 13
1. La tendance à l’augmentation et à la concentration des effectifs hivernants 13
a. Le consensus sur l’augmentation des effectifs d’oies cendrées en Europe 13
b. La situation en France 16
2. Les évolutions du comportement migratoire de l’espèce 18
a. Le déplacement du centre de gravité de l’aire d’hivernage vers le nord 18
b. Des migrations de retour de plus en plus précoces 18
c. Les migrations postnuptiales 19
d. La sédentarisation accrue 20
II. LA RÉGLEMENTATION EN MATIÈRE DE PRÉLÈVEMENTS 23
A. LE STATUT LÉGAL DE L’ESPÈCE 23
1. Sur le plan international : les conventions et accords 23
2. Au niveau de l’Union européenne 25
a. La base juridique : la directive sur la conservation des oiseaux sauvages 25
b. La variation des périodes de chasse 27
c. L’interprétation stricte par la jurisprudence 29
3. Sur le plan français 32
a. La règle de base : une espèce chassable sous conditions 32
b. L’application « tumultueuse » : une succession d’arrêtés annulés par le Conseil d’État 34
c. La solution retenue par le Gouvernement en 2015 36
d. Les fondements juridiques des décisions 37
B. L’AMPLEUR DES PRÉLÈVEMENTS 39
1. L’évaluation incomplète des prélèvements cynégétiques 39
a. Des chiffres encore incertains au niveau européen 39
b. Un prélèvement croissant au niveau français 41
2. Les autres prélèvements 41
a. Les diverses méthodes de destruction 41
b. L’encadrement par des plans de gestion 43
III. LES TERMES DU DÉBAT ET LES PISTES DE RÉFLEXION 47
A. LE CONTEXTE ACTUEL : LES DIVERGENCES DES PROTAGONISTES 47
1. L’importance des dégâts causés aux cultures justifie-t-elle une régulation plus intense de l’espèce ? 47
a. Des dégâts de plus en plus importants 47
b. Des indemnisations coûteuses 48
2. Un accroissement des prélèvements en Espagne et en France permettrait-il une meilleure régulation de l’espèce dans d’autres pays ? 50
3. Dans quelles conditions le gazage ou la destruction massive des oies cendrées sont-ils autorisés sur le territoire des Pays-Bas ? 52
a. L’encadrement par les plans de gestion ou de régulation 52
b. La question du gazage 53
4. La notion même de migration ne peut-elle pas être remise en cause ? 54
5. L’instauration d’une dérogation pour allonger la période de chasse est-elle compatible avec les normes européennes ? 56
a. La mise en place de dérogations au titre de la directive 56
b. La position actuelle de la Commission européenne 58
B. LES DÉMARCHES EXAMINÉES EN FRANCE 59
1. La mise en place d’un plan de gestion de l’espèce 59
a. L’intérêt et la faisabilité d’un plan de gestion 60
b. Les critiques ou les réserves à l’égard d’un plan de gestion 62
c. Les modalités d’un plan de gestion 63
2. L’amélioration des conditions d’hivernage 64
C. LES DÉMARCHES AU NIVEAU EUROPÉEN 66
1. De l’évaluation à l’évolution des directives européennes ? 66
a. L’évaluation du fonctionnement des directives 66
b. Les réticences à la révision des directives 68
2. La poursuite nécessaire du dialogue 69
SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS 71
EXAMEN DU RAPPORT EN COMMISSION 73
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 103
ANNEXES 107
L’objectif de la mission d’information, qui a été créée à ma demande par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et qui a associé des membres du groupe d’études sur la chasse, est de trouver une solution au débat qui perturbe depuis une dizaine d’années les relations entre fédérations de chasseurs et associations environnementales sur la question des dates d’ouverture et de fermeture de la chasse aux oies cendrées.
Votre rapporteur a donc procédé à une vingtaine d’auditions de toutes les parties prenantes, et s’est rendu en Belgique et aux Pays-Bas pour recueillir le maximum d’informations et confronter les points de vue. Son souhait est qu’un accord soit trouvé de manière pérenne entre toutes les parties prenantes, comme cela a été le cas en 2009, accord malheureusement dénoncé l’année suivante par l’une des parties.
Les démarches successives dans notre pays n’ont jamais été exemptes de controverses mais, pour que ce problème somme toute assez subalterne ne continue pas à perturber le climat social et à alimenter le rejet de l’Union européenne, il apparaît impératif de dégager une solution qui donne satisfaction à court comme à moyen terme, qui corresponde à l’état du droit et aux données scientifiques, et qui s’appuie sur des arguments de raison et non de passion. Le climat actuel paraît plus apaisé et plus propice à une reprise du dialogue entre les différentes parties prenantes, même si des crispations se manifestent encore.
Cependant, compte tenu du contexte économique et social de notre pays, et prenant en compte les pressions sur la biodiversité et la difficulté de reconquérir la biodiversité ordinaire, le débat sur la modification des dates d’ouverture et de fermeture d’un gibier d’eau, même s’il est complexe et récurrent, doit être remis à sa juste place.
*
Après avoir présenté les données scientifiques les plus récentes sur l’espèce Anser anser, votre rapporteur rappellera la réglementation en matière de prélèvements et indiquera les informations qu’il a pu recueillir sur les périodes de chasse dans différents pays européens et sur les prélèvements cynégétiques ainsi que sur les méthodes de régulation de l’espèce dans les pays où la surabondance d’oiseaux provoque des dégâts. Partant des termes actuels du débat et des principales questions qui structurent les antagonismes, il évoquera quelques pistes de réflexion pouvant déboucher sur une solution acceptable.
I. LES CONNAISSANCES SCIENTIFIQUES SUR LES OIES CENDRÉES SE SONT AMÉLIORÉES
A. L’ABONDANCE DES CONNAISSANCES LAISSE CEPENDANT DES INTERROGATIONS, CE QUI A CONDUIT À MENER UN NOUVEAU PROGRAMME D’ÉTUDES
Comme en témoigne l’abondance de la littérature scientifique sur le sujet, l’espèce d’oie Anser anser est de celles qui ont fait l’objet de multiples études ornithologiques et éthologiques dans de nombreux pays européens, dont le rapport du Muséum national d’histoire naturelle d’octobre 2009 a réalisé un bilan synthétique des connaissances à l’époque (1).
Les tableaux suivants en dressent le portrait.
Classification de l’oie cendrée
Classe : Oiseaux / Aves
Ordre : Ansériformes / Anseriformes
Famille : Anatidés / Anatidae (canards, cygnes, oies)
Genre : Anser
Espèce : Anser anser (Linné, 1758)
Sous-espèces : Anser anser anser en Europe occidentale et centrale
Anser anser rubrirostris en Turquie et en Sibérie.
● La sous-espèce Anser anser anser a été divisée par certains chercheurs en cinq populations ou entités selon des critères biogéographiques, même si les limites entre les différents groupes ne sont pas toujours clairement établies :
– la population islandaise (100 000 individus), plutôt stable, qui hiverne en Écosse, et dans le nord de l'Irlande et de la Grande Bretagne ;
– la population écossaise (10 000 individus) qui a la particularité d’être sédentaire ;
– la population du Nord-Ouest de l'Europe (Norvège, Suède, Danemark, Allemagne du Nord, Pays-Bas et Flandres belges, France), forte d’au moins 800 000 à 900 000 individus, qui hiverne aux Pays-Bas, en France, en Espagne, au Portugal et au Maroc. Certains spécialistes identifient même deux voies de migration, à partir de la Norvège ou des rives de la Baltique ;
– la population du Centre et du Nord-Est de l'Europe (50 000 individus), qui niche en Russie, en Pologne, dans les pays baltes, en Finlande, etc. et qui hiverne principalement au Maghreb (Tunisie et Algérie) mais quelquefois aussi en Italie ;
– la population de l'Est de l'Europe, forte de 85 000 individus, qui niche au Sud de la Russie, en Biélorussie, en Roumanie, en Bulgarie, etc., et qui hiverne autour de la mer Noire, en Turquie et au Nord de la Syrie.
En réalité, selon tous les interlocuteurs rencontrés au cours de la mission, il est certain que tous les animaux appartiennent génétiquement à la même espèce et qu’il n’y a qu’une seule population d’oies cendrées. Mais les oies peuvent manifester des comportements individuels différents qui varient au sein d’un même groupe et qui peuvent d’ailleurs changer d’une année à l’autre.
Portrait de l’oie cendrée
Morphologie : Les oies cendrées ont une silhouette massive : mesurant entre 68 et 90 cm pour une masse de 2,5 à 3,6 kg, et une envergure variant de 147 à 180 cm. Ce sont les plus grandes oies européennes. L’ensemble du plumage est gris brun avec des reflets blancs sur le dessus, gris plus clair avec des taches noires sur le dessous.
Les mâles sont légèrement plus grands et plus lourds que les femelles. Les jeunes ressemblent aux adultes même s’ils n’ont jamais de taches noires sur le ventre.
Comportement : Excellents nageurs, les animaux passent de longs moments à terre pour se nourrir.
C’est une espèce migratrice, se déplaçant vers le sud et l’ouest de l’Europe à l’automne vers les zones d’hivernage, et remontant vers le nord à la fin de l’hiver et au début du printemps vers les zones de nidification. Sociable, l’oie cendrée devient grégaire au moment des migrations. Les dimensions des groupes vont alors des unités familiales jusqu’au rassemblement de plusieurs centaines voire de milliers d’individus. Les déplacements ont lieu de jour comme de nuit, à des altitudes variables mais toujours en formation en V ou en chevrons très reconnaissables. Le passage des migrateurs est repéré par les cris fréquents, aigus et puissants qu’ils émettent.
Habitat et alimentation : Les oies cendrées fréquentent les zones humides, en bordure de marais, de lacs d’eau douce ou d’estuaires marins. Elles s’y nourrissent d’herbes et de jeunes pousses, mais aussi de tubercules, de rhizomes ou de racines, voire consomment de petits animaux aquatiques.
Reproduction : L’espèce est monogame, les couples se formant à l’âge de trois à quatre ans pour toute la vie. Les nids sont construits à terre dans la végétation. La femelle pond de quatre à neuf œufs qu’elle incube pendant 27 à 29 jours. Les oisillons quittent rapidement le nid et acquièrent une motricité suffisante pour suivre leurs parents.
L’oie cendrée et l’homme : La domestication remonte à plusieurs milliers d’années et les races domestiques actuelles descendent d’oies cendrées, d’oies cygnoïdes ou d’hybrides. L’animal est source de viande, de graisse, d’œufs, de duvet et de plumes.
L’action de l’homme sur le milieu naturel est souvent défavorable à l’animal : les drainages, les comblements et les aménagements réduisent l’habitat naturel. Mais la création de réserves naturelles de zones humides est plutôt favorable à l’espèce. De plus, la présence de prairies ou le développement de certaines cultures agricoles permettent d’offrir des aires où les oies viennent s’alimenter.
● Comme le rappelle Jacques Comolet-Tirman dans son rapport de 2009, notre pays est situé sur un axe majeur de migration des oies cendrées, depuis la frontière belge vers le sud-ouest du pays et la péninsule ibérique.
Traditionnellement, la migration postnuptiale commence en septembre et s'achève en décembre. Les oies qui partent hiverner dans la péninsule ibérique voire au-delà survolent la France en plusieurs vagues de passage : le premier flux notable d'oies venant des côtes de la Baltique se déroule dans la seconde quinzaine d'octobre, le second a lieu à la mi-novembre. Les passages de fin novembre et début décembre concernent davantage les oies ayant niché en Norvège. Au cours de ces migrations, la plupart des animaux rejoignent directement les zones d'hivernage et leurs haltes sur le sol français sont peu nombreuses et de courte durée.
Les premières oies cendrées commencent leur migration de retour début février voire fin janvier, et les flux perdurent jusqu’en avril avec un pic de migration mi-février.
Au cours de ces migrations, les haltes sont plus régulières (de deux jours à plusieurs semaines) et concernent des groupements plus nombreux. Il est probable que l'arrivée d'un plus grand nombre d'individus correspond à un durcissement des conditions d'hivernage en Espagne, où les ressources alimentaires peuvent se révéler insuffisantes, mais elle suppose un départ des sites méridionaux dans des conditions physiques qui ne sont pas optimales pour les oiseaux.
Les déplacements hivernaux des oiseaux migrateurs sont souvent complexes et dépendent évidemment à la fois des impératifs alimentaires et des variations météorologiques de courte période : votre rapporteur reviendra dans la partie III sur la notion de « migration », qui reste au cœur de certains débats.
2. Un nouveau programme d’études pour lever les interrogations
● Les débats difficiles au sein de la table ronde « chasse » en 2010 comme les réflexions menées depuis pour trouver une solution pérenne à ce dossier ont montré que les différents participants ne partageaient pas les mêmes conclusions sur le plan scientifique et qu’il restait certaines interrogations.
Il convenait donc d’approfondir et d’actualiser les connaissances sur les populations d’oies cendrées afin de répondre aux questions liées à leur dynamique ainsi qu’aux voies et aux dates de leurs migrations :
– La tendance à l’augmentation globale des effectifs hivernants est-elle confirmée ? Quelle est l’évolution des couples nicheurs ? Existe-t-il des différences sensibles selon les pays européens ?
– Quelle est l’origine des oies cendrées traversant la France ou y hivernant ? Existe-t-il des différences entre l’Ouest et le Sud-Est du pays ?
– Quels sont les principaux sites d’hivernage ?
– Quelles sont les périodes de migration prénuptiale et postnuptiale ? À quelles dates précises les oies cendrées commencent-elles à migrer vers les lieux de reproduction ? Quand traversent-elles notre pays ?
– Quelles sont les évolutions du comportement migratoire de l’espèce ? Quels sont les facteurs expliquant ces évolutions ?
– Quelle est l’ampleur des prélèvements cynégétiques en France et en Europe ?
– La chasse en France permet-elle de réduire les dégâts occasionnés dans d’autres pays, par exemple aux Pays-Bas ?
● Le programme d’études le plus récent a été commandé par le ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer (MEDDTL) à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, le 16 février 2010. La lettre de commande évoquait la nécessité de définir un protocole scientifique précis, de constituer un groupe de travail ad hoc réunissant des représentants des chasseurs et des associations environnementales, et confiait à l’ONCFS le soin de lancer ce programme d’études.
Le groupe ad hoc s’est réuni à trois reprises pour élaborer un programme en six volets, qui a été validé par le GEOC (groupe d’experts sur les oiseaux et leur chasse) puis par le ministère, le 5 juillet 2011.
Le rapport final « Amélioration des connaissances sur l’oie cendrée en France » a été publié par l’ONCFS en novembre 2014, sous la signature de Vincent Schricke.
Ce rapport a le grand mérite d’actualiser les données scientifiques, non seulement en ce qui concerne la France mais aussi pour les pays qui accueillent les mêmes groupes d’oies cendrées au cours de leurs migrations. De manière générale, les faits scientifiques ont été bien accueillis par toutes les parties prenantes au dossier mais des critiques ont été émises à l’égard des conclusions.
Le tableau suivant détaille l’intitulé des six volets d’études :
volets du programme d’études 2011-2014 | |
Volet 1 |
Analyse historique et actuelle de la base de données baguage – marquage des oies |
Volet 2 |
Suivi de l’hivernage et de la chronologie de la migration des oies cendrées en France de Wetlands International et du CRBPO |
Volet 3 |
Suivi de la migration et des modalités d’hivernage de la population espagnole |
Volet 4 |
Origine et déplacements migratoires des oies cendrées hivernant en Camargue |
Volet 5 |
Suivi satellitaire d’oiseaux norvégiens et suivi du succès de la reproduction |
Volet 6 |
Estimation des prélèvements le long des voies de migration |
B. LES PRINCIPAUX RÉSULTATS DES ÉTUDES LES PLUS RÉCENTES
1. La tendance à l’augmentation et à la concentration des effectifs hivernants
a. Le consensus sur l’augmentation des effectifs d’oies cendrées en Europe
Même si quelques populations sauvages sont en stagnation ou en déclin, en Irlande, en Islande et en Russie, pour des raisons méconnues, de manière générale, la population d’oies cendrées en Europe du Nord-Ouest a vu ses effectifs s’accroître de manière spectaculaire depuis 40 ans.
Jusqu’au début des années 1960, l’ONCFS l’estimait entre 25 000 et 30 000 individus, puis 50 000 en 1978, de 120 000 à 130 000 en janvier 1984, 200 000 au milieu des années 1990 et près de 500 000 à l’hiver 2003 – 2004.
La tendance persiste puisque l’évaluation a atteint 600 000 individus en 2009 et plus de 700 000 en 2013. Selon certains experts, ce chiffre constituerait un minimum. Birdlife International, dans son rapport (2) de 2015 qui agglomère des données nationales, cite même une estimation de 800 000 à un million d’individus sur l’ensemble du continent européen, incluant donc toutes les populations d’oies cendrées de l’Islande à la Turquie (3). Le 6e rapport de l’AEWA évalue la fourchette entre 900 000 et 1,2 million.
Selon les données recueillies auprès du CERDP (4) et synthétisées dans le tableau ci-après, votre rapporteur estime vraisemblable l’estimation de 800 à 900 000 individus sur l’axe péninsule ibérique – Scandinavie, même s’il est difficile d’additionner les données nationales compte tenu de la différence des modes de calcul et des dates de comptage, et du fait qu’existe un risque de double comptage.
Estimations des effectifs d’oies cendrées en Europe du Nord-ouest | ||||||
Allemagne |
Danemark |
Espagne |
France |
Norvège |
Pays-Bas |
Suède |
80 000 |
45 000 |
60 000 |
20 000 |
130 000 |
480 000 |
166 000 |
Source : CERDP (2015)
En Espagne, 60 000 oies cendrées ont été recensées en janvier 2014, soit juste avant le début de la migration prénuptiale, dont la moitié dans le parc national de la Doňana en Andalousie (5). Ce chiffre semble confirmer la baisse des effectifs hivernants depuis une dizaine d’années.
Dans de nombreux pays du Nord notamment en Scandinavie, le décompte de la population marque évidemment de grandes différences selon la saison : pour la Suède, 166 000 oies cendrées ont été dénombrées en septembre 2014 mais seulement 38 000 en janvier 2015 ; en Norvège, la population totale est estimée à 130 000 au début de la période de chasse (10 août) et les effectifs de couples nicheurs et reproducteurs sont passés en dix ans de 10 000 à 18 000 voire 20 000, mais aucun comptage national n’est effectué en hiver.
Aux Pays-Bas, la situation est très particulière car, d’une part, la population d’oies cendrées continue de croître à un rythme annuel de 5 % depuis le milieu des années quatre-vingt, d’autre part, on constate la présence d’une importante population d’oies sédentaires.
À cet égard, au-delà même d’une certaine imprécision, les chiffres communiqués à la mission sont éloquents :
– la population sédentaire (c’est-à-dire présente toute l’année) est estimée de 430 000 à 500 000 individus sur les cinq dernières années en juillet selon Sovon Vogelonderzoek Nederland (6). Ce nombre est similaire à celui estimé par la fédération royale des chasseurs (KNJV). Mais il pourrait même être sous-évalué dans la mesure où les oies sont très dispersées sur le pays et que les comptages ne couvrent pas tout le territoire en hiver ;
– durant la période de reproduction, on dénombre environ 120 000 couples nicheurs (entre 70 000 et 170 000 selon BirdLife), ce qui est cohérent avec la population à la fin de l’été ;
– la population hivernale, estimée par Sovon durant la période au cours de laquelle elle est la plus importante, atteint 2 millions d’individus pour l’ensemble des oies et des canards dont plus de 600 000 pour les seules oies cendrées.
La population néerlandaise représenterait ainsi de 42 % à 55 % de l’ensemble des oies cendrées sur le continent européen (selon BirdLife International en 2015) ou 80 % de la seule population Nord-Ouest européenne.
Évolution sur trente années du nombre d’oies cendrées aux Pays-Bas
Légende : Grauwe Gans = oies cendrées / gemiddeld aantal = nombre moyen
À la différence des Pays-Bas, la Belgique n’accueille qu’un nombre limité de représentants de l’espèce. En Wallonie, l’oie cendrée est un nicheur très rare. En Flandre, seule région concernée par le phénomène migratoire, l’Institut de Recherche sur la Nature et la Forêt (INBO) estime les effectifs entre 1 500 et 3 000 individus selon les années. Une expérience de réintroduction de l’espèce, menée au cours des années 50 dans la réserve du Zwin (7) s’est conclue par la sédentarisation de quelques centaines de couples d’oies cendrées.
● Les raisons évoquées pour expliquer cette croissance générale de la population sont multiples : elles tiennent principalement à l’augmentation de la protection accordée aux oiseaux migrateurs et à l’interdiction de la chasse dans certains pays, au développement des capacités d’accueil et donc des aires d’alimentation (réserves naturelles ou ornithologiques dans le cadre de la directive « Habitats », extension des prairies inondables, etc.), ainsi qu’aux changements climatiques.
Certains experts estiment que l’expansion concerne essentiellement les populations sédentaires et que les effectifs d’oies migratrices sont relativement constants.
Historiquement, la tradition d’hivernage dans notre pays, attestée au Moyen-Âge mais qui avait disparu, s’est développée dans les années soixante et, depuis quarante ans, l’effectif hivernant d’oies cendrées a suivi l’évolution numérique de la population Nord-Ouest européenne.
Le suivi des oies cendrées en France est assuré depuis plusieurs années par des dénombrements en hiver. Ces données sont accessibles dans la base de Wetlands International (dénombrement à la mi-janvier) et dans celle du Réseau ONCFS/FNC/FDC « Oiseaux d’eau – Zones humides » (dénombrements mensuels de septembre à mars sur les principaux sites d’hivernage).
L’effectif hivernant des oies cendrées est estimé à 20 000 individus en moyenne au mois de janvier. Ce chiffre a augmenté progressivement de 1987 à 2009, mais, après l’avoir dépassé, semble atteindre un nouveau palier autour de 20 000 depuis quatre ans. Un consensus s’établit pour constater que le taux de croissance de la population atteint 3 % par an.
Les dénombrements réalisés en janvier 2013 montrent que trois sites ont accueilli plus de 53 % des oies hivernant en France : la baie de l’Aiguillon–Pointe d’Arçay (Vendée), le lac du Der-Chantecoq (en Champagne) et la Camargue (Bouches-du-Rhône), seul des trois sites où les effectifs d’oies continuent à croître.
En France, les effectifs d’hivernage restent donc faibles par rapport à ceux des autres pays de la même voie migratoire (8) : soit, selon les années, entre 2,2 % et 4 %, sur une population totale d’oies cendrées estimée à plus de 700 000 en Europe Nord-Ouest. Les raisons de la modestie de ces effectifs sont mal cernées mais seraient liées, d’une part, à un manque de disponibilités alimentaires, d’autre part, à un excès de dérangements dans les zones de gagnage, l’espèce étant très sensible au manque de tranquillité. Les associations de protection de l’environnement estiment que la population stagne parce que le niveau de la capacité d’accueil est atteint.
La présence d’une population nicheuse en France est confirmée. Certainement liée à des réintroductions, elle reste marginale à l’échelle européenne (quelques dizaines de couples (9) soit environ 1 %) et est répartie sur une dizaine de départements, dans des espaces protégés. Pour l’essentiel, il semblerait que ces oiseaux effectuent des déplacements limités même si deux exceptions ont été notées (10).
● L’origine essentiellement nordique des populations d’oies cendrées
Les oies cendrées observées dans notre pays en transit migratoire et/ou en hivernage appartiennent à la voie de migration Nord-Ouest européenne :
– un premier axe principal concerne des individus en majorité originaires de trois pays (Norvège, Suède et Danemark) où ils font l’objet d’un suivi par baguage et marquage ; les oiseaux norvégiens sont les plus nombreux à transiter par la France pour hiverner en Espagne. Peu sont originaires des Pays-Bas. (11)
– un second axe de migration concerne l’Est de la France, de la Champagne à la Camargue. Mais le nombre d’individus, venant d’Allemagne, de Pologne ou de République tchèque, est faible par rapport à l’axe atlantique.
Ces résultats ont été confirmés par les données disponibles tant auprès de Wetlands International pour la période 1984-2011 que dans les bases françaises du CRBPO (12) qui s’appuient sur des reprises d’oies baguées (270 entre 1981 et 2011) et des contrôles visuels d’oiseaux (294 entre 1987 et 2011).
Notre pays est donc un lieu de passage ou d’hivernage pour les oies cendrées qui se reproduisent dans d’autres pays, en particulier scandinaves.
2. Les évolutions du comportement migratoire de l’espèce
Les études récentes sur l’évolution des effectifs et du comportement migratoire de l’espèce montrent des changements importants dans :
– l’aire de répartition d’hivernage ;
– les dates de migration ;
– la concentration des oiseaux avec une forte tendance à la sédentarisation dans certains pays.
a. Le déplacement du centre de gravité de l’aire d’hivernage vers le nord
On assiste à un double phénomène confirmant que le barycentre des aires d’hivernage se déplace vers le nord, voire le nord-est, de l’Europe.
D’une part, est constaté un déclin de l’hivernage dans le sud de l’Espagne (13). Dans les années quatre-vingt, environ 80 % des oies cendrées scandinaves hivernaient dans la péninsule ibérique ; en 2012, ce pourcentage était évalué à seulement 10 %. La chute des populations comptabilisées en janvier serait liée aux variations des conditions climatiques (au niveau de la pluviométrie et des températures) et à la disparition de certaines lagunes dans la péninsule ibérique. Compte tenu de ce déclin, certains chercheurs estiment que l’hivernage en Espagne pourrait disparaître à terme (14) et que l’hivernage en France pourrait être amené à croître.
D’autre part, le suivi d’oiseaux d’origine scandinave a montré :
– non seulement que les oies nichant en Norvège partaient en migration mi-août pour une arrivée en France ou en Espagne fin novembre, après des escales au Danemark ou en Allemagne du Nord puis de plus en plus aux Pays-Bas où plus de la moitié des oiseaux marqués ayant migré restaient désormais pour l’hiver, sans poursuivre leur migration plus au sud ;
– mais que, maintenant, les oies cendrées d’origine suédoise ou finlandaise hivernent majoritairement aux Pays-Bas voire restent au sud de la Suède (où, durant les hivers 2007 et 2008, 50 000 individus ont été décomptés) et ne migreraient donc plus jusqu’à la péninsule ibérique.
b. Des migrations de retour de plus en plus précoces
● Selon les données disponibles de plusieurs études sur la période 1986-2009 et synthétisées dans le rapport du Museum national d’histoire naturelle de 2009 déjà cité, les vols d’oies cendrées vers le nord sont observés de plus en plus tôt au-dessus de notre pays, avec néanmoins une relative variabilité.
Depuis 1995, le premier vol est observé avant le 31 janvier et les observations montrent une tendance à l’avancement des dates des premiers vols (un jour par an depuis 1986). Les pics de migration, impliquant 50 % des effectifs, ont lieu désormais autour de mi-février et les derniers oiseaux passent début avril.
Le début des mouvements est discret, mais les observations en vol d’oies en migration mettent en évidence, au niveau national, un pic de migration du 11 au 20 février.
● Le rapport de l’ONCFS de novembre 2014 confirme cette évolution.
Pour les trois années d’étude (2012 à 2014), les résultats, issus des décomptes des jours de vols d’oies vers le nord, « mettent en évidence au niveau national le début des trajets de retour dans la troisième décade de janvier et un pic de migration en deuxième décade de février. Les déplacements ont débuté dans la deuxième décade de janvier en 2014.
Plusieurs haltes migratoires sont observées en Espagne, en France et dans les étangs des Pays-Bas : leur durée peut varier de quelques jours à deux semaines. Au total, les trajets de retour entre les sites d’hivernage au sud et les sites de nidification au nord s’étalent sur une durée qui peut atteindre deux mois.
Ces haltes et la variabilité des dates selon les années amènent à s’interroger sur la nature profonde des vols, sur laquelle votre rapporteur reviendra.
● L’étude des modalités de la migration des oies cendrées hivernant en Espagne fournit des résultats plus contrastés puisque, pour les quinze volatiles équipés d’émetteurs GPS/GSM, les dates de départ en migration se situent entre le 11 février et le 15 mars. Ces résultats, qui s’appuient certes sur un très petit nombre d’oiseaux, sont cependant cohérents – sur un plan statistique – avec le pic de migration observé en février en France.
L’étude a également montré que les trajets migratoires suivaient la voie de migration est-Atlantique déjà connue et que certains oiseaux traversaient directement le Golfe de Gascogne évitant ainsi le passage par les cols pyrénéens.
● Dans le même temps, sont notées des arrivées de plus en plus précoces sur les sites nordiques où les oiseaux passent l’été (de 5 à 7 jours par décennie depuis trente ans).
c. Les migrations postnuptiales
De manière symétrique, les observations en vol des passages postnuptiaux montrent que les premiers vols vers le sud, sud-ouest débutent fin septembre et que plusieurs pics de migration peuvent être observés, selon les années, jusqu’à fin novembre (certainement liés aux variations de la météorologie à court terme).
Les méthodes basées sur la pose d’émetteurs ont indiqué des départs en migration d’oies norvégiennes entre le 7 et le 28 août 2012, avec des arrivées aux Pays-Bas entre fin septembre et fin novembre, en France et en Espagne après le 15 novembre. En 2013, la migration a été plus tardive, en raison d’un hiver précédent plus long qui aurait retardé de deux semaines la période de reproduction. Toutes les oies équipées d’émetteurs n’ont ainsi pas quitté les Pays-Bas pour hiverner plus au sud ; celles qui choisissent d’hiverner plus au sud quittent les Pays-Bas après la mi-novembre.
Aux Pays-Bas, les oies cendrées avaient quasiment disparu il y a un siècle en raison de trop forts prélèvements et du développement de l’urbanisation. Vraisemblablement à la suite de réintroductions volontaires, l’espèce a commencé à revenir dans les années 70 et 80.
Dans les années 80 et 90, les oiseaux venant hiverner étaient pour une large part originaires de Scandinavie et d’Europe de l’Est, avec des arrivages à partir de la fin août jusqu’à des départs en avril.
Selon les ornithologues, les oiseaux reproducteurs originaires des Pays-Bas font preuve de différentes stratégies : certains demeurent proches des aires de reproduction, d’autres émigrent vers l’Espagne ; les aires de nichage sont dispersées sur le territoire et il semble que ce soient les oiseaux natifs des Pays-Bas qui les utilisent.
Aujourd’hui, sur les 500 000 oies recensées au maximum en hiver aux Pays-Bas, la majorité fait partie de la population reproductrice nationale et doit être considérée comme sédentaire c’est-à-dire qu’elle ne migrerait plus, même si certains groupes effectuent des mouvements ponctuels, par exemple d’est en ouest au cours de l’hiver, pour rejoindre des gagnages, ou à partir de juin pour des échanges avec les populations reproductrices d’Allemagne de l’Ouest (15) . Une étude issue des informations recueillies sur les oiseaux bagués estime que la population d’hivernage est à 67 % d’origine néerlandaise (Alterra - rapport 2343) ; la même étude affirme que 95 % des oies cendrées sont sédentaires et n’émigrent pas à l’étranger.
Par ailleurs, il semble qu’il y ait des différences sensibles selon les provinces : les populations au Nord des Pays-Bas, comme en Frise, seraient à moitié sédentaires, à moitié migratrices ; par contre, dans les provinces plus méridionales, comme la Zélande ou la Hollande du Sud, les proportions seraient de 80 %/20 % ou de 90 %/10 %.
Pour toutes les personnes auditionnées par la mission, la sédentarisation croissante aux Pays-Bas serait liée à de multiples facteurs dont les effets se cumuleraient et qui feraient de ce pays un véritable « paradis » pour les Anatidés : l’abandon de la chasse depuis 1999 ; la protection renforcée des oiseaux par la loi sur la faune et la flore de 2002 (16) et le développement de zones humides propices à la nidification, sous la forme notamment d’une véritable trame verte et bleue ; l’importance de la surface agricole utile consacrée aux prairies (51 %) et la modification des pratiques agricoles avec l’amélioration des rendements et l’introduction de cultures dont les oies sont friandes (comme le maïs) ; les effets climatiques et la tendance à des hivers doux ; voire, pour certains chercheurs, des évolutions comportementales, l’espèce perdant sa capacité migratrice « longue distance » et intégrant le fait d’hiverner au plus près des sites de reproduction.
La sédentarisation est donc un phénomène réversible, sans doute pas à court terme. Mais on constate que davantage d’oies migrent vers le Sud depuis les Pays-Bas lorsque les hivers sont rudes.
Comme votre rapporteur l’a indiqué, un phénomène comparable quoique de moindre ampleur serait constaté au Danemark et dans le Sud de la Suède où se dessine une tendance à la sédentarisation de 50 000 à 60 000 individus. Dans ces deux pays où la chasse reste autorisée, le développement de la sédentarisation serait à relier à une moindre couverture neigeuse en hiver, ce qui permettrait donc aux oiseaux de continuer à se nourrir sur place.
*
La dynamique des populations Nord-Ouest européennes dépend donc, d’une part, des capacités d’accueil dans les sites d’hivernage de la péninsule ibérique à la mer du Nord, d’autre part, de la pression des prélèvements cynégétiques tout au long des parcours de migration, enfin de l’évolution de la part des oies migrantes.
En conclusion de cette première partie, votre rapporteur souhaiterait souligner que, si les connaissances relatives à l’espèce Anser anser sont satisfaisantes – elles ont même été complétées par des études récentes –, il conviendrait de prolonger certains volets de ces études afin de lever les dernières incertitudes, d’éviter les ambiguïtés et de suivre les changements de comportement de l’espèce.
L’amélioration des connaissances sur certains points est primordiale dans l’hypothèse de la mise en place d’un plan de gestion et parce que les données scientifiques les plus récentes constituent un préalable pour toute nouvelle prise de décision au niveau européen. Elle est d’autant plus nécessaire que les données scientifiques sont quelquefois interprétées de manière divergente par les interlocuteurs rencontrés et que la situation de l’espèce continue d’évoluer rapidement.
La prolongation de certaines études a évidemment un coût comme le montrent les annexes du rapport de l’ONCFS de novembre 2014 qui détaillent les protocoles et les budgets des volets de recherche ; mais les sources de financement peuvent être multiples et s’accompagner de partenariats avec d’autres pays de la voie de migration.
Proposition n° 1 : Poursuivre certaines études, en particulier par baguage et pose de balises sur les oiseaux, afin de lever les dernières incertitudes sur les déplacements erratiques ou migratoires et sur les dates de migration prénuptiale et postnuptiale.
II. LA RÉGLEMENTATION EN MATIÈRE DE PRÉLÈVEMENTS
A. LE STATUT LÉGAL DE L’ESPÈCE
1. Sur le plan international : les conventions et accords
● La Convention de Bonn sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage concerne l’espèce Anser anser à travers, d’une part, son Appendice II, d’autre part, l’accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique – Eurasie (AEWA), qui a classé l’espèce, du fait de sa large répartition dans le monde et de son importante population, dans la catégorie LC (c’est-à-dire en préoccupation mineure).
L’AEWA
L’Accord du 16 juin 1995 sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie est un traité intergouvernemental destiné à la conservation des oiseaux d’eau migrateurs et de leurs habitats en Afrique, en Europe, au Moyen Orient, en Asie centrale, au Groenland et dans l’archipel canadien. L’accord a été élaboré dans le cadre de la Convention de Bonn sur les espèces migratrices (CMS) et est géré par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). La France est partie à l’accord depuis 2003.
Il a pour objet d’inciter les pays membres à établir une conservation et une gestion coordonnées des oiseaux d’eau migrateurs dans l’ensemble de leur aire de migration en portant une attention particulière aux espèces en danger et à celles dont l’état de conservation est défavorable.
Parmi les espèces couvertes par l’AEWA, listées à l’annexe 2 (« Espèces d’oiseaux d’eau migrateurs auxquels l’accord s’applique »), figure l’oie cendrée. Elle répond aux critères définis par l’accord : dépendre écologiquement des zones humides pendant au moins une partie de leur cycle annuel, traverser des frontières internationales durant leur migration, besoin d’habitat de bonne qualité pour se reproduire et d’un réseau de sites adaptés pour soutenir leurs migrations annuelles.
Le levier d’action principal de l’accord est le plan d’action qui est prévu à l’annexe 3 et qui est juridiquement contraignant pour tous les pays membres de l’accord. Le Plan d’action de l’AEWA spécifie les différentes mesures à prendre par les Parties afin de garantir la conservation des oiseaux d’eau migrateurs au sein de leurs frontières nationales.
Les Parties peuvent également mettre en œuvre des plans d’actions internationaux par espèce pour les populations figurant dans la liste de l’annexe 1 ou pour améliorer l’état de conservation général des populations.
Source : site internet de l’AEWA
L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a procédé au même niveau de classement.
L’Union internationale pour la conservation de la nature
Créée en 1948, l’UICN est la première organisation environnementale mondiale et le plus vaste réseau mondial de professionnels de la conservation, regroupant plus de 1 200 organisations membres dans 140 pays dont 200 gouvernements ou organisations gouvernementales, et 800 organisations non gouvernementales (dont la FNC) ; près de 11 000 scientifiques et spécialistes volontaires au sein de six commissions ; plus de 1 000 professionnels travaillant dans 45 bureaux dans le monde entier.
L’UICN est dirigée par un Conseil, élu tous les quatre ans par les organisations membres lors du Congrès mondial de la nature. Elle est financée par des gouvernements, des organismes bilatéraux et multilatéraux, des organisations membres et des sociétés. Elle bénéficie d’un statut d’observateur officiel auprès de l’Assemblée générale des Nations Unies.
L’UICN développe et soutient la science de pointe de la conservation, particulièrement en ce qui concerne les espèces, les écosystèmes, la diversité biologique et leur impact sur les moyens de subsistance des êtres humains. Elle conduit des milliers de projets sur le terrain partout dans le monde pour mieux gérer les environnements naturels.
L’UICN soutient les gouvernements, les ONG, les conventions internationales, les organisations des Nations Unies, les sociétés et les communautés, en vue de développer des lois, des politiques et de meilleures pratiques.
Source : site internet de l’UICN
● La Convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe a classé (dans son annexe III) l’oie cendrée dans les espèces protégées mais qui peuvent être chassées (17).
Extraits de la convention de Berne
Article 4 (relatif à la protection des habitats) : « 3-Les Parties contractantes s'engagent à accorder une attention particulière à la protection des zones qui ont une importance pour les espèces migratrices énumérées dans les annexes II et III et qui sont situées de manière adéquate par rapport aux voies de migration, comme aires d'hivernage, de rassemblement, d'alimentation, de reproduction ou de mue. »
Article 7 (relatif à la conservation des espèces) : « 1-Chaque Partie contractante prend les mesures législatives et réglementaires appropriées et nécessaires pour protéger les espèces de faune sauvage énumérées dans l'annexe III. »
Article 10 : 1-En plus des mesures indiquées aux articles 4, 6, 7 et 8, les Parties contractantes s'engagent à coordonner leurs efforts pour la conservation des espèces migratrices énumérées dans les annexes II et III et dont l'aire de répartition s'étend sur leurs territoires.
2-Les Parties contractantes prennent des mesures en vue de s'assurer que les périodes de fermeture et/ou d'autres mesures réglementaires d'exploitation instituées en vertu du paragraphe 3.a de l'article 7 correspondent bien aux besoins des espèces migratrices énumérées dans l'annexe III. »
2. Au niveau de l’Union européenne
a. La base juridique : la directive sur la conservation des oiseaux sauvages
• La pierre angulaire de la politique de conservation de la nature poursuivie par l’Union européenne est constituée par, d’une part, la directive concernant la conservation des oiseaux sauvages (directive « Oiseaux ») (18), d’autre part, la directive concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (directive « Habitats »). Ces deux textes poursuivent simultanément une approche écosystémique (protection des habitats vulnérables ou des habitats d’espèces menacées) et une approche systémique (protection de certaines espèces sauvages). Bien qu’il ait pour objet la protection des espèces animales et végétales sauvages, cet objectif n’a pas pour effet d’empêcher des particuliers d’invoquer certaines de leurs dispositions devant leurs juridictions nationales.
• De manière générale, la directive « Oiseaux » énonce un principe général de protection et se montre défavorable au fait de tuer, de capturer, de perturber, de détenir et de commercialiser les espèces d’oiseaux, de les perturber intentionnellement, de détenir des espèces protégées ainsi que de détruire, d’endommager ou de ramasser leurs nids et leurs œufs (articles 5 et 6). En outre, son article 8 interdit un certain nombre de moyens de capture. Ce régime de protection n’est pas pour autant absolu dans la mesure où il reconnaît la commercialisation (article 6), la chasse (article 7) et la capture traditionnelle de certaines espèces dans certaines conditions.
Les dates de chasse doivent respecter le fait que les espèces auxquelles s’applique la législation ne soient pas chassées pendant la période nidicole ni pendant les différents stades de reproduction et de dépendance. Lorsqu’il s’agit d’espèces migratrices, les États doivent également veiller en particulier à ce que les espèces auxquelles s’applique la législation sur la chasse ne soient pas chassées pendant leur période de reproduction et pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification.
L’article 9 prévoit néanmoins une série de dérogations au régime général de protection, permettant d’envisager des prélèvements, pour des motifs précis et sous certaines conditions, durant la période de retour des espèces migratrices. Les différents cas mentionnés aux a), b) et c) ont donné lieu à une abondante jurisprudence.
Anser anser fait partie des espèces mentionnées aux annexes de la directive : II, partie A (pour la chasse) et III, partie B (pour la vente et le transport des oiseaux vivants ou morts).
extraits de la directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009
concernant la conservation des oiseaux sauvages
Selon l’article premier, la directive a pour objet de protéger, gérer et réguler toutes les espèces d'oiseaux vivant naturellement à l'état sauvage sur le territoire européen des États membres - y compris les œufs de ces oiseaux, leurs nids et leurs habitats -, et de réglementer l'exploitation de ces espèces.
Selon l’article 3, les États membres doivent prendre toutes les mesures pour préserver, maintenir ou rétablir une diversité et une superficie suffisantes d’habitats pour ces oiseaux en créant des zones de protection ; en entretenant et en aménageant les habitats ; en rétablissant les biotopes détruits ; en créant des biotopes.
Des mesures de protection spéciale des habitats sont arrêtées pour certaines espèces d'oiseaux (mentionnées à l’annexe I) et les espèces migratrices.
L’article 5 établit un régime général de protection de toutes les espèces d'oiseaux. Il est notamment interdit :
- de tuer ou de capturer intentionnellement les espèces d'oiseaux couverts par les directives. Celles-ci autorisent néanmoins la chasse de certaines espèces à condition que les méthodes de chasse utilisées respectent certains principes (utilisation raisonnée et équilibrée, chasse en dehors de la migration ou de la reproduction, interdiction de méthodes de mise à mort ou de capture massive ou non sélective) ;
- de détruire, d'endommager leurs nids et leurs œufs, d’enlever les nids et de ramasser les œufs ;
- de les perturber intentionnellement ;
- de détenir les oiseaux dont la chasse et la capture ne sont pas autorisées.
Article 6
1. Sans préjudice des paragraphes 2 et 3, les États membres interdisent, pour toutes les espèces d’oiseaux visées à l’article 1er, la vente, le transport pour la vente, la détention pour la vente ainsi que la mise en vente des oiseaux vivants et des oiseaux morts ainsi que de toute partie ou de tout produit obtenu à partir de l’oiseau, facilement identifiables.
3. Les États membres peuvent autoriser sur leur territoire, pour les espèces mentionnées à l’annexe III, partie B, les activités visées au paragraphe 1 et à cet effet prévoir des limitations, pour autant que les oiseaux aient été licitement tués ou capturés ou autrement licitement acquis.
Les États membres qui souhaitent accorder une telle autorisation consultent au préalable la Commission, avec laquelle ils examinent si la commercialisation des spécimens de l’espèce en question ne conduit pas ou ne risque pas de conduire, selon toute prévision raisonnable, à mettre en danger le niveau de population, la distribution géographique ou le taux de reproductivité de celle-ci dans l’ensemble de la Communauté. S’il ressort de cet examen que, de l’avis de la Commission, l’autorisation envisagée conduit ou risque de conduire à l’un des dangers énumérés ci-dessus, la Commission adresse à l’État membre une recommandation dûment motivée désapprouvant la commercialisation de l’espèce en question. Si la Commission estime qu’un tel danger n’existe pas, elle en informe l’État membre.
Article 7
2. Les espèces énumérées à l’annexe II, partie A, peuvent être chassées dans la zone géographique maritime et terrestre d’application de la présente directive.
4. Les États membres s’assurent que la pratique de la chasse, y compris le cas échéant la fauconnerie, telle qu’elle découle de l’application des mesures nationales en vigueur, respecte les principes d’une utilisation raisonnée et d’une régulation équilibrée du point de vue écologique des espèces d’oiseaux concernées, et que cette pratique soit compatible, en ce qui concerne la population de ces espèces, notamment des espèces migratrices, avec les dispositions découlant de l’article 2.
Ils veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s’applique la législation sur la chasse ne soient pas chassées pendant la période nidicole ni pendant les différents stades de reproduction et de dépendance.
Lorsqu’il s’agit d’espèces migratrices, ils veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s’applique la législation sur la chasse ne soient pas chassées pendant leur période de reproduction et pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification.
Article 8
1. En ce qui concerne la chasse, la capture ou la mise à mort d'oiseaux dans le cadre de la présente directive, les États membres interdisent le recours à tous moyens, installations ou méthodes de capture ou de mise à mort massive ou non sélective ou pouvant entraîner localement la disparition d'une espèce, et en particulier à ceux énumérés à l'annexe IV sous a).
Article 9
1. Les États membres peuvent déroger aux articles 5 à 8 s'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pour les motifs ci-après :
a) dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques, dans l'intérêt de la sécurité aérienne, pour prévenir les dommages importants aux cultures, au bétail, aux forêts, aux pêcheries et aux eaux, pour la protection de la flore et de la faune ;
b) pour des fins de recherche et d'enseignement, de repeuplement, de réintroduction ainsi que pour l'élevage se rapportant à ces actions ;
c) pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la capture, la détention ou toute autre exploitation judicieuse de certains oiseaux en petites quantités.
2. Les dérogations doivent mentionner :
a) les espèces qui font l'objet des dérogations,
b) les moyens, installations ou méthodes de capture ou de mise à mort autorisés,
c) les conditions de risque et les circonstances de temps et de lieu dans lesquelles ces dérogations peuvent être prises,
d) l'autorité habilitée à déclarer que les conditions exigées sont réunies, à décider quels moyens, installations ou méthodes peuvent être mis en œuvre, dans quelles limites et par quelles personnes,
e) les contrôles qui seront opérés.
b. La variation des périodes de chasse
• L’espèce Anser anser est donc chassable dans la majorité des pays européens, sauf aux Pays-Bas où les lois sur la chasse ont restreint à cinq le nombre d’espèces susceptibles d’être chassées et l’ont interdit pour les oies cendrées depuis 1999, et dans certaines régions autonomes qui disposent de la compétence en matière de chasse (comme en Wallonie).
Ainsi, en Belgique, la réforme institutionnelle de 1980 a attribué la compétence en matière de chasse à chacune des trois régions, ce qui explique les différences d’approche : la région-capitale bruxelloise a interdit la chasse ; la région wallonne classe toujours l’oie cendrée comme gibier mais la chasse n’est plus ouverte depuis 1986 ; la région flamande ne l’autorise que dans un objectif de destruction, du 15 août au 30 septembre. Mais la Belgique n’accueille qu’un nombre limité d’individus sauf dans les zones humides en bordure de la mer du Nord.
• Les périodes de chasse
Les périodes de chasse sont évidemment très variables d’un pays à l’autre, démarrant tôt dans les pays nordiques (entre le 10 et le 21 août selon les comtés en Norvège par exemple ou du 11 au 21 août selon les régions en Suède) et plus tard en Espagne (début octobre) en vertu des traditions cynégétiques ; fermant plus tôt dans les pays du Nord (le 23 décembre en Norvège ou le 31 décembre en Suède) et au plus tard le 31 janvier dans les pays du Sud (France, Espagne).
Mais ces dates sont également différenciées au sein des États, comme en Allemagne ou en Espagne, où elles peuvent varier d’une région à l’autre.
Ainsi, chaque communauté autonome espagnole détermine les saisons de chasse sur son territoire avec les restrictions et les dérogations qu’elle estime nécessaires (19). En Allemagne, les Länder doivent respecter les dispositions de la Loi fondamentale et de la loi fédérale sur la chasse du 29 novembre 1952 ; les dates fixées par le ministre fédéral (du 1er au 31 août puis du 1er novembre au 15 janvier) sont des maxima mais les autorités fédérées peuvent fixer des périodes dérogatoires. En Rhénanie du Nord – Westphalie par exemple, les oies cendrées peuvent être chassées du 16 juillet au 31 janvier. Les parcs régionaux, où les conditions de chasse sont restreintes, constituent des exceptions à cette règle. La chasse à l’oie cendrée est interdite toute l’année à Berlin et en Thuringe.
Dans de nombreux pays en effet, les autorités locales peuvent décider de l’organisation de chasses préventives en dehors des périodes officielles. Ainsi, en Norvège, le gouverneur de comté peut faire débuter la chasse avec une anticipation de quinze jours pour éviter une surpopulation (« damage hunting »).
• La situation aux Pays-Bas
La chasse non réglementée des oies cendrées n’est plus autorisée aux Pays-Bas depuis 1999. Depuis lors, la chasse n’est autorisée que sur la base de licences qui ont pour finalité la prévention des détériorations commises par les oiseaux. Deux périodes sont distinguées : jusqu’en 2003-2004, les oies cendrées pouvaient seulement être chassées par dérogation du 1er avril au 30 septembre (« oies résidentes en été ») puis du 16 février au 31 octobre ; mais, depuis 2005-2006, les licences autorisent également la chasse des oies cendrées en automne, voire en hiver, du 1er novembre au 15 février (« oies migratrices en hiver ») lorsqu’on cherche à effrayer les oiseaux pour protéger des terres agricoles vulnérables.
Depuis 2005, la politique à l’égard de la chasse des oies a été régionalisée : ce sont les douze provinces hollandaises qui en sont responsables. Dans le cadre d’accords établis entre les associations d’agriculteurs, la fédération des propriétaires terriens (FPG), la fédération royale de la chasse (KNJV), l’Office des forêts (Staatsbosbeheer) et les associations de protection des oiseaux dont Vogelbescherming, les autorités provinciales délèguent la délivrance des licences aux unités provinciales de gestion de la faune (Faunabeheereenheid) pour réduire les nuisances occasionnées par les oies en général et les oies cendrées en particulier.
L’opinion publique reste majoritairement défavorable à la liberté de la chasse même si elle admet la nécessité de certaines dérogations. Une évolution serait perceptible. La fédération royale des chasseurs (KNJV) a cité un sondage du printemps 2015 qui montrait que plus de la moitié des personnes interrogées étaient favorables à la chasse et que 5 % seulement y étaient vraiment hostiles. Mais le parti politique hollandais de Protection des Animaux (Partij voor de Dieren), qui comprend deux députés à la Chambre des représentants, et d’autres associations protectrices des oies comme Vogelbescherming (20) considèrent que la chasse est inutile, des études montrant que la population des oies cendrées ne décroît pas grâce à cela, et n’admettent de régulation que pour des raisons liées au transit aérien. Ils suggèrent d’utiliser des équipements laser pour leur faire peur ou encore de faire pousser des cultures que les oies n’apprécient pas. D’ailleurs, en juillet 2015, lors de la révision de la loi de 2002 sur la faune et la flore, la Chambre des Représentants a rejeté une motion suggérant d’ajouter les oies cendrées à la liste des animaux relevant de la liberté de la chasse.
*
Certaines associations et fédérations de chasseurs soulignent donc – à juste titre – que les différences dans les dates de chasse sont également à relier aux dérogations apportées, notamment à la suite de dégâts sur les cultures agricoles ou en liaison avec une politique de prévention.
c. L’interprétation stricte par la jurisprudence
• L’interprétation de la directive « Oiseaux » a été donnée par la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE), laquelle a élaboré une jurisprudence stricte autour de la notion de « protection complète » des oiseaux migrateurs et du gibier d’eau, et précisant ainsi les notions de « petites quantités » de « risque de confusion » entre espèces ou d’ « autre solution satisfaisante ».
CJCE, 19 janvier 1994, Association pour la protection des animaux sauvages.
En application de l’article 7 § 4 de la directive 79/409/CEE du 2 avril 1979, la cour confirme la nécessité que la date de clôture de la chasse assure une « protection complète » des oiseaux migrateurs et du gibier d’eau. Elle condamne les méthodes qui visent ou qui aboutissent à ce qu’un pourcentage donné des oiseaux d’une espèce échappe à cette protection.
CJCE, 16 octobre 2003, LPO.
L’article 9 de la directive « Oiseaux » doit être interprété en ce sens que la chasse peut être autorisée au titre du paragraphe 1, c), « pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la capture, la détention ou tout autre exploitation judicieuse de certains oiseaux en petites quantités », notamment lorsqu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante.
Il en résulte que la protection prévue pour ces espèces tant pour la période nidicole et les différents stades de reproduction et de dépendance que pour le trajet de retour des espèces migratrices vers leur lieu de nidification, doit être une protection complète, excluant des risques de confusion entre espèces différentes. En conséquence, la CJUE a interdit l’échelonnement des dates de périodes de chasse en fonction des espèces ou selon différentes parties du territoire, sauf si la preuve, fondée sur des données scientifiques, qu’un tel échelonnement n’est pas incompatible avec la protection complète des espèces est rapportée.
Par l’arrêt du 16 octobre 2003, rendu à la suite d’une question préjudicielle que le Conseil d’État lui avait soumise le 25 janvier 2002, la CJUE a précisé son interprétation des dispositions de l’article 9 de la directive « Oiseaux » concernant les possibilités de dérogation qui ne peuvent être envisagées qu’à défaut de solutions alternatives satisfaisantes et ne peuvent servir de fondement légal à des mesures qui auraient « pour seul objet de prolonger les périodes de chasse de certaines espèces d’oiseaux sur des territoires déjà fréquentés par ces dernières pendant ces périodes de chasse fixées conformément à l’article 7 de la directive n° 79/409 ».
La jurisprudence de la Cour de Justice, qui introduit ainsi la protection du « premier oiseau », est excessivement stricte car elle considère que tout vol hivernal est une migration prénuptiale. Reprise par les jurisprudences au niveau de chaque État, elle est à la source de nombreux contentieux nationaux.
• La décision de la CJCE à propos de l’ouverture de la chasse printanière, au titre des années 2004 à 2007, à la tourterelle des bois (Streptopelia turtur) et à la caille des blés (Coturnix coturnix) à Malte (21), a semblé ouvrir de nouvelles perspectives. La Cour a, en effet, estimé que, si les deux espèces d’oiseaux étaient bien présentes à l’automne sur les territoires concernés, ce seul constat ne suffisait pas à considérer que la chasse automnale constituait une « autre solution satisfaisante ». Elle a également rappelé que l’expression « autre solution satisfaisante » n’entendait pas exclure le recours à une dérogation dès lors qu’existait une possibilité de chasser pendant les périodes légales (en application de l’article 7 de la directive) mais entendait permettre qu’il soit dérogé « dès lors que les possibilités de chasse offertes (…) en automne sont si limitées que l’équilibre recherché par la directive entre la protection des espèces et certaines activités de loisir est rompu. ». (22)
L’autre intérêt de cette jurisprudence est l’introduction du principe de proportionnalité : la Cour a indiqué que « la dérogation dont un État membre entend faire usage doit être proportionnée aux besoins qui la justifient » (23) et que « les dérogations ne peuvent être mises en œuvre que si la garantie existe que la population des espèces concernées est maintenue à un niveau satisfaisant. ». C’est d’ailleurs sur le fondement de ce principe que la Cour a condamné la République de Malte qui n’avait pas respecté les conditions de la dérogation interprétées à la lumière du principe de proportionnalité, et qui avait autorisé la chasse à la caille des blés et à la tourterelle des bois au printemps alors que cette chasse n’était une solution ni adéquate, ni proportionnée vu le taux élevé de mortalité de ces espèces durant cette période.
Suite à cette jurisprudence, Malte a modifié sa législation afin de respecter les conditions fixées à l’article 9 de la directive. Le caractère original de l’expérience de la chasse printanière à Malte est que cette chasse est conditionnée à un quota de prélèvements sur l’espèce concernée, prédéfini durant la période automnale de chasse : si le quota est rempli à la fin de la période légale de chasse, celle-ci n’est pas prolongée ; mais, si le quota n’est pas rempli, la chasse peut être prolongée pendant une période précise et avec fixation d’un quota de prélèvements (24). L’avantage de ce dispositif repose sur le fait qu’il permet d’ajuster les prélèvements cynégétiques selon l’état de conservation de l’espèce en question, et cela saison de chasse après saison. L’inconvénient majeur est la nécessité de s’assurer d’un système efficace et strict de déclaration des prélèvements par les chasseurs et de contrôle.
Dans la réponse à la question écrite du député européen Andrea Zanoni (25), qui critiquait l’inefficacité des contrôles (sept agents pour 1 000 chasseurs), le commissaire européen Janez Potocnik estimait, le 4 juin 2013, que les mesures prises par Malte prenaient – désormais – en considération le principe de proportionnalité et que les conditions étaient remplies pour autoriser les dérogations.
a. La règle de base : une espèce chassable sous conditions
• Une espèce chassable
Dans l’arrêté du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection, la protection de l’oie cendrée n’est pas prévue : la France ne considère pas cette espèce comme protégée.
Au contraire, l’arrêté du 26 juin 1987 (consolidé), qui fixe la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée, cite ainsi, dans son article premier, les trois espèces : oie cendrée, oie des moussons et oie rieuse.
• Les compétences ministérielles
En vertu de l’article R. 424-9 du code de l’environnement, le ministre en charge de la chasse est compétent pour fixer les dates d’ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux de passage et au gibier d’eau, par arrêté prévoyant les conditions spécifiques de chasse de ces gibiers. Les dates sont fixées après avis du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage et après consultation de l’Office national de la faune sauvage et de ses habitats.
La jurisprudence du Conseil d’État a bien précisé que le ministre est seul compétent et que les préfets ne pouvaient déroger à ces dates.
Pour déterminer ces dates, le ministre s’appuie sur l’article L. 424-2 du code de l’environnement qui détermine les conditions de définition des périodes de chasse, en application de l’article 7 de la directive européenne sur la conservation des oiseaux sauvages.
Article L. 424-2 du code de l’environnement
Nul ne peut chasser en dehors des périodes d’ouverture de la chasse fixées par l’autorité administrative selon des conditions déterminées par décret en Conseil d’État.
Les oiseaux ne peuvent être chassés ni pendant la période nidicole ni pendant les différents stades de reproduction et de dépendance. Les oiseaux migrateurs ne peuvent en outre être chassés pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification.
Toutefois, pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la capture, la détention ou toute autre exploitation judicieuse de certains oiseaux migrateurs terrestres et aquatiques en petites quantités, conformément aux dispositions de l'article L. 425-14, des dérogations peuvent être accordées.
Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application de cette disposition.
• Les dates d’ouverture et de fermeture
● Les dates d’ouverture de la chasse aux oies cendrées sont complexes car elles dépendent des territoires concernés. En revanche, la date de fermeture de la chasse est uniforme sur l’ensemble du territoire.
L’arrêté du 24 mars 2006 relatif à l’ouverture de la chasse aux oiseaux de passage et au gibier d’eau (voir Annexe 2), qui a été modifié (26), autorise l’ouverture anticipée :
– le premier samedi d’août à 6 heures (27) pour le domaine public maritime des départements côtiers de la façade maritime de l'Atlantique, de la Manche et de la mer du Nord, à l'exception des étangs et des plans d'eau salés reliés ou non à la mer, et certains territoires assimilés (28) ;
– le premier jour de la troisième décade d’août à 6 heures (29) pour les territoires mentionnés à l’article L. 424-6 du code de l’environnement (marais non asséchés, fleuves, rivières, canaux, réservoirs, lacs, étangs, nappes d’eau) ;
Article L. 424-6 du code de l’environnement
Dans le temps où, avant l'ouverture et après la clôture générales, la chasse est ouverte, les espèces de gibier d'eau ne peuvent être chassées que :
1° En zone de chasse maritime ;
2° Dans les marais non asséchés ;
3° Sur les fleuves, rivières, canaux, réservoirs, lacs, étangs et nappes d'eau ; la recherche et le tir de ces gibiers ne sont autorisés qu'à distance maximale de trente mètres de la nappe d'eau sous réserve de disposer du droit de chasse sur celle-ci.
La date d’ouverture générale de la chasse pour le reste du territoire est fixée au troisième week-end de septembre.
● L’arrêté du 19 janvier 2009 relatif aux dates de fermeture de la chasse aux oiseaux de passage et au gibier d'eau (dans sa version consolidée, voir Annexe 1) fixe désormais au 31 janvier la date de fermeture de la chasse à l’oie cendrée.
Mais il faut rappeler que, depuis vingt ans, les dates de fermeture de la chasse aux oies cendrées ont été ramenées par étapes jusqu’à cette date : 28 février jusqu’en 1998 ; 20 février à partir de 1999 (30) ; 10 février en 2008 (31).
b. L’application « tumultueuse » : une succession d’arrêtés annulés par le Conseil d’État
Depuis plus de vingt ans, les arrêtés fixant les dates d’ouverture et/ou de fermeture de la chasse aux oies cendrées ont fait l’objet de recours devant le Conseil d’État et ils ont tous été annulés par la juridiction, même si les motifs invoqués ont pu différer d’une décision à l’autre.
Cette jurisprudence constante mécontente les associations et fédérations de chasseurs dont les demandes sont anciennes. Mais les associations de protection de l’environnement justifient leurs recours par le sentiment qu’elles ont que le ministère chargé de l’écologie qui a signé les arrêtés méconnaît le droit.
Jurisprudence du Conseil d’État depuis 1993
En 1993 et les années suivantes, une succession d’arrêtés préfectoraux autorisant la chasse à l’oie cendrée au-delà du 10 février a été annulée par le Conseil d’État (CE, 12 février 1993, Ministre de l’environnement : annule l’arrêté préfectoral du 23 juillet 1990 du préfet des Bouches-du-Rhône autorisant la chasse à l’oie au-delà du 10 février ; CE, 27 octobre 1993 : annule l’arrêté du préfet de Seine-Maritime du 24 juillet 1991 en ce qu’il autorise la chasse à l’oie cendrée au-delà du 1er février 1992, CE, 11 janvier 1995 : annule l’arrêté du préfet des Landes qui avait fixé la date de clôture de la chasse à l’oie cendrée au 16 février 1992 ; CE, 20 novembre 1998 : annule l’arrêté du préfet de l’Hérault fixant au 10 février 1993 la date de fermeture de la chasse pour l’oie cendrée).
La jurisprudence du Conseil d’État se réfère systématiquement à la directive « Oiseaux », notamment à son article 7 concernant la conservation des oiseaux sauvages, reprenant les termes de la directive : les États membres lorsqu’il s’agit d’espèces migratrices « veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s’applique la législation de la chasse ne soient pas chassées pendant la période de reproduction, et pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification ».
La décision du 25 janvier 2002 reprend l’interprétation stricte de la Cour de Justice sur l’article 7 § 4 : « il y a lieu de se référer à l'interprétation que la Cour de Justice des Communautés européennes a, en particulier dans ses arrêts du 19 janvier 1994 et du 7 décembre 2000, donnée de l'article 7 § 4 de la directive du 2 avril 1979 ; qu'il en résulte, notamment, que la protection prévue pour ces espèces, tant pour la période nidicole et les différents stades de reproduction et de dépendance que pour le trajet de retour des espèces migratrices vers leur lieu de nidification, doit être une protection complète ».
C’est par cette même décision que le Conseil d’État soumet à la CJCE la question préjudicielle portant sur l’interprétation de l’article 9 de la directive (voir arrêt de la CJCE du 16 octobre 2003) : « l'article 9 § 1 sous c) de la directive 79-409, du Conseil, du 2 avril 1979, permet-il à un État membre de déroger aux dates d'ouverture et de clôture de la chasse qui résultent de la prise en compte des objectifs énumérés au § 4 de son article 7 ? En cas de réponse affirmative, quels sont les critères qui permettent de déterminer les limites de cette dérogation ? ».
Pour apprécier la compatibilité des arrêtés et des décrets fixant les dates de clôture de la chasse avec la directive de 1979, le Conseil d’État rapproche les données scientifiques telles qu’elles ressortent des pièces du dossier et la jurisprudence de la CJUE.
Dans sa décision du 10 mai 2004, le Conseil d’État s’est ainsi appuyé sur l’enquête nationale sur les tableaux de chasse à tir de la saison 1998 – 1999 pour annuler l’arrêté du 4 février 2003 du ministère de l’écologie et du développement durable comme dérogeant aux dates de la chasse pour un motif exclu des hypothèses visées à l’article 9 de la directive Oiseaux.
De même, dans sa décision du 5 juillet 2004, le Conseil d’État a annulé l’arrêté du 31 décembre 2003 en tant qu’il autorisait la chasse aux oies, aux limicoles, aux rallidés et au vanneau huppé au-delà du 31 janvier 2004, avec des dates échelonnées jusqu’au 20 février.
La jurisprudence plus récente du Conseil d’État mérite d’être précisée.
● Le ministre chargé de l’écologie n’ayant pas répondu aux lettres des associations de protection de l’environnement, datées du 22 octobre 2010, par lesquelles elles demandaient la modification de l’arrêté du 19 janvier 2009, ces trois associations (32) ont contesté l’arrêté ministériel du 22 novembre 2010 fixant de nouveau la clôture de la chasse au 10 février.
Par sa décision du 23 décembre 2011, le Conseil d’État a considéré que cet arrêté du 22 novembre 2010 manifestait le refus du ministre d’abroger l’arrêté du 19 janvier 2009 sur ce point et lui a enjoint de fixer, dans un délai d’un mois, une date de fermeture de la chasse pour les trois espèces d’oies qui ne soit pas postérieure au 31 janvier. Cette injonction a été exécutée par un arrêté ministériel modificatif du 12 janvier 2012 (33).
● Toutefois, par arrêté du 3 février 2012, la ministre chargée de l’écologie a autorisé des prélèvements jusqu’au 10 février 2012, dans treize départements, à des fins d’études scientifiques sur l’origine et les déplacements migratoires de populations, en se basant sur la dérogation prévue à l’article 9 § 1 b) de la directive « Oiseaux ». Cet arrêté a fait l’objet d’une requête de l’Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS) et le Conseil d’État a de nouveau annulé l’arrêté, par décision du 7 novembre 2012, en considérant qu’il y avait une application inexacte de l’article L. 424-2 du code de l’environnement : selon le juge, les prélèvements autorisés étaient dénués de tout intérêt scientifique (il n’y avait pas de protocole scientifique versé au dossier) et ne s’inscrivaient pas dans les motifs énumérés à l’article 9 § 1 de la directive « Oiseaux » au titre des dérogations (les études auraient pu être menées avec d’autres moyens que la chasse, comme les captures).
● Plus récemment, à l’issue d’une consultation du public qui s’est déroulée du 21 au 28 janvier 2014, l’arrêté du 30 janvier 2014 du ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie a prévu que, « par exception à l’article 1er de l’arrêté du 19 janvier 2009, pour la saison 2013-2014, la date de fermeture de la chasse de l’oie cendrée, de l’oie des moussons et de l’oie rieuse » soit fixée au 10 février 2014.
Saisi par quatre associations de protection de l’environnement (34) d’une demande d’annulation, le juge des référés du Conseil d’État a suspendu l’exécution de cet arrêté du 30 janvier 2014 par une ordonnance du 5 février 2014, en s’appuyant une fois de plus l’interprétation stricte de la directive pour une protection complète de l’espèce.
c. La solution retenue par le Gouvernement en 2015
La succession d’annulations ou de suspension des arrêtés ministériels par le Conseil d’État obère la possibilité pour le Gouvernement de prolonger la date de clôture au-delà du 31 janvier par voie réglementaire.
C’est pourquoi, dans une démarche politique d’apaisement, la ministre en charge de l’écologie a innové en 2015. Par lettre en date du 28 janvier 2015, elle a certes rappelé que la date de fermeture de la chasse aux oies était fixée au 31 janvier mais elle a donné comme instruction au directeur général de l’ONCFS, que, dans la période du 31 janvier au 8 février, soit organisée « une action d’information visant à prévenir les chasseurs » et a demandé que la verbalisation ne prenne effet qu’à compter du 9 février suivant.
De facto, la période de chasse autorisée était ainsi prolongée de huit jours calendaires sur l’ensemble du territoire national.
Cette décision a été vivement contestée par plusieurs associations de protection de l’environnement dont LPO et la FNE. Son statut juridique est – il faut le reconnaître – « fragile » et elle ne peut pas constituer une solution pérenne – tout au moins à moyen terme. Pour les associations de protection de l’environnement, une telle décision, contraire à la réalité scientifique et au droit, conduit à une véritable « rupture de confiance » : mais la mission a estimé qu’elle avait le mérite d’avoir apporté une solution de court terme dans une période de blocage.
Le Conseil d’État n’a pas été saisi de cette décision. Mais il appelle l’attention sur le fait qu’il ne faudrait pas que la France s’expose à une condamnation – de la part des instances européennes – pour omission à la poursuite des infractions, comme cela s’est produit par l’arrêt du 12 juillet 2005 « Poissons sous taille » qui a condamné la France pour « manquement sur manquement ».
d. Les fondements juridiques des décisions
Il est à noter que :
● dans ses mémoires en défense, le ministère a soutenu, à chaque fois, que les moyens invoqués n’étaient pas fondés et que la condition d’urgence n’était pas remplie, et, dans le cas de 2014, que les études en cours, tant du GEOC que de l’ONCFS, permettaient de remettre en cause les règles fixées en 2012. En particulier, dans sa réponse à la question écrite de notre collègue Nicole Ameline (35), le Gouvernement semblait envisager que les mouvements d’oies cendrées observés en France à compter de la dernière décade de janvier ne correspondent pas à un réel début de migration ;
● le Conseil d’État s’est à chaque fois appuyé sur l’article L. 424-2 du code de l’environnement, et a considéré au moins pour l’arrêté de janvier 2014 – dont la suspension était demandée – que la condition d’urgence requise par l’article L. 521-1 du code de justice administrative devait être regardée comme remplie.
Il s’est également conformé à l’interprétation que la Cour de Justice de l’Union européenne a donnée des dispositions de l’article 7 § 4 de la directive « Oiseaux » du 30 novembre 2009, dont l’article L. 424-2 assure la transposition (36).
Il a ainsi expressément retenu comme argument le fait que la protection prévue pour ces espèces, tant pour la période nidicole et les différents stades de reproduction et de dépendance que pour le trajet de retour des espèces migratrices vers leur lieu de nidification, devait être complète. Ainsi, il a considéré que :
– « si la période de vulnérabilité débute, pour ces espèces, à la première décade de février, la tendance révélée à l’augmentation importante du niveau de migration atteint au cours de cette décade impose une fermeture de la chasse dès la fin de la décade précédente pour satisfaire à l’objectif de protection complète de ces espèces » (37) ;
– et que la fixation de dates échelonnées en fonction des espèces ou en fonction des différentes parties du territoire n’était légalement possible que s’il était établi, au regard des données scientifiques et techniques, que cet échelonnement était compatible avec l’objectif de protection complète.
À cet égard, il est nécessaire de rappeler que la Cour de Justice de l’Union européenne a pris position sur les critères à retenir pour fixer la date de clôture de la chasse aux oiseaux migrateurs et au gibier d’eau. Elle a reconnu que les mouvements migratoires sont caractérisés par une certaine variabilité et a souligné qu’un « certain nombre d’oiseaux d’une espèce migratrice donnée peuvent entamer leur trajet de retour vers leur lieu de nidification à une date relativement précoce par rapport aux flux migratoires moyens ».
Mais la Cour de Justice a également précisé que les méthodes de détermination des dates de la chasse aux oiseaux qui visent ou aboutissent à ce qu’un pourcentage donné des oiseaux d’une espèce échappe à cette protection n’étaient pas conformes à la directive concernant la conservation des oiseaux sauvages.
● Pour le Gouvernement, les derniers travaux de l’ONCFS ne peuvent que confirmer les juridictions nationales dans les décisions qu’elles ont successivement prises.
Dans ses réponses à différentes questions écrites de plusieurs de nos collègues (38), le Gouvernement indique ainsi que : « l'étude conduite par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage et dont les résultats définitifs viennent d'être rendus, n'apporte pas d'éléments nouveaux qui remettraient en cause l'analyse sur la date de fermeture des oies validée par la Haute juridiction. »
Mais le Gouvernement précise néanmoins que : « ce travail de référence sur l'oie cendrée pourra éventuellement faire l'objet d'ajustements si toutefois des données nouvelles étaient disponibles, ou si des travaux de recherche étaient conduits par la Fédération nationale des chasseurs. ».
En particulier, les nouvelles données pourraient porter sur la nature des vols « printaniers » et la signification à donner aux termes de migration prénuptiale ou postnuptiale et de vols erratiques (voir partie III A).
*
Si on peut comprendre les réticences du Gouvernement à prendre des arrêtés dérogatoires quant aux dates de fermeture de la chasse aux oies cendrées, compte tenu de la jurisprudence européenne et nationale, les possibilités demeurent néanmoins en droit : soit pour régionaliser les dates de fermeture, à condition de justifier par des études scientifiques ; soit pour prendre en compte la situation de l’espèce, c’est-à-dire non seulement l’évolution des dates de migration que la surabondance, et autoriser une période complémentaire de moins de dix jours dans le cadre de l’article 7 de la directive « Oiseaux », en fixant un plafond quantitatif de prélèvements pour l’espèce ; soit pour recourir aux dérogations admises par l’article 9 de la même directive (ce n’est pas parce que toutes les conditions ne sont pas remplies actuellement qu’il faut s’interdire un tel recours à l’avenir).
Proposition n° 2 : Poursuivre les études juridiques afin de déterminer les conditions qui permettraient de fixer par arrêté ministériel des dérogations à la date annuelle de fermeture de la chasse aux oies cendrées.
1. L’évaluation incomplète des prélèvements cynégétiques
a. Des chiffres encore incertains au niveau européen
Les données comparatives sur les prélèvements cynégétiques sont mal connues alors que la connaissance de ces prélèvements constitue un des éléments essentiels de la dynamique de l’espèce.
L’ONCFS a mené une enquête au niveau européen en 2011-2013. Les questions posées concernaient : le statut de l’espèce et la législation de la chasse, les prélèvements annuels de 1990 à 2012, l’existence de quotas, les périodes et les techniques de chasse, les mesures de gestion en cas de dégâts importants aux cultures. Les données comparatives sont regroupées dans le tableau suivant selon les pays ayant répondu à cette enquête. Les informations recueillies par votre rapporteur auprès du CERDP (39) complètent ces données pour six pays qui ont répondu au questionnaire qu’il leur a envoyé.
Estimations des prélèvements cynégétiques d’oies cendrées en Europe | ||||||
Saison de chasse |
Allemagne |
Danemark |
Espagne |
Norvège |
Suède |
Pays-Bas |
2013-2014 |
42 500 |
45 000 |
6 000 |
15 000 |
35 000 |
200 000 |
Source : CERDP (2015), réponses fournies pour six pays en dehors de la France
Estimations des prélèvements cynégétiques d’oies cendrées en Europe | ||||||
Saison de chasse |
Allemagne |
Danemark |
France |
Norvège |
Suède |
Pays-Bas |
1992-1993 |
25 511 |
12 000 |
6 290 |
6 390 |
||
1997-1998 |
30 697 |
9 600 |
8 370 |
4 160 |
||
1999-2000 |
31 900 |
9 177 |
7 800 |
|||
2002-2003 |
30 949 |
13 110 |
9 493 |
6 600 |
||
2005-2006 |
31 969 |
19 804 |
1 703 |
10 571 |
||
2007-2008 |
44 106 |
27 080 |
1 573 |
11 589 |
14 600 |
43 000 |
2008-2009 |
52 732 |
21 298 |
3 661 |
12 865 |
||
2009-2010 |
26 593 |
4 020 |
12 800 |
|||
2010-2011 |
42 247 |
4 482 |
14 630 |
126 716 | ||
2011-2012 |
45 101 |
7 946 |
13 320 |
23 800 |
||
2012-2013 |
42 500 |
15 000 |
200 000 |
Source : Rapport ONCFS (novembre 2014)
• De manière générale, une corrélation positive entre les effectifs présents et le niveau des prélèvements peut se vérifier.
Les prélèvements apparaissent en forte augmentation au Danemark (10 700 individus prélevés en 1990 et 45 100 en 2011), en Suède (6 390 oiseaux prélevés en moyenne au début des années quatre-vingt-dix, 14 600 au milieu des années 2000, 23 800 en 2011 et même plus de 35 000 selon la fédération suédoise de la chasse) et aux Pays-Bas (plus de 126 000 oies chassées sur la période du 1er avril 2010 au 1er avril 2011, soit dix fois plus que dix ans auparavant).
Dans les Flandres belges, les tableaux de chasse sont exprimés par un indice (nombre moyen d’oies tuées par 100 hectares) dont la valeur a fortement augmenté entre 1998 et 2005 en lien direct avec l’augmentation de la population hivernante ; puis, en 2005 et jusqu’en 2007, cette population a diminué conduisant à une baisse du tableau de chasse.
En Allemagne, les statistiques font état de 42 500 individus pour la saison de chasse 2012/2013 ; ce chiffre a plus que doublé en dix ans. Un tiers de toutes les oies cendrées tuées à la chasse est prélevé en Schleswig-Holstein et un tiers en Basse-Saxe (40).
Au total, on évalue à environ de 150 000 à 180 000 le nombre des oies cendrées de la population Nord-Ouest européenne qui sont prélevées chaque année pendant la saison « hivernale » de chasse. Sur un total estimé entre 650 000 et 700 000 individus fin janvier, c’est-à-dire quand l’essentiel des prélèvements cynégétiques a été effectué, cela représente entre 17,5 % et 19 % des effectifs à l’issue de la période de reproduction.
À ce total, doit être ajouté le prélèvement effectué aux Pays-Bas pendant la période de reproduction : 70 000 oies durant l’été 2010, 150 000 durant l’été 2013. On est ainsi étonné de constater que, dans un pays où la chasse est légalement interdite, plus de 200 000 oies cendrées aient été tirées pour la période 2013-2014 selon le président de la fédération royale des chasseurs KNJV.
b. Un prélèvement croissant au niveau français
En France, le prélèvement cynégétique d’oies cendrées est loin d’être négligeable par rapport aux effectifs présents constatés.
L'analyse des tableaux de chasse réalisés lors de la saison 1998-1999 montre que le prélèvement a pu atteindre 20 850 individus (soit environ 22 %). Cependant, cette estimation ne permet pas de dissocier les trois espèces d'oies (cendrées, des moussons et rieuses), même si les oies cendrées sont majoritaires dans les tableaux de chasse.
La part des prélèvements est majoritaire d'octobre à décembre (64 %) et en février (18 %), c'est-à-dire pendant les périodes de migration, postnuptiale à l’automne et prénuptiale à la fin de l’hiver.
Une nouvelle enquête a été menée par l’ONCFS pour la saison 2014-2015 mais ses résultats ne sont pas encore connus avec certitude. On évalue le nombre de prélèvements entre 15 et 18 000, mais il serait nécessaire d’obtenir des chiffres plus précis.
Certaines associations de défense de l’environnement estiment que les prélèvements cynégétiques sont excessifs en France. Mais les chiffres de prélèvements rapportés à la population en croissance montrent que les capacités globales de prélèvement dans notre pays ne peuvent pas représenter un risque pour les populations nord-européennes, même si un allongement de la période de chasse était autorisé.
a. Les diverses méthodes de destruction
Dans le cadre de l’application de la directive européenne sur la conservation des oiseaux, d’autres moyens de prélèvement sont mis en œuvre dans différents pays pour réguler les populations d’oies, soit en cas de dégâts agricoles ou piscicoles, soit pour des raisons de sécurité aérienne à proximité des aéroports, soit pour des motifs liés à la santé publique (déjections dans les lacs de baignade ou le long des captages) ou à la destruction d’habitats naturels.
En cas de dégâts agricoles et/ou pour des raisons de sécurité aérienne, les tirs d’effarouchement peuvent être autorisés aux Pays-Bas (41), dans les Flandres belges, en Allemagne, en Suède et en Norvège, selon des modalités propres à chaque pays, voire à chaque région, province ou comté : des autorisations de tir sont accordées de la mi-juillet à la mi-août en Norvège, de début octobre à fin décembre en Belgique (Flandres). Dans les Flandres belges, dans un souci de conservation de la nature, il est autorisé de détruire les œufs, de tirer au fusil ou de capturer les oies adultes au filet afin de les tuer, uniquement du 1er juin au 14 juillet. La destruction des œufs peut être autorisée par les autorités locales suédoises ou norvégiennes, dans le cadre de plans locaux de gestion.
Comme l’ont expliqué les responsables de l’unité provinciale de gestion de la faune en Zélande (Faunabeheereenheid Zeeland FBE), les mesures les plus couramment utilisées sont : perturber les couples au printemps pour les empêcher de nicher ; secouer ou percer les œufs dans les nids au printemps ; capturer les oies au filet pendant la période des mues (42) puis les gazer au CO2 ; autoriser la chasse sur les terres cultivées à partir de quotas décidés au cours de l’hiver précédent. Ces méthodes de destruction sont également utilisées dans les autres provinces néerlandaises.
Il est à noter que certaines techniques de régulation sont très efficaces (secouage des œufs, trempage des œufs dans l’huile ou remplacement des œufs par des factices par exemple car les femelles continuent à couver et ne répondent pas) mais difficiles à mettre en œuvre (les nids sont dispersés dans les roseaux et peu visibles, les oies font de plus en plus leurs nids en bordure de canaux ou sur de petites îles) donc coûteuses en moyens humains. Elles ont montré leur efficacité dans des territoires délimités comme l’île de Texel en Hollande du Nord.
Les mesures alternatives de gestion comme les clôtures de parcelles (pour empêcher les oisons d’aller brouter) ou les tirs d’effarouchement se sont montrées globalement peu efficaces, surtout pour les oies sédentaires car les animaux s’habituent vite.
Les mesures visant à favoriser les prédateurs naturels comme les renards sont controversées car ce sont également des prédateurs d’espèces limicoles dont la conservation est fragile. Mais le recours expérimental aux renards a donné des résultats intéressants dans certaines îles néerlandaises.
Certains interlocuteurs de votre rapporteur, comme l’institut scientifique néerlandais Alterra, ont par ailleurs relevé que les destructions sont inefficaces en raison de phénomènes de compensation (les couvées des autres couples sont plus nombreuses).
b. L’encadrement par des plans de gestion
Les méthodes décrites précédemment ne sont mises en œuvre que dans le cadre de plans de gestion ou de régulation, élaborés à un niveau national ou local.
• Plusieurs pays ont mis en place des plans de gestion :
– en Norvège, un plan national, adopté en 1996, préconisait que la gestion de la population des oies cendrées se fasse au plus près des réalités du terrain (et notamment des destructions de récolte) par des plans locaux. Le gouvernement norvégien privilégie donc le traitement local de la question, par le biais de plans locaux et considère que réduire cette marge de manœuvre locale pourrait avoir un impact négatif sur la population des oies cendrées. En 2014, le gouvernement a indiqué qu’il évaluerait l’impact des plans locaux et déciderait s’il convenait ou non de revenir à un traitement de la question au niveau national ;
– en Suède, l’agence pour la protection de l’environnement a émis à l’automne 2014 un plan national de gestion des oies cendrées, des grues et des cygnes. Ce plan encadre l’action des autorités locales sur les questions de prévention et de réparation des dommages. Des plans locaux ont également été rédigés ;
– dans un souci de prévention, les Pays-Bas, confrontés à d’importants problèmes de dégâts aux cultures, qui ont été multipliés par 7 entre les saisons 2003 et 2011, ont octroyé des licences pour autoriser la chasse tant pour les oies migratrices en hiver que pour les oies résidentes en été. Mais ces dérogations se sont révélées insuffisantes.
C’est pourquoi, l’idée d’un plan national de gestion a été étudiée au début des années 2010 et un projet a été élaboré en 2012 associant les douze provinces et les associations concernées pour réduire les nuisances causées par les oies en général : les principes de base étant d’interdire le tir sur les oies migratrices en hiver et de se focaliser sur les oies résidentes en été, et de limiter les effectifs par tout un panel de mesures dont certaines étaient déjà appliquées depuis la saison 2003-2004.
Ce projet national a échoué parce que la province de Frise a refusé de l’appliquer craignant qu’il ne soit pas efficace et parce qu’il concernait uniquement les oies cendrées. De plus, l’accord ne satisfaisait pas les chasseurs qui refusaient de n’effectuer des tirs que durant l’été. C’est pourquoi à partir de 2013-2014, la mise en œuvre des méthodes de régulation a été programmée au niveau de chaque province (voir partie III).
*
Dans l’ensemble, les techniques de régulation apparaissent brutales et pourraient heurter la sensibilité. Elles expliquent surtout les critiques des chasseurs de gibier d’eau qui ne comprennent pas l’ampleur des destructions dans certains pays et l’interdiction de la prolongation de la chasse pendant quelques jours dans d’autres pays. Les méthodes de régulation supposent d’être accompagnées par de la communication, car, d’une manière générale, il existe dans les pays du Nord de l’Europe un vif débat autour d’elles.
Votre rapporteur estime que les méthodes de destruction souffrent de deux défauts majeurs :
– d’une part, les captures ne font pas la différence entre les différentes espèces d’oies, voire entre les autres espèces d’oiseaux vivant dans les mêmes habitats et dont l’état de conservation peut se révéler fragile. Le statut des espèces peut être différent et, comme le tri n’est pas toujours effectué, les destructions ne sont pas sélectives (43) ;
– d’autre part, les mesures ne devraient concerner que les oies sédentaires mais il paraît bien difficile de s’assurer à quelle sous-population (sédentaire ou migratrice) les oies capturées appartiennent, alors même que cette distinction n’est pas pertinente, et que l’hybridation avec des oies domestiques est un phénomène attesté.
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En conclusion de cette deuxième partie, votre rapporteur souhaite souligner qu’il lui paraît essentiel de mieux connaître les prélèvements dus à la chasse dans la période où elle est autorisée, tant en France que dans les pays correspondant à l’axe majeur de migration, de la péninsule ibérique à la Scandinavie.
Proposition n° 3 : Effectuer des comptages plus fréquents et plus exhaustifs pour mieux évaluer les prélèvements cynégétiques en France.
Proposition n° 4 : Poursuivre les enquêtes auprès des autres pays européens afin de connaître les données sur les prélèvements et la mise en œuvre des plans de gestion de l’espèce.
III. LES TERMES DU DÉBAT ET LES PISTES DE RÉFLEXION
A. LE CONTEXTE ACTUEL : LES DIVERGENCES DES PROTAGONISTES
Les débats de la table ronde « chasse » de 2010 comme les réponses à la consultation publique, effectuée du 21 au 28 janvier 2014 sur le site internet du ministère chargé de l’écologie, exprimant des positions favorables ou hostiles au projet d’arrêté relatif à la chasse des trois espèces d’oies, ont souligné un certain nombre de sujets clivants entre, d’une part, les fédérations ou associations de chasseurs, d’autre part, les associations de protection de l’environnement, les scientifiques jouant un peu le rôle de « go between ».
Ayant constaté ces mêmes clivages lors des auditions qu’il a menées et au cours de son déplacement en Belgique et aux Pays-Bas, il est apparu intéressant à votre rapporteur d’examiner ces sujets sous forme de cinq interrogations présentant l’état du débat et permettant une meilleure recherche de solutions.
1. L’importance des dégâts causés aux cultures justifie-t-elle une régulation plus intense de l’espèce ?
a. Des dégâts de plus en plus importants
● Les terrains d’alimentation des Anatidés en général et des oies cendrées en particulier peuvent être divers : marécages, marais ou prairies faiblement inondées. En cas de surpopulation ou d’assèchement des zones humides ou de manque alimentaire lors des haltes migratoires, les animaux gagnent les terres agricoles alentour, soit pour glaner dans les chaumes de céréales, soit pour brouter sur les terrains cultivés et les prairies artificielles. Les oies cendrées peuvent alors attaquer certaines cultures maraîchères (champs de carottes, de navets, de pommes de terre ou de betteraves).
L’impact du broutage sur les récoltes futures ou sur les prairies est vécu négativement par les agriculteurs lorsque la fréquentation se poursuit en fin d’hiver, surtout dans la mesure où les animaux peuvent revenir plusieurs fois sur le même terrain. Mais la surpopulation peut également entraîner des dégâts sur le milieu naturel, soit directement en détruisant des zones naturelles fragiles, soit indirectement par concurrence entre espèces sur les mêmes habitats.
C’est ce qui explique que la plupart des organisations agricoles et les gestionnaires des zones naturelles humides soutiennent l’option d’une plus forte régulation de l’espèce.
● Les dégâts aux cultures sont particulièrement importants aux Pays-Bas où, rappelons-le, l’espèce n’est plus librement chassable et où la tendance à la sédentarisation se confirme : les effectifs d’oiseaux s’accroissent d’année en année et les dégâts se produisent tout au long de l’année, particulièrement au printemps et en été. Lors du déplacement aux Pays-Bas, il a été indiqué que certains agriculteurs néerlandais avaient été contraints d’abandonner les terres cultivées autour des zones de repos.
Il est donc évident qu’aux Pays-Bas, et dans une moindre mesure en Allemagne, en Suède (où les dégâts constatés du printemps à l’automne dans les champs de céréales deviennent importants) et depuis peu en Norvège, s’imposent des mesures de régulation de l’espèce. C’est ce qui explique la mise en œuvre de plans de régulation dans ces pays : en Norvège pour la période 2012-2020 ; aux Pays-Bas depuis 2013-2014.
b. Des indemnisations coûteuses
● Les dégâts aux cultures sont indemnisés dans certains pays européens, comme en Allemagne, en Suède ou en Belgique. La réglementation de l’Union européenne encadrant les aides de l’État dans les secteurs agraire et forestier autorise une compensation grâce à un financement national, à condition que les dégâts aient été causés par des animaux protégés par l’Union européenne ou sur la base du droit des États eux-mêmes.
En Flandre belge, les agriculteurs peuvent remplir un questionnaire aux fins de compensation par le gouvernement, à la condition de pouvoir prouver que les oies cendrées qui causent les dégâts se trouvent sur des terres possédées par le gouvernement. Une telle preuve est difficile à fournir.
En Allemagne, la décision de verser ou non, et jusqu’à quelle hauteur, des compensations financières aux dégâts causés aux agriculteurs revient aux seuls Länder. Ainsi, les agriculteurs peuvent recevoir des paiements compensatoires convenus préalablement s’ils mettent à disposition des terres agricoles servant d’aire de repos et de source de nourriture pour les oiseaux migrateurs.
En Suède, le montant des indemnités versées en 2015 aux agriculteurs s’élève à environ 1 million d’euros.
Aux Pays-Bas, le montant annuel des indemnisations directes versées aux agriculteurs par les provinces néerlandaises a atteint 12 millions d’euros en 2014, dont 9 millions pour la période hivernale et 3 millions pour la période estivale. Ce montant était de 9,2 millions d’euros en 2012 lorsque seul l’État procédait à des indemnisations (44). Les provinces craignent que ces montants n’augmentent considérablement au moment où les versements de l’État à partir du fonds national dédié Fauna found restent inférieurs aux versements à la charge des provinces.
Certains des interlocuteurs de la mission ont indiqué que, même si le recours au bénévolat est important, il conviendrait de multiplier par deux ces chiffres en incluant les mesures liées à la prévention et assumées sur le plan financier par les propriétaires fonciers, les associations privées ou l’État lorsqu’il possède les terres.
La procédure d’indemnisation est longue, complexe et soumise à conditions : les agriculteurs doivent avoir mené des mesures préventives (par exemple par effarouchement comme le montre la photographie suivante) et circuler sur les terres concernées au moins trois fois par semaine ; s’ils estiment leur perte à plus de 300 euros, ils introduisent une demande d’indemnisation ; un contrôleur se déplace pour évaluer les dégâts ou les pertes de récoltes à venir ; l’indemnisation n’est jamais complète et ne dépasse pas 95 %.
Une des plus grandes critiques apportées au système d’indemnisations est la part indirecte que l’Union européenne y prendrait. En effet, des aides européennes peuvent être accordées aux agriculteurs par le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) au titre de mesures de protection de la nature (« aires de repos pour les oiseaux migrateurs »). Ainsi, l’institut Alterra a indiqué que, pour 2007-2008 par exemple, près de 14 millions d’euros avaient été accordés aux agriculteurs néerlandais, dont la moitié pour la prise en charge de l’accueil des oies sur des terrains dédiés et la moitié au titre des indemnisations suite aux dégâts que ces oiseaux provoquaient (voir Annexe 3).
● En France, comme en Espagne, la situation est différente car ces dégâts aux cultures sont jusqu’à présent minimes. Quel que soit le sens accordé aux deux qualificatifs, sur le territoire national, l’espèce Anser anser ne peut être qualifiée, ni d’invasive, dont la propagation menacerait la biodiversité, ni de nuisible, comme pouvant porter atteinte à la santé et à la sécurité publiques, à la protection de la flore et de la faune ou aux activités agricoles.
De toute façon, les dégâts aux cultures et aux récoltes agricoles ne pourraient pas être indemnisés car seuls les dégâts causés par les grands gibiers sont indemnisés (45), à hauteur de 45 millions d’euros par an.
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Il y a donc un débat « croisé » et une recherche d’équilibre entre les objectifs liés à la chasse, à la préservation de la biodiversité et à la gestion des espaces naturels humides et forestiers.
Mais la mission s’est demandé si la première manière de lutter contre la prolifération des oies cendrées dans certains pays et de limiter les dégâts causés et les risques sur la santé humaine ou le transport aérien n’était pas tout simplement de réduire les capacités d’accueil voire les zones d’alimentation offertes à celles-ci durant la saison hivernale, surtout si l’espèce n’est aucunement en voie d’extinction. Sans doute peut-on y noter aussi une contradiction voire une incohérence dans l’application des directives « Oiseaux » et « Habitats » !
TECHNIQUES D’EFFAROUCHEMENT
2. Un accroissement des prélèvements en Espagne et en France permettrait-il une meilleure régulation de l’espèce dans d’autres pays ?
● Compte tenu de l’origine des oies en transit ou en hivernage dans notre pays, la question se pose de savoir si un prélèvement cynégétique accru en France diminuerait les dégâts agricoles occasionnés aux Pays-Bas ou en Norvège.
Compte tenu du fait qu’il est estimé que seuls 5 % des oies cendrées nichant aux Pays-Bas sont des migratrices transitant par la France, les associations de protection de l’environnement (la LPO et la FNE en France, l’association de protection des oiseaux Vogelbescherming aux Pays-Bas) ont estimé cette hypothèse peu probable.
Le coordinateur néerlandais du programme de marquage des oies cendrées, Berend Voslamber, avait déjà expliqué lors de la mission conduite par notre ancien collègue député Jérôme Bignon, au printemps 2009, que les oiseaux transitant par les régions Ouest de notre pays n’étaient pas impliqués de manière significative dans ces dommages aux cultures.
● Il est vrai que jusqu’à présent, les Pays-Bas n’ont jamais demandé aux chasseurs espagnols ou français de les aider à réguler les populations en prélevant davantage d’individus sur leur territoire. Ce sont bien les autorités néerlandaises qui cherchent à mettre en place des prélèvements accrus dans leur pays. Pour éviter une trop grande concentration d’oies cendrées aux Pays-Bas, il conviendrait en revanche d’amplifier les efforts de prélèvements en Norvège et au Danemark. C’est ce qui explique l’évolution de ces deux pays au regard des prélèvements cynégétiques, d’une part, de la réflexion autour d’un plan de gestion de l’espèce, d’autre part (comme il a été indiqué en partie B).
À la fin des années 2000, certains chercheurs considéraient que l’aggravation de la pression cynégétique risquait d’affecter directement les effectifs d’oies nichant en Norvège, qui migraient en faisant halte aux Pays-Bas et dont la progression avait atteint un palier. La reprise de la croissance des effectifs en Norvège depuis quelques années a mis fin à cette hypothèse et pourrait, de ce fait, justifier un prélèvement cynégétique en France.
● Beaucoup d’interlocuteurs ont rappelé lors de leurs auditions que le prélèvement cynégétique en France atteignait environ 1 500 individus au cours de la première décade de février, lorsque la chasse était légale à cette période. On peut alors supposer que prolonger la période de chasse de huit à dix jours en France ne suffirait pas à régler le problème de la trop forte population aux Pays-Bas car seulement un à deux milliers d’individus supplémentaires seraient prélevés durant cette période, mais pourrait participer à réguler l’inflation de population qui se dessine en Norvège.
Mais la fédération européenne des associations de chasse et conservation (FACE) et la fédération royale des chasseurs aux Pays-Bas ont fait valoir que les mesures de destruction concernaient à présent toutes les provinces néerlandaises et toute l’année, et qu’il était impossible, par exemple en mars ou en avril, de sérier si une oie appartenait au groupe sédentaire, au groupe des migrants venus de Scandinavie et ayant hiverné sur place, ou à un groupe d’oiseaux migrateurs remontant du sud et faisant halte, les mesures de régulation ne faisant guère la différence entre les groupes. De leur point de vue, augmenter même marginalement le prélèvement cynégétique en France pourrait contribuer à réduire le stock d’oiseaux présents aux Pays-Bas au début du printemps. Un tel argument mériterait d’être repris dans les négociations avec la Commission européenne ou dans le cadre de l’élaboration d’un plan de gestion européen.
3. Dans quelles conditions le gazage ou la destruction massive des oies cendrées sont-ils autorisés sur le territoire des Pays-Bas ?
a. L’encadrement par les plans de gestion ou de régulation
● Comme votre rapporteur l’a indiqué en partie II, dans le cadre de la décentralisation et de la compétence « chasse » dévolue aux provinces, il est revenu à chaque province d’élaborer un plan de gestion avec les parties prenantes en cherchant à respecter les clauses générales du plan national abandonné. L’objectif était de revenir – au bout d’un délai de cinq ans – au niveau des dégâts agricoles en 2005 pendant la saison d’été (de février à novembre), correspondant à un effectif de 150 000 oies (dont 100 000 oies cendrées et 50 000 bernaches) pour la fédération syndicale agricole LTO Nederland (46) ou à un effectif de 200 000 à 250 000 oies selon les responsables de la chasse et de la faune sauvage du ministère des affaires économiques, en charge de l’agriculture et de la nature.
Les plans, mis en œuvre par les unités provinciales de la gestion de la faune, sont basés sur des études menées chaque année par l’institut Sovon et comprennent des quotas de destruction d’œufs et d’oiseaux, selon les périodes. Votre rapporteur ne reviendra pas sur les méthodes de prélèvements et de régulation employées (47), sauf en ce qui concerne le gazage.
La conséquence directe est qu’il n’y a plus une seule approche – les plans diffèrent au niveau des quotas de destruction, des périodes autorisant les chasses sous dérogation, des méthodes de destruction utilisées etc. –, et que n’existe aucune coordination au niveau fédéral ni de coopération entre les autorités provinciales. Ainsi la Frise autorise les prélèvements cynégétiques tout au long de l’année y compris durant l’hiver alors que la Zélande voire les provinces voisines de la Frise assurent une protection renforcée des oies durant l’hiver, arguant de la présence d’oiseaux migrateurs, et n’autorisent les tirs qu’en été. Lorsqu’on connaît les dimensions des régions néerlandaises et la volatilité de certains groupes d’oies, on ne peut que s’interroger sur la cohérence de dispositifs disparates, qui ne fait l’objet d’aucune remarque ou évaluation de la part de la Commission européenne.
● Le cas particulier de l’aéroport de Schiphol a fait l’objet d’un plan spécifique élaboré par les autorités en charge de la sécurité aérienne, en concertation avec les compagnies aériennes, les pilotes, les agriculteurs, les associations environnementales, les gestionnaires de zones humides, le ministère de la défense (pour les aéroports militaires également touchés par le phénomène) et la province de Hollande du Nord, territorialement compétente. Les premiers incidents se sont en effet produits dès 2000 et ils s’accroissent, plusieurs cas d’atterrissage d’urgence ont eu lieu depuis 2010, les vols d’oies traversant les pistes.
Ce plan comporte plusieurs volets :
– la régulation du nombre d’oies dans le périmètre de 7 km puis de 20 km (avec des techniques d’effarouchement particulières comme les canons pyrotechniques, les rayons laser ou la diffusion de cris d’angoisse de l’espèce…) ;
– la réduction de l’offre alimentaire avec l’incitation à produire d’autres cultures ou l’obligation pour les agriculteurs de retourner les terres dans un délai de 48 heures après les récoltes pour éviter que les oiseaux ne viennent glaner (des compensations sont alors versées) ;
– la détection précoce des groupes d’oies, en particulier au moyen de radars dédiés, afin de prévenir les situations qui pourraient devenir dangereuses ;
– l’aménagement du territoire et la gestion de l’eau. En effet, dans un rayon de 7 km puis dans une bande large de 13 km, se trouvent des terrains de golf, des zones de production de bulbes, des dunes littorales, des marécages voire les canaux de la ville d’Amsterdam qui constituent autant d’aires idéales pour la reproduction.
Jusqu’à présent, c’est l’État néerlandais qui prend complètement en charge ces mesures ; mais il envisage d’obliger l’aéroport de Schiphol et les compagnies aériennes, au premier rang desquelles KLM, à participer à leur financement, ce qu’elles refusent jusqu’à présent.
Si la réglementation néerlandaise a autorisé le gazage des oies au dioxyde de carbone au motif de dégâts agricoles, ce procédé n’a plus été utilisé depuis 2009 sous la pression de l’opinion publique qui avait déjà conduit à prohiber la chasse. Officiellement, jusqu’en 2013 ou 2014, la seule exception concernait l’aéroport international de Schiphol pour des raisons évidentes de sécurité aérienne et uniquement de juin à août : sur un total d’environ 50 000 oies sédentaires (toutes espèces confondues) dans un rayon de 20 km autour de l’aéroport, le prélèvement, variable selon les années, a été estimé à environ 8 000 oiseaux durant l’été 2011 et 10 000 durant l’été 2013.
Mais il semble bien que plusieurs provinces y aient recours depuis cette année. À la demande du gouvernement néerlandais, la Commission européenne a donc autorisé les provinces à recourir à la technique du gazage par « biocide » en dehors de l’aire qui était initialement circonscrite au périmètre de 20 km autour de l’aéroport de Schiphol. Pendant l’été dernier, les provinces de Frise, de Nord et de Sud Hollande et de Gelderland ont utilisé cette technique du gazage pour éliminer des dizaines de milliers d’animaux.
Les responsables de la sécurité aérienne ont indiqué que d’autres aéroports néerlandais étaient maintenant concernés par la prolifération des oies et des canards – et en particulier les aérodromes militaires –, qu’ils résolvaient jusqu’à présent leurs difficultés en ayant recours à des tirs de chasse sur les pistes mais qu’ils envisageaient la mise en œuvre de plans similaires à celui de Schiphol.
Il est à signaler qu’au départ, une seule entreprise procédait au gazage des oies autour de l’aéroport de Schiphol à l’aide d’un camion incorporant une chambre à CO2. Avec un tel système, environ 7 000 animaux peuvent être gazés chaque semaine. On estime qu’au cours des dernières années près de 50 000 à 60 000 oies cendrées ont été éliminées par ce procédé très décrié. Les représentants de l’unité provinciale de Zélande ont évoqué le recours à une entreprise flamande de capture de rats musqués (RATO VZW) qui se reconvertit dans la capture des oies et dispose des installations nécessaires.
● Contrairement à ce qui est souvent affirmé, les oies gazées ne sont pas systématiquement détruites et il existe une filière dans l’alimentation humaine car ces oies ne sont pas jugées impropres à la consommation. Il a été précisé à votre rapporteur qu’un seul centre vétérinaire délivre les autorisations, et que, si le ministère chargé des questions agricoles indique que les oies sont données aux banques alimentaires, la fédération royale des chasseurs et d’autres intervenants soulignent que l’industrie alimentaire utilise la chair pour faire de la charcuterie appréciée (le coût unitaire d’une oie gazée ne serait que de 50 centimes d’euros).
4. La notion même de migration ne peut-elle pas être remise en cause ?
Le débat sur les dates d’ouverture et de fermeture de la chasse est évidemment lié à la notion même de migration.
● Au sens du guide sur la chasse durable en application de la directive « Oiseaux », il y a une aire où les oies hivernent et une aire où elles se reproduisent : du moment qu’elles partent des zones d’hivernage vers les lieux de nidification (ou l’inverse), il n’y a aucun doute qu’il s’agit d’un mouvement migratoire.
Mais les déplacements hivernaux des oiseaux migrateurs sont souvent complexes et le fait qu’ils quittent les zones d’hivernage ne signifie pas forcément qu’ils commencent la migration de retour. Des déplacements sont constatés qui correspondent davantage à la recherche de zones d’alimentation qu’à la reprise de la migration prénuptiale : la difficulté réside donc dans le fait de différencier ces « délocalisations » durant l’hivernage – qui peuvent être qualifiées d’errements – avec des déplacements prénuptiaux, surtout lorsque des migrateurs et des sédentaires de la même espèce séjournent ensemble.
La plupart des scientifiques s’accordent sur le fait qu’il est nécessaire de bien qualifier le phénomène de « migration » pour lequel trois critères sont souvent avancés : la direction et l’altitude des vols, ainsi que la distance parcourue d’un seul trait.
Selon les critères retenus par l’ONCFS ou le Museum national d’histoire naturelle, lorsqu’il y a beaucoup d’oies qui partent vers le nord / nord-est à la fin de l’hiver ou vers le sud / sud-ouest à la fin de l’été et en automne, alors il y a migration, même si elles font des haltes sur le trajet pour se nourrir ou se reposer.
Tous les scientifiques ne retiennent pas un critère identique de distance : certains évoquent des distances de 150 voire 200 kilomètres pour qualifier un mouvement migratoire ; d’autres estiment qu’un court déplacement de quelques kilomètres, s’il est clairement orienté vers le nord / nord-est, est toujours signe de migration prénuptiale.
Mais la mission s’est aussi intéressée à deux autres données : le début de la migration prénuptiale et sa durée. En effet, tous les individus d’une même espèce ne terminent pas leur période d’hivernage au même moment : des précurseurs peuvent quitter tôt les aires d’hivernage et les ornithologues définissent bien des pics de migration comme c’est le cas pour les oies cendrées. De plus, la durée de la période de migration est fonction de nombreuses variables, comme l’étendue des pays traversés, la disponibilité des aires de repos sur le trajet, l’importance des populations migrant etc.
C’est pourquoi, en application de l’article 7 paragraphe 4 de la directive « Oiseaux » et s’appuyant sur les données scientifiques recueillies au niveau national, la Commission européenne publie un document « rapport d’analyse des concepts-clés » qui retrace, pour chaque espèce de l’annexe II, la qualité de migratrice ou de sédentaire, la définition de la période de reproduction (48), la période de reproduction (49), les difficultés dans l’identification de la période de migration prénuptiale, la période de migration prénuptiale (50).
Les données des périodes de reproduction et de migration étant présentées par décade, le niveau de précision est donc de dix jours et un chevauchement d’une décade (pouvant aller de 1 à 9 jours) entre la date de fermeture de la chasse et le début de la période de migration prénuptiale est possible : la Commission européenne autorise une certaine flexibilité, sous réserve, comme votre rapporteur l’a indiqué, de respecter les dispositions de l’article 7 de la directive sur la protection complète de l’espèce concernée.
● Votre rapporteur a constaté que, pour certains de ses interlocuteurs, les sources mêmes de données scientifiques constituaient débat. Ainsi, l’ISNEA (Institut scientifique Nord-Est atlantique) souligne les divergences sur les dates de migration entre les données issues des contrôles visuels et celles issues des suivis individuels d’oies équipées de balises GPS. Pour l’ISNEA, qui s’appuie sur le balisage de 16 oiseaux, qui a été effectué sur quatre années, la technique des balises permet de suivre de manière continue le positionnement des oiseaux équipés et d’établir précisément l’histoire de leurs déplacements ; toutes les observations d’oies en vol ne peuvent donc pas être considérées comme des vols migratoires vers les zones de reproduction. C’est pourquoi l’ISNEA – comme de nombreuses associations de chasseurs – conteste sur ce point les conclusions du rapport de l’ONCFS de novembre 2014, les oies baguées ayant toutes entamé leur migration après le 11 février.
Pour sa part, l’ONCFS constate qu’il n’y a aucune ambiguïté entre les relevés précédents sur les dates de migration et le suivi des oies par balisage ces dernières années. Même si le nombre des balises est faible, les résultats sont cohérents avec les données préexistantes, à savoir que le pic de migration se produit dans la deuxième décade de février en France. Il n’est donc pas anormal que les relevés par balise aient montré des départs d’Espagne à partir du 10 ou 11 février lors des années d’études.
Au contraire, le balisage a apporté des réponses à des questions résiduelles et montré par exemple un parcours de retour à travers le Golfe de Gascogne et non plus seulement à travers les cols pyrénéens.
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Remettre en cause les données scientifiques, en particulier sur des faits précis, ne mène à rien. Émettre des doutes sur les conclusions qui en sont tirées ne doit pas faire l’objet d’anathèmes mais servir de base à de nouvelles approches.
Ainsi, il est avéré que le pic de migration prénuptiale des oies cendrées a bien lieu durant la deuxième décade de février : tout le confirme. Le débat porte sur la caractérisation de certains vols durant la dernière décade de janvier.
5. L’instauration d’une dérogation pour allonger la période de chasse est-elle compatible avec les normes européennes ?
a. La mise en place de dérogations au titre de la directive
Les dérogations sont des exceptions qui apportent une certaine flexibilité à l’application d’une réglementation. Les possibilités de recours aux dérogations sont limitées et doivent être justifiées par rapport aux objectifs généraux de la directive « Oiseaux » et conformes aux conditions spécifiques décrites à son article 9. Ces conditions sont strictes et restreignent considérablement la possibilité d’utilisation, d’autant plus que la mise en œuvre est encadrée tant par la Commission européenne que par la Cour de Justice de l’Union européenne (voir supra).
● Le recours à une dérogation dans les conditions prévues par l’article 9 de la directive « Oiseaux » est présenté comme une solution de court terme par les fédérations et associations de chasseurs afin de prolonger et d’harmoniser les périodes de chasse en février. Selon celles-ci, une dérogation serait juridiquement conforme non seulement à la directive [article 9 : « les États membres peuvent déroger aux articles 5 et 8 s’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante pour les motifs ci-après (…)], mais aussi à plusieurs arrêts de la CJUE et au guide sur la chasse durable en application de la directive (51), publié par la Commission européenne.
Selon les associations, la demande :
– porte sur l’allongement de la période de chasse, de dix jours pour la FNC à vingt jours pour les associations de Sauvaginiers,
– et s’appuie sur des paragraphes différents de l’article 9 de la directive, le 1 a) pour la FNC ou le 1 c) pour l’Union nationale des associations de chasseurs des oiseaux migrateurs (UNACOM).
La complexité de la situation actuelle du point de vue des dates d’ouverture et de fermeture de la chasse, lesquelles diffèrent selon les espèces d’oies, justifierait la mise en place d’une harmonisation. Comme les autres espèces d’oies (oie des moussons et oie rieuse) ne migrent pas avant la mi-février, elles peuvent être chassées jusqu’au 10 février, tandis que les oies cendrées ne peuvent être chassées que jusqu’au 31 janvier. En demandant le recul de la date limite au-delà du 31 janvier, les fédérations de chasseurs mettent en avant l’harmonisation des périodes d’ouverture de la chasse aux oies.
La nouvelle demande des fédérations de chasseurs en 2015 porte spécifiquement sur la possibilité de dérogation offerte en application de l'article 9 paragraphe 1 c) de la directive européenne. La question est donc posée de savoir si cette proposition répond aux critères nécessaires pour l'octroi d'une telle dérogation.
Trois conditions cumulatives sont posées et rappelées dans le guide sur la chasse durable en application de la directive : 1/ qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante ; 2/ que soit faite la preuve d’un des motifs énoncés à l’article 9, paragraphe 1, points a), b) et c) ; 3/ que soient satisfaits des critères de forme. La jurisprudence de la CJUE, en dégageant un critère de proportionnalité à l’objectif de conservation des espèces poursuivi par la directive, a durci les conditions d’octroi d’une dérogation.
● Le ministère chargé de l’écologie souligne que les pistes liées à tout type de dérogation dans le cadre juridique actuel ont largement été explorées dans les années passées et ont donné lieu à l’important contentieux historique que votre rapporteur a rappelé. Les travaux de l’ONCFS et du GEOC n’ont d’ailleurs que confirmé les juridictions nationales dans les décisions qu’elles avaient prises. La question reste posée de savoir quel serait le support d’une dérogation possible dans le cadre de la réglementation actuelle et compte tenu des données scientifiques.
Une piste envisageable serait de s’inspirer de la réglementation mise en place à Malte à la suite de sa condamnation par la CJUE pour non-respect du critère de proportionnalité dans l’octroi d’une dérogation aux chasseurs. En instaurant un système de quota de prélèvements par période d’ouverture de la chasse, Malte s’est conformée aux conditions imposées par la directive. L’instauration d’un suivi des prélèvements effectués par les chasseurs, lequel repose sur une confiance dans l’échange d’information, a été également un des critères d’acceptation de la dérogation par la Commission européenne.
b. La position actuelle de la Commission européenne
● Par lettre du 30 janvier 2015, la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie a sollicité le Commissaire européen Karmenu Vella sur :
– d’une part, la possible utilisation de la dérogation prévue par l’article 9 paragraphe 1 c) afin de prolonger la chasse aux trois espèces d’oies concernées, si le prélèvement d’oies cendrées était strictement limité à un petit nombre de spécimens, ce qui n’aurait aucun impact sur la dynamique de l’espèce ;
– d’autre part, sur l'évolution possible de la question de la date de fermeture de la chasse aux oies dans le cadre de la directive, pour tenir compte de la forte dynamique de cette espèce qui cause notamment de sérieuses perturbations dans certains États-membres (Pays-Bas, Belgique et récemment Norvège).
La réponse du Commissaire européen, en date du 13 mars dernier, a été transmise à la Fédération nationale des chasseurs (FNC). Rappelée dans les réponses du ministère aux questions écrites des députés (52), cette position rejoint les propos qui ont été tenus à votre rapporteur lors de sa rencontre avec les services de la Commission européenne ; ceux-ci considèrent en effet que :
– le régime dérogatoire est d’interprétation stricte et il revient aux États, pour sa mise en œuvre, d’établir que les conditions de son application sont remplies ;
– la première condition à remplir pour accéder au régime dérogatoire est l’absence « d’autre solution satisfaisante » ;
– la France ne satisfait pas cette condition puisque les espèces d’oies visées sont effectivement présentes sur le territoire national durant la période légale de chasse, du 21 août au 31 janvier, et que les quantités prélevées sont loin d’être négligeables.
Les services de la Commission rappellent également que le guide sur la chasse durable en application de la directive « Oiseaux », reprenant la décision de la CJCE, souligne que cette condition « ne saurait être remplie lorsque la période de chasse ouverte à titre dérogatoire coïncide sans nécessité avec les périodes où la directive vise à établir une protection particulière », c’est-à-dire lors des migrations. Le guide ajoute qu’une « telle nécessité ferait défaut notamment si la mesure autorisant la chasse à titre dérogatoire avait pour seul objet de prolonger les périodes de chasse de certaines espèces d’oiseaux sur les territoires déjà fréquentés par ces dernières pendant les périodes de chasse fixées conformément à l’article 7 de la directive », c’est-à-dire du 21 août au 31 janvier en France.
L’analyse actuelle de la Commission, qui se réfère au rapport de l’ONCFS, ne permet donc pas d’envisager une telle dérogation en vue de prolonger les dates de chasse au-delà du 31 janvier.
Par « boutade » ou par « provocation », les services de la Commission européenne ont même indiqué à votre rapporteur que, si les derniers travaux de l’ONCFS n’avaient pas été disponibles, il aurait pu être envisagé d’accorder à la France une dérogation au titre de l’article 7 de la directive…
B. LES DÉMARCHES EXAMINÉES EN FRANCE
Afin de trouver une solution au dilemme actuel, et puisque le recours aux dérogations prévues par la directive « Oiseaux » ne semble pas possible dans les conditions actuelles, au moins tant que le dialogue avec la Commission européenne n’est pas repris ou achevé, deux démarches sont actuellement examinées en France pour adapter le cadre de la chasse aux oies cendrées : la mise en place d’un plan de gestion et l’amélioration des conditions d’hivernage des oies cendrées.
1. La mise en place d’un plan de gestion de l’espèce
Tant le Gouvernement que certaines associations de défense de l’environnement ou les fédérations de chasseurs semblent désormais favorables à l’adoption et à la mise en œuvre d’un plan de gestion des oies cendrées, au niveau national et international, afin de développer une logique de long terme dans le prélèvement de ces oiseaux.
a. L’intérêt et la faisabilité d’un plan de gestion
L’hypothèse retenue est celle d’un plan international qui serait décliné au niveau national.
• Piste privilégiée : le plan d’action et de gestion
Depuis quelques années, l’AEWA (Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie) réfléchit à une gestion de l’espèce Anser anser sur l’ensemble de son aire de migration. Pour réussir à faire évoluer le cadre de conservation de l’espèce, il est en effet plus pertinent de travailler à l’échelle de l’aire de répartition. L’AEWA présente, en outre, la caractéristique d’être un cadre où les chasseurs et les observateurs se rejoignent sur les principaux enjeux de conservation durable des espèces chassables.
L’Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique - Eurasie promeut deux objectifs :
– principalement, le maintien et la sauvegarde des oiseaux d’eau au statut de conservation défavorable. À ce titre, un plan d’action de sauvegarde des oies naines (Anser erythropus) a été établi en 2008 (53) ;
– mais également, des dispositifs de gestion des espèces abondantes qui causent des dommages significatifs aux activités humaines (dommages significatifs à l’agriculture et à la pêche). Les récents documents de l’AEWA à l’occasion de la dixième réunion du Comité permanent (54), notamment « les critères de sélection des populations prioritaires pour l’élaboration de plans d’action et de gestion », confirment cette approche et ouvrent la voie à des plans concernant des espèces en bon état de conservation.
Ainsi, à la demande des gouvernements danois et norvégien, un plan d’action et de gestion pour la population de l’oie à bec court (Anser brachyrhynchus) a été adopté en 2012 à la suite d’un groupe de travail international constitué en 2010.
Plan de gestion de l’AEWA pour la population de l’Oie à bec court (2012)
L’Oie à bec court (Anser brachyrhynchus) est classée comme espèce en état de conservation favorable en Europe, figurant dans la catégorie « préoccupation mineure » (LC) sur la liste rouge de l’IUCN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature). Or, sa présence sur certains territoires entre en conflit avec des intérêts agricoles ou piscicoles, engendrant d’importants coûts économiques ainsi qu’une dégradation de la végétation locale, en particulier de la toundra à Svalbard, archipel en Norvège.
La cinquième conférence des parties a mis en place un plan de gestion pour la population de l’Oie à bec court lequel est le premier dans son genre dans le cadre de l’AEWA. Il consiste à mettre en œuvre une stratégie de chasse durable pour maintenir l’état de conservation de l’espèce tout en tenant compte d’intérêts économiques et professionnels. Révisé tous les 10 ans (soit en 2022), il donne lieu à la publication d’un rapport annuel sur l’état de conservation de la population, laquelle doit être maintenue aux alentours de 60 000 individus. Le plan se décline en 8 actions clés pour atteindre les objectifs fixés.
En conséquence, la durée de la période de chasse a été élargie d’un mois mais l’effectif cible n’a pas été atteint.
Bien que la Commission européenne n’ait pas le même regard, le travail effectué par l’AEWA est reçu positivement par les instances européennes car les travaux qui y sont menés ont toute garantie de sérieux et de validité, et l’AEWA peut se prévaloir d’une expérience de plus de vingt ans.
L’influence de la France dans le cadre de l’AEWA est assez forte car notre pays a toujours soutenu cet accord, à la fois financièrement et éthiquement, et il a encouragé la collaboration avec les pays africains pour des échanges sur la restauration des habitats naturels en Europe et en Afrique.
• Avantages d’un plan d’action et de gestion
Selon l’organisation scientifique Oiseaux Migrateurs du Paléarctique Occidental (OMPO), la directive « Oiseaux » n’est plus adaptée aux réalités biologiques actuelles du fait notamment de l’absence d’outil de gestion. La directive européenne n’admet qu’une dérogation au cadre juridique de prélèvement des espèces chassables : une telle dérogation n’est pas un mécanisme de gestion des espèces en accroissement sur la voie de migration mais constitue seulement une solution de court terme dans l’attente d’un plan de gestion à l’échelle européenne.
Oiseaux Migrateurs du Paléarctique Occidental (OMPO)
L’OMPO est un institut scientifique européen dont la compétence recouvre la zone paléarctique en tant que région biogéographique. Il s’intéresse à la fois aux oiseaux d’eau et aux grives, pigeons etc. qu’on retrouve davantage dans le sud de l’Europe.
Son objet est de réaliser en propre des études scientifiques ou d’encourager de telles études pour mieux fonder les décisions publiques en matière d’espèces migratrices. Il promeut deux approches : participer à la lutte contre l’érosion de la biodiversité en se focalisant sur les espèces menacées ; assurer une gestion durable des espèces chassables le long de leur voie de migration.
Couvrant l’ensemble de la zone de migration, il se focalise essentiellement sur les pays d’Afrique de l’Ouest où se situent les principales zones d’hivernage et sur les pays d’Europe de l’Est et la Russie où il devient un interlocuteur.
L’approche scientifique s’effectue à trois niveaux : la description par le recueil de données en réseaux ; la compréhension des mécanismes qui gouvernent la distribution des espèces, leur occupation de l’espace et leur dynamique ; la prédiction et la modélisation.
Compte tenu de l’état de la population d’oies cendrées, l’espèce peut être considérée comme prioritaire pour un tel plan de gestion.
Dans l’aire de l’AEWA, d’autres pays européens, où se constate une convergence de vues, sont motivés par une gestion de l’espèce à grande échelle, notamment les pays nordiques. L’adoption d’un plan de gestion spécifique à l’oie cendrée concernerait une dizaine de pays et intéresserait surtout la Norvège (55), la Suède et les Pays-Bas qui éprouvent des difficultés à gérer les oies sédentaires sur leurs territoires. Le Norwegian Institute for Nature research a indiqué que la population des oies cendrées devait être appréhendée au niveau européen tant une mesure nationale peut avoir un impact sur un autre État.
Certains pays se sont exprimés en faveur d’un plan plurispécifique qui intégrerait d’autres espèces notamment la bernache nonnette et l’oie rieuse. La question qui se pose est celle d’un plan de gestion spécifique à l’oie cendrée ou d’un plan de gestion global pour toutes les espèces d’oies générant des difficultés similaires. Selon le ministère chargé de l’écologie, il vaudrait mieux adopter une approche globale : un plan de gestion couvrant trois espèces d’oies concernerait alors une vingtaine de pays, ce qui représente un maximum pour que l’accord soit efficace.
b. Les critiques ou les réserves à l’égard d’un plan de gestion
Plusieurs critiques d’ordre général sont apportées au plan de gestion :
• Les délais
Il faudrait compter au minimum deux ans pour établir au niveau européen un tel plan, qui nécessite des études d’évaluation scientifique (cette phase de recueil des données est en partie déjà réalisée à ce jour) et de modélisation sur 5 ans voire plus, et qui repose sur une véritable négociation internationale avec les différents pays concernés. Il est certain que des négociations précipitées risqueraient de mener à l’échec mais l’immobilisme ne constitue pas une solution.
• L’articulation avec les normes européennes
L’articulation entre un plan d’action et de gestion comme annexe au traité de l’AEWA et la directive européenne sur la conservation des oiseaux sauvages soulève des interrogations.
Bien que les plans internationaux ne soient pas directement contraignants, les États signataires sont soumis à l’obligation de coopérer et de déployer tous leurs efforts en vue de la mise en œuvre de ces plans. Si l’OMPO estime qu’un plan de gestion a valeur contraignante et s’imposerait à la directive européenne, les associations françaises de défense de l’environnement – comme la FNE, la LPO ou Humanité et diversité – sont d’un avis contraire. Les critiques les plus vives viennent de la LPO en raison d’une confusion possible dans le rôle de l’AEWA qui ne devrait s’intéresser qu’aux espèces menacées, au risque de se retirer des discussions autour du plan de gestion.
Il est d’ailleurs étonnant de constater que l’association néerlandaise de protection des oiseaux Vogelbescherming s’aligne sur la position de la LPO, alors que ces deux associations représentent dans leur pays BirdLife International, qui se montre plutôt partie prenante à un accord AEWA…
Il est certain que tout plan de gestion élaboré dans le cadre de l’AEWA devra être discuté dans le cadre de l’Union européenne, ne serait-ce que pour les pays signataires de l’accord et membres de l’Union européenne. Actuellement, la Commission européenne n’a pas manifesté son désaccord préalable à l’égard d’un plan de gestion sur les oies ni refusé de participation à son élaboration. Si cela s’avérait, cela ne compromettrait pas pour autant la poursuite de l'élaboration du plan sous l'égide de l'AEWA, avec l'ensemble des pays intéressés.
La réserve de la Commission européenne viendrait de la certitude qu’un plan de gestion devrait être conforme à la directive « Oiseaux » et que les conditions ne seraient pas réunies pour autoriser davantage de prélèvements d’oies cendrées ni pour assouplir les règles de conservation des oiseaux sauvages.
Dans le même sens, certains pays comme la Belgique considèrent qu’un plan de gestion prévoyant davantage de chasse pouvait être contraire aux objectifs des directives « Oiseaux » et « Habitats », car il conduirait à déranger la faune en situation précaire, par exemple d'autres espèces protégées et parfois fragiles vivant dans le même habitat, et a fortiori durant la saison des migrations.
• Les difficultés d’application au plan national
Au cours de leur audition, l’ISNEA et l’UNACOM ne sont pas montrés favorables au plan de gestion car ils estiment qu’il n’implique pas forcément une prolongation des dates de chasse mais qu’il conduit à donner à chaque État des quotas à prélever : non seulement, un tel système fait passer de la chasse à la régulation ; mais se pose alors la question de la répartition des bagues entre les chasseurs.
Les services de la Commission européenne considèrent de manière générale qu’un tel plan ne constituera pas une solution satisfaisante dans le cas de la France.
c. Les modalités d’un plan de gestion
• Élaboration du plan de gestion et échéance
La ministre chargée de l’écologie a demandé, le 19 novembre 2014, à l'Accord sur la conservation des oiseaux d'eau migrateurs d'Afrique-Eurasie (AEWA) de se saisir de ce sujet pour la mise en œuvre d'un plan de gestion international de l'oie cendrée avec l'ensemble des États intéressés, en vue d’une meilleure gestion d’une espèce en bon état de conservation, et à l’échelle de sa voie de migration.
Afin d’échanger sur l’opportunité de mettre en place un tel plan, une réunion préparatoire a été organisée au ministère, le 27 janvier 2015, avec la Fédération européenne des associations de chasse et des conservatoires de la faune sauvage (FACE), l'organisation scientifique Oiseaux Migrateurs du Paléarctique Occidental (OMPO), l'AEWA, la FNC, l'ONCFS, la FNE, la LPO et la Fondation Sommer.
La première réunion du comité technique de l’AEWA, qui s’est tenue du 3 au 6 mars 2015, pour interroger les parties sur leur intérêt pour un tel plan de gestion, est très encourageante selon le ministère chargé de l’écologie.
Lors de la dixième réunion du Comité permanent de l'AEWA, du 8 au 10 juillet dernier, à Kampala en Ouganda, a été examiné un projet de résolution sur l’adoption et la mise en œuvre de plans internationaux d’action et de gestion mono ou plurispécifiques : le projet de plan de gestion multi-espèces « Oies » concernant en particulier l’Oie cendrée (mais aussi la Bernache nonnette et l'Oie rieuse) a été présenté par le directeur technique de l’AEWA. La représentante des Pays-Bas a déclaré au comité permanent de l'AEWA que son pays soutiendrait ce plan de gestion multi-espèces.
La proposition de développer ce plan sera faite aux parties lors de la 6e réunion des parties (MOP6), qui se déroulera du 9 au 14 novembre, à Bonn.
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Les travaux actuellement en cours ouvrent donc des perspectives. Se pose la question du financement pour l’élaboration du plan dans la mesure où les règles de l’AEWA veulent que ce financement soit assumé par le pays demandeur du plan. Le coût annuel compris entre 60 000 et 100 000 euros ferait l’objet de diverses contributions (MEDDE, FNC, etc.).
Une fois que le plan sera établi, différentes mesures de gestion détaillées seront prises. L’AEWA se tournera vers un opérateur pour gérer le plan d’action au niveau national. Les ministères chargés de l’écologie et de l’agriculture ont proposé que l’OMPO soit l’opérateur du plan pour la France, ce que toutes les parties prenantes ont accepté.
Proposition n° 5 : Soutenir la démarche du Gouvernement pour l’élaboration d’un plan d’action et de gestion de l’espèce au niveau de l’AEWA et pour sa mise en œuvre au niveau national.
2. L’amélioration des conditions d’hivernage
● Comme l’ont admis tous les interlocuteurs de la mission et bien qu’il ait augmenté, l’effectif des oies cendrées hivernant en France semble atteindre un palier autour de 20 000 individus. Une des pistes qui pourrait être retenue afin que cet effectif croisse de nouveau serait de favoriser les conditions d’hivernage sur notre territoire. L’exemple d’autres pays européens, comme l’Allemagne ou les pays scandinaves, pourrait être repris en favorisant les aires de repos et de gagnage dans le pays.
Plusieurs solutions pourraient être mises en œuvre comme la création :
– de zones d’accueil et de tranquillité suffisamment vastes et préservées des dérangements ;
– d’aires de gagnage pour améliorer l’alimentation des oiseaux hivernant.
Les rapports publiés par le Museum national d’histoire naturelle en 2009 et l’ONCFS en novembre 2014 permettraient d’identifier les zones prioritaires où de telles actions seraient menées.
● Pour les associations de défense de l’environnement, l’accroissement du nombre d’oies cendrées aurait un triple avantage : il permettrait de meilleures observations des oiseaux ; il favoriserait le tourisme ornithologique ; il accroîtrait le nombre d’oies susceptibles d’être chassées durant la période légale de chasse.
Cette solution :
– suppose évidemment de verser des compensations aux agriculteurs qui cultiveraient des parcelles spécifiques ou aux propriétaires fonciers qui affecteraient leurs terrains à améliorer les aires de repos ou de gagnage ;
– nécessite de s’assurer que les oiseaux à la recherche de nourriture et attirés par des parcelles qui leur sont consacrées ne se détournent vers d’autres champs ou des prairies cultivés, et prévoir une indemnisation dans le cas de dégâts.
La question se pose alors de l’origine des fonds et des montants. Mais il serait difficile de comprendre pourquoi un système en place dans d’autres pays – avec l’accord des autorités européennes et l’octroi de subventions européennes, par exemple au titre du FEADER – ne pourrait pas voir le jour en France, d’autant que l’évolution de la P.A.C. a considérablement réduit les aides à la culture des céréales ce qui faciliterait une reconversion.
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Proposition n° 6 : Aménager des zones d’accueil et de tranquillité pour les oies cendrées hivernant en France et prévoir, au voisinage immédiat de ces zones, des aires de gagnage, pour améliorer l’alimentation des oiseaux, par accord entre les associations de chasseurs, les associations de protection de l’environnement et les syndicats d’agriculteurs.
DISTRIBUTION SPATIALE DES EFFECTIFS D’OIES CENDRÉES EN FRANCE
C. LES DÉMARCHES AU NIVEAU EUROPÉEN
1. De l’évaluation à l’évolution des directives européennes ?
a. L’évaluation du fonctionnement des directives
La Commission européenne mène en ce moment un « fitness check », c’est-à-dire une évaluation du fonctionnement des deux directives « Oiseaux » et « Habitats ». L’objet de la procédure de « fitness check » n’est pas de modifier les directives mais de recueillir l’avis des parties prenantes sur le contenu des règles et leur mise en œuvre. Deux questions sont posées : le cadre réglementaire est-il adapté à sa finalité ? Atteint-il les résultats escomptés ?
Vers une révision de la directive 2009/147/CE ?
La directive « Oiseaux » de 1979 a été plusieurs fois modifiée, et a été finalement abrogée et remplacée par la directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages (qui a été modifiée marginalement en 2013 pour prendre en compte l’adhésion de la Croatie à l’UE).
Dans le cadre de son programme « REFIT » (Regulatory Fitness and Performance Programme), la Commission européenne a recensé une série d’actes législatifs européens existants en vue d’évaluer leur mise en œuvre de manière approfondie et la nécessité de les modifier. Parmi ces textes figure la directive « Oiseaux ».
Cette évaluation doit permettre de répondre aux questions suivantes : les objectifs ont-ils été atteints ? Les coûts engendrés ont-ils été raisonnables ? Chacun de ces textes pose-t-il un problème de cohérence avec d’autres actions ? Une démarche à l’échelle européenne est-elle encore nécessaire ? Quelles ont été les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre ? Quel est le bilan de l’application dans chaque État membre ?
Cette procédure dite « Fitness Check » se déroule selon le calendrier suivant :
Février 2014 : début de la procédure, qui porte sur la directive « oiseaux » de 2009 et la directive « habitats » de 1992 ;
Octobre 2014 : un contrat est conclu entre la Commission européenne et le consortium de cabinets de consultants qui assistera la Commission dans l’évaluation des deux directives ;
Janvier-Juin 2015 : la Commission a envoyé un questionnaire aux États membres et à plus de 150 organisations du secteur public et privé (agences publiques, ONG…), et a publié en ligne les réponses reçues ; 20 mai 2015 : publication par la Commission et l’Agence européenne de l’environnement d’un rapport sur l’état de conservation des types d’habitats et des espèces couverts par la directive « Oiseaux » et la directive « Habitats » et sur les tendances observées, pour la période 2007-2012 ; ce rapport fait la synthèse des informations que tous les États membres ont l’obligation de transmettre périodiquement à la Commission en application des dispositions des deux directives ;
Mai-Juillet 2015 : consultation du public (ouverte sur le site Internet de la Commission) ;
Automne 2015 : la Commission présentera un rapport faisant le bilan des contributions reçues ;
Début 2016 : publication des conclusions de la Commission ; c’est à ce stade que la Commission proposera, le cas échéant, une révision des deux directives.
Pour la France quatre acteurs ont été sollicités pour remettre une contribution : le MEDDE, l’Office national des forêts, l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture et LPO/Birdlife France.
Personne n’est capable d’affirmer aujourd’hui quelles sont les intentions de la Commission Juncker ni quel est l’actuel rapport de forces politiques. Il est certain que certains acteurs militent pour le « statu quo » tandis que d’autres, constatant que les situations diffèrent selon les pays, souhaitent retrouver une marge de manœuvre au niveau national. Une fusion des deux directives a même été évoquée alors qu’elles ne sont en rien contradictoires.
b. Les réticences à la révision des directives
Votre rapporteur a le sentiment que la plupart de ses interlocuteurs se sont montrés peu favorables à la révision de la directive sur la conservation des oiseaux sauvages, alors qu’elle aurait besoin d’un « toilettage » et d’une actualisation compte tenu de l’évolution des espèces et de leurs migrations, notamment en liaison avec les changements climatiques.
Les nombreuses réticences exprimées tiennent :
– aux délais nécessaires à une telle révision et à la difficulté d’obtenir un nouveau consensus entre les États membres – plus nombreux qu’à l’époque où les directives ont été prises, dans lesquels les situations diffèrent et au sein desquels les sensibilités à l’égard de la chasse et/ou de la protection stricte des espèces peuvent s’opposer (l’opinion publique est de moins en moins favorable aux activités traditionnelles comme la chasse) ;
– au risque d’une remise à plat qui soulèverait de multiples oppositions et pourrait, non seulement constituer un « appel d’air » pour d’autres revendications, mais aussi ne pas convenir aux parties prenantes – en particulier en France –. Car une révision aboutirait, soit à proposer des règles plus contraignantes, soit à introduire davantage de souplesse ;
– au sentiment que les difficultés proviennent davantage de la transposition de la directive dans le droit national et de la jurisprudence très stricte que du contenu même du texte européen ;
– à la position des services de la Commission européenne qui tiennent à l’unité et à l’intégrité de la réglementation actuelle qui a permis d’instaurer des règles communes ainsi qu’à la coordination des dispositifs nationaux, et qui sont réticents à l’évolution de textes qui s’appuient davantage sur les données scientifiques que sur des éléments socio-économiques.
Pour la Flandre, la directive « Oiseaux » est bonne. Pour la Wallonie, la question est sans objet actuellement, vu la présence anecdotique de l’espèce sur le territoire. Il est à noter que pour la Wallonie, une révision de la directive européenne concernant la conservation des oiseaux sauvages pourrait se justifier, non pas au regard des problèmes causés par l’oie cendrée, mais en raison des difficultés rencontrées avec l’interdiction générale de chasser durant les périodes de reproduction et de migration prénuptiale. Ces périodes sont en effet fort longues pour certaines espèces qui doivent pourtant pouvoir être régulées en raison des dégâts importants qu’elles causent à l’agriculture. On songe ici au pigeon ramier. L’obligation dans ce cas de devoir passer par des dérogations en application de l’article 9 de la directive est considérée comme particulièrement contraignante et sans réelle utilité.
C’est pourquoi, il semblerait que l’on s’oriente vers une modification du guide sur la chasse durable en application de la directive. Cette solution pourrait recueillir l’accord de la Commission européenne dans la mesure où les services sont partisans de solutions pragmatiques et redoutent des négociations et des revendications multiples.
Certes, ce guide n’est pas contraignant sur le plan juridique mais la jurisprudence tant européenne que nationale s’est longtemps reposée sur ce guide.
Votre rapporteur estime cependant que la piste de la révision de la directive « Oiseaux » voire sa fusion avec la directive « Habitats » ne doivent pas être abandonnées. Une nouvelle directive, actualisée, pourrait ainsi être plus opérationnelle en intégrant mieux la gestion de la biodiversité ordinaire en rapport avec l’évolution des espèces, du climat et de la nature des cultures.
2. La poursuite nécessaire du dialogue
● La présentation de nouvelles données scientifiques comme l’évolution de la jurisprudence européenne – telle celle relative à l’ouverture de la chasse printanière à la tourterelle des bois et à la caille des blés à Malte (56), évoquée dans la partie II –, pourraient néanmoins autoriser que se poursuive le dialogue entre le Gouvernement français et la Commission européenne.
Plusieurs thèmes pourraient être abordés :
– une réflexion sur les questions de chevauchement telles qu’elles ressortent de l’article 2-7 du guide de la chasse durable ;
– le recours à une dérogation au titre de l’article 9 de la directive « Oiseaux », soit au titre du paragraphe 1 a), 1 b) (dégâts) ou 1 c), sous réserve que notre pays présente les éléments qui correspondent aux conditions fixées par la CJCE :
. indiquer des dates précises, éventuellement différenciées selon les départements ;
. fixer des quotas d’oies chassables pendant la période légale puis pendant la période complémentaire ;
. instituer un système de déclarations de la part des chasseurs et un système de contrôle, à la charge des autorités administratives.
– l’interprétation même du guide sur la chasse durable.
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● Mais un des préalables devrait être la reprise du dialogue au niveau national. Or, depuis l’échec de la table ronde sur la chasse en 2010, il n’y a plus de dialogue multilatéral entre partenaires et la confiance est partiellement rompue. Pourtant, en cinq ans, les connaissances scientifiques se sont améliorées, la dynamique de l’espèce a changé, les comportements des chasseurs ont pu évoluer, des décisions ministérielles ont été prises et certaines annulées, de nouvelles propositions ont été formulées etc.
C’est pourquoi, il paraît essentiel que le dialogue puisse être renoué, non seulement sur le sujet qui fait l’objet du rapport d’information, mais également en abordant d’autres espèces d’oiseaux dans une démarche de réflexion plus globale.
La reprise du dialogue permettrait de faire le point sur l’état des données et de la jurisprudence, d’éliminer les pistes qui n’ont aucune chance d’aboutir et de réfléchir à d’autres solutions, notamment en s’inspirant de certains exemples étrangers. Mais il ne faut pas que les postures de tel ou tel acteur, voire les ressentiments sur les échecs passés, bloquent la reprise du dialogue et les échanges.
Proposition n° 7 : Poursuivre le dialogue avec la Commission européenne sur le recours possible à une dérogation au titre de l’article 9 de la directive « Oiseaux », en présentant un système qui corresponde aux conditions imposées par la jurisprudence européenne et française.
Proposition n° 8 : Proposer la reprise des négociations entre partenaires (pouvoirs publics, scientifiques, associations de chasseurs, associations de protection de l’environnement), avec pour objet exclusif le problème des oies cendrées, afin de renouer le dialogue et de trouver une solution de compromis.
Proposition n° 9 : Proposer à la Commission européenne l’ouverture du chantier de la révision de la directive sur la conservation des oiseaux sauvages compte tenu de l’évolution du climat et du comportement de l’espèce.
I. AMÉLIORER LES CONNAISSANCES
Proposition n° 1 : Poursuivre les études scientifiques, en particulier par baguage et pose de balises sur les oiseaux, afin de lever les dernières incertitudes sur les déplacements erratiques ou migratoires et sur les premières dates de migration prénuptiale.
Proposition n° 2 : Poursuivre les études juridiques afin de déterminer les conditions qui permettraient de fixer par arrêté ministériel des dérogations à la date annuelle de fermeture de la chasse aux oies cendrées.
Proposition n° 3 : Effectuer des comptages plus fréquents et plus exhaustifs pour mieux évaluer les prélèvements cynégétiques en France.
Proposition n° 4 : Poursuivre les enquêtes auprès des autres pays européens afin de connaître les données sur les prélèvements et la mise en œuvre des plans de gestion de l’espèce.
II. METTRE EN ŒUVRE DE NOUVELLES SOLUTIONS
Proposition n° 5 : Soutenir la démarche du Gouvernement pour élaborer un plan d’action et de gestion de l’espèce au niveau européen et pour le mettre en œuvre au niveau national.
Proposition n° 6 : Aménager des zones d’accueil et de tranquillité pour les oies cendrées hivernant en France et prévoir, au voisinage immédiat de ces zones, des aires de gagnage, pour améliorer l’alimentation des oiseaux, par accord entre les associations de chasseurs, les associations de protection de l’environnement et les syndicats d’agriculteurs.
III. REPRENDRE LES NÉGOCIATIONS
Proposition n° 7 : Poursuivre le dialogue avec la Commission européenne sur le recours possible à une dérogation au titre de l’article 9 de la directive « Oiseaux », en présentant un système qui corresponde aux conditions imposées par la jurisprudence européenne et française.
Proposition n° 8 : Proposer la reprise des négociations entre partenaires (pouvoirs publics, scientifiques, associations de chasseurs, associations de protection de l’environnement), avec pour objet exclusif le problème des oies cendrées, afin de renouer le dialogue et de trouver une solution de compromis.
Proposition n° 9 : Proposer à la Commission européenne l’ouverture du chantier de la révision de la directive sur la conservation des oiseaux sauvages compte tenu de l’évolution du climat et du comportement de l’espèce.
EXAMEN DU RAPPORT EN COMMISSION
Lors de sa réunion du mercredi 28 octobre 2015, la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné le rapport d’information de M. Philippe Plisson sur les oies cendrées.
M. le président Jean-Paul Chanteguet. Lors de sa réunion du 13 mai 2015, notre commission a décidé la création d’une mission d’information sur les oies cendrées, à la demande de M. Philippe Plisson, président du groupe d’études chasse et territoires, et l’a nommé rapporteur.
Au cours de ses travaux, M. Philippe Plisson a rencontré une cinquantaine de personnes, s’est rendu à Bruxelles et a effectué un déplacement aux Pays-Bas avec d’autres parlementaires.
La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a déjà eu l’occasion, à de nombreuses reprises, d’aborder le thème de la chasse qui fait partie de ses compétences. Ainsi, lors de la dernière législature, nous avons examiné une proposition de loi de M. Jérôme Bignon relative à la chasse. De même, nous avons eu plusieurs débats sur la chasse au loup dans certains départements et sur certaines méthodes de chasse à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à la biodiversité.
La présente mission d’information était centrée sur les dates d’ouverture et de fermeture de la chasse aux oies cendrées. Dans un premier temps, M. Plisson nous expliquera pourquoi il a souhaité que soit créée cette mission d’information. Puis, il nous présentera les différentes propositions qu’il souhaite faire.
M. Philippe Plisson, rapporteur. En préambule, je souhaiterais tout d’abord remercier la Commission et son président, Jean-Paul Chanteguet, d’avoir accepté de créer une mission d’information sur les oies cendrées et de m’en avoir confié la responsabilité.
Comme j’ai eu l’occasion de le dire au cours de mes déplacements, dans le monde actuel fait de drames et de bouleversements, ce sujet pourrait sembler futile. En réalité, il n’est pas anodin car il participe à ce rejet de l’Europe que l’on rencontre en particulier dans nos campagnes. Certaines décisions n’y sont pas comprises, ce qui entraîne des réactions vives, des manifestations et des votes extrémistes que nous déplorons ici.
Ce sujet mérite qu’on s’y attarde, d’autant qu’il serait facile de le régler. Malheureusement, les freins juridiques auxquels on se heurte font que ce dossier est sur la table depuis des années.
L’objectif de la mission d'information était d’essayer de trouver une solution au débat qui perturbe depuis une dizaine d’années, sinon davantage, les relations entre fédérations de chasseurs et associations environnementales sur la question des dates d’ouverture et de fermeture de la chasse aux oies cendrées. Le souhait est d’éviter que de nouvelles manifestations ne se produisent lors de la prochaine saison de chasse et qu’un accord soit enfin trouvé de manière pérenne entre toutes les parties prenantes.
Dès le départ, j’ai souhaité associer, outre les membres de notre commission, les membres du groupe d’études chasse et territoires de notre Assemblée, qui ont été invités à suivre les auditions. D’ailleurs, certains ont été très présents, en particulier M. Jean-Claude Buisine.
Au cours de nos travaux qui ont duré quatre mois et qui nous ont conduits à nous rendre à Bruxelles et aux Pays-Bas, j’ai effectivement auditionné une cinquantaine de personnes dont vous trouverez la liste en annexe et que je remercie pour leur collaboration.
Le rapport qui vous est présenté aujourd’hui est articulé autour de quatre points : la présentation des données scientifiques les plus récentes sur l’espèce d’oies Anser anser, le rappel de la réglementation en matière de prélèvements cynégétiques ou autres et de la jurisprudence, tant de la Cour de Justice de l’Union européenne que du Conseil d’État ; la présentation des termes du débat et des principales questions qui structurent les antagonismes ; les pistes de réflexion et les solutions envisageables.
En ce qui concerne les connaissances scientifiques sur les oies cendrées, je rappelle les deux études les plus récentes sur le sujet : d’une part, le rapport du Muséum national d’histoire naturelle d’octobre 2009, dont l’auteur est Jacques Comolet-Tirman ; d’autre part, le rapport demandé par le ministère chargé de l’écologie et remis par l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) au mois de novembre 2014, dont l’auteur est Vincent Schricke.
Qu’ont confirmé ces deux rapports ?
Tout d’abord, que la population d’oies cendrées en Europe occidentale comporte entre 800 000 et 900 000 individus et est en progression notable. L’augmentation récente et assez spectaculaire des effectifs fait l’objet d’un consensus parmi tous les ornithologues. Si l’espèce a pu être menacée à un moment, aujourd’hui elle se porte plutôt bien puisqu’elle prolifère.
Ensuite, que notre pays est situé sur un axe majeur de migration péninsule ibérique – Scandinavie. On dénombre seulement une vingtaine de milliers d’oies cendrées hivernant sur notre territoire dont l’origine est essentiellement nordique. Mais les comptages montrent que la France est survolée par plus de 100 000 oies cendrées en migration vers le sud en automne et vers le nord au printemps. Les raisons évoquées pour expliquer cette croissance générale de la population sont multiples. Elles tiennent principalement à l’augmentation de la protection accordée aux oiseaux migrateurs et à l’interdiction de la chasse dans certains pays, au développement des capacités d’accueil et donc des aires d’alimentation – réserves naturelles ou ornithologiques, extension des prairies inondables, etc. – ainsi qu’aux changements climatiques qui modifient, pour toutes les espèces d’ailleurs, tant la date que le lieu des migrations. Les Pays-Bas qui ont multiplié les aires d’accueil et les cultures pour sédentariser les oies, ont obtenu des résultats au-delà de leurs espérances.
Enfin, que des évolutions importantes dans le comportement de l’espèce sont intervenues : déplacement des aires d’hivernage vers le nord de l’Europe, migrations de retour de plus en plus précoces depuis vingt ans et sédentarisation accrue dans certains pays comme les Pays-Bas où l’on dénombre plus de 500 000 oies cendrées au cœur de l’hiver dont la majeure partie ne migre plus mais reste pour nicher.
Si les connaissances relatives à l’espèce Anser anser sont satisfaisantes et ont même été complétées récemment, des incertitudes demeurent sur les changements de comportement de l’espèce. Or ces connaissances sont primordiales dans l’hypothèse de la mise en place d’un plan de gestion et elles constituent un préalable pour toute nouvelle prise de décision au niveau européen. C’est pourquoi, ma première proposition vise à poursuivre certaines études, en particulier par baguage et pose de balises GPS sur les oiseaux, afin de lever les dernières ambiguïtés sur les déplacements qui peuvent être soit erratiques, soit migratoires, et sur les dates de migration prénuptiale et postnuptiale.
Il s’agit en effet de savoir si les vols d’oiseaux que l’on voit passer sont en déplacement erratique pour changer de lieu de nourriture ou s’ils sont en migration prénuptiale. Aujourd’hui, seules des balises posées sur les oiseaux nous permettent de le savoir. C’est ce qu’a fait l’ONCFS, en équipant seize oiseaux d’un GPS. Il ressort de cette expérience que tous ces oiseaux ont commencé à migrer après le 10 février. Cependant, comme on a vu des oiseaux voler avant et après cette date, la question reste posée.
Deuxième axe du rapport : Quel est le statut légal de l’espèce ?
Tant la Convention de Bonn sur la conservation des espèces migratrices sauvages que l’Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique – Eurasie (AEWA) ont classé l’espèce, du fait de sa large répartition dans le monde et de son importante population, dans la catégorie LC, c’est-à-dire en préoccupation mineure. L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a procédé au même niveau de classement.
Au niveau européen, la base juridique est la directive 79/409 sur la conservation des oiseaux sauvages de 1979 – contre laquelle M. Georges Riboulet, le président de l’Union nationale de défense des chasses traditionnelles françaises (UNDCTF) s’est battu pendant des années – modifiée pour la dernière fois en 2009, qui énonce un principe général de protection mais reconnaît la commercialisation, la chasse et la capture de certaines espèces et sous certaines conditions. C’est le cas de l’oie cendrée, espèce chassable.
En ce qui concerne la France, je rappelle que dans la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée figurent les trois espèces, oie cendrée, oie des moissons et oie rieuse, qu’en vertu de l’article R. 424-9 du code de l’environnement le ministre en charge de la chasse est seul compétent pour fixer les dates d’ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux de passage et au gibier d’eau, et qu’il s’appuie sur l’article L. 424-2 du code de l’environnement qui détermine les conditions de définition des périodes de chasse, en application de la directive européenne sur la conservation des oiseaux sauvages.
Les dates d’ouverture de la chasse aux oies cendrées sont complexes car elles dépendent des territoires concernés. Par contre, la date de fermeture de la chasse est uniforme sur l’ensemble du territoire : l’arrêté du 19 janvier 2009 fixe désormais au 31 janvier la date de fermeture de la chasse aux oiseaux de passage et au gibier d’eau.
Mais il faut indiquer que, depuis vingt ans, les dates de fermeture de la chasse aux oies cendrées ont été ramenées par étapes jusqu’à cette date : 28 février jusqu’en 1998 ; 20 février à partir de 1999 ; 10 février en 2008 ; et donc le 31 janvier depuis 2009. C’est depuis cette dernière date que chaque année, le 1er février, il y a une « guerre civile » dans ma circonscription.
Mme Catherine Quéré. Dans ma circonscription aussi !
M. Philippe Plisson, rapporteur. Je ne reviendrai pas sur les données que nous avons récoltées sur les périodes de chasse dans les différents pays et sur l’importance des prélèvements cynégétiques. Mais il est nécessaire d’avoir en mémoire quelques chiffres : au total, on évalue à environ de 150 000 à 180 000 le nombre des oies cendrées de la population nord-ouest européenne qui sont prélevées chaque année pendant la saison « hivernale » de chasse, soit 17 à 19 % des effectifs à l’issue de la période de reproduction. À ce total, doit être ajouté le prélèvement effectué aux Pays-Bas pendant la période de reproduction : 70 000 oies durant l’été 2010, 150 000 durant l’été 2013. Les Pays-Bas procèdent à des opérations de destruction massive parce que les oies mangent les cultures.
La nouvelle enquête menée par l’ONCFS évalue le nombre de prélèvements, en France, entre 15 000 et 18 000. Les chiffres de prélèvements rapportés à la population en croissance montrent que les capacités globales de prélèvement dans notre pays ne peuvent pas représenter un risque pour les populations nord-européennes, en forte augmentation elles aussi.
Je souligne également le fait que les différences dans les dates de chasse tiennent beaucoup aux dérogations qui sont autorisées dans le cadre de l’article 9 de la directive « Oiseaux » et qui permettent des prélèvements dans des conditions précises : pour la santé humaine, dans l’intérêt de la sécurité aérienne, en cas de dégâts agricoles ou piscicoles, ou à des fins scientifiques.
L’interprétation de la directive « Oiseaux » a été donnée par la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE), laquelle a élaboré une jurisprudence autour de la notion de « protection complète » des oiseaux migrateurs et du gibier d’eau, en précisant ainsi les notions de « petites quantités » susceptibles d’être prélevées, de « risque de confusion » entre espèces ou d’ « autre solution satisfaisante ».
La protection prévue pour ces espèces, tant pour la période nidicole et les différents stades de reproduction et de dépendance que pour le trajet de retour des espèces migratrices vers leur lieu de nidification, doit être complète et exclure des risques de confusion entre espèces différentes. En conséquence, la CJUE a interdit l’échelonnement des dates de périodes de chasse en fonction des espèces ou selon différentes parties du territoire, sauf si la preuve, fondée sur des données scientifiques, qu’un tel échelonnement n’est pas incompatible avec la protection complète des espèces est rapportée. Dès que le premier oiseau commence à migrer, on décide l’arrêt de la chasse.
Par l’arrêt du 16 octobre 2003, rendu à la suite d’une question préjudicielle que le Conseil d’État lui avait soumise le 25 janvier 2002, la CJUE a précisé son interprétation concernant les possibilités de dérogation qui ne peuvent être envisagées qu’à défaut de solutions alternatives satisfaisantes et ne peuvent servir de fondement légal à des mesures qui auraient « pour seul objet de prolonger les périodes de chasse sur des territoires déjà fréquentés par ces dernières pendant les périodes de chasse ».
La jurisprudence de la Cour de Justice, qui introduit ainsi la protection du « premier oiseau », est excessivement stricte car elle considère que tout vol hivernal est une migration prénuptiale. C’est le fond du débat. Reprise par les jurisprudences au niveau de chaque État, elle est à la source de nombreux contentieux nationaux.
C’est bien le cas dans notre pays où nous avons vécu une véritable saga puisque, depuis plus de vingt ans, les arrêtés fixant les dates d’ouverture et/ou de fermeture de la chasse aux oies cendrées ont fait l’objet de recours devant le Conseil d’État et ils ont tous été annulés par la juridiction.
Vous trouverez dans le rapport des précisions sur la jurisprudence récente du Conseil d’État et sur les raisons qui sous-tendent ses décisions, notamment celle du 23 décembre 2011 qui enjoint au Gouvernement de fixer une date de fermeture qui ne soit pas postérieure au 31 janvier, la décision du 7 novembre 2012 qui annulait l’arrêté du 3 février 2012 autorisant des prélèvements jusqu’au 10 février 2012 dans treize départements à des fins d’études scientifiques, et l’ordonnance du 5 février 2014 qui a suspendu l’arrêté du 30 janvier 2014.
Dans une démarche politique d’apaisement, la ministre de l’écologie a innové en 2015. Par lettre en date du 28 janvier 2015, elle a rappelé que la date de fermeture de la chasse aux oies était fixée au 31 janvier mais elle a donné comme instruction au directeur général de l’ONCFS que, dans la période du 31 janvier au 8 février, soit organisée « une action d’information visant à prévenir les chasseurs » et a demandé que la verbalisation ne prenne effet qu’à compter du 9 février suivant. (Murmures sur divers bancs) Si le statut juridique de cette solution est fragile, elle a le mérite d’avoir apporté une solution de court terme dans une période de blocage.
On peut comprendre les réticences du Gouvernement à prendre des arrêtés dérogatoires quant aux dates de fermeture de la chasse aux oies cendrées. Mais il me semble essentiel de souligner que les possibilités demeurent néanmoins en droit : soit pour régionaliser les dates de fermeture ; soit pour prendre en compte la situation de l’espèce, c’est-à-dire non seulement l’évolution des dates de migration que la surabondance, dans le cadre de l’article 7 de la directive « Oiseaux » ; soit enfin pour recourir aux dérogations admises par l’article 9 de la même directive – ce n’est pas parce que toutes les conditions ne sont pas remplies actuellement qu’il faut s’interdire un tel recours à l’avenir.
J’ai formulé trois propositions.
Premièrement, poursuivre les études juridiques afin de déterminer les conditions qui permettraient de fixer par arrêté ministériel des dérogations à la date annuelle de fermeture de la chasse aux oies cendrées.
Deuxièmement, effectuer des comptages plus fréquents et plus exhaustifs pour mieux évaluer les prélèvements cynégétiques en France qui aujourd’hui sont relativement vagues.
Troisièmement, poursuivre les enquêtes auprès des autres pays européens afin de connaître les données sur les prélèvements et la mise en œuvre des plans de gestion de l’espèce.
Il m’est apparu intéressant de formuler cinq interrogations présentant l’état du débat et permettant une meilleure recherche de solutions.
Première interrogation : l’importance des dégâts causés aux cultures justifie-t-elle une régulation plus intense de l’espèce ?
Face aux dégâts causés aux cultures particulièrement importants aux Pays-Bas et dans une moindre mesure en Allemagne, en Suède et en Norvège, la plupart des organisations agricoles et les gestionnaires des zones naturelles humides soutiennent l’option d’une plus forte régulation de l’espèce. C’est ce qui explique la mise en œuvre de plans de régulation en Norvège pour la période 2012-2020 et aux Pays-Bas depuis 2013-2014.
Les dégâts aux cultures sont indemnisés dans certains pays et coûtent de plus en plus cher. Aux Pays-Bas, le montant annuel des indemnisations directes versées aux agriculteurs par les provinces néerlandaises a atteint 12 millions d’euros en 2014, dont 9 millions pour la période hivernale et 3 millions pour la période estivale. Une des critiques apportées au système d’indemnisations est la part indirecte que l’Union européenne y prendrait. En effet, des aides européennes peuvent être accordées par le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER). L’Europe aide donc les pays à détruire les oies tout en interdisant, dans le même temps, de les chasser.
Mme Catherine Quéré. Eh oui, c’est la réalité !
M. Philippe Plisson, rapporteur. En France, comme en Espagne, la situation est différente car les dégâts aux cultures sont jusqu’à présent minimes. De toute façon, les dégâts aux cultures et aux récoltes agricoles ne pourraient pas être indemnisés car seuls les dégâts causés par les grands gibiers le sont actuellement.
Deuxième question : un accroissement des prélèvements en Espagne et en France permettrait-il une meilleure régulation de l’espèce dans d’autres pays ?
Compte tenu de l’origine des oies en transit ou en hivernage dans notre pays, la question se pose de savoir si un prélèvement cynégétique accru en France diminuerait les dégâts agricoles occasionnés aux Pays-Bas.
M. le président Jean-Paul Chanteguet. Bonne question !
M. Philippe Plisson, rapporteur. C’est ce que nous espérions lorsque nous avons lancé notre étude. Augmenter même marginalement le prélèvement cynégétique en France pourrait contribuer à réduire le stock d’oiseaux présents aux Pays-Bas au début du printemps et plus particulièrement en Norvège, leur destination connue, où elles prolifèrent. Un tel argument mériterait d’être repris dans les négociations avec la Commission européenne ou dans le cadre de l’élaboration d’un plan de gestion européen.
Troisième question : dans quelles conditions le gazage ou la destruction massive des oies cendrées sont-ils autorisés sur le territoire des Pays-Bas ? Nous nous sommes rendus aux Pays-Bas où nous avons rencontré les oies et ceux qui les gazent. Nous avons vu des troupeaux d’oies en train de paître dans les champs comme des vaches. Nous avons regardé un film qui montre la manière dont les Hollandais se débarrassent des oies cendrées, en particulier en Zélande.
Les différentes méthodes de destruction des oies cendrées sont toutes encadrées par des plans nationaux ou locaux de gestion ou de régulation. Ainsi, il revient à chaque province néerlandaise d’élaborer un plan de gestion avec les parties prenantes, l’objectif étant de revenir au niveau des dégâts agricoles en 2005, pendant la saison.
Le cas particulier de l’aéroport de Schiphol a fait l’objet d’un plan spécifique. Les premiers incidents se sont en effet produits dès 2000 et ils s’accroissent depuis 2010. La présence de nombreuses oies cendrées à proximité de l’aéroport perturbe le trafic et pourrait bien occasionner des accidents puisque certains oiseaux rentrent dans les réacteurs. Ce plan comporte plusieurs volets mais il autorise la capture puis le gazage au dioxyde de carbone d’un nombre important d’oiseaux chaque année – 10 000 durant l’été 2013 dans un rayon de vingt kilomètres autour de l’aéroport. Au moment de la mue, quand elles n’ont plus de plumes, les oies ne peuvent plus voler. Elles sont donc mises dans des containers, gazées et tuées. Ensuite, certains en font des rillettes… (Rires)
Mme Catherine Quéré. Nous en avons même goûté ! (Rires)
M. Philippe Plisson, rapporteur. Il semble bien que plusieurs provinces aient recours à cette pratique depuis cette année pour éliminer des dizaines de milliers d’animaux, en particulier en Zélande – nous l’avons vérifié – et en Frise.
Quatrième question : la notion même de migration ne peut-elle pas être remise en cause ?
Le débat sur les dates d’ouverture et de fermeture de la chasse est évidemment lié à la notion même de migration.
Or les déplacements hivernaux des oiseaux migrateurs sont souvent complexes et le fait qu’ils quittent les zones d’hivernage ne signifie pas forcément qu’ils commencent la migration de retour. Des déplacements correspondent davantage à la recherche de zones d’alimentation. Certains oiseaux se déplacent en effet parce qu’ils n’ont plus à manger. La difficulté réside donc dans le fait de différencier ces « délocalisations » durant l’hivernage, qui peuvent être qualifiées d’errements, avec des déplacements prénuptiaux.
Remettre en cause les données scientifiques, en particulier sur des faits précis, ne mène à rien. Émettre des doutes sur les conclusions qui en sont tirées doit servir de base à de nouvelles approches, et c’est ce que nous faisons. Il est avéré que le pic de migration prénuptiale des oies cendrées a bien lieu durant la deuxième décade de février. Le débat porte donc sur la caractérisation de certains vols durant la dernière décade de janvier : les oies vont-elles sur leur lieu de nidification ou cherchent-elles un endroit où elles pourront se nourrir ?
Cinquième question : l’instauration d’une dérogation pour allonger la période de chasse est-elle compatible avec les normes européennes ?
Les possibilités de recours aux dérogations sont limitées et doivent être justifiées par rapport aux objectifs généraux de la directive « Oiseaux » et conformes aux conditions spécifiques décrites à son article 9. Ces conditions sont strictes et restreignent considérablement la possibilité d’utilisation, d’autant plus que la mise en œuvre est encadrée tant par la Commission européenne que par la Cour de Justice de l’Union européenne.
Trois conditions cumulatives sont rappelées dans le guide sur la chasse durable en application de la directive : premièrement, qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante ; deuxièmement, que soit faite la preuve d’un des motifs énoncés à l’article 9, paragraphe 1, points a), b) et c) ; troisièmement, que soient satisfaits des critères de forme.
La Commission européenne a rappelé sa position actuelle dans une réponse à la lettre que la ministre de l’écologie avait envoyée le 30 janvier dernier au commissaire européen Karmenu Vella : le régime dérogatoire est d’interprétation stricte et il revient aux États, pour sa mise en œuvre, d’établir que les conditions de son application sont remplies. La première condition à satisfaire pour accéder au régime dérogatoire est l’absence « d’autre solution satisfaisante ». Or la France ne satisfait pas à cette condition puisque les espèces d’oies visées sont effectivement présentes sur le territoire national durant la période légale de chasse du 21 août au 31 janvier et que les quantités prélevées sont loin d’être négligeables. Elles peuvent être chassées durant leur première migration vers le sud.
Quatrième et dernier axe du rapport : quelles sont les démarches possibles ?
Deux démarches sont examinées en France pour adapter le cadre de la chasse aux oies cendrées : la mise en place d’un plan de gestion et l’amélioration des conditions d’hivernage.
Tant le Gouvernement que certaines associations de défense de l’environnement ou les fédérations de chasseurs semblent désormais favorables à l’adoption et à la mise en œuvre d’un plan de gestion des oies cendrées afin de développer une logique de long terme dans le prélèvement de ces oiseaux.
L’hypothèse retenue est celle d’un plan international d’action et de gestion dans le cadre de l’AEWA qui serait décliné au niveau national. Car, si l’AEWA promeut principalement le maintien et la sauvegarde des oiseaux d’eau au statut de conservation défavorable, il peut aussi avoir comme objectif de mettre en œuvre des dispositifs de gestion des espèces abondantes qui causent des dommages significatifs aux activités humaines.
Quels sont les avantages et les inconvénients d’un plan d’action et de gestion ?
Selon l’organisation scientifique Oiseaux migrateurs du paléarctique occidental (OMPO), la directive « Oiseaux » n’est plus adaptée aux réalités biologiques actuelles du fait notamment de l’absence d’outil de gestion. La directive européenne n’admet qu’une dérogation au cadre juridique de prélèvement des espèces chassables. Une telle dérogation n’est pas un mécanisme de gestion des espèces en accroissement mais constitue seulement une solution de court terme dans l’attente d’un plan de gestion à l’échelle européenne.
Dans l’aire de l’AEWA, d’autres pays européens sont motivés par une gestion de l’espèce à grande échelle, notamment les pays nordiques qui subissent les dégâts. L’adoption d’un plan de gestion spécifique à l’oie cendrée concernerait une dizaine de pays et intéresserait surtout la Norvège, la Suède et les Pays-Bas qui éprouvent des difficultés à gérer les oies sédentaires sur leurs territoires.
Certains pays se sont exprimés en faveur d’un plan plurispécifique qui intégrerait d’autres espèces, notamment la bernache nonnette et l’oie rieuse. La question qui se pose est celle d’un plan spécifique à l’oie cendrée ou d’un plan global pour toutes les espèces d’oies générant des difficultés similaires. Selon le ministère de l’écologie, il vaudrait mieux adopter une approche globale : un plan de gestion couvrant trois espèces d’oies concernerait alors une vingtaine de pays, ce qui représente un maximum pour que l’accord soit efficace.
Plusieurs critiques d’ordre général sont apportées au plan de gestion, touchant aux délais ou à l’articulation avec les normes européennes. Un plan de gestion prendra beaucoup de temps à être mis en place car tout plan de gestion élaboré dans le cadre de l’AEWA devra être discuté dans le cadre de l’Union européenne, ne serait-ce que pour les pays signataires de l’accord et membres de l’Union européenne.
La ministre de l’écologie a demandé à l’AEWA, le 19 novembre 2014, de se saisir de ce sujet pour la mise en œuvre d’un plan de gestion international de l’oie cendrée avec l’ensemble des États intéressés. C’est donc une demande officielle. Une réunion préparatoire a été organisée au ministère, le 27 janvier 2015, avec la Fédération européenne des associations de chasse et des conservatoires de la faune sauvage (FACE), l’OMPO, l’AEWA, la Fédération nationale des chasseurs (FNC), l’ONCFS, France nature environnement (FNE), la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) et la Fondation Sommer.
La première réunion du comité technique de l’AEWA, qui s’est tenue du 3 au 6 mars 2015, pour interroger les parties sur leur intérêt à l’égard d’un tel plan de gestion, est très encourageante. Lors de la dixième réunion du Comité permanent de l’AEWA, du 8 au 10 juillet dernier, à Kampala, a été examiné un projet de résolution sur l’adoption et la mise en œuvre de plans internationaux d’action et de gestion mono ou plurispécifiques. Le projet de plan de gestion multi-espèces « oies » concernant en particulier l’oie cendrée mais aussi la bernache nonnette et l’oie rieuse a été présenté par le directeur technique de l’AEWA. Nous sommes dans une démarche qui est entrée aujourd’hui dans une phase de réalisation.
Une fois que le plan d’action sera établi, différentes mesures de gestion détaillées seront prises. L’AEWA se tournera vers un opérateur pour gérer le plan au niveau national. Les ministères chargés de l’écologie et de l’agriculture ont proposé que l’OMPO soit l’opérateur du plan en France, ce que toutes les parties prenantes ont accepté.
C’est pourquoi je propose de soutenir la démarche du Gouvernement pour l’élaboration d’un plan d’action et de gestion de l’espèce au niveau de l’AEWA et pour sa mise en œuvre au niveau national dès qu’il sera achevé.
Une autre piste concerne l’amélioration des conditions d’hivernage. L’effectif des oies cendrées hivernant en France semble atteindre un palier autour de 20 000 individus. L’exemple d’autres pays européens, comme l’Allemagne ou les pays scandinaves, pourrait être repris afin de créer des zones d’accueil et de tranquillité suffisamment vastes et préservées des dérangements et des aires de gagnage pour améliorer l’alimentation des oiseaux hivernant. Si nous arrivons à faire en sorte que des oiseaux s’arrêtent chez nous, éventuellement qu’ils y migrent, nous aurons alors une vraie raison de pouvoir participer à leur régulation.
Mme Catherine Quéré. Ils seront gazés au lieu d’être chassés !
M. Philippe Plisson, rapporteur. Cette solution suppose évidemment de verser des compensations aux agriculteurs qui cultiveraient des parcelles spécifiques et de s’assurer que les oiseaux à la recherche de nourriture et attirés par des parcelles qui leur sont consacrées ne se détournent vers d’autres champs ou des prairies cultivés. Enfin, il faut prévoir une indemnisation dans le cas de dégâts, comme c’est le cas en Hollande.
La question se pose alors de l’origine des fonds et des montants. Mais il serait difficile de comprendre pourquoi un système en place dans d’autres pays – avec l’accord des autorités européennes et l’octroi de subventions européennes, par exemple au titre du FEADER – ne pourrait pas voir le jour en France, d’autant que l’évolution de la PAC a considérablement réduit les aides à la culture des céréales, ce qui faciliterait une forme de reconversion pour certains agriculteurs.
Quelles pourraient être les démarches au niveau européen ? Dans le rapport, j’ai appelé cette démarche « de l’évaluation à l’évolution des directives européennes ? »
La Commission européenne mène en ce moment un fitness check, c’est-à-dire une évaluation du fonctionnement des deux directives « Oiseaux » et « Habitats ». L’objet de la procédure est de recueillir l’avis des parties prenantes sur le contenu des règles et leur mise en œuvre. Deux questions sont posées : le cadre réglementaire est-il adapté à sa finalité ? Atteint-il les résultats escomptés ? Il y a deux semaines, j’ai participé, à Bruxelles, à un colloque organisé par la FACE sur ce sujet.
Pour la France, quatre acteurs ont été sollicités pour remettre une contribution : le ministère du développement durable, l’Office national des forêts, l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture et LPO/BirdLife France.
Personne n’est capable d’affirmer aujourd’hui quelles sont les intentions de la Commission Juncker ni quel est l’actuel rapport de forces politiques.
J’ai le sentiment que la plupart des interlocuteurs se sont montrés peu favorables – c’est le moins que l’on puisse dire – à la révision de la directive sur la conservation des oiseaux sauvages, alors qu’elle aurait besoin d’un toilettage et d’une actualisation compte tenu de l’évolution des espèces et de leurs migrations, notamment en liaison avec les changements climatiques.
En 1979, date de la directive, l’oie cendrée était en voie de disparition alors qu’aujourd’hui c’est une espèce invasive. On voit bien que les choses ont évolué, que leur habitat s’est modifié, que le climat a changé ce qui a entraîné des bouleversements en ce qui concerne les migrations puisque les oies s’arrêtent en Hollande au lieu d’aller jusqu’en Espagne ou au Maroc. Toutes ces constatations mériteraient que l’on remette sur la table cette directive. Mais dans cette Europe à vingt-huit, tout le monde a peur d’ouvrir la boîte de Pandore. Les associations de protection des oiseaux et les associations de chasse, en particulier la FACE, considèrent qu’il ne faut toucher à rien car de toute façon on ne parviendra pas à se mettre d’accord. Or, la directive de 1979 n’est plus adaptée, elle permet juste un équilibre précaire qui n’est pas satisfaisant pour la France.
Les nombreuses réticences exprimées tiennent aux délais nécessaires à une telle révision, à la difficulté d’obtenir un nouveau consensus entre les États membres, au risque d’une remise à plat qui soulèverait de multiples oppositions et pourrait constituer un appel d’air pour d’autres revendications, au sentiment que les difficultés proviennent davantage de la transposition de la directive dans le droit national et de la jurisprudence très stricte que du contenu même du texte.
Certains pays ne disposent pas d’une instance comparable au Conseil d’État. C’est le cas, par exemple, de Malte qui a pu bénéficier pour d’autres espèces, comme la tourterelle et la caille, de dérogations. Comme le Conseil d’État rend des décisions par rapport à la légalité juridique et que le droit européen prévaut sur le droit national, les arrêtés du Gouvernement français ont été cassés, quel que soit le gouvernement en place depuis 2010.
C’est pourquoi, il semblerait que l’on s’oriente plutôt vers une modification du guide sur la chasse durable en application de la directive. Cette solution pourrait recueillir l’accord de la Commission européenne dans la mesure où les services sont partisans de solutions pragmatiques et redoutent des revendications multiples.
Certes, ce guide n’est pas contraignant sur le plan juridique mais la jurisprudence tant européenne que nationale s’est longtemps reposée sur lui.
J’estime cependant que la piste de la révision de la directive « Oiseaux » voire sa fusion avec la directive « Habitats » ne doit pas être abandonnée. Une nouvelle directive, actualisée, pourrait ainsi être plus opérationnelle en intégrant mieux la gestion de la biodiversité ordinaire en rapport avec l’évolution des espèces, du climat et de la nature des cultures.
Enfin, je reste persuadé de la nécessaire poursuite du dialogue tant au niveau européen, entre le Gouvernement français et la Commission européenne, que français.
Plusieurs thèmes pourraient être abordés : une réflexion sur les questions de chevauchement telles qu’elles ressortent de l’article 2-7 du guide de la chasse durable ; le recours à une dérogation au titre de l’article 9 de la directive « Oiseaux », soit au titre du paragraphe 1 a), 1 b) (dégâts) ou 1 c), sous réserve que notre pays présente les éléments qui correspondent aux conditions fixées par la CJUE ; l’interprétation même du guide sur la chasse durable.
Mais un des préalables devrait être la reprise du dialogue au niveau national. Or depuis l’échec de la table ronde sur la chasse en 2010, il n’y a plus de dialogue multilatéral entre partenaires et la confiance est partiellement rompue. Pourtant, en cinq ans, les connaissances scientifiques se sont améliorées, la dynamique de l’espèce a changé, les comportements des chasseurs ont évolué, des décisions ministérielles ont été prises et certaines annulées, de nouvelles propositions ont été formulées.
C’est pourquoi, mes dernières propositions consistent à poursuivre le dialogue avec la Commission européenne sur le recours possible à une dérogation au titre de l’article 9 de la directive « Oiseaux », en présentant un système qui corresponde aux conditions imposées par la jurisprudence européenne et française.
Je propose également la reprise des négociations entre partenaires – pouvoirs publics, scientifiques, associations de chasseurs, associations de protection de l’environnement – avec pour objet exclusif le problème des oies cendrées, afin de renouer le dialogue et de trouver une solution de compromis. C’est ce que j’ai déjà proposé aux différents protagonistes. Les chasseurs l’ont accepté mais à ce jour la LPO s’y oppose. M. Allain Bougrain-Dubourg ne veut pas en entendre parler et je le regrette car on pourrait essayer de se mettre autour d’une table pour trouver une solution de compromis. Des avancées peuvent être faites de chaque côté qui permettraient de trouver des solutions de bon sens. Nous sommes là davantage dans des postures que dans une attitude constructive.
Enfin, je propose que la Commission européenne ouvre le chantier de la révision de la directive sur la conservation des oiseaux sauvages compte tenu de l’évolution du climat et du comportement de l’espèce. Je demande que cette directive soit révisée car elle est obsolète. Il faut prendre son courage à deux mains et la remettre sur la table.
En conclusion, compte tenu du contexte économique et social de notre pays, et prenant en compte les pressions sur la biodiversité et la difficulté de reconquérir la biodiversité ordinaire, le débat sur la modification des dates d’ouverture et de fermeture d’un gibier d’eau, même s’il est complexe et récurrent, doit être remis à sa juste place.
Les démarches successives dans notre pays n’ont jamais été exemptes de controverses mais, pour que ce problème somme toute assez subalterne ne continue pas à perturber le climat social et à alimenter le rejet de l’Union européenne, il apparaît impératif de dégager une solution qui donne satisfaction à court comme à moyen terme, qui corresponde à l’état du droit et aux données scientifiques, et qui s’appuie enfin sur des arguments de raison et non de passion. (Applaudissements sur tous les bancs)
M. Jean-Jacques Cottel. Je tiens tout d’abord à remercier Philippe Plisson pour la qualité de son travail.
Ce rapport permet de comprendre le phénomène migratoire sur l’ensemble de la sphère géographique migratoire de cette espèce et de clarifier bien des questions sur les blocages plus techniques que politiques. Je pense, par exemple, à l’actuelle directive européenne « Oiseaux » et aux difficultés pour la France de rentrer dans le cadre d’une dérogation.
Il apporte des précisions sur l’état de la connaissance scientifique de cette espèce et sur ses évolutions récentes bien qu’il soit nécessaire de les approfondir pour mieux cerner les chiffres des prélèvements cynégétiques.
Il fait l’état de la situation dans les pays voisins, ce qui permet de voir à quel point le manque, non seulement d’harmonisation, mais aussi de coopération conduit à des situations paradoxales aux Pays-Bas, voire contradictoires.
Il rappelle la succession d’arrêtés ministériels qui ont été annulés par le Conseil d’État ces dernières années, ce qui a abouti régulièrement à des impasses.
Le rapport relativise la question d’un plus grand prélèvement en France au bénéfice d’une meilleure régulation de l’espèce dans les autres pays. Quand bien même les périodes de chasse seraient largement prolongées, le nombre d’oies chassées paraît d’ores et déjà insuffisant pour régler le problème compte tenu de l’expérience acquise lorsqu’elle était légale au-delà du 31 janvier.
Il est très intéressant de lire dans le rapport le chapitre consacré à la remise en cause de la notion de migration qui détermine l’objet de la problématique, à savoir les dates d’ouverture et de clôture de la chasse. En effet, la réalité est plus complexe car il y a confusion dans les déplacements hivernaux de ces oiseaux migrateurs du fait de l’évolution comportementale de l’espèce entre des migrations de retour depuis des zones d’hivernage et les déplacements plus ponctuels correspondant à la recherche de zones d’alimentation.
Notre collègue est catégorique quand il mentionne que le pic de migration a bien lieu durant la deuxième décade de février, ce qui montre l’inadéquation entre les limites imposées et la réalité constatée.
Parmi les solutions préconisées, il faut saluer la volonté du Gouvernement de sortir par le haut de cette affaire en ayant pris soin d’engager simultanément des démarches avec l’AEWA pour la mise en œuvre d’un plan de gestion à l’échelle internationale et le maintien du dialogue avec les instances européennes, à la fois pour parvenir à une dérogation de cette directive « Oiseaux » et lui proposer de la réviser compte tenu du changement climatique et de l’évolution comportementale de l’espèce, sans oublier la poursuite des négociations et du dialogue au niveau national entre les différents partenaires.
Comme la recherche de solutions prendra nécessairement du temps, qu’elles émanent de l’Europe ou de l’AEWA, quelles solutions préconiser pour 2016 et les années suivantes ? À mon sens, l’initiative prise par Mme la ministre pour 2015, qui avait répondu à un besoin suite à des problèmes sociaux sur notre territoire, ne constitue pas une solution pérenne.
Le rapport fait état d’un déplacement vers le nord du centre de gravité des migrations d’hivernage. Quelle est la situation de la France face à cette évolution ? Doit-on s’attendre à une montée en puissance du phénomène ? Ne peut-on pas envisager dès maintenant l’élargissement des conditions d’indemnisation si une telle question se posait ?
Enfin, le rapport ne détaille peut-être pas suffisamment la procédure du gazage des oies cendrées effectuée aux Pays-Bas, alors que celles-ci peuvent se retrouver dans la chaîne alimentaire. J’espère que des contrôles sont réalisés. Pouvez-vous nous donner des précisions sur ce sujet ?
M. le président Jean-Paul Chanteguet. Vive la traçabilité !
M. Jean-Marie Sermier. Monsieur le rapporteur, je tiens à vous féliciter pour la qualité de votre travail. Vous avez raison, si ce sujet peut paraître extrêmement anodin au regard des problèmes auxquels notre pays est confronté aujourd’hui, il rentre dans une réflexion globale sur ce que vivent les zones rurales. En effet ceux qui y habitent, ceux qui y travaillent, ont un sentiment d’abandon, voire de rejet de leur culture. Il est devenu extrêmement difficile d’être agriculteur, de résider dans une petite commune. Les décisions successives prises par des gens qui connaissent probablement mal la ruralité ne sont pas toujours bien comprises par ceux qui y habitent.
Les chasseurs font partie intégrante de la ruralité, comme on l’a vu lors de l’examen du texte sur la biodiversité. Malheureusement, nous avions assisté alors à un affrontement entre les « chasseurs agriculteurs ruraux » et ceux qui ne partagent pas ces valeurs.
C’est probablement un rapport de ce type qui peut permettre de jeter les bases d’une réflexion commune et d’arrêter d’opposer les uns aux autres dès lors que l’on s’appuie sur des données fiables validées par tout le monde.
La bonne nouvelle de ce matin, c’est que les oies cendrées sont de plus en plus nombreuses. On voit bien qu’entre une espèce protégée et une espèce nuisible la différence est plus ténue qu’il n’y paraît puisqu’elle peut être protégée sur un territoire et nuisible à un autre endroit et que cette notion peut évoluer dans le temps. J’en veux pour preuve que les sangliers ont fait l’objet des mêmes remarques il y a quelques décennies. Je suis riverain d’une grande forêt de feuillus, la forêt de Chaux, où le cerf a été introduit il y a une trentaine d’années avant de devenir aujourd’hui pratiquement nuisible, l’ONF estimant qu’il mange trop de jeunes pousses. Il faut donc s’appuyer en permanence sur des données extrêmement précises. C’est ce qu’a fait notre rapporteur, ce qui lui a permis de faire des propositions réalistes pour éviter d’utiliser cette somme hallucinante de 12 millions d’euros de crédits européens pour gazer des oies alors que l’agriculture est confrontée actuellement à une crise grave. La France aurait pu éviter cela grâce à la chasse.
Il y a quelques années, j’avais commis, avec Mme Geneviève Gaillard, un rapport sur la gouvernance et le financement des associations environnementales. Je souhaite que l’on puisse nous rappeler à l’occasion quelles sont les associations qui agissent dans de tels débats, quels sont leurs financements, leur gouvernance, parce qu’il y a d’un côté ces associations et, de l’autre des fédérations de chasse qui sont très contrôlées et très organisées. J’aimerais bien que ce soit le cas pour tout le monde.
Mme Catherine Quéré. Très bien !
M. Bertrand Pancher. Je tiens également à remercier Philippe Plisson pour la qualité de son travail et surtout de s’être engagé dans un dossier…
M. Philippe Plisson, rapporteur. Sur lequel on risque de prendre des coups !
M. Bertrand Pancher. …sujet à controverse et relativement complexe. Je m’aperçois qu’à la suite d’un tel travail, tout s’éclaircit et qu’il est possible de mettre en place des solutions naturellement sans en rajouter à la polémique.
Nous serons de plus en plus confrontés à des sujets de ce type dans le futur en raison du réchauffement climatique, Dans certains endroits, il augmente les distances de migration des oiseaux et les affaiblit. Ailleurs, il conduit certaines espèces migratoires à ne plus bouger, ce qui entraîne des nuisances. Cette étude montre également qu’il y a différentes catégories dans une espèce puisqu’il y a des oies sédentaires et celles qui continuent à migrer.
M. Jean-Pierre Dufau. C’est la même espèce, mais elles n’ont pas le même comportement !
M. Bertrand Pancher. Il ne faut pas confondre ces deux catégories.
Il est évident que la régulation des espèces est un sujet de société. C’est la raison pour laquelle nous ne sommes pas hostiles à la chasse. Nous considérons que c’est une activité naturelle qui trouve son sens sur les paysages, à condition de remettre les choses en ordre.
Monsieur le rapporteur, vous dites qu’il faut améliorer les conditions d’hivernage des oies cendrées en France, en sous-entendant qu’on doit pouvoir davantage les tirer parce qu’elles seront de plus en plus nombreuses. Tuer un animal n’est pas un jeu, y compris pour un chasseur. Pour être d’une famille de chasseurs, je sais que ce n’est pas par jeu que les chasseurs tuent mais pour réguler les espèces. Si l’on fait croire que c’est un jeu, les chasseurs se mettront de plus en plus à dos l’opinion publique et ils ne s’en sortiront pas.
Dès lors que les connaissances scientifiques progressent, on peut s’engager dans une régulation un peu différente et modifier les périodes de chasse. Mais prenons garde à l’amalgame et à ne pas opposer bêtement les chasseurs et les associations de protection des animaux.
Au Royaume-Uni, il n’y a pas de frontière entre les chasseurs et les protecteurs des animaux.
Mme Catherine Quéré. Ce n’est pas vrai !
M. Bertrand Pancher. Là-bas, les associations de chasseurs sont considérées comme des associations environnementales, ce qui n’est pas le cas chez nous.
Enfin, il est évident qu’il faut reprendre les négociations. L’idéal serait de parvenir à un minimum de consensus. Ce rapport devrait contribuer à ouvrir les esprits.
Je formule le vœu que votre rapport puisse être diffusé un peu partout. Pour ma part, je le distribuerai très largement dans mon département. On peut s’honorer du travail du Parlement lorsqu’on lit un document de ce type.
Mme Laurence Abeille. Monsieur le rapporteur, je tiens aussi à vous remercier pour votre travail.
Les zones rurales sont effectivement de plus en plus en déshérence. La vie sociale y est compliquée. Mais il ne faut pas se tromper. Ce n’est pas à cause de la chasse, c’est d’abord parce qu’il n’y a pas d’emplois, que les services publics ont malheureusement souvent déserté les bourgs et les villages, qu’il y a relativement peu d’activités culturelles.
Des habitants se mobilisent beaucoup pour sauver leur ville, leur village, leurs emplois, leurs bourgs, faire vivre des commerces de proximité. La chasse n’est pas un pilier indispensable à l’équilibre de la vie rurale. Le partage de la forêt, de la nature, de la connaissance des animaux, de l’environnement peut se faire sans fusil.
Monsieur le rapporteur, j’ai été surprise par la méthode que vous avez employée puisque vous n’avez associé à vos travaux que les membres du groupe d’études chasse et territoires de l’Assemblée nationale. Deux autres groupes d’études, le groupe préservation et reconquête de la biodiversité que je préside, et le groupe d’études protection des animaux que préside Mme Geneviève Gaillard, n’ont pas participé à vos travaux, ce qui révèle un parti pris dans la rédaction du rapport.
En fait, l’objectif de cette mission d’information était bien plus de trouver de nouvelles dates d’ouverture de la chasse aux oies cendrées avec la volonté du monde de la chasse de prolonger ces dates d’ouverture. Votre rapport aurait pu tout aussi bien s’intituler : « Mission d’information sur la chasse aux oies cendrées », car tel est bien l’objet de votre réflexion.
La fin de la chasse aux oies sauvages est fixée au 31 janvier de chaque année, pour se conformer à la directive « Oiseaux » selon laquelle les oiseaux migrateurs ne doivent pas être chassés durant la migration prénuptiale.
Au cours des travaux de votre mission d’information, vous avez effectué un déplacement aux Pays-Bas avec l’idée que le prolongement de la date d’ouverture de la chasse se justifierait eu égard aux dégâts qu’y provoquent les oies cendrées sur l’agriculture. Lors de cette visite, les associations environnementales néerlandaises vous ont expliqué que le prolongement de la chasse aux oies cendrées en France n’aurait pas d’impact sur la population d’oies aux Pays-Bas et donc sur les dégâts agricoles. La Ligue de protection des oiseaux a relayé ces arguments auprès des parlementaires. Si la population d’oies cendrées avait quasiment disparu aux Pays-Bas au début du siècle, elle a beaucoup augmenté, avec une estimation de 439 000 oies estivantes en 2012. Mais seule une partie de ces oies migre vers l’Espagne pour l’hiver. Des études ont montré que 95 % des oies cendrées observées en France viennent de Scandinavie et d’Europe centrale. Un prolongement de la date de chasse en France ne résoudrait donc en aucune façon les problèmes néerlandais.
Comme le rappelle la LPO, à cela s’ajoute que d’un point de vue technique le changement climatique rendant la migration des oies cendrées de plus en plus précoce, le prolongement de la saison de chasse n’a pas de justification puisque de plus en plus d’oies traversent la France avant la fin du mois de janvier, donc pendant la période de chasse.
Outre ces arguments techniques sur l’inutilité du prolongement de la chasse en France pour résoudre le problème de dégâts occasionnés par les oies aux Pays-Bas, s’ajoute l’argument juridique et plus formel. Le commissaire européen à l’environnement, M. Karmenu Vella, a en effet confirmé, au mois de mars dernier, que la dérogation offerte par la directive « Oiseaux » permettant de faire prolonger les dates de chasse ne peut pas s’appliquer à la situation qui nous préoccupe. En France, la jurisprudence est constante puisque les textes autorisant des dates de fermeture après le 31 janvier sont systématiquement jugés non-conformes par les tribunaux saisis par les associations. Aussi notre groupe s’oppose au prolongement des dates de chasse des oies cendrées. À l’instar des associations de préservation de la biodiversité comme la LPO, nous considérons que la décision de la ministre de l’environnement, l’hiver dernier, de ne pas sanctionner le braconnage des oies pendant dix jours après la fin de la période de chasse ne repose sur aucun fondement.
Enfin, je souhaite faire une petite remarque de vocabulaire. Vous employez la jolie formule de « prélèvements cynégétiques » pour parler de la mort d’animaux sauvages. Or il s’agit ici de tuer des animaux sauvages par plaisir, en tout cas dans le cadre d’un loisir puisque personne n’est obligé de le faire – en disant cela, je ne porte pas de jugement. Je pense que les mots doivent dire les choses et qu’il ne faut pas les masquer sous un vocabulaire un peu poétique.
Vous comprendrez donc que nous ne soutenons pas ce rapport qui n’a comme objectif final que de parvenir à la prolongation des dates de chasse aux oies cendrées.
M. Patrice Carvalho. Monsieur le rapporteur, j’ai bien cru que vous alliez prôner l’abstinence et nous demander de ne pas consommer d’oie pendant les fêtes de fin d’année ! (Rires) Mais me voilà rassuré puisque vous demandez de remettre tout le monde autour de la table et de rouvrir le dossier.
Je sais que vous avez l’habitude de prendre des coups. Nous en avons ici l’exemple concret. (Sourires)
Comme Mme Laurence Abeille, je trouve qu’il est dommage de ne pas avoir associé les autres groupes d’études, afin d’avoir un vrai débat sur le fond.
Pour ma part, j’ai défendu la chasse dans d’autres mandats parce que c’est une tradition. Madame Laurence Abeille, si la chasse n’avait pas existé, nous ne serions pas là puisque nos ancêtres seraient morts de faim. (Rires)
Mme Laurence Abeille. Mais cela fait un certain temps !
M. Patrice Carvalho. La chasse existe naturellement. J’en veux pour preuve que les corbeaux, les pies, les rapaces déciment des nichées complètes de passereaux.
M. Jean-Pierre Dufau. Et les lions chassent les gazelles ! (Sourires)
M. Patrice Carvalho. Je suis triste quand je vois un nid de mésanges disparaître en quelques secondes. Mais c’est l’équilibre naturel de la nature.
Le sujet est délicat, en raison de l’antagonisme, pour ne pas dire de l’obscurantisme des uns et des autres. Dès que l’on modifie les dates d’ouverture et de fermeture de la chasse, c’est le tollé des deux côtés. Vous l’avez dit, il est difficile d’asseoir tout le monde autour de la table. Pourtant, il va bien falloir discuter d’une modification éventuelle de la date de fermeture de la chasse à l’oie cendrée en raison de son changement de comportement, lors de sa migration. Avant, on pouvait voir les pigeons ramiers, que l’on appelle ailleurs les palombes, en forêt de Compiègne ou en forêt de Laigue. C’était un pigeon très sauvage. Maintenant, ils sont chez moi, dans les sapins de mon jardin où ils se reproduisent. Ils ne migrent plus autant qu’avant.
C’est la faune et la flore en général qui sont touchées. La semaine dernière, par exemple, j’ai vu une fleur s’épanouir, alors qu’habituellement elle fleurit au printemps.
M. Philippe Plisson, rapporteur. C’est à cause du changement climatique ! (Sourires)
M. Patrice Carvalho. Et du développement de l’urbanisation, des cultures intensives. Et je vous rappelle que la guerre en Yougoslavie a entraîné une invasion de volatiles à grande échelle. (Murmures)
Par ailleurs, on ne sait pas l’incidence que peut avoir l’utilisation de nouvelles technologies, par exemple, de nos téléphones portables, sur la migration de certaines espèces. Bref, il va falloir analyser toutes ces modifications. Vous avez parlé des balises GPS qui ont été posées sur seize oies cendrées. Il faudrait procéder à une analyse plus complète et à plus grande échelle, ce qui nous permettrait de mieux comprendre, donc de mieux agir.
Mme Catherine Beaubatie. Monsieur le rapporteur, je vous remercie pour cet examen exhaustif de la situation de la chasse des oies cendrées en France et en Europe. On voit bien ce matin que ce sujet fait débat.
À vous lire, on peut être naïvement surpris de la rigidité de la Commission européenne sur de possibles dérogations de la directive « Oiseaux ». En effet, la création de quotas ne permettrait-elle pas de résoudre une partie du problème, en instaurant à la fois de la souplesse et un plafond régulateur pour préserver la biodiversité ?
Votre rapport préconise une solution très intéressante : la possibilité de créer des zones de tranquillité et de gagnage aux alentours des foyers naturels des oies cendrées. Cette solution aurait le mérite de réunir à la fois des agriculteurs, des associations environnementales, des chasseurs, vers une démarche écologique et d’accroître ainsi le verdissement de notre agriculture.
Avez-vous échangé avec Bercy ou le ministère de l’agriculture sur l’opportunité de créer des incitations financières allant dans ce sens ?
Mme Sophie Rohfritsch. À mon tour, je tiens à féliciter le rapporteur car son rapport est très complet. Il prend en compte toutes les dimensions du sujet. Je souhaiterais que la question soit élargie à l’ensemble des positions qui sont prises par l’Union européenne au sujet des espèces protégées. Vous le savez, le grand hamster d’Alsace est une espèce protégée. Les moyens financiers très importants qui ont été engagés pour le protéger s’avèrent aujourd’hui efficaces. La solution qui consiste à territorialiser ce type de procédure avec un contrôle plus souple et moins contraignant de l’Union européenne est une bonne idée concernant aussi le hamster d’Alsace.
M. Yannick Favennec. Je suis élu un département rural, la Mayenne, où la chasse est une activité de loisir et sportive très pratiquée. Je veux dire à Mme Abeille que les chasseurs sont des acteurs incontournables de la ruralité. Ils contribuent à son attractivité, au lien social dans nos territoires. Ce sont des régulateurs intelligents de la biodiversité.
La mission d’information devait permettre de répondre à l’épineuse question de la chasse aux oies cendrées au-delà du 31 janvier. Les chasseurs veulent en effet pouvoir pratiquer cette chasse dix jours supplémentaires alors que la directive européenne « Oiseaux » le leur interdit.
Monsieur le rapporteur, vous avez entendu tous les protagonistes de ce dossier, les pro et les anti chasse. Malheureusement, les points de vue des différentes parties semblent toujours aussi éloignés. Je constate d’ailleurs que vos préconisations reposent largement sur une reprise des négociations. Or le dialogue est rompu depuis cinq ans. Vous avez dit tout à l’heure qui n’y a plus de confiance. Les divergences sont telles entre les protagonistes qu’il paraît très difficile d’imaginer qu’un accord pourrait être trouvé. La situation semble inextricable. Faute d’accord, que se passera-t-il après le 31 janvier 2016 ?
Mme Suzanne Tallard. Monsieur le rapporteur, je vous félicite de vous être attaqué à un sujet complexe et conflictuel depuis de nombreuses années.
Votre rapport fait état de connaissances scientifiques intéressantes. On ne peut que partager votre préconisation d’améliorer ces connaissances et de les faire partager. Ce n’est pas le plus facile puisque le dialogue est totalement rompu.
Je suis élue d’une circonscription qui a la chance d’avoir le siège de la LPO. Cela veut dire que je vois les esprits s’échauffer dès la rentrée de septembre pour savoir jusqu’à quand les chasseurs vont pouvoir chasser les oies cendrées. Votre préconisation de reprendre le dialogue sur la base de connaissances scientifiques partagées me semble être une méthode incontournable, mais qui ne donnera pas des résultats dans l’immédiat. Voilà pourquoi, comme M. Yannick Favennec, je vous demande ce qui se passera le 31 janvier 2016, c’est-à-dire lorsque les chasseurs mettront physiquement la pression physiquement sur la LPO.
M. Guillaume Chevrollier. Monsieur le rapporteur, vous nous présentez un rapport de quatre-vingt-douze pages instructif. Il fait référence à un autre rapport de l’ONCFS de 2014 : il ressort de ce rapport que la population d’oies cendrées progresse de manière importante depuis une quarantaine d’années et que les migrations sont de plus en plus précoces. Il s’agit de trouver un équilibre entre la gestion cynégétique et la protection des espèces. J’en profite pour dire que les chasseurs sont des protecteurs de la biodiversité. La question de la clôture de la chasse au 31 janvier reste posée. Vous avez évoqué la directive de 1979 qui doit s’adapter aux réalités d’aujourd’hui. Quelle est la place du principe de subsidiarité pour la gestion des oies cendrées ?
Mme Catherine Quéré. Je remercie M. Philippe Plisson pour son implication dans ce dossier qui a pu faire sourire certains de nos collègues. Mais pour être élue du même département que Mme Suzanne Tallard et voisine de celle du rapporteur, je confirme que chaque année, à partir du mois de septembre, et surtout au mois de janvier, les esprits s’échauffent. Comme l’a dit M. Philippe Plisson, il y a des positions de passion plutôt que de raison. Je pense que la passion existe de tous les côtés.
J’ai eu le plaisir d’accompagner le rapporteur aux Pays-Bas. Je n’ai pas très bien compris la position des représentants de BirdLife qui a été reprise par Mme Laurence Abeille, qui n’est plus là : ils ne sont pas choqués lorsque l’on rassemble les oies dans des enclos, qu’on les affole et qu’on les gaze, que l’on détruit les œufs en les perçant et en les secouant, mais ils estiment que les chasseurs tuent par plaisir. Le plaisir de la chasse, ce n’est pas seulement la passion de tuer, c’est aussi tout l’environnement qu’il y a autour. Je considère que le plaisir n’est pas un péché, bien au contraire. (Rires)
Est-il possible de remettre en cause l’enquête de l’ONCFS ? J’ai été très étonnée que l’on tire des conclusions alors que l’expérimentation a été faite sur seize oies seulement. Cette enquête scientifique a fait beaucoup de tort.
Je partage totalement la position des différents ministres de l’environnement qui se sont tournés vers l’AEWA. Mais je me demande dans combien d’années on parviendra à un résultat.
Je pense qu’il faut totalement contester cette directive de 1979 qui est obsolète. En effet, elle précise qu’il faut protéger des oiseaux en phase de disparition. Or les oies cendrées sont devenues invasives. Il y a donc là une contradiction que l’on devrait pouvoir dénoncer. La position de l’AEWA prévaudra-t-elle sur celle de la directive ?
Enfin, vous estimez qu’il faudrait permettre aux oies cendrées de stationner un peu dans notre pays. Or on a vu quels dégâts occasionne leur sédentarisation aux Pays-Bas. Ne serait-ce pas de la folie d’organiser dans notre pays la sédentarisation, alors que la Hollande ne sait plus comment s’en dépêtrer ?
M. Charles-Ange Ginesy. À mon tour, je veux féliciter le rapporteur pour la qualité de son rapport sur un sujet qui peut sembler léger mais qui a des conséquences financières très importantes, tant sur les plans national qu’européen.
Je suis élu d’une zone rurale où des espèces gênent l’activité agropastorale. J’ai interrogé Mme la ministre sur le problème du loup en souhaitant que le plan loup soit exécuté au pied de la lettre et que l’État ne mette pas un coup d’épée dans l’eau alors que, là aussi, les enjeux financiers sont importants.
Ce rapport a le mérite d’ouvrir une brèche sur les difficultés qui sont les nôtres eu égard aux relations entre les États membres et la directive « Oiseaux » qui date de 1979 même si elle a été révisée depuis. Elle n’a eu de nouveaux fondements qu’à partir de 2009. Mais en 2015, nous nous posons à nouveau la question, tant pour le grand hamster d’Alsace, que le loup ou les oies cendrées.
Ce rapport doit permettre d’imposer à l’Europe une révision régulière en la matière. Que pensez-vous de cette piste, puisque nous n’arrivons pas à obtenir des dérogations, ou l’application de certains textes de la convention de Berne en particulier ? En même temps que nous demandons la révision de cette directive, ce serait peut-être le bon moment pour que la France intervienne pour demander des révisions régulières.
On le voit, le réchauffement climatique fait bouger les lignes. Les espèces sont en mutation permanente. Je demande que l’on revoie régulièrement la condition des espèces protégées.
M. Jean-Pierre Dufau. Monsieur le président, je vous remercie de m’avoir invité à participer aux réunions de la commission du développement durable dont je ne fais pas partie puisque je suis membre de la commission des affaires étrangères. Cela dit, je suis membre du groupe d’études chasse et territoires, et je me suis rendu en Hollande.
Beaucoup de choses intéressantes ont déjà été dites. Ce qui différencie la France des autres pays européens, c’est que le droit de chasse a fait partie des revendications de la Révolution française. Ce fut l’une des doléances le plus souvent exprimées. Aujourd’hui, les choses ont évolué. Mais il n’empêche que certains pensent qu’on leur retire des droits.
L’oie cendrée est une espèce dite migratrice. Or on nous explique que nombre d’entre elles sont devenues sédentaires. Cela veut dire que la situation a changé depuis la directive de 1979. Cette espèce n’est pas en voie de disparition. Au contraire elle prolifère, à tel point qu’en Hollande on est obligé de la gazer et de secouer les œufs après la reproduction.
M. Jean-Claude Buisine. Eh oui ! C’est la réalité !
M. Jean-Pierre Dufau. La directive précise qu’il ne faut pas porter atteinte à la période prénuptiale, mais ensuite rien n’empêche de détruire les œufs. Il faut donc revoir les choses. On nous a même expliqué que les oies gazées étaient données en priorité aux associations caritatives et certains prétendent qu’un commerce illicite a été organisé.
Voilà ce que je souhaitais dire, pour que les défenseurs de la nature et les chasseurs soient informés de la réalité.
Effectivement, la notion d’espèce protégée ne tient plus. Et la période de reproduction est extrêmement controversée. On nous explique que la quasi-totalité des oies sont passées avant le 31 janvier. C’est pourquoi je ne vois pas en quoi une dérogation de dix jours porterait atteinte à l’espèce. D’autres prétendent, et je suis plutôt de cet avis, que c’est dans la deuxième décade, voire la troisième décade du mois de février que la majorité des oies passent. D’où la solution de compromis de fixer la fermeture de la chasse au 10 février qui constitue un équilibre. Il s’agit de dix jours. Qui y a-t-il d’extraordinaire là-dedans ?
L’ensemble des propositions qui sont faites ici permettraient de traiter le problème à long terme. La dérogation à l’article 9 de la directive permettrait de régler la question à court terme et constituer le premier élément d’une pacification. Puis, tout le monde pourrait s’asseoir autour d’une même table pour régler l’ensemble des problèmes que pose la directive et le cas d’autres espèces que l’oie cendrée qui n’est pas en péril.
M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je précise que j’ai donné un droit de tirage spécial à M. Jean-Pierre Dufau qui intervenait pour la première fois dans cette commission.
M. Jean-Claude Buisine. Monsieur le président, je vous remercie d’avoir inscrit ce sujet à l’ordre du jour de la commission du développement durable. Je tiens à féliciter le rapporteur pour son excellente analyse. Ce rapport sera très utile dans les semaines et les années à venir.
Il ne faut pas opposer les écologistes et les chasseurs. Les chasseurs sont les premiers écologistes, en particulier sur le littoral français. Ils entretiennent les espaces ruraux, les zones humides. Je tiens à souligner le travail qu’ils réalisent tout au long de l’année sur le territoire, en liaison avec le Conservatoire du littoral.
Des chasses protégées, raisonnées sont mises en place sur le littoral du Nord-Pas-de-Calais et de la Picardie. Les chasseurs installent des huttes pédagogiques. Il n’est pas question de chasser pour le plaisir, mais pour réguler une population d’oies. Les chasseurs ne méritent pas les quolibets que l’on entend quelquefois. Ce sont des gens responsables qui entretiennent le territoire et protègent la nature. Ils méritent d’être respectés.
Le rapport qui nous est présenté est très exhaustif. Je souhaite que le dialogue se poursuive et que les négociations reprennent avec tous les partenaires.
La directive « Oiseaux » a fait son temps. Elle mérite aujourd’hui d’être révisée. Toutefois, les arcanes administratifs européens mettent beaucoup de temps à se mettre en mouvement. Je le regrette très sincèrement, car c’est surtout l’annexe 2 de cette directive qui pose problème aujourd’hui. Il faudrait pouvoir la modifier dans des délais raisonnables pour répondre aux demandes légitimes des chasseurs.
Dans son introduction, M. Plisson note que ce débat perturbe le climat social. Je dirais même qu’il pourrit la situation et c’est dommage. Cela fait dix ans que cela dure. Je souhaite que le climat s’apaise dans les semaines et les mois à venir et qu’une solution soit trouvée le plus rapidement possible.
M. Guy Bailliart. En arrivant ce matin en commission, j’étais plutôt sceptique. Je ne pensais pas que ce sujet m’intéresserait beaucoup. Mais ce rapport est très intéressant car il est significatif de la façon dont nous gérons l’espace naturel.
Toutes les propositions de ce rapport sont excellentes. Elles pourraient même s’appliquer à toutes les autres espèces. En réalité, il s’agit de gérer la ressource animale. Les réactions passionnelles en la matière proviennent du fait que chacun pense être dépositaire de la vie de la nature. Les chasseurs comme les défenseurs des oiseaux disent défendre la nature. Or, en Europe, la nature n’existe plus. Cela fait très longtemps que tout a été géré par l’homme. Les propositions du rapporteur ressemblent beaucoup aux préconisations faites en ce qui concerne la gestion des parcs naturels régionaux selon lesquelles il faut gérer l’espace. On croit qu’il suffit d’analyser les choses tous les quinze ou vingt ans pour prendre des décisions. Mais ce n’est pas du tout ainsi que cela se passe.
En Grande-Bretagne, la chasse est gérée de façon privée. De ce fait, les Britanniques n’ont pas besoin de s’embarrasser de toutes ces préconisations. En effet, lorsqu’ils ont l’impression que l’espèce diminue, ils la chassent moins. Au contraire, quand elle augmente ils la chassent davantage. C’est une activité touristico-économique qui est gérée comme telle.
Le plus important, c’est de reprendre les négociations. Comment faire pour que les gens comprennent que nous gérons l’espace ? Pour ma part, je vis en zone rurale et je ne suis pas chasseur. Je constate que les chasseurs se débrouillent très bien pour gérer leur chasse. Ils prennent garde à ne pas tuer ce qu’il ne faut pas.
Je pense que c’est dans une cogestion que l’on peut parvenir à quelque chose. Sinon, les problèmes se reposeront chaque année. On pourra changer les dates d’une semaine ou deux, rien n’y fera car il y a toujours une frontière quelque part. Les chasseurs comme les défenseurs des oiseaux savent très bien que s’il n’y a pas d’oiseaux il n’y a rien à chasser ni rien à défendre.
M. Philippe Plisson, rapporteur. Je remercie mes collègues pour leurs félicitations unanimes et tous ceux qui ont participé à ces auditions. Je souligne que tous les députés de cette commission ont été convoqués à toutes les auditions et invités à participer. Par exemple, Mme Geneviève Gaillard a participé aux auditions. Elle devait se rendre avec moi aux Pays-Bas ; malheureusement, elle n’a pas pu venir pour des raisons personnelles. Cela dit, elle a été partie prenante de la démarche. Il n’y a eu aucun ostracisme.
M. Jean-Jacques Cottel demande quelles solutions proposer pour 2016. Comme je ne suis pas ministre en charge de l’environnement, je ne signe pas les arrêtés. J’ai déjà interrogé la ministre qui s’engage à trouver une solution qui pourrait ressembler à celle de l’année dernière – même si cette décision a été controversée – en attendant les solutions juridiques.
M. Jean-Pierre Dufau. C’est une solution d’attente.
M. Philippe Plisson, rapporteur. En Hollande, nous avons rencontré toutes les parties prenantes avec lesquelles nous avons eu un dialogue constant. Le représentant de la LPO néerlandaise nous a dit qu’il ne savait pas pourquoi il était là et que de toute façon il ne serait pas d’accord avec nous. Cela dit, nous avons discuté ensemble pendant une heure. Nous lui avons demandé comment il soutenait ces destructions massives qui se font dans des conditions plutôt difficiles – c’est le dioxyde de carbone qui permet de gazer les oies cendrées. Nous avons vu un film qui montre des petits oiseaux parqués dans les cercles où ils sont nés, derrière des grillages avec l’impossibilité de les franchir pour ne pas aller dans les cultures. Bref, ils crèvent de faim derrière les grillages. On est loin du bien-être animal. Comme l’a dit Mme Laurence Abeille, la chasse c’est le plaisir de tuer alors que les Hollandais tuent par nécessité.
Je partage l’analyse de M. Jean-Marie Sermier quant aux oiseaux nuisibles. Je précise que les 12 millions d’euros qui servent à éradiquer les oies cendrées aux Pays-Bas ne sont pas des fonds européens mais néerlandais. En revanche, le FEADER paie pour la mise en culture puisque les provinces mettent en place des cultures spécifiques pour favoriser la présence des oies. Une solution pourrait être de lancer sur notre territoire les mêmes programmes d’accueil des oies.
Bertrand Pancher a parlé de l’évolution climatique que nous constatons tous et de la nécessité de réguler les espèces. Il se demande s’il faut des aires de gagnage en France pour accueillir les oies pour les tuer, ce qui lui semble un peu compliqué. En réalité, nous proposons simplement de partager la tâche à la fois d’accueil et de régulation des oies. Si la France prend sa part pour l’accueil des oies, elle prendra sa part pour leur régulation. Et tout le monde y trouvera son compte. On serait alors dans une démarche gagnant-gagnant.
Il propose la collaboration entre chasseurs et associations de défense de l’environnement qui existe déjà sur le terrain et qui pourrait peut-être être mise en œuvre au niveau national. Des discussions ont déjà eu lieu en 2009, mais elles ont viré à l’aigre. Aujourd’hui, un certain nombre de protagonistes sont les mêmes et ils campent toujours sur leurs postures. Tous les efforts que j’ai effectués depuis plusieurs années pour rassembler les gens autour d’une même table se sont toujours soldés par un refus systématique de la LPO. Les autres sont d’accord. En disant cela, je ne porte pas de jugement de valeur. J’ai de bons rapports avec Allain Bougrain-Dubourg mais il ne veut rien savoir en la matière. Il est bloqué sur sa position qu’il ne discutera pas. J’espère qu’il évoluera parce que c’est nécessaire.
Mme Laurence Abeille a évoqué la manière dont les chasseurs appréhendent la problématique. On voit bien que notre collègue est urbaine parce que, pour les chasseurs, la chasse est un marqueur de leur comportement et de leur vie. Ce loisir qui date de la Révolution, comme l’a rappelé M. Jean-Pierre Dufau, est très ancré. Certains ont des compétences avérées sur la chasse qui leur permettent d’être reconnus dans un territoire et dans une société ; ils passent des jours et des nuits à travailler à leurs tonnes. Il ne faut donc pas prendre cette activité à la légère et la balayer d’un revers de main.
M. Jean-Claude Buisine. Très bien !
M. Philippe Plisson, rapporteur. Dans mon territoire, une grande partie des 33 % d’électeurs qui votent Front national sont des chasseurs car ils ne comprennent pas les décisions qui sont prises au niveau de l’Europe, ce qui entraîne un rejet de la politique. Même si on aime beaucoup les oies et des animaux, ne pourrait-on pas trouver des solutions de compromis qui nous permettent de ne plus rencontrer de telles attitudes extrêmement nuisibles à la démocratie et à l’Europe ?
M. Patrice Carvalho a raison : les palombes migrent moins. Les oies ne sont pas les seules à avoir changé de comportement en raison notamment du changement climatique. Il faudrait revoir les dates de la chasse à la palombe.
Mme Catherine Beaubatie nous a parlé de la rigidité de la Commission. Elle applique tout simplement les textes. Le directeur chargé des directives « Oiseaux » et « Habitas » au sein de la Commission européenne et le responsable des migrations que nous avons rencontrés sont arrivés avec le rapport de l’ONCFS sous le bras : c’est un rapport scientifique reconnu ; mais c’est la conclusion du rapporteur qui a abouti aux conséquences que l’on connaît. Le directeur nous a dit que, comme le rapport stipule que les oies commencent à migrer dès le 20 janvier et que la Cour européenne de justice a sacralisé cette parole, il devrait fermer la chasse à partir du 20 janvier s’il appliquait strictement cette conclusion. Nous lui avons répondu qu’il fallait surtout éviter cela sinon le remède serait pire que le mal. Tant que nous en restons à l’application rigide de cette directive au premier oiseau qui migre, on ne peut pas bouger. En fait, si on n’aboutit pas un accord local, la seule solution consiste à modifier la directive en l’adaptant au bon sens et à la situation des espèces.
Mme Sophie Rohfritsch a fait un parallèle avec le hamster d’Alsace et souhaite une décentralisation de la directive. Le rapport propose plutôt la décentralisation de l’application de la directive. Certes, c’est difficile car on ouvrirait la boîte de Pandore. Mais dans certains territoires, compte tenu de la présence des espèces, la date de fermeture de la chasse pourrait être différente selon le territoire, comme cela s’est déjà fait pour la date d’ouverture, même si je sais que ceux qui n’auraient pas obtenu la bonne date monteraient au créneau. En tout cas, ça peut être une solution.
M. Yannick Favennec souhaite la reprise des négociations. Nous ne demandons pas mieux, en particulier au niveau local. Mais encore faut-il y avoir des interlocuteurs. Or, comme je vous l’ai déjà dit, tous les interlocuteurs ne sont pas disponibles. Même si elle n’est pas très enthousiaste, la Fédération des chasseurs serait d’accord pour s’asseoir autour de la table, ainsi que l’ONCFS. Je dois dire que l’association Humanité et biodiversité n’y est pas opposée. Le blocage provient uniquement de la LPO qui, à ce jour, m’a opposé un non ferme et définitif.
Monsieur Guillaume Chevrollier, nous sommes ouverts à la discussion. Encore faut-il pouvoir le faire.
Madame Catherine Quéré, on ne peut pas remettre en cause l’étude scientifique de l’ONCFS car elle a été reconnue par tous. C’est la conclusion du rapporteur qui prête à discussion ; mais, en tout état de cause, elle lui appartient. Nous avons proposé de réviser la directive 79/409.
Non, le rapport de l’AEWA ne peut faire évoluer la directive. Il indique seulement l’état de l’espèce et la manière dont on peut la gérer. Le directeur chargé de ce dossier au sein de la Commission européenne m’a répondu que cela ne changeait rien à la situation et que les règles actuelles continueraient à s’appliquer. Seule la remise à plat de la directive permettrait de modifier les choses. Si le premier oiseau migre le 20 janvier tandis que tous les autres le font le 10 février, comme c’est souvent le cas, on pourrait fixer la date de fin de chasse au pic de migration. En tout cas c’est une des solutions que nous proposerions si la directive était rediscutée.
Monsieur Charles-Ange Ginesy, on peut effectivement faire un parallèle entre la situation de l’oie cendrée et celle du loup puisque maintenant il est invasif. Même si c’est une espèce protégée, il faut se poser la question de sa prolifération et des méthodes pour la réguler.
M. Jean-Pierre Dufau, qui est un ardent défenseur des chasseurs, a appelé au dialogue. Effectivement, il faut essayer de rétablir le dialogue mais il faudrait que chacun y mette du sien et éviter de continuer à se regarder en chien de faïence. Cela se fait déjà sur le terrain puisque les chasseurs travaillent avec les écologistes pour protéger les espèces et les habitats. Il n’y a donc aucune raison qu’on ne puisse pas le faire au niveau national si chacun sort de ses postures.
M. Jean-Claude Buisine, qui a participé activement à toutes les auditions et à nos déplacements, souhaite la révision de la directive. Je ne peux qu’y souscrire. Je le répète, c’est l’une de nos préconisations.
Enfin, M. Guy Bailliart nous a parlé de réactions passionnelles. Comme je l’ai dit, c’est toujours la passion qui l’emporte sur la raison. Il faudrait que chacun fasse preuve d’un peu de raison pour que l’on puisse reprendre les négociations. Oui, à la cogestion et non aux postures et à la défense de fonds de commerce qui sont nuisibles à l’évolution des espèces et surtout au dialogue social qui malheureusement est bloqué aujourd’hui sur ce sujet.
M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je tiens à remercier M. Philippe Plisson pour l’excellent travail qu’il a réalisé, mais aussi notre directeur-adjoint, Thierry Vanel, ingénieur agronome de formation, qui a travaillé sur ce dossier. Il nous revient d’autoriser la publication du rapport.
*
La Commission autorise la publication du rapport d’information.
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
Par ordre chronologique
Fédération nationale des chasseurs (FNC)
– M. Alain Durand, vice-président délégué
– M. Charles Lagier, conseiller juridique
Fédération européenne des associations de chasse et conservation (FACE)
– M. Benoît Chevron, vice-président
– M. Jean-Pierre Arnauduc, directeur du service technique de la FNC
Oiseaux Migrateurs du Paléarctique Occidental (OMPO)
– M. Jacques Trouvilliez, président du Conseil Scientifique OMPO, secrétaire exécutif de l’AEWA
– M. Thibaut Powolny, chef de projet OMPO
Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) - Direction des études et de la recherche
– M. Vincent Schricke, chef de projet responsable de l’équipe Anatidés, auteur du rapport « Amélioration des connaissances sur l’oie cendrée en France »
Institut Scientifique Nord Est Atlantique (ISNEA)
– M. Willy Schraen, président
– M. Mathieu Boos, docteur en sciences écologiques
Ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie, Direction de l’eau et de la biodiversité
– M. Paul Delduc, directeur général de l’aménagement, du logement et de la nature
– M. Christian Le Coz, sous-directeur de la protection et de la valorisation des espèces et de leur milieu
– Mme Mireille Celdran, chef du bureau de la chasse et de la pêche à la direction de l’eau et de la biodiversité
France Nature Environnement*
– Mme Dominique Py, administratrice de FNE en charge de la chasse
Ligue pour la protection des oiseaux (LPO)
– M. Yves Verilhac, directeur général LPO France
– M. Bernard Deceuninck, scientifique spécialiste des oies
Muséum national d’histoire naturelle - Service du Patrimoine Naturel
– M. Jacques Comolet-Tirman, chargé de mission « expertise et inventaires avifaune »
Groupement des associations de sauvaginiers de l’Aquitaine – Gassaua
– M. Jean-Francis Séguy, président
Humanité et Biodiversité
– M. Christophe Aubel, directeur
Union nationale des associations de chasseurs des oiseaux migrateurs (UNACOM)
– M. Christian Minville, président
– M. Éric Sicard, vice-président
– M. Nicolas Lottin, vice-président
– Maître Bruno Poulain, avocat
Conseil d’État
– Mme Suzanne Von Coester, maître des requêtes
Déplacement à Bruxelles le 22 septembre 2015
Parlement européen
– Mme Annie Schreijer-Pierik, députée européenne, secrétaire générale de l’intergroupe « Biodiversity, Hunting, Countryside »
– MM. Sander Smit et Cornelis Reinardus Bos, conseillers de Mme Schreijer-Pierik
Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne
– M. Gilles Morellato, conseiller chargé du climat, de la biodiversité, de l'eau, du développement durable et du contentieux,
– Mme Aude Charrier, conseillère chargée de l'automobile, des carburants, des substances chimiques et de l'économie verte
Fédération européenne des associations de chasse et conservation (FACE)
– M. Filippo Segato, secrétaire général
– M. Alexander Griffin, directeur chargé de la conservation, expert en biologie des oiseaux migrateurs
Commission européenne, direction générale de l'environnement
– M. Stefan Leiner, directeur chargé de la biodiversité
– M. Ludovic Le Maresquier, chargé de politiques
Déplacement aux Pays-Bas les 23 et 24 septembre 2015
Gestion des populations d’oies cendrées dans la province de Zélande
Rencontre avec les différentes organisations représentées dans l’Unité régionale de gestion de la faune (Faunabeheereenheid Zeeland, FBE) :
– Fédération des propriétaires fonciers (FPG) : M. Seijdlitz, secrétaire de la FBE Zélande
– Office des Forêts (Staatsbosbeheer) : M. Peter Maas
– Section méridionale du syndicat agricole (LTO) : M. Martin Dekker
– Autorité provinciale de la Zélande : M. Peter Sinke
– Fondation pour la protection de la nature (Zeeuws Landschap) : S. Haaij
– Association de protection de la nature (Natuurmonumenten) : H. Mester
Politiques publiques pour la gestion des populations d’oies cendrées
Province de Frise :
– M. Klaas Talma, responsable protection de la nature à l’autorité provinciale
– M. Wopke Veenstra, élu provincial du parti frison régionaliste de gauche
Province de la Hollande du Nord :
– Mme Ilse Zaal, élue provinciale, présidente de la section provinciale du parti libéral de gauche (D66)
Province de la Hollande du Sud :
– Mme Jacqueline van Hoey Smith, vice-présidente de l’unité provinciale de gestion de la faune
Province d’Utrecht :
– M. Jeroen Nussl, secrétaire adjoint de l’unité provinciale de gestion de la faune
– Mme Annegien Helmens, responsable protection des espèces, et M. Theo de Gelder, responsable de la chasse et de la gestion de la faune sauvage du ministère de l’Économie chargé de l’agriculture et de la nature
– Mme Maaike van Asten, directrice intérimaire de la sécurité de l’aviation civile au ministère de l’infrastructure et de l’environnement, et M. Bart Straver, responsable sécurité de l’aéroport de Schiphol
Aspects scientifiques, cynégétiques, agricoles et environnementaux
– M. Dick Melman, écologue auprès d’Alterra, Institut scientifique de Wageningen UR
– M. Laurens Hoedemaker, président de la Fédération royale des chasseurs (KNJV), et M. rnoud Meijering, lobbyist du KNJV
– Mme Meta Rijks, écologue à Staatsbosbeheer, Office des forêts
– M. Fred Wouters, directeur de l’association de protection des oiseaux Vogelbescherming
– M. Harry Kager de la Fédération syndicale agricole LTO Nederland
Ambassade de France
– M. Laurent Pic, ambassadeur
– M. Bernard Boidin, conseiller économique
– M. Dieuwe de La Parra, attaché agriculture
Rencontre avec les différentes organisations représentées dans l’Unité régionale de gestion de la faune (Faunabeheereenheid Zeeland, FBE) :
Colloque sur la procédure de révision des directives européennes
– M. Karl-Heinz Florenz, député européen, président de l’intergroupe « Biodiversity, Hunting, Countryside » du Parlement européen
– M. Nicola Notaro, chef d’unité, direction générale Environnement de la Commission européenne
– M. Seger van Voorst Tot Voorst, directeur du Stichting Het Nationale Park De Hoge Veluwe
– M. Wouter Langhout, conseiller sur la politique Nature de l’Union européenne, Birdlife
– M. Filippo Segato, secrétaire général de la FACE
* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.
ANNEXE 1
Arrêté du 19 janvier 2009 relatif aux dates de fermeture de la chasse
aux oiseaux de passage et au gibier d'eau
Version consolidée
Le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire,
Vu la directive 79/409/CEE du Conseil du 2 avril 1979 modifiée concernant la conservation des oiseaux sauvages, notamment l'article 7, paragraphe 4 ;
Vu le code de l'environnement, notamment les articles L. 424-2 à L. 424-6 et R. 424-9 ;
Vu le décret n° 2003-1112 du 24 novembre 2003 portant publication de l'accord sur la conservation des oiseaux d'eau migrateurs d'Afrique-Eurasie ;
Vu l'avis du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage en date du 16 décembre 2008,
Arrête :
La fermeture de la chasse aux oiseaux de passage et au gibier d'eau est fixée comme suit :
ESPÈCES |
DATES DE FERMETURE |
Canards de surface : Canard colvert. Canard pilet. Canard siffleur. Canard souchet. Sarcelle d'été. Sarcelle d'hiver. Rallidés : Foulque macroule. Poule d'eau. Râle d'eau. Alaudidés : Alouette des champs. |
31 janvier |
Canards plongeurs : Eider à duvet (*). Fuligule milouinan (*). Harelde de Miquelon (*). Macreuse noire (*). Macreuse brune (*). |
10 février |
Oies : Oie cendrée. Oie rieuse. Oie des moissons. Canards plongeurs : Fuligule milouin. Fuligule morillon. Garrot à œil d'or. Nette rousse. |
31 janvier |
Limicoles : Barge à queue noire. |
31 janvier |
Colombidés : Pigeon biset. |
10 février |
Turdidés : Merle noir. |
10 février |
Caille des blés. |
20 février |
(*) Du 1er au 10 février, la chasse de ces canards ne peut se pratiquer qu'en mer, |
Par exception au tableau ci-dessus, la chasse des grives litorne, musicienne, mauvis et draine, ainsi que celle du merle noir, ferme le 20 février dans les départements et les cantons suivants : Alpes-de-Haute-Provence, Hautes-Alpes, Alpes-Maritimes, Ardèche (cantons de Bourg-Saint-Andéol, des Vans, de Vallon-Pont-d'Arc), Aude, Aveyron, Bouches-du-Rhône, Haute-Corse, Corse-du-Sud, Drôme (dans les cantons de Pierrelatte, Saint-Paul-Trois-Châteaux, Grignan, Nyons, Buis-les-Baronnies, Séderon, Rémuzat, La Motte-Chalançon, Luc-en-Diois, Châtillon-en-Diois), Gard, Hérault, Lozère, Pyrénées-Orientales, Tarn, Var et Vaucluse.
Sur ces territoires, la chasse des grives et du merle ne peut être pratiquée du 10 au 20 février qu'à poste fixe matérialisé de main d'homme.
Par exception au tableau ci-dessus, la chasse des pigeons ramiers est autorisée du 11 au 20 février, à poste fixe matérialisé de main d'homme.
Dans le département du Gers, elle ne peut être pratiquée pendant cette période qu'au tir au posé dans les arbres à l'aide d'appelants vivants.
Dans les départements de l'Ariège, de l'Aveyron, de la Dordogne, de la Haute-Garonne, de la Gironde, des Landes, du Lot, de Lot-et-Garonne, des Pyrénées-Atlantiques, des Hautes-Pyrénées, du Tarn et de Tarn-et-Garonne, elle ne peut être pratiquée pendant cette période qu'au posé dans les arbres à l'aide d'appelants vivants ou artificiels.
ANNEXE 2
Arrêté du 24 mars 2006 relatif à l'ouverture de la chasse aux oiseaux de passage et au gibier d'eau
(version consolidée)
La ministre de l'écologie et du développement durable,
Vu le décret n° 2003-1112 du 24 novembre 2003 portant publication de l'accord sur la conservation des oiseaux d'eau migrateurs d'Afrique-Eurasie ;
Vu le code de l'environnement, notamment les articles L. 424-2, L. 429-1, R. 424-9 et R. 429-1 ;
Vu l'avis du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage en date du 20 mars 2006,
Arrête :
L'ouverture de la chasse aux oiseaux de passage est fixée comme suit :
ESPÈCES |
DATES D'OUVERTURE |
Phasianidés |
|
Caille des blés |
Dernier samedi d'août |
Columbidés |
|
Pigeon biset |
Ouverture générale |
Pigeon colombin |
Ouverture générale |
Pigeon ramier |
Ouverture générale |
Tourterelle des bois |
Dernier samedi d'août (*) |
Tourterelle turque |
Ouverture générale |
Limicoles |
|
Bécasse des bois |
Ouverture générale |
Alaudidés |
|
Alouette des champs |
Ouverture générale |
Turdidés |
|
Grive draine |
Ouverture générale |
Grive litorne |
Ouverture générale |
Grive mauvis |
Ouverture générale |
Grive musicienne |
Ouverture générale |
Merle noir |
Ouverture générale |
(*) Avant l'ouverture générale, la chasse de la tourterelle des bois ne peut être pratiquée qu'à poste fixe matérialisé de main d'homme et qu'à plus de trois cents mètres de tout bâtiment. |
Article 2
L'ouverture de la chasse au gibier d'eau est fixée comme suit :
ESPÈCES |
DATES D'OUVERTURE | ||
Ouverture anticipée |
Cas général | ||
Territoires décrits au paragraphe (**) ci-dessous |
Autres territoires mentionnés à l'article L. 424-6 du code de l'environnement |
Reste du territoire | |
Oies |
|||
Oie cendrée |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Oie des moissons |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Oie rieuse |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Canards de surface |
|||
Canard chipeau |
Premier samedi d'août à 6 heures |
15 septembre à 7 heures |
15 septembre à 7 heures |
Canard colvert |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Canard pilet |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Canard siffleur |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Canard souchet |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Sarcelle d'été |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Sarcelle d'hiver |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Canards plongeurs |
|||
Eider à duvet |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Fuligule milouin |
Premier samedi d'août à 6 heures |
15 septembre à 7 heures |
15 septembre à 7 heures |
Fuligule milouinan |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Fuligule morillon |
Premier samedi d'août à 6 heures |
15 septembre à 7 heures |
15 septembre à 7 heures |
Garrot à œil d'or |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Harelde de Miquelon |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Macreuse noire |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Macreuse brune |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Nette rousse |
Premier samedi d'août à 6 heures |
15 septembre à 7 heures |
15 septembre à 7 heures |
Rallidés |
|||
Foulque macroule |
Premier samedi d'août à 6 heures |
15 septembre à 7 heures |
15 septembre à 7 heures |
Poule d'eau |
Premier samedi d'août à 6 heures |
15 septembre à 7 heures |
15 septembre à 7 heures |
Râle d'eau |
Premier samedi d'août à 6 heures |
15 septembre à 7 heures |
15 septembre à 7 heures |
Limicoles |
|||
Barge à queue noire |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Barge rousse |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Bécasseau maubèche |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Bécassine des marais |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier samedi d'août à 6 heures (***) |
Ouverture générale |
Bécassine sourde |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier samedi d'août à 6 heures (***) |
Ouverture générale |
Chevalier aboyeur |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Chevalier arlequin |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Chevalier combattant |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Chevalier gambette |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Courlis cendré |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Courlis corlieu |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Huîtrier pie |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Pluvier doré |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Pluvier argenté |
Premier samedi d'août à 6 heures |
Premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures |
Ouverture générale |
Vanneau huppé |
ouverture générale |
ouverture générale |
ouverture générale |
(**) Domaine public maritime des départements côtiers de la façade maritime de l'Atlantique, de la Manche et de la mer du Nord, à l'exception des étangs et des plans d'eau salés reliés ou non à la mer. Partie de l'estuaire de la Gironde qui comprend la partie du domaine public fluvial qui est située entre le domaine public maritime et la limite de salure des eaux et qui inclut l'estran et les îles jusqu'à la limite des plus hautes eaux avant débordement. Étangs suivants de la Gironde et des Landes : étangs du Porge, étang de Hourtin-Carcans, étang de Cazaux et de Sanguinet, étang du Cousseau, étang de Lacanau, étang de La Forge-Uza, étang de Moïsan, étangs de la Maillouèyre, étang des dunes domaniales de Moliets et Maa, lac de Moliets, lac de la Prade, lac de Hardy, lac Blanc, étang Noir, étang d'Irieu, lac du Turc, étang de Garros, étang d'Aureilhan, étang de Parentis-Biscarrosse, étang de Pontenx-les-Forges, étang de Léon et étang de Soustons. Hors du domaine public maritime, sur le canton de La Teste : les parties soumises aux marées, du domaine du Rocher, du domaine de Bayonne et des grands prés du Teich ; Hors du domaine public maritime, sur le canton d'Audenge : les parties soumises aux marées des îlots de Biganos. (***) Jusqu'au premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures, sur les seules prairies humides et les |
Article 3
Par exception aux dispositions des articles 1er et 2, dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, la chasse aux oiseaux de passage et au gibier d'eau est ouverte à partir de l'ouverture générale de la chasse dans ces départements. Cette exception ne s'applique pas au vanneau huppé.
Par exception aux dispositions de l'article 2, dans le département de l'Hérault la chasse à la foulque macroule est ouverte le premier jour de la troisième décade d'août à 6 heures.
Par exception aux dispositions de l'article 2, dans le département de la Gironde, la chasse des canards de surface, des canards plongeurs, des oies et des limicoles (excepté le vanneau huppé) est ouverte le premier jour de la deuxième décade d'août, à 6 heures, sur les territoires mentionnés à l'article L. 424-6 du code de l'environnement des cantons de Saint-Vivien-de-Médoc, Lesparre-Médoc, Saint-Ciers-sur-Gironde et Blaye. Le tir est limité sur la nappe d'eau depuis l'intérieur des installations de chasse avec fusil déchargé à l'aller et au retour de la tonne.
Par exception aux dispositions de l'article 2, dans le département de l'Hérault, la chasse des oies, des canards de surface, des canards plongeurs, des rallidés et des limicoles (excepté le vanneau huppé) est ouverte le 15 août à 6 heures :
-sur le domaine public maritime amodié aux associations de chasse maritime (ACM) suivantes : lot 1 : ACM d'Agde à Vendres ; lot 2 : ACM du bassin de Thau ; lot 3 : ACM de Frontignan ; lot 4 : ACM de Villeneuve-lès-Maguelone ; lot 5 : ACM de l'étang de l'Or et les marais attenants à ces lots ;
-sur les étangs et marais non asséchés, salés ou saumâtres suivants : étangs palavasiens Vic, Méjean et Grec.
Par exception aux dispositions de l'article 2, dans le département du Gard, la chasse des oies, des canards de surface, des canards plongeurs, des rallidés et des limicoles (excepté le vanneau huppé) est ouverte le 15 août à 6 heures sur la partie du domaine public de l'étang de l'Or amodiée à l'Association des chasseurs et propriétaires d'Aigues-Mortes.
Dans les départements de l'Hérault et du Gard, dans les secteurs énumérés ci-dessus, l'emploi des chiens est interdit du 15 août au premier jour de la troisième décade de ce mois.
Par exception aux dispositions de l'article 2, dans le département de l'Ain, la chasse aux canards de surface, aux canards plongeurs, aux oies et aux limicoles, excepté le vanneau huppé est ouverte le 1er dimanche de septembre à 8 heures sur les étangs situés sur le territoire des communes suivantes : Ambérieux-en-Dombes, Birieux, Bouligneux, Certines, Chalamont, Chaneins, Chanoz-Châtenay, La Chapelle-du-Châtelard, Chaveyriat, Châtenay, Châtillon-la-Palud, Châtillon-sur-Chalaronne, Civrieux, Condeissiat, Crans, Dompierre-sur-Veyle, Druillat, Faramans, Joyeux, Lapeyrouse, Lent, Marlieux, Meximieux, Mionnay, Miribel, Montagnat, Le Montellier, Monthieux, Montluel, Montracol, Neuville-les-Dames, Pizay, Le Plantay, Priay, Péronnas, Rancé, Relevant, Reyrieux, Rignieux-le-Franc, Romans, Saint-André-de-Corcy, Saint-André-le-Bouchoux, Saint-André-sur-Vieux-Jonc, Saint-Georges-sur-Renon, Saint-Germain-sur-Renon, Saint-Jean-de-Thurigneux, Saint-Marcel, Saint-Nizier-le-Désert, Saint-Paul-de-Varax, Saint-Rémy, Saint-Trivier-sur-Moignans, Saint-Eloi, Sainte-Croix, Sainte-Olive, Sandrans, Savigneux, Servas, Sulignat, Tramoyes, La Tranclière, Varambon, Versailleux, Villars-les-Dombes, Villeneuve, Villette-sur-Ain, Villieu-Loyes-Mollon.
Par exception aux dispositions de l'article 2, dans le département de l'Indre, la chasse aux canards de surface, aux canards plongeurs, aux oies et aux limicoles, excepté le vanneau huppé, est ouverte le 1er septembre à 6 heures sur les territoires mentionnés à l'article L. 424-6 du code de l'environnement situés sur le territoire des communes suivantes : Arthon, Azay-le-Ferron, Bélâbre, Bouesse, Buxières-d'Aillac, Chalais-Chitray, Ciron, Douadic, Jeu-les-Bois, Lingé, Luant-Lureuil, Luzeret, Martizay, Mauvières, Méobecq, Mézières-en-Brenne, Migné, Neuillay-les-Bois, Nuret-le-Ferron, Obterre, Oulches, La Pérouille-Prissac, Rosnay, Ruffec, Sainte-Gemme, Saint-Hilaire-sur-Benaize, Saint-Michel-en-Brenne, Saulnay, Tendu, Velles, Vendœuvres.
Par exception aux dispositions de l'article 2, dans le département de la Loire, la chasse aux canards de surface, aux canards plongeurs, aux oies et aux limicoles, excepté le vanneau huppé est ouverte le 1er septembre à 6 heures sur les étangs et nappes d'eau situés sur le territoire des communes suivantes : Andrézieux-Bouthéon, Bellegarde-en-Forez, Chambœuf, Civens, Cuzieu, Feurs, Marclopt, Montrond-les-Bains, Rivas, Saint-André-le-Puy, Saint-Bonnet-les-Oules, Saint-Cyr-les-Vignes, Saint-Galmier, Saint-Laurent-la-Conche, Salt-en-Donzy, Valeille, Veauche, Boisset-lès-Montrond, Bonson, Chalain-le-Comtal, Craintilleux, Grézieux-le-Fromental, L'Hopital-le-Grand, Magneux-Haute-Rive, Moingt-Montbrison Pommiers, Précieux, Savigneux, Saint-Cyprien, Saint-Romain-le-Puy, Sury-le-Comtal, Unias, Veauchette, Arthun, Boën, Bussy-Albieux, Chalain-d'Uzore, Chambéon, Champdieu, Cleppe, Marcilly-le-Châtel, Marcoux, Mizérieux, Montverdun, Mornand, Nervieux, Poncins, Pralong, Saint-Etienne-le-Molard, Saint-Paul-d'Uzore, Sainte-Agathe-la-Bouteresse, Sainte-Foy-Saint-Sulpice, Trelins.
ANNEXE 3
Évolution des indemnités versées aux agriculteurs néerlandais (en millions d’euros)
En violet : au titre de la politique d’accueil des oiseaux migrateurs
En rouge brique : au titre des dégâts aux cultures et des frais de gestion
Part des oies cendrées (Grauwe gans) dans le total des indemnisations des dégâts causés par l’ensemble des oies (ganzen)
(en millions d’euros)
ANNEXE 4
Le réseau Natura 2000
Alors qu’à l’origine, les habitats étaient protégés sans vue d’ensemble, le concept de réseau écologique s’est progressivement imposé, notamment avec la mise en place du réseau Natura 2000 (en application de la directive Habitats). Deux catégories de zones forment l’ossature de ce réseau : d’une part, les « zones de protection spéciale » qui sont destinées, en vertu de la directive Oiseaux, à protéger les habitats de certaines espèces d’oiseaux sauvages ; d’autre part, en vertu de la directive Habitats, des « zones spéciales de conservation » dont l’objet est de protéger, hormis les sites ornithologiques, certains habitats naturels d’intérêt communautaire.
Les deux directives prévoient un régime préventif applicable à toutes les zones protégées du réseau Natura 2000. Aussi les États membres doivent-ils assurer, en vertu de l’article 6 de la directive Habitats, que soient évitées, dans les zones protégées, la détérioration des habitats ainsi que les perturbations significatives touchant les espèces pour lesquelles lesdites zones ont été classées. En outre, la protection des zones « ne doit pas se limiter à des mesures destinées à obvier aux atteintes et aux perturbations externes causées par l’homme, mais doit aussi, selon la situation qui se présente, comporter des mesures positives visant à conserver et à améliorer l’état du site ». Toutefois, « l’adoption de mesures positives visant à conserver et à améliorer l’état d’une [zone] n’a pas un caractère systématique, mais dépend de la situation concrète de la [zone] concernée ».
Au titre de l’article 6, par. 2, et de l’interdiction qui y est consacrée de détériorer les habitats protégés, la Cour semble avoir dégagé au fil de sa jurisprudence récente une obligation de respecter la « connectivité » des habitats. En effet, les États membres ne pourront autoriser ni l’exercice d’une activité sur un site classé ni même admettre sa poursuite s’il apparaît qu’elle est susceptible de « produire un effet de barrière qui est de nature à contribuer à la fragmentation de l’habitat ». Si cette obligation concerne assurément la « connectivité » au sein d’un même site, elle pourrait bien également s’appliquer à des activités qui, bien que situées en dehors des sites protégés, contribuent à les détériorer.
À la différence de la directive Oiseaux, la directive Habitats n’instaure pas un régime général de protection des espèces animales et végétales vivant à l’état sauvage sur le territoire de l’Union européenne, les mesures de protection ne s’appliquant qu’à l’égard d’un nombre restreint d’espèces d’intérêt communautaire. Deux régimes de protection sont prévus par la directive Habitats : d’une part, un régime de protection stricte des espèces dont les prélèvements ne peuvent être autorisés qu’à titre exceptionnel (grands carnivores, cétacés, tortues terrestres, etc.) et, d’autre part, un régime plus souple autorisant que certaines espèces (bouquetin, chamois) fassent l’objet de prélèvements limités. Pour chacune de ces espèces, les États membres veillent à maintenir ou à rétablir leurs populations dans un état de conservation favorable. S’agissant des espèces soumises au régime « de protection stricte », les États membres doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour permettre d’éviter la détérioration ou la destruction effective des sites de reproduction ou des aires de repos qui abritent de telles espèces (énumérées à l’annexe IV de la directive Habitats). Enfin, à l’instar de ce qui a été prévu dans la directive Oiseaux, des dérogations ont été aménagées au régime de protection des espèces animales et végétales. La Cour est, à cet égard, soucieuse de contrôler la stricte conformité des mesures dérogatoires à l’ensemble des critères et des conditions énoncés à l’article 16.
1 () Jacques Comolet-Tirman (octobre 2009), « L’oie cendrée Anser anser en France et en Europe. Dynamique de la population, statuts de conservation, voies de migration et dates de migration prénuptiale », Paris, Muséum national d’histoire naturelle, Service du Patrimoine Nature.
2 () BirdLife International, liste rouge des espèces menacées (2015).
3 () Par ailleurs, près de 30 000 individus en Grande-Bretagne auraient une origine férale (oies domestiques redevenues sauvages).
4 () Centre européen de recherche et de documentation parlementaires
5 () Statistiques fournies par M. Maňez Rodrigez, coordinateur du groupe oiseau du centre biologique du parc national.
6 () Organisation non lucrative dont l’objet est de tenir le compte des oiseaux aux Pays-Bas.
7 () Zone humide de 1 500 hectares en bordure de la mer du Nord.
8 () Environ 60 à 80 000 oies cendrées hivernent en Espagne, notamment dans le parc national de la Doñana en Andalousie.
9 () Près de 100 couples en 2003 ; entre 176 et 188 couples nicheurs en 2011 selon l’étude de BirdLife international de 2015 reprenant les chiffres nationaux.
10 () Dont un individu issu du Marquenterre ayant été retrouvé en Norvège au printemps et un en Espagne en hiver (étude de 1999).
11 () Parmi les oies cendrées équipées d’un collier depuis 1984, 5 % ont été contrôlés en France : 95 % étaient originaires de Norvège et de Suède, et 5 % des Pays-Bas.
12 () Le Centre de Recherches sur la Biologie des Populations d’Oiseaux (Museum national d’histoire naturelle) est l’organisme officiel de baguage des oiseaux.
13 () Effectif variant de 74 000 à 120 000 individus selon les années, d’après Wetlands International.
14 () Hypothèse de M. Vincent Schricke.
15 () Une étude issue des informations recueillies sur les oiseaux bagués estime que la population d’hivernage est à 67 % d’origine néerlandaise et que 95 % des oies cendrées sont sédentaires et n’émigrent pas.
16 () Cette loi a assuré la transposition de la directive européenne sur la protection des oiseaux.
17 () (http://conventions.coe.int/Treaty/fr/Treaties/Html/104.htm)
18 () La directive a été modifiée à de nombreuses reprises par des directives de la Commission et a été récemment codifiée : directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages, J.O., n° L 20 du 26 janvier 2010, p. 7.
19 () En application de l’article 148 de la Constitution espagnole du 27 décembre 1978.
20 () Association équivalente de LPO et affiliée à BirdLife International.
21 () C.J.C.E., arrêt du 10 septembre 2009, Commission c/ Malte, C-76/08, points 48 et 65.
22 () Paragraphe 56 de l’arrêt.
23 () Paragraphe 57 de l’arrêt.
24 () Par exemple, la chasse a été prolongée à Malte, du 10 au 30 avril 2013, avec un quota de prélèvements fixé à 11 000 individus.
25 () Réponse à la question écrite n° E-004289-13 du 16 avril 2013.
26 () Par les arrêtés ministériels des 30 juillet 2008, 13 août 2008, 20 juillet 2011, 20 avril 2012, 2 août 2012 et 18 juillet 2013.
27 () Soit par exemple le 1er août 2014 ou le 2 août 2015.
28 () Territoires concernés par l’arrêté du 20 juillet 2011 :
- Partie de l'estuaire de la Gironde qui comprend la partie du domaine public fluvial qui est située entre le domaine public maritime et la limite de salure des eaux et qui inclut l'estran et les îles jusqu'à la limite des plus hautes eaux avant débordement.
- Étangs suivants de la Gironde et des Landes : étangs du Porge, étang de Hourtin-Carcans, étang de Cazaux et de Sanguinet, étang du Cousseau, étang de Lacanau, étang de La Forge-Uza, étang de Moïsan, étangs de la Maillouèyre, étang des dunes domaniales de Moliets et Maa, lac de Moliets, lac de la Prade, lac de Hardy, lac Blanc, étang Noir, étang d'Yrieu, lac du Turc, étang de Garros, étang d'Aureilhan, étang de Parentis-Biscarrosse, étang de Pontenx-les-Forges, étang de Léon et étang de Soustons.
- Hors du domaine public maritime, sur le canton de La Teste : les parties soumises aux marées, du domaine du Rocher, du domaine de Bayonne et des grands prés du Teich ;
- Hors du domaine public maritime, sur le canton d’Audenge : les parties soumises aux marées des îlots de Biganos.
29 () Soit par exemple le jeudi 21 août 2014 ou le vendredi 21 août 2015.
30 () cf. loi n° 98-549 du 3 juillet 1998 relative aux dates d’ouverture anticipée et de clôture de la chasse aux oiseaux migrateurs (abrogée en 2000).
31 () cf. arrêté du 17 janvier 2005 relatif aux dates de fermeture de la chasse aux oiseaux de passage et au gibier d’eau, modifié par l’arrêté du 28 janvier 2008.
32 () France Nature Environnement, Ligue pour la protection des oiseaux, Ligue ROC pour la préservation de la faune sauvage et la défense des bons chasseurs.
33 () Publié au Journal officiel du 31 janvier 2012.
34 () Humanité et biodiversité, France Nature Environnement, Association pour la protection des animaux sauvages, Ligue pour la protection des oiseaux.
35 () Réponse à la question n° 73236, publiée au Journal officiel du 17 mars 2015.
36 () Arrêt du 19 janvier 1994 « Association pour la protection des animaux sauvages ».
37 () Décision du 23 décembre 2011.
38 () Parmi les dernières réponses : à la question n° 73908 de M. Patrice Carvalho, publiée au Journal officiel du 17 mars 2015 ; à la question n° 73236 de Mme Nicole Ameline, publiée au Journal officiel du 17 mars 2015 ; à la question n° 76888 de M. Marcel Bonnot, publiée au Journal officiel du 14 avril 2015 ; à la question n° 78212 de M. Xavier Bertrand, publiée au Journal officiel du 19 mai 2015 ; à la question n° 78999 de M. Jean-Pierre Decool, publiée au Journal officiel du 16 juin 2015.
39 () Centre européen de recherche et de documentation parlementaire.
40 () Système d’information sur les animaux sauvages des Länder allemands, rapport annuel 2013.
41 () Des tirs « pyrotechniques » ont également été évoqués.
42 () Au moment où elles sont physiquement incapables de s’enfuir en volant et où elles se regroupent sur les plans d’eau. La technique consiste à s’approcher des groupes par barque et à rabattre les oiseaux vers une rive basse près de laquelle des filets ont été disposés. Rapidement, les oies sont triées, disposées dans des cageots et emportées sur les lieux où elles seront éliminées.
43 () Ainsi, en 2007/2008, sur les 110 000 oiseaux détruits, on comptait 43 000 oies cendrées, 40 000 oies rieuses et 22 000 canards siffleurs.
44 () L’essentiel des dégâts aux cultures est causé par les oies cendrées (en raison de leur nombre).
45 () Articles L. 426-1 à L. 426-6 et R. 426-1 à R. 426-19 du code de l’environnement.
46 () Qui regroupe près de 50 000 adhérents soit 70 % des agriculteurs professionnels.
47 () Tirs d’effarouchement, dérangements, destructions de pontes, stérilisation des œufs, capture au filet etc.
48 () En général, l’occupation des sites de reproduction (cas en France).
49 () De la deuxième décade de février à la première décade d’août en France.
50 () Du 1er février au 10 avril pour la France.
51 () http://ec.europa.eu/environment/nature/conservation/wildbirds/hunting/docs/hunting_guide_fr.pdf
52 () Réponses aux questions n° 78999 de M. Jean-Pierre Decool et n° 79000 de M. Olivier Audibert Troin, publiées au Journal officiel du 16 juin 2015.
53 () Bien d’autres plans d’action internationaux par espèce (ISSAP) sont mis en œuvre par l’AEWA.
54 () Du 8 au 10 juillet 2015, à Kampala, en Ouganda.
55 () La directive « Oiseaux » ne s’applique pas à la Norvège, pays non-membre de l’Union européenne.
56 () C.J.C.E., arrêt du 10 septembre 2009, Commission c/ Malte, C-76/08.
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