N° 1050
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 mai 2013.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI CONSTITUTIONNNELLE (N°815) portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature,
PAR M. Dominique RAIMBOURG,
Député.
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INTRODUCTION 7
I. UNE INSTITUTION ANCIENNE DONT LA COMPOSITION ET LES MISSIONS ONT ÉTÉ MODIFIÉES À DEUX REPRISES DEPUIS LE MILIEU DES ANNÉES 1990 10
A. LA RÉVISION DE JUILLET 1993 : L’EXTENSION DES COMPÉTENCES DU CSM AUX MAGISTRATS DU PARQUET 11
B. LE PROJET INABOUTI DE RÉVISION DE 1998 13
C. LA RÉVISION DE JUILLET 2008 : LA SUPPRESSION DE LA PRÉSIDENCE DU CSM PAR LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE ET LA MISE EN MINORITÉ DES MAGISTRATS 14
1. Les propositions du « comité Balladur » en 2007 14
2. La révision constitutionnelle de juillet 2008 14
II. LA COMPOSITION ET LE FONCTIONNEMENT ACTUELS DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE 16
1. Les règles de convocation, de présidence et de quorum 18
2. Les obligations déontologiques et le principe du déport 18
3. Le principe de l’autonomie budgétaire 18
C. LES COMPÉTENCES DU CSM 19
1. Des compétences en matière de nomination des magistrats 19
a) Un pouvoir de proposition pour les plus hauts postes du siège 19
Source : Conseil supérieur de la magistrature 20
b) Un pouvoir d’avis pour les nominations des magistrats du parquet 20
Source : Conseil supérieur de la magistrature 21
a) Des compétences différentes à l’égard des magistrats du siège et du parquet 22
b) La saisine du CSM par les justiciables 23
III. RÉFORMER LE CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE POUR RENFORCER L’INDÉPENDANCE DE LA JUSTICE 25
A. LE CONTENU DU PROJET DE LOI CONSTITUTIONNELLE 25
1. Une nouvelle composition pour le CSM 26
a) Une majorité de magistrats de l’ordre judiciaire 26
b) Des modalités nouvelles de nomination des personnalités qualifiées 27
c) Un président élu par la formation plénière parmi les personnalités qualifiées 27
2. La consécration d’une réelle formation plénière 28
a) Une formation plénière 28
b) Deux formations respectivement compétentes à l’égard des magistrats du siège et du parquet 28
3. Des compétences renforcées 29
a) Le renforcement des prérogatives de la formation plénière 29
b) Un rôle renforcé dans les nominations des magistrats du parquet 29
c) Un rôle renforcé en matière disciplinaire à l’égard des magistrats du parquet 30
d) Le maintien du principe de la saisine directe par un justiciable 30
4. Le renvoi à une loi organique 30
B. LES ORIENTATIONS RETENUES PAR VOTRE COMMISSION DES LOIS 30
1. La composition du CSM 31
a) L’équilibre entre magistrats et personnalités extérieures : le choix de la parité 31
b) La question de la présidence du CSM : le choix d’un président désigné par le collège ad hoc, dont la nomination sera soumise à l’approbation des commissions des Lois de l’Assemblée nationale et du Sénat 34
c) La question de la composition du collège ad hoc chargé de désigner certaines personnalités extérieures : le choix d’une composition élargie 36
d) Modalités du vote des commissions parlementaires sur la nomination des personnalités extérieures : le choix d’un vote à une majorité positive des trois cinquièmes sur le nom de chaque personnalité désignée 36
e) La question de la composition de la formation plénière : le choix du maintien d’une parité entre magistrats et non magistrats 37
2. Les attributions du CSM 38
a) En matière de nominations des magistrats du siège et du parquet : le choix de ne pas modifier l’équilibre du projet initial 38
b) En matière disciplinaire et déontologique : le choix d’ouvrir la saisine du CSM aux magistrats sur les questions déontologiques qui les concernent 39
CONTRIBUTION DE M. GEORGES FENECH, CO-RAPPORTEUR SUR LA MISE EN APPLICATION DE LA LOI CONSTITUTIONNELLE 41
AUDITION DE MME CHRISTIANE TAUBIRA, GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE, ET DISCUSSION GÉNÉRALE 45
EXAMEN DES ARTICLES 61
Article 1er(article 64 de la Constitution) : Concours du CSM à la garantie de l’indépendance de la justice 61
Article 2 (article 65 et articles 65–1 et 65–2 [nouveaux] de la Constitution) : Composition, fonctionnement et compétences du CSM 62
Article 65 de la Constitution : Compétences et organisation du CSM 62
Article 65–1 de la Constitution : Composition et mode de désignation des membres du CSM 65
Article 65–2 de la Constitution : Renvoi à une loi organique 72
Article 3 : Modalités d’entrée en vigueur des nouvelles rédactions des articles 65 et 65–1 de la Constitution 86
TABLEAU COMPARATIF 87
AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 92
PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR 101
DÉPLACEMENTS DU RAPPORTEUR 103
Le présent projet de loi constitutionnelle, adopté en Conseil des ministres le 13 mars 2013, vise à renforcer l’indépendance et l’autorité du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) par une composition renouvelée, des modes de désignation confortant l’indépendance de ses membres et des compétences renforcées.
Comme le rappelle une recommandation adoptée en novembre 2010 par le comité des ministres aux États membres du Conseil de l’Europe (1), l’indépendance des magistrats « ne constitue pas une prérogative ou un privilège accordé dans leur intérêt personnel mais dans celui de l’État de droit et de toute personne demandant et attendant une justice impartiale ». Tel est bien l’enjeu du présent projet de loi constitutionnelle : garantir l’indépendance de la justice afin que les magistrats rendent leurs décisions en toute impartialité et que les citoyens aient la conviction que les décisions prises par la justice ne le sont que dans l’intérêt de la loi et des justiciables.
Dès lors, la nomination des magistrats du siège comme du parquet et les conditions dans lesquelles ils exercent leurs fonctions doivent être entourées de toutes les garanties rendant l’impartialité de la justice insoupçonnable pour les justiciables. Ces garanties reposent dans une très large mesure sur l’intervention du CSM, compétent tant en matière nominations qu’en matière disciplinaire. Le présent projet de loi constitutionnelle vise, à la fois, à placer le CSM à l’abri de toute intervention politique, tant en ce qui concerne sa composition que son fonctionnement, et à renforcer ses compétences.
Il comporte trois articles : l’article 1ermodifie l’article 64 de la Constitution afin que soit précisé que le CSM « concourt », par ses avis et ses décisions, à garantir l’indépendance de la justice, indépendance dont le président de la République demeure le garant. L’article 2, qui est le cœur du texte, remplace l’actuel article 65 de la Constitution par trois articles : dans sa nouvelle rédaction, l’article 65 précise les compétences du CSM ; le nouvel article 65–1 fixe sa composition dans ses différentes formations ; l’article 65–2, quant à lui, renvoie à une loi organique la fixation des modalités d’application des deux articles 65 et 65–1. L’article 3 du projet de loi constitutionnelle est relatif aux modalités d’entrée en vigueur des nouvelles rédactions des deux articles précités, dont les conditions seront fixées par la loi organique.
Ce projet de réforme entend revenir sur certains des choix opérés par la précédente majorité lors de la révision constitutionnelle de juillet 2008 (2) et reprendre des avancées contenues tant dans cette réforme de 2008 que dans le projet de révision qui n’a pu aboutir en 1998–99 (3).
Des avancées certaines ont en effet été obtenues en 2008 sur lesquelles il n’est pas question de revenir ; c’est notamment le cas de la fin de la présidence du CSM par le président de la République ou de la possibilité d’une saisine directe du CSM par un justiciable, introduite en 2008 sur l’initiative du rapporteur de votre commission des Lois, M. Jean–Luc Warsmann, dans le but de restaurer la confiance des citoyens dans l’autorité judiciaire.
Pour autant, le Gouvernement a estimé nécessaire de revenir sur d’autres choix qui ont été faits par la précédente majorité.
— S’agissant de la composition du CSM, un nouvel équilibre est proposé entre magistrats de l’ordre judiciaire et non–magistrats, réservant une majorité aux premiers. L’enjeu de cet équilibre est d’éviter un double écueil : le risque de politisation du CSM réduisant son indépendance, d’une part, le risque de corporatisme, d’autre part. La mise en minorité des magistrats judiciaires décidée par la précédente majorité n’était pas conforme aux standards européens en la matière, il convenait donc de revenir sur ce choix opéré en 2008.
— S’agissant des autorités de nomination des personnalités extérieures, la révision de 2008 avait maintenu trois autorités politiques de nomination, nommant respectivement deux personnalités extérieures – le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat – ce qui laisse toujours planer une suspicion – certainement injustifiée – à l’égard du caractère politique des nominations ; parce qu’en la matière, la moindre suspicion ne peut être admise, le présent projet de loi constitutionnelle dessaisit les trois autorités politiques précitées de cette prérogative, au profit d’un collège ad hoc, composé de sept hautes personnalités (4).
— S’agissant des compétences exercées par le CSM en matière de nomination des magistrats du parquet, la nature de l’avis rendu par le CSM ne sera plus un avis simple – choix retenu en 2008 – mais un avis conforme – ce que prévoyait déjà le projet de 1998.
— En quatrième lieu, la formation du CSM compétente à l’égard des magistrats du parquet ne se contentera plus d’émettre un avis sur les propositions de sanctions disciplinaires émises par le garde des Sceaux, mais jouera le rôle de réel conseil de discipline des magistrats du parquet, à l’instar de son homologue compétente à l’égard des magistrats du siège ; une telle réforme était envisagée en 1998.
— En dernier lieu, le projet de loi constitutionnelle rétablit une réelle formation plénière composée de l’ensemble des membres des deux formations du CSM. La question du maintien même d’une formation plénière avait fait débat en 2008 : le projet gouvernemental initial distinguait alors deux formations, l’une compétente à l’égard des magistrats du siège, l’autre à l’égard des magistrats du parquet, respectivement présidées par le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette même cour. Sur l’initiative du rapporteur Jean-Luc Warsmann, l’Assemblée nationale, en première lecture, avait expressément introduit l’existence d’une formation plénière, garantissant l’unité du corps judiciaire et permettant à ses membres d’avoir une analyse transversale de l’organisation de la justice, que ce soit en matière de déontologie des magistrats ou de fonctionnement de l’institution judiciaire. Toutefois, cette formation plénière n’avait de plénière que le nom, tous les membres issus de la magistrature n’y siégeant pas afin que soit maintenue une majorité de non magistrats en son sein. À l’instar du projet de 1998, la réunion du CSM en formation plénière est expressément prévue par le présent projet de loi constitutionnelle. Ses prérogatives sont en outre renforcées : elle élit le président du CSM et peut s’autosaisir de toute question relative à l’indépendance de l’autorité judiciaire ou à la déontologie des magistrats.
Afin de préparer l’examen du présent projet de loi constitutionnelle, votre rapporteur a procédé à de nombreuses auditions (5) et s’est rendu à deux reprises au Conseil supérieur de la magistrature afin de rencontrer les membres de ses deux formations (6) et d’échanger avec eux, tant sur le fonctionnement actuel du CSM que sur le projet de réforme qui vous est aujourd’hui soumis. Il rappelle que, s’agissant d’une révision de la Constitution, c’est le projet du Gouvernement qui servira de base à la discussion en séance publique.
I. UNE INSTITUTION ANCIENNE DONT LA COMPOSITION ET LES MISSIONS ONT ÉTÉ MODIFIÉES À DEUX REPRISES
DEPUIS LE MILIEU DES ANNÉES 1990
Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a été créé par une loi du 30 août 1883 portant réforme de l’organisation judiciaire. Cette loi avait à la fois pour objet de suspendre, pour une durée de trois mois, la règle de l’inamovibilité des magistrats du siège – ce qui permit de révoquer les magistrats suspects de complaisance ou de compromission avec le précédent régime – et de soustraire le déroulement de carrière des magistrats à la volonté politique, en créant une institution indépendante de l’exécutif et chargée de la discipline des magistrats. Le CSM était alors constitué par la Cour de cassation, réunie en assemblée plénière.
L’inscription du CSM dans la Constitution date de la IVe République – titre IX de la Constitution du 27 octobre 1946. Il était alors chargé de proposer au président de la République les nominations des magistrats du siège et les décisions concernant leur avancement ; il exerçait également des compétences disciplinaires. Présidé par le président de la République – le garde des Sceaux en étant le vice-président – le CSM était composé de six personnalités élues par l’Assemblée nationale en dehors de ses membres, quatre magistrats élus par chacune des catégories de magistrats – magistrats de la Cour de cassation, des cours d’appel, des tribunaux de première instance et juges de paix – et deux membres désignés par le président de la République au sein des professions judiciaires, mais en dehors du Parlement et de la magistrature. Le CSM d’alors comprenait ainsi quatorze membres, pour un mandat de six ans.
Comme l’expliquait Paul Coste-Floret, rapporteur du projet de Constitution devant l’Assemblée constituante, « cette composition, qui se tient à égale distance d’une subordination de la magistrature à l’Assemblée nationale et d’une inadmissible composition corporative du Conseil, paraît devoir donner toute satisfaction et réaliser le but à atteindre ». Mais si l’écueil du corporatisme était évité par une composition privilégiant les désignations politiques, la politisation du CSM fut perçue négativement et motiva une modification de ses règles de composition à l’occasion du changement de République.
La Constitution de 1958 a ainsi apporté des modifications sensibles à la composition du CSM : le nombre de ses membres a été réduit de quatorze à onze, tandis que la durée de leur mandat a été portée de six à quatre ans. Tous les membres du CSM étaient désormais désignés par le président de la République. L’ordonnance du 22 décembre 1958 (7) précisait la répartition des neuf membres autres que le président de la République et le garde des Sceaux qui en restaient respectivement président et vice–président. Il s’agissait de :
— trois membres de la Cour de cassation, dont un avocat général, et trois magistrats du siège des cours et tribunaux étaient désignés sur une liste établie par le bureau de la Cour de cassation, comportant trois fois plus de noms que de postes à pourvoir ;
— un conseiller d’État était désigné sur une liste de trois noms établie par l’assemblée générale du Conseil d’État ;
— deux personnalités qualifiées étaient désignées à raison de leur compétence.
Les attributions du CSM demeuraient en revanche inchangées, celui-ci étant compétent en matière de discipline des magistrats du siège, ainsi que pour les propositions de nominations de ces mêmes magistrats.
Après une longue période durant laquelle la composition et les missions du CSM ne firent l’objet d’aucune modification, la réflexion sur une réforme fut initiée en 1993 par le « comité Vedel », qui y vit un moyen de conforter le respect et l’indépendance de l’autorité judiciaire. Dans son rapport du 15 février 1993, le comité proposait de « donner au Conseil supérieur de la magistrature une composition équilibrée, [en faisant] une place égale à des magistrats élus par leurs pairs et à des personnalités choisies par les présidents des deux assemblées et par deux hautes juridictions [le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État] » (8). Il proposait également de confier au CSM la possibilité de recevoir les plaintes et doléances tant des justiciables que des membres du corps judiciaire. Il suggérait enfin de lui transférer le pouvoir de nommer l’ensemble des magistrats du siège.
La loi constitutionnelle du 27 juillet 1993 (9) réforma le CSM, avec le double souci de renforcer l’indépendance de cette institution et de faire progresser l’unité de la magistrature. C’est depuis cette réforme que les attributions du CSM ont été étendues aux magistrats du parquet. Désormais, il donne son avis sur les nominations de magistrats du parquet, à l’exception des emplois auxquels il est pourvu en Conseil des ministres (10). Il donne également son avis sur les sanctions disciplinaires concernant les magistrats du parquet, alors que ce rôle était auparavant assuré par la commission de discipline du parquet.
Ses attributions à l’égard des magistrats du siège, qui étaient déjà plus nombreuses (conseil de discipline, avis pour toutes les nominations et propositions pour les nominations des magistrats du siège à la Cour de cassation et des premiers présidents de cour d’appel), ont également été renforcées : l’avis simple du CSM a été remplacé par un avis conforme et le pouvoir de proposition a été étendu aux nominations des présidents de tribunal de grande instance.
La modification de la composition du CSM a constitué le complément logique de l’évolution de ses attributions, dans la mesure où l’extension de sa compétence aux magistrats du parquet impliquait de prévoir la présence de ces mêmes magistrats dans l’institution. Le CSM comprend depuis lors deux formations, l’une compétente à l’égard des magistrats du siège, l’autre à l’égard des magistrats du parquet.
Symbole de l’unité du corps de la magistrature, la formation compétente à l’égard des magistrats du siège était composée de cinq magistrats du siège et d’un magistrat du parquet, tandis que celle compétente à l’égard des magistrats du parquet était composée de cinq magistrats du parquet et d’un magistrat du siège. Les autres membres du Conseil étaient un conseiller d’État, désigné par le Conseil d’État et trois membres n’appartenant ni au Parlement ni à la magistrature, désignés respectivement par le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat.
Par ailleurs, le président de la République et le garde des Sceaux demeuraient respectivement président et vice-président du CSM. Toutefois, lorsque le CSM siégeait en conseil de discipline, il était présidé par le premier président de la Cour de cassation ou le procureur général près la Cour de cassation, selon que l’affaire concernait un magistrat du siège ou un magistrat du parquet.
Chacune des deux formations du CSM comptait donc dix membres (non compris le président de la République et le garde des Sceaux), dont une majorité de magistrats.
La révision constitutionnelle du 27 juillet 1993 a été complétée par l’adoption d’une nouvelle loi organique sur le CSM (11), qui a notamment précisé les modalités de désignation des membres du CSM : les magistrats sont choisis par la voie de l’élection, au sein de collèges correspondant aux différentes catégories de magistrats. Elle a également prévu que, lorsque le CSM joue le rôle d’un conseil de discipline, le président de la République et le garde des Sceaux n’assistent pas aux séances.
Par ailleurs, dans le silence de la Constitution et des dispositions organiques le concernant, le Conseil a décidé de se réunir une fois par mois en section commune aux deux formations, sous la présidence d’un membre commun. Ces réunions permettaient d’harmoniser les points de vue, les pratiques et les méthodes de travail des deux formations et de mettre au point le rapport d’activité annuel.
Un nouveau projet de réforme constitutionnelle a été engagé par Mme Élisabeth Guigou, alors garde des Sceaux, ministre de la Justice, en avril 1998, sur la base du rapport remis au chef de l’État par M. Pierre Truche en juillet 1997 (12).
Le projet (13), dont l’objet était de renforcer le rôle du CSM à l’égard des magistrats du parquet, prévoyait que l’ensemble de ces magistrats seraient nommés sur avis conforme du CSM. En outre, la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet aurait statué comme conseil de discipline.
Parallèlement, le projet révisait la composition du CSM, les magistrats devenant minoritaires (dix membres sur vingt–et–un). Les onze personnalités extérieures au corps judiciaire auraient compris, outre le conseiller d’État désigné par le Conseil d’État, six personnalités nommées respectivement par le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat et quatre personnalités nommées conjointement par le premier président de la Cour de cassation, le vice-président du Conseil d’État et le premier président de la Cour des comptes (14). La réunion du CSM en formation plénière aurait été expressément prévue par la Constitution. Cette formation plénière se serait vue reconnaître la possibilité d’émettre des avis, à la demande du président de la République, sur des questions d’ordre général intéressant le statut des magistrats.
Après l’adoption du projet de loi constitutionnelle par les deux assemblées dans les mêmes termes, le décret inscrivant à l’ordre du jour du Congrès ce projet de loi constitutionnelle fut signé le 3 novembre 1999 ; toutefois, le président de la République, constatant la persistance d’un blocage ne permettant pas l’adoption du texte à la majorité requise des trois cinquièmes, décida finalement d’abroger ce décret avant que la réunion du Congrès n’intervienne (15).
C. LA RÉVISION DE JUILLET 2008 : LA SUPPRESSION DE LA PRÉSIDENCE DU CSM PAR LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE ET LA MISE EN MINORITÉ DES MAGISTRATS
Le comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République, présidé par M. Édouard Balladur, dit « comité Balladur » s’est, notamment, interrogé sur la nécessité de modifier le rôle et la composition du CSM. Ce comité a estimé que « la réforme de 1993 n’a pas atteint ses objectifs dans la mesure où elle n’a pas mis fin aux conflits entre le Gouvernement et le Conseil supérieur de la magistrature ; en dépit de la lettre des textes, aussi bien constitutionnels qu’organiques, le Conseil a instauré en son sein une prétendue " réunion plénière " dont l’existence même alimente le reproche de corporatisme trop souvent adressé à l’institution ; celle-ci s’avère insuffisamment ouverte sur l’extérieur » (16).
Partant de ce constat, le comité a proposé de rénover le CSM :
— en supprimant la présidence de droit par le président de la République et en confiant la présidence du CSM à une personnalité indépendante, extérieure au corps judiciaire ;
— en assurant une composition plus ouverte sur la société, préconisant que soient désignés, parmi les six personnalités extérieures, un avocat et un professeur d’université ;
— en élargissant les attributions du CSM à l’égard des magistrats du parquet, en prévoyant un avis simple non seulement à l’égard des procureurs et des substituts, mais aussi à l’égard des procureurs généraux ;
— en permettant la saisine du CSM par les justiciables eux-mêmes et non plus uniquement par le garde des Sceaux ou les premiers présidents de cour d’appel (17).
Reprenant en partie les préconisations du comité Balladur, la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 a, en premier lieu, supprimé la présidence du CSM par le président de la République et la vice-présidence par le garde des Sceaux. Comme l’ont souligné nombre de personnes entendues par votre rapporteur, l’exercice de la présidence du CSM par le président de la République n’était pas purement formel, le président pouvant notamment exercer une influence sur l’ordre du jour du CSM et nommant le magistrat chargé d’assurer le rôle de secrétaire administratif du Conseil. En outre, le CSM siégeait au Palais de l’Alma – dépendance de la présidence de la République – excepté toutefois en matière disciplinaire, où il siégeait déjà à la Cour de cassation. Comme le résumait en 1999 le professeur Jean Gicquel, « le cordon ombilical avec le pouvoir exécutif a été maintenu » (18). Dans son rapport annuel pour 2005, le CSM avait fait observer que la situation française, « quasi exceptionnelle dans l’Union européenne, peut surprendre au regard des exigences objectives du principe de la séparation des pouvoirs puisque l’indépendance de la justice se définit au premier chef à l’égard du pouvoir politique. Elle traduit, en les associant, deux spécificités constitutionnelles françaises : d’une part, la conception du rôle du chef de l’État comme clef de voûte des institutions, qui " assure par son arbitrage le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État ", d’autre part, la réticence à reconnaître formellement l’existence d’un " pouvoir judiciaire " et, par suite, à rendre complètement autonome l’instance constitutionnelle chargée de garantir son indépendance. »
La révision de 2008 a prévu que la présidence de la formation compétente à l’égard des magistrats du siège serait assurée par le premier président de la Cour de cassation, la présidence de la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet revenant au procureur général près cette même cour.
Cette révision s’est en outre traduite par une mise en minorité des magistrats avec la présence de huit personnalités extérieures à la magistrature, communes aux deux formations, ces deux formations, compétentes respectivement pour les magistrats du siège et pour les magistrats du parquet, comptant par ailleurs en leur sein sept magistrats ; la parité est néanmoins rétablie – comme l’a expressément souhaité la commission des Lois de l’Assemblée nationale – en matière disciplinaire, les deux formations comptant huit magistrats lorsqu’elles siègent en cette matière (cf. infra).
La composition du CSM a en outre été élargie avec la nomination d’un représentant de la profession d’avocat et l’augmentation du nombre de personnalités n’appartenant ni au Parlement ni à l’ordre judiciaire désignées par le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat, qui est passée de trois à six.
Autre innovation importante de la révision constitutionnelle de 2008, l’avis des commissions parlementaires compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat – à savoir les commissions des Lois – est désormais requis sur les nominations de ces six personnalités désignées par les autorités politiques.
La révision de 2008 a été également marquée par la consécration officielle de la formation plénière du CSM, présidée par le premier président de la Cour de cassation, le cas échéant suppléé par le procureur général près cette même cour, et comptant six autres magistrats provenant pour moitié de chacune des deux formations, ainsi que les huit personnalités qualifiées ; cette formation plénière est compétente pour « répondre aux demandes d’avis formulées par le président de la République » et se prononcer « sur les questions relatives à la déontologie des magistrats ainsi que sur toute question relative au fonctionnement de la justice dont le saisit le ministre de la Justice ».
La participation du ministre de la Justice aux séances des formations du CSM a été encadrée : elle est désormais interdite en matière disciplinaire, même si est maintenue la possibilité pour le garde des Sceaux d’assister aux réunions relatives aux nominations, afin de lui permettre de défendre son point de vue et d’expliquer ses propositions de nominations.
S’agissant des compétences du CSM, et conformément à la préconisation du comité Balladur, la procédure d’avis de la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet a été étendue à l’ensemble des nominations de magistrats du parquet.
Sur le plan disciplinaire a été instauré – à l’initiative de la commission des Lois de l’Assemblée nationale – le principe d’une saisine du CSM par tout justiciable, la procédure étant fixée par la loi organique (cf. infra).
Ainsi, depuis 1993, les révisions constitutionnelles successives ont été marquées par une progression constante de l’autonomie du CSM à l’égard du pouvoir exécutif, qu’il s’agisse des modalités de désignation de ses membres ou de ses compétences. Toutes les réformes ont vu un retrait progressif de l’Exécutif et une diversification des autorités de nomination et des personnes extérieures nommées ; les compétences du CSM ont été accrues, tant en matière de nomination qu’en matière disciplinaire.
II. LA COMPOSITION ET LE FONCTIONNEMENT ACTUELS DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE
La composition et le fonctionnement actuels du Conseil supérieur de la magistrature sont régis par l’article 65 de la Constitution, dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, complété par les modifications apportées à la loi organique du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature par la loi organique n° 2010–830 du 22 juillet 2010 relative à l’application de l’article 65 de la Constitution.
Les huit personnalités extérieures à la magistrature – un avocat, un conseiller d’État et six personnalités qualifiées, nommées à raison de deux chacun par le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat (19) – siègent dans les trois formations du CSM : la formation plénière, la formation compétente à l’égard des magistrats du siège et la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet.
Par ailleurs, la formation compétente à l’égard des magistrats du siège compte six magistrats du siège et un magistrat du parquet, et est présidée par le premier président de la Cour de cassation. De la même manière, la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet est composée de six magistrats du parquet et d’un magistrat du siège ; elle est présidée par le procureur général près la Cour de cassation.
Ainsi, la « formation siège », comme la « formation parquet », comptent ordinairement quinze membres. Elles en comptent seize, dont huit magistrats, lorsqu’elles siègent en matière disciplinaire, car le magistrat du siège membre de la « formation parquet » est alors appelé à siéger dans la « formation siège », tandis que le magistrat du parquet membre de la « formation siège » est appelé à siéger dans la « formation parquet ».
Enfin, l’article 65 de la Constitution prévoit que la formation plénière, dont sont membres les huit personnalités qualifiées, ne compte que trois des magistrats membres de la « formation siège » et trois des magistrats membres de la « formation parquet » et est présidée par le premier président de la Cour de cassation, lequel peut être suppléé par le procureur général près la Cour de cassation. Ainsi, la formation plénière compte également quinze membres, dont huit personnalités extérieures et sept magistrats.
L’article 65 étant très détaillé s’agissant de la composition du CSM, la loi organique du 22 juillet 2010 (20) prise pour son application se contente de préciser certaines règles, telles que la détermination d’une règle d’alternance pour les magistrats, du siège comme du parquet, appelés à siéger dans la formation plénière, la détermination de la commission parlementaire compétente pour rendre l’avis sur la nomination des personnalités qualifiées, les règles présidant à la désignation de l’avocat par le président du Conseil national des barreaux, après avis conforme de l’assemblée générale dudit Conseil, ou l’adaptation du régime des incompatibilités des membres du CSM.
En dehors du cadre constitutionnel, l’actuel CSM a constitué, de facto, une réunion – réellement plénière celle–ci – dénommée « réunion générale », destinée à répondre aux besoins pratiques de coordination de l’organisation des travaux du CSM et à faciliter la mise en commun des expériences des deux formations.
Les règles qui président à l’organisation et au fonctionnement du CSM ont été adaptées par la loi organique du 22 juillet 2010 précitée, afin de prendre en compte sa nouvelle composition.
Il revient au président de chacune des formations le soin de réunir cette dernière. Pour la présidence des réunions, il peut être suppléé par le magistrat hors hiérarchie membre de la formation. Les règles de quorum ont en outre été modifiées en 2010, par cohérence avec l’augmentation du nombre de membre de chaque formation : il est fixé désormais, outre le président de séance, à huit membres – sept en matière disciplinaire.
C’est le président de chaque formation qui en fixe l’ordre du jour – avant la révision de 2008, cette prérogative revenait au président de la République. Les effets n’en sont pas négligeables : la Chancellerie ne peut plus retirer unilatéralement un mouvement de magistrats préalablement inscrit à l’ordre du jour.
Les membres du CSM qui appartiennent à la magistrature sont soumis aux obligations déontologiques qui sont celles de tout magistrat. Les membres du CSM doivent notamment respecter l’obligation de déport qui s’impose à tout magistrat afin d’éviter que puisse naître un doute sur l’impartialité des décisions prises par le Conseil.
Depuis 2010, figure expressément dans la loi organique la mention des exigences qui s’imposent aux membres du CSM : indépendance, impartialité et intégrité. Sont également explicitement prévues les conditions dans lesquelles un membre du CSM ne peut rapporter un dossier, ni siéger dans une affaire, lorsque sa participation est susceptible de faire naître un doute sur l’impartialité de la décision rendue. La formation plénière du CSM est chargée d’apprécier si un des membres du CSM a manqué à ses obligations et peut, le cas échéant, prononcer un avertissement, voire la démission d’office de l’intéressé.
La loi organique prévoit désormais que « l’autonomie budgétaire du Conseil supérieur de la magistrature est assurée dans les conditions déterminées par la loi de finances ». Depuis le 1er janvier 2012, les crédits affectés au Conseil sont regroupés au sein du programme 335 de la mission Justice, dédié à ces crédits, alors qu’ils faisaient l’objet auparavant de l’action 04 du programme 166 Justice judiciaire. Le CSM siège dans des locaux qui ne dépendent plus de la présidence de la République.
L’article 65 de la Constitution énumère précisément les compétences qui sont celles de chacune des formations du CSM. La loi organique a en outre précisé le contour de certaines de ses compétences consultatives.
Le Conseil supérieur de la magistrature, dans sa formation compétente à l’égard des magistrats du siège, dispose du pouvoir de proposition pour les postes les plus élevés dans la hiérarchie, à savoir les magistrats à la Cour de cassation (premier président, présidents de chambre, conseillers, conseillers en service extraordinaires, conseillers référendaires et auditeurs), les premiers présidents de cours d’appel et les présidents de tribunaux de grande instance, ces derniers relèvent du pouvoir de proposition du Conseil depuis la loi constitutionnelle du 27 juillet 1993.
Pour ces quelque quatre cents postes, le CSM dispose de l’initiative, recense les candidatures, étudie les dossiers des candidats, procède à l’audition de certains d’entre eux et arrête les propositions. Il dispose d’un pouvoir très étendu puisque sa décision s’impose au garde des Sceaux.
Pour les nominations des autres magistrats du siège, le pouvoir de proposition relève du garde des Sceaux, le CSM émettant sur le projet de nomination – transmis dans le cadre des « transparences » – un avis liant le garde des Sceaux, ce dernier ne pouvant passer outre un avis négatif du CSM. La formation compétente à l’égard des magistrats du siège nomme un rapporteur pour chaque poste à pourvoir qui étudie les dossiers des magistrats proposés, mais aussi ceux de candidats qui n’ont pas été retenus par la Chancellerie et notamment des magistrats qui ont formulé des observations sur les projets de nomination parce qu’estimant pouvoir également concourir pour le même poste (on les nomme « observants »). La formation dans son ensemble étudie ensuite tous les dossiers puis procède à l’audition du candidat proposé et des observants, phase d’auditions d’autant plus cruciale lorsqu’il s’agit de déceler les compétences particulières nécessaires pour occuper un poste de chef de cour, pour lequel il ne suffit pas d’être un excellent juriste, mais où il faut avoir des compétences de gestion et d’encadrement.
Activité de nomination de la formation du siège entre 2006 et 2012
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 | |
Nombre de projets de nomination examinés |
1 294 |
1 290 |
1 129 |
1 278 |
1 347 |
1 233 |
1 238 |
Nombre d’observations |
683 |
707 |
626 |
964 |
638 |
527 |
233 |
Nombre d’avis conformes |
1 235 |
1 227 |
1 081 |
1 230 |
1 279 |
1 187 |
1 067 |
Nombre d’avis non conformes |
26 |
32 |
27 |
25 |
37 |
22 |
41 |
Nombre de retraits |
21 |
22 |
7 |
13 |
7 |
17 |
25 |
Nombre désistements |
12 |
9 |
14 |
10 |
22 |
13 |
10 |
Nombre de décisions d’incompétence |
0 |
0 |
0 |
0 |
2 |
0 |
0 |
Nombre de sursis à avis |
12 |
9 |
14 |
10 |
22 |
3 |
10 |
Source : Conseil supérieur de la magistrature
b) Un pouvoir d’avis pour les nominations des magistrats du parquet
Pour les magistrats du ministère public, depuis la loi constitutionnelle du 27 juillet 1993, la formation du CSM compétente à leur égard donne sur les propositions de nomination un avis simple : le garde des Sceaux n’est pas tenu en droit de suivre un avis défavorable rendu par la formation du parquet ; la pratique, sur ce point, s’est révélée très variable et, depuis 2008, aucune nomination d’un magistrat du parquet n’est intervenue après un avis défavorable rendu par le CSM.
Une des novations importantes issues de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 a été de soumettre à l’avis du CSM les projets de nomination des procureurs généraux, nommés jusque–là en seul Conseil des ministres. Cette disposition a certes renforcé le rôle du CSM à l’égard du ministère public, mais reste en retrait par rapport au projet de révision constitutionnelle d’avril 1998 qui prévoyait que l’ensemble des magistrats du parquet seraient nommés sur avis conforme du CSM.
La procédure suivie par la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet diffère quelque peu de celle suivie par la formation compétente à l’égard des magistrats du siège. Dans le cadre de la désignation des avocats généraux près la Cour de cassation, de procureurs généraux, de procureurs de la République ou d’inspecteurs des services judiciaires, la formation du CSM compétente à l’égard des magistrats du parquet entend le candidat et les observants dont le rapporteur a estimé qu’ils pouvaient légitimement entrer en compétition avec le candidat proposé par la Chancellerie. S’en suit une phase de délibéré à l’issue de laquelle la formation du CSM conclut par un avis favorable ou un avis défavorable à la proposition de nomination qui lui est soumise. Contrairement à la formation compétente à l’égard des magistrats du siège, la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet motive systématiquement ses avis défavorables et les notifie aux intéressés.
La formation compétente à l’égard des magistrats du parquet a en outre développé une pratique dite de « gradations », lui permettant d’émettre des « recommandations formelles », notifiées au garde des Sceaux, afin, sans contester une nomination pour laquelle il a donné un avis favorable, de signaler les mérites particuliers de tel ou tel observant pour un poste futur ; il lui arrive également d’émettre des signalements plus informels au cabinet du garde des Sceaux.
Activité de nomination de la formation du parquet entre 2006 et 2012
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 | |
Nombre de projets de nomination examinés |
560 |
576 |
592 |
655 |
614 |
577 |
630 |
Nombre d’observations |
158 |
232 |
257 |
172 |
194 |
145 |
145 |
Nombre d’avis favorables |
538 |
555 |
578 |
633 |
597 |
550 |
483 |
Dont décharges |
0 |
0 |
0 |
1 |
1 |
1 |
0 |
Nombre d’avis défavorables |
10 |
14 |
6 |
13 |
6 |
9 |
15 |
Nombre de retraits |
8 |
4 |
3 |
4 |
5 |
9 |
19 |
Nombre de désistements |
4 |
3 |
5 |
5 |
6 |
0 |
2 |
Nombre de sursis à avis |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
9 |
6 |
Nombre de « passé outre » un avis défavorable |
9 |
9 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
Réceptions de candidats |
32 |
30 |
52 |
69 |
36 |
47 |
62 |
En vertu de l’article 64 de la Constitution, le CSM « assiste » le président de la République, garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire. À cet effet, et pour répondre aux demandes d’avis formulés par le président de la République, le CSM se réunit en formation plénière, présidée par le premier président de la Cour de cassation, le cas échéant suppléé par le procureur général près cette même Cour.
La formation plénière se prononce également sur les questions relatives à la déontologie des magistrats, ainsi que sur toute question relative au fonctionnement de la Justice dont le saisit le garde des Sceaux.
Tous les ans, le CSM publie le rapport d’activité de chacune de ses formations. Il élabore et rend public un recueil des obligations déontologiques des magistrats, dont la dernière édition date de 2010 (21).
En matière disciplinaire, le CSM peut en premier lieu être saisi par le garde des Sceaux de faits motivant des poursuites disciplinaires contre un magistrat du siège ou du parquet. Il peut aussi être saisi par les premiers présidents de cours d’appel ou les présidents de tribunaux supérieurs d’appel, ou par les procureurs généraux près les cours d’appel ou les procureurs près les tribunaux supérieurs d’appel. Depuis la révision de 2008, il peut également l’être par tout justiciable, sous réserve que la commission d’admission des requêtes juge la saisine recevable.
La formation du CSM compétente à l’égard des magistrats du siège, lorsqu’elle statue en matière de discipline des juges, prononce directement la sanction : le CSM a alors un caractère juridictionnel dont les décisions relèvent du pourvoi en cassation devant le Conseil d’État.
Pour ce qui concerne la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet, la formation compétente du CSM émet un simple avis. Le pouvoir de prononcer la sanction appartient au garde des Sceaux, sa décision pouvant faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d’État comme toute décision disciplinaire prise à l’encontre d’un fonctionnaire.
Dans tous les cas, le CSM statue lors d’une audience publique qui se tient dans les locaux de la Cour de cassation, après enquête et rapport de l’un de ses membres. Le principe du contradictoire est respecté : le magistrat mis en cause est assisté de conseils (avocats et/ou collègues magistrats membres d’un syndicat) ; il est entendu par le rapporteur avant l’audience, puis par la formation lors de l’audience publique au cours de laquelle, après que les griefs lui ont été notifiés, il est interrogé ; le représentant de la direction des services judiciaires avance les arguments de l’accusation, puis vient le temps de la défense, le dernier mot étant donné au mis en cause. La délibération a ensuite lieu hors la présence du rapporteur, dans le respect du principe contenu dans une réserve d’interprétation émise par le Conseil constitutionnel dans une décision récente (22).
Activité disciplinaire du CSM en 2010 et 2011
(source : Conseil supérieur de la magistrature)
La formation du siège du conseil de discipline du CSM a rendu treize décisions en 2010 qui ont emporté, notamment, deux mises à la retraite d’office, deux retraits des fonctions de juge d’instruction assortis de déplacements d’office, un retrait des fonctions de premier vice–président assorti d’un déplacement d’office et deux interdictions d’être désigné dans des fonctions de juge unique. En 2011 ont été rendues trois décisions, deux emportant mise à la retraite d’office et la dernière, une rétrogradation assortie d’un déplacement d’office.
La formation du parquet du conseil de discipline du CSM a rendu un avis en 2010 préconisant la rétrogradation assortie du déplacement d’office pour un vice-procureur, et trois avis en 2011 : un avis de retrait des fonctions de substitut du procureur de la République et de substitut placé auprès d’un procureur général près d’une cour d’appel, assorti d’un déplacement d’office, un avis de non–lieu à sanction disciplinaire pour un vice-procureur et un avis défavorable au projet de décision soumis par le garde des Sceaux.
L’article 65 de la Constitution, dans sa rédaction issue de la révision de juillet 2008, précise que « Le Conseil supérieur de la magistrature peut être saisi par un justiciable dans les conditions fixées par une loi organique ».
La loi organique du 22 juillet 2010 précitée prévoit que tout justiciable qui estime qu’à l’occasion d’une procédure judiciaire le concernant, le comportement adopté par un magistrat du siège ou du parquet dans l’exercice de ses fonctions « est susceptible de recevoir une qualification disciplinaire » peut saisir le CSM. La plainte ne peut être dirigée contre un magistrat qui demeure saisi de la procédure, « à peine d’irrecevabilité ». La plainte doit contenir l’indication détaillée des faits et griefs allégués, être signée par le plaignant et indiquer son identité et son adresse, ainsi que les éléments permettant d’identifier la procédure en cause. Elle ne peut être présentée après l’expiration d’un délai d’un an suivant une décision irrévocable mettant fin à la procédure.
La loi organique a prévu l’instauration d’un dispositif de filtrage, afin que les formations disciplinaires ne soient saisies que des seules plaintes fondées et d’éviter ainsi un engorgement du CSM qui serait préjudiciable et à son bon fonctionnement et à l’objectif recherché : l’examen des plaintes est confié à des « commissions d’admission des requêtes » (compte tenu des effectifs de magistrats, il en existe une pour les magistrats du parquet et deux pour les magistrats du siège), composée chacune de quatre membres du CSM (deux magistrats et deux non magistrats) désignés chaque année par le président de chaque formation. Il est en outre prévu que les membres de la commission d’admission des requêtes qui auront eu à connaître d’une affaire ne peuvent siéger dans la formation disciplinaire saisie de cette affaire ou de faits identiques à ceux soulevés par un justiciable dont la saisine a été rejetée.
La commission d’admission des requêtes examine les plaintes qu’elle a jugées recevables, pour estimer si les faits évoqués sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire. À ce titre, elle sollicite des observations et informations auprès du premier président de la cour d’appel dont dépend le magistrat, qui doivent lui être communiquées dans un délai de deux mois. Le magistrat mis en cause peut également être entendu par la commission d’admission des requêtes.
Dans le cas où la commission d’admission des requêtes estime que les faits sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire, elle renvoie l’examen de la plainte à la formation compétente du CSM. Dans le cas où la commission d’admission des requêtes estime que les faits ne sont pas susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire, elle rejette la plainte.
Dans l’hypothèse où la commission d’admission des requêtes décide de transmettre la plainte d’un justiciable à la formation disciplinaire compétente, la procédure disciplinaire à l’encontre d’un magistrat est enclenchée ; l’audience disciplinaire ne peut se tenir moins de trois mois après que la commission d’admission des requêtes a transmis la plainte. Le justiciable ne dispose pas de recours contre la décision prise à la suite de l’avis de la formation disciplinaire.
La saisine du CSM par les justiciables : statistiques 2011–2012
(source : Conseil supérieur de la magistrature)
▪ Le volume des requêtes des justiciables
Ont été enregistrées 421 plaintes en 2011 et 283 plaintes en 2012.
En 2011, aucune requête n’a été jugée recevable par les commissions d’admission des requêtes compétentes pour les magistrats du siège ; une seule l’a été par la commission d’admission des requêtes compétente pour les magistrats du parquet.
En 2012, onze requêtes ont été jugées recevables par les commissions d’admission des requêtes compétentes pour les magistrats du siège, dont cinq requêtes dirigées à l’encontre du même magistrat qui ont été renvoyées à la formation disciplinaire. Deux requêtes ont été jugées recevables pour la commission d’admission des requêtes compétente pour les magistrats du parquet, dont une requête a été renvoyée devant la formation disciplinaire et l’autre a été rejetée.
▪ Principaux motifs de rejet des requêtes
La grande majorité des requêtes rejetées – respectivement 55,8 % et 69,8 % en 2011 et 2012 – l’ont été au motif que le justiciable contestait une décision de justice sans critiquer le comportement d’un magistrat.
Le second motif de rejet tient au non–respect du délai fixé par la loi organique – un an après qu’une décision irrévocable est intervenue : 17,7 % des requêtes en 2011 et 10,1 % en 2012 ont été rejetées pour ce motif.
Enfin, dans 7,7 % des cas, le magistrat critiqué demeure toujours saisi de la procédure.
▪ Magistrats concernés par la procédure
En 2011, 71 % des requêtes visaient des magistrats du siège, 10,7 % des requêtes concernaient des magistrats du parquet et 14,7 % visaient à la fois des magistrats du siège et du parquet.
En 2012, 74 % des requêtes concernaient des magistrats du siège, 14 % des requêtes concernaient des magistrats du parquet et 12 % visaient à la fois des magistrats du siège et du parquet.
III. RÉFORMER LE CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE POUR RENFORCER L’INDÉPENDANCE DE LA JUSTICE
Conformément à l’un des engagements pris pendant la campagne présidentielle (23) et aux orientations données par le président de la République au cours de l’audience solennelle de rentrée de la Cour de cassation le 18 janvier 2013 (24), le projet de loi constitutionnelle qui vous est aujourd’hui soumis modifie la composition du CSM et renforce ses compétences. Comme l’a rappelé le chef de l’État, « il n’y a pas de justice sans indépendance des juges. Il ne suffit pas d’être une femme ou un homme libre pour rendre la justice. Il faut apparaître comme tel aux yeux de tous ».
Les trois évolutions souhaitées par le président de la République sont les suivantes :
— une composition du Conseil supérieur de la magistrature comprenant davantage de magistrats que de personnalités extérieures à la magistrature ;
— un mode rénové de nomination des membres des personnalités extérieures, désormais proposées par « un collège indépendant » et non plus par le pouvoir politique, et approuvées aux trois cinquièmes par les commissions des Lois de l’Assemblée nationale et du Sénat afin de « lever le soupçon sur l’intervention du pouvoir exécutif dans les nominations et le déroulement des carrières des magistrats » ;
— des compétences étendues, l’avis conforme du CSM devant être requis pour toutes les nominations des magistrats du parquet.
Le projet de loi constitutionnelle, qui vous est aujourd’hui soumis, est le résultat de la concertation menée par la Chancellerie avec les trois organisations syndicales de magistrats dont les positions sont divergentes sur de très nombreux points, comme votre rapporteur a pu s’en rendre compte lors des auditions qu’il a menées.
La composition du CSM sera fixée par un nouvel article 65–1 de la Constitution qui préciserait désormais que le CSM sera composé de vingt–trois membres :
— huit magistrats du siège, élus par les magistrats du siège ;
— huit magistrats du parquet, élus par les magistrats du parquet ;
— un conseiller d’État, élu par le Conseil d’État ;
— un avocat ;
— cinq personnes qualifiées n’appartenant ni au Parlement, ni à l’ordre judiciaire, ni à l’ordre administratif, ni aux barreaux et nommées par un collège de hautes personnalités.
La nouvelle composition du CSM assurerait une majorité aux membres issus de la magistrature, en contrepartie de quoi la présidence sera désormais assurée par une des personnalités extérieures désignées par un collège ad hoc de hautes personnalités.
Alors que la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République avait accru le poids des personnalités qualifiées, plus nombreuses que les magistrats élus, le présent projet de loi constitutionnelle prévoit une composition dans laquelle les magistrats de l’ordre judiciaire redeviennent majoritaires.
Dans les formations respectivement compétentes à l’égard des magistrats du siège et du parquet, l’équilibre serait de huit magistrats, contre sept « non magistrats ».
Dans la formation plénière, la majorité de magistrats serait encore bien plus forte puisqu’ils seraient seize à y siéger, contre les mêmes sept personnalités non magistrats.
■ Au nombre de sept, les personnalités n’appartenant pas à la magistrature judiciaire seront désormais toutes désignées par des autorités indépendantes du pouvoir politique (25). Il s’agit :
— d’un conseiller d’État, élu par le Conseil d’État ;
— d’un avocat, dont l’exposé des motifs du projet de loi constitutionnelle indique qu’il sera désigné, en vertu de la loi organique, par le président du Conseil national des barreaux, après avis conforme de l’assemblée générale ;
— et de cinq personnalités qualifiées, « désignées conjointement » par un collège de personnalités indépendantes (vice-président du Conseil d’État, président du Conseil économique, social et environnemental, Défenseur des droits, premier président de la Cour de cassation, procureur général près la Cour de cassation, premier président de la Cour des comptes et un professeur des universités).
■ Le Parlement dispose d’un droit de veto selon une procédure inspirée de celle introduite, pour les nominations relevant de l’article 13, par la révision constitutionnelle de 2008. Le septième alinéa du nouvel article 65–1 précise que : « Dans chaque assemblée parlementaire, une commission permanente désignée par la loi se prononce par un avis public sur la liste des personnes ainsi désignées. Aucune ne peut être nommée si l’addition des votes défavorables à cette liste dans chaque commission représente au moins les trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions ».
L’exposé des motifs du projet de loi constitutionnelle précise que « la liste entière sera rejetée si l’addition des votes défavorables à cette liste représente au moins les trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. Cela ne fera pas obstacle à ce que la nouvelle liste dont les assemblées devraient alors être saisies reprenne certains des noms figurant sur la liste ayant fait l’objet du vote défavorable ».
La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 avait retiré au président de la République, ainsi qu’au ministre de la Justice qui l’assurait en son absence, la présidence du Conseil supérieur de la magistrature pour la confier au premier président de la Cour de cassation.
Le présent projet de loi constitutionnelle prévoit que le président du CSM est élu par la formation plénière parmi les cinq personnalités désignées par le collège ad hoc. L’exposé des motifs justifie la présidence par un non magistrat par le nécessaire « équilibre d’un conseil où les magistrats sont désormais majoritaires ». Il dispose en outre que « La loi organique précisera [que le président du CSM] exerce ses fonctions à temps plein ».
Le premier alinéa de l’article 65 précisera désormais que « le Conseil supérieur de la magistrature comprend une formation plénière, une formation compétente à l’égard des magistrats du siège et une formation compétente à l’égard des magistrats du parquet ».
Dans l’équilibre du présent projet de loi constitutionnelle, la formation plénière du Conseil supérieur de la magistrature redevient réellement plénière : elle comprendra l’ensemble de ses membres, soit seize magistrats – huit du siège et huit du parquet – et sept personnalités extérieures.
Le Conseil supérieur de la magistrature se réunira en formation plénière pour élire son président parmi les cinq personnalités qualifiées désignées par le collège de hautes personnalités.
Il se réunira également en formation plénière pour répondre aux demandes d’avis formulées par le président de la République, pour se prononcer sur les questions relatives à la déontologie des magistrats ainsi qu’à toute question relative au fonctionnement de la justice dont le saisit le garde des Sceaux ou pour débattre d’une question relative à l’indépendance de l’autorité judiciaire ou à la déontologie des magistrats dont il se serait saisi d’office. Là réside une innovation notable du projet de loi constitutionnelle qui confère au CSM la faculté de s’autosaisir (cf. infra).
La formation compétente à l’égard des magistrats du siège comprendra, outre le président du CSM et les six autres personnalités qualifiées, huit magistrats, dont sept magistrats du siège et un du parquet. Cette adjonction d’un magistrat du parquet dans la formation compétente à l’égard du siège (et vice–versa) est devenue traditionnelle ; elle est la traduction institutionnelle de l’unité du corps de la magistrature.
Lorsqu’elle statuera comme conseil de discipline des magistrats du siège, la formation du CSM compétente à l’égard des magistrats du siège sera complétée – et présidée – par le premier président de la Cour de cassation.
La formation compétente à l’égard des magistrats du parquet comprendra outre le président du CSM et les six autres personnalités qualifiées, huit magistrats, dont sept magistrats du parquet et un du siège.
Lorsqu’elle statuera comme conseil de discipline des magistrats du parquet, la formation compétente sera complétée – et présidée – par le procureur général près la Cour de cassation.
La participation du ministre de la Justice aux séances des formations demeure permise, sauf en matière disciplinaire. Le dernier alinéa du nouvel article 65–1 précisera en effet, comme c’est le cas actuellement, que « sauf en matière disciplinaire, le ministre de la justice peut participer aux séances des formations du Conseil supérieur de la magistrature ».
La formation plénière du CSM continuera à connaître des demandes d’avis qui lui sont adressées par le président de la République, en sa qualité de garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire, et des questions relatives à la déontologie des magistrats et au fonctionnement de la justice que lui soumet le ministre de la Justice.
Innovation du projet de loi constitutionnelle, le CSM pourra désormais également se saisir d’office de toute question portant sur la déontologie des magistrats et l’indépendance de la justice (cf. deuxième alinéa du nouvel article 65). Cette innovation est à rapprocher de la nouvelle rédaction du deuxième alinéa de l’article 64 de la Constitution, issue de l’article 1er du présent projet de loi, qui disposerait désormais que « le Conseil supérieur de la magistrature concourt, par ses avis et ses décisions, à garantir (l’) indépendance » de la justice, dont le président de la République est le garant.
Autre innovation majeure du présent projet de loi constitutionnelle, la nomination de l’ensemble des magistrats du parquet, y compris les procureurs généraux, sera subordonnée à l’avis conforme du CSM (cf. quatrième alinéa du nouvel article 65).
Pour ce qui est de la nomination des magistrats du siège en revanche, le droit n’est pas modifié. Le troisième alinéa de l’article 65 précisera, comme c’est le cas actuellement, que « la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du siège fait des propositions pour les nominations des magistrats du siège à la Cour de cassation, pour celles de premier président de cour d’appel et pour celles de président de tribunal de grande instance. Les autres magistrats du siège sont nommés sur son avis conforme ».
Le pouvoir disciplinaire à l’égard des magistrats du parquet, qui appartenait jusqu’ici au ministre de la Justice, reviendra désormais au CSM, ainsi que le précise le sixième alinéa du nouvel article 65 de la Constitution – « La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet statue comme conseil de discipline des magistrats du parquet. » – dont la rédaction est calquée sur celle du cinquième alinéa relatif aux magistrats du siège – « La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du siège statue comme conseil de discipline des magistrats du siège ».
En matière disciplinaire, les formations compétentes respectivement à l’égard des magistrats du siège et du parquet continuent d’être présidées par le premier président de la Cour de cassation, pour la première, et par le procureur général près ladite Cour, pour la seconde.
Le dernier alinéa du nouvel article 65 disposera, comme le droit actuel, que « Le Conseil supérieur de la magistrature peut être saisi par un justiciable ».
Le nouvel article 65-2 de la Constitution renvoie traditionnellement à une loi organique le soin de déterminer les conditions d’application des nouveaux articles 65 et 65-1 ; cette loi organique devra, notamment, établir à quelle date entreront en vigueur ces articles, dans leur rédaction nouvelle, tant pour ce qui concerne la composition du CSM que l’exercice par lui de ses nouvelles compétences.
Le projet initial a fait l’objet d’assez nombreuses critiques par les personnes entendues par votre rapporteur. En premier lieu, la composition du CSM suscite de très vifs débats, certains voyant dans la majorité donnée aux magistrats l’unique moyen de répondre aux exigences européennes, d’autres l’analysant comme un dangereux retour en arrière, d’autres encore estimant inutile de revenir à nouveau sur la composition du CSM, laquelle n’a, à leurs yeux, pas de lien avec l’amélioration de l’impartialité et de l’indépendance de la justice. S’agissant, en second lieu, des attributions dévolues au CSM, certaines personnes entendues ont dénoncé une « réforme a minima », regrettant que le projet de loi constitutionnel ne consacre pas davantage de pouvoirs au CSM, notamment en matière de propositions de nomination et de gestion des carrières des magistrats.
Après avoir entendu les positions exprimées par les uns et par les autres, votre rapporteur s’est forgé la conviction que la composition proposée devait être modifiée, dans le but de conforter la sérénité qui doit présider aux débats du CSM : il estime préférable d’instaurer une parité entre magistrats et non magistrats afin de mettre un terme à une querelle qui, sans être dépourvue d’intérêt, conduit assez largement à occulter les questions de fond, qui concernent les compétences du CSM. Il croit également préférable que le président du CSM ne soit pas élu par lui, au risque de voir s’organiser une forme de campagne électorale avant son installation, mais désigné par le collège ad hoc ce qui, par conséquent, permettra aux deux commissions des Lois de l’Assemblée nationale et du Sénat de se prononcer sur sa nomination. S’agissant des modalités de vote de ces deux commissions, votre rapporteur estime que le vote bloqué sur une liste doit être abandonné au profit d’un vote individuel sur chaque nom proposé par le collège et que le veto aux trois cinquièmes devrait être remplacé par l’exigence d’un vote positif aux trois cinquièmes des suffrages exprimés. S’agissant des modalités de saisine du CSM, il propose que les magistrats puissent le saisir de toute question déontologique qui les concerne.
Au cours de sa réunion du mercredi 22 mai 2013, votre commission des Lois a adopté quatorze amendements, dont l’ensemble des dix amendements présentés par votre rapporteur, deux amendements de M. Georges Fenech, un amendement de M. Sergio Coronado et deux amendements – dont un identique à un amendement présenté par votre rapporteur – de M. Gilles Bourdouleix.
Aux yeux de votre rapporteur, la composition idéale du CSM serait celle qui permettrait d’éviter un double écueil : celui du risque de corporatisme – avec une composition qui laisse par conséquent une large place au regard extérieur apporté par des personnalités qui ne sont pas issues de la magistrature – et celui du soupçon de politisation, ce qui suppose une présidence indépendante et un nouveau mode de désignation des membres extérieurs.
La question de l’équilibre entre magistrats et non magistrats au sein du CSM est posée à chaque tentative de réforme de l’institution ; elle fait aujourd’hui l’objet d’importants débats entre les organisations syndicales, seule l’Union syndicale des magistrats (USM) s’étant déclarée favorable à une majorité de magistrats.
Les représentants de l’USM entendus par votre rapporteur ont fait valoir que la composition actuelle du CSM n’était pas conforme aux « standards » européens qui exigent que les magistrats soient majoritaires, ou du moins ne soient pas minoritaires au sein de ce type d’organismes. La composition et les pouvoirs des « conseils de justice » (26) – catégorie générique dont relève notre CSM – font depuis de nombreuses années l’objet de recommandations de la part de divers organismes européens, qu’il s’agisse du Conseil de l’Europe, d’associations de magistrats (telles que l’Union internationale des magistrats ou les magistrats européens pour la démocratie et les libertés), ou d’organismes para-étatiques composés de magistrats, tels que le Conseil consultatif des juges européens ou le Réseau européen des conseils de justice.
Le Conseil de l’Europe, dans sa recommandation du 17 novembre 2010 sur l’indépendance, l’efficacité et les responsabilités des juges (27), préconise, dans son paragraphe 27, qu’« au moins la moitié des membres de ces conseils [soient] des juges choisis par leurs pairs issus de tous les niveaux du pouvoir judiciaire et dans le plein respect du pluralisme au sein du système judiciaire ».
L’assemblée générale du Réseau européen des conseils de justice, réunie à Budapest les 21 et 23 mai 2008, a posé le principe selon lequel, « en ce qui concerne la composition des conseils de justice, (…) lorsque la composition est mixte, le conseil doit compter une majorité de magistrats, sans être inférieure à 50 % » et que « dans tous les cas (composition mixte ou non), les magistrats, membres du conseil, doivent représenter tous les magistrats » (28).
Votre rapporteur estime qu’une composition réservant une majorité aux magistrats judiciaires va au–delà des préconisations émises par des organes consultatifs du Conseil de l’Europe – qui ne lient d’ailleurs pas notre pays. Si une majorité de non magistrats est contraire à ces préconisations, tel n’est pas le cas d’une parité entre magistrats et personnalités extérieures.
En outre, les arguments en défaveur d’une majorité de magistrats ne manquent pas, comme l’ont d’ailleurs relevé, lors de leurs auditions, tant le Syndicat de la magistrature que le Syndicat Force–ouvrière Magistrats. Le risque de corporatisme a été très largement évoqué.
Lors de son audition, le professeur Guy Carcassonne a mis le législateur en garde contre le risque de remplacer une dépendance politique – par essence « sporadique et lointaine » – par une dépendance syndicale – « constante et bien plus proche ». Prévoir une majorité de magistrats serait encourager le corporatisme d’un corps qui exerce pourtant une très éminente fonction au sein de l’État. Il s’est notamment interrogé sur le crédit qui pourrait être donné aux décisions qui sortiront de la formation plénière qui serait composée d’une écrasante majorité de magistrats.
Les personnalités qualifiées apportent un regard extérieur au corps qui est très utile au CSM. Pour M. Éric de Montgolfier, procureur général près la cour d’appel de Bourges, il serait dangereux de laisser à un corps, quel qu’il soit, le soin de son propre service ; les membres d’un corps ne sont pas les meilleurs contrôleurs de leur action, mieux vaut donc privilégier un contrôle exercé par de bons connaisseurs de la justice, néanmoins détachés d’enjeux pour leur propre carrière.
Pour autant et malgré l’ampleur des débats qu’elle suscite, l’importance de la question de l’équilibre entre magistrats et personnalités extérieures a été très largement relativisée par les membres du CSM – dont l’opinion est d’ailleurs très diverse sur cette question – rencontrés par votre rapporteur. Sans trahir le secret des délibérés, plusieurs membres du CSM ont souligné le fait que, dans le cadre d’un vote sur une nomination donnée, la ligne de partage des voix ne se faisant jamais entre l’ensemble des magistrats, d’une part, et l’ensemble des non magistrats, de l’autre.
M. Vincent Lamanda, premier président de la Cour de cassation, président du CSM dans sa composition issue de la réforme de 2008, a estimé que la composition du CSM n’avait pas d’incidence sur son fonctionnement et sur le contenu de ses décisions. Il a néanmoins estimé qu’une augmentation trop importante du nombre de membres risquerait d’alourdir et d’allonger les délibérations.
Votre rapporteur a proposé par amendement, adopté par votre Commission au même titre qu’un amendement identique présenté par M. Gilles Bourdouleix, que soit établie une parité entre magistrats et non magistrats afin, pour reprendre l’expression employée par M. Daniel Ludet, conseiller à la Cour de cassation, membre du CSM, de mettre fin – espérons définitivement – à une forme de « guerre de religions » qui se concentre sur le point – relativement secondaire – de la composition du CSM et permettrait de se concentrer à l’avenir sur la question essentielle, celle des compétences dévolues au CSM. Cette proposition est d’ailleurs conforme à une des conclusions de la commission d’enquête parlementaire créée à l’occasion de l’affaire dite « d’Outreau » qui avait formulé en juin 2006 plusieurs propositions afin de restaurer la confiance des Français dans la justice (29).
Votre Commission a en outre adopté un amendement de M. Sergio Coronado prévoyant que, parmi les six personnalités désignées, le collège devrait choisir autant de femmes que d’hommes.
b) La question de la présidence du CSM : le choix d’un président désigné par le collège ad hoc, dont la nomination sera soumise à l’approbation des commissions des Lois de l’Assemblée nationale et du Sénat
Par cohérence avec une composition réservant une majorité aux magistrats, le projet initial du Gouvernement prévoit de confier la présidence du CSM à une personnalité extérieure, élue par la formation plénière du CSM parmi les cinq personnalités désignées par le collège ad hoc.
La question de la présidence du CSM est importante : le président joue, en effet, un rôle tout particulièrement éminent dans la fixation de l’ordre du jour du CSM et la conduite de ses travaux. Comme l’a noté M. Frédéric Tiberghien, conseiller d’État, membre du CSM, l’importance de cette prérogative a été très largement perçue en 2011 lorsqu’a été mis en place un CSM présidé, non plus par le président de la République, mais par les deux chefs de cour. Or, les questions procédurales ne doivent pas être négligées : comme l’avait relevé M. Mattias Guyomar, rapporteur public, dans ses conclusions sous l’arrêt du Conseil d’État du 30 décembre 2010 dans l’affaire Marc Robert (30), le respect des procédures et leur transparence est crucial afin de ne laisser aucune place au doute ou au soupçon.
Le choix retenu par le projet de loi constitutionnelle initial suscite de nombreuses interrogations qui se concentrent sur trois points : le choix d’un président non magistrat ; le choix d’un président unique pour toutes les formations du CSM et donc exerçant son office à temps plein ; l’élection du président par la formation plénière du CSM.
— Un président non magistrat
Les syndicats de magistrats, dans leur ensemble, ne se sont pas déclarés favorables à une présidence du CSM exercée par une personnalité extérieure, préférant le maintien du statu quo de la double présidence exercée par le premier président de la Cour de cassation pour la formation du siège et la formation plénière et le procureur général près cette même Cour pour la formation du parquet : pour l’USM, « il ne peut aisément se concevoir que l’organe destiné à présider aux nominations et à la discipline des magistrats de l’ordre judiciaire soit présidé par une personnalité extérieure à la magistrature, sauf à afficher une réelle défiance à l’égard de celle–ci ». Pour M. Emmanuel Poinas, secrétaire général du syndicat FO Magistrats, ce serait comme demander aux avocats d’accepter que le Conseil national des barreaux fût présidé par un notaire.
M. Vincent Lamanda, premier président près la Cour de cassation, comme M. Jean–Claude Marin, procureur général près cette même Cour, se sont dits inquiets de voir la présidence confiée à un non magistrat, pour qui il pourra être difficile de s’affirmer vis–à–vis d’autres membres du CSM réputés mieux connaître l’institution judiciaire que lui.
Votre rapporteur estime pour sa part que l’exercice de la présidence du CSM par une personnalité extérieure renforcera l’image d’impartialité donnée de l’institution : il ne suffit pas pour une institution d’être impartiale, il faut aussi donner aux citoyens l’image de cette impartialité. Il juge donc préférable de confier la présidence à une haute personnalité, qui incarnera l’institution et l’éloignera de tout soupçon de corporatisme.
— Un président unique pour les deux formations, désigné pour exercer son mandat à temps plein
Confier la présidence du CSM à une personnalité extérieure incarnant l’institution et présidant toutes ses réunions devrait permettre d’assurer au CSM une unité plus grande que ne le permet le système actuel. Aujourd’hui, les modalités de fonctionnement sont telles qu’il a pu être considéré qu’il existait, de fait, non pas un mais deux CSM, chacun d’eux ayant ses méthodes et ses critères d’appréciation propres ; ainsi, à titre d’exemple, la formation compétente à l’égard des magistrats du siège ne motive pas ses avis négatifs, à la différence de la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet.
La présidence unique n’enlèvera cependant rien à l’existence de deux formations au sein du CSM, qui se justifie pleinement. Les profils et qualités professionnelles requis pour exercer des fonctions de magistrats du parquet – de plus en plus impliqués dans les politiques locales de la ville ou de la lutte contre la délinquance – ne sont en effet pas exactement les mêmes que ceux requis pour exercer les fonctions de magistrat du siège.
L’existence d’un président à temps plein résoudra en outre les possibles difficultés liées aujourd’hui à la gestion par les chefs de cour d’un double agenda à la Cour de cassation et au CSM, comme l’a notamment relevé lors de son audition le professeur Dominique Chagnollaud.
— Un président non plus élu par l’assemblée plénière du CSM mais désigné par le collège ad hoc et validé par les commissions des Lois des deux assemblées
Nombreuses ont été les personnes entendues par votre rapporteur qui ont souligné les limites des modalités proposées par le projet de loi constitutionnelle pour la désignation du président du CSM : prévoir une élection du président par la formation plénière pourrait ainsi conduire, comme l’a notamment souligné le professeur Bertrand Mathieu, à l’organisation d’une campagne électorale en son sein, les candidats étant amenés à donner des gages aux autres membres. Le président ainsi élu pourrait se considérer comme l’obligé de certains, ce qui ne pourrait se concevoir dans un tel conseil.
C’est pourquoi votre rapporteur a proposé à votre commission des Lois, qui l’a accepté, un système dans lequel le président est nommé avant la première réunion du CSM : son amendement précise que la désignation devra être faite par le collège ad hoc, puis validée par les commissions des Lois de l’Assemblée nationale et du Sénat.
c) La question de la composition du collège ad hoc chargé de désigner certaines personnalités extérieures : le choix d’une composition élargie
Le projet de loi constitutionnelle prévoit de confier à sept hautes personnalités le soin de désigner conjointement cinq des sept personnalités extérieures appelées à siéger au CSM. Ce collège remplace ainsi les trois autorités politiques jusqu’ici chargées de procéder à de telles nominations : le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat.
Le choix de la collégialité a été critiqué par certaines des personnes entendues par votre rapporteur, les unes y voyant un facteur de déresponsabilisation des autorités de nomination, réduites à des tractations entre elles, d’autres, le risque d’un affaiblissement de la légitimité de membres du CSM, désormais désignés par des personnalités non issues du suffrage universel, d’autant que cette modalité de désignation serait spécifique au CSM. Pourtant la plupart des personnes entendues ont salué cette avancée du projet de loi constitutionnelle qui coupe le lien avec le pouvoir politique et contraint l’ensemble des hautes personnalités à s’entendre sur la désignation de personnalités peu contestables. Votre rapporteur, qui partage cette dernière analyse, ajoute que l’obligation d’obtenir le vote positif aux trois cinquièmes des commissions des Lois des deux assemblées renforcera les exigences qui pèseront sur le collège tout autant que la légitimité des personnes ainsi nommées (cf. infra).
Compte tenu de l’augmentation proposée du nombre de personnalités extérieures désignées par le collège, votre rapporteur a suggéré d’élargir symétriquement la composition de ce dernier en incluant en son sein, outre les sept personnes prévues par le projet initial, le président d’une instance consultative de protection des libertés publiques et de défense des droits de l’homme, dont la loi organique pourrait par la suite préciser qu’il s’agit de la Commission nationale consultative des droits de l’homme.
d) Modalités du vote des commissions parlementaires sur la nomination des personnalités extérieures : le choix d’un vote à une majorité positive des trois cinquièmes sur le nom de chaque personnalité désignée
Le projet de loi constitutionnelle prévoit que les commissions des Lois des deux assemblées seront appelées à se prononcer par un vote bloqué sur la liste des personnalités désignées par le collège ad hoc. Les deux commissions des Lois devraient alors, soit approuver globalement la liste, soit la rejeter dans son ensemble, ce qui conduirait dans ce dernier cas le collège à se réunir pour proposer une nouvelle liste, soumise ensuite à la même procédure devant les deux commissions des Lois.
Si le vote bloqué présente le mérite de respecter les équilibres souhaités par le collège, entre les hommes et les femmes notamment, il présente de très nombreux inconvénients qui conduisent votre rapporteur à proposer un vote candidat par candidat ; à défaut, il serait très difficile pour les deux commissions des Lois de repousser un candidat figurant sur la liste et, si elles le faisaient, de faire comprendre au collège quel est le nom qu’elles ne souhaitent pas voir figurer à nouveau dans la liste dont elles seraient alors saisies.
Votre rapporteur a donc présenté un amendement, qui a été adopté par votre commission des Lois, substituant au vote sur liste bloquée un vote sur chaque proposition de désignation effectuée par le collège. Compte tenu des nouvelles modalités proposées pour la désignation du président du CSM, cela permettra aux deux commissions des Lois de se prononcer également spécialement sur la nomination du président du CSM.
S’agissant des conditions de majorité requise, alors que le projet du Gouvernement maintient la règle, actuellement applicable en vertu du dernier alinéa de l’article 13 de la Constitution s’agissant de certaines nominations effectuées par le président de la République, d’un veto des trois cinquièmes, ce qui permet la nomination de personnalités recueillant deux cinquièmes des voix des deux commissions, nombreuses ont été les personnes entendues par votre rapporteur qui ont plaidé – comme l’avait d’ailleurs souhaité le président de la République – pour que lui soit substituée une règle dite des « trois cinquièmes positifs » exigeant, pour qu’une nomination soit effectuée, qu’elle obtienne une majorité qualifiée de trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions.
Votre rapporteur a estimé que l’instauration d’une telle règle aura le mérite de conforter l’autorité morale des personnalités désignées par le collège et que, si elle présente un risque de blocage de certaines nominations en raison de querelles politiques dans les assemblées parlementaires, il préférait courir ce risque et faire le choix de la confiance dans la maturité du Parlement.
e) La question de la composition de la formation plénière : le choix du maintien d’une parité entre magistrats et non magistrats
Le projet de loi constitutionnelle prévoit que siégeront désormais dans la formation plénière l’ensemble des membres du CSM ; si cette composition renforce symboliquement l’unité du corps de la magistrature, le déséquilibre qu’elle emporte au profit des magistrats de l’ordre judiciaire – qui occuperont seize sièges sur vingt-trois, soit près de 70 % des sièges – emporterait plus d’inconvénients encore. Pour le professeur Bertrand Mathieu, rejoint par M. Jean-Pierre Machelon, doyen de la faculté de droit de l’université Paris Descartes, tous deux membres de l’actuel CSM, ce déséquilibre risquerait de bouleverser la cohérence du CSM et pourrait in fine conduire à une forme d’autogestion du corps par les syndicats de magistrats, ce qui ne va pas dans le sens de l’indépendance de la magistrature. Me Christian Charrière–Bournazel, président du Conseil national des barreaux a, de même, estimé que le déséquilibre institué par le projet de loi constitutionnelle en faveur des magistrats emportait le risque pour la magistrature de se refermer sur elle–même. Ce déséquilibre a été jugé par le professeur Dominique Chagnollaud d’autant plus dangereux que c’est la formation plénière qui est chargée d’élaborer les normes déontologiques applicables à la magistrature, ce qui donnerait un pouvoir considérable aux seize magistrats qui en sont membres.
C’est pour toutes ces raisons que votre rapporteur a proposé par amendement, qui a été adopté par votre Commission, que soit maintenu un principe de réfaction des sièges de magistrats à la formation plénière, afin que soit assurée une parité entre magistrats et non magistrats en son sein : y siégeraient, outre les huit personnalités extérieures, quatre magistrats du siège et quatre magistrats du parquet. Par cohérence, votre Commission a adopté un amendement de M. Gilles Bourdouleix octroyant voix prépondérante au président, afin d’éviter tout risque de blocage au sein de la formation plénière.
Cette composition n’interdit cependant pas au CSM de maintenir, de facto, une réunion générale composée de tous les membres du CSM afin que soit finalisée l’élaboration du rapport annuel, que soit organisé le programme de visites des juridictions, communes au siège et au parquet, ou que soient coordonnées les méthodes de réponse aux plaintes des justiciables.
a) En matière de nominations des magistrats du siège et du parquet : le choix de ne pas modifier l’équilibre du projet initial
Le projet constitutionnalise une pratique praeter legem, continuellement suivie par les différents gardes des Sceaux depuis 2008 : la nomination des magistrats du parquet sur avis conforme de la formation compétente du CSM.
Cette évolution a été très largement saluée par les personnes entendues par votre rapporteur, qui y ont vu un heureux rapprochement du statut des magistrats du parquet sur celui des magistrats du siège, d’autant qu’il se double d’un autre rapprochement sur le plan disciplinaire (cf. infra).
Au-delà de l’avis conforme, certaines personnes entendues par votre rapporteur ont plaidé pour que soit étendu le champ du pouvoir de proposition du CSM aux postes les plus élevés dans la hiérarchie du parquet, à l’instar de ce qui prévaut pour le siège (31) : il s’agirait, pour les postes d’avocats généraux près la Cour de cassation, de procureurs généraux et de procureurs de la République, de substituer au pouvoir d’empêcher, seul dévolu à la formation du parquet en vertu du présent projet de loi constitutionnelle, celui de choisir.
Votre rapporteur note néanmoins que les conditions de nomination des magistrats du parquet doivent aussi permettre au garde des Sceaux de mener la politique pénale décidée par le Gouvernement. Il estime qu’une grande avancée a été obtenue depuis juillet 2012, date à partir de laquelle la garde des Sceaux a systématiquement soumis tous les postes du parquet à la « transparence » - mécanisme permettant de connaître le nom de tous les candidats à un poste -, y compris les postes de procureurs généraux près les cours d’appel, d’avocats généraux près la Cour de cassation et d’inspecteurs et inspecteurs adjoints de l’inspection générale des services judiciaires. Cette pratique a été notamment saluée par M. Jean–Claude Marin, procureur général près la Cour de cassation, qui y a vu une bonne pratique réduisant la suspicion qui pesait parfois sur les choix opérés par le Gouvernement et renforçant l’information des membres du CSM désormais à même de comparer les mérites des différents candidats avant de rendre leur avis.
Votre rapporteur a par conséquent proposé à votre commission des Lois de ne pas faire droit à la demande d’élargissement du champ du pouvoir de proposition du CSM.
b) En matière disciplinaire et déontologique : le choix d’ouvrir la saisine du CSM aux magistrats sur les questions déontologiques qui les concernent
S’agissant des modalités de saisine du CSM, la faculté à nouveau reconnue au CSM – après l’interdiction résultant de la réforme de 2008 (32) – de se saisir d’office d’une question relative à l’indépendance de l’autorité judiciaire ou à la déontologie des magistrats a été très largement saluée par les personnes entendues par votre rapporteur.
Il a été relevé par ailleurs qu’il paraîtrait fort utile de permettre expressément la saisine du CSM par un magistrat. Dans le dispositif du projet initial, les magistrats sont, de fait, les seuls à ne pouvoir le saisir, ce qui est pour le moins paradoxal : Me Christophe Ricour, avocat, membre du CSM, a souligné l’importance d’ouvrir à tout magistrat la possibilité d’une saisine du CSM lorsqu’il s’estime menacé dans son indépendance ou son impartialité. M. Daniel Ludet, conseiller à la Cour de cassation, membre du CSM, a quant à lui souligné la portée symbolique forte qu’il y aurait à inscrire dans la loi constitutionnelle la possibilité de saisine par un magistrat, même si l’autosaisine permettrait in fine au CSM de se saisir d’un cas individuel.
Votre commission des Lois a adopté un amendement, présenté par votre rapporteur, permettant à tout magistrat de saisir le CSM d’une question déontologique le concernant. Il reviendra à la loi organique de prévoir, en formation disciplinaire, le déport d’un membre qui aurait eu à conseiller, sur un plan déontologique, le magistrat mis en cause.
CONTRIBUTION DE M. GEORGES FENECH,
CO-RAPPORTEUR SUR LA MISE EN APPLICATION DE LA LOI CONSTITUTIONNELLE qui serait issue de l’adoption
définitive du projet de loi
(nommé en application de l’article 145-7 du Règlement)
En qualité de co-rapporteur du présent projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature tel que présenté par le gouvernement, j’émettrai un avis défavorable.
Mais je tiens au préalable à rendre hommage à la qualité du travail de notre collègue rapporteur, Dominique Raimbourg.
Jamais l’attente de nos concitoyens n’a été aussi grande à l’égard de notre justice, dont il faut rappeler qu’elle est un élément essentiel de notre état de droit, de notre démocratie et de la cohésion de notre société. Dès lors, une réforme du CSM, clé de voûte du système judiciaire aurait dû être menée avec réflexion et concertation, ce qui n’est pas ici le cas.
Ce projet de loi constitutionnelle doit être rejeté car il est le fruit d’une certaine forme de précipitation et qu’il risque d’entraîner une montée du corporatisme, dangereuse pour l’indépendance de l’Autorité judiciaire.
Le projet de loi constitutionnelle portant réforme du CSM a malencontreusement été relancé par François Hollande le 3 avril dernier après ce qu’il faut bien appeler le scandale Cahuzac. Le Président de la République a en effet annoncé, en réponse, que cette réforme permettrait de renforcer l’indépendance de la justice. Ce qui provoquait l’étonnement de plusieurs membres du CSM qui en faisaient part au Président de la République, lequel dans sa réponse du 15 avril regrettait a minima que ses propos aient pu être interprétés « dans un sens qu’ils n’avaient pas. »
Faut-il rappeler que le Procureur de Paris, M. François Molins, qui est à l’origine de l’enquête sur M. Cahuzac et donc à en croire le Président de la République, à l’origine de la précipitation de cette réforme, n’aurait sans doute pas été nommé avec la composition du CSM que vous proposez ? En effet, l’Union syndicale des Magistrats et le Syndicat de la Magistrature étaient opposés à cette nomination et l’avaient clairement fait savoir.
Dès lors, la précipitation dans laquelle ce projet de loi a été rédigé explique l’insuffisance et le manque de rigueur de ce texte. « Il ne faut toucher aux lois que d’une main tremblante » conseillait en son temps Portalis, l’un des rédacteurs du Code civil. C’est encore plus vrai dès lors qu’elle concerne la loi suprême.
La dernière réforme du CSM date de 2008 et avait, à juste titre, introduit une majorité de non-magistrats au CSM. Or, aucune étude d’impact n’est venue établir un bilan de cette réforme encore récente. Pourquoi s’empresser ainsi ? Faut-il y voir la nécessité de « satisfaire » quelques syndicats de magistrats, dont l’un d’entre eux s’est tristement illustré depuis, avec la révélation de l’affichage d’un « mur des cons » dans son local syndical, une mise au pilori qui a soulevé une vive émotion dans tout le pays.
Une autre innovation majeure de ce texte, que je désapprouve, est de faire nommer les personnalités civiles devenues minoritaires, collectivement par un collège réunissant le vice-président du Conseil d’État, le président du Conseil économique, social et environnemental, le Défenseur des droits, le Premier président de la Cour de cassation, le Procureur général près la Cour de cassation, le Premier président de la Cour des comptes et un professeur des universités.
Ce nouveau système présente en effet de nombreux inconvénients, au-delà du fait qu’il affaiblit le prestige du CSM puisque les personnalités de la société civile ne seront plus nommées, à l’instar par exemple du Conseil constitutionnel, par le Président de la République et les Présidents des deux chambres, les plus hautes autorités du pays. Il est par ailleurs particulièrement complexe, puisqu’il fait intervenir une commission réunissant sept membres. En outre, il amoindrit la légitimité des personnes élues, par l’effet d’une dilution des décideurs. Enfin, il donne un poids trop fort au Conseil d’État qui intervient deux fois dans la nomination d’un membre du CSM. Cela est d’autant plus préjudiciable et surprenant que le Conseil d’État est de surcroît l’instance de cassation du CSM.
Concernant cette liste de « cinq personnes qualifiées n’appartenant ni au Parlement, ni à l’ordre judiciaire, ni à l’ordre administratif, ni aux barreaux », pourquoi avoir choisi une nomination et une validation conjointe plutôt qu’individuelle ? Et pourquoi proposer la création d’une nouvelle commission ad hoc au sein des assemblées plutôt qu’une audition par la commission des lois ? Cela crée un soupçon de partisanerie et de complaisance sur les conditions de nomination de ces membres. Est-ce le moyen de faire accepter certains noms noyés parmi trois ou quatre autres personnalités réellement qualifiées ?
Ces soupçons sont d’autant plus légitimes que nous n’avons pas de précisions sur le mode d’élection des magistrats au sein du CSM. Sera-t-il modifié pour « plaire » à l’un ou l’autre des deux principaux syndicats? Pourquoi ne pas envisager un vote préférentiel ou une sorte de panachage pour choisir les magistrats qui seront membres du CSM ? Cela donnerait une réelle marge de liberté à nos magistrats et réduirait les possibilités de cooptation. Car de facto, les syndicats de magistrats ont déjà un quasi-monopole de présentation des candidatures comme le soulignait, dans une tribune au Figaro, M. Magendie, Premier président honoraire de la cour d’appel de Paris. La commission d’enquête parlementaire, dite Commission d’Outreau, avait elle-même souhaité l’élection directe des membres magistrats par leurs pairs, sans critères de représentativité syndicale. Doit-on rappeler que cette proposition avait reçu l’approbation de tous les groupes politiques ?
Dans le même sens, alors que Nicolas Sarkozy avait mis fin à la présidence du CSM par le Président de la République, que faut-il penser du maintien de la présence du garde des Sceaux au sein du Conseil supérieur de la magistrature ?
Je dois encore exprimer un autre regret : aucune avancée n’est envisagée concernant la saisine du CSM par le justiciable. C’est d’autant plus regrettable que cela aurait pu permettre de renforcer la confiance des citoyens dans leur justice. On aurait pu imaginer, par exemple, une extension du délai d’expiration, aujourd’hui d’un an, pour le dépôt de la plainte suivant une décision irrévocable mettant fin à la procédure. On aurait pu imaginer que des témoins puissent être entendus lors des enquêtes sur les défaillances d’un magistrat, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui et est pour le moins surprenant. Même si cela ne relève pas à proprement parler du projet de loi constitutionnelle, là encore, la précipitation n’a pas été bonne conseillère.
Il convient à présent d’expliciter le point central de notre opposition à ce texte. En effet, le projet de loi du gouvernement, présente le risque majeur d’accroître les dangers du corporatisme et par voie de conséquence de creuser davantage le fossé entre la justice et les citoyens.
L’indépendance des magistrats n’implique pas l’autonomie du corps judiciaire. Cette logique auto-gestionnaire est contraire à l’évolution qui tend à la reconnaissance d’un véritable pouvoir judiciaire, lequel exige une participation importante du corps social à sa gestion, par un droit de regard externe et une forme de responsabilité.
Comment s’étonner dès lors que plusieurs personnalités auditionnées, à l’exception notable du syndicat majoritaire des magistrats, aient dénoncé une « syndicalisation-politisation » de la justice, « un système oligarchique coupé du système démocratique », « une réforme USM » ou encore une « régression démocratique ».
Cette réforme, en proposant de donner une majorité de sièges aux magistrats au sein du CSM, renforce de facto le repli sur soi et entraînera une suspicion lors des avis ou décisions du CSM, en particulier en matière disciplinaire.
Faut-il rappeler que le club de réflexion « Terra Nova », l’Institut pour la Justice, ou encore la Commission de réflexion sur la justice présidée en 1997 par M. Truche ont préconisé une majorité de non-magistrats au sein du Conseil supérieur de la magistrature ? Le Club des juristes propose pour sa part une composition paritaire, ce qui n’est pas la proposition du projet de loi constitutionnelle, en particulier dans la composition de la formation plénière, où il n’est plus question d’une simple majorité de magistrats mais d’une écrasante domination des magistrats. Cela est d’autant plus dommageable que le projet de loi souhaite permettre à cette formation de se saisir d’office des questions relatives à l’indépendance de l’autorité judiciaire et à la déontologie des magistrats.
A cet égard, contrairement à ce que rappelle l’exposé des motifs du projet de loi, la recommandation CM Rec (2010) 12 du Comité des ministres du Conseil de l’Europe en son article 27 n’est pas défavorable au système paritaire. Notons que cette recommandation est en outre dénuée de valeur normative.
Ce projet de loi est donc porteur d’une volonté de mainmise sur le CSM par les syndicats de magistrats. Cela n’a d’ailleurs pas échappé à M. Urvoas, président de notre commission des Lois qui déclarait, le 27 mars dernier dans le journal Le Monde : « Remettre au sein du CSM une majorité de magistrats, n’est-ce pas prendre le risque que renaissent des stratégies de réseau ? Est-ce vraiment le gage d’une grande transparence ? Je suis, pour le moment, dubitatif ».
Les doutes de notre honorable Président sont légitimes car le corporatisme est le meilleur moyen de s’isoler du reste de la société et d’accroître la défiance à l’égard de la justice.
Ce risque majeur de corporatisme condamne définitivement cette réforme à laquelle le gouvernement serait bien avisé de renoncer.
Ainsi, après la suppression des jurés populaires dans les tribunaux correctionnels, la suppression d’une majorité de non-magistrats au sein du CSM va clairement à l’encontre du rapprochement des Français et de la justice souhaitée par la précédente majorité.
Couper la justice du peuple français est une faute. Quel pouvoir peut se revendiquer d’une légitimité quand il n’est pas élu, quand par pure idéologie il lui arrive de refuser ostensiblement d’appliquer des lois votées par la représentation nationale, quand enfin il se recroqueville sur lui-même en refusant de rendre des comptes et de s’ouvrir à la société ?
En définitive, ce projet de réforme constitutionnelle porte en germe l’affaiblissement de l’indépendance de la justice, principe essentiel qui fonde une démocratie.
C’est pourquoi le groupe UMP ne votera pas ce texte.
Je vous remercie.
AUDITION DE MME CHRISTIANE TAUBIRA, GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE,
ET DISCUSSION GÉNÉRALE
Au cours de sa séance du mardi 21 mai 2013, la Commission procède à l’audition de Mme Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice, sur le présent projet de loi constitutionnelle et sur le projet de loi relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et d’action publique (n° 845).
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Je vous remercie, madame la garde des Sceaux, d’avoir répondu à notre invitation pour nous présenter le projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature et le projet de loi relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et d’action publique.
Mme Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice. C’est avec plaisir que je réponds à l’invitation de votre Commission, avec laquelle j’ai toujours des échanges très denses, fructueux, même s’ils sont parfois vifs.
Les deux projets de loi que je vous présente aujourd’hui visent à consolider l’indépendance de l’autorité judiciaire. Le projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature, modifiant les articles 64 et 65 de la Constitution, vise à réformer substantiellement la composition et le fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature, afin de renforcer significativement son rôle. Quant au projet de loi ordinaire, qui tend à modifier les articles 30, 35 et 39-1 du code de procédure pénale, relatifs aux attributions du garde des Sceaux et à ses relations avec le parquet, il a pour objectif essentiel de supprimer la possibilité pour le garde des Sceaux d’adresser au parquet des instructions individuelles. Ces projets traduisent l’engagement n° 53 du candidat François Hollande, réaffirmé en janvier 2013 par le président de la République lors de l’audience solennelle de rentrée de la Cour de cassation.
La réforme constitutionnelle de 2008 a été mise en œuvre en 2011 et l’on pourrait s’interroger sur l’opportunité de procéder à une nouvelle réforme du CSM. C’est qu’il s’agit, comme je viens de le dire, de conforter les conditions de l’indépendance et de l’impartialité de l’autorité judiciaire, tant au niveau du CSM que des parquets eux-mêmes.
Certes, la réforme de 2008 avait permis des avancées substantielles, notamment en retirant au président de la République et au ministre de la Justice respectivement la présidence et la vice-présidence du CSM, et en ouvrant aux justiciables la faculté de saisir le CSM. Cependant, certaines de ses dispositions tendaient à neutraliser ces avancées, notamment s’agissant des rapports entre l’Exécutif et la magistrature. La loi constitutionnelle de 2008 a ainsi confié aux autorités politiques le soin de désigner six personnalités extérieures, au lieu de quatre auparavant. En outre, l’interprétation de cette réforme par le Conseil constitutionnel a dénié au CSM la faculté de s’autosaisir.
Notre proposition de réécriture de l’article 65 de la Constitution, qui a recueilli l’accord du Conseil d’État, vise à mettre le CSM à l’abri des interventions politiques. Conformément au souhait du président de la République, nous avons proposé une présence majoritaire des magistrats élus dans la composition du Conseil. Cependant les échanges auxquels l’avant-projet a donné lieu ont fait apparaître la préférence des parlementaires pour une composition paritaire entre magistrats et non magistrats, parité qui est par ailleurs conforme aux standards européens, notamment aux recommandations du Conseil de l’Europe. Notre texte prévoit par ailleurs que le président du CSM sera choisi parmi les cinq personnalités qualifiées désignées par le collège.
Le projet de loi constitutionnelle dispose par ailleurs que la formation plénière du CSM réunira effectivement tous les membres du Conseil, alors que, dans l’état actuel du droit, elle ne rassemble pas la totalité des membres des deux formations spécialisées, celle compétente à l’égard des magistrats du siège et celle compétente à l’égard des magistrats du parquet.
Ce texte prévoit, par ailleurs, que le CSM pourra se saisir d’office des questions relatives à l’indépendance de l’autorité judiciaire et à la déontologie des magistrats.
L’indépendance vis-à-vis de l’Exécutif est le maître mot de notre proposition de réforme du CSM. Je n’ai pas à vous rappeler que, jusqu’en 1993, tous les membres du CSM étaient désignés par le pouvoir politique : ce n’est que depuis cette date que les magistrats siégeant au Conseil sont élus par leurs pairs. À partir de la réforme de 2008, les personnalités qualifiées siégeant au CSM sont nommées par les autorités politiques. Nous proposons qu’elles le soient désormais par un collège dont les membres seront désignés au titre de leur fonction : il s’agirait du vice-président du Conseil d’État, du président du Conseil économique, social et environnemental, du Défenseur des droits, du premier président de la Cour de cassation, du procureur général près la Cour de cassation, du premier président de la Cour des comptes et d’un professeur des universités.
Ce collège serait chargé de dresser une liste de cinq personnes qualifiées – six en cas de parité dans la composition du Conseil – dont la désignation serait soumise à l’avis conforme des commissions des Lois des deux assemblées, la nomination ne pouvant pas avoir lieu si l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés. Le choix d’un vote sur liste bloquée obéit à un souci de cohésion, mais je n’ignore pas que ce point est discuté, certains nous ayant fait part de leur préférence pour un vote sur les candidatures individuelles.
Le CSM comprendrait en outre un avocat, désigné par le Conseil national des barreaux, et un conseiller d’État, élu par le Conseil d’État.
Le projet de loi constitutionnelle vise aussi à renforcer l’impartialité du parquet puisqu’il prévoit que la nomination des magistrats du parquet sera subordonnée à l’avis conforme du CSM et aligne le régime disciplinaire de ces magistrats, qui relèverait désormais du CSM, sur celui des magistrats du siège. Une telle réforme contribuera à l’unité du corps de la magistrature, conformément à la Constitution et à une revendication forte des magistrats.
Le projet de loi relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et d’action publique propose, quant à lui, une rédaction de l’article 30 du code de procédure pénale plus conforme aux dispositions de l’ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. Celle-ci réservait l’exercice de l’action publique aux seuls magistrats du parquet, alors que la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité confiait au ministre de la Justice la conduite directe de l’action publique. Notre projet restitue au garde des Sceaux la responsabilité d’animer la politique pénale du Gouvernement sur l’ensemble du territoire, conformément à l’article 20 de la Constitution, et au parquet le plein exercice de l’action publique. Cela signifie qu’il revient au ministre de la Justice de définir les priorités de la politique pénale et aux procureurs généraux et aux procureurs de décliner ces orientations générales dans leur ressort.
Je vous renvoie au contenu de la circulaire générale de politique pénale du 19 septembre 2012 indiquant les principes directeurs de la nouvelle politique pénale : l’individualisation des décisions à tous les stades de la procédure, le principe que la réponse pénale doit intervenir dans un temps utile, c’est-à-dire n’être ni trop précipitée ni trop longue, des décisions d’incarcération qui tiennent compte des critères élargis par la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, le respect des droits de la défense, une attention particulière portée aux victimes d’infraction, attention particulière qui s’est traduite dans le projet de loi de finances pour 2013 par la création d’une centaine de nouveaux bureaux d’aide aux victimes, afin que chaque tribunal de grande instance en soit doté d’ici la fin de cette année. Est également rappelée, dans cette circulaire, la nécessité d’une prise en charge continue et dynamique des mineurs délinquants, à vocation d’abord éducative. Quant aux procureurs de la République, il est fait mention de l’obligation qui est la leur d’informer les officiers de police judiciaire des suites données par les juridictions aux procédures qu’ils ont menées.
Ces nouvelles relations entre la Chancellerie et les magistrats du ministère public sont fondées sur la responsabilité du garde des Sceaux en ce qui concerne la mise en œuvre de la politique pénale sur l’ensemble du territoire. Des directives de politique pénale peuvent également être consacrées à des territoires particuliers, tels que la Corse, Marseille, la Nouvelle-Calédonie ou la Guyane, dont la situation singulière sur le plan pénal appelle des réponses spécifiques. Ainsi, la circulaire du 23 novembre 2012 relative à la politique pénale territoriale pour la Corse recommande au parquet de favoriser la co-saisine des services de police et de gendarmerie.
Les procureurs généraux restent responsables, dans leur ressort, de l’animation et de la coordination de l’action publique, dans le respect des grandes orientations de la politique pénale générale. Les zones de sécurité prioritaires sont l’exemple type de territoires où les procureurs généraux et les procureurs déclinent la politique pénale générale en fonction des profils de délinquance qu’ils rencontrent dans leur ressort.
Les directives du garde des Sceaux peuvent aussi préciser les conditions dans lesquelles la politique pénale s’applique à des thématiques particulières. C’est l’objet de ma circulaire sur la détention d’armes ou de celle consacrée à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme. De même, le garde des Sceaux peut diffuser des instructions générales visant à accompagner une réforme législative. J’ai ainsi présenté, dans une circulaire, la loi relative au harcèlement sexuel ou encore celle ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe.
Le projet de loi prévoit par ailleurs les conditions dans lesquelles le parquet informe la Chancellerie de l’application de la loi et de la mise en œuvre des instructions générales. Aux termes de ce texte, les procureurs généraux sont tenus d’adresser, chaque année, au ministre de la Justice un rapport de politique pénale afin de rendre compte, non seulement de la gestion des parquets de leur ressort, mais aussi de la mise en œuvre de la politique pénale. Ce rapport annuel viendra s’ajouter aux rapports particuliers adressés tout le long de l’année à la Chancellerie, et qui l’informent sur l’état des procédures, la conduite locale de l’action publique, et les difficultés d’application de la politique pénale générale. Ces remontées d’information permettent au garde des Sceaux de prendre des mesures adaptées ou de savoir où il faut renforcer les moyens. Ces signalements sont aussi pour vous, parlementaires, une source d’information fort utile, qui vous permet de ne pas dépendre des médias pour connaître l’état des procédures.
M. Dominique Raimbourg, rapporteur du projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature. Je voudrais d’abord saluer M. Fenech, co-rapporteur d’application pour ce texte, avec lequel j’ai travaillé en bonne intelligence.
La réforme constitutionnelle de 2008 était déjà une avancée incontestable, et les auditions auxquelles nous avons procédé ont confirmé que le fonctionnement de l’actuel CSM, issu de cette réforme, était assez satisfaisant. Ce projet de loi constitutionnelle va cependant permettre de progresser encore, notamment sur deux points : la nécessité d’un avis conforme du CSM pour la nomination des magistrats du parquet ; la diminution de la proportion des non magistrats – je les appellerai les « laïcs » – dans la composition du CSM.
Il est nécessaire de rappeler, à ce stade, que le CSM est un conseil supérieur de la magistrature, et non de la justice : il n’est donc pas question de faire droit à la demande de certains syndicats de magistrats que lui soit transférée la direction des services judiciaires ou l’inspection générale des services judiciaires. L’objectif du texte est simplement de garantir l’indépendance et, par là même, l’impartialité de cet organisme.
Il me semble que l’on peut encore améliorer ce texte, notamment en établissant la parité entre « laïcs » et magistrats dans la composition du CSM. C’est la raison pour laquelle je vous proposerai de porter le nombre de personnalités qualifiées désignées par le collège ad hoc de cinq à six. Le CSM compterait alors trois collèges : un collège de huit magistrats du parquet, un collège de huit magistrats du siège et un collège de huit non magistrats. Il serait également possible de soumettre la désignation des personnes qualifiées à l’obligation de respecter la parité entre les hommes et les femmes.
Ensuite, nous vous proposerons d’introduire dans le collège des autorités de nomination le président d’une « instance consultative de protection des libertés publiques et de défense des droits de l’homme », cette périphrase désignant en réalité la Commission nationale consultative des droits de l’homme. Le recours à cette périphrase vise à éviter que l’on nous reproche de constitutionnaliser cette instance. De même, par précaution, le projet de loi constitutionnelle désigne la commission des Lois par la périphrase « commission permanente désignée par la loi », pour le cas où cette commission changerait de nom.
Je vous proposerai aussi de confier au collège des autorités de nomination le soin de désigner, parmi les personnalités nommées par lui, le futur président du CSM.
S’agissant du vote des commissions des Lois sur la désignation des membres « laïcs » du CSM, nous proposerons de substituer au vote bloqué de liste, prévu par le projet de loi, un vote sur chaque nom. En outre, chaque nomination, pour être effective, devrait recueillir un vote positif des trois cinquièmes des suffrages exprimés dans les deux commissions. Nous avons conscience du risque de blocage institutionnel que ce mécanisme comporte, ainsi que de celui de ne voir proposer à la nomination que des personnalités sans aspérité afin de prévenir un tel blocage. Seule l’expérience nous instruira sur ce point, mais si le système fonctionne, il pourrait être généralisé à l’ensemble des nominations visées au dernier alinéa de l’article 13 de la Constitution.
Un autre de mes amendements vise à modifier la composition de la formation plénière. La question est d’importance, sachant que le projet ouvre à celle-ci la possibilité de se saisir d’office de toute question relative à l’indépendance de l’autorité judiciaire et à la déontologie des magistrats. Telle qu’elle est prévue par le texte du Gouvernement, cette composition va à l’encontre du principe de parité, puisque sur les vingt-trois membres du CSM, seuls sept ne sont pas magistrats. C’est la raison pour laquelle je vous propose de maintenir le système en vigueur depuis la réforme de 2008, selon lequel la formation plénière ne comprend pas la totalité des magistrats : elle comprendrait alors huit magistrats et huit personnalités qualifiées. La composition paritaire de la formation plénière me semble en effet le meilleur moyen de préserver l’indépendance du CSM et de lui éviter de se transformer en intersyndicale.
Nous proposerons enfin que le CSM puisse être saisi par un magistrat sur une question de déontologie qui le concerne.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec, rapporteur du projet de loi relatif aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et d’action publique. Cela fait très longtemps que les rapports entre le parquet et le ministère de la Justice suscitent le débat, le dernier en date ayant abouti au projet de loi relatif à l’action publique en matière pénale, déposé en 1998 sur le bureau de l’Assemblée nationale par la garde des Sceaux de l’époque, Mme Élisabeth Guigou.
La disposition fondamentale du dispositif que l’on nous propose aujourd’hui est la suppression, conformément aux engagements du candidat François Hollande, de la possibilité pour la Chancellerie de donner des instructions individuelles aux magistrats du parquet : c’est l’objet de la nouvelle rédaction qui nous est proposée pour l’article 30 du code de procédure pénale. L’affirmation législative de ce principe vise non seulement à protéger les justiciables et à lutter contre les suspicions de connivence entre les politiques et la justice, mais également à remédier aux colossales difficultés nées de la contradiction entre le principe de subordination hiérarchique du ministère public français et les conventions auxquelles la France est partie. En effet, en vertu de l’article 20 de la Constitution, aux termes duquel le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation, c’est au Gouvernement qu’il revient de conduire la politique pénale, via les magistrats du parquet, qui lui sont hiérarchiquement subordonnés. Ce système original présente l’inconvénient de contrevenir aux principes posés par la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui s’est progressivement intégrée au droit positif des États membres.
Tout l’enjeu du texte est donc de concilier le principe selon lequel le Gouvernement conduit la politique de la Nation, que nul n’entend remettre en cause, notamment en matière pénale, avec l’exercice de l’action publique par des magistrats indépendants et impartiaux, bien que hiérarchiquement subordonnés.
Je tiens à souligner que le dispositif législatif qui nous est proposé réaffirme la compétence du ministre de la Justice dans la conduite de la politique pénale déterminée par le Gouvernement. Il le fait plus fortement encore que ne le faisait la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, aux termes duquel « le ministre de la justice conduit la politique d’action publique déterminée par le Gouvernement ». En revanche, le projet de loi ne modifie en rien l’article 31 du code de procédure pénale, aux termes duquel il revient au ministère public d’exercer l’action publique et de requérir l’application de la loi. C’est le respect de ces attributions propres à chacun qui doit présider aux relations entre le ministre de la Justice et le ministère public, selon les modalités que Mme la garde des Sceaux vient de rappeler.
Nous vous proposerons donc d’adopter ce dispositif, après y avoir apporté quelques améliorations.
Nous souhaiterions que les instructions générales de politique pénale soient rendues publiques. Nous voudrions aussi que le Gouvernement informe chaque année le Parlement de la mise en œuvre de sa politique pénale, par une déclaration qui pourrait être suivie d’un débat. Une telle disposition existait déjà dans le projet de loi « Guigou » de 1998.
Nous proposerons également qu’après avoir été adressé au procureur général, le rapport annuel de politique pénale établi par le procureur de la République soit communiqué par celui-ci au président du tribunal de grande instance et fasse l’objet d’un débat lors de la plus prochaine assemblée générale des magistrats du siège et du parquet. Ce dispositif est requis et décliné au niveau de chaque cour d’appel.
Nous suggérons par ailleurs de modifier le titre du projet de loi en substituant aux mots : « d’action », les mots : « de mise en œuvre de l’action », l’action publique relevant en effet de la compétence exclusive du parquet.
Enfin, afin de conforter encore les conditions de la conciliation entre les enjeux conventionnel et constitutionnel évoqués au début de mon intervention, je proposerai de préciser, à l’article 31 du code de procédure pénale, que le ministère public exerce l’action publique « dans le respect des principes d’indépendance et d’impartialité. » Une telle précision permettrait d’affirmer que les membres du parquet sont des magistrats impartiaux et indépendants, bien que hiérarchiquement subordonnés au garde des Sceaux. Ce texte doit, en lien avec la réforme du CSM, protéger notre pays du risque de sanction de la Cour européenne des droits de l’homme, sans pour autant remettre en cause la spécificité de notre ministère public. Je vous rappelle en effet que la jurisprudence de la Cour européenne dénie au ministère public la qualité d’autorité judiciaire et que la Cour de cassation partage désormais le point de vue de la Cour de Strasbourg.
M. Georges Fenech. Je vous remercie d’abord, madame la garde des Sceaux, pour votre présentation et pour l’esprit d’ouverture dont vous faites preuve en acceptant de faire évoluer votre projet de loi constitutionnelle portant réforme du CSM. Mais cette évolution même nous conduit à poser cette question : tout ça pour ça ?
On se souvient que c’est l’affaire Cahuzac qui a incité le président de la République à précipiter une réforme institutionnelle majeure, au point de remettre en cause la réforme de 2008, qui constituait pourtant une avancée considérable, sans même attendre d’avoir le recul nécessaire pour en évaluer les résultats. La majorité de ceux que nous avons auditionnés a même déploré ce que certains qualifient de « régression démocratique » et la constitution d’un « système oligarchique ». Ces auditions m’ont fait pressentir que la disposition donnant aux magistrats la majorité au sein du CSM ne serait finalement pas adoptée.
Vous confondez, madame, indépendance et autonomie : l’indépendance, ce n’est pas l’irresponsabilité. Ce n’est pas en coupant le CSM de la société que nous parviendrons à rétablir la confiance de nos concitoyens envers l’institution judiciaire. La parité entre magistrats et non magistrats serait un moindre mal, mais cela resterait une régression.
Je crains par ailleurs qu’en confiant à un collège d’autorités de nomination la désignation des personnalités qualifiées, votre projet n’affaiblisse la légitimité des membres du CSM. En effet, quelle haute autorité pourrait être plus légitime que le président de la République ou les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat ?
Pour toutes ces raisons, ce texte me semble loin d’être une avancée. Et je crains qu’il ne fasse pousser des cris d’orfraie aux syndicats de magistrats eux-mêmes, s’il ne tient pas finalement l’engagement du président de la République de donner aux magistrats – et donc aux syndicats de magistrats – la majorité au sein du CSM.
Je me demande enfin à quel titre vous maintenez la faculté pour le garde des Sceaux d’assister aux séances du CSM.
M. Jacques Bompard. Si l’intention d’assurer l’indépendance de la justice est louable, ce n’est pas en multipliant les lois qu’on y parviendra, au contraire. Si ce texte met la justice à l’abri de l’Exécutif, il ne la protégera pas des pressions des puissances politiques, ni des coteries, ni des réseaux, des syndicats, des médias, ni du conformisme ambiant, ni des puissances financières, parce que c’est impossible. Pour que le service public de la justice ne puisse pas être soupçonné de partialité, il faudrait que chaque juge soit Dieu. Ce n’est pas en changeant la forme qu’on changera le fond. L’impartialité ne se décrète pas : elle se constate.
M. Roger-Gérard Schwartzenberg. S’agissant de la composition du CSM, je partage largement la position de Dominique Raimbourg : les standards européens imposent simplement la parité, et non pas la prédominance des magistrats.
La nomination des cinq personnalités qualifiées qui auront été désignées par un collège à la composition quelque peu baroque – ce qui n’est pas nécessairement un inconvénient – dépendra de la validation d’une liste bloquée par absence de veto des trois cinquièmes des commissions des Lois des deux assemblées. Ce veto aux trois cinquièmes étant plus difficile à obtenir qu’une approbation dans les mêmes proportions, la liste a peu de chances d’être rejetée.
Si la plupart des membres de ce collège sont en effet indépendants du pouvoir politique, je vous rappelle que le Défenseur des droits, le premier président de la Cour de cassation, le procureur général près la Cour de cassation et le premier président de la Cour des comptes sont nommés en Conseil des ministres. Les différentes personnalités composant le collège ont de surcroît moins d’autorité que le président de la République et les présidents des deux assemblées parlementaires. Je ne vois donc pas l’intérêt de la substitution proposée. En outre, en quoi le président du CESE, même s’il est élu par ses pairs, serait-il plus exempt de suspicion que d’autres autorités ?
Par ailleurs, un avis conforme sera requis pour la nomination de tous les membres du parquet, y compris ceux qui sont au sommet de la hiérarchie, alors que certains magistrats du siège, eux, sont nommés sur proposition.
Enfin, je conçois la difficulté qu’il y a à concilier la position des instances européennes sur le statut du parquet et le maintien d’un lien avec la Chancellerie, comme le rappelait M. Le Bouillonnec ; mais l’obligation faite aux procureurs généraux comme aux procureurs de la République d’adapter les instructions générales de politique pénale au contexte de leurs ressorts respectifs ne risque-t-elle pas d’ébrécher l’unité de la loi pénale ? Des explications complémentaires, voire des amendements, me paraissent souhaitables sur ce point.
M. Sébastien Denaja. Je salue la portée des deux textes qui nous sont soumis. Vous étiez déjà la ministre de l’égalité, madame la garde des Sceaux ; vous serez bientôt celle de l’indépendance. En tant que membre de la Délégation aux droits des femmes de notre assemblée, je suis particulièrement sensible à la question de la parité ; or, s’il est une institution inégalitaire sur ce plan, c’est bien l’institution judiciaire, où les femmes sont aussi nombreuses en bas de la hiérarchie que rares en son sommet. Le fait qu’une femme soit à la tête de la Chancellerie ne saurait masquer cette triste réalité.
S’agissant des liens entre la Chancellerie et le parquet, on ne peut que se réjouir de voir consacrée une pratique qui a toujours été celle de la gauche. Cependant, le projet de loi ne répond pas à toutes les attentes des magistrats du parquet, dont la plupart attendent un statut rénové et plus protecteur. Quelles dispositions législatives envisagez-vous pour garantir le respect de l’autonomie de leurs décisions, l’objectivité des critères d’affectation dans les services et d’attribution des dossiers, ainsi que le respect de la liberté de parole à l’audience ?
M. Patrick Devedjian. S’agissant de la composition du Conseil supérieur de la magistrature, madame la garde des Sceaux, le président de la République s’était engagé à ce que les « clercs » disposent d’un siège de plus que les « laïcs » : la parité que M. le rapporteur veut introduire par amendement ne correspond donc pas à cet engagement.
Le principe de l’opportunité des poursuites est de la plus grande conséquence au regard de l’indépendance du parquet. Quelles sont les voies de recours contre un classement inconsidéré ?
Si un procureur n’applique pas, par simple négligence ou de manière délibérée, les directives de politique pénale, quelles en sont les conséquences et quelle est sa responsabilité ? Quelles sont alors les voies de recours pour le Gouvernement ? Rappelons que l’avortement fut autrefois un crime – passible de la guillotine, à laquelle fut condamnée une femme sous le régime de Vichy –, puis un délit de moins en moins poursuivi, avant d’être tout simplement légalisé et remboursé par la sécurité sociale : ce long chemin est dû, pour une large part, à la politique pénale et à la cessation progressive des poursuites par les parquets.
Comment les citoyens sont-ils protégés de dépendances autres que celles qui peuvent lier les magistrats au pouvoir politique, comme la dépendance aux consignes syndicales ? J’ajoute que l’indépendance et l’impartialité sont deux notions très différentes : on peut être indépendant et partial – cela arrive même très souvent.
M. Jean-Frédéric Poisson. Je regrette que l’ordre du jour de l’éventuel Congrès du Parlement du mois de juillet prochain ait été amputé de deux textes d’un intérêt tout particulier, qui de surcroît correspondent à des engagements du président de la République. Dans cette Commission comme ailleurs, le précédent exécutif, faut-il le rappeler, s’était vu reprocher de convoquer le Congrès des motifs un peu courts des « pattes arrière », comme disent les chasseurs Mais, peut-être, Mme la garde des Sceaux pourra-t-elle nous donner des informations sur le calendrier d’examen des projets de loi constitutionnelle relatifs à l’inscription du dialogue social dans la Constitution et au statut pénal du chef de l’État ?
La conclusion de M. Raimbourg me semble être l’idée directrice de son analyse : le Conseil supérieur de la magistrature ne saurait s’apparenter à une intersyndicale des magistrats. Même si la représentativité des juges était garantie par leur adhésion obligatoire à une organisation syndicale – ce qui est juridiquement impossible, bien entendu –, il ne serait sans doute pas opportun de livrer les clés du CSM à des organisations qui, compte tenu des modalités de désignation, y assurent leur présence. Une telle hypothèse est encore moins crédible au regard d’un taux de syndicalisation en moyenne inférieur à 10 %, même s’il est sans doute un peu plus élevé chez les magistrats. La sagesse commanderait de faire vivre le système actuel un peu plus longtemps ; mais telle n’est pas, apparemment, la volonté du Gouvernement et du chef de l’État. Cela dit, la proposition du rapporteur est un pis-aller, et je la fais donc mienne.
Néanmoins, en l’absence de voix prépondérante, comment faire émerger une majorité au sein d’une instance dont la composition est paritaire ? Cela risque de créer des blocages institutionnels, que le rapporteur lui-même déclare redouter.
Je partage les craintes de M. Schwartzenberg quant à un affaiblissement de l’autorité du CSM. Le projet, par exemple, ne donne aucune précision sur le profil, les titres et la spécialité du professeur d’université membre du collège de désignation : sans remettre en cause ses compétences scientifiques, bien entendu, on peut craindre que son autorité personnelle ne soit contestée dans ce rôle, ce qui ne serait pas sain pour l’institution.
Comment les sept personnalités mentionnées à l’alinéa 15 de l’article 2 désigneront-elles les cinq personnes qualifiées qui siégeront au CSM ? Disposeront-elles d’une liste ? Devront-elles se prononcer à l’unanimité ou à la majorité qualifiée ?
Enfin, j’attends avec impatience le débat sur les amendements annoncé par M. Le Bouillonnec. Quelle forme prendra l’évaluation des procureurs de la République par les procureurs généraux sur la mise en œuvre des instructions générales, telle qu’elle est prévue à l’article 2 du projet de loi ordinaire ? Comment garantir l’objectivité de cette évaluation ? Je remercie Mme la garde des Sceaux pour les rapports annuels de politique pénale mentionnés aux articles 2 et 3, car ils nous épargnent les traditionnels amendements sur le sujet ; toutefois, aucune présentation au Parlement n’est prévue. Je souhaiterais que ces rapports soient, au mieux, débattus en séance publique ou, à défaut, au sein de notre commission.
M. Alain Tourret. Est-il bien nécessaire de convoquer le Congrès pour changer, en fin de compte, un membre du CSM ? Cette convocation, concevable au regard de l’ensemble de la réforme constitutionnelle, ne relève-t-elle pas, désormais, de l’acharnement thérapeutique ?
S’agissant des liens entre le parquet et le garde des Sceaux, nous nous étions opposés à la réforme proposée par Mme Guigou ; il avait fallu des transactions complexes pour aboutir à un texte qui ne fut finalement pas voté, puisque le Congrès n’a pas été convoqué. Les radicaux de gauche refusent la République des juges comme l’indépendance des procureurs. Notre architecture judiciaire est en effet fragilisée par la non-reconnaissance de la spécificité du statut du garde des Sceaux : sa désignation devrait être ratifiée par le Parlement, et il devrait échapper aux aléas des remaniements gouvernementaux – je suis d’ailleurs loin d’être le seul à défendre cette idée. Une telle indépendance politique, en le mettant à l’abri des soupçons, lui permettrait d’établir un véritable rapport hiérarchique avec le parquet. Mais ce n’est évidemment pas le sens du texte qui nous est proposé.
Comme l’a par exemple montré l’affaire Clinton aux États-Unis, l’indépendance donne aux procureurs la possibilité d’agir avec férocité et ce, en l’absence de tout contrôle ; elle devient alors synonyme de partialité – d’où mes doutes quant à toute disposition en ce sens. De plus, comme M. Schwartzenberg le soulignait, l’unité de la politique pénale doit être assurée sur l’ensemble du territoire, tâche qui incombe d’ailleurs aux procureurs de la République – dont chacun sait qu’ils détiennent le vrai pouvoir en la matière – bien davantage qu’aux procureurs généraux. En ce sens, l’absence de hiérarchisation entre le parquet et la Chancellerie me semble dangereuse pour la République.
L’État, rappelons-le, est séparé non pas en trois mais en deux pouvoirs, puisque la justice n’est pas un pouvoir ; c’est une autorité. C’est pourquoi les deux textes dont nous discutons ne laissent pas de m’inquiéter. J’approuve les amendements du rapporteur au projet de loi constitutionnelle portant réforme du CSM, mais ceux-ci ne correspondent toutefois pas aux engagements du président de la République. Enfin, gardons-nous de réduire le lien entre les procureurs et le garde des Sceaux aux directives de politique pénale.
M. Paul Molac. La présente réforme va dans le sens de l’indépendance de la justice. À la faculté de Rennes, si je me souviens bien, mes doctes professeurs d’histoire m’enseignaient qu’il existe un pouvoir exécutif, un pouvoir législatif et un pouvoir judiciaire.
M. Alain Tourret. S’ils le disaient, ils avaient tort ! Cette thèse n’est au demeurant ni celle de Montesquieu ni celle de Locke.
M. Paul Molac. J’ai lu ces auteurs, et l’indépendance de la justice me semble être l’un des fondements de notre droit et de notre démocratie.
Nous avons de surcroît tout intérêt à lever les soupçons de nos concitoyens, qui jugent incestueux les liens entre le pouvoir politique et la justice. La perfection n’est certes pas de ce monde, mais une plus grande clarté sera bénéfique.
Je me félicite également de la présence majoritaire des magistrats au sein du CSM, comme de la place accordée à des personnalités extérieures à l’institution judiciaire.
Par ailleurs, l’un de mes amendements tend à faire valider la liste des membres du CSM par un vote positif à la majorité des trois cinquièmes des deux commissions parlementaires, plutôt que par l’absence de veto, comme c’est le cas dans la rédaction actuelle. Nous avons aussi déposé des amendements sur la question de la parité hommes-femmes et sur les propositions de nomination. En tout état de cause, nous devrions soutenir cette réforme.
La politique judiciaire et l’exercice de la justice sont en effet deux choses très différentes, monsieur Le Bouillonnec.
Enfin, les rapports des procureurs devraient être rendus publics, à tout le moins par le biais de la tenue d’un débat au Parlement.
M. Guy Geoffroy. Je reste perplexe face à certaines dispositions de l’un et l’autre texte.
L’avis conforme du CSM sur la nomination des magistrats du parquet n’appelle pas d’observations particulières de ma part. En revanche, le mode de désignation des non magistrats me semble d’une trop grande complexité au regard de l’objectif, qui était de retirer un peu de légitimité à cette désignation ; de plus, je ne vois pas au nom de quoi le président de la République et les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat seraient indignes de ce pouvoir. Je remercie donc notre rapporteur des amendements significatifs qu’il a déposés.
Je n’ai pas présenté d’amendements au projet de loi ordinaire, car je pensais que le rapporteur le ferait : l’article 1er ne laisse pas de m’étonner, non pas sur le fond, que l’on peut approuver, mais sur la forme. Aux « instructions générales » du garde des Sceaux on peut en effet opposer, non des instructions « dans des affaires individuelles », mais plutôt des instructions « particulières ». C’est d’ailleurs parce qu’il s’agissait, selon ses propres termes, d’une « affaire particulière » que le CSM – que vous aviez saisi, madame la garde des Sceaux – a refusé de rendre un avis sur l’affaire dite du « mur des cons ». Je suggère donc à notre rapporteur d’amender le quatrième alinéa de l’article 1er, pour remplacer les mots : « dans des affaires individuelles » par une expression telle que : « dans une affaire de nature particulière » ou : « dans une affaire en particulier ». Un tel amendement correspondrait mieux, à mon avis, à l’esprit du texte, esprit auquel je n’adhère d’ailleurs pas tout à fait car il faut veiller, comme le soulignait M. Tourret, à ce que la quête d’indépendance n’entraîne pas des effets collatéraux contraires à l’objectif poursuivi.
M. François Vannson. Depuis vingt ans que je suis parlementaire, je vois s’empiler les réformes de la justice. N’étant pas un praticien du droit, j’ai cependant acquis la conviction que c’est la compétence des magistrats, leur indépendance et leur imperméabilité aux pressions qui rendent leurs décisions indiscutables – sous réserve, bien entendu, des recours auxquels chaque justiciable a droit.
Je ne doute pas de vos bonnes intentions, madame la garde des Sceaux, mais je crains qu’une simple réforme du CSM ne suffise pas à éviter les dysfonctionnements. J’aborde donc nos débats avec un certain scepticisme, d’autant que le léger déséquilibre entre les magistrats du siège et les magistrats du parquet m’interpelle un peu.
Mme la garde des Sceaux. Beaucoup de questions portent, en substance, sur la signification de l’indépendance de l’autorité judiciaire – puisque c’est bien une « autorité », comme l’a rappelé M. Tourret –, comme sur le difficile exercice consistant à élaborer des mesures, telles que la nomination des magistrats sur avis conforme du CSM, la composition de cette institution où les représentants de la société civile siégeraient à parité avec les magistrats, son fonctionnement, son droit d’auto-saisine ou le principe constitutionnel de l’unité du corps nonobstant l’ordonnance de 1958, qui place le parquet sous l’autorité du garde des Sceaux.
La deuxième difficulté tient à la définition même de l’indépendance : plusieurs constitutionnalistes ont écrit des articles sur le sujet, pour dire qu’au fond, la dépendance envers le pouvoir politique, qui tire sa légitimité du suffrage universel, était sans doute la moins grave des dépendances. C’est là une question philosophique, sur laquelle je m’étais exprimée en octobre dernier lors du congrès de l’Union syndicale des magistrats. L’indépendance et l’impartialité, de fait, interrogent d’abord les préjugés, les origines et les expériences de chacun. Je propose cependant, à travers la présente réforme, de faire le pari que les magistrats connaissent la grandeur de leur mission ; qu’ils se savent investis d’un pouvoir considérable, celui de décider de la liberté d’autrui ; qu’ils sont vigilants, enfin, sur ce qui pourrait, consciemment ou inconsciemment, affecter leur impartialité.
L’indépendance et l’impartialité sont deux notions distinctes, j’en suis bien d’accord : il est plus facile d’organiser la seconde que la première, qui se heurte par exemple au principe de l’unité du corps, alors même que les magistrats du siège sont inamovibles, contrairement à ceux du parquet qui, pourtant, suivent la même formation, sont recrutés selon les mêmes modalités, prêtent le même serment et sont soumis à la même déontologie. Bref, sans préjuger d’éventuelles exceptions, notre magistrature est d’une grande maturité ; aussi l’avons-nous également associée à la réflexion sur l’indépendance et l’impartialité.
Reste que cette dernière est essentielle, notamment à ceux de nos concitoyens qui n’ont pas accès aux sphères d’influence ; c’est d’abord pour eux que la magistrature doit échapper à tout soupçon d’inféodation. En dépit de la loi du 9 mars 2004, aux termes de laquelle les instructions doivent être écrites et versées au dossier, le justiciable ordinaire a le sentiment que certaines d’entre elles peuvent être orales : bien que je ne donne aucune instruction, j’ai parfois dû préciser que je ne donnais jamais de coups de téléphone non plus… Le fait que le Parlement et le Gouvernement affirment que toute instruction individuelle, qu’elle soit écrite ou orale, est formellement interdite protègera les magistrats. Une telle mesure peut donc conduire ces derniers à accompagner la réforme, s’agissant notamment des conditions de leur impartialité et de leur indépendance.
Ces deux projets, monsieur Fenech, ne sont en rien liés à l’affaire Cahuzac, à la suite de laquelle le président de la République et le Premier ministre ont annoncé des textes sur la transparence de la vie publique et la création d’un parquet financier à compétence nationale. Le sujet n’a rien à voir avec le CSM, même si le Gouvernement a rappelé à l’occasion de cette affaire, son attachement au respect de l’indépendance de la justice, s’abstenant de toute interférence dans les procédures, conformément à des pratiques que nous entendons inscrire dans la loi.
Le projet de loi, dans sa version actuelle, prévoit que les magistrats redeviennent majoritaires au sein du CSM, mais votre Commission a visiblement une position différente ; la parité, au demeurant, est conforme aux recommandations européennes.
Reste que la présente réforme est différente de celle de 2008. J’entends bien les arguments sur la légitimité des autorités de désignation mais, outre que le président de la République et les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat incarnent le pouvoir politique, ils sont, si l’on excepte le cas particulier de la cohabitation, de sensibilité politique proche, voire identique. Le collège, monsieur Schwartzenberg, n’a certes pas la légitimité du suffrage universel, mais il en a d’autres ; certaines des personnalités qui le composent sont nommées en Conseil des ministres, c’est vrai, mais pas au même moment et pas forcément par le même Gouvernement. Au reste, je ne vous cache pas que sa composition a été difficile à déterminer, notamment parce que le nombre de ses membres devait être un peu supérieur à celui des personnalités qu’il aura à désigner… La solution retenue n’est sans doute pas idéale, mais la solution idéale existe-t-elle ? Compte tenu des engagements du président de la République en la matière, il n’y avait pas beaucoup d’autres choix. Celui qui a été retenu n’affaiblira par ailleurs ni la qualité ni la légitimité des membres du CSM, puisque la liste des personnes désignées par le collège fera l’objet d’un avis public des commissions des Lois de l’Assemblée nationale et du Sénat.
La présence du garde des Sceaux aux séances du CSM – non à ses délibérations – se justifie par le fait qu’il doit défendre des candidatures et préparer le décret de nomination.
J’ajoute que pour les nominations aux postes de procureurs généraux, de magistrats du parquet général à la Cour de cassation, d’inspecteurs généraux, d’inspecteurs généraux adjoints des services judiciaires, de procureurs généraux près une cour d’appel et de substituts chargés du secrétariat général d’une juridiction, ma circulaire du 31 juillet 2012 impose la transparence.
Le garde des Sceaux doit effectivement veiller au principe de l’unité de la loi pénale par le biais d’une circulaire, que les procureurs généraux déclinent en fonction des réalités de leur ressort. Les orientations de la politique pénale sont précisément détaillées dans cette circulaire, mais les contentieux varient selon les territoires ; l’écart peut être tel qu’il justifie une circulaire de politique territoriale : c’est le cas en Corse, où la criminalité, complexe, a des ramifications dans d’autres territoires et même à l’étranger.
Monsieur Denaja, nous pourrons reparler de la parité, ainsi que du statut des magistrats du parquet ; cependant, l’alignement de leur régime disciplinaire sur celui des magistrats du siège constitue déjà une avancée substantielle. Quant à la liberté de parole à l’audience, elle est inscrite dans l’ordonnance de 1958. Comme le dit l’adage : « la plume est serve mais la parole est libre ».
Entre 1997 et 2002, monsieur Devedjian, aucune instruction individuelle n’a été adressée aux procureurs : la mesure s’inscrit dans la continuité de pratiques anciennes, auxquelles le projet de loi « Guigou » entendait déjà donner une traduction législative. L’interdiction des instructions individuelles, faut-il le préciser, concerne aussi bien les poursuites que les réquisitions. Il existe par ailleurs des voies de recours auprès du procureur général contre un classement sans suite, que le procureur de la République doit toujours motiver. En tout état de cause, c’est précisément l’absence d’instructions qui peut amener le garde des Sceaux à rédiger plusieurs circulaires, par exemple pour préciser, s’il y a lieu, les orientations de la politique pénale en matière de terrorisme. Je rappelle que le procureur de la République est placé sous l’autorité du procureur général qui, pour le coup, peut lui adresser des instructions individuelles aux fins de poursuites ou de réquisitions.
M. Georges Fenech. Il peut aussi ne pas le faire !
M. Patrick Devedjian. Et le procureur général n’a pas forcément connaissance de tout ce qui se passe dans ses parquets !
Mme la garde des Sceaux. Aux termes de l’ordonnance de 1958, le procureur de la République doit rendre compte de ses décisions au procureur général. Bien entendu, si la situation relève d’une procédure disciplinaire, celle-ci sera ouverte ; et s’il y a une négligence du procureur général, il devra en répondre.
M. Patrick Devedjian. Les procédures disciplinaires prennent du temps !
Mme la garde des Sceaux. Il peut bien entendu y avoir des cas d’exception mais, je le répète, nous faisons le pari de la confiance. Quoi qu’il en soit, votre développement sur la force de la jurisprudence était intéressant.
Je vous ai répondu sur la dépendance, monsieur Poisson. Quant aux autres textes, ils viendront en temps voulu, mais il est vrai que l’inscription à l’ordre du jour parlementaire est un combat de tous les instants, que je mène depuis des mois.
Je suis favorable à la présentation d’un rapport annuel au Parlement par le garde des Sceaux sur l’application de la politique pénale, monsieur Molac, mais pas à celle des rapports établis par les parquets, monsieur Poisson.
Je connais vos positions, monsieur Tourret, mais il faudrait un autre texte pour les prendre en compte, et un tel texte n’est pas à l’ordre du jour.
Au cours de sa séance du mercredi 22 mai 2013, la Commission examine les articles du projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature (n° 815).
Article 1er
(article 64 de la Constitution)
Concours du CSM à la garantie de l’indépendance de la justice
L’article 1er du projet de loi constitutionnelle modifie l’article 64 de la Constitution qui, dans sa rédaction actuelle, dispose que « le président de la République est garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire » (premier alinéa dont la rédaction demeure inchangée) et qu’« il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature » (deuxième alinéa).
Le présent article remplace cette dernière phrase par la suivante : « le Conseil supérieur de la magistrature concourt, par ses avis et ses décisions, à garantir cette indépendance ».
La portée de cette modification est importante : le Conseil supérieur de la magistrature ne se contente plus « d’assister » le président de la République dans sa mission. Il concourt désormais à la garantie de l’indépendance de la justice – ce changement est aussi flagrant sur un plan grammatical, le CSM devenant le sujet de la phrase. Le terme « concourt » assure une meilleure reconnaissance du rôle dévolu au CSM.
Cette modification de l’article 64 de la Constitution est à rapprocher de la faculté nouvelle donnée au CSM de s’autosaisir. Le deuxième alinéa du nouvel article 65, dans sa rédaction issue de l’article 2 du présent projet de loi constitutionnelle, précise que le CSM se réunit en formation plénière non seulement pour répondre aux demandes d’avis formulées par le président de la République ou aux questions relatives au fonctionnement de la justice dont le saisit le ministre de la Justice, mais qu’il peut aussi « se saisir d’office des questions relatives à l’indépendance de l’autorité judiciaire et à la déontologie des magistrats ».
La modification proposée de l’article 64 de la Constitution a été très largement saluée par les personnes entendues par votre rapporteur, certaines regrettant cependant son caractère trop limité.
M. Vincent Lamanda, premier président de la Cour de cassation a estimé que le terme « concourt » pouvait laisser entendre que d’autres institutions que le CSM pourraient également être chargées de garantir, aux côtés du président de la République, l’indépendance de la justice.
Votre commission des Lois a adopté un amendement présenté par M. Georges Fenech (amendement n° 21) visant à remplacer le terme « concourt » par le terme « veille ».
*
* *
La Commission est saisie de l’amendement CL 14 de M. Georges Fenech.
M. Georges Fenech. Il convient d’écrire que le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) « veille » auprès du président de la République à garantir l’indépendance de la magistrature, plutôt qu’il n’y « concourt ».
Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement à l’unanimité.
Puis elle adopte l’article 1er modifié.
Article 2
(article 65 et articles 65–1 et 65–2 [nouveaux] de la Constitution)
Composition, fonctionnement et compétences du CSM
L’article 2 du projet de loi constitutionnelle remplace l’actuel article 65 de la Constitution par trois nouveaux articles 65, 65–1 et 65–2, le premier précisant les compétences du CSM, le deuxième fixant la composition de ses différentes formations et le dernier renvoyant à une loi organique la fixation des modalités d’application des deux premiers articles. Alors que les précédentes rédactions de l’article 65 mêlaient les règles de composition et de compétences des différentes formations au sein de mêmes alinéas, le parti est donc pris par les rédacteurs du présent projet de clarifier formellement la rédaction des articles relatifs au CSM en séparant les dispositions relatives à la composition du CSM de celles ayant trait à ses compétences et à son organisation.
Article 65 de la Constitution
Compétences et organisation du CSM
● Le premier alinéa du nouvel article 65 de la Constitution consacre expressément l’existence de la formation plénière du CSM. Il disposera désormais que le CSM « comprend une formation plénière, une formation compétence à l’égard des magistrats du siège et une formation compétente à l’égard des magistrats du parquet ».
Cette consécration n’est pas dénuée de portée symbolique lorsqu’on songe aux débats qui ont eu lieu en 2008 sur la question du maintien d’une formation plénière : le projet initial du Gouvernement distinguait alors deux formations, l’une compétente à l’égard des magistrats du siège, l’autre à l’égard des magistrats du parquet, respectivement présidées par le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette même cour. Sur l’initiative du rapporteur et Président de votre commission des Lois, M. Jean–Luc Warsmann, l’Assemblée nationale avait expressément introduit en première lecture le principe de l’existence d’une formation plénière, garantissant l’unité du corps judiciaire et permettant une analyse transversale de l’organisation de la justice, de son fonctionnement ou des questions de déontologie des magistrats.
Votre commission des Lois a adopté un amendement présenté par M. Georges Fenech (amendement n° 22) visant à inverser dans le texte l’ordre de présentation des trois formations, afin de faire figurer les formations respectivement compétentes à l’égard des magistrats du siège et du parquet avant la formation plénière, ce qui est cohérent avec la réduction des attributions de cette dernière, souhaitée par votre Commission.
● Le deuxième alinéa du nouvel article 65 de la Constitution précise les compétences de la formation plénière du CSM. Outre les compétences qui lui sont actuellement dévolues et qui demeurent inchangées – la formation plénière répond aux demandes d’avis formulées par le président de la République et se prononce sur les questions relatives à la déontologie des magistrats ou sur toute question relative au fonctionnement de la justice dont le saisit le ministre de la Justice –, le présent article précise que le CSM « peut se saisir d’office des questions relatives à l’indépendance de l’autorité judiciaire et à la déontologie des magistrats ».
La procédure qui devra être suivie pour que le CSM s’autosaisisse d’une question sera définie par la loi organique.
Lors des auditions, il a été souvent relevé qu’il apparaît pour le moins paradoxal de ne pas ouvrir la saisine du CSM aux magistrats eux–mêmes : alors que le président de la République, le garde des Sceaux et tout justiciable peuvent le saisir, qu’il pourra s’autosaisir demain, il serait curieux de ne pas permettre à un magistrat qui estime que son indépendance est menacée ou qui se pose des questions en matière de déontologie ne puisse saisir lui–même le CSM. Votre rapporteur a proposé un amendement permettant à tout magistrat de saisir le CSM sur une question déontologique qui le concerne. Cet amendement a été adopté par votre Commission (amendement n° 25), de même que deux amendements rédactionnels de votre rapporteur (amendements n° 23 et 24),
● Le troisième alinéa du nouvel article 65 de la Constitution est relatif aux pouvoirs de nomination dévolus à la formation du CSM compétente à l’égard des magistrats du siège, pouvoirs qui demeurent inchangés. Sa rédaction est identique à celle qui figure au quatrième alinéa de l’actuel article 65.
Cette formation continuera ainsi de disposer d’un pouvoir de proposition pour les postes les plus élevés dans la hiérarchie des magistrats du siège, à savoir les magistrats à la Cour de cassation (premier président, présidents de chambre, conseillers, conseillers en service extraordinaire, conseillers référendaires et auditeurs), les premiers présidents de cours d’appel et les présidents de tribunaux de grande instance. Pour ces postes, la décision du CSM s’impose au garde des Sceaux.
Pour les nominations des autres magistrats du siège en revanche, le pouvoir de proposition relève du garde des Sceaux, le CSM émettant sur le projet de nomination un avis liant le garde des Sceaux, ce dernier ne pouvant passer outre un avis négatif du CSM.
● La rédaction du quatrième alinéa du nouvel article 65 de la Constitution, relatif aux pouvoirs de nomination des magistrats du parquet, s’éloigne en revanche de celle du cinquième alinéa de l’actuelle rédaction de l’article : alors que ce dernier alinéa prévoit aujourd’hui sur la formation du CSM compétence à l’égard des magistrats du parquet « donne son avis » sur les nominations qui concernent les magistrats du parquet, la nouvelle rédaction proposée pour le quatrième alinéa de l’article prévoira qu’elle « émet un avis conforme sur la nomination des magistrats du parquet ».
Votre rapporteur a proposé de lever toute ambiguïté sur la rédaction de cette dernière phrase en lui substituant, par amendement, adopté par la commission des Lois (amendement n° 26), la phrase suivante : « Les magistrats du parquet sont nommés sur l’avis conforme de la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet ».
Sur le fond, si l’avis conforme constitue une avancée notable, certaines personnes entendues par votre rapporteur ont estimé que cette disposition ne faisait que constitutionnaliser une pratique constante, aucun garde des Sceaux n’étant, depuis 2008, jamais passé outre l’avis défavorable du CSM pour nommer un magistrat du parquet et jugé préférable d’aller plus loin vers un alignement des statuts des magistrats du siège et du parquet en octroyant à la formation du CSM compétente à l’égard des magistrats du parquet un pouvoir de nomination analogue à celui de son homologue du siège pour les postes les plus élevés dans la hiérarchie du parquet (premiers avocats généraux à la Cour de cassation, procureurs généraux, procureurs de la République). Votre rapporteur n’a pas souhaité suivre cette préconisation, rappelant que les magistrats du parquet, contrairement à ceux du siège, sont chargés de mettre en œuvre la politique pénale définie par le garde des Sceaux et qu’il est par conséquent cohérent de permettre au pouvoir exécutif de choisir les magistrats chargés d’appliquer la politique pénale qu’il définit.
● Les cinquième et sixième alinéas du nouvel article 65 de la Constitution sont relatifs aux fonctions disciplinaires du CSM : le cinquième alinéa précise, à l’instar du sixième alinéa de la rédaction actuelle, que la formation du siège « statue comme conseil de discipline des magistrats du siège ». Le droit reste inchangé en la matière. Tel n’est, en revanche, pas le cas pour ce qui est du régime disciplinaire des magistrats du parquet, qui se trouve aligné sur celui des magistrats du siège par le sixième alinéa de l’article.
En l’état actuel du droit, la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet ne dispose que du pouvoir de donner un avis au garde des Sceaux sur les sanctions disciplinaires qu’il entend prononcer. Désormais, à l’instar des magistrats du siège, ceux du parquet se verront appliquer une procédure disciplinaire dans laquelle le CSM statue comme conseil de discipline.
Votre rapporteur a proposé un amendement, adopté par la commission des Lois, allégeant la rédaction par la fusion des deux alinéas, s’inspirant d’ailleurs de la rédaction proposée en 1998 (amendement n° 27).
● Le dernier alinéa du nouvel article 65 de la Constitution constitue la reprise de l’actuel dixième alinéa de l’article, introduit en 2008 ; il précise que le CSM peut être saisi par un justiciable.
Le renvoi à une loi organique qu’opère la rédaction actuelle n’est plus nécessaire dans la mesure où le nouvel article 65–2 précisera désormais d’une manière générale qu’une loi organique détermine les conditions d’application des articles 65 et 65–1 de la Constitution.
Cette procédure, que les justiciables s’approprient progressivement, est de nature à renforcer la confiance qu’ils ont envers l’institution judiciaire en confortant l’exigence d’exemplarité qui s’impose aux magistrats.
Article 65–1 de la Constitution
Composition et mode de désignation des membres du CSM
● Les six premiers alinéas du nouvel article 65–1 de la Constitution énumèrent la liste des membres composant le CSM. Il s’agit de huit magistrats du siège, huit magistrats du parquet, un conseiller d’État, un avocat et cinq personnes qualifiées, soit au total vingt–trois membres, dont seize magistrats de l’ordre judiciaire.
Les 1° et 2° précisent que les magistrats du siège et du parquet sont respectivement élus par les magistrats du siège et du parquet, précision qui n’apparaît pas dans la rédaction actuelle du deuxième alinéa de l’article 65, qui renvoie à la loi organique le soin de déterminer les modes de scrutins des différents collèges électoraux. Le présent article élève ainsi au rang constitutionnel une garantie procédurale pour la désignation des magistrats siégeant au CSM.
Le 3° prévoit, comme c’est le cas actuellement, qu’un conseiller d’État siège au CSM. La présence de droit d’un membre du Conseil d’État au sein du CSM date de la révision constitutionnelle du 27 juillet 1993 et a été maintenue à l’occasion de la révision du 23 juillet 2008.
Le présent 3° précise que le conseiller d’État est « élu par le Conseil d’État », là où la rédaction actuelle du deuxième alinéa de l’article 65 dispose qu’il est « désigné par le Conseil d’État ». Dans la mesure où le conseiller d’État appelé à siéger au CSM est en pratique élu par les conseillers d’État, le terme « élu » semble plus pertinent.
Le 4° prévoit, comme c’est le cas actuellement, qu’un avocat siège au CSM. La présence de droit d’un avocat au sein du CSM date de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. C’est la loi organique qui précise les modalités de sa désignation.
L’article 5-1 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature, dans sa rédaction issue de la loi organique n° 2010-830 du 22 juillet 2010 relative à l’application de l’article 65 de la Constitution précise que : « l’avocat qui siège dans les trois formations du Conseil supérieur de la magistrature est désigné par le président du Conseil national des barreaux, après avis conforme de l’assemblée générale dudit conseil ». Lors de son audition par votre rapporteur, Me Christian Charrière–Bournazel, président du Conseil national des barreaux a indiqué que le bureau de cette instance avait coutume de proposer les noms de quelques personnes, souvent d’anciens bâtonniers, noms qui sont ensuite soumis au vote de l’assemblée générale du Conseil national des barreaux.
Nombreuses ont été les personnes entendues par votre rapporteur qui ont souligné la pertinence de la présence d’un avocat dans les différentes formations du CSM, tout particulièrement en matière disciplinaire où sa culture du contradictoire et des droits de la défense trouve spécialement à s’exercer.
Le 5° précise que cinq personnes qualifiées – contre six dans la composition actuelle – complètent la composition du CSM. Ces personnalités ne doivent appartenir ni au Parlement, à l’ordre judiciaire, ni à l’ordre administratif, ni – innovation du présent projet de loi constitutionnelle – « aux barreaux ».
Cette formulation large laisse une grande latitude de choix au collège chargé de la désignation des personnalités : pourraient ainsi être nommés des juristes ou des auxiliaires de justice, mais aussi des personnes ayant une compétence dans le domaine des ressources humaines, particulièrement appréciable s’agissant de la détection, lors des entretiens, des compétences managériales des candidats aux postes à responsabilité, notamment les postes de chef de cour. La formulation retenue permet aussi la nomination d’anciens députés ou sénateurs, de même que de magistrats administratifs ou judiciaires ou d’avocats honoraires.
Votre rapporteur a présenté un amendement, identique à un amendement de M. Gilles Bourdouleix, portant le nombre de personnalités qualifiées désignées par le collège ad hoc de cinq à six. Ces deux amendements ont été adoptés par la Commission (amendement n° 28).
Aux yeux de votre rapporteur, cette évolution permettra tout d’abord d’établir une parité entre magistrats et non magistrats au sein des formations du CSM (huit pout huit), parité souhaitée par la commission d’enquête sur l’affaire dite d’Outreau mais aussi appelée de leurs vœux par nombre de personnes entendues, car de nature à mettre fin au récurrent débat relatif à la composition du CSM.
Le nombre pair de membres permettra en outre au collège de respecter les exigences de parité hommes–femmes, aujourd’hui posées par l’article 5-2 de la loi organique du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature dans sa rédaction issue de la loi organique du 22 juillet 2010, exigences qui sont élevées au rang constitutionnel par un amendement présenté par M. Sergio Coronado et adopté par votre Commission (amendement n° 30).
Votre rapporteur a en outre proposé que le terme « personnes » soit remplacé par celui, plus approprié, de « personnalités » (amendement n° 29).
● Le septième alinéa de l’article 65–1 de la Constitution précise les conditions de désignation des personnalités qualifiées : ces dernières sont « désignées conjointement » par sept hautes personnalités :
— le vice–président du Conseil d’État ;
— le président du Conseil économique, social et environnemental ;
— le Défenseur des droits ;
— le premier président de la Cour de cassation ;
— le procureur général près la Cour de cassation ;
— le premier président de la Cour des comptes ;
— un professeur des universités.
La composition du collège ad hoc appelle plusieurs remarques : en premier lieu, votre rapporteur salue le remplacement des autorités politiques de nomination par un collège d’autorités, ce qui contribuera à écarter les soupçons de politisation des nominations. Il note d’ailleurs qu’une procédure de nomination de personnalités extérieures faisant intervenir de hautes personnalités indépendantes n’est pas une idée nouvelle : en 2008, l’Assemblée nationale, sur l’initiative du rapporteur Jean–Luc Warsmann, avait souhaité que les non magistrats ne soient pas majoritairement désignés par des autorités politiques et avait adopté, en première lecture, un dispositif prévoyant, outre la nomination d’un conseiller d’État et d’un avocat, la nomination d’un professeur des universités, ainsi que celle d’une personnalité qualifiée désignée par le Défenseur des droits et d’une autre désignée par le président du Conseil économique et social, le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat continuant pour leur part à nommer chacun une personnalité qualifiée ; telle n’a pas été la solution finalement retenue par le législateur constitutionnel de 2008.
De la même manière, la collégialité des instances de désignation a déjà été proposée par le passé : dans le cadre du projet de loi constitutionnelle précité relatif au CSM déposé le 15 avril 1998, la nomination des onze personnalités extérieures au corps judiciaire aurait compris, outre un conseiller d’État désigné par le Conseil d’État et six personnalités nommées respectivement par le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat, quatre personnalités nommées conjointement par le premier président de la Cour de cassation, le vice-président du Conseil d’État et le premier président de la Cour des comptes (33).
Votre rapporteur croit aux mérites de la collégialité en matière de désignation de personnalités qualifiées : le nombre de personnalités composant le collège, plus élevé que celui de personnalités à désigner, obligera ses membres à s’entendre sur chacun des noms qui seront ensuite soumis au vote de chacune des commissions des Lois de l’Assemblée nationale et du Sénat.
Certaines des personnes entendues par votre rapporteur ont pu voir une difficulté dans le fait que certains membres du collège ont été nommés par le pouvoir politique. Votre rapporteur estime que le niveau de responsabilités de ces personnes fait qu’elles sont pleinement indépendantes du pouvoir politique ; à cela s’ajoute, comme l’a fait remarquer la garde des Sceaux lors de son audition par votre commission des lois le 21 mai, le fait que ces personnalités ont été désignées selon des calendriers différents et peuvent donc avoir été nommées par des majorités politiques distinctes.
La présence du vice–président du Conseil d’État au sein du collège fait l’objet d’un débat, certaines des personnes entendues par votre rapporteur estimant délicat de prévoir sa participation à la désignation de personnalités extérieures – d’autant que, étant la personnalité la plus élevée sur un plan protocolaire, il pourrait être amené à présider le collège – alors même qu’un conseiller d’État siégera de droit au CSM et que lui–même préside l’instance de cassation des décisions du CSM. Votre rapporteur fait remarquer que le conseiller d’État membre du CSM n’était pas désigné par le vice–président du Conseil d’État mais élu par ses pairs et qu’il serait pour le moins curieux que le vice–président du Conseil d’État soit exclu d’un collège où siègent d’autres chefs de cours de même rang.
Le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette même cour, qui jusque–là présidaient respectivement les formations du CSM compétentes à l’égard des magistrats du siège et du parquet deviennent membres du collège nommant les personnalités qualifiées ; ils demeurent néanmoins respectivement président de chacune des deux formations disciplinaires en vertu des onzième et douzième alinéas du nouvel article 65–1.
La présence d’un « professeur d’université » a soulevé de nombreuses interrogations : à l’inverse des autres membres du collège, désignés en raison de leur fonction, ce « professeur des universités » devra être choisi selon des modalités qu’il reviendra à la loi organique de définir. Cette asymétrie pourrait être cause d’attaques en légitimité du professeur des universités face à des autorités, pour certaines d’entre elles de niveau constitutionnel. Les représentants du ministère de la Justice ont indiqué à votre rapporteur qu’il pourrait être envisagé de confier sa désignation au Conseil national des universités, le cas échéant parmi les professeurs de droit.
D’autres instances pourraient prétendre siéger au collège ad hoc : Mme Christine Lazerges a souligné que l’instance qu’elle préside, la Commission nationale consultative des droits de l’Homme, en tant qu’unique autorité indépendance de protection des droits de l’homme à vocation généraliste en France, homologuée comme telle par les Nations unies, aurait toute sa place dans le collège, aux côtés du Défenseur des droits.
Votre rapporteur a présenté un amendement, qui a été adopté par la commission des Lois (amendement n° 31), visant d’une part à mentionner expressément que les personnalités extérieures sont nommées par un « collège » composé de huit personnalités, l’amendement prévoyant, en outre, l’adjonction aux sept membres initialement prévus du président d’une « instance consultative de protection des libertés publiques et de défense des droits de l’homme », dont la loi organique pourrait par la suite préciser qu’il s’agit de la Commission nationale consultative des droits de l’homme. Le recours à une périphrase permet d’éviter la constitutionnalisation d’une commission dont l’existence est fondée par une loi ordinaire (34).
L’amendement précise en outre qu’il reviendra au collège de désigner le futur président du CSM, ce qui permettra, d’une part, que les commissions des Lois de l’Assemblée nationale et du Sénat se prononcent sur la nomination du président (ce que le projet de loi constitutionnelle initial ne permettait pas) et évitera, d’autre part, que la première réunion du nouveau CSM ne s’ouvre par une campagne électorale pour la présidence, peu propice à la sérénité qui doit présider aux débats du Conseil.
● Le même alinéa précise également que la liste des personnalités ainsi désignées par le collège est soumise à l’avis, au sein de chaque assemblée parlementaire, de la commission permanente désignée par la loi – c’est-à-dire la commission des Lois – qui se prononce par un avis public sur la liste des personnes ainsi désignées ; il est en outre précisé qu’aucune de ces personnes ne peut être nommée si l’addition des votes défavorables à cette liste dans chaque commission représente au moins les trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions.
La procédure ad hoc ainsi mise en place s’inspire très largement de celle qui prévaut aujourd’hui en application du dernier alinéa de l’article 13, introduit par la révision du 23 juillet 2008, qui soumet le pouvoir de nomination du président de la République à certains emplois ou fonctions à « l’avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée ». La nomination ne peut être décidée « lorsque l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions ».
Pourquoi préférer une procédure ad hoc à un simple renvoi à l’article 13 ? C’est l’exposé des motifs du présent projet de loi constitutionnelle qui apporte la réponse : « dans chaque assemblée parlementaire, une commission permanente désignée par la loi se prononcera par un avis public sur la liste des personnes ainsi désignées. La liste entière sera rejetée si l’addition des votes défavorables à cette liste représente au moins les 3/5 des suffrages exprimés au sein des deux commissions. Cela ne fera pas obstacle à ce que la nouvelle liste dont les assemblées devraient alors être saisies reprenne certains des noms figurant sur la liste ayant fait l’objet du vote défavorable ».
Ce vote bloqué sur une liste emporte toutefois une logique du « tout ou rien » qui ne satisfait pas votre rapporteur. La liberté des parlementaires se trouve bridée ; une commission prendra–t–elle l’initiative de rejeter toute une liste si un nom lui pose difficulté ? Votre rapporteur préconise donc une validation individuelle des propositions de nomination émanant du collège.
S’agissant du veto des trois cinquièmes, nombre de personnes entendues par votre rapporteur ont déclaré préférer lui voir substituer – comme l’avait d’ailleurs souhaité le président de la République dans son allocution devant la Cour de cassation le 18 janvier 2013 – un pouvoir de confirmation à un vote positif des trois cinquièmes.
Votre rapporteur a présenté un amendement, adopté par votre Commission (amendement n° 32), visant, d’une part, à remplacer le droit veto aux trois cinquièmes des suffrages exprimés exercé par les commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat par la nécessité de recueillir un vote positif des trois cinquièmes des suffrages exprimés, et d’autre part, à remplacer le vote bloqué de liste par un vote sur chaque nom – y compris celui du président – proposé par le collège ad hoc.
● Le huitième alinéa précise que le CSM se réunit en formation plénière pour élire son président parmi les personnalités qualifiées visées au 5°. Votre commission des Lois n’a pas souhaité confier à la formation plénière le soin d’élire le président du CSM mais au collège ad hoc le soin de le désigner, sa nomination étant donc soumise à un vote positif des trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des commissions des Lois des deux assemblées (cf supra).
S’agissant de la composition de la formation plénière, le déséquilibre institué par le projet initial entre magistrats et non magistrats – les magistrats occupant seize des vingt–trois sièges – pose difficulté. C’est pourquoi votre rapporteur a proposé la reprise du mécanisme de réfaction introduit par la réforme constitutionnelle de 2008, prévoyant que seulement quatre des huit magistrats du siège et seulement quatre des huit magistrats du parquet siégent à la formation plénière, au sein de laquelle sera ainsi maintenue la parité entre magistrats et non magistrats (amendement n° 33). En conséquence, votre Commission a adopté un amendement présenté par M. Gilles Bourdouleix visant, afin d’éviter tout risque de blocage, à donner voix prépondérante au président en la formation plénière (amendement n°34).
● Les neuvième et dixième alinéas sont relatifs à la composition des deux formations du CSM, respectivement compétentes à l’égard des magistrats du siège et du parquet.
La formation compétente à l’égard des magistrats du siège est composée du président du CSM, de sept des huit magistrats du siège, d’un des huit magistrats du parquet, du conseiller d’État, de l’avocat et des quatre – cinq dans l’équilibre retenu par votre commission des Lois – personnalités qualifiées autres que le président du CSM. Dans le projet initial, cette composition garantit une majorité de magistrats de l’ordre judiciaire : ils sont huit, pour sept personnalités parmi lesquelles figure le président. Dans le cadre des amendements adoptés par votre Commission, la parité est assurée dans cette formation.
De manière symétrique, la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet est composée, dans le projet initial, du président du CSM, de sept des huit magistrats du parquet, d’un des huit magistrats du siège, du conseiller d’État, de l’avocat et des quatre personnalités qualifiées autres que le président du CSM. Dans le cadre des amendements adoptés par votre Commission, le nombre de personnalités qualifiées est augmenté et la parité entre magistrats et non magistrats est assurée dans cette formation.
● Les onzième et douzième alinéas sont relatifs à la composition des deux formations du CSM lorsqu’elles statuent comme conseils de discipline : dans ce cas, la composition énoncée plus haut est complétée, respectivement, par le premier président de la Cour de cassation et le procureur général près cette même cour qui assurent la présidence de chaque formation. Cette composition renforce la majorité des magistrats de l’ordre judiciaire dans le cadre du projet du Gouvernement - ils sont neuf, dont le président, pour sept personnalités ; dans l’équilibre retenu par votre commission des Lois, les deux formations disciplinaires seraient composées de neuf magistrats et de huit personnalités extérieures.
● Le dernier alinéa précise, comme le fait aujourd’hui le neuvième alinéa de l’article 65, que le ministre de la Justice peut, sauf en matière disciplinaire, participer aux séances des formations du CSM.
Le maintien de cette disposition a été très largement critiqué par les personnes entendues par votre rapporteur. Pour le professeur Pierre Lyon–Caen, comme pour les représentants du Syndicat de la magistrature, s’il est justifié que le garde des Sceaux soit présent au début de certaines réunions du CSM afin de présenter ses projets de nominations aux membres du CSM, il serait très contestable de lui permettre d’assister à la suite des réunions ; ce serait lui conférer un droit de regard permanent sur le fonctionnement de l’institution, ce qui ne serait pas acceptable.
Votre rapporteur rappelle que cette disposition n’est que la reprise du droit actuel ; la garde des Sceaux, lors de son audition par votre Commission le 21 mai (35), a indiqué que le ministre de la Justice pouvait être présent aux débats du CSM mais en aucun cas lors de ses délibérations et qu’il était légitime que le garde des Sceaux puisse présenter ses projets de nominations aux membres des deux formations du CSM.
Article 65–2 de la Constitution
Renvoi à une loi organique
Le nouvel article 65–2 a pour unique objet de renvoyer à une loi organique la détermination des conditions d’application des articles 65 et 65–1. Sa rédaction est à rapprocher de celle du onzième alinéa de l’actuel article 65 qui dispose : « la loi organique détermine les conditions d’application du présent article ».
À la suite de la révision constitutionnelle de juillet 2008 a été adoptée la loi organique n° 2010-830 du 22 juillet 2010 relative à l’application de l’article 65 de la Constitution, qui a notamment modifié certains des articles de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature.
De la même manière, à la suite de l’adoption du présent projet de loi constitutionnelle, devrait être votée une nouvelle loi organique dont l’objet sera notamment de :
— Préciser la composition des collèges électoraux pour l’élection des magistrats du siège et du parquet appelés à siéger au CSM et à modifier, le cas échéant, les modes de scrutin retenus pour l’élection des magistrats par les différents collèges.
Le vote de la loi organique pourrait être l’occasion de rééquilibrer la composition actuelle qui assure une surreprésentation des magistrats occupant un poste élevé dans la hiérarchie judiciaire. Dans chaque formation, les trente–six premiers présidents et procureurs généraux de cours d’appel disposent d’un représentant, de même que les cent soixante et un présidents et procureurs des tribunaux de grande instance ou les magistrats hors hiérarchie de la Cour de cassation ; les trois autres membres représentant le reste du corps, soit plusieurs milliers de magistrats. Selon les informations dont dispose votre rapporteur, le Gouvernement pourrait avoir l’intention de fondre dans un même collège, s’agissant des magistrats du siège, les conseillers à la Cour de cassation et les premiers présidents de cours d’appel. Une fusion analogue serait opérée pour les magistrats du parquet.
Les avis sont néanmoins assez partagés sur ce sujet : M. Jean–Claude Marin, procureur général près la Cour de cassation, président de la formation du CSM compétente à l’égard des magistrats du parquet, tout comme d’ailleurs M. Jean Trotel, premier président de la cour d’appel de Lyon, membre de la formation du CSM compétente à l’égard des magistrats du siège, ont souligné que les chefs de cour assument des fonctions d’encadrement très différentes de celles des conseillers et avocats généraux à la Cour de cassation, justifiant pleinement leur présence en tant que tels au CSM.
— Préciser les modalités de réunion du collège ad hoc.
Il reviendra à la loi organique de préciser les modalités de fonctionnement du futur collège, du moins dans ses grands principes. Il n’est pas certain que la loi organique doive préciser dans le détail les modalités de sa réunion ; elle pourrait aussi laisser une assez grande marge d’appréciation à ses membres pour régler les modalités de leurs délibérations.
— Préciser les modalités d’autosaisine du CSM.
Si la loi constitutionnelle reconnaît au CSM la compétence pour se saisir d’office de questions relatives à l’indépendance de l’autorité judiciaire et à la déontologie des magistrats, il reviendra à la loi organique de préciser les modalités de cette autosaisine, notamment les règles de majorité permettant la prise d’une telle décision.
— Préciser le statut des membres du CSM.
Comme l’ont révélé les entretiens que votre rapporteur a eus avec des membres du CSM, l’ampleur de la tâche de membre de ce conseil plaide sans doute pour un exercice à temps plein, qu’il s’agisse des magistrats ou des personnalités extérieures, sauf à courir le danger de voir évoluer leur rôle vers une délégation à des assistants, faute de temps pour les membres de se plonger réellement dans les dossiers. Si une telle solution était préférée, il reviendrait au législateur organique de déterminer de nouvelles modalités d’indemnisation des membres du CSM.
La future loi organique devrait également, à l’instar de la loi organique précitée de juillet 2010, modifier certains articles de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature afin de tirer les conséquences de l’instauration de l’avis conforme du CSM pour la nomination des magistrats du parquet.
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* *
La Commission est saisie de l’amendement CL 36 de M. Gilles Bourdouleix, tendant à supprimer l’article 2.
M. Gilles Bourdouleix. Il y a aujourd’hui d’autres priorités que cette réforme, qui est loin des préoccupations des Français.
M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable. Cette réforme, qui a notamment pour but de constitutionnaliser l’exigence d’un avis conforme du CSM pour la nomination des magistrats du parquet, est importante.
La Commission rejette l’amendement.
Puis elle est saisie de l’amendement CL 15 de M. Georges Fenech.
M. Georges Fenech. Il est plus logique de présenter la composition du Conseil supérieur de la magistrature avant d’en déterminer les attributions, comme la Constitution le fait d’ailleurs pour le Conseil constitutionnel. L’amendement tend donc à inverser l’ordre des articles 65 et 65-1 proposés par le projet de loi constitutionnelle.
M. le rapporteur. Avis défavorable, car il est au contraire préférable de définir la compétence du CSM avant d’en fixer la composition.
La Commission rejette cet amendement.
Elle est ensuite saisie de l’amendement CL 16 de M. Georges Fenech.
M. Georges Fenech. Dans l’esprit du rapporteur, la formation compétente à l’égard des magistrats du siège et la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet sont plus importantes que la formation plénière, dont il importe au reste de revoir les prérogatives et la composition telles que les prévoit le texte. Dès lors, il apparaît logique et nécessaire de redonner la prééminence aux deux premières en les citant avant plutôt qu’après ladite formation plénière.
M. le rapporteur. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.
Puis elle adopte successivement les amendements de précision rédactionnelle CL 54 et CL 55 du rapporteur.
Elle est ensuite saisie de l’amendement CL 17 de M. Georges Fenech.
M. Georges Fenech. Cet amendement tend à insérer au troisième alinéa, après les mots : « d’office », les mots : « , après approbation d’au moins trois quarts des membres de la formation plénière » pour ce qui concerne la saisine d’office du CSM
M. le rapporteur. Avis défavorable, car un amendement ultérieur viendra modifier la composition de la formation plénière, répondant partiellement à la crainte que vous exprimez dans votre exposé des motifs.
L’amendement est retiré.
La Commission examine l’amendement CL 56 du rapporteur.
M. le rapporteur. Il s’agit d’autoriser les magistrats à saisir le CSM des questions de déontologie qui les concernent.
La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.
Elle est ensuite saisie de l’amendement CL 18 de M. Georges Fenech.
M. Georges Fenech. Cet amendement donnera probablement lieu à un clivage entre la majorité et l’opposition.
L’autorité judiciaire n’a pas la légitimité démocratique qu’ont les pouvoirs exécutif et législatif. Il convient donc d’en rester à la réforme de 2008, qui a déjà innové en permettant au Conseil supérieur de la magistrature de donner un avis simple sur les nominations des magistrats du parquet. Est-il d’ailleurs si nécessaire de procéder dans la précipitation à une nouvelle réforme sur ce point, surtout en l’absence de toute étude d’impact ?
Plus généralement, les magistrats du parquet, en particulier les procureurs, ont pour mission de protéger la société et de représenter ses intérêts. Or, la volonté générale s’exprime par le vote des lois définissant la politique du Gouvernement en matière de justice, en premier lieu la politique pénale. Il est donc légitime que le pouvoir politique, élu démocratiquement au suffrage universel, puisse continuer à nommer ces magistrats.
M. le rapporteur. Avis défavorable. C’est évidemment le cœur de la réforme qui est en cause ici et la pratique proposée a déjà été appliquée par deux gardes des Sceaux successifs – M. Michel Mercier et Mme Christiane Taubira.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. D’autre part, la réalisation d’une étude d’impact n’est pas une obligation pour les projets de loi constitutionnelle. C’est là une lacune de la réforme constitutionnelle de 2008…
La Commission rejette l’amendement.
Elle adopte ensuite l’amendement de précision rédactionnelle CL 57 du rapporteur. En conséquence, les amendements CL 1 et CL 2 de M. Sergio Coronado deviennent sans objet.
M. Sergio Coronado. Mes amendements tendaient à aligner le mode de nomination des magistrats du parquet sur celui des magistrats du siège. Dès lors que le Conseil supérieur de la magistrature peut faire des propositions pour les nominations des magistrats du siège à la Cour de cassation, des premiers présidents des cours d’appel et des présidents des tribunaux de grande instance, il doit pouvoir proposer des nominations aux postes comparables pour les magistrats du parquet. L’amendement CL 1 se distinguait du CL 2 en ce qu’il ajoutait à la liste de ces postes celui de procureur de la République financier.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Merci de ces précisions, hélas sans plus d’objet.
La Commission est saisie de l’amendement CL 58 du rapporteur.
M. le rapporteur. Afin d’alléger la rédaction, je propose de fusionner les alinéas 6 et 7.
La Commission adopte l’amendement. En conséquence, l’amendement CL 19 de M. Georges Fenech devient sans objet.
La Commission est saisie, en discussion commune, des amendements CL 32 de M. Georges Fenech et CL 3 de M. Sergio Coronado.
M. Georges Fenech. Permettez-moi, monsieur le président, de revenir un instant sur mon amendement CL 19 qui est tombé.
Selon moi, le CSM doit donner son avis, et non statuer, sur les sanctions disciplinaires concernant des membres du parquet. Je suggérais donc de revenir à cet égard à l’esprit de la loi constitutionnelle de 2008. Il est en effet nécessaire que ces magistrats restent sous l’autorité ultime du garde des Sceaux, car c’est une politique publique qui est mise en œuvre à travers l’action du parquet. Cela ne nuirait en rien à l’indépendance de la justice, mais contribuerait à légitimer démocratiquement une action publique, tout en demandant aux responsables politiques d’assumer cette politique. D’autre part, la disposition que je proposais aurait grandement réduit les risques de corporatisme. Mon amendement CL 32 est défendu.
M. Sergio Coronado. De même mon amendement CL 3, qui va dans le même sens.
M. le rapporteur. Avis défavorable, car ces amendements sont satisfaits par l’adoption de l’amendement CL 56.
Les amendements CL 32 et CL 3 sont retirés.
Puis la Commission examine l’amendement CL 33 de M. Gilles Bourdouleix.
M. Gilles Bourdouleix. Afin d’éviter que, dans leur fonction disciplinaire, les magistrats membres du CSM n’aient à statuer sur le cas de magistrats de rang supérieur, cet amendement tend à exclure qu’ils puissent être en activité : il pourrait alors s’agir soit d’anciens magistrats, soit de magistrats placés en disponibilité.
M. le rapporteur. Avis défavorable. Une telle disposition relève de la loi organique – étant entendu que le cumul d’indemnités associé à ce cumul de fonctions devra nous inciter à procéder sur ce point avec la plus grande prudence.
La Commission rejette cet amendement.
Elle est ensuite saisie des amendements CL 20 de M. Georges Fenech et des amendements CL 40 et CL 39 de M. Gilles Bourdouleix, pouvant faire l’objet d’une discussion commune.
M. Georges Fenech. Mon amendement CL 20 tend à réduire de huit à quatre le nombre de magistrats dans chacune des formations.
La question cruciale est ici de savoir si la majorité au sein du CSM doit revenir aux magistrats ou aux personnalités de la société civile. La réforme de 2008 a opté pour la deuxième formule afin de décloisonner le Conseil, de l’ouvrir sur la société et d’éviter les effets de corporatisme. Des clubs de réflexion tels que Terra Nova ou l’Institut pour la justice se sont prononcés dans le même sens, tout comme la commission Truche dans son rapport de 1997. Vous-même, monsieur le président, si j’en crois un article publié récemment par Le Monde, avez émis des doutes quant à la nécessité de renverser la proportion actuelle.
De fait, l’indépendance n’est pas l’autonomie et nous sommes inquiets à l’idée que pourraient intervenir des accords entre syndicats, aboutissant à une sorte d’autogestion. N’oublions pas en effet que les magistrats membres du CSM sont élus sur des listes présentées par les organisations syndicales.
Pour toutes ces raisons, le maintien d’une majorité de non magistrats me semble préférable à la parité que propose le rapporteur, au terme d’une longue réflexion. Le CSM doit être représentatif de la société, qui a un droit de regard sur la nomination des juges.
M. Gilles Bourdouleix. Mes amendements CL 40 et CL 39, bien que proposant d’autres proportions, relèvent du même esprit et se recommandent par les mêmes arguments. Il s’agit en effet d’éviter une autogestion du CSM, compte tenu de la syndicalisation des magistrats. Il est préférable d’assurer aux personnalités de la société civile une présence égale, sinon une majorité, au sein de ce conseil.
M. le rapporteur. Avis défavorable. La réforme est certes délicate car elle vise à la fois à garantir l’indépendance des juges, et partant leur impartialité, et à éviter la tentation corporatiste qui est propre à tous les corps.
Un équilibre a été trouvé avec l’établissement d’une parité entre magistrats et non magistrats, la présidence du CSM revenant à un de ces derniers. Il convient, à mon sens, de s’en tenir à cet équilibre.
La Commission rejette successivement les trois amendements.
Elle examine les amendements CL 4 de M. Sergio Coronado et CL 50 de Mme Catherine Coutelle, pouvant faire l’objet d’une discussion commune.
M. Sergio Coronado. Mon amendement CL 4 tend à instaurer la parité dans la composition du CSM en y garantissant aux femmes la place qui leur revient légitimement.
M. Sébastien Denaja. L’amendement CL 50 a le même objet.
M. le rapporteur. Avis défavorable, bien que je sois favorable à la parité entre hommes et femmes. Celle-ci fera en effet l’objet d’amendements que nous examinerons tout à l’heure, mais qui ne s’appliqueront qu’aux non magistrats, dont la désignation relève de ce projet de loi constitutionnelle. La parité parmi les magistrats relève, quant à elle, de la loi organique – et l’on peut pressentir déjà qu’il ne sera pas si facile de l’organiser, compte tenu de l’existence de trois collèges d’élection…
M. Sébastien Denaja. En vertu de quel grand principe cette parité ne relève-t-elle pas du champ constitutionnel ? Pourquoi exclure de cette loi constitutionnelle la parité pour les magistrats ?
M. le rapporteur. La parité n’est nullement exclue, mais renvoyée à la loi organique qui fixera les modalités d’élection des magistrats qui siègeront au CSM.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Il serait compliqué d’inscrire dans la Constitution toutes les modalités d’élection des différentes instances dont elle fait état !
M. Sébastien Denaja. Sans être pleinement convaincu – la parité entre les femmes et les hommes n’est pas une simple modalité d’élection –, je me range à vos arguments et retire l’amendement CL 50.
L’amendement CL 50 est retiré.
M. Sergio Coronado. Rassuré par l’attachement du rapporteur à la parité entre femmes et hommes et par la position prise sur ce point par le groupe majoritaire, je retire également mon amendement CL 4.
L’amendement CL 4 est retiré.
La Commission est ensuite saisie de l’amendement CL 21 de M. Georges Fenech.
M. Georges Fenech. Ce projet de loi constitutionnelle représente, par rapport aux promesses du président de la République, un net recul – sinon un nouveau reniement.
Majorité de « laïcs » ou majorité de « clercs » ? Ce sera finalement la parité, soit l’ajout d’un magistrat à la composition actuelle du CSM. Comme je le soulignais hier en présence de la garde des Sceaux, c’est donc pour une seule personne que vous nous demandez de nous déplacer à Versailles pour un Congrès. Tout ça pour ça ! Nous assistons à une sorte de rétropédalage au plus haut niveau de l’État.
Vous procédez ici dans la précipitation, en réponse à l’affaire Cahuzac, comme si celle-ci aurait été évitée avec une autre configuration du Conseil supérieur de la magistrature. Une telle réforme méritait davantage de réflexion et de concertation. Les membres du Conseil supérieur de la magistrature ont d’ailleurs fait part de leur émotion au président de la République, qui a en réponse exprimé ses regrets quant à l’interprétation faite de ses propos.
La montagne constitutionnelle accouche d’une souris. Fallait-il se précipiter de réformer le Conseil supérieur de la magistrature alors que, comme vous l’avez dit vous-même hier, monsieur le rapporteur, la réforme de 2008 n’a été contestée par personne – à l’exception, notable certes, de l’Union syndicale des magistrats (USM) ? Sans doute la réaction de ce syndicat majoritaire sera-t-elle vive en constatant que les engagements présidentiels ne sont pas tenus.
M. le rapporteur. La réforme du CSM, destinée à assurer l’indépendance de la justice, a été envisagée bien avant l’affaire Cahuzac.
D’autre part, ce sont seulement trois membres du CSM, sur vingt-deux, qui ont écrit au président de la République et celui-ci a répondu qu’il ne fallait pas chercher une attaque personnelle derrière la tournure prise par la réforme. On ne saurait donc tirer argument de ce qui n’est somme toute qu’un incident mineur.
Cette réforme a surtout l’objectif louable de rétablir la confiance de nos concitoyens dans l’indépendance de la justice, ce qui, même si les modifications de la Constitution sont limitées, justifie que nous nous déplacions jusqu’à Versailles.
En outre, certains événements passés justifient pleinement la constitutionnalisation de l’avis conforme pour la nomination des procureurs : ceux-ci doivent à la fois être vertueux et avoir l’apparence de la vertu. Cela aussi justifie que nous allions à Versailles !
La Commission rejette l’amendement.
Les amendements CL 5 de M. Sergio Coronado et CL 51 de Mme Catherine Coutelle sont retirés.
Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CL 23 de M. Georges Fenech.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques CL 59 du rapporteur et CL 41 de M. Gilles Bourdouleix, et l’amendement CL 6 de M. Sergio Coronado.
M. le rapporteur. Mon amendement vise à porter de cinq à six le nombre de non magistrats au sein du CSM – et d’en indiquer les conséquences pour les formations du Conseil compétentes respectivement à l’égard des magistrats du parquet et du siège.
M. Gilles Bourdouleix. Mon amendement est identique.
M. René Dosière. Comment et à l’initiative de qui se réunira le collège des non magistrats, composé de personnalités très diverses ? Pourquoi, d’autre part, y faire figurer le président du Conseil économique, social et environnemental au même titre que le vice-président du Conseil d’État ou le premier président de la Cour de cassation ?
M. le rapporteur. Les non magistrats dont il est question dans mon amendement sont membres du CSM. Quant aux personnalités que vous évoquez, elles font partie des autorités chargées de les nommer, nous reviendrons sur ces questions un peu plus loin dans notre examen de l’article.
M. Sergio Coronado. Je retire mon amendement CL 6 pour me rallier aux deux amendements identiques.
L’amendement CL 6 est retiré.
La Commission adopte les deux amendements identiques CL 59 et CL 41.
Elle adopte ensuite l’amendement de précision CL 60 du rapporteur.
Puis elle examine l’amendement CL 8 de M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Je propose qu’il y ait autant d’hommes que de femmes parmi les six personnalités qualifiées siégeant au Conseil supérieur de la magistrature.
M. le rapporteur. Avis favorable, sous réserve précisément que les mots « avec un nombre égal de représentants de chaque sexe » soient remplacés par les mots « comprenant un nombre égal de femmes et d’hommes ».
M. Sergio Coronado. C’est entendu.
La Commission adopte l’amendement CL 8 ainsi rectifié.
L’amendement de repli CL 7 de M. Sergio Coronado est retiré, de même que l’amendement CL 52 de Mme Catherine Coutelle.
La Commission en vient à l’amendement CL 37 de M. Gilles Bourdouleix.
M. Gilles Bourdouleix. Nous souhaitons conserver, au sein du CSM, une majorité de personnalités extérieures, comme l’avait permis la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008. À cette fin, notre amendement vise à rétablir les deux personnalités qualifiées désignées par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat.
M. le rapporteur. Avis défavorable : l’objectif de la réforme est précisément d’éviter que les personnalités chargées de désigner les membres du CSM n’aient une appartenance politique.
La Commission rejette l’amendement.
Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement CL 38 de M. Gilles Bourdouleix.
La Commission en vient à l’amendement CL 22 de M. Georges Fenech.
M. Georges Fenech. Cet amendement tend à introduire un membre du Conseil national de l’aide aux victimes au sein du CSM, au titre des représentants d’associations œuvrant dans ce domaine. Il s’agit, une fois encore, d’ouvrir le CSM à la société civile.
M. le rapporteur. Avis défavorable, pour trois raisons. D’abord, si nous ouvrons la porte aux victimes, il faudra le faire pour toutes les autres catégories de justiciables. Ensuite, la composition du Conseil national de l’aide aux victimes étant particulièrement complexe – il comprend à la fois des élus et des représentants des associations œuvrant dans le secteur –, il lui sera difficile de désigner un représentant. Enfin, le fait qu’il s’agisse d’une instance créée par décret soulève une difficulté juridique – qui pourrait toutefois être surmontée.
La Commission rejette l’amendement.
La Commission est saisie de l’amendement CL 34 de M. Gilles Bourdouleix.
M. Gilles Bourdouleix. Cet amendement, ainsi que le CL 35 qui suit, vise à inscrire dans la Constitution le principe de la parité entre hommes et femmes au sein du Conseil supérieur de la magistrature. Dans la mesure où il nous a été donné satisfaction s’agissant des personnalités extérieures et où nous avons entendu les arguments du rapporteur s’agissant des représentants des magistrats, je les retire.
Les amendements CL 34 et CL 35 sont retirés.
La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL 24 de M. Georges Fenech et CL 61 du rapporteur.
M. Georges Fenech. Jusqu’ici, les personnalités qualifiées étaient nommées par les plus hautes autorités du pays : le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat. Vous proposez qu’elles soient désormais désignées par un « collège », composé de personnalités telles que le Défenseur des droits ou le président du Conseil économique, social et environnemental. Je crains que cela n’affaiblisse la légitimité du CSM – voudriez-vous nommer de la même façon les membres du Conseil constitutionnel ?
D’autre part, ce dispositif me paraît bien complexe. Comment le collège procédera-t-il pour désigner collectivement les personnalités qualifiées membres du CSM ?
L’objet du présent amendement est donc de revenir au système de nomination antérieur.
M. le rapporteur. Avis défavorable : la réforme tend précisément à tenir à distance du pouvoir politique les autorités chargées de nommer les personnalités extérieures membres du CSM. Les modalités retenues sont classiques : de tels collèges existent déjà, notamment pour les nominations aux organismes de conseil en matière de finances publiques. En outre, ce dispositif permet une ouverture du CSM à la société civile.
Mon amendement CL 61 tend d’ailleurs à élargir la composition du collège au président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme ; afin de ne pas constitutionnaliser cette dernière, il y est fait référence par une périphrase. D’autre part, pour éviter qu’une des personnalités ainsi désignées ne soit obligée de faire campagne auprès des membres du CSM, je propose que le président du CSM – choisi, je le rappelle, parmi elles – soit désigné par les membres du collège, sous réserve que les commissions des lois de l’Assemblée nationale et du Sénat valident ce choix.
M. Georges Fenech. Comment sera désigné le professeur des universités qui participera au collège ?
M. le rapporteur. Cette question a fait l’objet d’importantes réflexions lors des auditions. Les modalités seront précisées par la loi organique : ce pourrait être le président du Conseil national des universités qui sera chargé de le désigner, de façon à être assuré qu’il s’agira bien d’un juriste.
M. Jean-Frédéric Poisson. Et comment les membres du collège désigneront-ils à leur tour les six personnalités qualifiées ?
M. le rapporteur. Ce sera également précisé par la loi organique, mais le vice-président du Conseil d’État et le premier président de la Cour de la cassation nous ont assuré qu’ils avaient l’habitude de procéder à des nominations conjointes et que cela ne soulevait aucune difficulté.
M. Philippe Gosselin. Voilà que l’on se met à faire du droit constitutionnel coutumier : c’est intéressant !
M. le rapporteur. Je souhaite également répondre à une objection soulevée par des amendements ultérieurs qui tomberont si la Commission adopte le mien : la présence du vice-président du Conseil d’État dans la liste des personnes chargées de désigner les personnalités qualifiées, alors qu’un conseiller d’État figure déjà au nombre des personnalités membres de droit du CSM, se comprend dans la mesure où ce dernier n’est pas nommé, mais élu par le Conseil d’État ; dès lors, le vice-président du Conseil d’État peut disposer d’un pouvoir de désignation partagé au sein du collège.
M. Georges Fenech. Cela donne quand même beaucoup de poids au Conseil d’État – d’autant que celui-ci est l’instance de cassation des décisions du CSM !
La Commission rejette l’amendement CL 24 de M. Georges Fenech, puis adopte l’amendement CL 61 du rapporteur.
En conséquence, les amendements CL 25 de M. Georges Fenech, CL 45 de M. Gilles Bourdouleix, CL 26 et CL 30 de M. Georges Fenech, CL 9 et CL 10 de M. Sergio Coronado et CL 31 de M. Georges Fenech deviennent sans objet.
La Commission en vient à l’amendement CL 62 du rapporteur.
M. le rapporteur. Cet amendement remplace le vote sur une liste par un vote sur chaque nom et dispose que les personnalités qualifiées désignées par le collège doivent recueillir le vote positif des trois cinquièmes des suffrages exprimés dans les commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. C’est sans doute parier sur la sagesse du Parlement, mais peut-être serait-il temps de lui faire confiance !
Mme Marie-Françoise Bechtel. En dépit de tout le bien que je pense des améliorations apportées au texte par le rapporteur, je ne suis pas favorable à cet amendement. Obtenir un vote positif à la majorité qualifiée d’une commission parlementaire, ce n’est pas la même chose que d’obtenir un consensus au sein d’un organe collégial, tel que celui qui procédera à la désignation des personnalités qualifiées. On risque d’aboutir à une entente sur le plus petit dénominateur commun et de choisir des personnalités qui ne gêneront personne, sans considération pour leur qualification.
M. Georges Fenech. En ce qui me concerne, une fois n’est pas coutume, je soutiens l’amendement du rapporteur ! Le droit de veto collectif, tel qu’il était prévu par le projet de loi constitutionnelle, n’est pas dans nos usages. Revenir à une validation par les commissions permanentes me paraît une excellente chose, d’autant plus qu’un vote positif à la majorité des trois cinquièmes renforcerait la légitimité des membres du CSM.
M. Matthias Fekl. Certes, le risque évoqué par Mme Bechtel existe, mais je suis convaincu que l’inversion de la majorité est indispensable pour conforter les nominations. Je suis donc très favorable à cet amendement, et je pense même que nous devrions engager une réflexion afin d’étendre cette procédure à d’autres types de nomination. Cela renforcerait la position, tant des personnes nommées, que du Parlement.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. D’ailleurs, sous la précédente législature, nous avions à plusieurs reprises souligné l’intérêt d’un vote positif, mais les collègues qui étaient alors dans la majorité s’y étaient opposés…
M. Philippe Gosselin. Nous avons pris le temps de la réflexion !
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Vous m’en voyez heureux ! Je suis d’accord avec Matthias Fekl : à l’avenir, il faudrait que l’expression du Parlement se traduise par des votes positifs.
M. Gilles Bourdouleix. Le groupe UDI soutient l’amendement du rapporteur – d’autant que nous avons déposé deux amendements qui reprennent chacun des points évoqués. Il est vrai que nous avions eu des discussions au sujet de la règle de la majorité inversée durant la précédente législature, et le quasi-consensus que nous trouvons aujourd’hui est très positif.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Félicitons-en le rapporteur !
La Commission adopte l’amendement, le président Jean-Jacques Urvoas constatant qu’une seule voix s’est exprimée contre l’amendement.
En conséquence, les amendements CL 27 de M. Georges Fenech, CL 48 de M. Gilles Bourdouleix, CL 28 de M. Georges Fenech, CL 49, CL 47 et CL 46 de M. Gilles Bourdouleix, CL 11 de M. Sergio Coronado et CL 29 de M. George Fenech deviennent sans objet.
La Commission est saisie de l’amendement CL 63 du rapporteur.
M. le rapporteur. Cet amendement vise à faire en sorte que la composition de la formation plénière respecte la parité entre magistrats et non magistrats, afin d’éviter que les premiers ne deviennent majoritaires du fait de l’existence d’un double collège. Je précise que la solution proposée est celle qui avait été adoptée lors de la réforme de 2008.
Ce système a un autre avantage : celui de respecter le principe du contradictoire, les droits de la défense et les exigences de la Cour européenne des droits de l’homme relatives à la procédure disciplinaire. En effet, le CSM étant à la fois un organisme chargé de donner des avis en matière de déontologie et une instance disciplinaire, il convient d’éviter que ceux qui donnent un avis sur la déontologie soient également membres de l’instance disciplinaire, afin qu’ils ne puissent pas faire l’objet d’une procédure de révocation ou de contestation au motif qu’ils ne seraient pas impartiaux.
M. Georges Fenech. Comment et par qui seront désignés les huit magistrats membres de cette formation plénière, parmi les seize que comprendra le CSM ?
M. le rapporteur. La loi organique le précisera.
M. Georges Fenech. C’est une réforme constitutionnelle à tiroirs !
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Je rappelle, chers collègues, que le vote du projet de loi constitutionnelle par le Congrès étant prévu le 22 juillet, l’Assemblée nationale devrait être saisie de la loi organique à partir du 16 septembre.
La Commission adopte l’amendement.
Elle examine ensuite l’amendement CL 42 de M. Gilles Bourdouleix.
M. Gilles Bourdouleix. Il s’agit de rendre la voix du président prépondérante, dans la mesure où l’on risque d’aboutir à une égalité des voix dans le cadre d’un système paritaire.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Cela me paraît convaincant !
M. le rapporteur. Et je suis convaincu, à condition précisément de remplacer « compte double » par « est prépondérante ».
M. Gilles Bourdouleix. J’en suis d’accord.
La Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.
Elle en vient à l’amendement CL 43 de M. Gilles Bourdouleix.
M. Gilles Bourdouleix. Cet amendement vise à ce que les voix des personnalités qualifiées comptent double en formation plénière, de façon à rétablir la parité.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Votre amendement est satisfait par un précédent amendement du rapporteur, monsieur le député. Acceptez-vous de le retirer ?
M. Gilles Bourdouleix. Je le retire.
L’amendement est retiré.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. À la suite de l’adoption de l’amendement CL 59 du rapporteur, les amendements CL 12 et CL 13 de M. Sergio Coronado n’ont plus d’objet.
Les amendements sont retirés ainsi que l’amendement CL 44 de M. Gilles Bourdouleix.
La Commission adopte l’article 2 modifié.
Article 3
Modalités d’entrée en vigueur des nouvelles rédactions
des articles 65 et 65–1 de la Constitution
Le présent article a pour objet de préciser les modalités d’entrée en vigueur des nouvelles rédactions des articles 65 et 65–1, relatifs respectivement aux nouvelles attributions et aux nouvelles règles de composition du CSM.
Il précise que les nouvelles rédactions de ces articles entreront en vigueur dans les conditions fixées par la loi organique nécessaire à leur application.
Il reviendra au législateur organique de décider si l’actuel CSM, dans sa composition issue de la révision constitutionnelle de 2008, ira au bout de son mandat, soit février 2015, ou bien si ce mandat sera écourté pour laisser place à un CSM à la composition renouvelée.
La Commission adopte l’article 3 sans modification.
Puis elle adopte l’ensemble du projet de loi constitutionnelle modifié.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Je précise que c’est le texte du Gouvernement qui sera examiné en séance plénière, et non celui de la Commission, puisqu’il s’agit d’un projet de loi constitutionnelle.
Je remercie le rapporteur pour son travail constructif et consensuel, qui a souvent recueilli l’assentiment de l’opposition.
*
* *
En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter le projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature (n° 815), modifié par les amendements figurant au tableau comparatif ci-après.
Dispositions en vigueur ___ |
Texte du projet de loi ___ |
Propositions de la Commission ___ |
Projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature |
Projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature | |
Constitution du 4 octobre 1958 |
Article 1er |
Article 1er |
Art. 64. – Le Président de la République est garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire. |
Le deuxième alinéa de l’article 64 de la Constitution est remplacé par un alinéa ainsi rédigé : |
(Alinéa sans modification) |
Il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature. |
« Le Conseil supérieur de la magistrature concourt, par ses avis et ses décisions, à garantir cette indépendance. » |
… magistrature veille, par … (Amendement n° 21) |
Une loi organique porte statut des magistrats. |
(Alinéa sans modification) | |
Les magistrats du siège sont inamovibles. |
(Alinéa sans modification) | |
Article 2 |
Article 2 | |
L’article 65 de la Constitution est remplacé par les dispositions suivantes : |
||
Art. 65. – Le Conseil supérieur de la magistrature comprend une formation compétente à l'égard des magistrats du siège et une formation compétente à l'égard des magistrats du parquet. |
« Art. 65. – Le Conseil supérieur de la magistrature comprend une formation plénière, une formation compétente à l’égard des magistrats du siège et une formation compétente à l’égard des magistrats du parquet. |
… comprend une formation compétente à l’égard des magistrats du siège, une formation compétente à l’égard des magistrats du parquet et une formation plénière. (Amendement n° 22) |
La formation compétente à l'égard des magistrats du siège est présidée par le premier président de la Cour de cassation. Elle comprend, en outre, cinq magistrats du siège et un magistrat du parquet, un conseiller d'État désigné par le Conseil d'État, un avocat ainsi que six personnalités qualifiées qui n'appartiennent ni au Parlement, ni à l'ordre judiciaire, ni à l'ordre administratif. Le Président de la République, le Président de l'Assemblée nationale et le Président du Sénat désignent chacun deux personnalités qualifiées. La procédure prévue au dernier alinéa de l'article 13 est applicable aux nominations des personnalités qualifiées. Les nominations effectuées par le président de chaque assemblée du Parlement sont soumises au seul avis de la commission permanente compétente de l'assemblée intéressée. |
(Alinéa sans modification) | |
La formation compétente à l'égard des magistrats du parquet est présidée par le procureur général près la Cour de cassation. Elle comprend, en outre, cinq magistrats du parquet et un magistrat du siège, ainsi que le conseiller d'État, l'avocat et les six personnalités qualifiées mentionnés au deuxième alinéa. |
« Le Conseil supérieur de la magistrature se réunit en formation plénière pour répondre aux demandes d’avis formulées par le Président de la République au titre de l’article 64. Il se prononce, dans la même formation, sur les questions relatives à la déontologie des magistrats ainsi que sur toute question relative au fonctionnement de la justice dont le saisit le ministre de la justice. Il peut se saisir d’office des questions relatives à l’indépendance de l’autorité judiciaire et à la déontologie des magistrats. |
… République en application de … … sur celles relatives au fonctionnement de la justice dont il est saisi par le ministre … … magistrats. Il peut également être saisi par tout magistrat sur une question de déontologie qui le concerne. (Amendement n° 23, |
La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard des magistrats du siège fait des propositions pour les nominations des magistrats du siège à la Cour de cassation, pour celles de premier président de cour d'appel et pour celles de président de tribunal de grande instance. Les autres magistrats du siège sont nommés sur son avis conforme. |
« La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du siège fait des propositions pour les nominations des magistrats du siège à la Cour de cassation, pour celles de premier président de cour d’appel et pour celles de président de tribunal de grande instance. Les autres magistrats du siège sont nommés sur son avis conforme. |
(Alinéa sans modification) |
La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard des magistrats du parquet donne son avis sur les nominations qui concernent les magistrats du parquet. |
« La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet émet un avis conforme sur la nomination des magistrats du parquet. |
Les magistrats du parquet sont nommés sur l’avis conforme de la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet. (Amendement n° 26) |
La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard des magistrats du siège statue comme conseil de discipline des magistrats du siège. Elle comprend alors, outre les membres visés au deuxième alinéa, le magistrat du siège appartenant à la formation compétente à l'égard des magistrats du parquet. |
« La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du siège statue comme conseil de discipline des magistrats du siège. |
La formation compétente à l’égard des magistrats du siège et la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet statuent respectivement comme conseil de discipline des magistrats du siège et des magistrats du parquet. (Amendement n° 27) |
La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard des magistrats du parquet donne son avis sur les sanctions disciplinaires qui les concernent. Elle comprend alors, outre les membres visés au troisième alinéa, le magistrat du parquet appartenant à la formation compétente à l'égard des magistrats du siège. |
« La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet statue comme conseil de discipline des magistrats du parquet. |
Alinéa supprimé (Amendement n° 27) |
« Le Conseil supérieur de la magistrature peut être saisi par un justiciable. |
(Alinéa sans modification) | |
Le Conseil supérieur de la magistrature se réunit en formation plénière pour répondre aux demandes d'avis formulées par le Président de la République au titre de l'article 64. Il se prononce, dans la même formation, sur les questions relatives à la déontologie des magistrats ainsi que sur toute question relative au fonctionnement de la justice dont le saisit le ministre de la justice. La formation plénière comprend trois des cinq magistrats du siège mentionnés au deuxième alinéa, trois des cinq magistrats du parquet mentionnés au troisième alinéa, ainsi que le conseiller d'État, l'avocat et les six personnalités qualifiées mentionnés au deuxième alinéa. Elle est présidée par le premier président de la Cour de cassation, que peut suppléer le procureur général près cette cour. |
||
« Art. 65-1. – Le Conseil supérieur de la magistrature a pour membres : |
Art. 65-1. (Alinéa sans modification) | |
« 1° Huit magistrats du siège élus par les magistrats du siège ; |
1° (Sans modification) | |
« 2° Huit magistrats du parquet élus par les magistrats du parquet ; |
2° (Sans modification) | |
« 3° Un conseiller d’État élu par le Conseil d’État ; |
3° (Sans modification) | |
« 4° Un avocat ; |
4° (Sans modification) | |
« 5° Cinq personnes qualifiées n’appartenant ni au Parlement, ni à l’ordre judiciaire, ni à l’ordre administratif, ni aux barreaux. |
5°Six personnalités qualifiées … … barreaux, comprenant un nombre égal de femmes et d'hommes. (Amendements n° 28, | |
« Les personnes mentionnées au 5° sont désignées conjointement par le vice-président du Conseil d’État, le président du Conseil économique, social et environnemental, le Défenseur des droits, le premier président de la Cour de cassation, le procureur général près la Cour de cassation, le premier président de la Cour des comptes et un professeur des universités. Dans chaque assemblée parlementaire, une commission permanente désignée par la loi se prononce par un avis public sur la liste des personnes ainsi désignées. Aucune ne peut être nommée si l’addition des votes défavorables à cette liste dans chaque commission représente au moins les trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. |
Un collège composé du vice–président du Conseil d’État, du président du Conseil économique, social et environnemental, du Défenseur des droits, du premier président de la Cour de cassation, du procureur général près la Cour de cassation, du premier président de la Cour des comptes, du président d’une instance consultative de protection des libertés publiques et de défense des droits de l’homme et d’un professeur des universités désigne les six personnalités mentionnées au 5° et propose qu’une de ces personnalités soit nommée président du Conseil supérieur de la magistrature. Dans chaque assemblée parlementaire, une commission permanente désignée par la loi se prononce par avis public sur le nom de chacune des personnes ainsi désignées. Aucune ne peut être nommée si l’addition des votes dans chaque commission représente moins des trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions (Amendements n° 31 et n° 32) | |
« Le Conseil supérieur de la magistrature se réunit en formation plénière pour élire son président parmi les personnes mentionnées au 5°. |
La formation plénière comprend quatre des huit magistrats du siège mentionnés au 1°, quatre des huit magistrats du parquet mentionnés au 2°, ainsi que les personnes mentionnées aux 3° à 5°. En formation plénière, la voix du président est prépondérante. (Amendements n° 33 et n° 34) | |
« La formation compétente à l’égard des magistrats du siège comprend, outre le président du Conseil supérieur de la magistrature, sept magistrats du siège et un magistrat du parquet, ainsi que les six membres, autres que le président, mentionnés aux 3°, 4° et 5°. |
… les sept membres … (Amendement n° 28) | |
« La formation compétente à l’égard des magistrats du parquet comprend, outre le président du Conseil supérieur de la magistrature, sept magistrats du parquet et un magistrat du siège, ainsi que les six membres, autres que le président, mentionnés aux 3°, 4° et 5°. |
… les sept membres … (Amendement n° 28) | |
« Lorsqu’elle statue comme conseil de discipline des magistrats du siège, la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du siège est complétée et présidée par le premier président de la Cour de cassation. |
(Alinéa sans modification) | |
« Lorsqu’elle statue comme conseil de discipline des magistrats du parquet, la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet est complétée et présidée par le procureur général près la Cour de cassation. |
(Alinéa sans modification) | |
Sauf en matière disciplinaire, le ministre de la justice peut participer aux séances des formations du Conseil supérieur de la magistrature. |
« Sauf en matière disciplinaire, le ministre de la justice peut participer aux séances des formations du Conseil supérieur de la magistrature. |
(Alinéa sans modification) |
Le Conseil supérieur de la magistrature peut être saisi par un justiciable dans les conditions fixées par une loi organique. |
||
La loi organique détermine les conditions d'application du présent article. |
« Art. 65-2. – Une loi organique détermine les conditions d’application des articles 65 et 65-1. » |
« Art. 65-2. – (Sans modification) |
Article 3 |
Article 3 | |
Les articles 65 et 65-1 de la Constitution, dans leur rédaction résultant de la présente loi constitutionnelle, entrent en vigueur dans les conditions fixées par la loi organique nécessaire à leur application. |
(Sans modification) |
AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION
Amendement CL1 présenté par M. Coronado et M. Molac
Article 2
À l’alinéa 5, après les mots :
« à l’égard des magistrats du parquet »,
rédiger ainsi la fin de l’alinéa :
« fait des propositions pour les nominations des magistrats du parquet à la Cour de cassation, pour celles de procureur général auprès de la cour d’appel, de procureur de la République et pour le procureur de la République financier. Les autres magistrats du parquet sont nommés sur son avis conforme. »
Amendement CL2 présenté par M. Coronado et M. Molac
Article 2
À l’alinéa 5, après les mots :
« à l’égard des magistrats du parquet »,
rédiger ainsi la fin de l’alinéa :
« fait des propositions pour les nominations des magistrats du parquet à la Cour de cassation, pour celles de procureur général auprès de la cour d’appel et pour celles de procureur de la République. Les autres magistrats du parquet sont nommés sur son avis conforme. »
Amendement CL3 présenté par M. Coronado et M. Molac
Article 2
Compléter l’alinéa 8 par les mots :
« ou par un magistrat ».
Amendement CL4 présenté par M. Coronado et M. Molac
Article 2
À l’alinéa 10, après les mots :
« Huit magistrats »,
rédiger ainsi la fin de l’alinéa :
« , avec un nombre égal de représentants de chaque sexe. ».
Amendement CL5 présenté par M. Coronado et M. Molac
Article 2
À l’alinéa 11, après les mots :
« Huit magistrats »,
rédiger ainsi la fin de l’alinéa :
« , avec un nombre égal de représentants de chaque sexe. ».
Amendement CL6 présenté par M. Coronado et M. Molac
Article 2
À l’alinéa 14, substituer au nombre : « cinq » le nombre : « six » ;
Amendement CL7 présenté par M. Coronado et M. Molac
Article 2
Compléter l’alinéa 14 par les mots suivants :
« , avec un nombre de représentants de chaque sexe dont l’écart ne peut être supérieur à 1. »
Amendement CL9 présenté par M. Coronado et M. Molac
Article 2
À la première phrase de l’alinéa 15, après les mots :
« président de la Cour des comptes »,
insérer les mots :
« , le président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté ».
Amendement CL10 présenté par M. Coronado et M. Molac
Article 2
À la première phrase de l’alinéa 15, après les mots :
« président de la Cour des comptes »,
insérer les mots :
« , le Président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme ».
Amendement CL11 présenté par M. Coronado et M. Molac
Article 2
À la dernière phrase de l’alinéa 15, substituer aux mots :
« défavorables à cette liste dans chaque commission représente au moins les »,
les mots :
« favorables à cette liste représente moins des ».
Amendement CL12 présenté par M. Coronado et M. Molac
Article 2
À l’alinéa 17, supprimer le mot : « six ».
Amendement CL13 présenté par M. Coronado et M. Molac
Article 2
À l’alinéa 18, supprimer le mot : « six ».
Amendement CL15 présenté par M. Fenech
Article 2
À l’alinéa 2, remplacer la référence : « 65 » par la référence : « 65‑1 »
À l’alinéa 9, remplacer la référence : « 65‑1 » par la référence : « 65 ».
Amendement CL17 présenté par M. Fenech
Article 2
Dans la dernière phrase de l’alinéa 3 après les mots: « d’office », insérer les mots :
« , après approbation d’au moins trois quarts des membres de la formation plénière, »
Amendement CL18 présenté par M. Fenech
Article 2
Rédiger ainsi l’alinéa 5 :
« La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet donne son avis pour les nominations concernant les magistrats du parquet, à l’exception des emplois auxquels il est pourvu en Conseil des ministres ».
Amendement CL19 présenté par M. Fenech
Article 2
À l’alinéa 7, substituer aux mots : « statue comme conseil de discipline » les mots :
« donne son avis sur les sanctions disciplinaires ».
Amendement CL20 présenté par M. Fenech
Article 2
À l’alinéa 10, substituer au mot : « huit », le mot : « quatre »
Amendement CL21 présenté par M. Fenech
Article 2
À l’alinéa 11, substituer au mot : « huit » le mot : « quatre »
Amendement CL22 présenté par M. Fenech
Article 2
Après l’alinéa 14 insérer un alinéa ainsi rédigé :
«6° Un membre du Conseil national de l’aide aux victimes, désigné parmi les membres de cette instance au titre des représentants d’associations œuvrant dans le domaine de l’aide aux victimes. »
Amendement CL23 présenté par M. Fenech
Article 2
À l’alinéa 14, substituer au mot : « cinq » le mot : « sept ».
Amendement CL24 présenté par M. Fenech
Article 2
À l’alinéa 15, remplacer la première phrase par l'alinéa suivant:
« Parmi les personnes mentionnées au 5°, le Président de la République nomme trois membres du Conseil supérieur de la magistrature dont son Président. Le Président du Sénat et le Président de l’Assemblée nationale nomment, chacun, deux membres du Conseil supérieur de la magistrature. La procédure prévue au dernier alinéa de l’article 13 est applicable aux nominations effectuées par le Président de la République des personnalités qualifiées. Les nominations effectuées par le président de chaque assemblée du Parlement sont soumises au seul avis de la commission permanente compétente de l’assemblée intéressée ».
Amendement CL25 présenté par M. Fenech
Article 2
Dans la première phrase de l’alinéa 15, substituer au mot : « conjointement » le mot : « respectivement »
Amendement CL26 présenté par M. Fenech
Article 2
Dans la première phrase de l’alinéa 15 substituer aux mots : « le vice-président du Conseil d’État, » : les mots :
« un membre du Conseil national de l’aide aux victimes, désigné parmi les membres de cette instance au titre des représentants d’associations œuvrant dans le domaine de l’aide aux victimes, »
Amendement CL27 présenté par M. Fenech
Article 2
Dans la deuxième phrase de l’alinéa 15, substituer aux mots « une commission permanente désignée par la loi » les mots :
« la commission permanente compétente »
Amendement CL28 présenté par M. Fenech
Article 2
Dans la deuxième phrase de l’alinéa 15, substituer aux mots : « sur la liste » les mots :
« sur le nom de chacune ».
Amendement CL29 présenté par M. Fenech
Article 2
Dans la dernière phrase de l’alinéa 15, supprimer les mots « à cette liste ».
Amendement CL30 présenté par M. Fenech
Article 2
Dans la première phrase de l’alinéa 15, substituer aux mots : « le président du Conseil économique, social et environnemental, » les mots :
« le président du Conseil constitutionnel, »
Amendement CL31 présenté par M. Fenech
Article 2
Dans la première phrase de l’alinéa 15, substituer aux mots : « un professeur des universités. » les mots :
« le président de la Conférence des présidents d’université. »
Amendement CL32 présenté par M. Fenech
Article 2
A l’alinéa 8, après le mot : « saisi » insérer les mots :
« par un magistrat de l’ordre judiciaire et »
Amendement CL33 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
Après l’alinéa 8, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les magistrats membres du Conseil supérieur de la magistrature ne peuvent exercer une fonction professionnelle pendant la durée de leur mandat ».
Amendement CL34 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
Après l’alinéa 14, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« L’ensemble des membres nommés au titre du 1°, l’ensemble des membres nommés au titre du 2° et l’ensemble des membres nommés au titre du 5° comprennent autant de femmes que d’hommes. Pour les membres nommés au titre du 5°, une différence de un est admise.
« Un tirage au sort, dont les modalités sont fixées par décret en Conseil d’État, indique si, pour la première constitution du Conseil supérieur de la magistrature faisant suite à l’adoption de la présente loi, le membre mentionné aux 3° et 4° est un homme ou une femme. Lors de chaque renouvellement des membres nommés au titre des mêmes 3° et 4°, le membre succédant à une femme est un homme et celui succédant à un homme, une femme. Le remplaçant d’un membre nommé au titre des 1°, 2° ou 5° est de même sexe. »
Amendement CL35 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
Après l’alinéa 14, insérer les deux suivants :
« Le Conseil supérieur de la magistrature comprend autant de femmes que d’hommes.
« Une loi organique fixe les modalités ».
Amendement CL36 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
Supprimer cet article.
Amendement CL37 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
I. - Après l’alinéa 14, insérer les deux alinéas suivants :
« 6° Une personne qualifiée n’appartenant ni au Parlement, ni à l’ordre judiciaire, ni à l’ordre administratif, ni aux barreaux, désignée par le Président de l’Assemblée nationale ;
« 7° Une personne qualifiée n’appartenant ni au Parlement, ni à l’ordre judiciaire, ni à l’ordre administratif, ni aux barreaux, désignée par le Président du Sénat.
II. - En conséquence, aux alinéas 17 et 18, substituer au nombre : « six » le nombre : « huit » et substituer aux références : « et 5° » les références « , 5°, 6° et 7° ».
Amendement CL38 présenté par M. Bourdouleix et M. Villain
Article 2
Après l’alinéa 14, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 6° Un député et un sénateur désignés par les présidents de chambre. »
Amendement CL39 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
1° Aux alinéas 10 et 11, substituer au nombre : « huit » le nombre : « sept » ;
2° En conséquence, à l’alinéa 14, substituer au nombre : « cinq » le nombre : « six » ;
3° En conséquence, aux alinéas 17 et 18, substituer au nombre : « sept » le nombre : « six » et au nombre : « six » le nombre : « sept » .
Amendement CL40 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
1° Aux alinéas 10 et 11, substituer au nombre : « huit » le nombre : « six » ;
2° En conséquence, à l’alinéa 14, substituer au nombre : « cinq » le nombre : « six » ;
3° En conséquence, aux alinéas 17 et 18, substituer au nombre : « sept » le nombre : « cinq » et au nombre : « six » le nombre : « sept » .
Amendement CL43 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
Après l’alinéa 16, insérer l’alinéa suivant :
« En formation plénière, le vote des personnes qualifiées n’appartenant ni au Parlement, ni à l’ordre judiciaire, ni à l’ordre administratif, ni aux barreaux compte double. »
Amendement CL44 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
Compléter les alinéas 19 et 20 par la phrase suivante :
« La voix du président est prépondérante ».
Amendement CL45 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
À l’alinéa 15, supprimer les mots « le vice-président du Conseil d’État, ».
Amendement CL46 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
Rédiger ainsi la dernière phrase de l’alinéa 15 :
« Ces dernières ne peuvent être nommées que si l’addition des votes favorables à cette liste dans chaque commission représente au moins les trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. »
Amendement CL47 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
1° À la deuxième phrase de l’alinéa 15, substituer aux mots : « la liste » le mot : « chacune » ;
2° En conséquence, à la dernière phrase de l’alinéa 15, substituer aux mots « cette liste » les mots « la nomination de chacune des personnes désignées ».
Amendement CL48 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
À la deuxième phrase de l’alinéa 15, après les mots : « par la loi », insérer les mots : « procède à des auditions publique de chacune des personnes désignées et ».
Amendement CL49 présenté par M. Bourdouleix, M. Villain et M. Gomes
Article 2
1° À la deuxième phrase de l’alinéa 15, substituer aux mots : « la liste » le mot : « chacune » ;
2° Rédiger ainsi la dernière phrase de cet alinéa :
« Ces dernières ne peuvent être nommées que si l’addition des votes favorables à la nomination de chacune des personnes désignées dans chaque commission représente au moins les trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. »
Amendement CL50 présenté par Mme Coutelle, M. Denaja, Mme Olivier et M. Noguès
Article 2
Compléter l’alinéa 10 par les mots : « en respectant la parité ; »
Amendement CL51 présenté par Mme Coutelle, M. Denaja et Mme Olivier
Article 2
Compléter l’alinéa 11 par les mots : « en respectant la parité ; »
Amendement CL52 présenté par Mme Coutelle, M. Denaja et Mme Olivier
Article 2
Compléter l’alinéa 14 par les mots : « , en respectant la parité. »
PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR
• Ministère de la Justice
— Mme Christine MAUGÜÉ, directrice de cabinet de la ministre
— M Jean-François BEYNEL, directeur-adjoint de cabinet de la ministre
— M. Paul HUBER, conseiller technique au cabinet de la ministre
— Mme Martine TIMSIT, conseillère parlementaire au cabinet de la ministre
— Mme Véronique MALBEC, directrice des services judiciaires
• Cour de cassation
— M. Vincent LAMANDA, premier président de la Cour de cassation, président de la formation plénière du Conseil supérieur de la magistrature, président de la formation compétente à l’égard des magistrats du siège
— M. Jean–Claude MARIN, procureur général près la Cour de cassation, président suppléant de la formation plénière du Conseil supérieur de la magistrature, président de la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet
• Conseil d’État
M. Jean-Marc SAUVÉ, vice-président
• Conseil économique, social et environnemental
M. Jean-Paul DELEVOYE, président
• Défenseur des droits
M. Dominique BAUDIS, Défenseur des Droits
• Cour des comptes
M. Didier MIGAUD, premier président
• Commission nationale consultative des droits de l’homme
Mme Christine LAZERGES, présidente, accompagnée de M. Pierre LYON-CAEN, avocat général honoraire près la Cour de cassation
• Avocats
— Me Christian CHARRIÈRE-BOURNAZEL, président du Conseil national des barreaux
— Me Daniel SOULEZ–LARIVIÈRE, avocat
• Syndicats de magistrats
— M. Christophe RÉGNARD, président de l’Union syndicale des magistrats (USM), accompagné de Marie–Jane ODY, secrétaire nationale
— M. Emmanuel POINAS, secrétaire général du syndicat FO Magistrats, accompagné de Mme Béatrice BRUGÈRE, membre du conseil national
— Mme Françoise MARTRES, présidente du Syndicat de la magistrature, accompagnée de M. Xavier GADRAT, secrétaire national
• Magistrat
M. Éric de MONTGOLFIER, procureur général près la cour d’appel de Bourges
• Professeurs de droit
— M. Guy CARCASSONNE, professeur de droit constitutionnel à l’université Paris-Ouest Nanterre-La Défense
— M. Pierre AVRIL, professeur émérite à l’université Paris II Panthéon-Assas, ancien membre du Conseil supérieur de la magistrature
— M. Jean GICQUEL, professeur émérite à l’université Paris I, ancien membre du Conseil supérieur de la magistrature
— M. Dominique CHAGNOLLAUD, professeur de droit constitutionnel à l’Université Panthéon Assas (Paris II), ancien président de la formation plénière du Conseil supérieur de la magistrature
• Mardi 23 avril 2013 : rencontre avec des membres de la formation du CSM compétente à l’égard des magistrats du parquet
— M. Jean–Claude MARIN, président
Personnalités extérieures :
— M. Jean–Pierre MACHELON, doyen de la faculté de droit de l’université Paris Descartes
— Mme Rose–Marie VAN LERBERGHE, administrateur indépendant
— Mme Chantal KERBEC, directrice honoraire des services du Sénat
— Mme Martine LOMBARD, professeure agrégée de droit public à l’université Paris II – Panthéon Assas
— M. Bertrand MATHIEU, professeur agrégé de droit public à l’université Paris I Panthéon Sorbonne
— Me Christophe RICOUR, avocat, ancien bâtonnier, ancien président de la conférence des bâtonniers
— M. Frédéric TIBERGHIEN, conseiller d’État
Magistrats élus, membres de la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet :
— M. Christian RAYSSÉGUIER, premier avocat général à la Cour de cassation
— M. Jean–Olivier VIOUT, procureur général honoraire
— Mme Danielle DROUY–AYRAL, procureur de la République près le tribunal de grande instance de Draguignan
— Mme Anne COQUET, vice–procureure près le tribunal de grande instance de Paris
— M. Christophe VIVET, vice–procureur près le tribunal de grande instance de Grenoble
• Mercredi 24 avril 2013 : rencontre avec des membres de la formation du CSM compétente à l’égard des magistrats du siège
— M. Vincent LAMANDA, président
Personnalités extérieures :
— M. Jean–Pierre MACHELON, doyen de la faculté de droit de l’université Paris Descartes
— Mme Rose–Marie VAN LERBERGHE, administrateur indépendant
— M. Pierre FAUCHON, sénateur honoraire
— Mme Chantal KERBEC, directrice honoraire des services du Sénat
— Mme Martine LOMBARD, professeure agrégée de droit public à l’université Paris II – Panthéon Assas
— M. Bertrand MATHIEU, professeur agrégé de droit public à l’université Paris I Panthéon Sorbonne
— Me Christophe RICOUR, avocat, ancien bâtonnier, ancien président de la conférence des bâtonniers
— M. Frédéric TIBERGHIEN, conseiller d’État
Magistrats élus, membres de la formation compétente à l’égard des magistrats du siège :
— M. Daniel LUDET, conseiller à la Cour de cassation
— M. Jean TROTEL, premier président de la cour d’appel de Lyon
— M. Loïc CHAUTY, président du tribunal de grande instance de Grenoble
— M. Laurent BEDOUET, vice–président chargé de l’application des peines au tribunal de grande instance de Paris
— Mme Emmanuelle PERREUX, vice–présidente du tribunal de grande instance de Bordeaux
— Mme Catherine VANDIER, substitut du procureur général près la cour d’appel d’Angers, magistrat du parquet membre de la formation compétente à l’égard des magistrats du siège