N° 1733
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 28 janvier 2014.
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LE PROJET DE LOI relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale,
PAR Mme Colette LANGLADE,
Députée.
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Voir les numéros :
Assemblée nationale : 1721.
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Pages
INTRODUCTION 5
I. LA REFONDATION DE L’ÉCOLE ET LE DÉVELOPPEMENT DE L’ALTERNANCE : DEUX POLITIQUES D’AVENIR EN FAVEUR DE LA JEUNESSE 7
A. LA REFONDATION : UNE POLITIQUE ÉDUCATIVE QUI VISE À DONNER À CHAQUE ENFANT LES MOYENS DE SA RÉUSSITE 7
1. La priorité au primaire et la sanctuarisation du collège unique 7
2. La lutte contre le décrochage 9
B. LA VALORISATION DE L’APPRENTISSAGE : UN IMPÉRATIF ÉCONOMIQUE ET SOCIAL 11
II. UN PROJET DE LOI QUI RENFORCE LES CENTRES DE FORMATION DES APPRENTIS ET L’ORGANISATION TERRITORIALE DE L’ORIENTATION ET DES FORMATIONS PROFESSIONNELLES 19
A. LES DISPOSITIONS CONCERNANT LES CFA 19
1. Des missions enrichies et précisées 19
2. De bonnes pratiques à respecter parallèlement à l’examen du présent projet de loi 20
a. Établir des passerelles avec les lycées professionnels 20
b. Faire de l’enseignement professionnel une voie d’excellence 22
B. LES DISPOSITIONS CONCERNANT LE SERVICE PUBLIC DE L’ORIENTATION ET LA DÉCLINAISON CONTRACTUELLE DES POLITIQUES DE FORMATION PROFESSIONNELLE 23
1. La fonction de coordination de la région pour l’orientation tout au long de la vie et la prise en charge locale du décrochage 23
a. Du dispositif virtuel issu de la loi du 24 novembre 2009 à un service public structuré qui respecte le rôle de l’État en matière d’orientation scolaire et universitaire 23
b. L’organisation territoriale du repérage et de la « remobilisation » des décrocheurs 28
2. Un cadre rénové pour l’adoption du contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles 29
TRAVAUX DE LA COMMISSION 31
Article 8 (art. L. 6231-1 du code du travail) : Missions des centres de formation d’apprentis 47
Après l’article 8 52
Article 12 (art. L. 6111-2, L. 6111-3, 6111-4 et 6111-5 du code du travail et art. L. 214-14, L. 214-16-1 [nouveau], L. 214-16-2 [nouveau], L. 313-6, L. 313-7 et L. 313-8 du code de l’éducation) : Service public de l’orientation tout au long de la vie et lutte contre le décrochage 53
Article 13 (art. L. 211-2, L. 214-12, L. 214-12-1 et L. 214-13 du code de l’éducation et art. L. 4424-1 du code général des collectivités territoriales) : Contrats de plan régionaux de développement des formations et de l’orientation professionnelles 61
ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE 77
La Commission des affaires culturelles et de l’éducation a décidé de se saisir pour avis de certaines dispositions du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, qui a été adopté en conseil des ministres le 22 janvier 2013 et qui sera examiné en séance à partir du 5 février prochain.
Cette saisine peut sembler a priori surprenante dans la mesure où la Commission n’est pas compétente en matière de droit du travail et où le projet de loi, pour l’essentiel, vise à transposer dans le code du travail l’accord sur la formation professionnelle conclu le 14 décembre 2013 entre les partenaires sociaux.
Dans le même temps, la refondation de l’école et le développement de l’alternance, celui-ci devant être favorisé par la future loi, sont corrélés. En effet, ces politiques s’articulent naturellement l’une avec l’autre : la première a pour but de garantir à chaque enfant les moyens de sa réussite, tandis que la seconde ambitionne de faciliter l’insertion des jeunes dans le monde du travail.
D’ailleurs, c’est en menant de front ces deux grands chantiers que notre pays parviendra – enfin – à transformer l’apprentissage en ce qu’il devrait être, à savoir une voie d’excellence, choisie pour elle-même, et non une filière de relégation pour les élèves en situation d’échec scolaire. Le défi qui doit être relevé par notre système de formation est, de fait, immense car celui-ci ne reconnaît, pour l’heure, qu’une voie de réussite – l’enseignement général – et pratique très tôt le « tri sélectif ».
À ces raisons de fond, qui justifient la saisine pour avis de la Commission, s’ajoute le fait que trois articles du projet de loi concernent directement son champ de compétences : l’article 8 relatif aux missions des centres de formation d’apprentis, qui favorisera les passerelles entre les différentes formations, l’article 12 relatif au service public de l’orientation tout au long de la vie et au suivi des décrocheurs et l’article 13 relatif au contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles, ces deux derniers articles modifiant des dispositions du code de l’éducation.
I. LA REFONDATION DE L’ÉCOLE ET LE DÉVELOPPEMENT DE L’ALTERNANCE : DEUX POLITIQUES D’AVENIR EN FAVEUR DE LA JEUNESSE
En matière de formation, les politiques publiques doivent marcher sur deux jambes : l’enseignement scolaire d’une part, qui détient les clefs de l’égalité des chances, et l’alternance d’autre part, qui favorise l’accès à l’emploi. Le service public de l’orientation tout au long de la vie, quant à lui, se situe au croisement de ces ambitions.
Ce contexte d’ensemble, aujourd’hui marqué par la refondation de l’école et le développement de l’apprentissage, tous deux portés par le gouvernement, doit être rappelé avant de présenter les dispositions du projet de loi pour lesquelles la Commission s’est saisie pour avis.
A. LA REFONDATION : UNE POLITIQUE ÉDUCATIVE QUI VISE À DONNER À CHAQUE ENFANT LES MOYENS DE SA RÉUSSITE
La loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République constitue le « socle » de la politique de redressement éducatif mise en œuvre par le gouvernement et la majorité. Son objectif est de garantir à tout élève les moyens – ceux-ci devant être brièvement commentés – nécessaires à sa réussite scolaire, éducative et sociale.
La maîtrise des savoirs de base est indispensable à la construction d’un avenir personnel et professionnel. Pour s’en convaincre, il suffit de rappeler que 21 % des personnes qui se déclarent au chômage et 37 % des personnes inactives maîtrisent mal l’écrit, contre 13 % parmi celles en emploi. En outre, mal maîtriser l’écrit complique les démarches nécessaires pour retrouver un emploi et peut avoir tendance à prolonger la durée de recherche : 30 % des personnes en difficulté à l’écrit se déclarant au chômage cherchent un emploi depuis plus de deux ans et 60 % ont déjà connu par le passé une ou plusieurs période(s) de chômage de plus d’un an (1).
• Le primaire
La refondation érige l’école primaire en priorité puisque c’est à ce niveau qu’il faut développer les capacités cognitives et les compétences langagières des jeunes enfants pour lutter contre les inégalités sociales de réussite et faire ainsi émerger une élite scolaire plus étoffée.
La dernière édition de l’évaluation PISA de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), publiée en décembre 2013, illustre de manière éclatante l’importance de cet enjeu. En effet, ce programme mesure les compétences des élèves de quinze ans, c’est-à-dire à l’âge où les écarts, qui n’ont pas été comblés au primaire, ne peuvent plus être rattrapés. Or, parmi les membres de l’Organisation, notre pays est celui où la corrélation entre le milieu socio-économique et la performance scolaire est la plus forte : la progression d’une unité de l’indice PISA de statut économique, social et culturel (qui englobe le niveau de formation, la profession et le patrimoine des parents) entraîne une augmentation du score en mathématiques de 39 points en moyenne dans les pays de l’OCDE et de 57 points en France (2).
Afin de lutter contre cette « fracture scolaire », le primaire recevra 14 000 nouveaux postes sur les 54 000 qui doivent être créés pendant le quinquennat dans l’enseignement scolaire. Sur cette enveloppe, 7 000 postes nouveaux permettront, dans les secteurs les plus fragiles, de favoriser l’évolution des pratiques pédagogiques, notamment grâce au dispositif « plus de maîtres que de classes ». Ainsi, à la rentrée 2013, 6 770 équivalents temps plein (ETP) ont été créés dans le premier degré, auxquels s’ajouteront 4 042 ETP à la rentrée 2014.
• Le collège
La loi du 8 juillet 2013 pour la refondation de l’école a consacré la notion de « tronc commun » de formation, qui garantit à chaque élève qu’il ne sera pas orienté de manière précoce dans des dispositifs de préapprentissage.
Ont donc été supprimées :
– la possibilité d’accomplir la classe de quatrième dans des classes préparatoires rattachées à un établissement de formation professionnelle ;
– la possibilité d’intégrer, avant l’âge de quinze ans, le dispositif d’initiation aux métiers en alternance (DIMA) créé par la loi du 28 juillet 2011 pour le développement de l’alternance et la sécurisation des parcours professionnels, dite loi « Cherpion » (3).
La réaffirmation du collège unique ainsi opérée doit être saluée car elle garantit à chaque élève le suivi d’une formation commune, indispensable à l’acquisition, par toute une classe d’âge, d’une culture partagée, et s’inscrit dans la lignée des travaux de l’OCDE qui ont établi que les systèmes éducatifs qui pratiquent des sélections ou des orientations précoces obtiennent de moins bons résultats.
Pour autant, le collège unique ne saurait être un collège uniforme, dont l’enseignement hypothético-déductif, souvent calqué sur le lycée, peut mettre en difficulté les élèves ne maîtrisant pas tous les codes scolaires. C’est ce que prévoit d’ailleurs la loi du 8 juillet 2013 pour la refondation de l’école, avec l’instauration, de la 6ème à la 3ème, d’enseignements « complémentaires » au tronc commun, revêtant un caractère interdisciplinaire et devant contribuer à l’acquisition des connaissances et des compétences fondamentales par des approches pédagogiques diversifiées.
• Les mesures transversales
Afin de conforter la refondation pédagogique de l’école, le gouvernement a décidé d’affecter la moitié des créations de postes programmées sur la durée du quinquennat – soit 27 000 emplois – à la mise en place d’une formation initiale de qualité pour les enseignants et d’instaurer des écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE), destinées à faire évoluer les pratiques d’enseignement.
Par ailleurs, 3 000 postes seront consacrés au rééquilibrage des moyens, c’est-à-dire à l’amélioration de l’équité territoriale inter-académique. En lien avec cette mesure, la refonte de la politique d’éducation prioritaire entrera en vigueur en 2015, afin de « donner plus » aux écoles et établissements les plus fragiles.
Enfin, la refonte des programmes de la scolarité obligatoire sera mise au service de la refondation et de l’évolution des méthodes d’enseignement. C’est le sens de la « feuille de route » adressée le 4 décembre 2013 au président du Conseil supérieur des programmes, M. Alain Boissinot, par le ministre de l’éducation nationale : en effet, la réécriture de ces outils de formation doit assurer leur « bon calibrage », celui-ci étant indispensable à une plus grande adaptation des pratiques pédagogiques, la formulation « d’objectifs clairs et définis selon une progression adaptée aux apprentissages des enfants » et une cohérence, jamais réalisée jusqu’ici, entre les connaissances, les compétences et la culture. L’entrée en vigueur de ce nouveau cadre pédagogique interviendra en 2014 pour la maternelle et en 2015 pour chaque cycle de l’école élémentaire et du collège.
Les décrocheurs sont les élèves de 16 à 25 ans qui quittent le système de formation initiale sans avoir obtenu de diplôme professionnel ni le baccalauréat. En France, ils sont estimés à 140 000 en moyenne chaque année et sont deux fois plus exposés au risque de chômage que les jeunes qui ont le baccalauréat ou un titre équivalent.
Pour lutter contre ce fléau, qui entretient la crise d’avenir dont souffre une partie de notre jeunesse, le rapport annexé de la loi du 8 juillet 2013 a fixé comme objectif de « diviser par deux la proportion des élèves qui sortent du système scolaire sans qualification et d’amener tous les élèves à maîtriser le socle commun de connaissances, de compétences et de culture à l’issue de la scolarité obligatoire ».
Le ministre de l’éducation nationale a donc mis en place un dispositif de « Formation-qualification-emploi » (FOQUALE) qui vise, aux termes de sa circulaire du 25 avril 2013, à faire revenir dans un parcours de formation qualifiante 20 000 jeunes ayant décroché. Les réseaux FOQUALE ont été ainsi progressivement créés autour des 360 plates-formes d’appui et de suivi du décrochage scolaire, institués par une circulaire du 9 février 2011 et chargés de coordonner l’action des acteurs de terrain (rectorats, service public de l’emploi et autres services de l’État, régions et autres collectivités locales) qui identifient, contactent et orientent les décrocheurs vers une solution adaptée.
Selon le bilan publié le 8 janvier 2014 par le ministère de l’éducation nationale, plus de 180 000 jeunes en situation de décrochage ont été contactés durant l’année 2013. Par ailleurs, plus de 100 000 ont bénéficié d’un entretien et 34 000 d’entre eux ont été pris en charge dans les réseaux FOQUALE. Enfin, 20 000 sont de retour en formation initiale diplômante et 3 000 sont en Service civique, la cible fixée par le ministre pour l’année 2013 étant ainsi dépassée.
Parallèlement à ce plan d’action, la loi du 8 juillet 2013 pour la refondation de l’école a consacré un droit à la poursuite d’études pour les élèves sans qualification. En effet, aux termes de l’article L. 122-2 du code de l’éducation, tout jeune sortant du système éducatif sans diplôme bénéficie d’une durée complémentaire de formation qualifiante, qui peut consister en un droit au retour en formation initiale sous statut scolaire. De plus, cet article dispose que tout élève qui, à l’issue de la scolarité obligatoire, n’a pas atteint un niveau de formation sanctionné par un diplôme national ou un titre professionnel enregistré et classé au niveau V du répertoire national des certifications professionnelles – comme le CAP – peut poursuivre des études afin d’acquérir ce diplôme ou ce titre.
Ainsi, la palette des instruments permettant de « raccrocher » des jeunes qui, pour beaucoup d’entre eux, ont été les victimes d’un collège conçu comme un « petit lycée » et d’une orientation subie, a été considérablement élargie. Elle devrait être complétée en mobilisant d’autres instruments, cette fois-ci au cœur des établissements, en suivant les préconisations des inspections générales de l’éducation nationale : généralisation du tutorat à l’ensemble du second cycle et des dispositifs pédagogiques et éducatifs de prévention et de réponse aux absences des élèves, formation des enseignants au repérage des signes du décrochage et prise en compte de cette problématique par les conseils pédagogiques des collèges et des lycées (4).
Les formations par alternance, tout comme l’enseignement technique et professionnel, ne bénéficient pas, en France, de la priorité qu’ils méritent. Or, comme le souligne le rapport « Gallois », « la différence avec l’Allemagne est ici " massive " : elle explique, sans aucun doute, une part significative de l’écart de compétitivité entre les deux pays ». Ce document de référence a donc proposé un objectif de doublement du nombre des formations en alternance sur le quinquennat (5). Sur la base de cette recommandation, le gouvernement s’est engagé, dans le Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi présenté par le Premier ministre le 6 novembre 2012, à faire progresser le nombre d’apprentis de 435 000 en 2012 à 500 000 en 2017. Puis, le 30 mai 2013, la France et l’Allemagne ont adressé au Conseil européen une contribution pour le renforcement de la compétitivité et de la croissance appelant au développement de la formation en alternance et de l’apprentissage, un objectif repris par l’ensemble des membres de l’Union européenne.
Voie de formation pratiquée aux niveaux infra-bac de qualification, ainsi que dans l’enseignement supérieur, y compris au niveau du master, l’apprentissage connaît une situation paradoxale. Comme l’ont souligné deux de nos collègues MM. Régis Juanico et Jean-Frédéric Poisson, à l’occasion d’un important travail effectué pour le compte du Comité d’évaluation et de contrôle de notre assemblée, « alors qu’il est une voie d’accès efficace à l’emploi durable et que, porté par l’artisanat, il a permis en France la formation d’un chef d’entreprise sur deux, l’apprentissage souffre d’une mauvaise image. Le choix de cette formation initiale est en effet souvent assimilé à l’incapacité pour les jeunes apprentis à demeurer au sein du système scolaire traditionnel. » (6).
• Une filière dynamique
L’apprentissage n’a cessé de progresser ces dernières années, à tous les niveaux.
Au niveau local, en 1997, les apprentis représentaient plus de 20 % des jeunes inscrits en année terminale de formation professionnelle dans seulement 9 régions sur 22. En 2008, ce chiffre avait doublé et l’apprentissage représentait même plus d’un quart des inscrits en année terminale de formation dans cinq régions (7).
Au niveau national, depuis une dizaine d’années, l’apprentissage connaît une croissance à peu près constante de ses effectifs, même si cette évolution doit être différenciée en fonction du niveau de diplôme préparé. En effet, comme le montre le tableau ci-après, la hausse globale des effectifs marque des évolutions contrastées.
Ainsi, certaines formations ont perdu des effectifs. En effet, à la suite de la réforme du lycée professionnel de 2009, qui a entraîné la disparition des brevets d’études professionnelles (BEP) au profit de la mise en place du baccalauréat professionnel préparé en trois ans (8), les formations préparant au premier diplôme ont perdu 44 000 apprentis entre 2008 et 2011. À l’inverse, celles qui préparent au « bac pro » ont augmenté de 21 700 apprentis (9).
Il est vrai aussi que le contexte économique difficile a sans doute freiné, depuis 2008, les entreprises à engager un apprenti, tandis que le contrat d’apprentissage sur trois ans au lieu de deux peut décourager certains jeunes ou employeurs. En particulier, selon le Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Céreq), la crise a affecté les recrutements d’apprentis dans tous les métiers du bâtiment. Entre 2008 et 2011, le nombre d’apprentis inscrits en année terminale des CAP du gros œuvre a diminué de 11 %, de 18 % dans le second œuvre et de 9 % dans le travail du bois. La crise a également freiné les nouvelles entrées dans les métiers du commerce et ceux de la réparation automobile (10).
De leur côté, les statistiques du ministère du travail indiquent également qu’aux niveaux V bis (emploi exigeant une formation d’une durée d’un an) et VI (formation n’allant pas au-delà de la scolarité obligatoire), soit les plus bas dans l’échelle des qualifications, la proportion d’apprentis diminue fortement, passant de 38,7 % en 2008 à 33,9 % en 2011, de même que celle des apprentis préparant des diplômes de niveau V (équivalent au CAP ou au BEP) est passée de 55,8 % à 45,5 %. Or cette régression apparaît problématique, d’une part, parce que les besoins de recrutement des entreprises pour ce type de main-d’œuvre demeurent, et, d’autre part, parce que l’effet de levier sur l’insertion dans l’emploi est supérieur pour les apprentis à faible niveau de qualification.
ÉVOLUTION DES EFFECTIFS D'APPRENTIS SELON LE NIVEAU DE FORMATION ENTRE 2000 ET 2012
France métropolitaine + Dom
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 | |
Niveau V hors BEP |
192 359 |
186 202 |
181 771 |
177 845 |
178 807 |
182 059 |
187 137 |
190 690 |
186 059 |
187 228 |
187 537 |
187 797 |
186 752 |
BEP |
52 974 |
51 244 |
50 395 |
47 490 |
46 467 |
46 554 |
48 254 |
48 604 |
45 600 |
22 539 |
4 320 |
1 763 |
456 |
Niveau IV hors bac pro |
35 951 |
37 511 |
39 755 |
41 462 |
43 511 |
46 789 |
49 242 |
50 758 |
51 586 |
54 262 |
55 998 |
55 252 |
54 505 |
Bac pro |
33 404 |
34 317 |
35 047 |
35 900 |
37 112 |
39 820 |
42 709 |
44 995 |
46 884 |
57 638 |
67 020 |
68 636 |
63 320 |
Niveau III |
35 553 |
37 234 |
37 751 |
38 217 |
39 560 |
44 233 |
50 316 |
55 577 |
58 572 |
59 532 |
62 074 |
67 193 |
76 047 |
Niveau II |
9 448 |
9 568 |
11 243 |
12 674 |
14 124 |
15 063 |
16 461 |
17 198 |
16 021 |
17 387 |
19 189 |
21 762 |
23 410 |
Niveau I |
6 185 |
6 852 |
7 514 |
8 378 |
9 407 |
11 341 |
13 690 |
17 340 |
22 928 |
26 156 |
30 142 |
33 931 |
37 219 |
TOTAL |
365 874 |
362 928 |
363 476 |
361 966 |
368 988 |
385 859 |
407 809 |
425 162 |
427 650 |
424 742 |
426 280 |
436 334 |
441 709 |
Source : Le supérieur : moteur de la croissance de l’apprentissage en 2010 et 2011, note d’information n° 13.22 de la DEPP, octobre 2013.
Quant aux formations supérieures (niveaux I à III, regroupant les bacs + 2 et au-delà), elles sont devenues, selon la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l’éducation nationale, « le moteur de la croissance de l’apprentissage ». Elles accueillaient près de 123 000 apprentis en 2011, soit 70 000 de plus qu’en 2000. Le principal gagnant est le brevet de technicien supérieur (BTS), 55 100 apprentis le préparant en 2011 (soit + 10,3 % par rapport à 2000), la licence, le diplôme d’ingénieur et le master enregistrant respectivement 13,2 %, 10,8 % et 17,6 % de croissance entre 2010 et 2011 (11).
Le gouvernement en d’ailleurs a pris acte en précisant, à l’occasion du vote de la loi du 22 juillet 2013 relative à la recherche et à l’enseignement supérieur, que les enseignements supérieurs « peuvent être organisés par alternance » (article L. 611-2 du code de l’éducation).
Le rapport précité de MM. Régis Juanico et Jean-Frédéric Poisson estime que, compte tenu du fait qu’entre 2005 et 2012, le nombre d’apprentis est passé de 379 000 jeunes à 443 000, soit une augmentation de 17 % en sept ans et de 2,4 % par an, cette croissance est cohérente avec la « cible » retenue par le Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi et qui vise à faire progresser le nombre d’apprentis de 435 000 à 500 000 en 2017 : ainsi, d’après nos collègues, cet objectif apparaît « raisonnablement ambitieux, dans la mesure où l’atteindre ne nécessite pas d’accélération du rythme de croissance récent des effectifs » (12).
• Une filière déconsidérée
Le dynamisme de l’apprentissage s’explique, en partie, par un dynamisme « par défaut ». En effet, celui-ci semble accueillir, avant tout, de nombreux jeunes en situation d’échec scolaire.
On ne peut donc pas vraiment parler, à ce sujet, d’orientation « choisie », notre système scolaire étant trop peu tourné vers l’apprentissage, contrairement à d’autres pays européens, comme l’Allemagne. Notre collègue Gérard Cherpion a d’ailleurs observé que le formulaire de vœux que les élèves doivent remplir à la fin de leur année de troisième ne comporte pas de case dédiée à l’apprentissage, mais une case dénommée « autre »… (13), même si certains rectorats commencent à intégrer l’offre d’apprentissage dans leurs processus informatisés.
• Le taux de réussite au diplôme
Lorsque l’on examine le taux de réussite au diplôme, la voie de l’apprentissage n’a rien à envier à la voie générale ou à la voie professionnelle, comme le montre le tableau ci-dessous.
TAUX DE RÉUSSITE EN CAP, BEP, BACCALAURÉAT ET BREVET PROFESSIONNEL
SESSIONS 2011 ET 2012
Session 2011 |
Session 2012 | |||
Scolaires |
Apprentis |
Scolaires |
Apprentis | |
CAP |
84 % |
82 % |
85 % |
82 % |
BEP |
78 % |
79 % |
79 % |
81 % |
Bac professionnel |
84 % |
86 % |
78 % |
80 % |
Bac général et techno |
87 % |
- |
89 % |
- |
BP |
- |
73 % |
- |
nd |
Source : direction générale de l’enseignement scolaire, octobre 2013.
Sur ce sujet, le rapport précité de MM. Régis Juanico et Jean-Frédéric Poisson met en avant le fait que la différence de taux de réussite entre le niveau bac et le niveau BEP/CAP est moins importante pour l’apprentissage que pour la voie scolaire. En conséquence, les rapporteurs du Comité d’évaluation et de contrôle de notre assemblée considèrent que la voie de l’apprentissage semble plus pertinente pour les diplômes les moins qualifiants et que cette donnée pourrait justifier « un usage plus intense de l’apprentissage pour les plus bas niveaux de qualification » (14).
• L’insertion sur le marché du travail
L’apprentissage constitue, de surcroît, un moyen d’accès efficace à l’emploi. Comme le montre le graphique ci-après, pour chaque niveau de formation, l’apprentissage présente des taux d’accès à l’emploi supérieurs de neuf points pour les non-diplômés, de onze points pour les diplômés du secondaire et d’un point pour les sortants du supérieur.
TAUX D’ACCÈS À L’EMPLOI (EN %)
Source : Pacte de l’alternance pour la jeunesse du Medef, novembre 2013, d’après l’enquête 2010 du Céreq auprès de la génération 2007.
En ce qui concerne le taux d’emploi, le Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Céreq) observe que, pour les sortants du secondaire, celui des titulaires d’un CAP ou d’un BEP (70 %) est d’au moins 20 points supérieur à celui des sortants sans diplôme (48 %) et que si le baccalauréat améliore encore la situation, le gain n’est que de trois points (73 %).
Toutefois, la spécialité de formation n’est pas indifférente, car certains CAP se révèlent moins « protecteurs » que d’autres. Ainsi, parmi ceux qui occupent un emploi en 2010, plus de 90 % des titulaires d’un CAP du gros œuvre du bâtiment exercent un emploi à durée indéterminée. Dans la même proportion, ils ont travaillé plus des trois quarts du temps depuis leur sortie de formation. À l’inverse, les titulaires d’un CAP ou d’un BEP du domaine de la vente ne sont que 50 % à bénéficier d’un emploi à durée indéterminée, et à peine plus à avoir travaillé plus des trois quarts du temps sur la période (15).
• Une filière qui doit être valorisée
L’existence de cette filière constitue une chance pour les jeunes rebutés par l’enseignement en partie élitiste et abstrait de la voie générale, qui peuvent ainsi y trouver leur vocation. C’est le constat dressé par le Comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale : pour ces jeunes, « la découverte du monde de l’entreprise est une révélation, leur permettant d’acquérir des compétences de savoir-être et de prendre confiance et conscience de leur utilité sociale » (1).
Pour lutter contre la persistance des stéréotypes contre l’apprentissage, il convient donc, comme le propose le gouvernement, non seulement de valoriser cette voie de formation, en réformant son financement et sa gouvernance, mais aussi de lier son développement à la refonte de notre système scolaire et d’orientation : ce n’est que lorsque tout jeune disposera, à l’issue du collège, des compétences et des connaissances fondamentales lui permettant de mener une vie active et responsable et d’une information détaillée et pertinente sur les parcours de formation et les métiers qu’il pourra choisir, en toute liberté, sa stratégie d’insertion professionnelle, sans exclure la voie de l’alternance.
Par ailleurs, l’apprentissage devrait être encouragé dans de nouveaux secteurs, en particulier le secteur public. Ce dernier recèle en effet un important potentiel d’emploi en apprentissage, qui aujourd’hui n’est pas assez exploité : seuls 10 000 contrats y ont été signés en 2012. Plusieurs difficultés expliquent cette situation : le coût relativement élevé de la formation d’apprentis pour les collectivités publiques, l’obligation de passer et de réussir un concours de la fonction publique pour pouvoir être titularisé, une méconnaissance globale de ce dispositif par les collectivités et les risques financiers liés à l’indemnisation des éventuelles périodes de chômage de l’apprenti, une fois son contrat terminé. Le gouvernement devrait donc s’emparer de cette question.
II. UN PROJET DE LOI QUI RENFORCE LES CENTRES DE FORMATION DES APPRENTIS ET L’ORGANISATION TERRITORIALE DE L’ORIENTATION ET DES FORMATIONS PROFESSIONNELLES
Le projet de loi comporte plusieurs dispositions novatrices relatives aux centres de formation des apprentis (CFA), au service public de l’orientation tout au long de la vie, à la prise en charge locale du décrochage et au développement maîtrisé des formations professionnelles. Dans leur ensemble, elles permettront de réaffirmer l’égale dignité des voies de formation, d’accroître l’offre de seconde chance aux jeunes sortis sans qualification du système de formation initiale et d’améliorer le processus de contractualisation des politiques d’orientation et de formation au niveau régional.
L’article 8 du projet de loi tend à renforcer les missions des centres de formation d’apprentis (CFU), qui ne sont définies, aujourd’hui, que de façon sommaire – une courte phrase – par l’article L. 6231-1 du code du travail.
En effet, ces missions sont enrichies et peuvent être classées dans trois grandes catégories : la pédagogie, l’assistance aux aspirants apprentis et l’accompagnement matériel et social des apprentis. On citera en particulier les quatre principes suivants :
– celui de la cohérence entre la formation dispensée en CFA et celle dispensée en entreprise, le projet de loi liant cette obligation à l’organisation de la coopération entre les formateurs et les maîtres d’apprentissage. Cette exigence est propre à l’alternance et se retrouve d’ailleurs dans la formation professionnelle pratiquée sous statut scolaire. Elle ne pourra être respectée que si les inspecteurs (Éducation nationale et Travail) disposent des moyens nécessaires au contrôle de sa mise en œuvre effective et si les formateurs et les maîtres d’apprentissage sont suffisamment valorisés pour qu’ils considèrent que leurs heures effectuées en CFA correspondent à un service pédagogique et non à un simple complément de salaire ;
– celui de la poursuite d’études. En effet, les CFA devront développer l’aptitude des apprentis à poursuivre des études par les voies de l’apprentissage, de l’enseignement professionnel ou technologique ou par toute autre voie, cette mesure complétant utilement le droit à une formation qualifiante pour les élèves n’ayant pas atteint un certain niveau de formation consacré par la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République ;
– celui de l’assistance aux postulants à l’apprentissage. À ce titre, les centres devront aider ces derniers dans leur recherche d’un employeur, ainsi que les apprentis en rupture de contrat dans la recherche d’un nouvel employeur, en lien avec le service public de l’emploi. Ce dernier point revêt une importance capitale lorsque l’on rappelle que plus d’un contrat d’apprentissage sur quatre est rompu avant son terme. Plus précisément, le taux d’échec en apprentissage, c’est-à-dire le taux de rupture des contrats, se situe entre 10 et 35 % et varie en fonction des régions et des branches professionnelles ;
– celui de l’accompagnement des apprentis. À ce titre, les CFA apporteront, en lien avec le service public de l’emploi, et en particulier avec les missions locales, un « accompagnement aux apprentis pour résoudre les difficultés d’ordre social et matériel susceptibles de mettre en péril le déroulement du contrat d’apprentissage ». Cette nouvelle mission doit être saluée, car trop souvent encore la rupture du contrat d’apprentissage résulte de difficultés pratiques et financières, principalement liées au transport – le coût du permis peut être prohibitif pour les jeunes concernés – et au double logement pour les périodes d’alternance, quand l’entreprise et le CFA sont éloignés l’un de l’autre (16). Le ministère du travail indique d’ailleurs que les centres sont déjà « très nombreux » à assurer un tel accompagnement : par exemple, ceux du Comité de concertation et de coordination de l’apprentissage du bâtiment et des travaux publics (CCA-BTP) l’organisent systématiquement, y compris avec du personnel embauché à cet effet.
À ces dispositions s’en ajoutent d’autres, contenues dans des articles du projet de loi pour lesquels la Commission ne s’est pas saisie pour avis, qui permettront de dynamiser l’apprentissage et qu’on ne mentionnera ici que pour mémoire : élargissement des compétences de la région en la matière, cette collectivité se voyant dotée notamment d’une compétence exclusive en matière de création des CFA (article 6) ; possibilité de conclure un contrat d’apprentissage dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée (article 7) ; réforme de la collecte de la taxe d’apprentissage, laquelle a été jugée par le rapport du sénateur François Patriat « illisible » et « insuffisamment contrôlée » (17) (article 9), etc.
Le développement de l’apprentissage implique de rapprocher les CFA des lycées professionnels, surtout à l’heure où la mise en place du « bac pro » en trois ans entraîne une réduction des contrats d’apprentissage en deux ans liés au brevet d’études professionnelles (BEP).
Comme l’ont souligné, à juste titre, les rapporteurs du Comité d’évaluation et de contrôle de notre assemblée, ces deux filières ne doivent pas se concurrencer, car il faut faire en sorte que « les avantages respectifs de la voie scolaire professionnelle et de l’apprentissage profitent aux jeunes formés dans les deux voies ». C’est pourquoi la mise en place « de passerelles efficaces et simples qui permettent aux jeunes de passer d’un système à l’autre sans difficulté, et ainsi de s’orienter, voire de se réorienter aisément » devrait être encouragée (18).
Ces passerelles devraient être établies dans le cadre des « campus des métiers » prévus par la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. Le rapport annexé à cette loi souligne en effet « qu’il conviendra de faire émerger » de tels campus, « pôles d’excellence offrant une gamme de formations professionnelles, technologiques et générales, dans un champ professionnel spécifique ». L’annexe ajoute que ces campus « pourront accueillir différentes modalités de formation (statut scolaire, apprentissage, formation continue, validation des acquis de l’expérience) et organiser des poursuites d’études supérieures et des conditions d’hébergement et de vie sociale ».
C’est sur ce fondement que douze « campus des métiers et des qualifications » ont été labellisés en 2013, un second appel à projet étant en cours de réalisation. Ces structures, portées conjointement par les autorités académiques et les conseils régionaux, associent les trois voies (générale, technologique et professionnelle) d’enseignement, et reposant sur un réseau d’acteurs variés – des établissements de formation, dont au moins un collège ou un lycée public, ainsi que des universités ou des écoles supérieures, des entreprises, des laboratoires de recherche, etc. – devraient d’ailleurs être un levier essentiel pour le développement économique et social des territoires.
Cette politique ne doit pas être exclusive d’un réexamen de l’offre de formation professionnelle dans la mesure où, comme l’a relevé la Cour des comptes dans le cadre d’une enquête effectuée à la demande de la Commission des finances de notre assemblée, une offre trop spécialisée de formations à la sortie de 3ème ne peut être qu’« insatisfaisante ». En effet, selon les interlocuteurs de la Cour, cet excès de spécialisation entrave inévitablement les perspectives d’avenir des élèves et alourdit les coûts des formations professionnelles, du fait de la faiblesse du nombre d’élèves concernés (19), et ce alors même que, d’après une étude du Céreq de décembre 2012, la moitié des jeunes diplômés exercent un métier pour lequel ils n’ont pas été qualifiés. En outre, certaines formations « tertiaires » de niveau V (BEP) et IV (« bac pro »), de type « secrétariat et comptabilité » par exemple, peinant à trouver des débouchés pour leurs diplômés face à la concurrence des « bacs technos » et des BTS, la question de leur pérennité mériterait d’être examinée.
Le pourcentage des jeunes en situation de décrochage scolaire issus du lycée professionnel demeure trop élevé. D’après une estimation des résultats déterminée en comparant les listes des élèves inscrits entre juin 2012 et octobre 2012 dans les établissements scolaires, la répartition par cycle scolaire des décrocheurs est en effet la suivante : 17,1 % en premier cycle, 28,2 % en second cycle général et technologique, 49 % en second cycle professionnel et 5,8 % dans d’autres situations (enseignement spécialisé, classe d’accueil, etc.) (20).
Les causes de ce décrochage sont évidemment multiples, mais les principales sont connues :
– en premier lieu, un problème d’orientation : en fin de 3ème, les élèves sont souvent orientés vers une formation qui n’était pas celle qu’ils avaient choisie,conduisant, dans bien des cas, à un manque de motivation scolaire durable. Ce phénomène est renforcé par la faible mobilité géographique des jeunes de la voie professionnelle, qui réduit encore leur éventail de choix ;
– en second lieu, les conséquences de la réforme de 2009 : les élèves qui s’engagent dans un cursus de baccalauréat professionnel en trois ans doivent désormais passer, au cours de la deuxième année, une certification dite « intermédiaire » (CAP ou BEP), censée leur garantir un diplôme en cas d’échec au bac professionnel. Or les élèves en plus grande difficulté scolaire, qui n’obtiennent pas ce diplôme intermédiaire, sont contraints de poursuivre vers le baccalauréat professionnel avec encore moins d’espoir et de motivation pour l’obtenir. On assiste alors à deux décrochages successifs, en 2nde professionnelle, puis en 1ère professionnelle. À cela s’ajoute la multiplication des périodes d’épreuves de contrôle en cours de formation, qui est parfois une source de stress pour les élèves et ampute le temps de formation.
Pour lutter contre ce phénomène, plusieurs mesures complémentaires devraient être adoptées :
– l’orientation vers l’enseignement professionnel devrait être décidée en accord avec l’élève, ce qui passe notamment par le respect du premier choix de formation professionnelle à la sortie du collège et la garantie d’un droit à la réorientation visant à prévenir les abandons précoces ;
– afin de diminuer les sorties sans diplôme et d’augmenter l’accès au baccalauréat professionnel, il conviendrait d’augmenter le temps de formation effectif et de simplifier les conditions de certification du diplôme intermédiaire et du baccalauréat ;
– une plus grande fluidité des parcours devrait être assurée grâce à la mise en place de véritables passerelles « ascendantes ». En effet, les passerelles existantes fonctionnent aujourd’hui surtout en sens inverse, par exemple pour réorienter des élèves en difficulté de la 2nde professionnelle vers le CAP ;
– enfin, des parcours en quatre ans devraient être aménagés pour les élèves les plus fragiles, par exemple en prévoyant le passage par un CAP en deux ans, suivi par la préparation d’un baccalauréat professionnel en deux ans.
B. LES DISPOSITIONS CONCERNANT LE SERVICE PUBLIC DE L’ORIENTATION ET LA DÉCLINAISON CONTRACTUELLE DES POLITIQUES DE FORMATION PROFESSIONNELLE
1. La fonction de coordination de la région pour l’orientation tout au long de la vie et la prise en charge locale du décrochage
L’égale dignité des voies de formation ne pourra être affirmée qu’à une double condition : d’une part, lorsque toutes les familles pourront accéder à une information lisible sur les diplômes et les métiers et, d’autre part, lorsque le « maquis » que constitue le système actuel d’orientation, soit une vingtaine de structures intervenant à l’échelle de chaque région, sera transformé en « jardin à la française ». Par ailleurs, les « décrocheurs » ne pourront accéder rapidement à des dispositifs de remobilisation ou de réinsertion que si ceux-ci sont mieux coordonnés sur le plan territorial.
L’article 12 devrait permettre d’atteindre ces objectifs en affirmant la compétence régionale dans deux domaines : l’organisation du service public de l’orientation et la lutte contre le décrochage.
Par ailleurs, l’article 13 tend à améliorer le contenu et le processus de ratification des contrats de plan régionaux de développement des formations professionnelles.
a. Du dispositif virtuel issu de la loi du 24 novembre 2009 à un service public structuré qui respecte le rôle de l’État en matière d’orientation scolaire et universitaire
• Un service de l’orientation pour l’heure essentiellement virtuel
Pour l’essentiel, deux mesures ont été adoptées sous la précédente majorité pour mettre en œuvre le service public de l’orientation, dont la création est demandée depuis plus de dix ans :
– en 2006, un poste de délégué interministériel à l’orientation a été créé, qui a été ensuite remplacé par un délégué à l’information et à l’orientation, institué par la loi du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle, placé, comme son prédécesseur, auprès du Premier ministre. Ce délégué est chargé de coordonner l’action de l’État dans les domaines de l’information sur les métiers et le monde de l’entreprise, de l’orientation scolaire et dans les établissements d’enseignement supérieur, de la préparation à l’emploi et de l’insertion professionnelle des jeunes ;
– la loi du 24 novembre 2009 a prévu en outre la mise en place d’un « service public de l’orientation tout au long de la vie », organisé pour « garantir à toute personne l’accès à une information gratuite, complète et objective sur les métiers, les formations, les certifications, les débouchés et les niveaux de rémunération, ainsi que l’accès à des services de conseil et d’accompagnement en orientation de qualité et organisés en réseaux » (article L. 6111-3 du code du travail).
À cet effet, le droit de toute personne « à être informée, conseillée et orientée en matière d’orientation professionnelle » est décliné en deux modalités :
– un service dématérialisé, gratuit et accessible (article L. 6111-3 du même code) (www.orientation-pour-tous.fr), qui a été ouvert le 6 décembre 2011 ;
– la création de « lieux uniques ». Ainsi, aux termes de l’article L. 6111-5 du code du travail, ces organismes proposent dans un « lieu unique à toute personne un ensemble de services » lui permettant de « disposer d’une information exhaustive et objective sur les métiers, les compétences et les qualifications nécessaires pour les exercer, les dispositifs de formation et de certification, ainsi que les organismes de formation et les labels de qualité dont ceux-ci bénéficient » et de « bénéficier de conseils personnalisés afin de pouvoir choisir en connaissance de cause un métier, une formation ou une certification adapté à ses aspirations, à ses aptitudes et aux perspectives professionnelles » liées aux besoins de l’économie et de la société. Le décret du 4 mai 2011 a créé dans ce but une labellisation « orientation pour tous » que les services publics concernés (Pôle emploi, missions locales, centre d’information et d’orientation, etc.) peuvent obtenir, dès lors qu’ils s’organisent sur un territoire pour offrir aux personnes les sollicitant informations et conseils sur les formations et les métiers.
Certes, ces mesures constituent en elles-mêmes des avancées. Mais la question essentielle, si ce n’est stratégique, de l’orientation, ne saurait se limiter à la désignation d’un délégué interministériel, au lancement d’un site internet et à la labellisation d’organismes.
De surcroît, l’année dernière, une mission constituée de trois inspections générales a sévèrement critiqué le bilan « médiocre » de la mise en place du service public de l’orientation, après la parution des textes d’application de la loi du 24 novembre 2009. En particulier, celle-ci a relevé le caractère « confidentiel » du service dématérialisé (1 000 appels par mois depuis son lancement contre les 145 000 contacts que peut recevoir en une seule année l’Office national d’information sur les enseignements et les professions), le rôle « décevant » de la délégation à l’information et à l’orientation et le fait que la procédure de labellisation « a consacré des partenariats déjà engagés ou n’a pas été en mesure de fédérer rapidement de nouveaux partenariats, et n’a pas eu d’incidence sur la qualité du service délivré » (21).
En réalité, « l’addition » d’un service d’un service dématérialisé et d’organismes labellisés n’égale pas un service public opérationnel. Pour mettre en place celui-ci, il faut aller plus loin, en proposant un cadre d’organisation clair et en désignant, au niveau local, un chef de file.
• Un cadre pour rendre enfin opérationnel ce service public
On compte près de 8 000 structures et plus de 35 000 professionnels répertoriés ou services locaux en charge de l’accueil, de l’information, du conseil ou de l’accompagnement en orientation, relevant d’une vingtaine de réseaux aux statuts variés.
Aussi, comme l’ont noté les inspections générales, « avec 300 à 400 bassins de formation ou zones d’emploi à couvrir, la mauvaise visibilité de l’offre auprès des différents publics, jeunes en formation initiale, sortis de formation, adultes actifs et demandeurs d’emploi, relève a priori plus d’un problème d’organisation et d’optimisation des ressources » (1).
C’est la raison pour laquelle, afin de donner corps à ce service, l’article 12 du projet de loi vise à préciser les rôles respectifs de l’État et de la région en matière d’orientation. Ainsi, si tous deux « assurent le service public de l’orientation tout au long de la vie », leurs responsabilités respectives en la matière sont clairement établies :
– d’un côté, l’État a pour mission de définir, au niveau national, la politique d’orientation des élèves et des étudiants dans les établissements scolaires et les établissements d’enseignement supérieur et de délivrer, à cet effet, l’information nécessaire aux publics concernés. En effet, c’est à la puissance publique de piloter l’orientation scolaire et universitaire, partie intégrante du service public de l’éducation, en donnant toute leur place, dans cette politique, aux conseillers d’orientation-psychologues, dont le rôle a été réaffirmé par la loi du 8 juillet 2013 pour la refondation de l’école ;
– de l’autre, la région doit coordonner, sur son territoire, l’action des « autres organismes » participant au service public régional de l’orientation, le recours au mot « autres » permettant de conforter le caractère particulier de l’orientation mise en œuvre au sein du système éducatif.
Les organismes participant au service public de l’orientation
Il convient de distinguer deux grandes familles de « participants » :
– d’une part, ceux sur lesquels l’État s’appuie pour définir la politique d’orientation scolaire et universitaire, à savoir la communauté éducative (chef d’établissement, professeur principal, services académiques, notamment l’inspecteur de l’éducation nationale en charge de l’orientation, etc.) et les organismes d’orientation qui dépendent du ministère de l’éducation nationale ou de l’enseignement supérieur (les centres d’information et d’orientation et les services universitaires d’information et d’orientation – CIO et SUIO) ;
– d’autre part, les organismes d’orientation dont l’action est coordonnée par la région. Selon les précisions apportées par les services du ministère du travail, ce sont ceux qui, « à l’exclusion des organismes relevant du ministère de l’éducation », répondent aux normes de qualité du service public régional de l’orientation élaborées par la région et n’exercent pas, afin de prévenir tout conflit d’intérêt, une activité de formation.
Le projet de loi ne propose pas pour autant d’établir une cloison étanche entre l’orientation des élèves et des étudiants et l’orientation professionnelle – et c’est heureux, car autrement la notion même d’orientation tout au long de la vie serait vidée de son sens. D’autres dispositions de l’article 12 prévoient, à cet effet, la mise en réseau par la région de tous les « services, structures et dispositifs » qui concourent, sur son territoire, à la mise en œuvre du service public régional de l’orientation tout au long de la vie. Ce dispositif a d’ailleurs été mis en œuvre, à titre expérimental, par huit régions volontaires (Aquitaine, Auvergne, Bretagne, Centre, Limousin, Pays de Loire, Poitou-Charentes et Rhône-Alpes), chaque acteur devant y mobiliser ses propres réseaux (CIO, missions locales, Pôle emploi, réseau Information Jeunesse, etc.) afin de faciliter, dans une logique de complémentarité, la nouvelle offre de service public.
Toutefois, le tissage par la région de liens étroits au sein d’un collectif n’implique pas que celle-ci soit dotée d’une compétence d’opérateur, ce qui est la condition essentielle pour respecter les prérogatives de l’État. D’ailleurs, afin de rendre opératoire le schéma organisationnel proposé par le gouvernement, l’article 12 propose qu’une convention annuelle, conclue entre l’État et la région, détermine les conditions dans lesquelles ces partenaires « coordonnent l’exercice de leurs compétences respectives » en région, ce qui est bien la preuve qu’aucun transfert de moyens n’est prévu d’un niveau de collectivité à l’autre.
Il est également proposé que la région assure un rôle d’information et mette en place un réseau de centres de conseil en validation des acquis de l’expérience (VAE).
Enfin, on rappellera – la Commission ne s’étant pas saisie des dispositions concernées – que l’article 12 a aussi pour objet de préciser le cadre du conseil en évolution professionnelle dont l’objectif est de favoriser l’évolution et la sécurisation du parcours professionnel des actifs.
• Les mesures connexes des lois dites « Peillon » et « Fioraso »
Tant la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République (loi « Peillon ») que la loi du 22 juillet 2013 relative à la recherche et à l’enseignement supérieur (loi « Fioraso ») comportent des mesures relatives à l’orientation qui permettront d’améliorer le service qui doit être effectivement rendu aux jeunes et à leurs familles.
– Chacun en convient : l’orientation doit être préparée en amont et surtout accompagnée par des personnels réellement formés sur la réalité des cursus et des métiers. Comme l’ont souligné nos collègues MM. Régis Juanico et Jean-Frédéric Poison, « tout doit être connu et mis sur la table, face aux élèves et leur famille : l’exigence incontournable d’un niveau général au moins correct, la difficulté de l’alternance, les taux d’insertion professionnelle, les rémunérations… » (22).
À cet égard, il faut se féliciter que la loi du 8 juillet 2013 pour la refondation de l’école ait prévu que « l’orientation et les formations proposées aux élèves tiennent compte du développement de leurs aspirations et de leurs aptitudes et des perspectives professionnelles liées aux besoins prévisibles de la société, de l’économie et de l'aménagement du territoire ». C’est pourquoi, afin de l’aider à élaborer son projet d’orientation scolaire et professionnelle et d’éclairer ses choix d’orientation, un « parcours individuel d’information, d’orientation et de découverte du monde économique et professionnel » est proposé à chaque élève, aux différentes étapes de sa scolarité du second degré. Celui-ci est défini, sous la responsabilité du chef d’établissement et avec l’élève et ses parents, par les conseillers d’orientation-psychologues, les enseignants et les autres professionnels compétents, les administrations concernées, les collectivités territoriales, les organisations professionnelles, les entreprises et les associations contribuant à la mise en œuvre de ce parcours (article L. 331-7 du code de l’éducation).
– Par ailleurs, afin de limiter l’orientation subie par défaut, qui demeure une source grave d’absentéisme et de décrochage scolaire, la loi du 8 juillet 2013 a modifié, à titre expérimental, la procédure d’orientation à la fin du collège, cette mesure faisant suite à une préconisation de la Cour des comptes (23).
Ainsi, par dérogation à la procédure fixée par l’article L. 331-8 du code de l’éducation, la décision d’orientation est retirée au chef d’établissement et confiée aux parents de l’élève concerné, cette expérimentation étant limitée à trois ans et devant faire l’objet d’un rapport d’évaluation transmis au Parlement avant sa généralisation.
Le décret relatif au « dernier mot » des parents en matière d’orientation
Entré en vigueur le 10 janvier dernier, le décret n° 2014-6 du 7 janvier 2014 prévoit que lorsque les propositions du conseil de classe sont conformes aux demandes des responsables légaux de l’élève ou de l’élève majeur, le chef d’établissement prend les décisions d’orientation conformément à ces demandes et les notifie aux responsables légaux de l’élève ou à l’élève majeur.
Lorsque ces propositions ne sont pas conformes aux demandes, le chef d’établissement ou son représentant avec le professeur principal de la classe reçoivent l’élève et ses responsables légaux afin de leur expliquer les propositions du conseil de classe, de recueillir leurs observations et de proposer un entretien avec un conseiller d’orientation-psychologue dans un délai de cinq jours ouvrables.
Si, au terme de ces cinq jours, le cas échéant après une nouvelle rencontre avec le chef d’établissement ou son représentant organisée à la demande de l’élève et ses responsables légaux, ces derniers maintiennent leur choix, le chef d’établissement prononce une décision d’orientation conforme à ce choix et en informe l’équipe éducative.
Cette procédure sera expérimentée cette année dans 117 collèges de 12 académies.
– Enfin, la loi « Fioraso » du 22 juillet 2013 impose aux établissements d’enseignement scolaire disposant d’une formation d’enseignement supérieur
– c’est-à-dire les qui lycées accueillent des classes préparatoires ou des sections de BTS – de rendre publiques des statistiques comportant des indicateurs de réussite de leurs élèves ou apprentis aux examens, concours et diplômes qu’ils préparent. Ces établissements doivent également diffuser une information générale sur les taux de poursuite d’études et d’insertion professionnelle dans chacun des domaines qui les concernent, chaque élève ou apprenti étant « obligatoirement informé de ces données statistiques avant son orientation dans un nouveau cycle ou une formation supérieure » (article L. 401-2-1 du code de l’éducation).
Clairement, l’Éducation nationale a décrété la mobilisation générale contre le décrochage. Celle-ci s’appuie, outre sur les réseaux FOQUALE déjà évoqués, sur les engagements contenus dans le rapport annexé à la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République.
Celui-ci prévoit en effet l’affectation de 4 000 emplois supplémentaires d’ici 2017 dans les collèges en difficulté et les lycées professionnels pour mettre en place « des organisations pédagogiques adaptées à l’hétérogénéité des publics », l’objectif étant notamment de lutter contre le décrochage scolaire.
La même annexe évoque d’autres moyens qui doivent être mis au service de cette priorité :
– la mobilisation des équipes pédagogiques du secondaire, via les projets d’établissement, « autour d’objectifs précis de réduction de l’absentéisme, premier signe du décrochage » ;
– la désignation « dans les collèges et les lycées professionnels à taux de décrochage particulièrement élevé » d’un référent, chargé de la prévention du décrochage et du traitement des cas avérés, en prévoyant et préparant le retour en formation des élèves concernés ;
– enfin, eu égard à la compétence de la région en matière de formation professionnelle, la recherche de partenariats État-région en vue d’« établir des objectifs conjoints de réduction du nombre de jeunes sortant de formation initiale ou présents sur le marché du travail sans qualification et pour définir les modalités d’atteinte de ces objectifs ».
Cette dernière orientation permet de souligner la nécessité qu’il y a, au-delà des murs de l’école, à désigner, dans les territoires, un coordonnateur chargé de mobiliser, au bon échelon, les différents réseaux qui assurent le repérage et la prise en charge des décrocheurs.
C’est ce que permet l’article 12 du présent projet de loi en confiant trois nouvelles compétences à la région :
– la désignation par la région, en lieu et place du préfet, des personnes et organismes, c’est-à-dire, concrètement, des responsables des plates-formes d’appui et de suivi des décrocheurs, des CIO, des missions locales, etc., auxquels les coordonnées des décrocheurs peuvent être transmises. On rappellera que cette possibilité de transmission a été introduite par la loi du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle et qu’elle constitue la base légale nécessaire à l’établissement d’un outil informatique national, qui permet des échanges de données entre l’ensemble des parties concernées (Éducation nationale, enseignement privé, centres de formation d’apprentis, missions locales…) en vue du repérage des élèves et des apprentis qui ont « décroché » ;
– la coordination et la mise en œuvre, au niveau local, en lien avec les autorités académiques, des actions de prise en charge des décrocheurs ;
– l’autorité sur le service public de l’orientation et les organismes y participant lorsqu’ils organisent, au niveau local, la réinscription du « décrocheur » dans un parcours de formation ou son accompagnement. La région semble en effet l’acteur le mieux placé pour identifier les voies alternatives qui peuvent être proposées aux jeunes qui rejettent l’environnement scolaire mais non les savoirs.
2. Un cadre rénové pour l’adoption du contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles
Au préalable, on rappellera que la région détient la compétence de droit commun en matière de formation professionnelle des jeunes et des demandeurs d’emploi – aux termes de l’article L. 214-12 du code de l’éducation, elle « définit et met en œuvre la politique régionale d’apprentissage et de formation professionnelle des jeunes et des adultes à la recherche d’un emploi ou d’une nouvelle orientation professionnelle » – et qu’elle est devenue le premier financeur de cette politique publique.
À ce titre, elle élabore le contrat de plan régional de développement des formations professionnelles, qui constitue un outil précieux pour promouvoir la voie professionnelle. C’est en effet dans ce cadre partenarial que pourront être développés les « campus des métiers », ces pôles d’excellence professionnelle déjà évoqués et conçus pour offrir à la fois des parcours allant du CAP aux formations d’ingénieurs et des conditions optimales d’accueil des jeunes.
L’article 13 du projet de loi propose donc de modifier la procédure d’adoption de ce contrat, qui se référera aussi à l’orientation professionnelle, tout en enrichissant son contenu.
Cet outil contractuel sera inscrit plus fortement dans une logique de négociation entre le conseil régional, l’État et les autorités académiques, tandis que les représentants des organisations syndicales de salariés et d’employeurs pourront en devenir les signataires.
Ces évolutions doivent être saluées, mais la rapporteure pour avis tient à souligner le fait que la réaffirmation du rôle des régions dans la valorisation de l’enseignement professionnel doit aller de pair avec un dialogue plus dynamique avec les branches professionnelles.
De ce point de vue, la création, par le décret n° 2013-539 du 25 juin 2013, du Conseil national éducation économie (CNEE) permettra d’établir une concertation permanente entre l’Éducation nationale, l’ensemble des secteurs professionnels et les acteurs publics impliqués dans la formation des jeunes et dans leur insertion professionnelle.
Au cours de sa séance du 28 janvier 2014, la Commission des affaires culturelles et de l’éducation examine pour avis les articles 8, 12 et 13 du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale (n° 1721).
M. le président Patrick Bloche. Le calendrier d’examen de ce projet de loi est également très serré, puisqu’il a été présenté le 22 janvier en conseil des ministres et viendra à l’ordre du jour de la séance publique dès le 5 février. La commission des affaires sociales, saisie au fond, devant l’examiner à partir de demain, nous n’avions d’autre choix que de donner notre avis aujourd’hui, ce qui nous conduit malheureusement à nous réunir au moment même où, en salle Lamartine, se tient un débat sur un sujet qui nous intéresse directement, l’évaluation des politiques publiques en faveur de la mobilité sociale des jeunes.
Malgré ces délais contraints, notre commission a donc souhaité examiner pour avis les dispositions du texte relevant de sa compétence afin de s’assurer de leur cohérence avec celles qui ont été adoptées dans la loi de refondation de l’école de la République : il s’agit des articles relatifs aux centres de formation des apprentis (CFA), au service public de l’orientation tout au long de la vie et aux contrats de plan régionaux de développement des formations et de l’orientation professionnelles.
L’ensemble de ces mesures ne pourra que contribuer à consacrer l’égale dignité des voies de formation, scolaire ou en alternance, et à offrir une seconde chance à chaque jeune sorti sans qualification du système de formation. Nous retrouvons donc des préoccupations qui ont su nous rassembler lors d’autres débats, notamment à propos de la refondation de l’école.
Mme Colette Langlade, rapporteure pour avis. Avant de présenter les dispositions contenues dans les articles 8, 12 et 13 du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, je ferai deux remarques.
La première est que notre commission est fondée à se saisir d’un texte qui vise à développer l’alternance et à améliorer l’offre d’orientation, car ces politiques s’articulent étroitement avec la refondation de l’école. D’un côté, la rénovation de notre système éducatif vise à assurer l’égalité des chances ; de l’autre, la relance de l’apprentissage est un moyen sûr de favoriser l’insertion professionnelle de celles et ceux qui passent par cette voie de formation. Dans les deux cas, il s’agit de promouvoir, en faveur de la jeunesse, des politiques d’avenir corrélées et efficaces. L’orientation tout au long de la vie, quant à elle, se situe au croisement de ces ambitions.
La deuxième remarque concerne la situation des lycées professionnels, abordée à de nombreuses reprises au cours de mes auditions, en lien avec la question de l’orientation et de la prise en charge des élèves « décrocheurs ». Rappelons que l’annexe de la loi du 8 juillet 2013 pour la refondation de l’école comprend plusieurs engagements à l’égard de ces lycées, parmi lesquels la création de 4 000 postes dans les collèges les plus difficiles et les lycées professionnels, afin de favoriser l’adoption d’organisations pédagogiques adaptées à des publics hétérogènes et, ainsi, de lutter contre le décrochage – plus de 40 % des décrocheurs étant issus des lycées professionnels – ; et l’organisation de campus des métiers et des qualifications, regroupant sur un même lieu toutes les voies de formation, ainsi que des entreprises et des universités.
Ces mesures fortes devraient nous inciter à ériger en priorité nationale – au même titre que l’apprentissage – la valorisation de l’enseignement professionnel, aujourd’hui très fragilisé.
J’en viens aux trois articles dont nous sommes saisis. Nous avons effectivement des choses à dire sur les passerelles entre les CFA et les filières d’enseignement, sur la mise en route effective du service public de l’orientation tout au long de la vie, sur la lutte contre le décrochage et sur le cadre de concertation de l’organisation des formations professionnelles, y compris initiales.
Je me réjouis que l’article 8 assigne aux CFA de véritables missions pédagogiques, qui les apparenteront à des formations professionnelles sous statut scolaire. Ces missions se fondent sur quatre principes ou objectifs : la cohérence entre la formation générale, la formation pratique et la formation en entreprise ; la poursuite d’études, qui nécessite l’instauration de passerelles ; l’assistance aux candidats à l’apprentissage et l’accompagnement des apprentis. La mise en œuvre de ces nouvelles obligations impliquera de valoriser davantage les formateurs et les maîtres d’apprentissage.
La question de l’orientation est traitée par l’article 12. La loi du 24 novembre 2009 relative à la formation professionnelle a institué un service public d’orientation tout au long de la vie, appelé communément SPO, dont la mise en place a été jugée décevante par une mission constituée par trois inspections générales. En effet, la question essentielle, voire stratégique, de l’orientation ne saurait se limiter à la désignation d’un délégué interministériel, au lancement d’un site Internet et à la labellisation d’organismes.
Il est vrai que l’on compte près de 8 000 structures et plus de 35 000 professionnels répertoriés ou services locaux en charge de l’accueil, de l’information, du conseil ou de l’accompagnement en orientation, relevant d’une vingtaine de réseaux aux statuts très variés. Nous sommes donc confrontés à un problème d’organisation des ressources.
C’est la raison pour laquelle l’article 12 vise à préciser les rôles respectifs de l’État et de la région en matière d’orientation. En effet, si tous deux assurent le service public de l’orientation tout au long de la vie, leurs responsabilités respectives en la matière doivent être clairement établies.
D’un côté, l’État a pour mission de définir au niveau national la politique d’orientation des élèves et des étudiants dans les établissements scolaires et les établissements d’enseignement supérieur, et de délivrer à cet effet l’information nécessaire aux publics concernés. De l’autre, la région doit coordonner sur son territoire l’action des autres organismes – ceux qui ne relèvent pas de l’éducation nationale.
Toutefois, le projet de loi a prévu que la région puisse mettre en réseau l’ensemble des acteurs, y compris les centres d’information et d’orientation (CIO). C’est actuellement le cas dans huit régions volontaires – Aquitaine, Auvergne, Bretagne, Centre, Limousin, Pays-de-Loire, Poitou-Charentes et Rhône-Alpes – qui, à titre expérimental, préfigurent le service public régional de l’orientation prévu par le projet de loi.
Afin de rendre opérationnel ce partage des compétences, l’article 12 propose qu’une convention annuelle détermine les conditions dans lesquelles l’État et la région coordonneront l’exercice de leurs compétences respectives en région – ce qui est bien la preuve qu’aucun transfert de moyens n’est prévu entre les deux niveaux de décision.
Enfin, en ce qui concerne le suivi des décrocheurs, l’article 12 confie de nouvelles compétences à la région : en particulier, elle coordonnera au niveau local, en lien avec les autorités académiques, les actions de prise en charge de ces jeunes et elle aura autorité sur le service public régional de l’orientation ainsi que sur les organismes participants lorsqu’ils organiseront la réinscription du décrocheur dans un parcours de formation ou son accompagnement. La région semble en effet l’acteur le mieux placé pour identifier les voies alternatives les plus adaptées aux jeunes qui rejettent l’environnement scolaire, mais non les savoirs.
Enfin, l’article 13 tend à enrichir le contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles et à améliorer sa procédure d’adoption en invitant les partenaires sociaux à le signer. Les dispositions concernées sont plutôt techniques, mais j’insiste sur le fait qu’elles ne modifient en rien l’équilibre atteint par la loi Peillon en ce qui concerne les ouvertures et fermetures de sections professionnelles dans les lycées. En effet, dans la mesure où, depuis le vote de la loi du 8 juillet 2013, la région ne peut arrêter la carte des formations qu’après l’accord du recteur, les deux collectivités publiques sont condamnées à s’entendre.
Au total, voici trois articles positifs pour nos jeunes et nos territoires, trois articles qui favoriseront l’égale dignité des parcours de formation initiale. Je propose donc de donner un avis favorable à leur adoption, sachant que je présenterai plusieurs amendements de précision et de clarification.
M. le président Patrick Bloche. Je remercie notre rapporteure pour avis pour le travail qu’elle a accompli dans un délai très bref – elle a notamment effectué un nombre impressionnant d’auditions –, ainsi que pour la présentation très synthétique de son rapport.
Mme Sandrine Doucet. Nous voici donc à la veille de la discussion d’un projet de loi qui est le fruit d’une méthode, celle du dialogue social, et d’un état d’esprit, celui qui avait déjà prévalu lors de l’examen en 1971, dans le cadre de la « Nouvelle société », de la loi de Jacques Delors sur la formation professionnelle, marquée par la volonté de s’adapter aux exigences de son temps. Désormais, ce sont la mondialisation et l’apparition de nouveaux acteurs tels que les collectivités territoriales qu’il faut prendre en compte.
Le projet de loi traite de trois sujets, la formation professionnelle, la démocratie sociale et l’inspection du travail, au bénéfice d’une même finalité : l’emploi.
Aujourd’hui, en France, seulement 11 % des formations suivies sont qualifiantes : c’est un des taux les plus bas d’Europe. De plus, cette formation professionnelle est dispensée de façon très inégalitaire, ceux qui y accèdent étant plutôt des cadres, des salariés des grandes entreprises, des hommes et surtout des actifs.
D’autre part, l’examen de la loi sur la refondation de l’école et celui de la loi sur l’enseignement supérieur et la recherche ont fait apparaître de nouveaux enjeux. Que faire, par exemple, de ces 140 000 « décrocheurs » qui quittent chaque année le système sans formation ? Rappelons qu’en 2013 – d’après le bilan publié le 8 janvier dernier –, plus de 180 000 jeunes ayant décroché ont été contactés par les réseaux « formation-qualification-emploi » – FOQUALE –, et que 20 000 d’entre eux sont de retour en formation initiale diplômante.
Mais les circonstances restent difficiles pour l’apprentissage. À cet égard, les injonctions de la précédente ministre de la formation professionnelle et de l’apprentissage et les suppressions de filières décidées dans l’enseignement professionnel n’ont pas facilité l’action de l’institution éducative ni favorisé, chez les jeunes, l’envie de se former. Dans ce domaine également a été appliquée une politique du chiffre : en imposant l’objectif de 800 000 apprentis en 2015, en ouvrant l’apprentissage dès quatorze ans dans le travail saisonnier et intérimaire, on s’est éloigné du premier principe énoncé dans ce projet de loi : mettre la personne au cœur du dispositif et adopter la concertation pour méthode.
De plus, comme l’a souligné Yves Durand dans un rapport de 2011, les régions ont dû non seulement financer les équipements des lycées techniques et professionnels – qui plus est à perte, en raison des fermetures de classes –, mais aussi reprendre en formation professionnelle les enseignements qui n’étaient plus assurés en formation initiale. Or les régions préfèrent étudier les besoins réels du terrain.
Il s’agit donc, avec ce projet de loi, de rétablir une justice et une ambition.
Cette réforme globale prend en charge tous les champs de la formation. Elle vise à favoriser l’emploi pour toutes les générations, mais surtout pour les plus jeunes qui, partout en Europe, sont frappés deux fois plus que les autres par le chômage. C’est d’ailleurs ce qui avait amené la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Geneviève Fioraso, à vouloir porter, en cinq ans, de 7 à 17 % la proportion d’alternants dans l’enseignement supérieur.
L’article 8 permettra aux CFA de travailler au plus près des besoins des jeunes. Ils sont appelés à travailler en pleine cohérence avec les entreprises, à favoriser la poursuite d’études, à accompagner les postulants dans leur recherche d’une entreprise d’accueil. L’apprentissage ne doit en effet être ni une voie de garage – nous proposerons un amendement précisant que son objectif est bien la progression sociale –, ni une possibilité d’orientation réservée à ceux qui auraient des relations dans le monde de l’entreprise.
Par ailleurs, le passage dans les CFA doit être l’occasion pour les jeunes apprentis de découvrir le volet européen de leur domaine d’études, ce que cherche à faciliter la nouvelle forme de mobilité européenne organisée dans le cadre du programme Erasmus Plus. Nous proposerons également un amendement sur ce sujet.
Le projet de loi crée enfin un service public régional de la formation professionnelle, afin que l’ensemble des compétences dans ce domaine s’exerce dans un cadre rénové. Il s’agit de rendre effectif l’accès de tous à un premier niveau de qualification, de faciliter l’insertion et les transitions professionnelles, d’adapter les qualifications proposées aux caractéristiques du tissu économique de chaque territoire et de mettre en place des programmes dédiés aux personnes en grande difficulté. Il s’agit de donc préparer l’avenir en s’appuyant sur tous les outils permettant d’évoluer dans l’emploi. Tout apprenant doit pouvoir être formé dans sa région, encadré par l’État et prêt pour les mobilités en Europe.
M. Patrick Hetzel. Je salue le travail réalisé par la rapporteure, d’autant qu’elle l’a accompli dans des conditions particulièrement difficiles. On peut même juger les parlementaires malmenés, puisqu’il ne s’est passé que deux jours entre le moment où nous avons disposé du texte définitif et la clôture du délai de dépôt des amendements. Cela nous a contraints à travailler plusieurs semaines sur ce qui n’était encore qu’un avant-projet de loi, profondément remanié depuis en Conseil d’État : les dispositions sur les conseils de prud’hommes en ont été retirées, tandis que demeure celle relative à la durée minimale hebdomadaire de vingt-quatre heures, qui ne figurait pourtant pas dans l’accord national interprofessionnel (ANI).
Le Gouvernement se félicite de sa méthode, fondée sur une concertation avec les partenaires sociaux. Mais s’en remettre à la démocratie sociale ne signifie pas mépriser la démocratie parlementaire. C’est pourtant ce à quoi nous assistons.
C’est d’autant plus vrai que, contrairement à ce qu’affirme le Gouvernement, ce projet de loi, comme je l’ai dit, ne se contente pas de retranscrire l’ANI du 14 décembre dernier. C’est aussi un véhicule législatif pour des dispositions sur la représentativité patronale ou sur l’inspection du travail, sujets qui n’étaient pas abordés par l’accord. On peut donc se demander si ce texte respecte l’esprit qui avait prévalu lors de la négociation de l’ANI. Enfin, nous déplorons que le Gouvernement ait décide recourir à la procédure accélérée pour l’examen du projet de loi.
À cela s’ajoutent plusieurs problèmes de fond.
Le premier concerne le compte personnel de formation. Ce compte, dont les droits sont transférables, qui peut être crédité jusqu’à un plafond de 150 heures et faire l’objet d’abondements de la part de l’État ou des régions, est présenté par le Gouvernement comme une véritable révolution. Or il n’en est rien : 150 heures, cela ne représente que 30 heures de plus que dans le cadre du droit individuel à la formation. Or une formation qualifiante nécessite plutôt un crédit de 400, voire 800 heures. Nous en sommes loin.
L’idée d’un compte personnel dont les crédits seraient mobilisables selon les souhaits des salariés est d’ailleurs contredite par la nécessité de bénéficier d’abondements supplémentaires pour accéder aux formations qualifiantes. Tout reste à prouver quant à la facilité de les obtenir. En attendant, en l’absence d’un plafond plus élevé, la liberté du titulaire du compte reste très limitée.
De plus, les listes devant fixer les formations éligibles posent question. Non seulement elles sont multiples – listes des branches, des régions, de l’État, listes destinées aux salariés ou aux demandeurs d’emploi –, ce qui va à l’encontre d’une réelle codécision des acteurs, mais elles représentent une contrainte pour le salarié ou pour le demandeur d’emploi, d’autant qu’elles s’ajoutent aux listes et inventaires existants. Il y a donc un écart entre ce qui est proposé et le prétendu mouvement de simplification administrative.
Le deuxième problème concerne l’apprentissage. Alors que le Président de la République maintient son objectif de porter à 500 000 le nombre d’apprentis en 2017, son gouvernement prend dans ce domaine, depuis plusieurs mois, des décisions contradictoires et floues qui déstabilisent les entreprises. Pour mémoire, le projet de loi de finances a divisé par deux le bénéfice du crédit d’impôt apprentissage et supprimé l’indemnité compensatrice forfaitaire, qu’il a remplacée par un dispositif de compensation s’appliquant au détriment des régions. En outre, le projet de réforme de la taxe d’apprentissage qui figurait dans la loi de finances rectificative de fin d’année a été censuré par le Conseil constitutionnel et son rétablissement n’est pas prévu par ce projet de loi.
Ce texte marque donc le désengagement de l’État, qui transfère la gestion des CFA aux régions sans pour autant en assurer le financement. Une fois de plus, le transfert d’une compétence aux collectivités se fera sans aucune compensation.
Je relève aussi, toujours en ce qui concerne l’apprentissage, une incertitude quant à la capacité qu’auront les entreprises de décider librement des établissements qu’elles souhaitent faire bénéficier des fonds aujourd’hui non affectés.
Enfin, l’articulation entre formation initiale et formation tout au long de la vie n’est pas suffisamment pensée dans ce projet, qui accorde également peu de place à l’enseignement supérieur alors que celui-ci a aussi un rôle à jouer en matière de formation professionnelle.
En définitive, ces dispositions sont très en retrait sur l’ambition affichée dans l’exposé des motifs. Force est de constater encore une fois le décalage entre les discours du Gouvernement et ses actes !
Mme Barbara Pompili. Je voudrais tout d’abord vous remercier, madame la rapporteure, pour l’efficacité dont vous avez fait preuve en effectuant un travail de qualité dans un temps très court.
Ce projet de loi comprend des dispositions visant à élargir et à simplifier l’accès à la formation professionnelle. Aujourd’hui en effet, celle-ci bénéficie majoritairement à des salariés disposant d’une formation initiale solide et capables de trouver les financements et d’identifier les interlocuteurs utiles dans le maquis des structures œuvrant dans ce champ. La commission d’enquête relative aux causes du projet de fermeture de l’usine Goodyear d’Amiens-Nord a ainsi démontré que les salariés les moins qualifiés de cet établissement étaient ceux qui avaient le moins bénéficié de formations, de sorte que certains ont même vu leur qualification régresser, jusqu’à l’illettrisme dans certains cas.
L’échec du droit individuel à la formation – en 2011, 5 % seulement des salariés en ont fait usage – a fait apparaître la nécessité d’un dispositif facilitant l’orientation des salariés souhaitant suivre une formation, via un meilleur accès aux financements et une meilleure connaissance de leurs droits et des formations disponibles : le projet de loi répond en partie à cette exigence. Les écologistes saluent en particulier le renforcement des compétences des régions : c’est en effet l’échelon territorial le plus à même de s’occuper avec cohérence et efficacité tant de la formation et de l’orientation que du développement économique, qui doivent aller de pair. C’est aussi le niveau qui permet une vision stratégique à court, moyen et long termes pour adapter aux défis de l’avenir les apprentissages et les formations professionnelles proposés aujourd’hui. En effet, ceux-ci doivent, non seulement satisfaire les besoins immédiats, mais aussi préparer à l’exercice des métiers de demain. C’est pourquoi nous veillerons à ce que les secteurs décisifs pour la transition écologique, comme les énergies renouvelables ou encore les transports, soient prioritaires.
L’enjeu est aussi d’assurer la lisibilité des politiques menées et de les rendre accessibles au plus grand nombre, via un guichet clairement identifiable où le public puisse trouver l’ensemble des informations et des compétences disponibles en matière d’orientation. Il faut que l’information soit identique quel que soit l’organisme auquel on s’adresse – centre d’information et d’orientation, mission locale ou Pôle emploi. Cela suppose des logiciels compatibles afin d’assurer des transferts d’information encore trop difficilement mis en œuvre aujourd’hui. Cette question revêt une importance cruciale pour remédier aux difficultés rencontrées par nombre de nos concitoyens pour accéder aux formations.
Si nous soutenons le renforcement du rôle de la région, nous pensons qu’il faut aller plus loin encore et en faire l’interlocuteur unique en ce qui concerne la formation, afin de mettre celle-ci au service des territoires. Les régions devraient ainsi récupérer la totalité de la compétence concernant les demandeurs d’emploi.
Le compte personnel de formation représente une réelle avancée : chacun pourra le conserver, quelle que soit sa situation professionnelle, et n’aura pas besoin du consentement de son employeur pour l’utiliser. Tout en saluant dans ce dispositif un premier pas vers le droit universel à la formation tout au long de la vie, nous avons toutefois des doutes quant à son applicabilité aux fonctionnaires, aux demandeurs d’emploi ou encore aux intermittents du spectacle. Pourriez-vous, madame la rapporteure, nous éclairer aussi sur le cadre dans lequel les bénévoles et les jeunes engagés en service civique pourront bénéficier d’actions de formation, comme le texte le prévoit ?
Les cent cinquante heures prévues par le projet de loi représentent une amélioration incontestable, mais encore insuffisante, la plupart des formations nécessitant entre 400 et 1 200 heures. Il serait peut-être nécessaire que les personnes peu formées comme les salariés en contrat précaire, les demandeurs d’emploi ou les personnes en situation de handicap aient droit à un plus grand nombre d’heures de formation pour que cette réforme bénéficie vraiment à ceux qui en ont le plus besoin, les personnes les moins formées et les chômeurs de longue durée. C’est là un enjeu de justice sociale, au même titre que l’éducation prioritaire.
Les écologistes souhaitent que la validation des acquis de l’expérience soit plus accessible et valorisée et prônent un droit universel à la formation tout au long de la vie, d’une durée minimale de cinq ans pour toutes et tous, utilisable à tout moment de sa carrière professionnelle. Nous en sommes encore loin, mais ce projet de loi constitue une avancée dont nous ne pouvons que nous réjouir.
M. Thierry Braillard. De même que la loi de sécurisation de l’emploi était la traduction législative d’un accord national interprofessionnel, le présent projet de loi est issu d’un accord sur la formation professionnelle conclu, le 14 décembre 2013, par les partenaires sociaux. Il faut saluer à cet égard le sens du dialogue social du Gouvernement, qui contraste avec ce que nous connaissions jusqu’ici. Contrairement à Patrick Hetzel, je préfère que ce dialogue soit fécond même si cela complique le travail des parlementaires !
Premier des trois articles sur lesquels nous sommes consultés, l’article 8 renforce et précise les missions confiées aux centres de formation : il vise notamment à consolider le projet de formation, à fournir un appui aux jeunes pour la recherche d’employeurs et il traite de la relation avec les maîtres d’apprentissage. Selon le rapport de Colette Langlade, notre pays compte actuellement 443 000 apprentis et l’objectif du Gouvernement est de porter ce nombre à 500 000 d’ici à 2017 : la nécessité de revaloriser cette voie de formation s’impose donc, d’autant qu’elle n’a rien à envier à la filière générale pour ce qui est du taux de réussite aux examens.
L’article 12 précise la répartition des compétences entre l’État et la région. Surtout, il institue un conseil gratuit en évolution professionnelle, qui sera mis en œuvre dans le cadre du service public régional de l’orientation. Il faudra simplement veiller à ce que les régions aient les moyens de l’organiser : il ne faudrait pas que les disparités économiques et sociales qui existent entre elles aboutissent à une inégalité dans ce domaine.
L’article 13, enfin, précise les modalités de mise en œuvre du contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles. Il met en exergue la négociation entre l’État, la région et les autorités académiques. Il me semble toutefois que ces dispositions auraient mieux trouvé leur place dans le futur projet de loi relatif à l’acte II de la décentralisation, qui tend précisément à étendre les compétences des régions.
Reste que ce texte fait avancer la cause d’une formation tout au long de la vie que le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste a toujours défendue.
Mme Sylvie Tolmont. Je salue à mon tour, madame la rapporteure, la qualité de votre travail et vous félicite de votre capacité à faire progresser la réflexion sur la formation professionnelle dans un temps très court !
Ce texte est la traduction concrète de la double priorité affirmée par le Président de la République : tout mettre en œuvre afin de remporter la bataille pour l’emploi et remettre la jeunesse au cœur de toutes les politiques. Et il faut être reconnaissant au ministre Michel Sapin d’avoir su élaborer un projet de loi pleinement au service de cette grande mission.
Conformément aux mêmes objectifs, la loi de refondation de l’école a déjà posé les jalons pour un système éducatif porteur d’espoir et instrument d’une insertion professionnelle réussie. Ces principes devaient impérativement être également appliqués à la voie professionnelle. Mais, au-delà de la nécessaire adaptation aux attentes des jeunes et aux exigences du marché du travail, c’est le souci de donner un nouvel élan à l’apprentissage que je retiens tout spécialement dans ce texte.
Trop souvent malmené, méconnu, dévalorisé, l’apprentissage souffre de représentations négatives qui empêchent les jeunes de s’y engager avec enthousiasme et fierté. Pourtant, ses bénéfices sont remarquables, autant pour les apprentis que pour les entreprises. Il contribue en effet à sensibiliser progressivement les jeunes aux réalités d’un milieu professionnel et à leur donner confiance dans leur capacité à exercer un métier, cela tout en maintenant un lien fort avec la formation théorique et en conduisant à l’obtention d’un diplôme. L’employeur peut bénéficier de la motivation et de l’implication ainsi obtenues pour former de futurs collaborateurs, voire, à terme, un futur repreneur.
C’est pourquoi il est crucial de dynamiser et de valoriser cette voie de formation et de changer le regard que la société porte sur cette forme de pédagogie pour inspirer aux jeunes un appétit pour cette filière.
Cette ambition pose la question de l’orientation. Or, si l’intention de revaloriser l’apprentissage est incontestable, le texte dit peu de chose des moyens nécessaires à une orientation de qualité. Le rôle du conseiller d’orientation, par exemple, n’est pas évoqué. Nous savons pourtant qu’une bonne orientation du futur apprenti est une des clés de la réussite de sa formation. Ne pourrait-on prévoir une sensibilisation à l’apprentissage et une information dès l’étape de l’orientation, au collège ?
Mme Annie Genevard. Je voudrais, moi aussi, déplorer l’excessive rapidité avec laquelle les projets de loi se succèdent, ce qui, dans la présente occurrence, nous a interdit de tirer tout le profit possible du travail de notre collègue rapporteure pour avis.
Il me semble peu cohérent de nous proposer d’accroître le rôle des régions dans le domaine de la formation, comme le Gouvernement le fait à travers ce projet de loi, avant de nous soumettre le projet de loi de décentralisation qui sera consacré à ces collectivités. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles elles se montrent quelque peu circonspectes quant à la dévolution de cette nouvelle compétence. En d’autres temps, qui ne sont pas si lointains, tout un chacun aurait crié au désengagement de l’État !
Je m’interroge également sur l’efficacité d’un dispositif qui dépendra à la fois de l’État et des régions. Il conviendra à cet égard d’évaluer sérieusement les expérimentations en cours.
D’autre part, madame la rapporteure, vous entendre affirmer l’égale dignité des diverses voies de formation et reconnaître que certains jeunes qui rejettent l’environnement scolaire ne rejettent pas pour autant les savoirs ne laisse pas de me surprendre : je me demande pourquoi vous avez souhaité abroger la loi Cherpion, qui abaissait à quatorze ans l’âge de l’entrée en apprentissage. Elle répondait très exactement aux préoccupations que vous exprimez !
La possibilité de conclure un contrat d’apprentissage à durée indéterminée est intéressante, notamment pour les employeurs des zones frontalières, qui se désespèrent de voir les jeunes qu’ils ont formés partir travailler dans le pays voisin. Ce dispositif doit permettre de garder le jeune dans l’entreprise qui l’a formé. Cependant, compte tenu de la difficulté de trouver des maîtres d’apprentissage, il ne faudrait pas que ce dispositif se traduise par un alourdissement des contraintes dissuadant un peu plus les entreprises d’embaucher des apprentis.
Plus de simplification, de lisibilité, d’efficacité : c’est ce que nous souhaitons tous. Faut-il rappeler que, alors que la formation mobilise un budget annuel de trente-deux milliards d’euros, 8 % seulement des chômeurs suivent une formation alors même que des centaines de milliers d’emplois ne sont pas pourvus ?
Mme Martine Faure. Je vous remercie, madame la rapporteure, des éclairages que vous nous avez apportés sur ces articles 8, 12 et 13 du projet de loi, qui s’inscrivent parfaitement dans le prolongement de la loi de refondation de l’école de la République, définissant le socle de la politique de redressement éducatif.
Pour construire une politique ambitieuse de l’apprentissage, il faut certes améliorer l’orientation des jeunes, valoriser la voie de l’apprentissage et développer les formations. Mais on ne parviendra pas à faire de l’alternance une voie d’excellence, à poursuivre la relance de l’apprentissage et à faciliter l’insertion des jeunes dans le monde du travail sans une implication massive des entrepreneurs et des artisans. Existe-t-il des incitations propres à assurer cette mobilisation des acteurs économiques ?
Mme Dominique Nachury. J’adresse à mon tour mes remerciements à Colette Langlade pour son travail, tout en déplorant le peu de temps qui nous a été accordé pour en prendre connaissance.
Le rôle de chef de file reconnu à la région par ce texte dans le domaine de la formation professionnelle me semble justifié. Cependant, le Gouvernement est-il si peu assuré de la solidité de cette disposition qu’il éprouve le besoin d’y revenir alors qu’une loi récente a déjà consacré ce rôle et que celui-ci sera à nouveau réaffirmé par l’acte II de la décentralisation ? Je crains d’autre part que la répartition des compétences entre l’État et la région définie par l’article 12 ne garantisse pas une réponse efficace, cohérente et lisible aux demandes d’information et d’orientation, dans la mesure où elle risque d’être peu lisible pour les premiers intéressés.
M. Stéphane Travert. Je tiens, comme tous, à féliciter Mme Langlade pour son excellent rapport.
La formation professionnelle est une réponse efficace au chômage des jeunes ainsi qu’au décrochage scolaire, à l’unique condition qu’elle soit complétée par un système d’orientation clair et efficace. Si nous voulons lutter contre le préjugé qui fait des formations professionnelles des voies de garage, il convient de ne pas y envoyer indistinctement tous les élèves en difficulté.
Le volet « orientation » de ce projet de loi est donc une pierre indispensable à la construction d’un parcours professionnel adapté aux besoins individuels. Il redonne tout son sens à la formation professionnelle, dont la vocation est de tirer le meilleur profit des qualités et des savoir-faire de tous, pour assurer l’insertion dans le monde professionnel par un emploi adapté à chacun.
L’article 13 affirme à la fois la compétence de l’État en matière de politique d’orientation des élèves et de délivrance de l’information, tout en impliquant les acteurs locaux sous l’égide de la région, chargée de coordonner l’action d’un service public régional de l’orientation et la prise en charge locale du décrochage. À ce titre, un large volet du second projet de loi de décentralisation portant sur les régions sera consacré à l’orientation.
Aux termes de ce projet de loi, tel que l’a présenté Mme Lebranchu en conseil des ministres, la région disposera de la possibilité, dans le respect des règles de la commande publique, d’habiliter des organismes pour la mise en œuvre d’actions de formation en faveur des publics en difficulté. Or vous soulignez dans votre rapport que la réaffirmation du rôle des régions dans la valorisation de l’enseignement professionnel doit aller de pair avec un dialogue plus dynamique avec les branches professionnelles. Pourriez-vous nous indiquer quelles mesures permettront d’intensifier ce dialogue ?
Mme Sophie Dessus. Je vous remercie, madame la rapporteure pour avis, pour la qualité de votre travail. Certes, ce projet de rapport ne porte que sur trois articles du projet de loi relatif à la formation professionnelle, mais ces trois articles sont en parfaite cohérence avec l’action du Gouvernement et avec la politique qu’il entend mener en faveur de la jeunesse.
Enfin l’apprentissage est placé au cœur du dispositif éducatif et retrouve ses lettres de noblesse ! Se mobilisent en sa faveur tous ceux qui se consacrent à la formation dans l’éducation nationale comme dans le monde de l’entreprise, ainsi que les régions bien sûr. Le but est de tout faire pour remotiver les jeunes et pour les diriger vers les filières où ils trouveront du travail, afin de leur éviter le chômage. Je peux témoigner que cela fait des années que parents, artisans et entreprises nous demandent de développer cette voie de formation.
La région aura un rôle essentiel à jouer. Le soutien des organismes consulaires et des branches professionnelles sera indispensable à la réussite du projet. Il faudra aussi parvenir à concilier les besoins des entreprises et les aspirations des jeunes : la formation professionnelle doit rester un choix pour ceux-ci tout en leur permettant de trouver un débouché professionnel.
Ma question porte sur les moyens qui accompagneront la réforme. Si on veut atteindre l’objectif des cinq cent mille apprentis, supérieur compris, il va falloir renforcer les structures de formation, telles que les CFA qui dispensent souvent un enseignement d’une très grande qualité. Est-il prévu des moyens supplémentaires pour les régions ? Comment faire en sorte que tous les jeunes de tous nos territoires bénéficient de la même qualité d’enseignement ?
M. Jean-Pierre Le Roch. Je voudrais d’abord, madame la rapporteure, saluer la qualité du travail que vous avez accompli dans des délais très contraints.
Si le taux d’accès des salariés à la formation était de 40,6 % en 2010, la part des formations qualifiantes restait faible : la proportion n’était que de 11 % des formations suivies, soit l’un des plus bas niveaux d’Europe. Il existe en outre de très fortes disparités, en fonction de la taille de l’entreprise, des catégories socioprofessionnelles, de l’âge, du sexe ou selon qu’on est actif ou chômeur. Ce dernier point est illustré par l’enquête de l’INSEE d’octobre 2013 portant sur la formation des adultes : dans la tranche d’âge des 25-54 ans, 60 % des personnes occupant un emploi au second trimestre 2012 avaient participé à au moins une formation au cours des douze mois précédant l’enquête, contre 40 % seulement des chômeurs.
Face à ce constat, le projet de loi se doit de répondre à l’exigence posée par le ministre d’engager un effort supplémentaire pour ceux qui en ont le plus besoin : chômeurs, salariés vulnérables, salariés des PME et des TPE. Différentes dispositions sont proposées dans cet objectif, telle l’augmentation de 50 % des moyens dédiés par les partenaires sociaux au financement de la formation des demandeurs d’emploi.
Notre commission s’étant saisie des articles 8, 12 et 13 du projet de loi, je souhaiterais vous interroger sur le rôle que doit jouer l’orientation tout au long de la vie dans l’insertion professionnelle. Votre rapport rappelle l’observation des inspections générales selon laquelle « avec 300 à 400 bassins de formation ou zones d’emploi à couvrir, la mauvaise visibilité de l’offre auprès des différents publics relève a priori plus d’un problème d’organisation et d’optimisation des ressources ». Or les articles 12 et 13 précisent les rôles respectifs de l’État et de la région, en confortant le rôle de cette dernière. Cette volonté de clarification, affirmée par le Président de la République dans son discours d’ouverture de la deuxième conférence sociale de l’emploi, ne peut être que saluée.
Les acteurs de la formation que j’ai rencontrés dans ma circonscription se sont plaints de l’existence de doublons entre les appels d’offre de Pôle emploi et ceux de la région et regrettent l’absence de coordination ainsi que de corrélation entre l’offre et les besoins. Par exemple, des cahiers des charges différents sont proposés aux organismes pour une même formation, ce qui complique l’instruction de ces dossiers.
Pouvez-vous nous indiquer comment cette clarification des compétences permettra aux régions et à Pôle emploi de gagner en complémentarité ? Ne serait-il pas préférable de confier à la région une compétence pleine et entière dans le domaine de la formation professionnelle ?
M. Ary Chalus. Je voudrais, après mes collègues, saluer le travail de notre rapporteure.
J’avais déjà interrogé le Gouvernement au début de 2013 sur les difficultés rencontrées par les jeunes désireux de se former en alternance pour trouver une entreprise susceptible de les accueillir. Alors que le département de la Guadeloupe connaît un taux de réussite de 86 % dans le cadre du service militaire adapté, j’ai dû dans ma commune ouvrir des postes pour permettre à des jeunes de poursuivre leur formation, du fait de l’impossibilité de trouver un patron qui les accepte en contrat d’apprentissage. Ces difficultés se rencontrent surtout dans le secteur de l’action sociale et sanitaire, étant donné le faible nombre de crèches et de centres communaux d’action sociale dans notre département au regard du nombre de jeunes qui souhaitent suivre cette formation. Je pense que la situation est la même dans les autres collectivités d’outre-mer. Ne faudrait-il pas trouver un dispositif susceptible de permettre à un plus grand nombre de jeunes ultramarins de poursuivre dans cette voie de formation ?
Mme la rapporteure pour avis. Vous avez raison, madame Doucet : ce projet de loi est un projet de justice et d’avenir pour nos jeunes.
Monsieur Hetzel, le compte personnel de formation figure à l’article 1er, qui est hors du champ de saisine de notre commission. Il reste qu’il est urgent de mobiliser ces trente milliards d’euros pour mieux former les jeunes et les chômeurs. Je relève d’autre part que, si la droite a ouvert la voie à la décentralisation de la formation professionnelle avec la loi du 30 décembre 1993, nous avons, nous, donné corps à ce processus.
M’appuyant sur le rapport de nos collègues Régis Juanico et Jean-Frédéric Poisson, j’indique dans mon rapport que l’objectif de 500 000 apprentis est à notre portée d’ici à 2017, monsieur Braillard.
Madame Tolmont, l’orientation au niveau de collège relève de la loi de refondation de l’école de la République de juillet 2013.
Je tiens à vous rappeler, mesdames Genevard et Nachury, qu’actuellement huit régions expérimentent le service public régional d’orientation, où elles tiennent le rôle de chef de file. Ces expérimentations seront évaluées d’ici à la fin de l’année. Quant à la loi Cherpion, elle a été abrogée par la loi Peillon, qui supprime la possibilité d’entrer en apprentissage dès quatorze ans.
Vous m’avez interrogée, madame Faure, sur l’implication des acteurs économiques. Sachez que le Gouvernement est pleinement mobilisé en faveur de cette voie d’excellence que constitue la formation en alternance assurée par les CFA et par les entreprises.
M. Travert a à juste titre insisté sur le rôle accru que les régions et les acteurs locaux devraient jouer à l’avenir en matière d’orientation, compte tenu du second projet de loi de décentralisation. En réponse à sa question, je lui indique qu’un Conseil national éducation économie a été institué afin d’animer le dialogue entre les branches professionnelles et l’Éducation nationale.
Madame Dessus, vous m’avez interrogée sur les moyens alloués à l’apprentissage : n’étant pas en mesure de vous répondre pour le moment, je poserai la question au ministre lors de l’examen de ce projet de loi en séance publique, la semaine prochaine.
Pour éviter les doublons dont Jean-Pierre Le Roch déplore l’existence, il conviendrait de rappeler aux différents réseaux présents sur nos territoires qu’ils se doivent d’être complémentaires, et non pas concurrents, afin d’œuvrer ensemble à l’avenir de nos jeunes.
Enfin, pour répondre à la question posée par M. Ary Chalus sur la Guadeloupe, il me paraît effectivement nécessaire de travailler à la carte des formations de l’État et des régions, là encore avec l’objectif de mieux couvrir les besoins.
Article 8
(art. L. 6231-1 du code du travail)
Missions des centres de formation d’apprentis
Le présent article a pour objet de redéfinir les missions des centres de formation d’apprentis (CFA). Celles-ci seront considérablement enrichies par la nouvelle rédaction proposée de l’article L. 6231-1 du code du travail, aujourd’hui quelque peu lapidaire. En effet, celui dispose que les CFA « dispensent aux jeunes travailleurs titulaires d’un contrat d’apprentissage une formation générale associée à une formation technologique et pratique qui complète la formation reçue en entreprise et s’articule avec elle ».
Le présent article propose donc de renforcer et de préciser les missions des centres, celles-ci devant être au nombre de cinq :
1° La première mission reprend textuellement celle déjà posé par le code du travail, à savoir que la formation dispensée par les CFA combine un volet général à un volet technologique et pratique.
2° La deuxième s’apparente à une double mission de contrôle et de coopération :
– D’une part, les CFA devront assurer la cohérence entre la formation dispensée au sein du centre de formation d’apprentis et celle dispensée au sein de l’entreprise. Cette nouvelle exigence est de nature à conforter l’articulation des deux modes d’apprentissage, en CFA et en entreprise, et à protéger les intérêts de l’apprenti dont le travail en entreprise doit être subordonné à un objectif de formation.
La cohérence et la complémentarité des deux volets de la formation sont en effet une caractéristique fondamentale de la pédagogie de l’alternance et une condition forte de son efficacité, et cela d’autant plus que les jeunes concernés ont un faible niveau de formation initiale.
Par exemple, si la formation théorique mais aussi technique en CFA est déconnectée de la formation en entreprise et n’y est pas fortement articulée, la formation en CFA ne sera pas plus attractive qu’en formation initiale classique, le cadre qui a pu précisément générer le « décrochage » de certains jeunes.
Or l’expérience prouve que cette exigence n’est pas toujours prise en compte. Son importance a donc conduit le gouvernement à l’affirmer au niveau de la loi et non pas seulement au niveau réglementaire, qui en traite plus en détail (cf. l’article R. 6233-57 du code du travail).
– D’autre part, le présent article précise que cette cohérence doit être assurée « en particulier en organisant la coopération entre les formateurs et les maîtres d’apprentissage ». Cet apport du projet de loi doit être salué, car les maîtres d’apprentissage ne pourront mener à bien leur mission qu’en étant soutenus par les formateurs. Il est en effet indispensable que les premiers puissent bénéficier de conseils en matière de techniques pédagogiques et d’un suivi d’expérience, en particulier lorsqu’ils assument ces fonctions pour la première fois.
3° La troisième mission revient à appliquer aux CFA le droit à la poursuite d’études, une notion déjà consacrée par le code de l’éducation. Le présent article propose de préciser à cet effet que les centres développent l’aptitude des apprentis à poursuivre des études par les voies de l’apprentissage, de l’enseignement professionnel ou technologique ou « par toute autre voie ». Cette formulation « large », qui permet d’englober le recours à la validation des acquis de l’expérience ou à la formation continue, souligne la nécessité de constituer des passerelles entre les différentes filières.
4° La quatrième mission qu’il est proposé de confier aux CFA est l’assistance aux postulants à l’apprentissage et aux apprentis. À ce titre, les centres devront aider les premiers dans leur recherche d’un employeur et les seconds, en rupture de contrat, dans la recherche d’un nouvel employeur, en lien avec le service public de l’emploi. Cette nouvelle obligation se justifie par le fait que bien souvent les aspirants apprentis ou apprentis sont jeunes et ne peuvent se « débrouiller » seuls dans la recherche d’un poste en entreprise, d’autant que les élèves qui arrivent dans les CFA sont plus jeunes que par le passé en raison de la diminution du redoublement en collège.
5° La cinquième et dernière mission, corrélée à la précédente, conduit les CFA à apporter, en lien avec le service public de l’emploi, en particulier avec les missions locales, un accompagnement aux apprentis pour résoudre les difficultés d’ordre social et matériel susceptibles de mettre en péril le déroulement du contrat d’apprentissage. On sait que celles-ci sont prégnantes et souvent liées au transport et au logement pour les périodes d’alternance lorsque l’entreprise et le CFA sont éloignés l’un de l’autre.
Il est donc nécessaire que les CFA apportent une attention personnalisée à ces situations délicates et orientent les apprentis concernés vers les dispositifs ou les services les plus à même de les aider. Ceux-ci tendent à se développer, mais il faudrait consacrer encore plus de moyens en la matière.
À titre d’illustration, la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) et l’Union professionnelle des artisans (UPA) mettent en œuvre une aide à la mobilité, sous forme de conduite accompagnée des apprentis en entreprise, afin que l’apprenti obtienne son permis de conduire dans le cadre à la fois de son entreprise et du CFA. Le code est préparé en auto-école, mais également au CFA, tandis que la partie pratique est menée d’abord en auto-école, puis avec un accompagnateur – qui est en général le chef d’entreprise.
Les parcours des apprentis pourraient être également sécurisés en accompagnant ces derniers dès leur entrée en formation, dans une logique préventive. Tels sont, en tout cas, les enseignements qui peuvent être tirés de l’évaluation d’une expérimentation réalisée par trois missions locales en Côte-d’Or.
En effet, dans cette expérimentation, le tutorat est assuré par un conseiller de la mission locale, extérieur à l’entreprise et au centre de formation, et qui est chargé de déceler au plus vite les éventuelles difficultés pour tenter d’y remédier, à la demande des jeunes, des employeurs, mais aussi des partenaires comme les CFA et les chambres consulaires.
Dans ce but, dès réception du contrat d’apprentissage, un courrier d’information est adressé au jeune et à l’employeur par la mission locale sur la désignation d’un tuteur externe. Celui-ci organise ensuite une visite en entreprise pour rencontrer séparément, puis conjointement le jeune et son maître d’apprentissage, afin de présenter le dispositif et faire un premier diagnostic. Enfin, le tutorat implique un suivi par entretien mensuel avec l’apprenti ou l’employeur et des interventions en cas de sollicitations ou difficultés de tout type (logement, mobilité, souci financier, condition de travail, assiduité aux cours…). Ce dispositif conduit à minorer le risque de résiliation du contrat de 6 à 8 points (24).
*
La commission est saisie de l’amendement AC4 de Mme Sandrine Doucet.
Mme Sandrine Doucet. Cet amendement vise à réaffirmer notre ambition de faire de l’apprentissage une voie de promotion sociale, et non de relégation professionnelle. Il fait ainsi écho au rapport d’information du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques en faveur de la mobilité sociale des jeunes, examiné en ce moment même en séance publique.
Mme la rapporteure pour avis. Je suis favorable à cet amendement qui tend à corréler deux objectifs assignés aux centres de formation d’apprentis (CFA) : celui de développer l’aptitude des apprentis à poursuivre des études et celui de favoriser leur mobilité sociale.
La commission adopte l’amendement.
Elle examine ensuite l’amendement AC2 de Mme Sylvie Tolmont.
Mme Sylvie Tolmont. Cet amendement vise à soumettre les CFA aux mêmes obligations en matière de formation à la citoyenneté que celles assignées par la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République aux écoles et aux établissements d’enseignement du second degré publics et privés sous contrat. Il y a là, en effet, un enjeu majeur si l’on veut préparer au mieux les apprentis à entrer dans la vie professionnelle et sociale, au même titre que tous les autres jeunes en formation.
Mme la rapporteure pour avis. Cet amendement me semble capital puisqu’il vise à faire en sorte que tous les jeunes d’une même classe d’âge, qu’ils soient formés sous statut scolaire ou par la voie de l’apprentissage, disposent des mêmes repères pour mener une vie de citoyens actifs et responsables : faire nation est quelque chose qui s’apprend, que l’on soit élève ou apprenti.
Mme Annie Genevard. « Faire nation », « faire famille », « faire sens » : voilà bien des expressions à la mode que je ne comprends guère…
La commission adopte l’amendement.
Elle aborde ensuite l’amendement AC15 de la rapporteure pour avis.
Mme la rapporteure pour avis. Cet amendement tend à préciser que la mission d’accompagnement des apprentis confiée aux CFA « pour résoudre les difficultés d’ordre social et matériel susceptibles de mettre en péril le déroulement du contrat d’apprentissage » peut également viser à prévenir ces difficultés. Une expérience de suivi menée en Côte-d’Or, s’appuyant sur des entretiens mensuels d’apprentis ou d’employeurs ainsi que sur des interventions auprès des apprentis en difficulté, a en effet montré qu’on pouvait, grâce à de telles actions de prévention, réduire notablement le risque de résiliation des contrats d’apprentissage.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle examine l’amendement AC3 de Mme Sylvie Tolmont.
Mme Sylvie Tolmont. Cet amendement vise à rappeler que l’objectif de mixité et d’égalité des sexes s’impose aux centres de formation des apprentis comme à tous les autres organismes ou institutions de ce pays.
M. le président Patrick Bloche. Voilà un amendement qui me paraît tout à fait cohérent avec votre mobilisation de ces dernières semaines.
Mme la rapporteure pour avis. Cet amendement tend à assigner une nouvelle mission aux CFA, consistant à favoriser la mixité, d’une part, en sensibilisant les formateurs à l’enjeu de l’égalité entre les sexes et, d’autre part, en menant une politique d’orientation qui mette l’accent sur les avantages de la mixité. Une telle proposition fait écho à la loi du 8 juillet 2013 pour la refondation de l’école, en vertu de laquelle l’orientation et les formations proposées aux élèves favorisent une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les différentes filières de formation. Les formateurs et les maîtres d’apprentissage des CFA ont à l’évidence un rôle à jouer à la matière. Avis favorable, par conséquent.
Mme Annie Genevard. L’expression de formations « fortement genrées » figurant dans l’exposé sommaire de l’amendement ne me paraît guère plus heureuse que celle que j’ai relevée tout à l’heure.
M. le président Patrick Bloche. Cette expression figurant non pas dans l’amendement lui-même, mais uniquement dans son exposé sommaire, il ne me paraît pas nécessaire de la rectifier.
La commission adopte l’amendement.
Elle en vient ensuite à l’amendement AC5 de Mme Sandrine Doucet.
Mme Sandrine Doucet. Cet amendement vise à confier aux CFA la mission de promouvoir la mobilité internationale des apprentis, notamment grâce aux programmes de l’Union européenne. Cette dernière est en effet actuellement sur le point de mettre en application son programme Erasmus Plus, qui tend à favoriser cette mobilité des apprentis. À ce programme s’ajoutent d’ailleurs le réseau EURES et les financements du Fonds social européen, sans parler de l’action de l’Agence Europe-Éducation-Formation France (AEEFF), chargée de promouvoir ces dispositifs dans notre pays.
Mme la rapporteure pour avis. Si je suis favorable à l’objectif poursuivi, je propose à l’auteur de l’amendement de le sous-amender afin de substituer le verbe « encourager » au verbe « promouvoir », qui semble assigner une obligation de résultat aux CFA alors que tous n’en auront pas forcément les moyens financiers.
Mme Sandrine Doucet. Si j’ai retenu ce terme, c’était, non pas pour adresser une injonction sans fondement aux CFA, mais parce que je savais que des moyens financiers étaient effectivement alloués à cette politique. Cela étant, j’accepte la modification proposée.
Mme Annie Genevard. Si la mobilité des jeunes en apprentissage dans l’espace européen ne pose aucun problème, on ne saurait en dire autant de celle des jeunes qui, formés en France, souhaiteraient faire leur apprentissage en Suisse, pays avec lequel nous avons pourtant des relations économiques intenses : la législation les en empêche en effet, alors même qu’ils ne parviennent pas à trouver de maître d’apprentissage en France et que la demande en Suisse est considérable dans certains secteurs – à tel point que ces jeunes seraient assurés d’y trouver un emploi à l’issue de leur formation. Ne pourrait-on profiter de ce projet de loi pour résoudre ce problème par amendement ?
M. le président Patrick Bloche. Si je comprends parfaitement votre préoccupation, le présent amendement ne me semble pas un support adéquat pour régler le problème que vous soulevez. Je vous suggère donc plutôt de profiter de la semaine qui nous sépare de l’examen du projet de loi en séance publique pour rédiger un amendement spécifique.
Mme Annie Genevard. Si j’ai souhaité soulever cette question maintenant, c’est pour y sensibiliser les membres de la commission afin d’éviter qu’un amendement sur le sujet ne soit rejeté ensuite sans examen, en séance publique, au seul motif qu’il aurait été déposé par l’opposition. Ayons une position constructive sur ce point, dans l’intérêt même des jeunes.
M. le président Patrick Bloche. Il n’est pas dans les habitudes de notre commission de rejeter systématiquement toute proposition émanant de l’opposition : nous sommes mêmes parvenus à adopter une proposition de loi du groupe UMP sur le livre – que l’Assemblée examinera d’ailleurs en deuxième lecture le 20 février.
M. Ary Chalus. M’engageant dans la voie ouverte par Mme Genevard, je souhaiterais que l’on fasse également référence, dans cet amendement à venir, à l’espace caraïbe : il est en effet plus facile pour un Guadeloupéen d’aller suivre une formation dans un pays de la Caraïbe que dans un pays de l’Union européenne.
Mme Sandrine Doucet. La mobilité internationale des apprentis visée par mon amendement concerne tous les pays du monde dans la mesure où les programmes de l’Union européenne, notamment le programme Erasmus Plus, permettent de financer des mobilités en dehors des États membres – comme le permettait d’ailleurs auparavant le programme Erasmus Mundus.
M. le président Patrick Bloche. Quand bien même il s’avérerait nécessaire de préciser les choses, il ne me paraît pas opportun de le faire à cet endroit du texte, qui a trait aux missions des CFA.
Mme Annie Genevard. Il est vrai aussi que la question que j’ai soulevée porte moins sur la mobilité que sur le statut des jeunes effectuant leur apprentissage en Suisse.
La commission adopte l’amendement AC5 rectifié.
Puis la commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 8 modifié.
La commission en vient à l’amendement AC7 de Mme Sylvie Tolmont portant article additionnel après l’article 8.
Mme Sylvie Tolmont. Toujours dans un souci de cohérence avec la loi pour la refondation de l’école, cet amendement vise à soumettre les centres de formation d’apprentis aux mêmes obligations d’affichage des symboles républicains que celles en vigueur dans les écoles et dans les établissements d’enseignement du second degré publics et privés sous contrat.
Mme la rapporteure pour avis. Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Article 12
(art. L. 6111-2, L. 6111-3, 6111-4 et 6111-5 du code du travail et art. L. 214-14, L. 214-16-1 [nouveau], L. 214-16-2 [nouveau], L. 313-6, L. 313-7 et L. 313-8 du code de l’éducation)
Service public de l’orientation tout au long de la vie et lutte contre le décrochage
Le présent article a pour objet de redéfinir le cadre juridique du service public d’orientation tout au long de la vie, créé par la loi du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie (25), et d’affirmer la compétence de la région en matière de lutte contre le décrochage.
1. Les dispositions modifiant le code du travail
• Les missions du service public de l’orientation tout au long de la vie
Les 1° et 2° du I procèdent à des modifications rédactionnelles, en associant l’orientation et la formation professionnelles dans les intitulés de différentes divisions de la sixième partie du code du travail, et proposent une nouvelle articulation des articles du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de cette partie du code du travail.
Le 3° du I prévoit de modifier le deuxième alinéa de l’article L. 6111-3 du code du travail relatif aux missions du service public de l’orientation tout au long de la vie pour préciser que celui-ci « garantit » (ce qui est plus impératif que « est organisé pour garantir ») à toute personne l’accès à une information gratuite, complète et objective sur les métiers, les formations, les certifications, les débouchés et les niveaux de rémunération, ainsi que l’accès à des services de conseil et d’accompagnement en orientation de qualité et organisés en réseaux.
De plus, il est proposé de confier une nouvelle mission à ce service, qui est de concourir à la « mixité professionnelle ». Cette dernière obligation fait écho à la disposition de la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République en vertu de laquelle l’orientation et les formations proposées aux élèves « favorisent la représentation équilibrée entre les femmes et les hommes parmi les filières de formation ».
• Les rôles respectifs de l’État et de la région
Le 3° du I propose ensuite de procéder à un partage clair des compétences entre l’État et les régions en ce qui concerne l’organisation du service public de l’orientation tout au long de la vie, que ces deux collectivités publiques sont chargées d’assurer.
– L’État définit, au niveau national, la politique d’orientation des élèves et des étudiants dans les établissements scolaires et les établissements d’enseignement supérieur. Le projet de loi précise que ce dernier « met en œuvre cette politique dans ces établissements et délivre à cet effet l’information nécessaire aux élèves et aux étudiants ». Autrement dit, la mise en ordre de marche du service public de l’orientation ne se traduira pas par un recul de la compétence traditionnelle de l’État en matière de pilotage de l’orientation scolaire et universitaire. En effet, cette orientation faisant partie intégrante du service public de l’éducation, sa conception ne saurait être « régionalisée ».
– La région, quant à elle, coordonne les actions « des autres organismes participant au service public régional de l’orientation ». Selon les précisions apportées par le ministère du travail, les structures concernées sont celles qui, à l’exclusion des organismes relevant de l’éducation nationale (établissements d’enseignement, CIO et SUIO), répondent à la double condition suivante : satisfaire au cahier des charges définissant les exigences de qualité de l’offre de service attendues d’un service public de l’orientation arrêté par la région (Cf. le commentaire du 5° du I) et respecter, pour des motifs déontologiques et de prévention des conflits d’intérêt, le principe selon lequel un organisme d’orientation ne peut être par ailleurs organisme de formation. En outre, les opérateurs du conseil en évolution professionnelle (CEP), à savoir Pôle emploi, Cap emploi, l’Agence pour l’emploi des cadres, les Missions locales et les OPACIF seront membres de droit du service public de l’orientation.
Ÿ Le 3° propose également de confier un rôle d’information à la région, qui devra par ailleurs mettre en place un réseau de centres de conseil en validation des acquis de l’expérience (VAE).
Selon les précisions apportées par le ministère du travail, ce rôle d’information concernera l’ensemble des métiers et des dispositifs de formation professionnelle, y compris la VAE.
On rappellera que celle-ci permet l’obtention de tout ou partie d’une certification (diplôme, titre à finalité professionnelle ou certificat de qualification professionnelle) sur la base d’une expérience professionnelle – salariée, non salariée et/ou bénévole (syndicale, associative) – validée par un jury.
Il revêt, de ce fait, un caractère essentiel pour la sécurisation des parcours professionnels, d’autant que la VAE est progressivement passée « d’un dispositif quasi expérimental, porté par des militants, à une démarche connue du plus grand nombre » (26). Le rapport sur la compétitivité de M. Louis Gallois a d’ailleurs préconisé son développement, en soulignant que l’objectif d’un tel mécanisme est d’éviter que la carrière des salariés ne se joue qu’au moment de la formation initiale et d’accroître ainsi leur « potentiel, leur employabilité et leur capacité à gérer des mobilités choisies ou liées aux évolutions ou aux difficultés des entreprises où ils travaillent » (27).
Dans le même temps, si 200 000 personnes ont, entre 2002 et 2010, obtenu un diplôme par la reconnaissance de leurs expériences, la VAE connaît de nombreux abandons en cours de route – certaines évaluations estimant, cet égard, que seul un tiers des candidats ayant déposé un dossier de recevabilité obtient une validation totale (28).
Ce contexte d’ensemble justifie les compétences que le projet de loi prévoit d’attribuer aux régions en matière de VAE.
Ÿ Enfin, le 3° du I précise que les organismes consulaires sont associés au service public régional de l’orientation et qu’une convention annuelle conclue entre l’État et la région dans le cadre du contrat de plan de développement des formations et de l’orientation professionnelles prévu à l’article L. 214-13 du code de l’éducation (cf. le commentaire de l’article 13) détermine les conditions dans lesquelles ces deux partenaires coordonnent l’exercice de leurs compétences respectives dans la région.
• Le service dématérialisé et la labellisation
Les 4° et 5° du I proposent de modifier sur deux points les dispositions qui encadrent le service dématérialisé et la procédure de labellisation.
On rappellera que le service concerné est un service « gratuit et accessible à toute personne, lui permettant de disposer d’une première information et d’un premier conseil personnalisé en matière d’orientation et de formation professionnelles et d’être orientée vers les structures susceptibles de lui fournir les informations et les conseils nécessaires à sa bonne orientation professionnelle » (article L. 6111-4 du code du travail).
Le présent article propose de supprimer la disposition en vertu de laquelle ce service est placé sous l’autorité du délégué à l’information et à l’orientation (DIO), car l’article 14 du présent projet de loi tend à supprimer cette fonction au profit du Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle (CNEFOP).
Désormais, la mise en cohérence des systèmes d’information relatifs à la formation et à l’orientation relèvera du CNEFOP et s’effectuera, de fait, dans un cadre concerté réunissant l’État, les partenaires sociaux et les régions.
Quant à la procédure de labellisation des organismes qui participent au service public de l’orientation, le présent article prévoit de la « décentraliser ». En effet, elle reposera sur des normes élaborées par la région, sur la base d’un cahier des charges qu’elle arrête, et non par le délégué à l’information et à l’orientation.
En conséquence, cette collectivité territoriale définira les normes de qualité exigées des organismes régionaux pour la reconnaissance de leur statut de membre du service public régional de l’orientation, tandis que ses services instruiront les demandes d’habilitation sur la base du cahier des charges régional.
Selon les précisions apportées par le ministère du travail, ce ne sont que les organismes d’orientation qui ne relèvent pas de l’éducation nationale qui devront respecter ces normes. Par ailleurs, ces normes seront élaborées selon un processus collectif au sein des comités régionaux de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles, qui permettra d’assurer l’adaptation de la démarche aux spécificités des territoires.
2. Les dispositions modifiant le code de l’éducation
Le III du présent article propose de procéder à diverses modifications dans le code de l’éducation, dont quelques-unes sont rédactionnelles.
• Les écoles de la deuxième chance
Le 2° tend à modifier l’article L. 214-14 afin de préciser que les écoles de la deuxième chance (E2C) participent au service public régional de la formation professionnelle, tandis que le Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie sera renommé Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles.
On rappellera qu’en vertu de cet article du code de l’éducation, les E2C proposent une formation à des personnes de seize à vingt-cinq ans dépourvues de qualification professionnelle ou de diplôme et délivrent une attestation de fin de formation indiquant le niveau de compétence acquis de manière à faciliter l’accès à l’emploi. Au nombre de 107 en 2012, elles ont accueilli 13 036 élèves et ont « enregistré » 58 % de sorties positives (un tiers des élèves bénéficient d’un contrat de travail, un autre tiers d’une formation qualifiante, un peu plus de 20 % d’un contrat de travail en alternance et un peu moins de 10 % d’un emploi aidé).
• La compétence d’organisation de la région en matière de service public d’orientation
Le 3° propose d’insérer deux nouveaux articles dans le code de l’éducation :
– Le L. 214-16-1 afin de prévoir que la région « organise » le service public régional de l’orientation tout au long de la vie. Le projet de loi précise en outre que cette collectivité assure « à cet effet » la mise en réseau de « tous les services, structures et dispositifs » qui concourent sur son territoire à la mise en œuvre de ce service. Les centres d’information et d’orientation (CIO) et les services universitaires d’information et d’orientation (SUIO) pourront apporter leur contribution à ce « collectif », dès que ces structures le souhaiteront, comme c’est le cas dans les huit régions qui expérimentent la préfiguration d’un tel dispositif. En effet, les ministres en charge de l’éducation nationale, du travail et de la jeunesse et des sports ont demandé, par courrier adressé aux préfets de région le 9 septembre 2013, que le service public régional de l’orientation tout au long de la vie soit « testé » dans huit régions volontaires (Aquitaine, Auvergne, Bretagne, Centre, Limousin, Pays de Loire, Poitou-Charentes et Rhône-Alpes), chaque acteur devant mobiliser, dans ce but, ses réseaux (CIO, missions locales, Pôle emploi, réseau Information et Jeunesse, etc.) autour du rôle « d’ensemblier » des régions.
– Le L. 214-16-2 afin de préciser que le préfet de région et le président du conseil régional déterminent par convention les services de l’État concourant à la mise en œuvre de cette compétence d’organisation.
Ces dispositions permettront de conforter le rôle de « chef de file » de la région et de mobiliser, à l’échelon pertinent, les différents acteurs, dans une logique de complémentarité et non de concurrence.
• L’entrée des régions dans le conseil d’administration de l’ONISEP
Le 4° du III propose de faire entrer dans le conseil d’administration de l’Office national d’information sur les enseignements et les professions (ONISEP) des représentants des régions, ce qui semble justifié au regard des évolutions proposées par le présent article.
• Le repérage et la prise en charge des décrocheurs
Ÿ L’article L. 313-7 du code de l’éducation donne une définition du décrochage scolaire et précise les modalités de son recensement. Dans un objectif de mobilisation des acteurs de la formation professionnelle initiale et continue en vue d’apporter des solutions d’accès de formation, d’accompagnement ou d’accès à l’emploi à des jeunes sortant sans diplôme du système de formation initiale, cet article précise en effet que « chaque établissement d’enseignement du second degré [y compris les établissements privés sous contrat] et ceux de l’enseignement agricole, et chaque centre de formation d’apprentis ou section d’apprentissage transmet à des personnes et organismes désignés par le représentant de l’État dans le département ainsi qu’à la mission locale pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes compétente [ou, à défaut à Pôle emploi] les coordonnées de ses anciens élèves ou apprentis qui ne sont plus inscrits dans un cycle de formation et qui n’ont pas atteint un niveau de qualification fixé par voie réglementaire ».
Ce niveau de qualification est défini à l’article D. 313-59 du code de l’éducation. Il s’agit soit du baccalauréat général, soit du CAP, du BEP ou du baccalauréat professionnel, selon la filière dans laquelle l’élève était inscrit.
Par ailleurs, la mise en œuvre de l’article L. 313-7 du code de l’éducation s’opère via le système interministériel d’échanges d’informations (SIEI) et une liste départementale des supposés décrocheurs. En outre, cet article précise que le dispositif de repérage est mis en œuvre et coordonné sous l’autorité du représentant de l’État.
En application de l’article L. 313-7 dudit code, chaque jeune présent sur ces listes doit cumuler les quatre conditions suivantes : avoir été scolarisé au moins quinze jours en continu au cours de l’année scolaire en cours ou de l’année scolaire précédente ; être âgé de 16 ans au moins ; ne pas avoir atteint le niveau de diplôme fixé par voie règlementaire ; ne plus être inscrit dans un dispositif de formation initiale relevant de l’Éducation nationale, du ministère de l’agriculture ou des CFA. En décembre 2013, lors de la dernière campagne du SIEI, 156 978 jeunes ont été identifiés comme étant « décrocheurs ».
Le système interministériel d’échange d’informations (SIEI) est le dispositif qui permet, par un croisement de fichiers informatisés, d’identifier les « décrocheurs ».
Encadré par un décret d’application du 31 décembre 2010, il a été autorisé par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) le 2 décembre 2010.
Quant aux données concernées, ce sont celles gérées par les établissements scolaires publics ou privés sous contrat et l’enseignement technique agricole. Elles sont comparées :
– d’une part, avec la base de données des centres de formation d’apprentis (INCA) ;
– d’autre part, via la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle et la direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques (DARES), avec la base de données des missions locales.
Cette comparaison permet de savoir si les élèves « perdus de vue » par leur établissement en cours de cursus sont de vrais décrocheurs ou s’ils se sont réorientés vers une formation gérée par les autres établissements ou centres de formation des partenaires du système.
Le 5° du III prévoit de modifier ce cadre juridique sur trois points :
– en mentionnant, au début de l’article L. 313-7 du code, les jeunes sortis du système de formation initiale sans titre professionnel classé au répertoire national des certifications professionnelles (au lieu de ne citer que les jeunes sans diplôme national) ;
– en confiant la compétence de désignation des personnes et organismes auxquels peuvent être transmises les coordonnées des décrocheurs au président de région et non plus au préfet ;
– en définissant les rôles respectifs de l’État et des régions dans le dispositif de repérage et de prise en charge des décrocheurs. Ainsi, le présent article réserve à l’État la mise en œuvre et la coordination, au plan national, du dispositif de collecte et de transmission des données relatives aux jeunes décrocheurs. En revanche, les actions de prise en charge des jeunes sortant du système de formation initiale sans diplôme national ou titre professionnel seront mises en œuvre et coordonnées au niveau local par la région, en lien avec les autorités académiques.
Le présent article confiera donc aux régions un rôle d’animation et de coordination – mais aussi de nomination des responsables – des plates-formes de suivi et d’appui aux décrocheurs (PASD), en cohérence avec leurs compétences en matière d’orientation et de formation des jeunes en difficulté d’insertion.
On rappellera que les PASD sont animées par 121 responsables départementaux (chef d’établissement, directeurs de centres d’information et d’orientation – CIO –, corps préfectoral, etc.) et permettent d’apporter aux décrocheurs des solutions personnalisées de formation ou d’insertion.
Ÿ Enfin, le 6° du III tend à modifier l’article L. 313-8 du code de l’éducation, qui prévoit la mobilisation du service public de l’orientation au service de la réinsertion des « décrocheurs ». Cet article dispose en effet que ce service et tous les organismes qui y participent s’organisent au plan régional et local pour permettre à tout jeune âgé de seize à dix-huit ans sorti sans diplôme du système de formation initiale et sans emploi de se réinscrire dans un parcours de formation, d’accompagnement ou d’exercer une activité d’intérêt général lui permettant de préparer son entrée dans la vie active.
Le 6° propose de préciser que cette mission de « raccrochage » est exercée sous l’autorité de la région et, par coordination avec le 5°, qu’elle est également exercée au bénéfice des jeunes sortis du système de formation initiale sans titre professionnel.
*
La commission examine en discussion commune les amendements AC16 de la rapporteure pour avis et AC6 de Mme Julie Sommaruga.
Mme la rapporteure pour avis. L’article 12, qui organise l’architecture générale du service public de l’orientation tout au long de la vie, dispose que l’État définit au niveau national la politique d’orientation scolaire et universitaire et la met en application dans les établissements d’enseignement. L’amendement AC16 précise que, pour ce faire, l’État s’appuie « notamment » sur les centres d’information et d’orientation (CIO) et sur les services universitaires d’information et d’orientation (SUIO). Il s’agit ainsi de donner un nouveau départ à ces centres, en leur permettant de tisser des liens avec les autres instances chargées de l’orientation.
Mme Julie Sommaruga. Mon amendement vise à faire en sorte que l’apport des CIO et des SUIO continue d’être regardé comme indispensable à une bonne politique de l’orientation.
Mme la rapporteure pour avis. Je demanderai à Mme Sommaruga de bien vouloir retirer son amendement au profit du mien, dans lequel j’emploie à dessein l’adverbe « notamment » afin de ne pas tenir à l’écart du service public de l’orientation le réseau des centres d’information et de documentation « jeunesse » (CIDJ), qui relève du ministère de la jeunesse et des sports.
M. Patrick Hetzel. Je soutiendrai l’amendement de la rapporteure pour avis, qui couvre un champ plus large que l’amendement AC6. Il convient en effet de prendre en compte, non seulement les CIO, les CIDJ et les SUIO, mais également les services communs universitaires d’information et d’orientation (SCUIO).
Mme Julie Sommaruga. Mon amendement vise à mettre en valeur le rôle d’animation de la politique d’orientation que jouent les CIO, car je suis très attachée à ce que ces derniers puissent continuer à assurer cette mission de service public.
M. Patrick Hetzel. En énumérant limitativement les organismes concernés, l’amendement proposé par Mme Sommaruga risque de figer une situation que nous souhaitons au contraire faire évoluer afin de permettre aux régions de développer leur propre service public d’information et d’orientation. La rédaction proposée par la rapporteure pour avis me paraît au contraire beaucoup plus ouverte puisqu’elle permet de prendre en compte les structures existantes sans pour autant empêcher toute évolution.
Mme Julie Sommaruga. Je doute que M. Hetzel soit le meilleur défenseur de l’amendement de la rapporteure pour avis : il nous donne en effet l’impression que les CIO vont disparaître – situation que mon amendement vise précisément à éviter.
M. le président Patrick Bloche. J’ai pour ma part du mal à appréhender le sens de cette controverse dans la mesure où les deux amendements dont nous débattons poursuivent le même objectif…
Mme la rapporteure pour avis. Ces deux amendements poursuivent effectivement le même objectif : ayant moi aussi entendu l’inquiétude des CIO lors de mes auditions, je suis convaincue qu’ils doivent rester des acteurs majeurs de la politique d’orientation tout au long de la vie. Il reste qu’aux termes de la loi, il convient de parler de « centres publics d’orientation scolaire et professionnelle », et non de « CIO ». C’est pourquoi j’ai rédigé ainsi mon amendement.
Mme Julie Sommaruga. Dans ce cas, je retire le mien au profit du vôtre.
L’amendement AC6 est retiré.
La commission adopte l’amendement AC16 de la rapporteure pour avis.
Elle émet ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 12 modifié.
Article 13
(art. L. 211-2, L. 214-12, L. 214-12-1 et L. 214-13 du code de l’éducation et art. L. 4424-1 du code général des collectivités territoriales)
Contrats de plan régionaux de développement des formations et de l’orientation professionnelles
Sans revenir sur le nouveau mode d’élaboration de la carte des formations initiales fixé par la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, le présent article tend à modifier le mode d’élaboration et à enrichir le contenu du contrat de plan régional de développement des formations professionnelles (CPRDFP), rebaptisé contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles (CPRDFOP), par cohérence avec l’extension de son champ au domaine de l’orientation. Il est en particulier proposé d’inscrire plus fortement ce support contractuel dans une logique de négociation quadripartite en permettant aux représentants des organisations syndicales de salariés et d’employeurs d’en devenir signataires.
1. Les contrats de plan régionaux de développement des formations professionnelles : un outil de coordination et de programmation à consolider
a. Du PRDF au CPRDF : la mise en cohérence régionale des politiques de formation professionnelle
Après que la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État a reconnu aux régions une compétence de droit commun pour la mise en œuvre des actions d’apprentissage et de formation professionnelle continue, la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle a procédé à la décentralisation de la formation professionnelle des jeunes, ce qui a conduit à la création du plan régional de développement des formations professionnelles des jeunes. Le périmètre de ce document a été étendu aux formations délivrées aux adultes par la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité qui l’a rebaptisé plan régional de développement des formations professionnelles (PRDF). Ce document devait être élaboré par le conseil régional en concertation avec l’État et les organisations syndicales d’employeurs et de salariés représentatives à l’échelon régional.
La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales, qui consacre la compétence générale des régions, leur a transféré l’organisation et le financement des formations sanitaires et sociales, la responsabilité de l’organisation du réseau des centres et points d’information et de conseil sur la validation des acquis de l’expérience (VAE) et prévu le transfert progressif des crédits de la commande publique à l’association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA).
Au terme de cette décentralisation progressive, les régions disposent d’une compétence de droit commun que l’article L. 214-12 du code de l’éducation formule de la manière suivante : « la région définit et met en œuvre la politique régionale d’apprentissage et de formation professionnelle des jeunes et des adultes à la recherche d’un emploi ou d’une nouvelle orientation professionnelle. »
Afin de répondre au besoin accru d’articulation entre l’ensemble des acteurs compétents en matière de formation professionnelle (État, régions, Pôle emploi, partenaires sociaux, entreprises etc.), la loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie a transformé le PRDF, document unilatéral dont l’élaboration était de la seule responsabilité du conseil régional, en contrat de plan régional de développement de la formation professionnelle (CPRDFP), signé par les différents acteurs concernés, ainsi engagés par leur signature et partant responsabilisés.
La co-signature du CPRDFP par le président du conseil régional, le préfet de région et l’autorité académique devait en particulier permettre d’assurer le développement équilibré de la carte des formations professionnelles initiales, s’agissant notamment de la répartition des formations par apprentissage et de celles dispensées en lycée professionnel. Les règles fixées en matière d’élaboration de la carte des formations professionnelles initiales n’ont en réalité pas permis de remplir cet objectif de manière satisfaisante. C’est pourquoi la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République a modifié le mode d’élaboration de cette carte selon les modalités rappelées dans l’encadré figurant dans le présent commentaire d’article.
Une circulaire de la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) a été adressée le 22 octobre 2010 aux préfets et aux directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) proposant une méthodologie de travail pour l’élaboration des contrats.
b. Le CPRDFP : un outil de contractualisation sur l’ensemble du champ de la formation professionnelle
• L’élaboration des CPRDFP
L’adoption dans chaque région d’un CPRDFP, prévue à l’article L. 214-13 du code de l’éducation, a pour objectif de « définir une programmation à moyen terme des actions de formation professionnelle des jeunes et des adultes » et d’« assurer un développement cohérent de l’ensemble des filières de formation. » Ce document de coordination vise à éviter les concurrences, les doublons et les chevauchements afin de gagner en lisibilité, en adaptabilité et en efficience.
Le contrat est élaboré par la région dans le cadre du comité de coordination régional de l’emploi et de la formation professionnelle (CCREFP) et sur la base des documents d’orientation présentés par le président du conseil régional, le préfet de région, le recteur et les organisations d’employeurs et de salariés.
L’article L. 214-13 précise que le comité procède à une concertation avec les collectivités territoriales concernées, Pôle emploi et des représentants d’organismes de formation professionnelle, notamment l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA).
Après consultation des départements (en particulier pour ce qui concerne les publics en insertion) et adoption par le conseil régional, le CPRDFP est signé par le président du conseil régional, le préfet de région et le recteur. L’article L. 214-13 précise qu’il engage les parties représentées au sein du CCREFP.
La circulaire précité du 22 octobre 2010 précise que « la concertation avec la commission paritaire interprofessionnelle régionale de l’emploi (COPIRE) et, lorsqu’elles existent, les commissions paritaires régionales des branches professionnelles, en amont des travaux du CCREFP, sera de nature, en outre, à favoriser la participation des partenaires sociaux ainsi que la mobilisation de leurs dispositifs et outils. »
L’article L. 214-13 du code de l’éducation précise enfin que le contrat de plan est établi après chaque renouvellement du conseil régional et prend effet le 1er juin de la première année civile suivant le début de la mandature. Ce document devait donc être conclu au plus tard le 1er juin 2011 pour une durée de quatre ans.
• Le contenu des CPRDFP
Aux termes de l’article L. 214-13 du code de l’éducation, le contrat de plan « détermine les objectifs communs aux différents acteurs sur le territoire régional, notamment en termes de filières de formation professionnelle initiale et continue, sur la base d’une analyse des besoins en termes d’emplois et de compétences par bassin d’emploi. Il porte sur l’ensemble du territoire national et peut être décliné par bassin d’emploi. »
Comme l’indique la circulaire précitée, « l’élaboration d’un diagnostic territorial partagé débouchant sur des préconisations opérationnelles est une étape clé pour la réussite des négociations. Il permettra en effet de s’accorder sur les défis économiques et humains auxquels chaque partie prenante devra s’attacher à répondre via son action en matière de formation professionnelle, au niveau régional, ainsi qu’à celui de chaque bassin d’emploi. Dans une optique prospective, le CPRDFP devra également permettre de répondre à des besoins identifiés de recrutements pour les emplois de demain (« croissance verte », services aux personnes, métiers réglementés de la santé…). Son élaboration sera issue d’un recueil des contributions des partenaires suivants : Carif-Oref, le rectorat, Pôle emploi, l’AFPA, les observatoires des différentes branches, la COPIRE, les OPCA…»
En ce qui concerne la formation des jeunes, comme le précise le II de l’article L. 214-13 précité, le CPRDFP « couvre l’ensemble des filières de formation des jeunes préparant l’accès à l’emploi et veille à assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans ces filières de formation professionnelle. Il inclut le cycle d’enseignement professionnel initial dispensé par les établissements d’enseignement artistique. Il vaut schéma prévisionnel d’apprentissage, schéma régional des formations sociales et schéma régional des formations sanitaires. »
Pour sa partie consacrée aux adultes, aux termes du III de l’article L. 214-13 précité, le CPRDFP « couvre l’ensemble des actions d’orientation et de formation professionnelles visant à favoriser l’accès, le maintien et le retour à l’emploi. »
• La mise en œuvre et le suivi des CPRDFP
Le CPRDFP a une durée égale à celle du mandat du conseil régional, soit, pour l’actuelle mandature, quatre ans jusqu’au 1er juin 2015. Ce cadre pluriannuel a vocation à être décliné par des conventions annuelles d’application qui précisent pour l’État et le conseil régional la programmation et le financement des actions, comme le précise le IV de l’article L. 213-14 du code de l’éducation.
Le deuxième alinéa du IV de l’article L. 213-4 dispose que ces conventions d’application « sont signées par le président du conseil régional, le représentant de l’État dans la région, le recteur, ainsi que, selon leur champ d’application, par les divers acteurs concernés. » Si la signature des orientations stratégiques du CPRDFP est tripartite, sa déclinaison en actions a donc vocation à être signée par les différents acteurs engagés dans ces actions afin de garantir son caractère prescriptif. Plus précisément, s’agissant des demandeurs d’emploi, les conventions annuelles de déclinaison du CPRDFP sont signées également par Pôle emploi.
La circulaire précitée du 22 octobre 2010 précise que le CPRDFP doit s’articuler avec les autres supports contractuels. Il a vocation à alimenter les plans d’actions pris dans le domaine de la formation et de l’insertion professionnelles tel que le contrat d’objectifs et de moyens (COM) insertion professionnelle des jeunes quand il existe. De même, les COM apprentissage doivent devenir l’un des leviers d’action privilégiés du CPRDFP en matière d’apprentissage. Le contrat doit par ailleurs s’articuler avec les politiques régionales concertées de formation mises en œuvre dans le cadre des plans régionaux pour l’insertion des travailleurs handicapés (PRITH).
La co-construction de la carte des formations professionnelles initiales prévue par la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République
L’élaboration de la carte des formations professionnelles initiales constitue un volet essentiel de la mise en œuvre du CPRDFP.
Le IV de l’article L. 214-13 du code de l’éducation renvoie à des conventions annuelles le soin de préciser, pour l’État et pour la région, la programmation et le financement des actions de formation à destination tant des adultes que des jeunes.
En matière de formation professionnelle initiale relevant de l’Éducation nationale et de l’enseignement agricole, les conventions sont signées par le président du conseil régional, le préfet de région et l’autorité académique.
S’agissant du choix des ouvertures et fermetures de sections de formation professionnelle initiale, les rôles respectifs de l’État et de la région méritaient d’être révisés afin de garantir les conditions d’une concertation satisfaisante.
En effet, l’article L. 214-13 du code de l’éducation prévoyait la possibilité pour les autorités de l’État, en cas de désaccord, de prendre seules la décision finale concernant les ouvertures et fermetures de formation dans ces établissements. Ce droit pour l’État de prendre des décisions unilatérales s’est révélé source de difficultés pour la mise en œuvre des CPRDFP. Cette disposition partait d’une intention compréhensible : prévoir les cas de désaccord à l’issue du dialogue entre l’État, notamment le recteur, et la région. Dans la pratique, elle a conduit les autorités académiques, ainsi assurées d’avoir le dernier mot, de se passer du dialogue avec la région. De fait, la plupart des régions ne signaient plus les conventions annuelles, refusant d’être placées par l’État devant le fait accompli.
Le rapport de notre collègue Yves Durand sur le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République (29) indiquait que, fin 2011, dans le cadre de la préparation de la rentrée 2012, plus de la moitié des régions n’avaient pas été consultées par le rectorat pour les ouvertures et les fermetures de sections en lycée professionnel. En raison de nombreuses fermetures de sections, des investissements réalisés pour ces lycées professionnels, parfois récemment, par les régions, en accord avec le rectorat ou à sa demande, sont devenus inutiles (ateliers, équipements, parfois des lycées entiers). Comme l’indique le rapport précité de M. Yves Durand, « dans les rares cas d’ouvertures de sections, le rectorat aurait parfois demandé au dernier moment à la région de financer en urgence des équipements et travaux nécessaires.
Le rapport montre également comment la situation antérieure à la loi du 8 juillet 2013 ne garantissait pas la complémentarité des politiques d’apprentissage et de formation professionnelle initiale sous statut scolaire : En effet alors que la carte des formations en apprentissage relève des régions, celle des formations des lycées professionnels relève in fine des recteurs, ce qui n’est pas un gage de cohérence de l’ensemble.
« Les décisions étant prises de manière unilatérale par le rectorat pour les lycées professionnels, l’apprentissage est le seul levier dont les régions disposent pour essayer de mettre en adéquation la formation avec le développement économique et l’aménagement du territoire, deux autres de leurs compétences.
« Du fait des suppressions massives de postes en lycée professionnel ces dernières années, les régions n’ont pu que déplorer les fermetures de sections ou rouvrir des formations équivalentes en apprentissage, lorsqu’elles estimaient que celles-ci offraient des débouchés aux jeunes ou répondaient à des besoins identifiés dans certains secteurs utiles au développement économique des territoires.
« La politique en matière d’offre et de carte des formations en apprentissage doit pourtant être étroitement articulée à celle menée dans l’enseignement professionnel public, afin d’offrir des solutions adaptées aux besoins des jeunes et des territoires. »
C’est à cette situation que le nouvel article L. 214-13-1 du code de l’éducation, introduit par l’article 29 de la loi du 8 juillet 2013, entend remédier en définissant une nouvelle procédure d’élaboration des conventions annuelles d’application du CPRDFP en matière de formation professionnelle initiale, laquelle oblige concrètement l’État et les régions à se mettre d’accord.
Aux termes de cet article, « chaque année, les autorités académiques recensent par ordre de priorité les ouvertures et fermetures qu'elles estiment nécessaires de sections de formation professionnelle initiale dans les établissements d’enseignement du second degré (…). Parallèlement, la région, après concertation avec les branches professionnelles et les organisations syndicales professionnelles des employeurs et des salariés concernés, procède au même classement.
« Dans le cadre de la convention annuelle prévue au IV de l’article L. 214-13 du présent code, signée par les autorités académiques et la région, celles-ci procèdent au classement par ordre de priorité des ouvertures et fermetures de sections de formation professionnelle initiale, en fonction des moyens disponibles.
« Chaque année, après accord du recteur, la région arrête la carte régionale des formations professionnelles initiales, conformément aux choix retenus par la convention mentionnée au deuxième alinéa du présent article et aux décisions d’ouverture et de fermeture de formations par l’apprentissage qu’elle aura prises.
« Cette carte est mise en œuvre par la région et par l’État dans l'exercice de leurs compétences respectives (…). Elle est communiquée aux organismes et services participant au service public de l’orientation. Les autorités académiques mettent en œuvre les ouvertures et fermetures de sections de formation professionnelle initiale sous statut scolaire en fonction des moyens disponibles et conformément au classement par ordre de priorité mentionné au deuxième alinéa du présent article. »
c. Un outil à consolider
Dans un rapport de mai 2012 consacré à l’évaluation du pilotage de la formation professionnelle par les conseils régionaux, l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) a dressé un premier bilan contrasté de la première génération des CPRDFP, bien que leur caractère récent n’ait pas permis à la mission d’en proposer une véritable évaluation.
S’agissant de la construction des contrats, l’IGAS relève que la totalité des partenaires du conseil régional (services de l’État comme partenaires sociaux) a exprimé sa satisfaction quant aux modalités de concertation mises en place par les régions. Si les partenaires sociaux de certaines régions ont fait part de leur déception par rapport aux résultats finaux, les services de l’État ont eu le sentiment que leur point de vue avait été pris en compte. Les DIRECCTE ont par exemple joué un rôle moteur dans de nombreuses régions pour la prise en compte de certaines priorités dans le contrat : intégration de la dimension interprofessionnelle ou encore des objectifs quantitatifs du COM apprentissage.
S’agissant du contenu des contrats, l’IGAS indique qu’« il est apparu consensuel dans les régions visitées, en partie grâce à la méthode d’élaboration partenariale choisie, en partie également en raison du fait que les contrats constituent une mise en cohérence des instruments qui existent déjà sans, le plus souvent, en créer de nouveaux. »
S’agissant de la mise en œuvre des contrats, l’inspection relève qu’« aucune des régions visitées par la mission n’avait commencé la négociation des conventions annuelles d’application des CPRDFP prévue par les textes. La majorité des CPRDFP renvoie néanmoins à des accords bilatéraux ou multilatéraux qui devront être conclus pour une mise en œuvre opérationnelle des principales orientations définies dans les contrats. Le pilotage envisagé pourrait se heurter à des problèmes de moyens, notamment pour les partenaires sociaux. » L’IGAS souligne que si tous les CPRDFP prévoient des modalités de suivi et d’évaluation, ces dernières sont définies de manière plus ou moins précise en fonction des régions, la fixation d’indicateurs, fréquente dans les contrats signés, ne constituant pas à elle seule une méthode d’évaluation.
Et l’inspection d’en conclure : « La question reste donc ouverte encore aujourd’hui de savoir si les CPRDFP, qui ont à l’évidence dynamisé les partenariats et la volonté de travailler ensemble, seront dans la durée de véritables instruments de mise en cohérence des politiques régionales auxquelles chaque partenaire fera référence dans son action propre. Il est cependant déjà possible de souligner que les travaux de préparation/diagnostic, souvent de qualité, ont permis à l’ensemble des acteurs de la formation de partager une vision commune des besoins de la région et de se reconnaître dans des priorités globales énoncées et dont l’atteinte devra être évaluée. Ce résultat a aussi été rendu possible en raison de la longue tradition de conventionnement entre acteurs (régions, rectorats, DIRECCTE, Pôle emploi, branches, OPCA), antérieure aux CPRDFP. Dans la plupart des régions, les CPRDFP, sans bouleverser ces différents instruments conventionnels qui leur préexistaient, ont néanmoins permis de les conforter dans un cadre d’analyses communes et autour d’objectifs partagés. »
Le diagnostic posé dans l’étude d’impact qui accompagne le présent projet de loi rejoint celui de l’IGAS : « La négociation des CPRDFP s’est faite avec le souci de donner un caractère plus opérationnel à cette démarche qu’à celles conduites précédemment, notamment dans le cadre des PRDF. Ces négociations, ressenties comme riches et importantes à la compréhension des enjeux locaux par l’ensemble des partenaires, ont réellement permis l’émergence de stratégies régionales qu’il convient de consolider en confirmant l’importance de cet outil.
Pour autant, si des engagements communs ont pu être pris à moyen terme entre signataires dans les régions, ces engagements ont souvent porté sur de grands principes sans préciser les moyens opérationnels permettant d’articuler les actions du conseil régional et de l’État. »
L’étude d’impact souligne par ailleurs que la formation des salariés n’a pas été uniformément abordée dans les CPRDFP, « non pas que le sujet ne rencontre pas l’intérêt des acteurs, notamment sous l’angle de l’appui aux personnes dans le cadre des restructurations ou en cours d’insertion par l’activité économique, mais parce que le rôle des partenaires sociaux n’est pas expressément prévu aux côtés de l’État et de la région comme signataires du contrat et des engagements qui y sont associés. »
Enfin, l’étude d’impact relève qu’à l’issue des négociations, « les signataires des CPRDFP étaient unanimes sur la nécessité d’intégrer les politiques sectorielles dans les politiques de formation. Activement présents lors des négociations de ces contrats, en particulier dans la phase de diagnostic, les partenaires sociaux ont permis d’ancrer les débats dans la réalité économique locale et ont pesé dans la définition des besoins de développement des compétences pour le territoire. Bien que cela ne soit pas prévu par la loi, il a été envisagé, dans plusieurs régions, de faire cosigner le CPRDFP par les partenaires sociaux, même si cela n’a été finalement été possible que dans une seule région (Languedoc Roussillon). »
2. Les modifications apportées par le présent article
Sans revenir sur les modifications apportées par la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République s’agissant du mode d’élaboration de la carte des formations professionnelles initiales, le présent article confirme le rôle du CPRDFP et son architecture globale, en apportant quelques clarifications qui s’appuient sur l’expérience de la première génération de CPRDFP signés entre juin 2011 et aujourd’hui.
a. Les modifications portant sur les contrats régionaux de développement des formations et de l’orientation professionnelles
Le IV du présent article propose une nouvelle rédaction des I et II de l’article L. 214-13 du code de l’éducation qui définissent les objectifs ainsi que les modes d’élaboration, de mise en œuvre et de suivi des CPRDFP.
Comme l’indique l’étude d’impact, « il était primordial d’assurer une clarification des objectifs du CPRDFOP et de l’assortir d’une simplification des conventionnements l’entourant. Ces éléments expliquent donc qu’il ne s’agisse ici que d’une réécriture de l’article L. 214-13 du code de l’éducation, qui devrait cependant faciliter les cycles de négociations des contrats de plan tout en permettant aux acteurs de se concentrer sur leur mise en œuvre. »
• La définition des contrats
Première modification proposée, le CPRDFP devient CPRDFOP afin de prendre en compte plus expressément l’orientation tout au long de la vie dans le champ de la contractualisation et faire de cet outil un instrument d’articulation de la chaîne emploi-orientation-formation professionnelle.
Le troisième alinéa du IV du présent article propose quant à lui une nouvelle définition du contrat.
Il est précisé que le contrat a pour objet « l’analyse des besoins à moyen terme du territoire national en matière d’emplois, de compétences et de qualifications ». La dimension d’analyse et d’anticipation du contrat devient ainsi prioritaire. Cette dimension existe déjà actuellement puisque le deuxième alinéa du I de l’article L. 214-13 précise que le contrat de plan détermine les objectifs communs aux différents acteurs sur le territoire régional, notamment en termes de filières de formation professionnelle initiale et continue, « sur la base d’une analyse des besoins en termes d'emplois et de compétences par bassin d’emploi. »
Comme il a été indiqué précédemment, l’expérience montre que l’élaboration d’un diagnostic territorial partagé est une étape clé pour la réussite des négociations. Le rapport de l’IGAS précité indique néanmoins que dans certaines régions, les partenaires sociaux ont regretté que la phase de diagnostic aboutisse plus à un constat rétrospectif qu’à une anticipation sur les évolutions à venir de l’emploi et de la formation.
Sur la base de cette analyse prospective, le contrat est défini comme un outil de programmation des actions de formation professionnelle des jeunes et des adultes, « compte tenu de la situation et des objectifs de développement économique du territoire. » Son objectif vise donc à assurer une meilleure articulation entre les besoins en emploi et en qualification des territoires, d’assurer un meilleur fléchage des financements publics destinés à la formation et in fine à assurer une meilleure insertion dans l’emploi des individus.
• Les objectifs du contrat
Les alinéas 13 à 19 du présent article proposent une réécriture plus précise des objectifs assignés au contrat de plan, explicitant les volets incontournables de la stratégie d’un territoire, qui peut être déclinée par bassin d’emploi, en matière de développement de l’orientation et de la formation. Le développement de l’orientation devient un objectif à part entière du contrat.
Le contrat devra tout d’abord définir « les objectifs dans le domaine de l’offre de conseil et d’accompagnement en orientation, afin d’assurer l’accessibilité aux programmes disponibles » (1° du I de la nouvelle rédaction proposée pour l’article L. 214-13).
Il devra également définir « les objectifs en matière de filières de formation professionnelle initiale et continue » (2° du I de la nouvelle rédaction proposée pour l’article L. 214-13).
Dans sa partie consacrée aux jeunes, le contrat devra définir (3° du I de la nouvelle rédaction proposée pour l’article L. 214-13) un schéma de développement de la formation professionnelle initiale favorisant une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes dans chacune des filières et incluant, comme c’est le cas actuellement, le cycle d’enseignement professionnel initial dispensé par les établissements artistiques.
Le texte explicite, pour le volet « jeunes », la nécessité de prendre en compte les conditions de leur hébergement car cette problématique est un frein important à l’accès des jeunes à la formation par alternance. Comme l’indique l’étude d’impact, « concernant les jeunes, le champ du CPRDFOP est étendu aux conditions d’hébergement des jeunes permettant de faciliter leur accès à la formation. En effet, la situation géographique des formations, qui s’ajoute à la précarité de certaines familles, peuvent parfois expliquer le décrochement de certains jeunes, qu’il convient d’accompagner pour leur permettre de terminer leur formation initiale. »
Dans sa partie consacrée aux adultes (4° du I de la nouvelle rédaction proposée pour l’article L. 214-13), le contrat définira, comme c’est le cas actuellement, « les actions de formation professionnelle ayant pour but de favoriser l’accès, le maintien et le retour à l’emploi ». Cette disposition reprend le III de l’article L. 214-13, dans sa rédaction actuelle.
Le contrat devra également comporter un schéma prévisionnel de développement du service public régional de l’orientation (5° du I de la nouvelle rédaction proposée pour l’article L. 214-13).
Enfin, il devra, comme c’est le cas actuellement, définir les priorités relatives à l’information, à l’orientation et la validation des acquis de l’expérience (6° du I de la nouvelle rédaction proposée pour l’article L. 214-13). Ce point reprend la dernière phrase du premier alinéa du I de l’actuel article L. 214-13.
L’alinéa 20 précise que les conventions annuelles conclues en application de l’article L. 214-13-1 s’agissant des cartes des formations professionnelles initiales, de l’article L. 6121-3 du code du travail (conventions conclues avec les organismes collecteurs paritaires agréé au titre de la participation des employeurs d’au moins dix salariés au développement de la formation professionnelle continue, qui déterminent l’étendue et les conditions de participation des régions au financement des actions de formations définies à l’article L. 6313-1 ainsi qu’à la rémunération des bénéficiaires d’un congé individuel de formation) et du IV du présent article s’agissant des conventions sectorielles, « concourent à la mise en œuvre de la stratégie définie par le contrat de plan régional. »
• L’élaboration du contrat
Le II de l’article L. 214-13 dans la rédaction proposée par l’article 13 clarifie la procédure d’élaboration du contrat, actuellement source de confusion.
La rédaction actuelle de l’article L. 214-13 prévoit en effet que le CPRDFP « engage les parties représentées au sein du comité de coordination régional de l’emploi et de la formation professionnelle. » Cette formulation, juridiquement contestable en l’absence de signature ou d’adoption formelle du contrat, doit être clarifiée pour rendre le texte plus conforme à la pratique.
Le nouveau comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CREFOP), institution ayant vocation à se substituer à l’actuel CCREFP, est expressément appelé à être le lieu de négociation du CPRDFOP.
Il convient en effet de souligner que l’article 14 simplifie par ailleurs la gouvernance nationale et régionale de la formation professionnelle et de l’emploi :
– au niveau national, il procède à la fusion du conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV) et du conseil national de l’emploi (CNE), réunis en un conseil national de l'emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles ;
– au niveau régional, il procède à la création des comités régionaux de l’emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles, issus de la fusion des CCREFP avec le conseil régional de l’emploi.
La rédaction proposée par le présent article, sans reprendre la notion « d’engagement des parties représentées au CREFOP » évoque une « adoption » du contrat en comité régional afin d’acter l’approbation des membres du CREFOP qui ne sont pas expressément signataires du contrat.
L’effectivité de cette nouvelle procédure est directement liée à la dynamique politique que la nouvelle gouvernance définie à l’article 14 du présent projet de loi va permettre d’installer. Le fait notamment que les membres du bureau du CREFOP partagent régulièrement leur diagnostic des besoins en compétences du territoire doit faciliter l’engagement de toutes les parties dans la mise en œuvre du CPRDOFP.
En ce qui concerne les règles d’adoption du contrat, elles seront définies en même temps que les procédures de fonctionnement du CREFOP, l’objectif étant de rendre cette adoption préalable à toute signature du contrat.
S’agissant de l’élaboration du contrat de plan, la seule modification proposée est la consultation des organismes consulaires. Pour le reste, le premier alinéa du II de l’article L. 214-13, dans sa rédaction proposée par le présent article, reprend les dispositions prévues par le troisième alinéa du I de cet article.
Le deuxième alinéa du II de l’article L. 214-13, dans sa rédaction proposée par le présent article, dispose que le contrat sera désormais établi dans l’année qui suit le renouvellement du conseil régional.
Comme le précise le troisième alinéa du II de l’article L. 214-13, dans sa rédaction proposée par le présent article, les partenaires sociaux, via les organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentées au sein du CREFOP, seront désormais expressément invités à signer le contrat de plan.
L’étude d’impact indique que cette modification doit « donner tout son poids au CPRDFOP pour adapter la planification de la carte régionale de formation continue aux besoins du marché de l’emploi. » Elle précise également que « l’association plus forte des partenaires sociaux a pour objectif de garantir des stratégies sectorielles renforcées entre acteurs, afin de mieux coordonner les financements à destination des adultes. »
« En termes d’impact, la signature des représentants des organisations syndicales de salariés et d’employeurs permettra de garantir une meilleure articulation des formations régionales avec les priorités à moyen terme du marché de l’emploi, et ce notamment en termes de diversité au sein des filières (équilibre hommes-femmes, accueil des personnes porteuses de handicap, etc.). Il est attendu que la signature des partenaires sociaux constitue un levier pour que les branches et les OPCA s’investissent activement dans la mise en œuvre des CPRDFOP, y compris sur le plan financier. »
Si tout ou partie des partenaires sociaux représentés au sein du CREFOP ne souhaitent pas signer le contrat de plan, celui-ci pourra tout de même être adopté et mis en œuvre.
Par ailleurs, les pratiques ayant été variables sur ce point, il est précisé que l’adoption par le conseil régional doit être effectuée avant la signature du contrat par le président du conseil régional.
• Le suivi et l’évaluation du contrat
En application du quatrième alinéa du II de l’article L. 214-13, dans sa rédaction proposée par le présent article, les modalités de suivi et l’évaluation du contrat ne seront plus assurées par le comité mais feront l’objet d’un décret en Conseil d’État pris après avis du conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (CNEFOP). Cette modification fait suite au constat de l’IGAS de l’insuffisance et de l’hétérogénéité des modalités de suivi et d’évaluation. L’étude d’impact indique que « ce décret devra permettre de poser un cadre commun permettant de proposer une méthodologie facilitant l’échange de bonnes pratiques entre régions. »
b. Les dispositions de coordination
Le I du présent article est une mesure de coordination qui vise à tenir compte de la nouvelle appellation des CPRDFOP.
Le II propose une nouvelle rédaction de l’article L. 214-12 du code de l’éducation. Cet article, issu de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales, confie à la région la responsabilité de définir et de mettre en œuvre la politique régionale d’apprentissage et de formation professionnelle des jeunes et des adultes à la recherche d’un emploi ou d’une nouvelle orientation professionnelle.
À cet effet, l’article L. 214-12 précise que la région élabore le contrat de plan régional de développement des formations professionnelles défini à l’article L. 214-13 et arrête la carte des formations professionnelles initiales du territoire régional définie à l’article L. 214-13-1.
Cette compétence comprend d’autres missions plus spécifiques de la région précisées par les trois derniers alinéas de l’article L. 214-12 :
« Elle organise sur son territoire le réseau des centres et points d’information et de conseil sur la validation des acquis de l’expérience et contribue à assurer l’assistance aux candidats à la validation des acquis de l’expérience.
« Elle organise des actions destinées à répondre aux besoins d’apprentissage et de formation en favorisant un accès équilibré des femmes et des hommes aux différentes filières de formation. (…)
« Elle assure l’accueil en formation de la population résidant sur son territoire, ou dans une autre région. Dans ce dernier cas, une convention fixe les conditions de prise en charge de la formation par les régions concernées. »
Le deuxième alinéa du II du présent article tend à préciser que la région est désormais compétente pour définir et mettre en œuvre le service public de l’orientation tout au long de la vie dans le cadre fixé à l’article L. 6111-3 du code du travail. Cette modification se veut la conséquence des modifications proposées par l’article 12 du présent projet de loi qui modifie l’article L. 6111-3 du code du travail afin de définir les rôles respectifs de l’État et des régions dans la définition et la mise en œuvre du service public de l’orientation tout au long de la vie. Or il convient de souligner que l’article L. 6111-3 du code du travail, dans la rédaction proposée par l’article 12, n’attribue pas à la région la compétence de « définir et mettre en œuvre » le service public de l’orientation tout au long de la vie. Quant au nouvel article L. 214-16-1 que l’article 12 du présent projet de loi tend à introduire dans le code de l’éducation, il reconnaît à la région un rôle d’organisation du service public de l’orientation tout au long de la vie.
Le troisième alinéa du II du présent article reprend la première phrase du premier alinéa de l’article L. 214-12 en ce qui concerne la compétence de principe de la région en matière d’apprentissage et de formation professionnelle des jeunes et des adultes à la recherche d’un emploi ou d’une nouvelle orientation professionnelle.
En ce qui concerne l’exercice de cette compétence, il est proposé de renvoyer aux dispositions des articles L. 6121-1 et suivants du code du travail relatifs à la compétence des régions que l’article 11 du présent projet de loi tend à modifier. C’est pourquoi, le présent article tend à supprimer les trois derniers alinéas de l’actuel article L. 214-12 dont les dispositions sont intégrées dans le code du travail par l’article 11 du présent texte.
La précision selon laquelle la région adopte la carte des formations professionnelles initiales est désormais reprise par le 1° de l’article L. 6121-1 relatif aux missions exercées par la région dans le cadre de sa compétence en matière de politique régionale d’accès à l’apprentissage et à la formation professionnelle.
L’alinéa relatif à la validation des acquis de l’expérience, dans sa double dimension territoriale et d’assistance devient le 3° du même article.
Quant à l’accueil en formation des populations résidant sur son territoire ou dans une autre région et aux actions destinées à répondre aux besoins d’apprentissage et de formation en favorisant l’accès équilibré des femmes et des hommes aux différentes filières de formation, ils sont désormais prévus par l’article L. 6121-2 relatif à l’organisation et au financement du service public régional de la formation professionnelle.
Le quatrième alinéa du II du présent article reprend la dernière phrase de l’actuel premier alinéa de l’article L. 214-12, en tenant compte de la nouvelle appellation du CPRDFP qui devient « contrat de plan de développement des formations et de l’orientation professionnelles » (CPRDFOP).
L’article L. 214-12-1 du code de l’éducation précise que « Les actions menées à l'égard des Français établis hors de France en matière de formation professionnelle et d'apprentissage relèvent de la compétence de l’État. »
Le 1° du III du présent article tend à confier cette compétence aux régions en coordination avec l’article 11 du présent projet de loi, qui confie aux régions le financement et l’organisation de la formation professionnelle des Français établis hors de France et l’hébergement des bénéficiaires.
Le 2° du III complète le premier alinéa de l’article L. 214-12-1 afin de préciser que « la convention prévue au 7° de l’article L. 6121-2 du code du travail précise les conditions d’accès au service public régional de la formation professionnelle des Français établis hors de France souhaitant se former sur le territoire métropolitain. »
Enfin, le V modifie par coordination l’article L. 4424-1 du code général des collectivités territoriales relatif aux compétences reconnues à la collectivité territoriale de Corse en matière d’éducation.
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La commission adopte l’amendement de coordination AC17 de la rapporteure pour avis.
Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 modifié.
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En conséquence, et sous réserve des amendements qu’elle propose, la Commission des affaires culturelles et de l’éducation émet un avis favorable à l’adoption des articles 8, 12 et 13 du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale (n° 1721).
ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE
(par ordre chronologique)
Ø Fédération nationale de l’enseignement, de la culture et de la formation professionnelle – Force Ouvrière (FNEC FP-FO) – M. Claude Charmont, secrétaire général
Ø Syndicat national de l’enseignement technique action autonome (SNETAA-FO) – M. Jean-Pierre Ardon, secrétaire général
Ø Mouvement des entreprises de France (MEDEF) (30) – Mme Sandrine Javelaud, directrice de mission sur la formation initiale, M. Matthieu Pineda, chargé de mission à la direction des affaires publiques
Ø Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) – M. Francis Petel, membre de la commission Formation éducation
Ø Ministère de l’éducation nationale – Direction générale de l’enseignement scolaire – M. Jean-Paul Delahaye, directeur général, Mme Stéphanie Roucou, chargée de mission, Mme Marie-Annick Malicot, chef du bureau des diplômes professionnels et M. Nicolas Torres, adjoint au chef de bureau de l’orientation et de l’insertion professionnelle
Ø Fédération syndicale unitaire (FSU) – M. Thierry Reygades, et M. Noël Daucé, secrétaires nationaux
Ø Union nationale des syndicats autonome-Éducation (UNSA-Éducation) – M. Joël Trubuilt, chef de travaux (SNPCT)
Ø Syndicat des enseignants de l’Union nationale des syndicats autonome (SE-UNSA) – Mme Christine Savantré, conseillère technique
Ø Syndicat général de l’éducation nationale-Confédération française démocratique du travail (SGEN-CFDT) – Mme Claudie Paillette, secrétaire nationale, M. Albert Ritzenthaler, secrétaire national, et M. Christian Lorent, secrétaire fédéral en charge de l'orientation
Ø Association des régions de France (ARF) – Mme Isabelle Gaudron, vice-présidente de la région Centre, chargée de la formation et de l’apprentissage et présidente de la commission apprentissage