P20 discours Laetitia Saint-Paul, commerce international (Tokyo, 4 novembre 2019)

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En matière économique, la priorité de la France est entièrement portée sur le renforcement de toutes les dynamiques soutenant la croissance. Tous les leviers budgétaire, monétaire, réglementaire et d’investissement sont actionnés à cette fin. La liberté du commerce et des investissements internationaux est un élément essentiel concourant à cette dynamique. Mais si l’ouverture et l’intégration des économies internationales sont capitales, la France estime qu’elles doivent s’accompagner d’un partage juste et équilibré des fruits de la croissance.

Pour atteindre cet optimum, la France est convaincue que les échanges commerciaux internationaux doivent s’inscrire dans un cadre réglementaire librement consenti par les États. Aujourd’hui, seule l’Organisation mondiale du commerce (OMC) offre ce cadre multilatéral mondial. Il faut veiller à le préserver, le réformer pour le rendre plus efficace dans ses trois fonctions fondamentales : l’édiction des règles commerciales, le suivi de leur mise en œuvre, le règlement des différends. 

Il faut entendre les critiques à l’encontre de l’OMC et savoir y répondre. Le mode de fonctionnement et les objectifs de cette institution datent de 1994, époque où les BRIC et les pays en développement n’avaient pas l’importance qu’ils ont à présent, époque où le numérique, la finance, les nouvelles technologies ne dominaient pas comme aujourd’hui les échanges internationaux, époque où les problématiques de propriété intellectuelle et de place des femmes dans le commerce n’étaient pas débattues.

Si le principe de la réforme a donc été acté par le G 20 de Buenos Aires, les 164 membres de l’OMC ont du mal à s’accorder sur le contenu ou même les priorités de cette réforme. Les tensions commerciales actuelles sont pour beaucoup dans le ralentissement actuel de la croissance mondiale. De toute évidence, l’existence de pratiques commerciales déloyales est une des causes des tensions commerciales actuelles. Mais nous ne saurions mettre un terme à ces pratiques par des mesures unilatérales, qui sont surtout porteuse d’un risque d’escalade. C’est par un système commercial multilatéral plus juste, plus efficace et fondé sur des règles partagées par tous que nous pourrons sortir par le haut de cette situation. 

L’urgence pour la France est d’assurer la poursuite de la fonction de règlement des différends qui est menacée directement par la paralysie complète de l’Organe d’appel dès le mois prochain avec le départ de deux des trois juges restants.

Par ailleurs, le G20 réuni à Osaka en juin dernier s’est accordé sur le double objectif de rétablir un équilibre de concurrence – un level playing field – afin de résoudre les tensions actuelles et de parvenir à une libre circulation des données avec des garde-fous permettant de protéger la vie privée et préserver les données personnelles.

Il convient à présent de passer à des propositions concrètes susceptibles de recueillir un large consensus.  

Le Japon a présenté des propositions constructives en matière de commerce numérique et la libre circulation des données. Un cadre réglementaire international s’impose si l’on ne veut pas que les plus grandes entreprises du marché dictent leur loi. Il faut aussi entendre les pays dénonçant les pertes fiscales trop importantes qu’ils subissent en raison du moratoire, sans cesse reconduit depuis plus de vingt ans, sur la taxation des transactions électroniques.

En matière de pêche, il faut aboutir rapidement (avant la fin de l’année afin de pouvoir présenter des résultats concrets à la 12e conférence ministérielle de l’OMC à Nur-Sultan de juin 2020) à un accord sur les subventions, comme les membres de l’OMC s’y sont engagés. Or les discussions à Genève se sont enlisées dans des questions de procédure.

Par ailleurs, la France attache une grande importance au respect des droits de propriété intellectuelle. Il serait utile de débattre de la pertinence de la reconduction continuelle depuis 1995 du moratoire sur les plaintes en non-violation en matière de propriété intellectuelle dans le domaine du commerce.

Enfin, de nombreux membres de l’OMC demandent également, non sans fondement, qu’un traitement ciblé des pays en développement soit réalisé notamment en vue de mieux cantonner le principe de traitement spécial et différencié.

Concernant la promotion des investissements libres, ouverts et équitables, la France veille particulièrement à la transparence des financements et à la destination des investissements : ceux-ci doivent prioritairement être orientés vers la construction d’infrastructures de qualité pour le développement des pays sous-équipés. J’ajouterai qu’il convient de veiller à ce que ces investissements soient réalisés en conformité avec les objectifs de l’Accord de Paris de 2015. Les investissements « verts » sont une priorité absolue pour la France.

Je vous remercie.