Géraud, Henri Jouve
1901 - 1991
Né le 5 juillet 1901 à Trizac (Cantal)
Décédé le 23 mai 1991 à Ballainvilliers (Essonne)
Député du Cantal de 1946 à 1951
Géraud Jouve est né le 5 juillet 1901 à Trizac (Cantal), dans une famille de cultivateurs de huit enfants. Après des études secondaires dans le Cantal et des études supérieures à l'Université de Strasbourg, il passe avec succès l'agrégation d'allemand. Professeur quelques années au lycée de Cahors, dans le Lot, il séjourne, de 1930 à 1931, à l'Institut français de Berlin, puis quitte l'enseignement pour le journalisme et devient correspondant de l'agence Havas, successivement en poste à Budapest, Varsovie, Berlin, Amsterdam puis Bucarest.
Géraud Jouve rejoint sitôt après la défaite le général de Gaulle à Londres. Il en est le délégué en Turquie de novembre 1940 à septembre 1942, avant de prendre, en janvier 1943, la direction de Radio-Brazzaville. Il fonde à Alger, en avril 1944, l'Agence France Presse, et, lorsque la France est libérée, en prend à Paris la direction des services politiques.
Géraud Jouve renonce au journalisme le 15 décembre 1945 pour s'engager dans la vie publique. Conseiller général de Riom-ès-Montagnes (Cantal) depuis le 23 septembre 1945, il se présente sur la liste de la SFIO dans la circonscription du Cantal aux élections pour la seconde Assemblée nationale constituante du 2 juin 1946. Deuxième sur la liste, il n'est pas élu. Les élections du 10 novembre 1946 pour la première Assemblée nationale lui sont plus favorables : Géraud Jouve, placé cette fois à la tête de la liste de la SFIO, recueille 21 235 voix sur 87 435 suffrages exprimés, et remporte l'un des trois sièges à pourvoir. Les deux autres élus du Cantal sont le communiste Clément Lavergne et le candidat de la « liste républicaine d'action paysanne et sociale » Camille Laurens.
Géraud Jouve est nommé membre de la Commission de la presse et de la Commission des affaires étrangères. Il est aussi nommé juré à la Haute cour de justice, et participe à la délégation française à l'Assemblée générale de l'ONU en 1950. Les questions d'information et d'audiovisuel retiennent particulièrement son attention. Géraud Jouve dépose ainsi, le 6 février 1948, un rapport au nom de la Commission de la presse sur la proposition de résolution du député communiste Fernand Grenier visant à « assurer la protection des films français » par une révision des accords Blum-Bymes du 28 mai 1946 ; remarquant que la pénétration du marché cinématographique français par l'industrie américaine est aussi le fait de « productions de second et de troisième ordre », il propose de réviser à la hausse le quota réservé aux films français par les accords Blum-Bymes, en le portant au-dessus de 50 % (environ cent soixante titres, pour une base de trois cents projetés) ; faute de quoi la France pourrait fixer une taxe importante sur les films doublés. Un peu plus de deux mois plus tard, le 28 mai 1948, Géraud Jouve précise ses positions dans un nouveau rapport qu'il dépose au nom de la Commission de la presse sur le projet de loi instituant une aide temporaire à l'industrie cinématographique, et sur la proposition de loi du député communiste Fernand Grenier visant au versement d'une subvention gouvernementale d'un milliard à la production cinématographique française. Géraud Jouve souligne l'ampleur de la crise que celle-ci traverse depuis que le cinéma américain domine sur les écrans européens, et, afin de le combattre, plaide pour la création d'une taxe additionnelle aux prix des places dans les salles. Cette aide n'aurait pas vocation à être pérennisée ; temporaire, elle « ne doit pas dispenser les diverses industries du cinéma de l'effort qui a été à peu près unanimement reconnu nécessaire pour surmonter la crise et normaliser la production, la distribution et l'exploitation ». Les recettes en seraient affectées au secteur de la production ; « à quoi servirait en effet de négocier une amélioration du quota réservé aux films français si, demain, faute d'avoir pris les mesures préalables, nous nous trouvions dans l'impossibilité de fournir aux salles le nombre de films français nécessaires pour utiliser ce quota ? »
Géraud Jouve s'intéresse aussi aux modifications du régime juridique des droits d'auteur. Il émet ainsi le 11 décembre 1947 un avis au nom de la Commission de la presse sur une proposition de loi déposée par le député des Deux-Sèvres Emile Bêche, dans lequel il soutient l'institution d'un domaine public payant sur l'exploitation des œuvres littéraires après l'expiration des droits patrimoniaux des écrivains, rejetant l'argument selon lequel cette mesure menacerait le financement des entreprises de presse.
Géraud Jouve s'intéresse enfin au développement de la télévision en France. Il dépose le 21 juillet 1949 une proposition de résolution afin d'y consacrer dès 1950 un crédit de sept cents millions de francs. Soucieux de mettre à profit « l'avance technique » dont la France bénéficie dans ce domaine, il réclame la construction d'urgence des premiers postes émetteurs à haute définition à Paris, Lille et Lyon.
Géraud Jouve vote la confiance à Léon Blum (17 décembre 1946), soutient le gouvernement Ramadier lors de la crise avec les ministres communistes (4 mai 1947), et se prononce en faveur du statut de l'Algérie (27 août 1947). Favorable à la nationalisation des écoles des houillères (14 mai 1948), il soutient le plan Marshall (7 juillet), la formation du Conseil de l'Europe (9 juillet 1949) et celle du pacte de l'Atlantique (26 juillet). Géraud Jouve se montre enfin favorable au projet de réforme électorale instituant le scrutin de liste majoritaire départemental à un tour avec apparentement (7 mai 1951).
Candidat au renouvellement de son mandat aux élections législatives du 17 juin 1951, Géraud Jouve ne retrouve pas son siège, les listes apparentées recueillant plus que la majorité absolue des suffrages. Il entame alors une carrière diplomatique : il est nommé délégué du ministre des Affaires étrangères auprès du Conseil de l'Europe de 1951 à 1955, ambassadeur en Finlande de 1955 à 1960, puis délégué en France du haut-commissaire des Nations Unies pour les réfugiés de 1960 à 1966. Toujours présent dans le milieu du journalisme, il préside aussi l'Association syndicale des rédacteurs en chef.
Géraud Jouve décède le 23 mai 1991 à Ballainvilliers (Essonne). Il était l'auteur de plusieurs ouvrages (Mon séjour chez les Nazis, 1941 ; La Remontée de Munich à Brazzaville, 1945 ; Voici l'âge atomique, 1946).
Géraud Jouve était officier de la Légion d'honneur et grand-croix du Lion de Finlande.