Louis, Joseph Martel
1813 - 1892
Représentant en 1849, député au Corps législatif de 1863 à 1870, représentant en 1871, ministre et membre du Sénat, né à Saint-Omer (Pas-de-Calais) le 15 septembre 1813, il se fit recevoir avocat et docteur en droit, puis entra dans la magistrature.
Il était juge au tribunal de Saint-Omer, lorsque, le 13 mai 1849, les électeurs du Pas-de-Calais l'envoyèrent siéger à l'Assemblée législative, le 10e sur 15, par 77,516 voix (129,691 votants, 194,088 inscrits). Il donna sa démission de magistrat, prit place à droite, et vota avec la majorité hostile à la République : pour l'expédition de Rome, pour la loi Falloux-Parieu sur l'enseignement, pour la loi restrictive du suffrage universel, etc. Il ne soutint pas, dans les derniers temps de la législature, la politique particulière de l'Elysée, et, après avoir protesté contre le coup d'Etat, il rentra dans la vie privée, et reprit sa profession d'avocat à Saint-Omer.
Pendant dix ans, M. Martel se tint à l'écart de la politique. Il y rentra en 1861, comme conseiller général du Pas-de-Calais, et, le 1er juin 1863, se présenta au Corps législatif dans la 5e circonscription de ce département, avec le programme de l'opposition orléaniste : il fut élu député par 13,860 voix (25,955 votants, 32,888 inscrits), contre 12,045 à M. Le Sergeant de Monnecove, député sortant, candidat officiel. Il alla siéger à la Chambre dans le petit groupe du centre qui suivait la direction politique de Thiers, et prit une part assez active aux discussions ; on remarqua les discours dans lesquels il réclama la juridiction des tribunaux ordinaires pour la presse, l'abolition du timbre en faveur des journaux et brochures traitant de matières économiques et sociales, l'examen par la Chambre des budgets ordinaire et extraordinaire de la ville de Paris ; il fut un des fondateurs du groupe des 46, noyau du tiers-parti.
Réélu, le 24 mai 1869, par 21,950 voix (22,084 votants, 29,775 inscrits) sans compétiteur, il acquit dans l'Assemblée une réelle influence, signa la célèbre demande d'interpellation des 116, et devint, à trois reprises, secrétaire du Corps législatif. Il sembla, après l'avènement au pouvoir de M. Emile Ollivier, s'être sensiblement rapproché du gouvernement et, lors de la discussion (2 juin 1870) de la pétition des princes d'Orléans demandant l'autorisation de rentrer en France, il déclara, au nom du centre gauche, qu'il ne voterait pas la loi d'exil si on la présentait, mais qu il ne l'abrogerait pas non plus, si le gouvernement jugeait cette mesure dangereuse.
Mais les événements qui marquèrent la fin du règne modifièrent son attitude ; avec Thiers, il se prononça contre la déclaration de guerre à la Prusse. Il se montra comme lui très réservé à l'égard du gouvernement de la Défense nationale et ne rentra en scène que lors des élections à l'Assemblée nationale (8 février 1871), où le Pas-de-Calais l'envoya siéger, le 1er sur 15, par 147,867 voix (149,532 votants, 206,432 inscrits). Elu comme conservateur sur une liste de protestation contre la politique et les décrets de la délégation de Bordeaux, M. Martel prit place au centre droit, et, jusqu'au mois de novembre 1872, vota constamment avec la majorité,
- pour les préliminaires de paix,
- pour l'abrogation des lois d'exil,
- pour le pouvoir constituant de l'Assemblée,
- contre le retour à Paris,
- contre la dissolution.
Dès la première constitution du bureau, il avait été élu vice-président de l'Assemblée nationale. Le chef du pouvoir exécutif l'avait nommé, d'autre part, vice-président du conseil supérieur de l'agriculture, du commerce et de l'industrie, et, après la répression de la Commune, président de la commission des grâces. Très attaché à la personne et aux idées de Thiers, il se sépara de la majorité de l'Assemblée, dès que celle-ci manifesta l'intention de renverser le chef de l'Etat ; le 29 novembre 1872, il soutint le gouvernement dans la commission des Trente, dont il faisait partie. Après la démission de M. Grévy comme président de la Chambre, il fut porté candidat à la présidence par les gauches et par le ministère ; mais la coalition des droites le repoussa, et élut M. Buffet (5 avril 1873). Le mois suivant, Thiers voulut faire appel à M. Martel, alors éloigné de Paris, pour lui offrir un portefeuille ; mais, n'ayant pas reçu de réponse en temps utile, il dut s'adresser à un autre député. Lors de la reconstitution du bureau le 20 mai, M. Martel fut encore une fois la candidat du gouvernement à la présidence, mais il échoua de nouveau, et ce ne fut même qu'au troisième tour de scrutin qu'il fut réélu vice-président. Le 24 mai, il vota contre la chute de Thiers, puis il se montra l'adversaire du cabinet de Broglie. Après s'être prononcé contre le septennat, contre la loi des maires, pour les propositions Périer et Maleville, pour l'amendement Wallon, pour la Constitution de 1875, il repoussa la loi sur l'enseignement supérieur.
Il était encore vice-président de la Chambre, lorsque les gauches le portèrent sur leur liste aux élections des sénateurs inamovibles : il fut élu par l'Assemblée nationale, le 8 décembre 1875, au 1er tour de scrutin, le 2e sur 75, par 344 voix (687 votants). A la première réunion de la Chambre haute, M. Martel fut élu vice-président. Il donna son appui au cabinet Dufaure; puis il fut appelé lui-même, le 12 décembre 1876, à prendre, dans le ministère Jules Simon, le portefeuille de la Justice et des Cultes. Il se déclara contre les magistrats qui avaient appartenu aux commissions mixtes, adressa (mai 1877) une circulaire aux évêques pour appeler leur attention sur la permission donnée à des orateurs laïques de faire des conférences dans les églises, et partagea, le 16 mai 1877, la disgrâce et la chute de M. Jules Simon. M. Martel s'assit alors au centre gauche du Sénat, et vota, le 23 juin suivant, contre la dissolution de la Chambre des députés. Le 19 novembre, il se prononça contre l'ordre du jour Kerdrel hostile à l'attitude de la majorité du Palais-Bourbon, et ne cessa jusqu'en 1879 d'opiner avec la minorité républicaine. Le renouvellement partiel du 5 janvier 1879 ayant donné la majorité aux gauches, M. Martel remplaça au fauteuil le président du Sénat, M. d'Audiffret-Pasquier. En cette qualité, il présida le Congrès le 30 janvier suivant, lors de l'élection présidentielle de M. Grévy, et le 18 juin, lors du retour des Chambres à Paris. Mais au bout de quelques mois, l'état de sa santé, assez gravement atteinte, le força d'abandonner la direction des débats et de se retirer dans le Midi ; sa démission de président, d'abord unanimement refusée par le Sénat, fut acceptée sur son insistance, le 25 mai 1880 ; il eut alors pour successeur M. Léon Say. Longtemps éloigné du Luxembourg par la maladie, M. Martel s'est prononcé, en dernier lieu,
- pour le rétablissement du scrutin d'arrondissement (13 février 1889),
- pour le projet de loi Lisbonne restrictif de la liberté de la presse,
- pour la procédure à suivre devant le Sénat contre le général Boulanger.
Date de mise à jour: décembre 2016
Né le 13 septembre 1813 à Saint-Omer (Pas-de-Calais), mort le 4 mars 1892 à Evreux (Eure).
Représentant du Pas-de-Calais en 1849.
Député du Pas-de-Calais au Corps législatif de 1863 à 1870.
Représentant du Pas-de-Calais de 1871 à 1875.
Sénateur inamovible de 1875 à 1892.
Ministre de la Justice du 12 décembre 1876 au 16 mai 1877.
(Voir première partie de la biographie dans ROBERT ET COUGNY, Dictionnaire des Parlementaires, t. IV, p. 286.)
La mort le surprit le 4 mars 1892, dans sa propriété d'Evreux où la maladie l'avait confiné. Il était âgé de 79 ans.