Onglet actif : Présentation

1) Fonctions et réglementation des commissions avant 1915

Les commissions jouent un rôle fondamental dans le fonctionnement des institutions républicaines. En effet, à la Chambre des députés comme au Sénat, tous les projets de loi déposés par le gouvernement et toutes les propositions de loi émanant des députés doivent être examinés par une commission avant d’être soumis à l’examen et au vote en séance publique.

Jusqu’à la fin du XIX° siècle, la Chambre procède à la désignation d’une commission – par tirage au sort dans les bureaux où sont répartis de façon aléatoire tous les députés – afin d’examiner chaque projet ou proposition de loi. La commission disparaît après la remise de son rapport.

Le 17 novembre 1902 la Chambre adopte, sur le rapport de Jules-Louis Breton au nom de la commission du Règlement, une résolution créant 16« grandes commissions » permanentes constituées pour la durée de la législature, et au sein desquelles se répartissent tous les députés.

Même si les commissions ne sont pas censées doubler les ministères, leurs compétences correspondent de fait aux grands domaines de l’intervention de l’État, leur importance variant au gré des sujets qui occupent les gouvernements. Seule la commission du Budget, qui rapporte le projet annuel de loi de finances, reste soumise à un renouvellement annuel ; elle ne deviendra permanente qu’en février 1915. Par ailleurs, il reste possible de créer des commissions spéciales pour examiner des sujets ne relevant pas de la compétence des grandes commissions, leur durée de vie étant limitée au traitement de la question qui leur a été soumise. Enfin, les commissions d’enquête jouissent de droits particuliers : elles peuvent convoquer des témoins qui ne peuvent se dérober et doivent prêter serment.

La résolution adoptée par la Chambre le 1er juillet 1910 sanctionne l’importance accrue des groupes parlementaires : la désignation des grandes commissions se fait dès lors à la proportionnelle des groupes. Ce changement entraîne la constitution du groupe des « non-inscrits », seul moyen pour ceux qui ne se reconnaissent pas dans les groupes existants de participer au travail des commissions. La présidence des commissions les plus importantes, très convoitée, constitue souvent le passage obligé avant l’obtention du portefeuille ministériel convoité.

Le Sénat n’adoptera qu’en janvier 1921 ce système de grandes commissions permanentes.

2) Le rôle nouveau des commissions pendant la guerre

Après la réunion de la Chambre en session extraordinaire en décembre 1914, la session ordinaire de 1915 s’ouvre réglementairement le premier mardi de janvier 1915. Certains membres du gouvernement – Alexandre Millerand en particulier - souhaiteraient cependant que le Parlement se mette à nouveau en congé, ce qui laisserait les mains aux libres à l’exécutif et au commandement militaire pour conduire la guerre.

Mais la majorité des parlementaires, qui entend participer activement à la direction du pays en guerre, refuse de se mettre à nouveau en congé. Le gouvernement recule, dans le souci de ne pas rompre avec la légalité républicaine. Après quelques semaines de tractations (qui n’ont pas laissé de traces écrites), le ministre des Finances, Alexandre Ribot, annonce qu’il demandera chaque trimestre le vote des crédits nécessaires au fonctionnement de l’État et au financement de la guerre (douzièmes provisoires), ce qui revient à assurer au Parlement de siéger sans discontinuer.

Les députés n’en sont pas moins sensibles aux risques de renseigner l’ennemi en abordant en séance publique des questions relatives à la défense nationale. Il est donc admis que celles-ci seront débattues en commission, dont les séances sont secrètes. Le Président du Conseil et les ministres se rendent dès lors à leurs convocations pour répondre à leurs interrogations et subir parfois de véritables interpellations. Ainsi les commissions, tout en conservant leur rôle traditionnel d’examen des projets et propositions de loi, deviennent le lieu privilégié du contrôle de l’action gouvernementale.

L’importance de chacune des commissions correspond aux exigences de la guerre : si la commission du Budget garde évidemment toute son importance, celle de l’Armée s’impose comme un des principaux lieux de débats et d’information, suivie par celle de la Marine, des Affaires étrangères. La participation à ces commissions, au sein desquelles les groupes désignent leurs membres les plus notables, tend à créer deux catégories de députés : ceux qui y siègent bénéficient de plus d’informations et de pouvoir que les membres des commissions considérées de moindre intérêt. Afin de limiter ce phénomène et répondre à la grogne des députés qui en sont exclus, la Chambre limite en 1917 à trois mandats la participation aux grandes commissions.

 

ANNEXE : liste des commissions entre 1902 et 1920

 

1902 (16 commissions)

Commission des Douanes

Commission du Travail

Commission d’Assurance et de Prévoyance sociales

Commission de l’Agriculture

Commission des Travaux publics, des Chemins de fer et des Voies de communication

Commission de la Réforme judiciaire et de la Législation civile et criminelle

Commission de l’Armée

Commission de la Marine

Commission des Affaires extérieures, des Protectorats et des Colonies

Commission de l’Enseignement et des Beaux-Arts

Commission de l’Administration générale, départementale et communale, des Cultes et de la Décentralisation

Commission du Commerce et de l’Industrie

Commission de la Législation fiscale

Commission de l’Hygiène publique

Commission des Postes et des Télégraphes

Commission des Économies

 

1915 (19 commissions)

Commission de l’Administration générale, départementale et communale

Commission des Affaires extérieures, des protectorats et des colonies

Commission de l’Agriculture

Commission de l’Armée

Commission d’Assurance et de prévoyance sociales

Commission du Budget

Commission du Commerce et de l’industrie

Commission des Comptes définitifs et des économies

Commission des Douanes

Commission de l’Enseignement et des Beaux-Arts

Commission de l’Hygiène publique

Commission de la Législation civile et criminelle

Commission de la Législation fiscale

Commission de la Marine de guerre

Commission de la Marine marchande

Commission des Mines

Commission des Postes et des télégraphes

Commission du Travail

Commission des Travaux publics, des chemins de fer et des voies de communication

 

1920 (20 commissions)

Commission de l’Administration générale, départementale et communale

Commission des Affaires générales

Commission de l’Agriculture

Commission de l’Algérie, des colonies et des protectorats

Commission de l’Alsace-Lorraine

Commission de l’Armée

Commission d’Assurance et de prévoyance sociales

Commission du Commerce et de l’industrie

Commission des Comptes définitifs et des économies

Commission des Douanes et des conventions commerciales

Commission de l’Enseignement et des Beaux-Arts

Commission des Finances

Commission de l’Hygiène

Commission de la Législation civile et criminelle

Commission de la Marine marchande

Commission de la Marine militaire

Commission des Mines et de la force motrice

Commission des Régions libérées

Commission du Travail

Commission des Travaux publics et des moyens de communication

 

Voir aussi :

 Traité de droit politique, électoral et parlementaire d’Eugène Pierre et notamment dans l’édition de 1924 : « De la procédure dans les commissions ».