N° 2365 _______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 juin 2005 RAPPORT D'INFORMATION DÉPOSÉ PAR LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE POUR L'UNION EUROPÉENNE (1), sur le Livre vert sur une approche communautaire ET PRÉSENTÉ par M. thierry MARIANI, Député. ________________________________________________________________ (1) La composition de cette Délégation figure au verso de la présente page. La Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Jean-Pierre Abelin, René André, Mme Elisabeth Guigou, M. Christian Philip, vice-présidents ; MM. François Guillaume, Jean-Claude Lefort, secrétaires ; MM. Alfred Almont, François Calvet, Mme Anne-Marie Comparini, MM. Bernard Deflesselles, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Nicolas Dupont-Aignan, Jacques Floch, Pierre Forgues, Mme Arlette Franco, MM. Daniel Garrigue, Michel Herbillon, Marc Laffineur, Jérôme Lambert, Edouard Landrain, Robert Lecou, Pierre Lellouche, Guy Lengagne, Louis-Joseph Manscour, Thierry Mariani, Philippe Martin, Jacques Myard, Christian Paul, Didier Quentin, André Schneider, Jean-Marie Sermier, Mme Irène Tharin, MM. René-Paul Victoria, Gérard Voisin. SOMMAIRE _____ Pages INTRODUCTION 7 I. FAUT-IL RECOURIR AUX MIGRATIONS ECONOMIQUES POUR FAIRE FACE A NOS BESOINS DE MAIN D'œUVRE ? 9 A. Les caractéristiques actuelles de la France en matière de démographie, d'emploi et de flux migratoires 10 1) Une situation démographique atypique 10 2) Un taux de chômage élevé 12 3) Des flux migratoires réguliers 13 B. Accorder la priorité aux politiques d'emploi et de valorisation des métiers 13 1) Mobiliser les ressources disponibles 14 2) Développer une analyse prospective des besoins de main d'œuvre générés par le vieillissement de la population 15 C. Anticiper les flux générés par la libre circulation des travailleurs ressortissants des nouveaux Etats membres 18 1) Le régime transitoire prévu par le traité d'adhésion 18 2) Les enseignements de l'expérience britannique 19 3) La situation en Irlande et en Suède 21 4) L'opportunité d'un assouplissement expérimental et ciblé 22 II. UNE HARMONISATION EUROPEENNE DANS CE DOMAINE EST-ELLE NECESSAIRE ? 25 A. Une harmonisation nécessaire mais encadrée par des compétences européennes limitées 25 1) Une harmonisation nécessaire dans un espace sans frontières intérieures 25 2) Des compétences européennes limitées 26 a) Le respect du principe de subsidiarité 26 b) Le maintien de l'unanimité en matière d'immigration légale 27 B. La lente émergence d'une politique européenne d'immigration économique 28 1) L'échec de la proposition de directive relative à l'admission à des fins d'emploi 28 2) Le rejet de la proposition italienne de créer des quotas européens 30 3) Les directives relatives à l'admission des chercheurs et des étudiants 31 C. Le débat ouvert par le Livre vert sur les migrations économiques 31 1) Une démarche prudente et progressive 32 2) Les premières réactions des Etats membres et des partenaires sociaux 33 III. FAUT-IL DES « QUOTAS » EUROPEENS ? 37 A. Quelle procédure d'admission serait la plus adaptée ? 37 1) Les processus de sélection par les employeurs 38 a) Un système souple et fondé sur les besoins du marché du travail 38 b) La procédure française d'introduction de main d'oeuvre 39 2) Les processus de sélection par les pays d'accueil 41 3) Les systèmes mixtes 45 B. Une politique de quotas européens serait-elle efficace ? 47 1) Les quotas par pays et métiers : les exemples italien et espagnol 48 2) Les plafonds américain et autrichien 54 3) Les « niveaux cibles » canadiens 62 IV. RENFORCER LA COOPERATION AVEC LES PAYS TIERS 65 A. Le programme d'assistance et technique en faveur des pays tiers 66 B. Les enjeux du codéveloppement 67 C. Intensifier la coopération contre l'immigration clandestine 69 ANNEXE : Liste des personnes auditionnées 79 Mesdames, Messieurs, La Commission européenne a présenté, le 11 janvier 2005, un Livre vert sur la gestion des migrations économiques. Ce Livre vert a pour objet d'ouvrir une vaste consultation sur ce sujet, et devrait déboucher sur un programme d'action relatif à l'immigration légale d'ici la fin de l'année 2005, puis sur des propositions législatives. La Commission y souligne que l'Europe perdra vingt millions de travailleurs entre 2010 et 2030, et appelle à un recours accru aux migrations économiques. Le débat ainsi ouvert est difficile, mais nécessaire. Difficile, car les Etats membres sont très réticents à voir l'Union européenne empiéter sur leurs compétences dans ce domaine, comme l'a montré l'échec de la proposition de directive relative à l'admission d'étrangers aux fins d'emploi déposé par la Commission en 2001. Les réactions suscitées par la proposition de l'Italie de créer des quotas européens d'immigration, en septembre 2003, soulignent également la sensibilité du sujet. Nécessaire, parce que l'Europe doit anticiper les conséquences du choc démographique des prochaines décennies, dont l'ampleur variera selon les Etats membres mais qui les affectera tous. Pour la France, le Livre vert arrive au moment opportun. Le débat sur les quotas d'immigrés a en effet été relancé, à droite, par le président de l'UMP, M. Nicolas Sarkozy, en janvier 2005, et à gauche par le secrétaire national du parti socialiste chargé des questions de société, M. Malek Boutih. En dépit d'un taux de chômage particulièrement élevé, plus de 200 000 offres d'emplois restent non pourvues à l'Agence nationale de l'emploi (ANPE), et le recours à une immigration sélective et qualifiée pour faire face à ces tensions sur le marché du travail est de plus en plus souvent évoquée. Dans ce contexte, le Livre vert est une opportunité, pour la Délégation pour l'Union européenne, d'effectuer une analyse comparée des différentes politiques migratoires pratiquées par certains des pays de l'OCDE en matière d'immigration économique. Les procédures de sélection des travailleurs (demande économique, systèmes à points, etc.) et les politiques de « quotas » ou de limitations numériques menées par l'Autriche, le Canada, l'Espagne, les Etats-Unis, l'Italie et le Royaume-Uni, en particulier, sont riches d'enseignements pour notre pays. La France doit profiter de l'expérience de ses partenaires, tout en gardant à l'esprit que les « meilleures pratiques » ne peuvent être simplement transposées, car l'efficacité d'une politique migratoire donnée dépend largement de son contexte économique, social et historique. Le Livre est aussi l'occasion d'examiner l'opportunité du maintien des restrictions posées à la libre circulation des travailleurs des nouveaux Etats membres, car il convient d'exploiter pleinement les potentialités du marché du travail intérieur. L'expérience des trois Etats (Irlande, Royaume-Uni et Suède) qui n'ont pas fait usage de la période transitoire prévue par le traité d'adhésion est éclairante sur ce point. Ce rapport a pour objet de répondre aux principales questions posées par le Livre vert, et en particulier à quatre questions essentielles : - l'Europe et la France, en particulier, auront-elles besoin de recourir aux migrations économiques pour faire face à leurs besoins de main d'œuvre ? - une harmonisation européenne dans ce domaine est-elle nécessaire ? - des quotas européens d'immigrés sont-ils souhaitables ? - comment renforcer la coopération avec les pays d'origine et de transit en matière de migrations ?
La Commission européenne part du constat qu'entre 2010 et 2030, aux taux d'immigration actuels, la population active de l'Europe des 25 diminuera de 20 millions de travailleurs. Elle souligne que, bien que l'immigration en soi ne constitue pas une solution au vieillissement de la population, des flux d'immigration plus soutenus pourraient être de plus en plus nécessaires pour couvrir les besoins du marché européen du travail et pour assurer la prospérité de l'Europe. Le recours aux migrations internationales pour faire face aux conséquences du vieillissement démographique est évoqué depuis la publication, en mars 2000, du rapport de la division de la population des Nations unies sur les « migrations de remplacement »(1). Ce rapport, très médiatisé et critiqué par de nombreux démographes français et européens, estimait que pour maintenir constant le ratio des 15-64 ans sur les 65 ans ou plus constaté en 1995 (il était alors de 4,4), l'Europe dans son ensemble aurait besoin de...1,4 milliard d'immigrants entre 1995 et 2050 ! Comme le souligne M. François Héran, directeur de l'Institut national des études démographiques (INED), l'objet de ce rapport était sans doute de démontrer, par un raisonnement par l'absurde, que la relève des retraités par les nouveaux immigrants ne pourra pas compenser le vieillissement(2). Les bouleversements démographiques auxquels l'Union européenne sera confrontée au cours des prochaines décennies sont cependant incontestables, et exigent de mener une réflexion prospective sur les moyens d'y faire face. Dans un autre Livre vert, rendu public en mars 2005, sur les changements démographiques(3), la Commission souligne ainsi qu'en 2030, deux personnes actives (15-65 ans) devront s'occuper d'une personne inactive (plus de 65 ans). L'Europe comptera 18 millions d'enfants et de jeunes de moins qu'aujourd'hui, le taux de fertilité de l'UE étant tombé à 1,48 en 2003, bien en deçà du taux requis pour assurer le remplacement de la population (2,1 enfants par femme). Pour compenser la perte de population active en âge de travailler, il nous faudra réaliser un taux d'emploi de plus de 70 %. Toutefois, ce constat uniforme masque les disparités existant entre les Etats membres. La France, en particulier, se trouve dans une situation atypique, presque asymétrique à celle des autres Etats de l'Union, dont les spécificités doivent être davantage prises en compte par la Commission dans ses propositions. A. Les caractéristiques actuelles de la France en matière de démographie, d'emploi et de flux migratoires A la différence de la plupart des autres pays européens, la France bénéficie d'un solde démographique positif et de l'entrée, de droit, sur le marché du travail d'environ 100 000 étrangers par an, arrivés en France pour des motifs familiaux. Elle connaît, par ailleurs, un taux de chômage particulièrement élevé, supérieur au taux moyen de l'Union européenne. 1) Une situation démographique atypique La situation démographique de la France est atypique par rapport aux autres Etats membres. La contribution de l'accroissement naturel (c'est-à-dire l'excédent des naissances sur les décès, estimé à 1,13 million entre 1999 et le 1er janvier 2004) à la croissance de la population y est en effet largement supérieure au solde migratoire (c'est-à-dire la différence entre les entrées et les sorties du territoire, estimée à 410 000 personnes sur la même période)(4), alors que les flux migratoires représentent les neuf dixièmes de la croissance de la population dans le reste de l'Europe. Sans immigration, l'Allemagne, la Grèce et l'Italie, par exemple, connaîtraient une baisse de leur population. L'indicateur conjoncturel de fécondité français (c'est-à-dire le nombre moyen d'enfants par femme) est le plus élevé d'Europe occidentale après l'Irlande (191,6 enfants pour 100 femmes en France, 198 en Irlande, moins de 130 en Espagne, Grèce et Italie, 148 en moyenne dans l'Union à 25)(5). Taux de croissance de la population
Sources : Eurostat, Conseil de l'Europe, US Bureau of the census - International Program Center. Du point de vue de l'emploi, la France connaît un taux de chômage élevé et persistant (10,2 % en mars 2005), particulièrement chez les jeunes (17,4 % chez les 15-29 ans) et les femmes (11,1 % contre 9 % pour les hommes)(6). Ce taux est supérieur au taux moyen de l'Union européenne à 25 (8,9 %), et en particulier, aux taux constatés en Irlande (4,3 %), en Autriche (4,6 %) et au Royaume-Uni (4,7 %). Taux de chomage (%) en fevrier 2005, par ordre croissant
Source : Eurostat. Les immigrés présents en France connaissent en outre un taux de chômage important, largement supérieur à la moyenne nationale : 17,4 % de la population active immigrée (19 % pour les étrangers)(7) étaient au chômage en 2004, contre un taux de 9,2 % pour la population active non immigrée, selon l'enquête Emploi de l'INSEE de 2004. Le surtaux de chômage des immigrés dont l'âge est compris entre 25 et 39 ans est particulièrement important : 21 % contre 9,4 % pour la même classe d'âge au sein de la population active non immigrée. Au sein de la population étrangère, le taux de chômage des Maghrébins est particulièrement fort : 30 % pour les Algériens et les Marocains en 2003(8). Le taux d'activité de l'ensemble de la population immigrée (55,2 %) est, par ailleurs, légèrement inférieur à celui de la population non immigrée (55,4 %), voire sensiblement inférieur pour les personnes dont l'âge est compris entre 25 et 39 ans (89,2 % pour les hommes immigrés de 25-39 ans, contre 94,5 % pour la population non immigrée, et 59,7 % pour les femmes de 25-39 ans contre 81,8 % pour la population non immigrée). 3) Des flux migratoires réguliers La France, pays d'immigration ancienne, connaît déjà un flux régulier d'étrangers qui entrent pour s'y établir à titre permanent et accèdent au marché du travail. Si le nombre d'étrangers admis en France au titre du travail est faible (environ 6 500 titres de séjour pour un an délivrés à ce titre en 2003), près de 100 000 étrangers, admis à un autre titre (principalement au titre du regroupement familial et de l'asile, ou en tant que membres de famille de Français) accèdent chaque année au marché du travail français(9). L'importance de cette immigration « inertielle », non discrétionnaire puisqu'elle constitue un droit pour les personnes concernées, doit être prise en compte. Ces caractéristiques françaises conduisent, au moins dans un premier temps, à privilégier les politiques de retour à l'emploi et d'insertion professionnelle, plutôt qu'un recours à l'immigration de travail. Cette orientation ne dispense cependant pas de mener une étude prospective des besoins de main d'œuvre futurs auxquels l'économie française devra faire face à l'horizon 2015-2020, et d'apprécier dans quelle mesure une intensification des flux migratoires serait nécessaire pour y répondre. 1) Mobiliser les ressources disponibles Dans un premier temps, les caractéristiques françaises et, en particulier, notre taux de chômage élevé, conduisent à privilégier des politiques de retour à l'emploi et d'insertion professionnelle, notamment par des actions de formation et de revalorisation de certains métiers, en particulier dans le bâtiment, les transports, l'hôtellerie et la restauration. La priorité est de mobiliser la main d'œuvre disponible, notamment à travers le plan national de lutte contre les difficultés de recrutement (« Objectif 100 000 emplois ») et le plan de cohésion sociale. La France ne connaît en effet actuellement pas de pénuries globales de main d'œuvre, mais rencontre des difficultés de recrutement dans certaines branches professionnelles. Le plan national de lutte contre les difficultés de recrutement « Objectif 100 000 Emplois » Des secteurs et des métiers connaissent des difficultés de recrutement importantes, en dépit de l'existence d'un chômage élevé. En 2004, 300 000 offres d'emploi n'étaient ainsi pas pourvues faute de candidats. Présenté par M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, en février 2004, le plan « Objectif 100 000 emplois » vise à réduire d'un tiers en un an le nombre d'offres durablement non pourvues. Ce plan national de lutte contre les difficultés de recrutement fixe à l'ANPE l'objectif d'augmenter de 3 points le taux de satisfaction des offres d'emplois et à l'AFPA d'inciter davantage de personnes à se former aux métiers sous tension. Il prévoit d'élaborer et de signer avec les branches professionnelles des accords nationaux d'incitation permettant d'améliorer l'attractivité des filières ou métiers concernés. Il engage le service public de l'emploi à bâtir des plans d'action régionaux permettant de pourvoir au moins 20 % d'offres d'emplois supplémentaires sur les métiers connaissant des difficultés de recrutement. Les métiers de bouche, le bâtiment, les transports et l'aide à domicile ont été considérés comme les secteurs prioritaires, dans lesquels les tensions sont les plus fortes. Parmi les métiers les plus concernés figurent notamment les métiers de maçon, de cuisinier, de serveur en restauration, d'électricien du bâtiment et de conducteur routier pour le transport de marchandises. Au 31 mars 2005, le plan 100 000 emplois a permis de réduire à 221 500 le nombre d'offres non satisfaites. Cette orientation est confortée par la position réservée de certaines fédérations professionnelles à l'égard d'un développement trop important du recours à la main d'œuvre étrangère. La Fédération française du bâtiment (FFB), par exemple, souhaite accorder la priorité à une politique volontariste visant à rendre la profession plus attractive, à favoriser le retour à l'emploi et à adapter les formations aux besoins. Compte tenu de l'important investissement réalisé en matière de formation professionnelle, le premier objectif consiste à fidéliser les salariés. La FFB ne préconise une ouverture de nos frontières aux étrangers que si toutes les autres solutions ont été envisagées dans le bassin d'emploi concerné et à condition que cette immigration ciblée soit placée sous la supervision des directions départementales de l'emploi. La Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), pour sa part, souligne que les besoins les plus importants concernent les travailleurs saisonniers et estime qu'une projection des besoins de main d'œuvre est très difficile, en raison des fortes variations conjoncturelles du secteur agricole. 2) Développer une analyse prospective des besoins de main d'œuvre générés par le vieillissement de la population Il est cependant nécessaire de mener une analyse prospective concernant la nécessité de recourir ou non à la main d'œuvre étrangère à l'avenir, dans la perspective des fortes évolutions démographiques que la France est appelée à connaître dès la fin de la présente décennie. La France sera en effet elle aussi confrontée, au cours des prochaines décennies, à un fléchissement de sa croissance démographique et à un vieillissement de sa population, qui doivent être anticipés. a) Les conclusions du rapport Héran Le Commissariat général du Plan a déjà organisé, de mars à décembre 2001, un séminaire d'études consacré à l'immigration, au marché du travail et à l'intégration, sous la présidence de M. François Héran, directeur de l'INED. Le rapport, très complet, produit à partir de ce séminaire conclut que ce n'est pas l'immigration qui résoudra le problème du vieillissement et qu'aucune raison d'ordre démographique ne justifie que l'on encourage le développement massif de l'immigration dans les décennies à venir, à condition de continuer à accueillir des immigrants au rythme d'environ 120 000 par an en migration nette. La France est en effet le seul grand pays d'Europe qui pourrait maintenir les effectifs de sa population d'âge actif sur le demi-siècle qui vient, si sa fécondité reste voisine du seuil de remplacement et à solde migratoire constant(10). b) Les travaux du groupe Kazan A la demande du ministère des finances et de la direction de la population et des migrations, le Commissariat général du Plan a entamé une seconde phase de réflexion. Un groupe de travail sur la prospective de la population active, des besoins de main d'œuvre et des migrations (appelé Kazan) a été créé, avec pour mission de conduire une expertise sur les politiques à mener pour répondre au « choc démographique » qui s'annonce. Il a commencé ses travaux en septembre 2004 et rendra ses conclusions à la fin de l'année 2005. Le groupe s'attachera, dans un premier temps, à préciser l'état des besoins de main d'œuvre globaux, sectoriels et locaux, auxquels pourrait faire face l'économie française à l'horizon 2015-2020 en raison du vieillissement de sa population. Une fois ce diagnostic posé, il appréciera dans quelle mesure des politiques ciblées sur l'activité des résidants (formation des jeunes, comportement d'activité des seniors et des femmes, etc.) et une intensification des flux migratoires seraient en mesure de répondre à ces besoins. Ces travaux sont menés en collaboration avec le groupe de prospective des métiers et des qualifications (PMQ) du Plan, qui fournira prochainement une estimation des prévisions de renouvellement jusqu'en 2015 pour 80 familles professionnelles. Selon les premières conclusions du groupe Kazan(11), fondées sur les projections de l'INSEE, la population française devrait augmenter de 7 millions de personnes à l'horizon 2040. Cette augmentation globale masque cependant d'importantes divergences entre classes d'âge. La population des moins de vingt ans déclinera de façon continue, alors que la population âgée de plus de 60 ans augmentera fortement, passant de 12 millions aujourd'hui à près de 20 millions d'individus à l'horizon 2030. La population des individus d'âge actif (20-64 ans) augmentera jusqu'en 2011 de près de 2,5 millions, avant de diminuer pour retrouver son niveau actuel vers 2050. A taux de chômage constant et en supposant de légères évolutions des taux d'activité(12), la population active devrait dès lors stagner jusqu'en 2010, puis diminuer à un rythme croissant, qui atteindra - 80 000 par an en 2020. Les dispositions de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites pourraient retarder ce processus, la diminution du nombre d'actifs intervenant alors à un rythme inférieur, de 30 000 personnes par an. Sur la base de ces projections, le groupe estime que le vieillissement démographique pourrait effectivement amplifier les difficultés de recrutement rencontrées dans certains secteurs. Ces besoins de main d'œuvre devraient cependant rester très différents selon les domaines d'activité. Dans l'agriculture et l'hôtellerie- restauration de tourisme, des besoins structurels de travailleurs saisonniers devraient apparaître. Dans le bâtiment, des tensions pourraient apparaître dans certains bassins d'emploi mais devraient rester temporaires et maîtrisés. Dans l'informatique, Syntec Informatique (chambre syndicale des SSII(13) et des éditeurs de logiciels) estime que la prévision des besoins est très difficile, car ils sont très fluctuants et tributaires de la mobilité internationale des informaticiens. C. Anticiper les flux générés par la libre circulation des travailleurs ressortissants des nouveaux Etats membres Les travailleurs ressortissants de huit nouveaux Etats membres (Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Slovaquie, Slovénie et République tchèque) ne bénéficient actuellement pas de la libre circulation. Il est paradoxal d'engager un débat sur l'opportunité de recourir davantage à la main d'œuvre étrangère en provenance des pays tiers, sans même évoquer, comme le fait la Commission, la levée de ces restrictions et les flux qu'elle serait susceptible de générer. Les nouveaux Etats membres concernés n'ont d'ailleurs pas manqué de le souligner, lors des premiers débats suscités par le Livre vert au Conseil de l'Union européenne. 1) Le régime transitoire prévu par le traité d'adhésion Le traité d'adhésion des dix nouveaux Etats membres, signé à Athènes le 16 avril 2003, prévoit une période de transition durant laquelle les travailleurs salariés ressortissants de ces pays, à l'exception de Chypre et de Malte, ne bénéficieront pas immédiatement de la liberté de circulation. Cette période de transition, d'une durée maximale de sept ans à compter du 1er mai 2004, repose un mécanisme en trois étapes (dit 2+3+2) : - une première période de deux ans (qui prendra fin le 1er mai 2006), au terme de laquelle le Conseil doit réexaminer le fonctionnement des dispositions transitoires sur la base d'un rapport de la Commission ; - en fonction des enseignements tirés de ce bilan, les anciens Etats membres pourront individuellement décider de prolonger ces mesures transitoires pour une deuxième période de trois ans, et notifieront cette décision à la Commission européenne ; - les Etats membres ayant maintenu des restrictions à la libre circulation des travailleurs à la fin de cette période de cinq ans pourront prolonger leur application pendant encore deux ans, si leur marché du travail subit ou est menacé de subir des perturbations graves. Les ressortissants des huit Etats concernés peuvent en revanche circuler librement sur le territoire de l'Union dès lors qu'ils n'exercent pas une activité salariée. Les étudiants, les chercheurs, les travailleurs indépendants et les prestataires de services ne souffrent donc d'aucune restriction (sauf en Allemagne et en Autriche, où des restrictions à la liberté de prestation de services dans certains secteurs jugés sensibles - tels que la construction ou le nettoyage de bâtiments - ont été prévues). Ce n'est pas la première fois que des mesures transitoires de ce genre sont prévues lors de l'adhésion de nouveaux Etats : ce fut le cas pour la Grèce (période transitoire de sept ans avant l'application de la liberté de circulation des travailleurs) et pour l'Espagne et le Portugal (période transitoire de sept ans également, finalement ramenée à six ans par le Conseil en 1991). Les huit nouveaux Etats membres concernés ont le droit d'appliquer des mesures équivalentes concernant l'accès des ressortissants des anciens Etats membres à leur marché du travail. En pratique, seuls trois pays ont décidé d'ouvrir l'accès à leur marché du travail dès le 1er mai 2004 : l'Irlande, le Royaume-Uni et la Suède. Plusieurs enseignements peuvent être tirés de leur expérience. 2) Les enseignements de l'expérience britannique Au Royaume-Uni, les travailleurs ressortissants des pays d'Europe centrale et orientale concernés ont accès librement au marché du travail, mais doivent s'enregistrer auprès du ministère de l'intérieur. Une procédure d'enregistrement spécifique de ces travailleurs (Worker Registration Scheme) a été mise en place (l'enregistrement coûte 50 livres sterling). Leur accès à certaines prestations sociales (dont l'inscription au chômage) en cas de perte d'emploi est subordonné à une période de douze mois d'activité continue, en raison des craintes que ne se développe un « tourisme social » (welfare shopping). Le Home Office britannique publie les statistiques concernant ces travailleurs dans un rapport trimestriel. Selon le dernier rapport disponible, en date du 26 mai 2005, 176 000 immigrants en provenance des huit nouveaux Etats membres sont venus travailler au Royaume-Uni entre le 1er mai 2004 et le 31 mars 2005(14). Plus de 20 000 enregistrements mensuels ont été effectués au cours des trois premiers mois suivant l'élargissement (mai à juillet 2004), puis le rythme semble s'être stabilisé entre 10 000 et 14 000 personnes par mois. Les Polonais représentent la majorité des travailleurs (56 %), suivis par les Lituaniens (15 %) et les Slovaques (11 %). Plus de huit travailleurs sur dix (82 %) ont entre 18 et 34 ans, et 56 % sont des hommes. Le nombre de personnes à charge accompagnant ces travailleurs est faible (11 476, soit environ 7 %). Les dix professions les plus souvent occupées par ces travailleurs sont celles d'ouvriers (22 %), de conditionneurs (7 %), d'assistants en cuisine et restauration (7 %), de serveurs (5 %), d'agents de nettoyage et d'employés domestiques (5 %), de manutentionnaires (5 %), d'ouvriers agricoles (4 %), de femmes de chambre (4 %), d'aides-soignants (3 %) et de vendeurs (3 %). Une petite majorité (52 %) d'entre eux exerce un emploi permanent. Un cinquième (21 %) s'est établi à Londres, suivi par l'Anglia (17 %) et la région du Centre (11 %). Il convient de relever que 19 % au moins des personnes enregistrées étaient déjà présentes sur le territoire britannique avant l'élargissement (cette proportion est en réalité sans doute plus importante - le gouvernement britannique l'estime à près d'un tiers, 15 % des travailleurs n'ayant pas précisé leur date d'arrivée). Une forte proportion des travailleurs enregistrés travaillait donc déjà en Grande-Bretagne avant l'élargissement, soit légalement en vertu des accords d'association conclus avec les pays candidats avant leur adhésion, soit illégalement comme travailleurs clandestins. Dans ce dernier cas de figure, l'adhésion a entraîné une forme de régularisation. Selon le ministre de l'immigration Tony McNulty, la contribution des travailleurs des nouveaux Etats membres à l'économie britannique pourrait être estimée à 500 millions de livres sterling. Une étude de l'entreprise Manpower confirme que les ressortissants des nouveaux Etats membres ont permis de répondre aux pénuries de main d'œuvre rencontrées dans certains secteurs de l'économie britannique(15). Les chiffres constatés au Royaume-Uni sont très largement supérieurs aux prévisions du gouvernement britannique, qui estimait entre 5 000 et 13 000 par an le nombre d'immigrants en provenance des nouveaux Etats membres. 3) La situation en Irlande et en Suède L'Irlande permet également aux travailleurs des huit nouveaux Etats membres visés par la période transitoire d'accéder à son marché du travail. Comme au Royaume-Uni, le gouvernement irlandais a durci les conditions d'accès des étrangers (y compris des ressortissants des nouveaux Etats membres) aux aides sociales, en introduisant un « test de résidence habituelle » (qui exige, sauf preuve contraire, une période de deux ans de résidence continue en Irlande pour avoir droit aux aides sociales). L'Irlande n'impose en revanche pas aux travailleurs des nouveaux Etats membres de s'enregistrer auprès du ministère de l'intérieur. L'immatriculation auprès de la sécurité sociale permet cependant de comptabiliser le nombre de ressortissants de ces pays ayant accédé au marché de l'emploi irlandais, grâce à leur « numéro personnel de service public » (Personal Public Service Number). Les chiffres constatés sont encore plus impressionnants qu'au Royaume-Uni. Selon les autorités irlandaises, 84 918 travailleurs des nouveaux Etats membres ont été enregistrés entre le 1er mai 2004 et le 30 avril 2005, pour une population totale de 4 millions d'habitants (rapporté à la population, c'est comme si plus de 1,2 million de ces travailleurs étaient venus en France). La moitié provenait de Pologne, suivie par la Lituanie, la Lettonie et la Slovaquie(16). Deux tiers des immigrants ont moins de 31 ans. Les chiffres suédois sont en revanche bien plus modestes : d'après le centre national suédois des statistiques, la Suède a accueilli 2 552 immigrants (pour une population de près de 9 millions d'habitants) en provenance des nouveaux Etats membres en 2004 (contre 1 143 en 2003, soit plus qu'un doublement). Les enseignements pouvant être tirés des expériences britannique et irlandaise pour la France, en ce qui concerne l'évaluation des flux générés par la libre circulation des travailleurs de ces Etats, doivent cependant être relativisés. Le dynamisme des économies britannique et irlandaise, combiné au fait qu'ils étaient les seuls, avec la Suède, à avoir ouvert leur marché du travail, ont rendu ces deux pays particulièrement attractifs. Ils conduisent cependant à ne pas sous-estimer l'importance des flux qui seront générés par la levée des restrictions actuelles à la libre circulation des travailleurs. 4) L'opportunité d'un assouplissement expérimental et ciblé La France a décidé de ne pas accorder la libre circulation aux travailleurs ressortissants des huit nouveaux Etats membres couverts par la période transitoire. Plusieurs raisons cumulatives justifient ce choix : l'incertitude concernant les flux de main d'œuvre générés par l'ouverture (qu'aucune étude n'a cerné de façon sérieuse), la situation du marché de l'emploi, et la situation démographique française, plus favorable que celle de la plupart de nos partenaires européens(17). La libre prestation de services, par des entreprises implantées dans les nouveaux Etats membres, est en revanche autorisée sans restriction depuis le 1er mai 2004 (à la différence de la situation en Allemagne et en Autriche). En principe, le droit du travail français, le salaire minimum afférent et les conventions collectives appropriées s'appliquent à l'entreprise prestataire, conformément à la directive du 16 décembre 1996 sur le détachement des travailleurs et au règlement 1408/71(18). L'application de ces textes est cependant problématique, surtout en l'absence de coopération efficace de la part des autorités du pays d'origine. Selon les représentants de certaines professions, les faux détachements et les abus seraient fréquents, en particulier dans les secteurs de l'agriculture, du bâtiment et du transport routier, et le « dumping social » qui en résulte est devenu une préoccupation majeure des intéressés. Dans ces conditions, il est paradoxal d'avoir autorisé sans délai la libre prestation de services, tout en imposant une période transitoire pour l'accès au marché du travail. Le Gouvernement français a annoncé qu'il n'envisage pas actuellement de faire usage de la troisième période supplémentaire de deux ans (1er mai 2009 - 1er mai 2011) au cours de laquelle des restrictions peuvent être maintenues. Des assouplissements ont par ailleurs été introduits pour les jeunes professionnels en formation âgés de 18 à 35 ans et pour les travailleurs saisonniers, par le biais d'accords bilatéraux conclus avec certains des nouveaux Etats membres, tels la Pologne et la Hongrie. Les travailleurs des nouveaux Etats membres autorisés à travailler en France bénéficient, en matière sociale, d'une totale égalité de traitement avec les nationaux. Des réflexions sont en cours concernant la décision qui sera prise à l'issue de la première période de deux ans (soit le 1er mai 2006). Un groupe de travail franco-polonais sur la mobilité de la main d'œuvre a été mis en place en décembre 2004, afin d'étudier les possibilités d'assouplissement de la circulation des travailleurs salariés, et notamment l'opportunités d'une ouverture sectorielle anticipée du marché du travail français. A titre expérimental, une levée partielle - limitée à certains métiers et à certaines régions - des restrictions a été envisagée, sous réserve d'être accompagnée par un renforcement de la coopération entre les autorités françaises et polonaises en matière de lutte contre le travail illégal (en particulier en ce qui concerne les travailleurs employés par des prestataires de services polonais en France). Les métiers concernés seraient ceux où les tensions sur le marché du travail sont les plus fortes (maçons, couvreurs, cuisiniers, serveurs en restauration, conducteurs routiers), et les régions retenues en fonction du même critère. Ces réflexions n'ont pas abouti sur des actions concrètes, pour l'instant. Un tel assouplissement des restrictions à la libre circulation, ciblé et à titre expérimental, est souhaitable, compte tenu des difficultés de recrutement rencontrées dans certains secteurs. Ce n'est, en tout état de cause, qu'une fois la libre circulation des travailleurs salariés pleinement réalisée qu'un recours accru à la main d'œuvre en provenance des pays tiers devrait être envisagé. Comme pour la main d'œuvre de ces pays, ce recours à la main d'œuvre devra lui aussi favoriser une immigration choisie en fonction des besoins réels de l'économie française. La première des questions posées par le Livre vert de la Commission sur la gestion des migrations économiques est celle de la nécessité d'une harmonisation en la matière. Si la nécessité d'un certain degré d'harmonisation n'est guère contestable, il convient d'en souligner les limites. Les compétences de l'Union dans ce domaine sont en effet limitées, et leur exercice difficile compte tenu de la règle de l'unanimité. Les échecs précédents de la proposition de directive relative à l'admission des ressortissants de pays tiers à des fins d'emploi, puis de la proposition italienne d'instaurer des quotas européens, soulignent combien le débat ouvert par le Livre vert sera difficile. Il apparaît peu probable qu'il se concrétise par l'adoption de textes ambitieux dans un avenir proche. Une politique européenne d'immigration économique est nécessaire, mais étroitement encadrée par les traités, qui ne confèrent à l'Union que des compétences limitées dans ce domaine. 1) Une harmonisation nécessaire dans un espace sans frontières intérieures Une politique européenne d'immigration économique est nécessaire : dans un espace sans frontières intérieures, l'admission de ressortissants de pays tiers dans un Etat membre affecte en effet les autres Etats membres. Certes, ces ressortissants n'ont pas, actuellement, le droit d'accéder au marché de l'emploi des autres Etats membres : la directive du 25 novembre 2003 relative au statut des résidents de longue durée, en particulier, n'oblige pas les autres Etats membres à accorder à ces résidents le droit d'accéder à leur marché du travail (art. 14 § 3). Mais les ressortissants de pays tiers peuvent voyager au sein de l'espace Schengen, fournir des prestations de services dans un autre Etat membre, voire y résider une fois acquis le statut de résident de longue durée. Ces déplacements secondaires, ainsi que les risques de distorsions de concurrence dans l'emploi des travailleurs migrants (pour les travailleurs saisonniers, par exemple), rendent nécessaire une politique européenne d'immigration. Il s'agit bien d'une question d'intérêt commun, qui requiert un certain degré d'harmonisation. 2) Des compétences européennes limitées Cette nécessaire harmonisation est cependant encadrée, les compétences de l'Union étant limitées et leur exercice difficile en raison de l'application de la règle de l'unanimité. a) Le respect du principe de subsidiarité Les compétences de l'Union en la matière sont limitées. Certes, l'article 63 § 3 du traité instituant la Communauté européenne permet au Conseil d'adopter des mesures relatives aux « conditions d'entrée et de séjour, ainsi que des normes concernant les procédures de délivrance par les Etats membres de visas et de titres de séjour de longue durée », mais il ne vise pas spécifiquement l'admission à des fins d'emploi et l'accès au marché du travail des ressortissants de pays tiers. La question de l'accès à l'emploi des ressortissants de pays tiers a en effet disparu du traité, alors qu'elle figurait parmi les questions d'intérêt commun sur lesquelles le conseil pouvait adopter des résolutions en vertu du traité de Maastricht (art. K.1.3)(19). Le projet de traité constitutionnel, que les Français ont rejeté le 29 mai dernier, rappelle d'ailleurs, à la demande de l'Allemagne lors de la Convention, que « cet article n'affecte pas le droit des Etats membres de fixer les volumes d'entrée des ressortissants de pays tiers, en provenance de pays tiers, sur leur territoire dans le but d'y rechercher un emploi salarié ou non salarié » (art. III-267 § 5). Cet alinéa encadrerait très fortement la politique européenne d'immigration économique, et sa portée est d'ailleurs difficile à évaluer : jusqu'à quel point est-il possible de légiférer sur les conditions d'entrée et de séjour à des fins d'emploi sans affecter les volumes d'entrée des ressortissants des pays tiers à cette fin ? On peut d'ailleurs également s'interroger sur l'existence, dans le traité CE actuel, d'une telle limite : cet alinéa ne fait-il que refléter, en le précisant, l'état du droit actuel, ou constitue-t-il une nouvelle limitation, introduite à titre de compromis en l'échange de l'acceptation par l'Allemagne du passage à la majorité qualifiée et à la codécision en matière d'immigration légale ? La Commission semble considérer que cette limite existe déjà dans le traité en vigueur, puisqu'elle « reconnaît pleinement que les décisions sur le nombre des migrants économiques pouvant être admis dans le but de rechercher un emploi relèvent des Etats membres ». Dans ces conditions, les propositions qu'elle est susceptible de présenter ne devraient apporter qu'un degré d'harmonisation limité, conformément au principe de subsidiarité. b) Le maintien de l'unanimité en matière d'immigration légale La politique européenne d'immigration légale reste régie par l'unanimité. L'Allemagne et l'Autriche se sont en effet opposées, en novembre 2004, à ce que la décision mettant en œuvre la « clause passerelle » prévue par le traité de Nice (dont l'article 67 § 2 TCE permet au conseil de décider, à l'unanimité, de passer à la majorité qualifiée et à la codécision en matière d'immigration) vise l'immigration légale. Seuls l'immigration illégale et le contrôle aux frontières sont donc passés, à compter du 1er janvier 2005, à la majorité qualifiée, en application de la décision du Conseil du 22 décembre 2004(20). Chaque Etat continue, en matière d'immigration légale, à détenir un droit de veto, et l'Allemagne a jusqu'ici refusé toute harmonisation concernant l'accès des étrangers à son marché du travail, en raison de l'opposition de certains Länder et de la sensibilité de ce sujet en Allemagne, où l'adoption de la loi du 5 août 2004 sur l'immigration a été très difficile. Les chances de parvenir à une véritable politique européenne d'immigration économique sont, dans ce contexte, plutôt limitées. Ce cadre institutionnel et ses limites expliquent que le dossier de l'immigration économique n'ait que peu progressé depuis l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, en 1999. La proposition de directive déposée par la Commission en 2001 a en effet été repoussée sine die par les Etats membres, de même que la proposition italienne de mettre en place des quotas d'immigration européens. Deux textes sectoriels ont cependant été adoptés récemment, sur l'admission des étudiants et des chercheurs. Ces succès relatifs démontrent qu'une approche sectorielle, moins ambitieuse, aurait sans doute davantage de chances d'aboutir. 1) L'échec de la proposition de directive relative à l'admission à des fins d'emploi La Commission a présenté, en 2000, une première communication(21) abordant l'immigration économique et prônant une réouverture des canaux de l'immigration légale aux travailleurs, afin de faire face aux pénuries de main d'œuvre futures de l'Union européenne. Dans une deuxième communication(22), présentée en 2001, la Commission suggérait d'appliquer la méthode ouverte de coordination, utilisée en matière d'emploi et pour la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne (qui vise à faire de l'Union « l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde » d'ici 2010), à la politique d'immigration. Cette méthode ouverte de coordination reposerait sur l'adoption d'orientations pluriannuelles européennes et l'élaboration de plans d'action nationaux précisant les objectifs pour chacun des Etats membres. Ces plans auraient comporté deux parties, la première étant un bilan portant sur les résultats globaux de la politique d'immigration écoulée, et la seconde une présentation des actions mises en œuvre pour atteindre les objectifs de la période en cours (avec des projections sur le nombre et les qualifications des travailleurs admis). Les Etats membres ont rejeté cette proposition d'étendre la méthode ouverte de coordination à l'immigration. La Commission a également déposé, le 11 juillet 2001, une proposition de directive relative à l'admission d'étrangers aux fins d'emploi(23). Ce texte visait à définir les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers en vue d'un emploi salarié ou de l'exercice d'une activité indépendante, ainsi qu'à déterminer les règles relatives aux procédures de délivrance des titres de séjour et de travail concernés(24). Le mécanisme d'admission proposé reposait sur un examen au cas par cas des demandes, la principale condition d'appréciation étant que le poste n'ait pas pu être pourvu par une personne appartenant déjà légalement au marché du travail. L'offre d'emploi devait, à cette fin, être publiée au moins quatre semaines par les services d'emploi de plusieurs Etats membres ou le réseau européen EURES(25). Les Etats membres confrontés à une pénurie de main d'œuvre auraient pu appliquer d'autres systèmes, tels que des programmes de « carte verte » ou la fixation d'un seuil de salaire à partir duquel la procédure serait accélérée. Les permis délivrés auraient une validité maximale de trois ans, renouvelables pour une période n'excédant pas trois ans. Les discussions sur ce texte se sont rapidement enlisées, en raison des très fortes réticences de la plupart des Etats membres. La plupart des délégations l'ont en effet jugé trop précis, car il détaillait la procédure d'accès au marché du travail, bien au-delà de la seule affirmation des principes généraux qui seuls relèvent du niveau européen. La France, comme la plupart des autres Etats membres, a considéré cette proposition contraire au principe de subsidiarité, parce que conduisant à une politique d'immigration de travail gérée à Bruxelles. 2) Le rejet de la proposition italienne de créer des quotas européens Le débat a rebondi sous la présidence italienne, au cours du second semestre 2003. L'Italie a proposé, lors du Conseil « Justice et Affaires intérieures » informel des 12 et 13 septembre 2003, à ses partenaires d'additionner au niveau européen des quotas d'immigration légale, fixés par chaque Etat membre en fonction de ses besoins. Ces quotas seraient utilisés par l'Union dans les négociations d'accords de réadmission avec les pays d'origine et de transit, sur le modèle italien. Il se serait donc agi de quotas par pays d'origine et par catégories d'immigrants (niveau d'études, secteurs d'activité, etc.). De nombreux Etats s'y sont opposés, dont la France et l'Allemagne, en rappelant leur hostilité de principe aux quotas. Le Président de la République, M. Jacques Chirac, a ainsi rappelé, lors du Conseil européen de Bruxelles, le 17 octobre 2003, que « la position de la France et de l'Allemagne et d'un certain nombre d'autres pays est, a priori, hostile au système même des quotas ». Le Conseil européen a donc simplement accepté qu'une étude sur les liens entre immigration légale et immigration clandestine (le terme « quotas » ne figurant pas dans les conclusions du Conseil européen) soit confiée à la Commission. L'étude rendue par la Commission en juin 2004 souligne les inconvénients de quotas préférentiels réservés aux pays tiers, sur le modèle italien (manque de souplesse, difficultés diplomatiques, discrimination pour les ressortissants d'autres pays tiers, etc.) et constate l'absence de consensus à ce sujet entre les Etats membres(26). La création de quotas ne figure donc pas parmi ses recommandations. 3) Les directives relatives à l'admission des chercheurs et des étudiants Les Etats membres sont cependant parvenus à s'entendre sur deux propositions de directives sectorielles, relatives à l'admission des étudiants et des chercheurs. L'ambition de ces textes reste certes limitée, mais l'accord du Conseil sur ces deux directives est encourageant. La directive du 13 décembre 2004(27) harmonise les conditions d'entrée et de séjour des étudiants, des élèves de l'enseignement secondaire, des stagiaires non rémunérés et des volontaires. Elle prévoit notamment que les étudiants étrangers devraient en principe avoir accès au marché du travail, tout en autorisant les Etats membres à tenir compte de la situation de leur marché du travail (art. 17). La proposition de directive relative à l'admission des chercheurs(28), déposée par la Commission le 16 mars 2004, a fait l'objet d'un accord politique au Conseil « Justice et Affaires intérieures » du 19 novembre 2004, mais n'a pas encore été formellement adoptée. Elle définit les conditions d'admission des chercheurs étrangers, pour une durée supérieure à trois mois, aux fins de mener des projets de recherche dans le cadre d'une convention d'accueil avec un organisme de recherche. Un chercheur admis à ce titre pourra également effectuer une partie de son projet de recherche dans un autre Etat membre. La Commission européenne, instruite par l'échec de la proposition de directive sur l'admission à des fins d'emploi, a décidé de procéder à une vaste consultation de l'ensemble des acteurs intéressés (Etats membres, institutions communautaires, société civile) au sujet des migrations économiques avant de présenter une nouvelle proposition. C'est l'objet du Livre vert déposé le 11 janvier 2005, qui devrait déboucher sur un programme d'action en matière d'immigration légale à la fin de l'année 2005 (prévu par le programme de La Haye adopté par le Conseil européen en novembre 2004), puis sur des propositions législatives visant à établir un cadre communautaire en matière de migrations à des fins d'emploi. Une audition publique est également prévue à la mi-juin 2005. 1) Une démarche prudente et progressive Le Livre vert adopte une démarche prudente et progressive, qui laisse de nombreuses options ouvertes. Les principales questions posées par la Commission sont les suivantes : - Une politique européenne en matière de migration de main d'œuvre est-elle nécessaire, et si oui quel est le degré d'harmonisation requis ? - Faut-il prévoir un cadre juridique global, couvrant presque tous les ressortissants de pays tiers entrant dans l'UE, ou bien privilégier des propositions sectorielles (visant les travailleurs saisonniers, les salariés transférés au sein d'une même entreprise, etc.) ? - En ce qui concerne les travailleurs salariés, le principe de « préférence communautaire » (selon lequel les Etats membres accordent l'accès à leur marché du travail à un ressortissant de pays tiers uniquement si l'offre d'emploi ne peut être pourvue par la main d'œuvre nationale ou communautaire) devrait-il être étendu aux ressortissants de pays tiers résidant légalement dans l'UE (en plus des résidents de longue durée, pour lesquels cette extension sera effective à partir de 2006), voire à ceux ayant déjà travaillé dans l'UE ? - Faut-il retenir un système d'admission des travailleurs salariés étrangers fondé sur l'existence d'un emploi déterminé à pourvoir (condition du besoin économique), à partir d'une évaluation individuelle reposant sur la publication de l'offre d'emploi pendant une durée minimale, sur EURES(29) par exemple ? Ou bien faut-il préférer un système européen de sélection à points, sur le modèle canadien, qui privilégierait l'expérience, la formation, les connaissances linguistiques, l'existence d'une offre d'emploi, etc. ? - Devrait-on prévoir un permis de séjour et de travail combiné au niveau européen, ou au moins une demande unique permettant d'obtenir un permis de séjour et un permis de travail distincts à travers un guichet unique ? - Devrait-on permettre au travailleur étranger admis de changer d'employeur ? - Comment la coopération avec les pays d'origine et de transit pourrait-elle être renforcée ? La Commission évoque également la mise en place d'une coordination par laquelle les Etats membres appliqueraient des quotas nationaux et informeraient la Commission de la mise en œuvre de ces politiques afin de parvenir à une évaluation des besoins globaux du marché du travail européen. 2) Les premières réactions des Etats membres et des partenaires sociaux a) La position des Etats membres Les contributions écrites des Etats membres sur le Livre vert (qui devaient être envoyées le 15 avril 2005 au plus tard) n'ont pas encore été rendues publiques. Le Livre vert a cependant été évoqué dans plusieurs groupes de travail du Conseil (comité stratégique immigration, frontières et asile et groupe des questions sociales) ainsi que lors du Conseil Emploi du 2 juin 2005. Les premières réactions des Etats membres sont prudentes : il existe un relatif consensus sur la nécessité de règles communes, mais en conservant de larges marges de manœuvre aux Etats. Les délégations plaident pour des solutions flexibles, qui devront tenir compte des spécificités nationales (par exemple des différences de situation démographique). Les nouveaux Etats membres ont souligné, à juste titre, que la libre circulation des travailleurs n'est pas achevée dans l'Union européenne, et qu'il convient d'exploiter pleinement les potentialités du marché du travail intérieur. Certaines délégations se sont prononcées en faveur d'une approche sectorielle, par catégories de travailleurs. Plusieurs pays, dont la France, ont souligné la nécessité de promouvoir des actions de coopération et de codéveloppement avec les pays d'émigration. b) La position des partenaires sociaux La Confédération européenne des syndicats (CES) s'est déclarée, pour sa part, déçue que le Livre vert mettre l'accent sur les aspects économiques et les arguments utilitaires liés à la thématique de l'immigration(30). Elle regrette que peu d'attention soit accordée, selon elle, à la question clé de l'intégration et qu'aucune référence ne soit faite au rôle important des partenaires sociaux et du dialogue social dans ce domaine. La perspective du travailleur migrant lui semble absente, de même les problèmes d'égalité entre hommes et femmes (alors qu'une proportion croissante de travailleurs migrants sont des femmes travaillant dans les secteurs de la santé et des soins). La CES est favorable à une législation communautaire, qui établirait certains critères, définitions et procédures communs, mais qui laisserait les Etats membres répondre aux besoins spécifiques de leur marché du travail et déterminer les volumes d'admission de personnes. Elle préfère une approche horizontale plutôt que des propositions sectorielles, par catégories de migrants. La « préférence communautaire » devrait, selon elle, être étendue aux ressortissants de pays tiers en séjour régulier ainsi qu'à ceux ayant déjà travaillé quelques années dans l'Union avant de retourner dans leur pays. Le détenteur du permis devrait toujours être le travailleur, afin d'éviter les abus et les formes modernes d'esclavage. Les droits accordés aux travailleurs migrants devraient être égaux à ceux des citoyens européens, conformément au principe d'égalité de traitement. La coopération avec les pays tiers devrait être formalisée par des accords bilatéraux, reposant sur les liens historiques et culturels entre les Etats membres et d'autres régions du monde. L'Union des industries de la Communauté européenne (UNICE) est favorable à la mise en place d'un cadre européen concernant l'admission de ressortissants de pays tiers à des fins d'emploi (à l'exception de la Fédération des syndicats patronaux allemands (BDA), de la Fédération des industries allemandes (BDI) et du MEDEF français, qui estiment qu'il n'y a pas de valeur ajoutée substantielle pour un tel cadre communautaire). Ce cadre devra respecter le principe de subsidiarité, et donc laisser aux Etats membres le soin de déterminer le nombre de migrants à admettre, les types de qualifications et compétences de ces migrants, ainsi que leur pays d'origine. Il devra être suffisamment flexible, pour permettre aux administrations nationales d'appliquer un large éventail de procédures d'admission afin de rencontrer rapidement les besoins des entreprises, en particulier des PME, et d'assurer le respect des accords bilatéraux qui établissent des conditions d'admission plus favorables pour les citoyens de pays déterminés. L'UNICE préfèrerait un cadre horizontal couvrant toutes les catégories de migrants économiques, avec des dispositions plus favorables pour les stagiaires, les personnes transférées au sein d'une même entreprise, les prestataires de services contractuels, les visiteurs commerciaux et les travailleurs saisonniers. Les procédures prévues devraient être non bureaucratiques, rapides et transparentes, avec un guichet unique pour les permis de séjour et de travail. Certaines des autres questions posées par le Livre vert appellent des réponses relativement rapides et simples : - Un cadre juridique global, couvrant l'ensemble des ressortissants de pays tiers, est préférable, avec des dispositions spécifiques particulières concernant certaines catégories de migrants (travailleurs saisonniers, cadres hautement qualifiés, etc.). - L'application du principe de préférence communautaire devrait être étendue aux ressortissants de pays tiers déjà installés dans l'Union, afin de recruter des travailleurs déjà intégrés dans un Etat membre. Cette extension ne devra cependant pas conduire à un allongement des délais de recrutement. - Dans un souci de simplification et d'efficacité, une procédure unique devrait être prévue, dans chaque Etat membre, pour la délivrance des permis de séjour et de travail. - Le travailleur admis devrait pouvoir changer d'employeur, afin d'éviter tout risque d'abus. Les deux autres questions relatives au choix du système d'admission et à la mise en place de quotas sont en revanche plus complexes. Les différentes politiques migratoires des pays de l'OCDE se distinguent au regard de deux critères principaux. Le premier repose sur la durée des droits de séjour octroyés, et le second oppose les politiques de sélection fondées sur l'offre de travail des migrants à celles fondées sur la demande de travail des entreprises. La plupart des pays européens, ainsi que le Japon, pratiquent des politiques de migration temporaires, tandis que les pays connaissant une immigration de peuplement (Australie, Canada, Etats-Unis, et Nouvelle-Zélande) ont recours, parallèlement aux migrations temporaires, aux migrations permanentes et accordent un statut de résident permanent dès l'arrivée. Cette opposition traditionnelle tend cependant à perdre de sa pertinence, la migration temporaire devenant de plus en plus souvent une voie d'accès à l'immigration permanente. La migration temporaire sert ainsi à filtrer les migrants en vue d'une éventuelle admission permanente. Aux Etats-Unis, par exemple, plus de la moitié des immigrants permanents (50,8 % en 2003, contre 64 % en 2002) admis vivaient déjà aux Etats-Unis, et le visa H1-B, réservé aux travailleurs qualifiés, devient fréquemment une étape vers le statut d'immigrant permanent. L'autre distinction majeure, qui oppose les politiques fondées sur l'offre de travail des migrants à celles fondées sur la demande de travail des entreprises, conserve en revanche toute sa pertinence, en dépit du développement de systèmes mixtes combinant ces deux types de procédures(31). Chacune de ces procédures peut être combinée à des quotas ou à des limitations numériques ; l'opportunité de telles limitations constitue donc une question distincte de celle du choix d'un type de procédure de sélection plutôt qu'un autre. 1) Les processus de sélection par les employeurs Ce premier processus de sélection repose sur la demande des employeurs et prend ainsi en compte les besoins du marché du travail. C'est la procédure la plus répandue dans les pays européens, dont la France, et aux Etats-Unis. a) Un système souple et fondé sur les besoins du marché du travail La sélection des travailleurs repose sur les employeurs, qui se chargent d'identifier personnellement les travailleurs qu'ils désirent embaucher, en fonction de leurs besoins, et de déposer les demandes de permis de séjour et de travail. L'admission est souvent subordonnée à un examen préalable du marché du travail, visant à s'assurer qu'il est impossible de trouver un candidat possédant les qualifications nécessaires et déjà résidant sur le territoire pour occuper le poste. Cette évaluation individuelle vise également à s'assurer que l'embauche d'un travailleur étranger ne conduira pas à diminuer les salaires ou à dégrader les conditions de travail. Dans beaucoup de pays à fort taux de chômage, il est rare que cette vérification soit concluante, et les taux de refus sont élevés. Cet examen individuel est lourd et bureaucratique, aussi des exceptions sont-elles souvent prévues, pour les travailleurs très qualifiés ou pour des métiers connaissant de fortes pénuries de main d'œuvre (c'est le cas, en particulier, au Royaume-Uni avec la liste des professions en pénurie de main d'œuvre (UK Skills Shortage Occupations) et, dans une moindre mesure, en France, cf. infra). Ce système présente plusieurs avantages. Les employeurs sont plus aptes que l'Etat à juger des compétences du migrant et à évaluer leurs besoins. Ce mode de sélection permet ainsi de répondre efficacement aux besoins du marché du travail, et favorise l'intégration de l'immigrant, qui s'insère sur le marché du travail dès son arrivée et n'entraîne aucune charge financière, dans l'immédiat, pour l'Etat d'accueil. En l'absence d'un assouplissement pour les travailleurs qualifiés, il peut cependant se révéler inadapté pour cette catégorie : l'administration ne peut effectuer une évaluation aussi fine des compétences et du potentiel d'un candidat que l'employeur lui-même, et un candidat déjà résidant doté de qualifications équivalentes à ses yeux ne l'est pas forcément pour l'employeur. b) La procédure française d'introduction de main d'oeuvre Le système français actuel d'introduction de main d'œuvre étrangère repose sur les employeurs. La procédure est à l'initiative de l'employeur, qui transmet sa demande à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle compétente. Celle-ci statue en fonction de la situation de l'emploi présente et à venir dans la profession demandée par le travailleur étranger, des conditions d'application par l'employeur de la réglementation relative au travail et des conditions d'emploi et de rémunération offertes au travailleurs étrangers (qui doivent être identiques à celles dont bénéficient les travailleurs français). Cette procédure est simplifiée pour certaines catégories d'immigrants, pour lesquels la situation de l'emploi n'est pas opposée : c'est le cas pour les cadres dirigeants et de haut niveau percevant une rémunération brute au moins égale à 5 000 euros bruts (dans le cadre du dispositif destiné à renforcer l'attractivité de la France), ainsi que pour les étudiants étrangers (pour une première expérience professionnelle en relation avec les études suivies). Ce dispositif peut en outre être assoupli pour répondre aux difficultés de recrutement rencontrées dans certains secteurs de l'économie : c'est ce qui a été fait dans l'informatique en 1998, par simple circulaire, en raison des pénuries observées. L'opposabilité de la situation de l'emploi a ensuite été rétablie en janvier 2004, compte tenu de la progression du chômage dans ce secteur. La procédure française, gérée au plus près du terrain en fonction des besoins des entreprises, présente en principe la souplesse nécessaire pour répondre à des tensions conjoncturelles sur le marché du travail. Son efficacité pourrait cependant être renforcée en diminuant les délais de réponse et en renforçant la remontée des informations provenant des directions départementales, en particulier en ce qui concerne le nombre et la répartition des demandes d'autorisation et les taux de refus. Les procédures dites simplifiées pour les immigrants très qualifiés restent en outre, aux yeux des employeurs, trop lourdes, ce qui réduit l'attractivité de la France. Une étude récente souligne ainsi que les entreprises trouvent cette procédure rigide, excessivement complexe, trop lente, et parfois inéquitable (compte tenu de la variabilité de traitement d'une direction départementale à l'autre, voire selon la personne en charge du dossier)(32). 2) Les processus de sélection par les pays d'accueil Ce second système de sélection repose sur le pays d'accueil, ou, si l'on préfère, sur l'offre des migrants. Ce processus est généralement associé aux pays d'immigration permanente, et est donc pratiqué par ce qu'il est convenu des « pays d'installation » : l'Australie, le Canada et la Nouvelle Zélande. Le Royaume-Uni l'utilise également pour l'immigration très qualifiée (Highly Skilled Migrant Program, mis en place en janvier 2002), et souhaite étendre ce système à l'ensemble de l'immigration à des fins d'emploi et d'études. Un système à points a été envisagé un moment en Allemagne (la commission Süssmuth sur l'immigration l'avait recommandé), mais n'a finalement pas été retenu par la nouvelle loi sur l'immigration, entrée en vigueur le 1er janvier 2005. Les migrants potentiels sont soumis à un processus de sélection fondée sur certaines caractéristiques, dont on estime qu'elles favorisent l'intégration dans le pays hôte : l'âge, la maîtrise de la langue du pays d'accueil, la formation, l'expérience professionnelle, le fait d'exercer une profession faisant l'objet d'une pénurie de main d'œuvre, la présence de parents et la détention d'une offre d'emploi dans le pays d'accueil sont notamment pris en compte. Chacune de ces caractéristiques se voit accorder un nombre de points, un seuil minimum de points étant requis pour être admis. L'immigrant est souvent immédiatement autorisé à venir accompagné de sa famille proche. a) Le système à points canadien Le Canada accueille chaque année entre 220 000 et 245 000 nouveaux immigrants permanents (221 352 en 2003). Le système actuel a été mis en place par la loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (LIPR), entrée en vigueur le 28 juin 2002. La responsabilité de la politique d'immigration est partagée entre le gouvernement fédéral et les provinces, avec lesquelles des accords et des ententes ont été signés. Ces accords permettent aux provinces de jouer un rôle direct dans la sélection d'un certain nombre d'immigrants souhaitant s'établir sur leur territoire (appelés les « candidats des provinces », qui disposent généralement de compétences professionnelles particulièrement demandées). Depuis 1978, le Québec dispose d'une plus grande autonomie que les autres provinces, qui lui permet d'opérer sa propre sélection en matière d'immigration économique (sous réserve de respecter les formalités canadiennes en matière de sécurité et de santé), et de déterminer les volumes d'immigrants qu'il désire accueillir. Environ 60 % des étrangers admis comme résidents permanents chaque année le sont au titre de l'immigration économique, les 40 % restant l'étant au titre du regroupement familial, de l'asile ou pour des motifs d'ordre humanitaire. En 2003, 121 055 immigrants économiques (soit 55 % du total) ont été accueillis, tandis que 68 863 personnes (soit 33 %) l'ont été au titre du regroupement familial et 25 981 (12 %) comme réfugiés (auxquels s'ajoutent 2 % de personnes faisant l'objet de mesures de renvoi à exécution différée, de demandeurs d'asile non reconnus, etc.). En pratique, seuls 51 686 demandeurs principaux ont été accueillis au titre de l'immigration économique, soit 23,3 % du total, les conjoints et les enfants des demandeurs principaux étant comptabilisés comme immigrants économiques. L'immigration économique recouvre cinq catégories d'immigrants : les travailleurs qualifiés, les entrepreneurs, les investisseurs, les travailleurs indépendants et les candidats des provinces. Les travailleurs qualifiés forment la catégorie la plus importante. Ils sont sélectionnés selon six facteurs : les études, la connaissance des langues officielles (anglais et français), l'expérience professionnelle acquise, l'âge, l'existence d'un emploi réservé au Canada, et la capacité d'adaptation. Chacun de ces facteurs se voit affecter un certain nombre de points, la note de passage étant actuellement fixée à 67 points sur 100. La grille de sélection du Québec est légèrement différente et avantage, en particulier, la pratique du français. L'évaluation se fait sur documents, mais une entrevue peut être prévue avec un agent des visas pour élucider les ambiguïtés, les incohérences ou les insuffisances dans les documents du demandeur. La grille de sélection vise à retenir des candidats polyvalents, qui pourront s'adapter aux évolutions rapides du marché du travail canadien, tandis que l'ancien système privilégiait les personnes exerçant une « profession en demande », pour laquelle existaient des pénuries (ce système a été jugé désuet, parce qu'il ne tenait pas compte de la mobilité professionnelle croissante). La note de passage peut être ajustée chaque année, afin d'assurer un équilibre entre le nombre et la qualité des demandes et atteindre le « niveau cible » fixé.
D'autres grilles de sélection spécifiques s'appliquent aux entrepreneurs et investisseurs, ainsi qu'aux travailleurs indépendants. En 2001, le Canada comptait près de 5,5 millions de résidents nés à l'étranger, soit 18,4 % de sa population totale. Montréal, Toronto et Vancouver ont accueilli 73 % de ces immigrants. Plus de 150 000 étrangers obtiennent la citoyenneté canadienne (qui peut être demandée après trois ans de résidence) chaque année. Le système fonctionne bien, car il fournit une main d'œuvre qualifiée (les immigrants ont, en moyenne, des qualifications professionnelles supérieures à celles de la population canadienne) et dont l'intégration est satisfaisante. Des difficultés existent cependant, en raison d'un décalage entre le profil favorisé par la grille de sélection, qui privilégie les candidats ayant exercé de très longues études, et les besoins réels de l'économie canadienne, qui rencontrent des pénuries en ce qui concerne les professions intermédiaires. Ce système vise en réalité à sélectionner des citoyens, et non des travailleurs. Le Québec s'apprête d'ailleurs à modifier sa grille de sélection afin de corriger ce biais et de favoriser les travailleurs exerçant des professions en demande. De plus, l'absence de reconnaissance de nombreux diplômes étrangers représente un obstacle à l'intégration de certains immigrants, qui se voient interdire d'exercer des professions réglementées (qui représentent 20 % de la population active au Canada) par les quelque 400 ordres professionnels canadiens. Des assouplissements ont aussi été apportés et des moyens supplémentaires affectés, en avril dernier, en matière de regroupement familial des parents et grands-parents (dont le nombre augmentera de 12 000 en 2005 et en 2006), afin d'accélérer le traitement des demandes et de faire face au développement d'un arriéré d'environ 110 000 dossiers. b) Avantages et inconvénients des systèmes à points Ce système de sélection présente plusieurs atouts. Il permet de sélectionner des individus en fonction de leur potentiel d'intégration dans la société d'accueil. Souvent associé à des « niveaux cibles » fixés chaque année, il assure une certaine maîtrise du volume d'entrées et est rassurant pour les opinions publiques. Il apparaît plus objectif que le système fondé sur la demande des employeurs, et est plus lisible. Ses limites doivent cependant être soulignées : il n'est pas adapté au recrutement de personnes peu qualifiées et convient davantage à une immigration permanente, de peuplement. En favorisant des personnes très qualifiées, il peut également conduire à sélectionner des personnes qui ne répondent pas aux besoins réels du marché du travail et qui éprouveront des difficultés à s'insérer. L'opposition entre ces deux processus de sélection doit être relativisée. En pratique, il est possible de les combiner dans le cadre d'un système mixte, dans lequel un système à points serait réservé à l'immigration qualifiée, tandis que l'immigration peu qualifiée resterait recrutée par les employeurs en fonction de leurs besoins. Le système britannique actuel, par exemple, combine la sélection par les employeurs à un système à points pour les travailleurs très qualifiés (Highly Skilled Migrant Program). Les travailleurs peu ou moyennement qualifiés sont sélectionnés par les employeurs dans le cadre du régime du permis de travail (Work Permits Scheme). Ce régime comporte deux niveaux : le premier est réservé aux professions figurant sur la liste des professions en pénurie de main d'œuvre (UK Skills Shortage Occupations), et le second aux autres professions. Les admissions sont subordonnées à un test du marché du travail destiné à s'assurer que le poste ne peut être pourvu par la main d'œuvre résidente (qui exige qu'une offre ait été publiée pendant au moins quatre semaines), sauf si le poste demandé figure sur la liste des professions en pénurie de main d'œuvre. Cette liste est établie par le ministère de l'intérieur après consultation de panels sectoriels, composés de représentants des syndicats, des organisations patronales, des principales entreprises et des agences gouvernementales du secteur concerné. La liste actuelle comporte surtout des professions d'ingénieur (ingénieur spécialisé en génie ferroviaire, dans le domaine de la construction de ponts, des transports, etc.) et dans le secteur de la santé (médecins généralistes et spécialistes, dentistes, etc.). Tous les postulants à un permis de travail doivent avoir un niveau de formation minimum ou au moins trois années d'expérience professionnelle, sauf dans les secteurs de l'hôtellerie-restauration et de l'agroalimentaire, pour lesquels un programme spécifique (Sector Based Scheme) a été mis en place en 2003, afin de faire face aux pénuries rencontrées. Les critères de formation ou d'expérience y sont assouplis, afin de permettre l'admission de travailleurs peu qualifiés, mais le programme est soumis à un plafond fixé à 15 000 permis pour 2004-2005 (9 000 pour l'hôtellerie-restauration et 6 000 pour l'agroalimentaire), et à 20 % du plafond total pour les ressortissants d'un même pays. Un réexamen de ce programme est en cours. Un système à points spécifique a été créé pour les travailleurs très qualifiés, en 2001, qui sont admis sans avoir besoin d'être déjà titulaires d'un contrat de travail. Ce programme pour les migrants hautement qualifiés (Highly Skilled Migrant Programme) prend en compte les diplômes, l'expérience professionnelle, le salaire (avec des grilles différentes pour les pays à faible revenu) et les performances antérieures, ainsi que les qualifications du conjoint. Un bonus est accordé au moins de 28 ans, ainsi qu'aux titulaire d'un MBA (Master in Business Administration). Le seuil requis est actuellement de 65 points. D'autres programmes spécifiques concernent notamment les travailleurs saisonniers agricoles (Seasonal Agricultural Workers Scheme) et les citoyens du Commonwealth âgés de 17 à 27 ans souhaitant effectuer un séjour prolongé aux Royaume-Uni (Working Holydaymaker Scheme). Le gouvernement britannique a annoncé, en février 2005, qu'il envisage de remplacer tous les programmes existants par un système à points unique, qui comprendrait quatre niveaux, réservés respectivement aux travailleurs très qualifiés, qualifiés, non qualifiés et aux étudiants et spécialistes(33). Le système resterait cependant mixte, dans la mesure où seuls les travailleurs très qualifiés seraient dispensés d'avoir déjà une offre d'emploi. Certains des experts rencontrés mettent en doute la pertinence de créer un système à points pour des travailleurs peu qualifiés. b) Les avantages d'un système mixte Les avantages d'un système mixte, combinant un système à points pour les travailleurs qualifiés et une sélection par les employeurs pour les autres catégories, sont certains. Le test du marché du travail est en effet inadapté pour les travailleurs qualifiés, et le système à points n'est pas approprié pour les travailleurs peu qualifiés. Les systèmes mixtes permettent de combiner les avantages de chaque processus de sélection, en tenant compte des spécificités de chaque catégorie et des besoins des entreprises. Au niveau européen, une proposition de directive éventuelle devrait donc offrir un large éventail de procédures aux Etats membres. La sélection par les employeurs devrait être retenue, avec la possibilité, pour les Etats membres qui le souhaitent, d'opter pour un système de sélection à points pour certaines catégories d'immigrants (qu'il appartiendrait à chaque Etat de déterminer), dans le cadre d'un système mixte. La France pourrait ainsi envisager d'introduire un système à points pour les étudiants admis à rester en France pour y chercher du travail, ou plus généralement pour les travailleurs qualifiés. Quelle que soit la procédure de sélection choisie, il est possible de prévoir des quotas ou des limitations numériques au nombre d'étrangers admis chaque année. Dans le Livre vert, la Commission emploie le terme « quotas » sans apporter davantage de précision. L'expression « quotas » peut cependant désigner des réalités fort différentes. Plusieurs types de quotas sont en effet envisageables. Les quotas au sens strict signifient qu'une quote-part du total des immigrants est réservée aux ressortissants de certains Etats, ou bien à certaines catégories socioprofessionnelles (ces deux catégories de quotas pouvant se combiner). Au sens large, les quotas désignent toute forme de limitation numérique du nombre - total ou par catégories - d'immigrants admis chaque année. Il est cependant préférable de distinguer les quotas stricto sensu, des plafonds (à ne pas dépasser) ou des « niveaux cibles » (qui constituent plutôt des objectifs à atteindre), qui peuvent être globaux ou par catégories d'admission (emploi, regroupement familial, etc.), tels qu'ils sont pratiqués au Canada, par exemple. 1) Les quotas par pays et métiers : les exemples italien et espagnol Les Etats de l'OCDE pratiquant encore des quotas par pays sont peu nombreux. Depuis que les Etats-Unis et le Canada ont abandonné cette politique dans les années 60, seules l'Italie (depuis 1998) et l'Espagne (depuis 1993) pratiquent ce système. Une partie (Italie) ou la totalité (Espagne) de ces quotas sont réservées aux pays tiers avec lesquels des accords bilatéraux ont été conclus, en fonction de leur coopération dans la lutte contre l'immigration clandestine. Ces quotas sont également déclinés par régions (Italie) et par provinces, ainsi que par types de main d'œuvre (travail saisonnier, salarié ou indépendant) et catégories d'emploi. Dans le cas italien, ces « quotas préférentiels » ne représentent qu'une fraction du total des quotas et sont affectés par pays, tandis qu'en Espagne la totalité du « contingent » est réservée à l'ensemble des sept pays tiers visés, sans affectation préalable entre lesdits pays. En Italie comme en Espagne, les limites d'un tel système sont évidentes : il est bureaucratique et difficile à gérer, et surtout les chiffres sont sans commune mesure avec la réalité des flux qu'accueillent ces deux Etats. Les besoins de main d'œuvre des entreprises et des particuliers sont difficiles à évaluer à l'avance, et la faiblesse des chiffres retenus explique largement l'ampleur de l'immigration clandestine constatée (cf. la régulation opérée en 2002 en Italie - 634 728 personnes sur 705 404 demandes - et en 2004 en Espagne - 700 000 demandes enregistrées entre le 7 février et le 7 mai derniers). a) Le système de quotas italien L'Italie a mis en place un système de quotas en 1998, avec la loi-cadre 286/98, dite Turco-Napolitano, amendée par la loi 189/02 du 30 juillet 2002, dite Bossi-Fini. Les quotas sont fixés chaque année par un décret du président du Conseil, après consultation des partenaires sociaux, des chambres de commerce et des régions. Ils ont été fixés, pour 2005, à 159 000 travailleurs : 79 500 ressortissants de pays tiers et 79 500 travailleurs des huit nouveaux Etats membres concernés par la période transitoire (cf. supra). Ces quotas nationaux sont ensuite répartis par régions et provinces, par type de main d'œuvre, catégories d'emploi et nationalités. Parmi les 79 000 travailleurs des pays tiers autorisés en 2005, figurent par exemple(34) : - 30 000 travailleurs salariés (dont 15 000 postes réservés au travail domestique et les soins à la personne) ; - 2 500 travailleurs indépendants (chercheurs, hommes d'affaires, dirigeants d'entreprises privées, personnes exerçant une profession libérale, artistes de renommée internationale) ; - 200 descendants de ressortissants italiens d'Argentine, du Venezuela et de l'Uruguay, qui pourront être admis comme travailleurs salariés ou indépendants ; - 1 000 travailleurs salariés très qualifiés ou cadres dirigeants ; - 20 800 ressortissants de pays ayant conclu ou s'apprêtant à conclure des accords de coopération avec l'Italie : 3 000 Albanais, 3 000 Tunisiens, 2 500 Marocains, 2 000 Egyptiens, 2 000 Nigériens, 2 000 Moldaves, 1 500 Sri Lankais, 1 500 Bengalis, 1 500 Philippins, 1 000 Pakistanais, 100 Somaliens et 700 ressortissants d'autres pays ayant conclu des accords en matière d'immigration et de réadmission ; - 25 000 travailleurs saisonniers seront admis parce qu'ils sont ressortissants de Serbie-Monténégro, Croatie, Bosnie-Herzégovine, ARYM, Bulgarie, Roumanie ou de pays ayant signé des accords en matière d'immigration avec l'Italie, ou parce qu'ils ont déjà été admis comme travailleurs saisonniers en 2003 ou en 2004. Les demandes d'autorisation d'entrée de travailleurs étrangers sont formulées par les employeurs : un étranger doit être déjà titulaire d'un contrat de travail pour être admis. La loi Bossi-Fini de 2002 a en effet mis fin au système de « parrainage » qui permettait à un étranger de se voir délivrer un permis de séjour d'une année, durant laquelle il pouvait chercher un emploi, sous réserve qu'un « sponsor » (italien ou ressortissant d'un pays tiers résidant régulièrement en Italie) s'engage à lui assurer un logement et à subvenir à ses besoins si nécessaire. La plupart des demandes sont nominatives et concernent un travailleur déjà connu de l'employeur (il s'agit, en pratique, souvent de régularisations de travailleurs clandestins déjà sur place). L'autorisation est donnée par l'antenne locale du ministère du travail, dans les limites du quota local et après publication nationale de l'offre d'emploi pendant 20 jours, puis un permis de séjour est délivré par le ministère de l'intérieur (un guichet unique devrait être mis en place dans toutes les préfectures d'ici la fin de l'année 2005). L'employeur doit apporter la preuve qu'il dispose d'un logement adéquat et déposer une caution en garantie des frais éventuels de rapatriement au cas où le travailleur étranger perdrait le droit de séjourner en Italie. Certaines catégories de travailleurs (telles que les infirmières, les personnes transférées au sein d'une même entreprise, les professeurs d'université, les interprètes, les stagiaires, les athlètes, etc.) ne sont pas soumises à quotas, en raison des pénuries de main d'œuvre rencontrées. Les autorités italiennes essaient, par ailleurs, de développer, avec les régions et les fédérations professionnelles, des programmes de formation dans les pays d'origine. Des projets pilotes avec la Tunisie, la Moldavie, la Pologne, la Roumanie et le Sri Lanka sont en cours. Le gouvernement italien considère que le système des « quotas préférentiels », réservés aux pays d'origine et de transit collaborant efficacement avec l'Italie dans la lutte contre l'immigration clandestine, est efficace. Le ministère de l'intérieur souligne ainsi que, selon ses statistiques, le nombre d'immigrants clandestins albanais arrêtés alors qu'ils s'apprêtaient à débarquer illégalement sur la côte italienne a chuté de 4 018 personnes en 2001, à 1 247 en 2002 et 62 au cours des huit premiers mois de 2003. Les quotas accordés à un pays peuvent être diminués l'année suivante en cas de coopération insuffisante : c'est ce qui a été fait avec le Maroc en 2001, par exemple. De tels accords sont cependant d'un maniement délicat, car ils combinent deux logiques potentiellement contradictoires au sein d'un même instrument : si la conjoncture exige de baisser les volumes d'admission, cette diminution sera perçue comme une sanction, et inversement, si un pays ne coopère pas efficacement, il faut baisser les volumes quelle que soit la demande des employeurs.
Source : Ministère de l'intérieur italien. La faiblesse des chiffres fixés, par rapport aux besoins de l'économie italienne (en dépit d'un taux de chômage élevé, de 8,4 %, et dépassant les 20 % dans certaines régions du sud de l'Italie), doit cependant être soulignée. Les besoins sont particulièrement importants dans le domaine des soins à domicile (en raison du vieillissement de la population), de la construction et de l'agriculture. Le décalage entre les demandes des employeurs et les quotas actuellement accordés est considérable et varie, dans certaines provinces, du simple au double. Les demandes non satisfaites trouvent dans l'immigration irrégulière la main d'œuvre souhaitée. Combiné à l'absence d'une réelle politique de lutte contre le travail clandestin, ce décalage explique l'ampleur de l'immigration clandestine, dont attestent les débarquements réguliers de clandestins sur l'île de Lampedusa, via la Libye, et le bilan des régularisations menées par les gouvernements successifs : 220 000 personnes en 1990, 255 000 en 1998 et 641 638 en 2003, en application de la loi Bossi-Fini. Ces régularisations ont été opérées sur l'initiative des employeurs, qui déposaient les demandes et devaient s'acquitter d'un rattrapage de cotisations, plafonné à trois mois de cotisations patronales. Le gouvernement envisage d'augmenter les quotas, mais n'a pas pu le faire cette année en raison de difficultés juridiques (le règlement d'application de la loi Bossi-Fini n'a pas été publié), qui l'ont obligé à reprendre les chiffres de l'année passée. Le fonctionnement du système est, en outre, très bureaucratique, et conduit un bureau local du ministère du travail à ne pouvoir autoriser qu'un seul Moldave ou Nigérien, par exemple, ce qui rend la procédure très complexe à gérer. Ce système, mis en place par la gauche puis révisé par la droite, fait cependant l'objet d'un consensus partisan : au-delà de quelques divergences sur les modalités de leur mise en œuvre, ni la gauche, ni la droite italiennes ne remettent aujourd'hui en cause le principe des quotas. b) Le système de quotas espagnol Depuis 1993, l'Espagne a mis en place des quotas (appelés contingent) pour gérer l'immigration à des fins d'emploi et répondre aux besoins de ses entreprises. Le contingent de travailleurs étrangers extra communautaires pour 2004 était de 10 908 emplois stables et de 20 070 emplois saisonniers, déclinés par provinces, secteurs d'activité et professions (et non par nationalités). Ce contingent est déterminé en concertation avec les partenaires sociaux, après analyse de la situation du marché du travail. Depuis février 2005 (date d'entrée en vigueur du nouveau règlement d'application de la loi la loi organique 4/2000 sur les droits et l'intégration sociale des étrangers en Espagne), le chiffre fixé en début d'année peut être ajusté en cours d'année, autant de fois que nécessaire. Ces emplois sont proposés aux ressortissants de sept pays tiers (Bulgarie, Colombie, Equateur, Maroc, Pologne, République dominicaine et Roumanie), avec lesquels des accords bilatéraux ont été conclus. Ces accords permettent le recrutement de travailleurs permanents et saisonniers, ainsi que de stagiaires, et contiennent des dispositions relatives aux procédures de sélection et de formation, aux conditions de travail et aux droits sociaux, au retour des migrants et à la lutte contre l'immigration clandestine. La sélection des travailleurs est effectuée sur place par des commissions bilatérales, et les entreprises peuvent y participer. Les travailleurs saisonniers doivent s'engager à retourner dans leur pays d'origine à la fin du contrat, et se présenter au bureau consulaire espagnol de leur pays dans un délai d'un mois à compter de leur retour. Les contrats de travail sont signés avant l'arrivée en Espagne. Le rôle de ce contingent dans la gestion de l'immigration économique reste cependant marginal : seuls 10 % des permis de travail délivrés à des étrangers l'ont été au titre du contingent, le reste relevant de la procédure ordinaire (non soumise à quotas), qui permet aux employeurs de recruter des travailleurs qu'ils connaissent déjà, par le biais de demandes nominatives (et non génériques, comme dans le cadre du contingent), si une évaluation individuelle prouve qu'aucun ressortissant espagnol ou citoyen européen (hors nouveaux Etats membres) ne peut remplir l'emploi proposé. Près de la moitié du contingent fixé pour les emplois stables n'a d'ailleurs pas été utilisée, en raison de la lourdeur et de la durée excessive de la procédure d'introduction. La procédure ordinaire a été assouplie par un nouveau règlement d'application de la loi organique 4/2000 sur les droits et l'intégration sociale des étrangers en Espagne, adopté en décembre 2004 : il n'y aura plus d'évaluation individuelle dans les secteurs connaissant des pénuries de main d'œuvre importantes, dont la liste sera fixée par le gouvernement chaque trimestre. Ces voies d'entrées légales restent insuffisantes pour faire face aux besoins de main d'œuvre de l'économie espagnole, en particulier dans le secteur des services domestiques (notamment des soins à domicile pour les personnes âgées et des gardes d'enfants), du bâtiment, du tourisme et de l'agriculture. L'immigration clandestine est donc très importante, comme l'illustrent les nombreuses embarcations de fortune, appelée pateras, faisant tragiquement naufrage sur les côtes espagnoles. C'est ce qu'attestent aussi les 690 679 demandes de régularisations enregistrées (déposées surtout par des Equatoriens, des Roumains et des Colombiens), selon le ministre espagnol du travail, M. Jesus Caldera, entre le 7 février et le 7 mai 2005. Cette régularisation vise à faire « affleurer » l'économie souterraine et à récupérer les cotisations sociales concernant ces centaines de milliers d'emplois clandestins. Les demandes sont introduites par les employeurs, et leur acceptation est subordonnée à un casier judiciaire vierge, l'enregistrement sur les registres municipaux (empadrominamiento) au moins six mois avant le début de l'opération, et un contrat de travail d'une durée minimale de six mois. Les autorités espagnoles ont annoncé une forte augmentation des sanctions et des moyens consacrés à la lutte contre le travail clandestin (un demi-million d'inspections du travail est annoncé chaque année), une fois la régularisation terminée. 2) Les plafonds américain et autrichien Les Etats-Unis et l'Autriche ont mis en place des plafonds, non par pays, mais par catégories d'immigrants : le nombre maximum d'étrangers admis au titre regroupement familial et à des fins d'emploi est ainsi fixé chaque année. Les Etats-Unis ont mis fin aux quotas par pays, mis en place après la première guerre mondiale, en 1965. Ces quotas par origine ont été remplacés par des plafonds numériques, fixés pour chaque catégorie d'immigrants permanents. Il existe deux voies d'entrées légales aux Etats-Unis : la première a trait aux immigrants permanents (appelés immigrants), et la deuxième aux immigrants temporaires (appelés nonimmigrants). Seuls les immigrants permanents sont soumis à des limitations numériques (sous réserve de certaines catégories d'immigrants temporaires, telles que les personnes entrant avec un visa H1-B, qui sont elles aussi soumises à un plafond). Les conditions requises pour entrer en tant qu'immigrants permanents sont plus strictes, ces derniers pouvant notamment, une fois admis, accéder à la nationalité américaine après cinq ans de résidence. Le système actuel a été mis en place par la loi sur l'immigration et la nationalité (Immigration and Nationality Act, INA) de 1990. Le plafond total d'immigrants permanents est de 675 000 personnes par an, dont 480 000 au titre du regroupement familial (les parents proches d'un ressortissant américain - c'est-à-dire le conjoint et les enfants mineurs non mariés, ainsi que les père et mère des citoyens américains âgés de plus de 21 ans - ne sont cependant pas soumis à limitation numérique), 140 000 au titre de l'emploi et 55 000 dans le cadre de la « loterie diversité » (qui est réservée aux ressortissants de pays dont le taux d'admission aux Etats-Unis est faible, c'est-à-dire dont moins de 50 000 personnes ont été admises au cours des cinq dernières années). Ces limitations se combinent à un plafond par pays, qui interdit en principe aux ressortissants d'un seul pays d'excéder 7 % du total des visas délivrés, dans un souci de diversité (sous réserve de quelques dérogations, concernant notamment l'immigration à des fins d'emploi ainsi que les conjoints et les enfants des résidents permanents). Le nombre de réfugiés pouvant accéder au statut d'immigrant permanent est également limité à 10 000 par an (le nombre de réfugiés pouvant être admis aux Etats-Unis en 2005 étant pour sa part plafonné à 70 000). Comme le montre le tableau suivant, les plafonds relatifs au regroupement familial et à l'emploi sont eux-mêmes subdivisés en plusieurs groupes préférentiels. La plupart des plafonds de chaque catégorie peuvent être augmentés du nombre de visas non utilisés au titre d'une autre catégorie (ou sous catégorie) donnée, et certains sont reportables d'une année à l'autre. En pratique, les plafonds ne sont donc pas identiques chaque année.
En 2003, 705 827 personnes ont été admises comme immigrants permanents aux Etats-Unis, contre 1 063 732 en 2002 et 1 064 318 en 2001. Cette chute des admissions est due, pour l'essentiel, non pas à une baisse du nombre des demandes, mais à l'allongement des délais de traitement et au développement d'un arriéré important. En pratique, une très faible proportion des immigrants permanents (entre 3,7 % et 7,8 %) est admise à des fins d'emploi (en dépit d'une augmentation importante du plafond depuis 1992). Plus de 70 % des entrées sont en effet liés au regroupement familial stricto sensu, et plus de la moitié des visas délivrés au titre de l'emploi visent en réalité le conjoint et les enfants des demandeurs principaux(35). Presque la moitié des entrées n'est pas limitée par un plafond, car il s'agit de parents proches d'un citoyen américain (47,2 % des admissions en 2003). Les demandes sont traitées par les services américains d'immigration et de citoyenneté (U.S. Citizenship and Immigration Services, USCIS), rattachés au département de la sécurité intérieure (Department of Homeland Security, DHS), ainsi que par les services consulaires du département d'Etat, si le candidat réside à l'étranger. Les dix principaux pays d'origine des immigrants permanents sont le Mexique, l'Inde, les Philippines, la Chine, le Salvador, la République dominicaine, le Vietnam, la Colombie, le Guatemala et la Russie. Plus d'un tiers (34,7 %) des immigrants admis sont originaires d'Asie, en 2003. Plus d'un tiers des immigrants s'installent en Californie (25 % en 2003, 27,4 % en 2002) et dans l'Etat de New York (12,7 % en 2003, 10,8 % en 2002). Près de 28 millions d'immigrants temporaires ont été admis aux Etats-Unis en 2003 (le nombre d'admissions comprend cependant des entrées multiples d'une même personne au cours de l'année). Certes, plus de 24 millions sont venus pour affaires ou pour loisir, mais ces migrants n'en jouent pas moins un rôle croissant sur le marché du travail américain. Certains visas d'immigration temporaire, tel que le visa H1-B, permettent en effet de travailler aux Etats-Unis jusqu'à six années. Il existe plus de 80 catégories de visas d'immigration temporaire, dont une quinzaine permet d'accéder au marché du travail américain. Les principaux visas d'immigration temporaire permettant de travailler aux Etats-Unis E-1 Négociateurs E-2 Investisseurs H-1A Travailleurs temporaires - infirmières diplômées (programme ayant pris fin en 1995) H-1B Travailleurs temporaires - activités spécialisées et mannequins de haute couture H-1C Infirmières diplômées dans des zones de pénuries de personnel de santé H-2A Travailleurs agricoles temporaires H-2B Travailleurs temporaires rendant d'autres services L-1 Personnes transférées au sein d'une même entreprise O Etrangers dotés de compétences exceptionnelles dans le domaine des arts, des sciences, des affaires ou du sport P Athlètes et professionnels du spectacle Q Visiteurs dans le cadre d'un échange culturel international R Etrangers travaillant pour des organisations confessionnelles à caractère non lucratif TN Cadres canadiens et mexicains au titre de l'accord de libre-échange nord-américain (ALENA) La plupart de ces programmes d'immigration temporaire ne sont pas soumis à limitation numérique. Les visas H1-B (surnommés les visas « high-tech » parce que plus de la moitié est délivrée à des personnes travaillant dans le secteur informatique, surtout à des Chinois et à des Indiens), sont cependant plafonnés à 65 000 par an depuis le 1er octobre 2003 (le plafond avait été porté à 115 000 en 1999 et 2000, puis à 195 000 par an entre 2001 et 2003, en raison d'une forte demande des employeurs). Le plafond actuel (calculé par année fiscale, soit d'octobre à octobre) semble insuffisant : en 2004, il a été atteint dès le mois de février, soit en seulement cinq mois, et celui de 2005 était épuisé dès octobre 2004, les demandes ayant pu être déposées à partir d'avril 2004. Les visas H2-B (utilisés dans la construction, pour les entraîneurs sportifs, les serveurs en restauration, les assistants en cuisine, etc.) sont également plafonnés, à 66 000 personnes par an. La demande est très supérieure à l'offre (en 2004, le plafond était atteint dès le mois de mars) pour cette catégorie aussi. Les employeurs exercent de fortes pressions sur le Congrès pour que ces limitations soient relevées. Les inconvénients du système américain doivent être soulignés. La lourdeur des procédures d'admission par rapport aux besoins de l'économie américaine, combinée à l'absence de politiques efficaces de lutte contre le travail clandestin et de reconduite à la frontière, ont produit, en quelques années, plus de 10 millions de travailleurs clandestins. Les Etats-Unis s'apprêtent peut-être à régulariser ces millions de clandestins. Le Président Georges Bush a en effet annoncé, le 7 janvier 2004, un nouveau programme pour les travailleurs temporaires, qui serait ouvert à de nouveaux travailleurs étrangers ainsi qu'aux travailleurs clandestins déjà présents aux Etats-Unis, sous réserve qu'aucun travailleur américain ne soit disponible pour l'emploi proposé(36). Cette proposition, reprise dans le discours sur l'état de l'Union du 2 février 2005, divise profondément la majorité républicaine, certains l'assimilant à une « amnistie » pour les immigrants irréguliers. Elle ne s'est traduite, pour l'instant, par aucune initiative concrète de la part de la Maison Blanche. Un projet de loi (dit « Agjobs bill ») visant à régulariser les saisonniers agricoles sans papiers ayant travaillé au moins 100 jours au cours des douze derniers mois (soit une population estimée à un million de travailleurs et de membres de famille), déposé par des parlementaires des deux camps, a d'ailleurs été repoussé par le Sénat le 26 avril dernier. Il a cependant réussi à rassembler une majorité simple (53 voix), insuffisante - 60 voix étaient requises - mais encourageante pour les partisans d'une réforme de la politique de l'immigration américaine. Un nouveau projet de loi bipartisan, plus ambitieux, a en outre été déposé le 12 mai 2005, par les sénateurs McCain (républicain) et Kennedy (démocrate) et les représentants Kolbe (R), Fleke (D) et Guttierez (D). Ce projet de loi (appelé « Secure America and Orderly Immigration Act ») prévoit notamment un nouveau visa de trois ans pour des travailleurs non qualifiés, valable trois ans renouvelables et pouvant déboucher sur une autorisation de séjour de longue durée (green card valable dix ans). Un visa du même type pourrait être délivré à un travailleur illégal et aux membres de sa famille, sous réserve de payer une amende de 2 000 dollars par adulte et de pratiquer un anglais de base. Ce projet a été relativement bien accueilli, les critiques restant mesurées. Les commentateurs estiment cependant qu'il ne devrait pas aboutir très rapidement. Une task force indépendante regroupant les initiateurs du projet, des représentants de l'administration et les principaux acteurs intéressés (syndicats, chambre de commerce, etc.) a été créée pour éviter l'enlisement du texte. Pour mémoire, une régularisation de 2,7 millions d'immigrants illégaux a déjà eu lieu en 1986 (Immigration Reform and Control Act, IRCA), au profit des travailleurs agricoles et des personnes résidant aux Etats-Unis depuis 1981. Dans le même temps, le Congrès a adopté, le 10 mai 2005, des dispositions durcissant les contrôles exercés lors de la délivrance des permis de conduire, afin d'éviter qu'ils ne puissent être utilisés comme pièce d'identité par les clandestins. Des groupes de citoyens, appelés les « minutemen », se sont par ailleurs formés en Arizona, pour surveiller la frontière avec le Mexique, qu'ils estiment insuffisamment contrôlée par la police des frontières. Des délais d'attente et des arriérés considérables se sont par ailleurs développés en matière de regroupement familial, en raison des plafonds et du volume des demandes. Un citoyen américain souhaitant faire venir son enfant majeur du Mexique peut ainsi attendre près de neuf ans, et un immigrant mexicain légal près de sept ans pour faire venir son conjoint et ses enfants mineurs. Les demandes relatives aux frères et sœurs philippins d'un citoyen américain enregistrées il y a 22 ans sont aujourd'hui en cours d'examen. Ces délais contribuent, en pratique, au développement de l'immigration clandestine. Des plafonds ont aussi été introduits en Autriche en 1993, afin de limiter l'immigration en provenance de pays tiers. Les admissions à des fins d'emploi, au titre du regroupement familial et dans le cadre de séjours privés sont soumises à ces limitations, déclinées par Länder (mais ni par pays d'origine, ni par métiers). Les plafonds sont fixés chaque année par le Gouvernement fédéral (ministère de l'Intérieur), à partir des propositions des Länder (qui ne peuvent être revues à la hausse, mais seulement à la baisse par le Gouvernement). Un institut économique indépendant (WIFO) produit, en amont, un rapport d'expertise sur la situation du marché de l'emploi. Le Parlement (chambre des députés) est consulté. Le plafond était fixé à 8 050 personnes en 2004, et a été réduit à 7 500 pour 2005. Le plafond pour les travailleurs peu qualifiés est nul, tandis qu'il était de 2 200 pour les travailleurs qualifiés, indépendants ou salariés (qui doivent détenir un contrat de travail) en 2004. Ces « travailleurs clés » sont définis selon une liste de cinq critères alternatifs tels que le niveau d'études, un niveau de rémunération supérieur à 2 200 euros mensuels, l'apport en capital, etc. Le plafond pour le regroupement familial était, en 2004, de 5 490 personnes. Une limitation numérique est également prévue pour les travailleurs saisonniers : elle est fixée à 8 000 travailleurs par an, mais il s'agit d'une moyenne sur l'année (ce qui autorise l'entrée, en pratique, d'environ 60 000 saisonniers par an, surtout dans les secteurs de l'agriculture et du tourisme). Depuis octobre 2003, certaines catégories de travailleurs très qualifiés, tels que les chercheurs, ne sont pas soumises à limitation numérique, afin de renforcer l'attractivité de l'Autriche pour les « cerveaux ». En pratique, les plafonds ne concernent qu'une infime partie des entrées d'étrangers : 6 000 à 7 500 entrées effectives (le quota n'étant pas épuisé, en raison des conditions exigées pour entrer dans la catégorie des « travailleurs clés »), sur un total de 65 000 entrées par an. Le regroupement familial à la demande des Autrichiens (y compris d'étrangers récemment naturalisés) et des autres citoyens européens n'est en effet pas soumis à quotas. Il constitue la majorité des admissions et ouvre l'accès au marché du travail autrichien. Le phénomène de file d'attente créé par le plafond pour le reste du regroupement familial (l'examen des demandes surnuméraires étant repoussé à l'année suivante) a en outre conduit l'Autriche à créer en 2003 une procédure d'admission spéciale, pour motifs humanitaires, afin d'éviter d'être condamnée par la cour constitutionnelle autrichienne. Les délais d'attente sont en effet de un à trois ans, selon les Länder. Ce système, rigide et bureaucratique, conduit à des débats politiques difficiles chaque année au Parlement et suscite de multiples pressions (des partis, syndicats, entreprises, etc.), alors qu'il ne porte que sur une faible proportion des admissions. Il relève dès lors davantage de l'affichage politique que d'une véritable politique migratoire, les flux concernés étant minimes. 3) Les « niveaux cibles » canadiens Le système canadien apparaît, en comparaison, plus séduisant. Il repose sur un système de sélection à points (cf. supra) et des « niveaux cibles », consistant en une fourchette estimée, en 2005, entre 220 000 et 245 000 nouveaux résidents permanents. Ces niveaux sont présentés par le Gouvernement au Parlement dans un rapport annuel sur l'immigration. Le nombre minimum de points requis pour être admis peut être ajusté, afin d'atteindre cette cible chaque année. Un objectif est également fixé en ce qui concerne chaque sous catégorie d'immigrants, afin de maintenir le ratio souhaité entre l'immigration économique (60 %) et le regroupement familial et l'asile (40 %).
L'analyse comparée des différents systèmes de limitations numériques fait apparaître qu'aucun système n'est parfait. Toutefois, sous réserve de corriger les défauts propres à chacun, la France pourrait utilement s'inspirer de l'expérience de nos partenaires, et mettre en place des plafonds en matière d'immigration de travail et de regroupement familial. Ces plafonds seraient fixés chaque année par le Parlement et devraient être combinés avec un système à points pour l'immigration qualifiée (cf. supra). Cette réforme permettrait à la France de se doter d'une véritable politique d'immigration et de retrouver une maîtrise quantitative des flux migratoires, en fonction des besoins de l'économie et de nos capacités d'accueil. Ces plafonds devront, pour être crédibles, prendre en compte la part importante de l'immigration « non discrétionnaire » qu'accueille la France, principalement au titre du regroupement familial. Le choix de mettre en place des limitations numériques ou non doit cependant relever de chaque Etat membre, et n'a pas à être imposé par l'Union, conformément au principe de subsidiarité. Une éventuelle proposition de directive ne devrait donc ni imposer, ni exclure de telles limitations, afin d'en laisser le libre choix à chaque Etat. Une politique d'immigration efficace ne peut être développée qu'en coopération avec les pays d'origine et de transit, dont la réalité et les besoins doivent être pris en compte. Cette coopération devrait notamment se développer dans le cadre du partenariat euro-méditerranéen(37), du dialogue 5+5 sur la migration en Méditerranée occidentale(38) et de la politique de voisinage de l'Union. Le Livre vert insiste sur cet aspect et ouvre des pistes intéressantes à cet égard, en particulier pour lutter contre les effets potentiellement négatifs d'une « fuite des cerveaux ». Il évoque ainsi plusieurs mesures visant à renforcer la coopération avec les pays tiers, telles que la création de centres de formation et de recrutement dans les pays d'origine pour les qualifications demandées dans l'Union, des centres de formation culturelle et linguistique, ou encore la facilitation des transferts de fonds des migrants vers leur pays d'origine. Certaines de ces mesures pourraient déjà être mises en œuvre dans le cadre du programme d'assistance technique en faveur des pays tiers adopté le 10 mars 2004, tandis que d'autres devraient être développées dans le cadre d'une politique européenne de codéveloppement ambitieuse. Cette coopération dans le domaine de l'immigration légale doit naturellement s'accompagner d'une coopération accrue en matière de lutte contre l'immigration clandestine et la traite des êtres humains, avec la conclusion d'accords de réadmission. La Commission européenne a présenté une communication sur l'intégration des questions liées aux migrations dans les relations avec les pays tiers en décembre 2002(39). Elle y examine comment les politiques et instruments de l'Union, dont la politique de développement, peuvent contribuer à éradiquer les causes profondes des flux migratoires. Elle rappelle qu'une aide communautaire directe (935 millions d'euros sur la période 2000-2006) a été programmée pour aider les pays tiers à surmonter les problèmes soulevés par les migrations légales et illégales. Elle considère, d'une manière générale, que l'intégration des problèmes de migration dans l'action extérieure de la Communauté doit encourager les pays tiers à coopérer, plutôt que pénaliser (comme certains pays l'avaient envisagé lors de la préparation du Conseil européen de Séville des 21 et 22 juin 2002) ceux qui ne souhaitent coopérer ou qui ne sont pas en mesure de le faire. Une nouvelle communication sur l'immigration et le développement est prévue d'ici la fin de l'année 2005. Le Conseil européen de Séville des 21 et 22 juin 2002 a insisté sur la nécessité d'intensifier la coopération avec les pays tiers en matière d'immigration, et le Conseil « affaires générales » du 19 mai 2003 a adopté des conclusions sur les migrations et le développement en ce sens. Ces conclusions préconisent notamment de favoriser le transfert de fonds des migrants vers leur pays d'origine pour contribuer à leur développement et de favoriser la mobilité des cerveaux. Ces orientations générales se sont concrétisées avec l'adoption, le 10 mars 2004, d'un programme d'assistance technique et financière en faveur de pays tiers dans le domaine de l'asile et des migrations, appelé AENEAS. Ce programme pluriannuel (2004-2008), doté d'une enveloppe de 250 millions d'euros, permet de financer une meilleure information des populations des pays d'origine sur les conditions d'entrée et de séjour dans l'UE. Il vise aussi à renforcer les liens entre les migrants et leurs pays d'origine, afin de favoriser leur contribution au développement de ces pays par l'utilisation des sommes transférées dans des investissements productifs et le soutien à des programmes de microcrédit. Il favorise l'élaboration d'une législation relative à l'immigration légale (règles d'admission, droits et de statut des personnes admises, non-discrimination, etc.) et à la protection internationale ainsi que la réadmission. Des campagnes d'information, des actions visant au maintien de liens entre les émigrants et les communautés locales de leur pays d'origine peuvent, par exemple, être financées à ces fins. Il convient de renforcer cette coopération, dans le cadre d'une politique ambitieuse de codéveloppement. Le codéveloppement désigne toute action d'aide au développement à laquelle participent des migrants, quelles que soient les modalités de cette action. Il peut concerner aussi bien les immigrés qui désirent retourner dans leur pays pour y créer une activité que ceux (hommes d'affaires, universitaires, médecins, ingénieurs notamment) qui, tout en étant durablement établis en France : - soit sont disposés à investir dans leur pays d'origine pour y promouvoir des activités productives et y réaliser des projets sociaux (écoles, centres de santé, etc.) ; - soit souhaitent faire profiter leur pays d'origine de leurs compétences, de leur savoir-faire et de leurs réseaux de relations. Cette politique se traduit concrètement par la canalisation de l'épargne des migrants (dont les transferts sont estimés à 126 milliards de dollars par an par la Banque mondiale, à comparer au 60 milliards de l'aide publique au développement mondiale) vers des investissements productifs, et par la mobilisation des diasporas hautement qualifiées au bénéfice de leur pays d'origine. En pourcentage du PNB des pays destinataires, les transferts de fonds des migrants représentent entre 3 et 15 % et, dans bien des cas, 10 à 20 % du budget de l'Etat, voire davantage, et pourraient donc avoir un effet de levier important dans ces pays. Les diasporas scientifiques, techniques et économiques, constituées de migrants très qualifiés (enseignants, chercheurs, médecins, ingénieurs, informaticiens, cadre du privé) peuvent également jouer un rôle important en faveur du développement de leur pays d'origine : on estime ainsi à environ 600 000 le nombre d'ingénieurs originaires de pays du Sud travaillant pour des institutions du Nord, alors qu'ils sont 1,2 million au maximum dans les pays du Sud eux-mêmes. La France joue un rôle actif dans ce domaine, qu'illustre notamment la nomination d'un ambassadeur délégué au développement (poste occupé par M. Christian Connan) en décembre 2002 et le développement de programmes spécifiques de codéveloppement avec le Mali, le Sénégal, le Maroc et les Comores. Deux exemples de projets franco-maliens de codéveloppement 1. La commune de Gentilly (16 118 habitants, banlieue sud de Paris) a réalisé avec la commune de Duguwulowila, dans la région du Koulikoro au Mali, un centre de santé communautaire dans le village de Kolobo (1 600 habitants), sur l'initiative d'une association de jeunes franco-maliens de la deuxième génération : l'association des jeunes du 162 (qui avait déjà construit dans ce village un espace culturel). Le coût de l'équipement est de 182 000 euros (120 millions de francs CFA). La ville de Gentilly a financé environ 42 % de ce montant (77 000 euros) et le ministère des affaires étrangères/coopération un tiers (60 000 euros). L'association des jeunes du 162 a réuni, grâce au concours de la population gentilléenne et de la communauté malienne de Gentilly, 11 % du financement (20 000 euros). Les habitants de Kolobo bénéficient désormais d'un centre de santé équipé d'un dispensaire, d'une maternité ainsi que d'une pharmacie, géré par une équipe médicale composée d'un médecin, d'un aide soignant et de deux matrones. 2. L'association des ressortissants de la commune de Lamy (Mali) en France (ARLF), la coopération française et la société télécash Mali ont cofinancé à Lamy un bureau de poste-téléphone-télépaiement réalisé en liaison avec l'Office national de la poste malienne et la société de téléphone Sotelma. Ce bureau permettra aux habitants de la commune de Lamy mais aussi à ceux des six communes voisines (comptant au total 38 villages) de recevoir courriers et colis postaux (alors qu'ils étaient obligés jusqu'à présent de se rendre à Kayes, la capitale régionale), de disposer d'une cabine téléphonique publique et de recevoir de l'argent par télépaiement, transféré depuis l'étranger et, en particulier, depuis la France. Le coût du projet est d'environ 90 000 euros (60 millions de francs CFA). Télécash Mali en finance la moitié, les migrants et les habitants 20 % et la coopération française 30 %. Ce projet a eu un effet de levier important, la société Sotelma, constatant qu'il existait un marché non négligeable, ayant décidé la construction d'antennes relais et de cabines dans plusieurs villes voisines. L'Union devrait développer ce type d'action, en facilitant les transferts des fonds des migrants grâce à la mise en place de circuits moins coûteux, car les systèmes de transferts de fonds existants sont soit longs, soit coûteux (jusqu'à 20 % des sommes transférées lorsque l'on a recours à des institutions spécialisées comme Western Union), soit peu fiables (système des « valises » confiées à des proches). Des cautionnements mutuels, apportés par des migrants vivant en Europe pour financer un projet dans leur pays d'origine, devraient également être organisés pour faciliter l'accès au crédit des micro-sociétés ou des PME. Les élites de la diaspora pourraient être encouragées à contribuer davantage au développement de leur pays d'origine, en créant par exemple des « doubles chaires » pour des enseignants, médecins ou chercheurs, qui pourraient partager leur temps entre leur pays d'origine et le pays d'accueil, ou en finançant un complément de salaire pour permettre à un migrant qualifié de rentrer dans son pays pour y exercer une fonction de responsabilité. Des aides à la réinsertion de migrants désirant rentrer dans leur pays d'origine pour y créer une activité sont également envisageables. Le codéveloppement, ainsi conçu, contribue à organiser une « circulation des cerveaux » plutôt qu'une « fuite des cerveaux », et favorise une gestion concertée des migrations, dans l'intérêt mutuel des pays d'origine et de l'Union. La coopération avec les pays tiers dans la lutte contre l'immigration clandestine et la traite des êtres humains est également indispensable. La conclusion d'accords de réadmission, en particulier, est un instrument déterminant de cette lutte, qui doit s'appuyer sur une politique de retour efficace pour être crédible. 1) L'état des négociations des accords de réadmission Onze mandats de négociation ont été confiés à la Commission en vue de la conclusion de tels accords. Quatre l'ont été en 2000, avec le Maroc, la Russie, le Pakistan et le Sri Lanka ; deux en 2001, avec Hong Kong et Macao ; cinq en 2002 avec l'Ukraine, la Chine, la Turquie, l'Algérie et l'Albanie. Des clauses de réadmission sont en outre incluses dans les accords conclus avec les Etats ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) dans le cadre de l'accord de Cotonou (art. 13), conclu en 2000. Les négociations avancent difficilement, suscitant la préoccupation de certains Etats membres. A ce jour, seuls quatre accords ont été signés, avec Hong Kong, Macao, le Sri Lanka et l'Albanie. Les négociations avec la Russie, l'Ukraine et le Maroc pourraient aboutir, selon certaines sources, d'ici la fin de l'année 2005, mais des difficultés subsistent en raison des liens opérés avec les facilitations de visas et des obstacles rencontrés au sujet de la réadmission des ressortissants de pays tiers. Le dernier sommet UE-Russie, le 11 mai 2005, s'est d'ailleurs conclu par un échec sur ce point, l'accord de réadmission espéré n'ayant pu être signé à cette occasion. Les discussions avec la Turquie apparaissent également difficiles, celle-ci souhaitant placer cette négociation dans le cadre plus général de l'ouverture des négociations d'adhésion. Les négociations avec l'Algérie devraient s'ouvrir prochainement. Le programme de La Haye adopté en novembre 2004 prévoit la nomination par la Commission d'un représentant spécial pour la réadmission, afin d'accélérer les négociations. 2) La coopération avec la Libye Le Conseil « justice et affaires intérieures » a par ailleurs adopté des conclusions sur l'instauration d'un dialogue et d'une coopération avec la Libye en matière d'immigration, le 3 juin 2005. La Libye est en effet l'un des principaux pays de transit vers l'Europe (en particulier vers l'Italie) pour des milliers d'immigrants clandestins, qui font souvent tragiquement naufrage en Méditerranée. Ces conclusions font suite à une mission d'experts de la Commission et des Etats membres, effectuée en Libye entre le 28 novembre 2004 et le 6 décembre 2004, et à des demandes pressantes de l'Italie. A court terme, le Conseil souhaite entamer d'urgence des discussions avec la partie libyenne afin d'empêcher de nouvelles pertes de vies humaines en mer. Il envisage également des programmes de formation à destination des responsables libyens du contrôle des frontières ainsi que la définition d'une région de recherche et de sauvetage pour la Libye. A moyen terme, une coopération dans le domaine de l'éloignement, un projet de renforcement des contrôles à l'aéroport international de Tripoli et des projets opérationnels sont envisagés. L'accent est mis sur la nécessité, pour que cette coopération se développe, pour la Libye de respecter les obligations qui lui incombent en vertu de la convention de l'organisation de l'unité africaine (OUA), dans laquelle la convention de Genève relative au statut des réfugiés est considérée comme l'instrument de base universel en ce qui concerne le statut des réfugiés. Toute coopération dans ce domaine est en effet conditionnée à un plus grand respect des droits fondamentaux par la Libye. Cette coopération devrait être étendue, à terme, à d'autres pays méditerranéens et aux principaux pays africains d'origine et de transit. Le Livre vert a ouvert un débat nécessaire et opportun. Son examen et l'analyse comparée des politiques d'immigration menées par nos partenaires appellent plusieurs recommandations. Le Livre vert ne prend pas suffisamment en compte les spécificités de chaque Etat membre, et en particulier, les caractéristiques françaises en matière de démographie, d'emploi et d'immigration. Les propositions que la Commission formulera devront aller au-delà du constat global et uniforme du Livre vert, et offrir suffisamment de marge de manœuvre aux Etats membres pour s'adapter à leur situation. Il convient d'exploiter pleinement le potentiel du marché intérieur, et de le concilier avec le recours à l'immigration en provenance des pays tiers. Une levée partielle des restrictions à la libre circulation des travailleurs des nouveaux Etats membres devrait donc être envisagée, à titre expérimental, dans les régions et les secteurs où les tensions sur le marché du travail sont les plus fortes. Une politique européenne d'immigration économique est nécessaire, car l'admission de travailleurs étrangers par chaque Etat membre a, dans un espace sans frontières, des conséquences pour ses partenaires. Il s'agit donc bien d'une question d'intérêt commun qui requiert un certain degré d'harmonisation, dans le respect du principe de subsidiarité. En matière de sélection des travailleurs étrangers, la France devrait opter pour un système mixte, c'est-à-dire introduire un système à points pour la sélection des travailleurs qualifiés, et maintenir le système actuel d'opposabilité de la situation de l'emploi pour les travailleurs peu qualifiés. Des plafonds devraient être mis en place en matière d'immigration à des fins d'emploi et de regroupement familial, afin de développer l'immigration choisie. Fixés chaque année par le Parlement, ces plafonds permettraient à la France de se doter d'une véritable politique migratoire. La coopération avec les pays d'origine et de transit doit être renforcée, tant en matière d'immigration légale que de lutte contre l'immigration clandestine. Elle doit s'inscrire dans le cadre d'une politique européenne ambitieuse de codéveloppement, dans l'intérêt mutuel de l'Union et des pays tiers. La Délégation s'est réunie le mercredi 8 juin, sous la présidence de M. Pierre Lequiller, Président, pour examiner le présent rapport d'information. L'exposé du rapporteur a été suivi d'un débat. Le Président Pierre Lequiller a remercié le rapporteur pour la qualité de son exposé et sa présentation très instructive de la situation dans différents pays, qui révèle qu'en matière de gestion des migrations économiques, la politique de l'Union européenne n'en est encore qu'à ses balbutiements. Puis il a demandé au rapporteur des précisions sur le système de points en vigueur au Canada. M André Schneider a, quant à lui, souhaité connaître les modalités concrètes de sélection des candidats à l'immigration économique. En réponse, le rapporteur a apporté des précisions sur le système en vigueur au Canada, fondé sur un barème de points. Il est nécessaire de totaliser un minimum de 67 points, qui sont attribués en fonction d'un certain nombre de critères : âge, niveau d'études, maîtrise d'une langue étrangère, présence de membres de sa famille sur le territoire, etc. C'est la combinaison de ces critères qui permet d'atteindre le nombre requis de points. Le Canada envisage néanmoins de réviser sa grille d'évaluation afin de privilégier l'employabilité plutôt que le niveau de diplôme, pour tenir compte des réticences qu'ont certains ordres professionnels à s'ouvrir à des travailleurs étrangers. S'agissant des modalités concrètes de sélection, le rapporteur a évoqué, pour le Canada, la compétence d'un organisme d'Etat. Les candidats à l'immigration économique peuvent s'auto-évaluer directement sur Internet, et sont informés du nombre de points qu'ils totalisent. Mais l'accès au territoire canadien ne signifie pas forcément l'obtention d'un contrat de travail. A cet égard, la situation est différente en Espagne où le travailleur doit déjà détenir un contrat de travail et où les employeurs jouent un rôle déterminant dans le processus de sélection. Le rapporteur a pris l'exemple du secteur de l'hôtellerie. Après avoir préalablement évalué leurs besoins en personnel, les représentants des chambres de commerce se rendent directement dans le pays d'origine des travailleurs migrants pour y présélectionner leur main d'œuvre. Les entretiens peuvent avoir lieu par visioconférences et les employeurs espagnols confirment ou non l'embauche des candidats présélectionnés. En ce qui concerne la situation dans l'Union européenne, le rapporteur a rappelé une double contrainte. D'une part, le principe de libre circulation dont l'effet immédiat est que la régularisation dans un pays membre a des conséquences pour tous les autres ; d'autre part, le maintien de la règle de l'unanimité qui empêche des progrès rapides au niveau de l'Union. L'analyse des procédures en vigueur dans différents pays, européens ou non, souligne à quel point il n'existe pas de solution miracle. Certaines bonnes pratiques existent néanmoins, comme au Canada qui, servi par sa géographie et son voisinage, semble réussir le pari de l'intégration de ses travailleurs immigrés. S'exprimant sur les quotas, le rapporteur s'est déclaré attentif à certaines pratiques, tout en ayant conscience des limites de ce système. Réservés à l'immigration économique, les quotas ne concerneraient que 5 à 6 % de notre immigration et ne protégeraient pas à eux seuls des vagues d'immigration clandestine. En Italie, la mise en place des quotas se traduit par un système de « donnant-donnant » avec les pays concernés, qui permet de très bons résultats en matière de réadmission, notamment en ce qui concerne les ressortissants albanais. Pour autant, le système italien est excessivement bureaucratisé et à certains égards peu efficace. En outre, comme c'est également le cas en Espagne et aux Etats-Unis, la quasi-absence de contrôle une fois passées les frontières révèle une certaine hypocrisie. En conclusion, le rapporteur a souligné l'enjeu des politiques de co-développement pour déplorer la faiblesse des réalisations, malgré les efforts déployés ces dernières années par la France. Cette politique n'est pas une solution miracle et il est illusoire de croire que l'on peut obliger à rentrer dans leur pays d'origine des étrangers réguliers qui ne le veulent pas. M. André Schneider a évoqué l'immigration turque qui passe par l'Allemagne et se retrouve dans l'est de la France dans le cadre de l'espace Schengen, ainsi que les attitudes très disparates des consulats de France dans les pays tiers en matière de visas, certains refusant des dossiers très solides assortis de contrats de travail conduisant les parlementaires à intervenir auprès du ministère des affaires étrangères alors que d'autres se montrent plus ouverts. Il a demandé au rapporteur, en conclusion de son excellent rapport, quelle méthode il conseillait d'adopter pour l'Union européenne et pour la France. Le rapporteur a estimé que l'Union européenne se trouvait à mi-chemin, dans une situation où elle ne tire pas encore les conséquences de la définition de conditions d'entrée communes. La création de consulats communs à plusieurs pays de l'Union européenne hérisse encore de nombreux diplomates, alors qu'elle serait cohérente avec la définition de conditions d'entrée identiques dans l'espace Schengen. Elle serait en outre source d'économies, elle permettrait de mettre en place des procédés communs tels que l'empreinte biométrique, trop coûteuse pour chacun des consulats nationaux, et elle éliminerait les maillons faibles. L'Union européenne est allée trop loin pour ne pas aller plus loin, en uniformisant les conditions d'entrée non seulement sur le volet emploi, mais aussi sur le volet regroupement familial, afin d'éviter des phénomènes de « shopping ». M. André Schneider s'est interrogé sur la situation des clandestins et le choix de régulariser ceux qui ont une capacité d'emploi. Le rapporteur a indiqué qu'il n'y avait pas plus de clandestins en France qu'ailleurs et que l'Espagne et l'Italie ont procédé à des régularisations sur l'initiative des employeurs, très différentes de celles opérées jusqu'à présent en France. Le Président Pierre Lequiller a suggéré de mettre l'accent dans l'intitulé du rapport sur son aspect comparatif, afin de bien mettre en valeur tout son intérêt. M. Didier Quentin a demandé quels arguments étaient invoqués par les milieux diplomatiques contre le regroupement des consulats, comme conséquence de l'uniformisation des règles. Le rapporteur a rappelé que les règles d'entrée n'étaient pas complètement uniformisées et que le regroupement des consulats était une perspective acceptée par la France. Il existe d'ailleurs un projet, très avancé, de consulat franco-allemand au Cameroun. ANNEXE : I. A Paris : Ministère de l'Emploi, du travail et de la cohésion sociale - M. Jean GAEREMYNCK, conseiller d'Etat, directeur de la population et des migrations ; - Mme Brigitte FRENAIS-CHAMAILLARD, sous-directeur de la démographie, des mouvements de population et des questions internationales ; - Mme Nadia MAROT, chef du bureau des affaires internationales, direction de la population et des migrations. Ministère des Affaires étrangères - M. François BARRY MARTIN-DELONGCHAMPS, directeur des Français à l'étranger et des étrangers en France ; - M. Eric LUBIN, sous-directeur de l'asile et de l'immigration ; - M. Christian CONNAN, ambassadeur délégué au codéveloppement. Ministère de l'Intérieur - M. Stéphane FRATACCI, directeur des libertés publiques et des affaires juridiques ; - M. Bernard SCHMELTZ, chef de service, sous-direction des étrangers et de la circulation transfrontière. Institut national des études démographiques (INED) - M. François HERAN, directeur de l'Institut national des études démographiques (INED) ; - Mme Michèle TRIBALAT, directeur de recherches à l'INED, ancien membre du Haut Conseil à l'intégration ; - M. Alain PARANT, directeur de recherches à l'INED, spécialiste du vieillissement démographique. Commissariat général du Plan - M. Yves CHASSARD, chef du service des affaires sociales, coordinateur du groupe de travail Kazan ; - Mme Manon DOMINGUES DOS SANTOS, professeur d'économie à l'Université de Marne-la-Vallée et conseiller scientifique du CGP ; - Mme Marie-Cécile MILLIAT, chargée de mission au groupe Europe du Commissariat général du Plan. Agence nationale pour l'emploi (ANPE) - M. Claude COCHONNEAU, vice-président de la FNSEA et président de la commission main d'œuvre de la FNSEA ; - Mme Muriel CAILLAT, sous-directrice emploi - formation, FNSEA. - Mme Annie GAUVIN, directrice générale adjointe, Agence nationale pour l'Emploi (ANPE). Partenaires sociaux - Mme Odile BELLOUIN, secrétaire nationale de la CFDT chargée des droits de l'homme et de l'immigration ; - M. Jean-Louis TERJMAN, directeur aux affaires sociales, Fédération française du Bâtiment ; - M. Bernard LEVACHER, président du groupement des employeurs des organisations professionnelles agricoles (GEOPA), membre de la commission main d'œuvre de la FNSEA ; - Mme Muriel CAILLAT, sous-directrice emploi - formation, FNSEA ; - Mme Nadine NORMAND, attachée parlementaire de la FNSEA. Partis politiques - Mme Emmanuelle MIGNON, directrice des études de l'UMP ; - M. Malek BOUTIH, secrétaire national du Parti socialiste, chargé des questions de société. Organisations internationales et ambassades - M. Jean-Pierre GARSON, chef de la division des économies non membres et des migrations internationales de l'OCDE ; - Mme Sophie NONNENMACHER, Programme Office, Migration Management Service, Organisation internationale des migrations (OIM) ; - Mme Agnès M. JAOUICH, directrice du programme immigration, ambassade du Canada en France. Associations - Mme Marie DUFLO, GISTI ; - Mme Catherine TEULE, Ligue des Droits de l'Homme ; - Mme Bernadette HETIER, MRAP ; - M. Ali EL BAZ, ATMF (association des travailleurs maghrébins de France). A Bruxelles : Commission européenne - M. Jean-Louis de BROUWER, directeur asile et immigration, Direction générale Justice, liberté et sécurité ; - M. Jérôme VIGNON¸ directeur de la protection et de l'intégration sociales, Direction générale Emploi, Commission européenne ; - M. Antonis KASTRISSIANAKIS, directeur de la stratégie pour l'emploi et définition et coordination de la politique du Fonds social européen ; - Dr Egbert HOLTHUIS, chef adjoint d'unité, chargé de l'analyse de l'emploi, Direction générale Emploi, affaires sociales et égalité des chances, Commission européenne. Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne - M. Daniel LECRUBIER, avocat général, chef du service « Justice et affaires intérieures » ; - M. Gilbert ELKAIM, conseiller, représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne. Partenaires sociaux - Mme Catelene PASSCHIER, secrétaire confédérale, Confédération européenne des syndicats ; - Mme Lorena IONITA, conseiller chargé de l'immigration, Département des affaires sociales, UNICE. A Washington : - Mme Ana AVENDANO, Director of the Immigrant Worker Program, AFL-CIO ; - Mme Susan MARTIN, Director, Institute for the Study of International Migration, Georgetown University ; - Département du Travail/Office of the Assistant Secretary for Policy : M. Jorge PEREZ-LOPEZ, directeur de l'office pour les affaires économiques internationales, et Mme Ruth SAMARDICK, directeur de l'office de la programmation ; - Dr Demetrios PAPADEMETRIOU, President, Migration Policy Institute ; - Mme Michele WASLIN, Ph.D., Director of Immigration Policy Research, et M. Pedro CAVALLERO, Director of International Projects, National Council of La Raza ; - Me Sharon COOK POORAK, membre du conseil de direction de l'American Immigration Lawyers Association (AILA) du barreau américain ; - M. George FISHMAN, Staff Director du sous-comité de l'Immigration et de la sécurité des frontières, comité des affaires judiciaires. A Rome : - Préfet Anna Maria D'ASCENZO, chef du département des libertés civiles et de l'immigration au Ministère de l'intérieur ; - M. Franco PITTAU, Caritas Italia ; - M. Piero SOLDINI, secrétaire confédéral de la CGIL, chargé des questions liées à l'immigration ; - M. Piero BORONI, secrétaire national de la FILCA-CISL (secteur du bâtiment) ; - M. Guglielmo LOY, secrétaire confédéral de l'UIL, chargé des questions liées à l'immigration ; - M. Maurizio SILVERI, directeur du département chargé de l'immigration au Ministère du Travail. A Madrid : - Mme Ana CORRAL, responsable confédérale pour l'Immigration, UGT (Union Générale des Travailleurs) ; - Professeur Joaquín ARANGO, Directeur, Fundación Ortega y Gasset - Centre des migrations et de la citoyenneté ; - M. Javier DOZ ORRIT, secrétaire confédéral d'action syndicale internationale ; M. Julio RUIZ, secrétaire confédéral pour les migrations ; M. Mohamed HAIDOUR, adjoint au secrétaire confédéral pour les Migrations ; M. José Antonio JIMÉNEZ, adjoint au secrétaire confédéral pour les migrations, CC.OO (Confédération Syndicale des Commissions Ouvrières). - M. Emilio GALLEGO, secrétaire général de la Fédération Espagnole de l'Hôtellerie ; M. Roberto SUÁREZ SANTOS, Département des Relations du Travail - CEOE ; M. Juan MENDEZ-VALDÉS, Département des Relations du Travail - CEOE ; M. Luis MÉNDEZ, Département des Relations du Travail - Confédération Espagnole des Organisations d'Employeurs. - Mme Carmen PEREZ GONZALEZ, conseillère, cabinet du secrétariat d'Etat à l'Immigration et l'Emigration ; - Mme Maria LUISA CASADO LOPEZ, conseillère technique chargée des affaires internationales, direction générale de l'immigration, ministère du travail et des affaires sociales ; - M. Pablo LOPEZ PIETSCH, direction générale de l'intégration des immigrants, ministère du travail et des affaires sociales.
A Montréal : - M. François PLOURDE, directeur des Politiques et des Programmes pour travailleurs immigrants du Ministère de l'Immigration et des communautés culturelles du Québec ; - Mme Christiane HUOT, coordinatrice des relations internationales, ministère de l'immigration et des communautés culturelles du Québec ; - Mme Christian RICHARD, conseillère à la direction France du ministère des relations internationales du Québec ; - Mme Isabelle DELACROIX, déléguée de l'Office des Migrations Internationales ; - M. Yann HAIRAUD, directeur de l'Agence Montréalaise pour l'Emploi ; - M. Lionel LEBRETON, président de l'association « Objectif Québec » (association axée sur l'intégration des jeunes immigrants français) ; - M. François CREPEAU, professeur de droit international; Chaire de recherche du Canada en droit international des migrations/ Centre d'Etudes et de recherches internationales (CERIUM)/Université de Montréal ; - M. Jean-Claude ICART, Centre de recherche sur l'immigration, l'ethnicité et la citoyenneté/ Université de Québec à Montréal (UQAM) ; - Mme Micheline LABELLE, directrice au Centre de recherche sur l'immigration, l'éthnicité et la citoyenneté/Observatoire international sur le racisme et les discriminations/Département sociologie de l'UQAM. A Ottawa : - M. Jean-Claude MENARD, actuaire en chef au Bureau du Surintendant des institutions financières ; - Mme Diane VINCENT, sous-ministre déléguée, ministère Citoyenneté et Immigration Canada ; - Mme Luce CHARBONNEAU, conseillère principale en politiques, direction générale de la sélection, ministère Citoyenneté et Immigration Canada ; - Commissaire ZACCARDELLI, commandant de la Gendarmerie royale du Canada ; - M. Paul HEBERT, gendarmerie royale du Canada ; - M. Marcel MERETTE, professeur à l'Université d'Ottawa ; - M. Jacques JANSON, représentant des Français de l'étranger. A Vienne : - MM. Josef KYTIR et Gustav LEBHART, Statistik Autria ; - Mme Ingrid NOWOTNY, adjointe au Directeur du Marché du Travail, Ministère de l'Economie et du Travail ; - Mme Julia BOCK-SCHAPPELWEIN, WIFO (Institut autrichien pour la recherche économique) ; - M. Matthias VOGL, Ministère de l'Intérieur ; - M. Christoph KAINZ, Chambre économique d'Autriche (WKÖ) ; - M. Johann BEZDEKA, sous-directeur chargé des questions de séjour des étrangers et de la nationalité, Ministère de l'Intérieur. Le rapporteur tient à remercier les ambassadeurs de France à Madrid, Rome, Ottawa, Vienne et Washington, le consul général de France à Montréal, ainsi que leurs collaborateurs, pour leur accueil chaleureux, leur disponibilité et la qualité de l'information qu'ils lui ont apportée. 1 () Nations unies, division de la population, Replacement Migration : Is it a Solution to Declining and Ageing Population ?, New York, 2000. 2 () Commissariat général du Plan, « Immigration, marché du travail, intégration », Rapport du séminaire présidé par François Héran, La Documentation française, novembre 2002, p. 43-44. 3 () Commission européenne, Livre vert « Face aux changements démographiques, une nouvelle solidarité entre générations », COM (2005) 94 final, 16 mars 2005. 4 ()INSEE Première n° 1000, « Enquêtes annuelles de recensement : premiers résultats de la collecte 2004 », janvier 2005. 5 ()INSEE Première n° 1004, « Bilan démographique 2004 », février 2005. 6 ()INSEE Première n° 1009, « Enquête sur l'emploi 2004 », mars 2005. 7 () Les populations immigrées et étrangères en France ne se recoupent pas parfaitement : un immigré est une personne née étrangère à l'étranger et résidant en France. Certains immigrés ont pu devenir français, les autres restant étrangers. Un immigré n'est donc pas nécessairement étranger et réciproquement, certains étrangers sont nés en France (essentiellement des mineurs). 8 () L'Observatoire de l'ANPE, « Les demandeurs d'emploi étrangers », mars 2005. 9 () Jean-François Léger, « Les entrées d'étrangers sur le marché de l'emploi français de 1999 à 2001 », Migrations et Etudes, n° 118, décembre 2003. 10 () Commissariat général du Plan, « Immigration, marché du travail, intégration », Rapport du séminaire présidé par François Héran, La Documentation française, novembre 2002. 11 () Commissariat général au Plan, groupe Kazan, « Les tensions sur le marché du travail augmenteront-elles avec le vieillissement de la population ? », Le quatre pages, n° 1, janvier 2005 ; « Quelle politique migratoire pour les dix prochaines années ? Premières réflexions », Le quatre pages, n° 2, juin 2005 (disponibles sur le site du CGP : www.plan.gouv.fr). 12 () Stabilité des taux des 15-24 ans et des hommes de 25-54 ans, légère augmentation du taux d'activité des femmes des mêmes tranches d'âge et poursuite de la diminution de la participation des plus de 55 ans. 13 () Sociétés de services en ingénierie informatique. 14 ()Home Office, Accession Monitoring Report. Mau 2004 - March 2005, 26 mai 2005. 15 ()Manpower, EU Enlargement - One Year On, mai 2005. 16 () FAS (Foras Aiseanna Saothair - Training and Employment Authority), Quarterly Labour Market Commentary, 1er trimestre 2005. 17 () Délégation aux affaires européennes et internationales, ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité et ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées, L'Europe s'élargit - comment la France accueillera les ressortissants des nouveaux Etats membres ? 2004. 18 () Directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services ; règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté. 19 () C'est sur ce fondement qu'a été adoptée la résolution du Conseil du 20 juin 1994 concernant la limitation de l'admission à des fins d'emploi de ressortissants de pays tiers sur le territoire des Etats membres. 20 () Décision n° 2004/927/CE du Conseil du 22 décembre 2004 visant à rendre la procédure définie à l'article 251 du traité instituant la Communauté européenne applicable à certains domaines couverts par la troisième partie, titre IV, dudit traité. 21 () Communication sur une politique communautaire en matière d'immigration, 22 () Communication sur une méthode ouverte de coordination de la politique communautaire en matière d'immigration, COM (2001) 336 final, 11 juillet 2001. 23 () Proposition de directive du Conseil relative aux conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers à des fins d'emploi ou d'une activité économique indépendante, COM (2000) 386 final, 11 juillet 2001. 24 () V. Philippe de Bruycker, « Vers une politique européenne d'immigration économique ? », in Emmanuelle Bribosia et Andrea Rea (ed.), Les nouvelles migrations. Un enjeu européen. Editions complexes, 2002. 25 () EURES est le portail européen sur la mobilité de l'emploi, qui regroupe l'ensemble des services publics européens de l'emploi (UE 25 plus Islande, Norvège et Suisse). A terme, toutes les offres d'emploi diffusées par ces services devraient être mises en ligne sur son site. 26 () Commission, Etude sur les liens entre immigration légale et immigration clandestine, COM (2004) 412 final, 4 juin 2004. 27 () Directive 2004/114/CE du 13 décembre 2004 relative aux conditions d'admission des ressortissants de pays tiers à des fins d'études, d'échange d'élèves, de formation non rémunérée ou de volontariat. V. rapport d'information n° 1481 de la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, p. 37 s. 28 () Proposition de directive du Conseil relative à une procédure d'admission spécifique des ressortissants de pays tiers aux fins de recherche scientifique, COM (2004) 178 final, 16 mars 2004. V. rapport d'information n° 1851 de la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, p. 63 s. 29 () EURES est le portail européen sur la mobilité de l'emploi, qui regroupe l'ensemble des services publics européens de l'emploi (UE 25 plus Islande, Norvège et Suisse). A terme, toutes les offres d'emploi diffusées par ces services devraient être mises en ligne sur son site. 30 () Confédération européenne des syndicats, « Réaction de la CES au Livre vert de la Commission sur une approche communautaire de la gestion des migrations économiques », 15-16 mars 2005 (disponible sur le site Internet de la CES : www.etuc.org). 31 () V. Demetrios G. Papademetriou et Kevin O'Neil, « Efficient Practices for the Selection of Economic Migrant », juillet 2004. 32 () Michel Dorin et Michèle Pracht, « Le recrutement des salariés qualifiés ressortissants de pays tiers par les entreprises », Migrations Etudes, n° 120, février 2004. 33 ()Home Office, Controlling our borders : Making migration work for Britain. Five year strategy for asylum and immigration, février 2005. 34 () Décret du président du Conseil du 17 décembre 2004. 35 ()U.S. Departement of Labor, Bureau of International Labor Affairs, « Developments in International Migration to the United States: 2004 », p. 6. 36 () La Maison Blanche, Fact Sheet : Fair and Secure Immigration Reform, 7 janvier 2004. 37 () Fondé lors de la conférence de Barcelone des 27 et 28 novembre 1995, ce partenariat regroupe les 25 et dix pays du pourtour méditerranéen (Maroc, Algérie, Tunisie, Egypte, Israël, Autorité palestinienne, Jordanie, Liban, Syrie, Turquie). 38 () Algérie, Libye, Maroc, Mauritanie et Tunisie + Espagne, France, Italie, Malte, et Portugal. 39 ()Communication de la Commission du 3.12.2002 au Conseil et au Parlement européen: Intégrer les questions liées aux migrations dans les relations de l'Union européenne avec les pays tiers, COM (2002) 703 final. |