N° 1430
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2013
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2014 (n° 1395)
TOME V
ÉCONOMIE
ENTREPRISES
PAR Mme Anne GROMMERCH et M. Daniel FASQUELLE
Députés
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Voir les numéros : 1395, 1428 (annexe 19).
L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.
À la date de la Commission élargie relative à la Mission « Économie », plus de 92 % des réponses étaient parvenues à vos rapporteurs.
SOMMAIRE
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Pages
INTRODUCTION 5
I. PRÉSENTATION DES PRINCIPALES ORIENTATIONS DE LA MISSION « ÉCONOMIE » EN FAVEUR DES ENTREPRISES 8
A. L’ÉVOLUTION GÉNÉRALE DE LA MISSION « ÉCONOMIE » : L’OBSCURCISSEMENT DE L’AIDE APPORTÉE AUX ENTREPRISES 8
B. UN SOUTIEN DE L’ÉTAT AUX ENTREPRISES QUI DOIT NOTAMMENT EMPRUNTER LA VOIE FISCALE 9
C. EXAMEN DES CRÉDITS RELATIFS AUX ENTREPRISES AU SEIN DU PROGRAMME N° 134 11
II. FAVORISER LA COMPÉTITIVITÉ DES ENTREPRISES FRANÇAISES : UN ENJEU FONDAMENTAL POUR LES ANNÉES À VENIR 22
A. PREMIÈRE PRIORITÉ : RESTAURER LE TAUX DE MARGE DES ENTREPRISES 22
1. Le taux de marge insuffisant comme facteur principal du manque de compétitivité de nos entreprises 22
2. Rétablir le taux de marge des entreprises : les pistes à explorer afin de retrouver un sentier de croissance positif et durable 25
B. DEUXIÈME PRIORITÉ : SIMPLIFIER L’ENVIRONNEMENT NORMATIF DES ENTREPRISES 27
1. Une ambition ancienne mais des résultats encore très insuffisants 28
2. La nécessité et l’urgence d’une action volontariste et de grande ampleur 29
EXAMEN EN COMMISSION 31
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 35
Notre pays connaît depuis plusieurs années, au moins depuis la chute de la banque américaine Lehmann Brothers en septembre 2008, une crise financière et économique sans précédent. Dans ce contexte, l’amélioration de notre système productif est plus que jamais nécessaire afin de passer d’une économie traditionnellement centrée sur la demande (afin de favoriser en premier lieu la consommation) vers une économie davantage orientée vers l’offre, et donc vers les entreprises. Cette tendance, malheureusement trop ignorée par l’actuel Gouvernement, est pourtant nécessaire puisque la consommation nécessite soit qu’on puisse la provoquer par des envies et des produits nouveaux, soit qu’on puisse y répondre rapidement, au risque de conduire à une hausse des prix (due à un déséquilibre entre l’offre et la demande) qui viendrait amputer encore davantage le pouvoir d’achat de nos concitoyens.
Or, dans ce contexte à la fois incertain et attentiste, notre pays a pourtant de nombreuses cartes en main parmi lesquelles les entreprises trouvent une place privilégiée.
En 2012, la valeur ajoutée de l’économie nationale a représenté 1 820,9 Mds€, soit une croissance en valeur de 1,5 % par rapport à 2011 (cette hausse ayant été de 3 % en 2010). Les sociétés non financières et les entreprises individuelles ont, dans ce contexte, été les plus gros contributeurs en produisant près des deux tiers de la valeur ajoutée (64 % en 2012), devançant ainsi les administrations (18 %) et les ménages (11 %). Cet état de fait masque un léger infléchissement de la part des entrepreneurs individuels qui, s’ils représentaient 12,2 % de la valeur ajoutée brute en 1990, n’en représentaient que 7,6 % en 2012 ; en revanche, la part des sociétés non financières a toujours été au même niveau, passant de 55,7 % en 1990 à 55,9 % en 2012.
Aujourd’hui, la France bénéficie d’un tissu productif important. Si l’on reprend la définition de l’entreprise et de sa catégorie telle que définie dans le cadre de la loi de modernisation de l’économie (LME) du 4 août 2008, notre pays comptait au mois de décembre 2010 environ 3,08 millions d’entreprises dans les secteurs marchands non agricoles (1). Sur ces 3,08 millions, on dénombrait notamment 229 grandes entreprises (c’est-à-dire comptant plus de 5 000 employés) employant le quart de l’effectif salarié de notre pays, soit 4,4 millions de personnes. Par ailleurs, on dénombrait 4 600 ETI (entreprises de taille intermédiaire dont les effectifs varient entre 250 et 5 000 salariés d’une part, et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 1,5 Md€ ou dont le total de bilan ne dépasse pas les 2 Mds€) et, surtout, 2,9 millions de micro-entreprises (qui ont moins de 10 salariés ou dont le chiffre d’affaires est inférieur à 2 M€), ces dernières employant 95 % des salariés de notre pays.
Même si l’on pourrait souhaiter voir la France compter davantage d’ETI, dont on sait, comme nous le montre l’exemple allemand du « Mittelstand », qu’il favorise la densification du tissu industriel d’un pays et s’avère souvent plus efficace que le soutien à quelques champions nationaux, aussi performants soient-ils, on ne peut que se féliciter du dynamisme de notre monde entrepreneurial. En effet, et même s’il a baissé de 1,4 % en glissement annuel sur les trois derniers mois (soit 3,1 % sur les douze derniers mois), le nombre de créations d’entreprises est en hausse au mois de septembre 2013 par rapport au mois d’août (+ 4,6 % en données corrigées des variations saisonnières) :
Source : INSEE (Informations rapides, 16 octobre 2013, n° 237)
Selon vos rapporteurs, on doit tirer au moins deux enseignements principaux de cette tendance récente.
D’une part, le statut d’« auto-entrepreneur » mis en place sous l’ancienne majorité a incontestablement répondu à une forte attente sociale et dans les faits se voit couronné de succès. Cette tendance est lourde puisque, pour prendre l’exemple de l’année 2012, si l’on atteint le chiffre de 550 000 entreprises créées, c’est surtout en raison des entreprises individuelles (+ 2 %) et, notamment, des auto-entreprises (+ 5 %) puisque, hors ces dernières, les créations d’entreprises ont en réalité baissé de 6 %. Par ailleurs, comme l’ont montré certaines études, le succès de l’EIRL, dont le statut est entré en vigueur au 1er janvier 2011, a également été important puisque, en 2012, 4 041 EIRL ont été créées sans avoir de préexistence (à la différence de l’année 2011 où un nombre conséquent d’EIRL résultait en vérité de la transformation du statut d’entreprises privées en EIRL).
D’autre part, cela démontre que l’initiative privée doit être fortement encouragée. Les statistiques démontrent là aussi que si l’âge moyen auquel on crée son entreprise est de 38 ans, le régime de l’auto-entrepreneuriat connaît un vrai succès auprès des moins de 30 ans et des plus de 60 ans, cette vague créatrice et cette volonté de se prendre en mains touchant donc toutes les couches de la population.
Si l’on tient compte de ces différents chiffres, ainsi que de ceux relatifs par exemple à l’effort en R&D (recherche et développement), la France pourrait s’enorgueillir de bénéficier d’un ensemble productif de tout premier ordre. Tel n’est malheureusement pas le cas en raison des incertitudes de la conjoncture économique mondiale et de l’action de l’actuel Gouvernement depuis plus d’un an et demi qui, par divers biais, a provoqué un certain découragement dans le monde de l’entreprise. Même si le solde sur les perspectives générales, qui représente l’opinion des industriels sur l’activité de l’industrie dans son ensemble, poursuit une progression amorcée depuis avril 2013 (son niveau se situant désormais selon l’INSEE au-dessus de sa moyenne de long terme, ce qui n’était plus le cas depuis juillet 2011), les perspectives du présent projet de loi de finances, notamment en matière fiscale, risquent fort d’entraver une reprise qui avait déjà grand peine à se dessiner.
Dans ce contexte, l’examen du budget consacré aux entreprises doit être effectué en prenant de nombreuses précautions. La mission « Économie » bénéficie, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, de 3 645 961 086 € en autorisations d’engagement (AE) et de 3 652 016 784 € en crédits de paiement (CP). Au sein des six programmes de la mission (aux trois traditionnels que sont les programmes nos 134, 220 et 305 ont été adjoints trois nouveaux programmes nos 405, 406 et 407), le programme n° 134 demeure le plus important avec 1 016 477 402 € en AE (soit 1 026 894 643 € en CP).
Pour autant, compte tenu à la fois de certains arbitrages rendus dans le cadre de sa politique économique et fiscale et du fléchage de certains crédits qui tendent à amoindrir l’effort à fournir en faveur du secteur productif, vos rapporteurs vous demanderont de donner un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission « Économie ».
A. L’ÉVOLUTION GÉNÉRALE DE LA MISSION « ÉCONOMIE » : L’OBSCURCISSEMENT DE L’AIDE APPORTÉE AUX ENTREPRISES
Mme Anne Grommerch, votre rapporteure sur ce budget l’année dernière, avait déjà regretté que la nouvelle maquette de la mission « Économie », si elle est légitime en tant qu’elle traduit ainsi les priorités de la nouvelle majorité, ne conduise ainsi à obscurcir les comparaisons avec les exercices précédents. On ne peut malheureusement que renouveler cette constatation cette année, la structure de la mission « Économie » ayant de nouveau fortement évolué.
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, la mission « Économie » a donc gagné trois nouveaux programmes, en portant leur nombre à six :
– le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » ;
– le programme 220 « Statistiques et études économiques » ;
– le programme 305 « Stratégie économique et fiscale » ;
– le programme 405 « Projets industriels » (nouveau) ;
– le programme 406 « Innovation » (nouveau) ;
– le programme 407 « Économie numérique » (nouveau).
En dépit de l’adjonction de trois nouveaux programmes qui représentent en cumulé près de 1,675 Md€ (AE=CP), la mission « Économie » subit une baisse de 0,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 retraitée des mesures de périmètre et de transferts. Si la masse salariale de la mission (hors cotisations au titre des pensions de l’État) représente 705 M€ (soit une hausse de 0,7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 retraitée), les crédits hors personnel s’élèvent à 2,7 Mds€ (en baisse de 24,6 M€ par rapport au précédent exercice).
Bien qu’ayant trait au monde de l’entreprise, le programme n° 405 « Projets industriels » ne sera pas examiné dans le présent avis, celui-ci faisant l’objet d’un avis spécifique de la part de notre collègue Jean Grellier. Il importe néanmoins de faire le lien entre ce programme, qui consiste notamment à accompagner l’investissement des filières industrielles dans certains projets, et le programme n° 134 spécifiquement tourné vers les entreprises, le soutien à notre système productif relevant bien entendu de plusieurs programmes.
Le programme n° 406 « Innovation » est également un programme transversal à l’ensemble de la mission « Économie » qui sera en grande partie piloté par Bpifrance. Le soutien à l’effort privé en R&D doit être pris à bras-le-corps et vos rapporteurs ne peuvent que s’en féliciter, même si la création de structures supplémentaires dédiées risque de disperser les efforts et de complexifier certains circuits. Il faudra veiller à la mise en œuvre de ces nouveaux dispositifs, tout en continuant de renforcer l’attractivité tant du CIR (dont le coût, estimé à 6 Mds€ pour 2014, devra sans nul doute être maîtrisé) que du CICE.
Quant au programme n° 407 « Économie numérique », il témoigne de la prise de conscience des pouvoirs publics de l’importance de l’économie numérique pour la croissance de nos entreprises, ces nouvelles technologies étant dotées d’un effet de levier important (notamment par le biais de l’effort demandé en R&D ainsi que celui des effets produits en termes de productivité).
Si vos rapporteurs peuvent comprendre l’isolation de ces budgets aux thématiques il est vrai spécifiques, il n’en demeure pas moins que cet éclatement au sein de la mission « Économie » contribue à obscurcir la lecture de l’effort budgétaire en faveur des entreprises. En effet, qu’il s’agisse des programmes n° 405 ou n° 406, les abondements dont ils font l’objet seront en pratique tout aussi profitables à l’ensemble de la sphère entrepreneuriale que le sont la plupart des actions du programme n° 134. Aussi, il conviendra à l’avenir d’user d’un spectre plus large que celui utilisé jusqu’à cet exercice afin d’appréhender dans toute sa complétude autant que sa complexité l’effort budgétaire de l’État en direction des entreprises.
Même si le consensus existe autour de l’importance des entreprises pour la santé économique de notre pays, les voies et moyens pour les soutenir empruntent des chemins fort divergents selon les majorités au pouvoir.
Or, lorsqu’on analyse le projet de loi de finances pour 2014 et les mesures d’ores et déjà adoptées dans le cadre des débats budgétaires sur la première partie du projet de loi (adoptée le 22 octobre par l’Assemblée nationale, le déficit budgétaire envisagé étant de 82,121 Mds€ contre 82,234 Mds€ initialement prévu), force est de constater que certaines mesures risquent de handicaper la compétitivité de nos entreprises.
Si l’on ne peut que se réjouir de voir le Gouvernement abandonner son idée de taxer l’excédent brut d’exploitation (EBE) au taux de 1 % pour compenser la perte de recettes consécutive à la disparition de l’imposition forfaitaire annuelle (IFA), on ne peut que regretter de voir l’impôt sur les sociétés (IS) une nouvelle fois alourdi. La France, qui compte dès à présent l’un des taux de l’impôt sur les sociétés les plus élevés de l’Union européenne (33,33 %), n’étant dépassée que par la Belgique (33,99 %) et talonnée par l’Espagne (30 %), a donc choisi de créer une « surtaxe temporaire », dont le taux va passer de 5 % à 11 %, conduisant le taux de l’IS à passer à 37 % pendant deux ans. Même si le principe de cette contribution exceptionnelle a été décidé sous l’ancienne législature, il n’en demeure pas moins que ce nouvel alourdissement risque de créer un mauvais signal en termes de compétitivité, thème qui fera d’ailleurs l’objet de développements spécifiques dans le cadre de la deuxième partie du présent avis. Une réflexion doit surtout intervenir sur l’assiette de l’IS afin de permettre à son taux de descendre sous la barre psychologique des 30 %, à défaut de pouvoir s’aligner à brève échéance sur les taux pratiqués aussi bien par l’Italie (27,5 %) que par la Suède (26,3 %), l’Autriche (25 %) ou l’Allemagne (15 %) (2) . Le Gouvernement a d’ores et déjà annoncé la réunion d’« Assises de la fiscalité » en fin d’année ; on ne peut que souhaiter, à cette occasion, la remise à plat d’un système qui, outre qu’il est démoralisant pour l’esprit entrepreneurial dans notre pays, est à la fois inéquitable (il affecte davantage les PME que les grandes entreprises) et partiellement inefficace (puisque nombre d’entreprises y échappent grâce aux dérogations et allègements existants).
Vos rapporteurs ne peuvent également qu’approuver la reconduction du statut de la jeune entreprise innovante (JEI) jusqu’au 31 décembre 2016 tout en regrettant l’abandon de certains avantages qui y étaient liés, notamment en termes d’exonération sur les plus-values de cession de titres. Dans le même ordre d’idées, vos rapporteurs approuvent l’initiative du Gouvernement de reconduire le dispositif du crédit d’impôt recherche (CIR), celui-ci s’étendant à de nouvelles dépenses comme celles relatives aux jeunes docteurs dont les rémunérations pourront désormais être prises en compte dans l’assiette du CIR pendant 2 ans, et ce pour le double de leur montant. Si l’on y ajoute la mise en œuvre à compter du 1er janvier 2014 du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui équivaut à une baisse de cotisations sociales sous la forme d’une réduction de l’impôt à acquitter en 2014 au titre de l’exercice 2013, la politique du Gouvernement s’avère favorable à l’innovation, s’inscrivant en cela dans un mouvement initié depuis plusieurs années.
Au-delà de certaines mesures qui, encore une fois, peuvent être approuvées sur tous les bancs de l’Assemblée nationale, il convient d’avoir à l’esprit que les entreprises réclament avant tout une stabilité et une lisibilité des règles qui leur sont applicables. De ce seul point de vue, la « pause fiscale » réclamée par nos concitoyens serait la bienvenue pour tous, consommateurs comme entreprises !
Au sein de la mission « Économie », seul le programme n° 134 intéressait jusqu’alors directement les entreprises. Désormais, il faudra compter avec les nouveaux programmes nos 405 et 406 qui, comme on l’a évoqué précédemment, ne pourront manquer d’avoir un impact sur l’activité de nos entreprises. La présente analyse s’en tiendra néanmoins au seul programme n° 134, le recul faisant évidemment défaut pour mesurer l’impact des deux autres programmes sur l’activité dans notre pays.
Si l’on souhaite aller davantage dans le détail, vos rapporteurs insistent pour mettre l’accent sur les actions n° 2 « Commerce, artisanat, services » (qui représente 8,7 % des dotations du programme), n° 3 « Actions en faveur des entreprises industrielles » (18,3 % des dotations), n° 7 « Développement international des entreprises » (9,6 % des dotations), n° 8 « Expertise, conseil et inspection » (1,8 % des crédits) et n° 20 « Financement des entreprises et attractivité du territoire » (4,3 % des crédits) qui concernent très directement les entreprises. Ces cinq actions représentent 42,7 % des crédits du programme n° 134, soit 434 414 367 € en AE.
Les dépenses d’investissements s’élèvent à 283 726 780 € en AE soit 293 426 928 € en CP, les dépenses relevant du Titre 2 (dépenses de personnel) représentant pour leur part 150 687 587 € (CP). Avant d’en venir à l’analyse des crédits proprement dite, vos rapporteurs regrettent la modification de la présentation qui existe dans le PAP (projet annuel de performances) quant au détail de l’évolution des ETPT (équivalent travaillé temps plein). Alors que, les années précédentes, les documents budgétaires faisaient apparaître en détail l’évolution des effectifs selon le type d’emplois considérés (catégorie A +, A, B ou C), cette distinction a aujourd’hui disparu. Compte tenu de l’importance des dépenses du Titre 2 (dépenses de personnels) dans le budget, le fait de masquer ces évolutions est dommageable : on ne peut qu’espérer un retour à l’ancienne présentation dès le projet de loi de finances pour 2015.
Sur les trois derniers projets de loi de finances, les crédits du programme n° 134 « Développement des entreprises et de l’emploi » peuvent être retracés de la manière suivante :
PROGRAMME N° 134 (MISSION « ÉCONOMIE »)
VARIATIONS BUDGÉTAIRES (crédits demandés) 2012 / 2013 / 2014
Numéro et intitulé de l’action concernée (nomenclature 2014) |
PLF 2012 |
PLF 2013 |
PLF 2014 |
Observations (sur les principales variations constatées entre 2012 et 2013) |
Observations (sur les principales variations constatées entre 2013 et 2014) |
02 - Commerce, artisanat et services |
137 387 441 € |
101 298 341 € |
88 141 381 € |
- 26,27 % : ainsi qu’à une contraction des dépenses de fonctionnement qui passent de 15 M€ (crédits demandés dans le PLF 2012) à 9,153 M€ (dans le présent PLF) soit une baisse de 38,98 % |
- 12,99 % : baisse due à une forte diminution des dépenses hors Titre 2 (- 19,98 %) qui passent de 65 783 672 € (AE, PLF 2013) à 52 638 084 € (AE, PLF 2014) |
03 – Actions en faveur des entreprises industrielles |
209 038 408 € |
203 067 186 € |
186 119 668 € |
- 2,86 % : baisse essentiellement due à la diminution des crédits relevant du financement de la politique en faveur de l’action relative au soutien de la compétitivité hors prix des entreprises |
- 8,345 % : baisse princi-palement due à une forte diminution des dépenses hors Titre 2 (- 16,64 %) |
04 – Développement des télécommunications, des postes et de la société de l’information |
202 353 575 € |
44 905 000 € |
194 832 213 € |
- 77,8 % : baisse très importante consécutive au changement dans le financement du contrat relatif la compensation par l’État des surcoûts de la mission de service public de transport postal de La Poste |
+ 433,876 % : hausse spectaculaire due à basculement des aides apportées la Poste dans son rôle d’acheminement de la presse qui passe donc du programme « Presse » (Mission Médias) au programme « Entreprises » (Mission Économie) |
05 – Fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des produits structurés |
50 000 000 € |
Nouvelle action créée en conséquence de la signature du Pacte de confiance et de responsabilité entre l’État et les collectivités territoriales conclu le 16 juillet 2013 | |||
07 – Développement international des entreprises |
120 835 252 € |
104 200 000 € |
97 800 000 € |
- 13,77 % : baisse due au changement de programme pour financer l’AFII (Agence française des investissements internationaux) |
- 6,14 % |
08 – Expertise, conseil et inspection |
19 476 789 € |
17 905 986 € |
18 640 511 € |
- 8,06 % |
+ 4,1 % |
13 – Régulation des communications électroniques et des postes |
23 315 564 € |
22 884 064 € |
22 855 385 € |
- 2,7 % |
- 0,125 % |
14 – Régulation et contrôle des marchés de l’énergie |
19 768 162 € |
19 351 869 € |
18 939 304 € |
- 2,11 % : diminution principalement consécutive à la baisse des frais de tenue du site internet (en baisse de 125 000 € par rapport au PLF 2012) |
- 2,13 % : baisse due à une forte diminution des dépenses de fonction-nement courant |
15 – Mise en œuvre du droit de la concurrence |
20 503 781 € |
20 646 141 € |
20 751 901 € |
+ 0,7 % |
+ 0,51 % |
16 – Régulation concurrentielle des marchés |
67 470 250 € |
70 484 600 € |
72 097 518 € |
+ 4,47 % : hausse due à une revalorisation des traitements en dépit d’une légère baisse des effectifs |
+ 2,29 % : hausse des moyens de fonctionnement dévolus à la DGCCRF |
17 – Protection économique du consommateur |
115 801 328 € |
121 086 013 € |
122 182 981 € |
+ 4,56 % |
+ 0,9 %: hausse des effectifs de la DGCCRF |
18 – Sécurité du consommateur |
41 327 292 € |
42 715 905 € |
45 268 419 € |
+ 3,36 % |
+ 5,96 % : hausse des moyens de fonctionnement dévolus à la DGCCRF |
20 – Financement des entreprises et attractivité du territoire |
19 700 000 € |
43 712 807 € |
Nouvelle action du programme n° 134 qui prend notamment en compte les moyens financiers dévolus à l’AFII (dont une SCSP de 14,2 M€), qui relevait auparavant de l’action n° 7 |
+ 221,9 % : instauration de moyens supplé-mentaires destinés à permettre à Bpifrance de garantir ses prêts à l’avenir | |
21 – Développement du tourisme |
44 569 064 € |
35 135 314 € |
Nouvelle action du programme n° 134 qui revêtait auparavant la forme d’un programme dédié au sein de la Mission « Économie » (programme n° 223) |
- 21,16 % | |
Total du |
1 000 133 372 € |
832 814 169 € |
1 016 477 402 € |
- 16,73 % |
+ 22,053 % |
L’examen détaillé du programme n° 134 fait apparaître les principales évolutions suivantes relatives aux entreprises :
– action n° 2 « Commerce, artisanat, services ». Cette action représente seulement 8,7 % du programme, ce qui confirme une nette diminution depuis plusieurs exercices, celle-ci ayant par le passé représenté 15,25 % du programme en 2011, 13,74 % en 2012 et 12,2 % en 2013. Dotée d’un montant de 88 141 381 € aussi bien en AE qu’en CP (contre 101 298 341 € lors du précédent exercice), cette action revêt pourtant un rôle essentiel puisqu’elle doit en principe soutenir le développement du commerce de proximité, de l’artisanat et des services à la personne au moyen d’interventions financières diverses et de dispositifs réglementaires et fiscaux. On observe tout d’abord un niveau des dépenses du Titre 2 (dépenses en personnels) d’une stabilité quasi parfaite (bénéficiant de 35 503 297 €, elles connaissent une très légère diminution de 11 372 €, soit de seulement 0,031 %), celles-ci s’accompagnant d’une hausse des effectifs puisque l’on passe de 415 à 425 ETPT sur cette seule action. Si l’on peut se réjouir de voir affectés des personnels en quantité suffisante pour assurer des missions essentielles à notre tissu industriel et artisanal, on ne peut néanmoins que regretter la baisse des dépenses hors Titre 2 qui sont parfois plus productives et dont l’effet de levier est, en matière économique, bien souvent plus important. Ainsi, dans le cadre du présent projet de loi de finances, celles-ci diminuent fortement de 13 145 588 €.
Reprenant des remarques faites les années précédentes aussi bien par des parlementaires de la majorité que de l’opposition, vos rapporteurs ne peuvent que déplorer à son tour la baisse très significative des crédits dont bénéficie le FISAC (Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce) qui, avec seulement 20 M€, diminuent de 12,3 M€ par rapport au précédent exercice. Il est paradoxal, pour ne pas dire incompréhensible, d’entendre vantée l’utilité du FISAC et de constater la baisse continue des moyens alloués, ceux-ci ayant été de 100 M€ en AE (90 M€ en CP) dans le cadre du PLF 2009 !
Créé par l’article 4 de la loi n° 89-1008 du 31 décembre 1989, c’est un outil d’accompagnement des évolutions collectives concernant les secteurs du commerce, des services et de l’artisanat dont le rôle essentiel est reconnu par tous. Cette nouvelle évolution est expliquée de la manière suivante par le Gouvernement :
- d’une part, le FISAC va bientôt faire l’objet d’une réforme structurelle dans le cadre du projet de loi (3) portée par Mme Sylvia Pinel, ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme, dont la discussion interviendra en Commission des affaires économiques au mois de décembre prochain. Constatant malheureusement que « la soutenabilité financière du dispositif n’éta[it] pas assurée » pour reprendre les termes de l’étude d’impact du projet de loi, ce qui a d’ailleurs conduit à ne plus subventionner certaines natures de dépenses, le FISAC devrait désormais passer d’une logique de guichets à une logique d’appels à projets, le FISAC ayant à l’avenir vocation à ne subventionner que des dépenses préalablement sélectionnées ;
- d’autre part, l’action n° 2 du programme n° 134 dispose désormais d’une nouvelle subdivision spécifiquement consacrée à l’EPARECA (Établissement public d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux), qui bénéficie d’une dotation de 7 M€. Or, lors des précédents projets de loi de finances, le financement de l’EPARECA était en grande partie assuré par le FISAC : le fait de sortir de « l’enveloppe FISAC » ces 7 M€ relativise donc également la baisse constatée.
Si la plupart des autres postes de dépenses ne subissent pas d’évolution particulièrement notable (tout au plus peut-on indiquer que l’aide au départ des commerçants diminue de manière assez significative de presque 25 %), vos rapporteurs souhaitent néanmoins faire deux remarques :
- tout d’abord, l’action n° 2 s’enrichit d’une nouvelle subdivision dotée de 2,79 M€ (AE=CP) consacrée aux « Services à la personne », la DGCIS reprenant les missions de l’ANSP (Agence nationale des services à la personne) au 1er janvier 2014, date de sa disparition. Dans le cadre du précédent projet de loi de finances, l’ANSP bénéficiait d’une subvention pour charges de service public de 9 M€ ; compte tenu de l’importance que le Gouvernement souhaite accorder aux services à la personne, vos rapporteurs regrettent que les raisons tant de la diminution des crédits dépendant de l’action n° 2 et affectés à ce secteur que de la disparition même de l’ANSP ne soient pas détaillées dans le cadre des documents budgétaires existants ;
- ensuite, tout en constatant que le transfert aux autres collectivités bénéficie de moyens équivalents à ceux du précédent exercice (8,96 M€ contre 8,9 M€ dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013), vos rapporteurs s’interrogent sur les raisons qui ont conduit le Gouvernement à ne plus subventionner le CEFAC (centre d’études et de formation des assistants techniques du commerce et des services). Cette association, créée en 1961 à l’initiative du réseau des chambres de commerce et d’industrie, assure la formation et le perfectionnement des assistants techniques du commerce, des services et du tourisme, c’est-à-dire des cadres qui accompagnent les mutations des TPE et des PME et participent ensuite au développement des territoires économiques. Or, alors que le CEFAC figurait l’année dernière parmi les organismes de formation spécialisés explicitement soutenus par l’État, celui-ci a disparu de l’énumération dans le cadre du présent PAP (projet annuel de performance). Là encore, quelques explications auraient pu être les bienvenues ;
– l’action n° 3 « Actions en faveur des entreprises industrielles » demeure toujours la plus importante action du programme puisqu’elle représente 18,3 % de ses dotations contre 24,2 % lors du précédent exercice. Accusant une baisse conséquente de ses crédits de 8,34 % par rapport au PLF 2013, cette action, bénéficiant de crédits à hauteur de 186 119 668 € en AE (soit 195 819 816 € en CP), connaît en outre une forte diminution de ses effectifs, le nombre d’ETPT passant de 1 185 à 1 157. À l’image de l’évolution constatée sur de nombreuses autres actions du programme n° 134, cette baisse tient non au niveau des dépenses du Titre 2 qui demeurent stables (96 543 779 € en AE contre 96 606 225 € en 2013) mais aux dépenses hors Titre 2 qui, pour leur part, connaissent une baisse non négligeable (89 575 889 € contre 107 460 961 €, soit plus de 16,64 %).
Les dépenses de fonctionnement baissent de 27,68 % par rapport à 2013 tandis que les dépenses d’intervention diminuent pour leur part de 8,28 % (si l’on raisonne en AE, la proportion s’élevant à 12,7 % en CP).
Mise en œuvre tant par la Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services (DGCIS) que, au niveau de l’administration déconcentrée, par les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE), elle regroupe tous les facteurs permettant d’améliorer la compétitivité de l’industrie française, qu’il s’agisse de son environnement économique, réglementaire ou financier.
Si, au sein du premier ensemble constitué par les dépenses de fonctionnement, les sommes allouées par exemple aux « Études et expertises » demeurent stables (bénéficiant de 3 220 192 € en AE, elles ne connaissent une baisse que de 96 000 € par rapport au précédent exercice), de même que celles destinées à la surveillance des marchés (dotée de plus de 1,16 M€, elles ne subissent qu’une diminution de 183 781 € en un an), celles relatives à d’autres postes sont en revanche en très forte diminution. C’est tout d’abord le cas des crédits de fonctionnement du réseau déconcentré qui passent de 6 052 183 € à seulement 1 780 593 €, soit une baisse de 70,58 %. Cette diminution s’explique en grande partie par un transfert définitif des crédits de fonctionnement mutualisés des DIRECCTE d’un montant de 3 784 012 € vers l’action n° 5 « Soutien » du programme n° 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail » au sein de la mission « Travail et emploi ». Cette action, d’un montant de 254 952 385 € en AE (soit 265 115 288 € en CP), représente 32,8 % du programme ; dans le cadre du PLF 2014, elle bénéficie d’un important transfert de crédits en provenance tant du programme n° 305 « Stratégie économique et fiscale » que du programme n° 134, tous deux au sein de la mission « Économie ».
Au sein des dépenses d’intervention, si les contributions aux organismes internationaux augmentent de manière significative (hausse de 450 000 €) pour tenir compte de la participation de la France, à compter du 1er janvier 2014, au financement du Comité européen de normalisation dans le domaine de l’électricité (CENELEC) et de la Commission électrotechnique internationale (CEI), vos rapporteurs ne peuvent que regretter fortement la baisse importante des subventions accordées aux CTI (centres techniques industriels). Celles-ci passent en effet de 23 409 190 € à 20 000 000 €, soit une diminution de 14,56 %. On constate également une baisse qui affecte les actions en faveur de la politique industrielle et du soutien à la compétitivité hors prix des PME, celle-ci diminuant pour sa part de 16,36 % (les crédits en AE passant de 45 435 230 € à 38 000 000 €). À l’heure où notre compétitivité demeure en berne, où le soutien à notre tissu industriel mérite plus que jamais d’être revalorisé (en termes de certification, d’aide au financement, de promotion du « fabriqué en France », de soutien en R & D…), cette évolution est difficilement compréhensible alors même, et on ne peut que s’en réjouir, qu’un soutien est explicitement apporté aux filières et au « fabriqué en France » pour un montant global de 11,2 M€ (cf. action n° 5-2-b au sein des actions pilotées par le réseau déconcentré des DIRECCTE) ;
– l’action n° 4 « Développement des télécommunications, des postes et de la société de l’information » connaît une forte augmentation de ses dotations, prenant ainsi le contre-pied de la baisse significative dont elle avait fait l’objet l’année dernière par rapport à ses dotations dans le cadre du PLF 2012. Ainsi, après avoir bénéficié en 2012 de 202 353 575 € en AE (le montant étant identique en CP) et vu ensuite ses dotations portées à seulement 44 905 000 € dans le PLF 2013 (soit une baisse de 77,80 %), l’action n° 4 bénéficie cette année de 194 832 213 € (tant en AE qu’en CP), soit une hausse de plus de 433 %. Comme on pouvait le supposer, il ne sert à rien de se réjouir de cette hausse spectaculaire qui résulte d’un tour de passe-passe administratif qui nuit fortement à la lisibilité des documents budgétaires.
En effet, la forte baisse constatée lors du précédent exercice venait du fait que la totalité de la compensation par l’État des surcoûts de la mission de service public de transport de la presse par voie postale confiée à La Poste avait été transférée sur la mission « Médias ». Dans le projet de loi de finances pour 2012, la subvention totale s’élevait à 259,2 M€, imputés à hauteur de 107,2 M€ sur la mission « Médias » et de 152 M€ sur la mission « Économie ». Dans le cadre du PLF 2013, les autorisations d’engagement prévues à ce titre s’étaient élevées à 249,5 M€ et avaient été imputées en totalité sur le programme n° 180 relatif à la presse (au sein de la mission « Médias »), le transfert depuis le programme n° 134 représentant alors un montant de 143 M€. Le Gouvernement a semble-t-il considéré que cette dotation devait davantage être considérée comme une aide apportée à La Poste plutôt qu’une aide apportée à la presse alors même que, dans un rapport rendu en juillet 2013, la Cour des comptes a inclus ce soutien parmi les « aides directes » au secteur de la presse écrite (4)… ; Sur cette évolution extrêmement critiquable, vos rapporteurs renvoient à l’avis budgétaire sur la presse rédigé par notre collègue M. Rudy Salles, au nom de la Commission des affaires culturelles ;
– l’action n° 5 « Fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des produits structurés » est une nouveauté dans le cadre du présent projet de loi de finances : son importance (4,9 % du programme) est réelle.
Cette action est la concrétisation d’une des promesses faites par le Gouvernement aux collectivités territoriales lors de la signature à l’Hôtel de Matignon, le 16 juillet 2013, du « Pacte de confiance et de responsabilité entre l’État et les collectivités locales ». À l’issue de nombreux travaux menés entre l’État et les organisations représentatives des territoires (Association des Maires de France, Assemblée des Départements de France, Association des Régions de France, Association des Maires Ruraux de France…), il a été décidé de créer un Fonds de soutien afin d’accompagner les collectivités territoriales qui avaient pu souscrire des emprunts sensibles dans leurs démarches transactionnelles avec les établissements bancaires, les conséquences des prêts toxiques octroyés en particulier par la Banque Dexia ayant durablement affecté nombre de collectivités sur notre territoire. Ce faisant, ce fonds s’est substitué à la précédente structure qui avait été créée par l’article 4 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012, les collectivités souhaitant en bénéficier devant adresser leur demande à l’État avant le 15 mars 2015.
Il est prévu que ce fonds intervienne de deux manières : soit en prenant en charge une partie des indemnités de remboursement anticipé des collectivités qui sortent de leurs emprunts toxiques, soit en prenant en charge une partie des intérêts des emprunts considérés. Abondé à hauteur de 100 M€, ses ressources proviennent donc pour moitié de la présente action n° 5 (50 M€), pour un quart (25 M€) de fonds en provenance du programme n° 122 « Concours spécifiques et administration » au sein de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », et pour un quart (25 M€ de nouveau) d’une ré-allocation des crédits délégués à l’Agence nationale de services et de paiement.
Vos rapporteurs ne peuvent que saluer la création de cette action qui devrait ainsi permettre d’aider de nombreuses collectivités dont la situation financière est parfois extrêmement fragile ;
– l’action n° 7 « Développement international des entreprises » recouvre, comme son nom l’indique, toute l’action menée en faveur de l’export et de la conquête de nouveaux marchés par nos entreprises. Dans un contexte de mondialisation toujours plus concurrentielle et agressive, les moyens destinés à favoriser le développement de nos entreprises à l’international doivent être renforcés et diversifiés.
Principalement mise en œuvre par Ubifrance, cette action voit ses crédits légèrement diminuer, passant de 104 200 000 € à 97 800 000 € en AE comme en CP (soit une baisse de 6,14 %). Il convient de rappeler que l’action des pouvoirs publics en faveur du soutien de nos entreprises à l’international passe également par l’action n° 20 du programme n° 134 (qui concerne essentiellement, comme on le verra, le financement de l’AFII, Agence française pour les investissements internationaux) et le programme n° 305 « Stratégie économique et fiscale » (dont l’action n° 2 « Développement international de l’économie française » est dotée, cette année, de 91 870 021 €, soit une baisse de 1,39 % par rapport au précédent exercice).
Vos rapporteurs ne peuvent que se féliciter des actions d’ores et déjà conduites par Ubifrance, grâce à ses 80 bureaux présents dans 70 pays à travers le monde, l’organisme « bras armé du commerce extérieur » en France pouvant par ailleurs s’appuyer tant sur les chambres de commerce et d’industrie françaises à l’étranger (CCIFE) dans les pays où il n’est pas implanté, que sur les conseillers du commerce extérieur de la France. Le contrat d’objectifs et de performance (COP) signé le 14 septembre 2011 entre Ubifrance et l’État pour la période 2012-2014 doit être amendé avant la fin de l’année 2013 en vue de confier à Ubifrance de nouvelles missions. À ce titre, vos rapporteurs souhaitent une mise en œuvre rapide de cet enrichissement, la modification du COP ayant déjà pris du retard puisque, annoncée comme devant être signée avant la fin du premier trimestre 2013, elle a subi un nouveau report à la fin du premier semestre qui n’a toujours pas vu de concrétisation à ce jour. Enfin, vos rapporteurs espèrent que les moyens qui seront dévolus à Ubifrance dans les prochains projets de loi de finances seront en adéquation avec les nouvelles ambitions affichées par le Gouvernement ;
– l’action n° 8 « Expertise, conseil et inspection » ne représente que 1,8 % du programme (contre 2,3 % l’année précédente) mais ses crédits connaissent pourtant une hausse réelle, passant de 17 905 986 € à 18 640 511 € (AE=CP), soit une augmentation de 4,1 %. Passant de 165 dans le PLF 2013 à 162 ETPT, cette action est mise en œuvre par le CGEIET (Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies) (5) et vise à éclairer les acteurs publics par des études et des conseils en tous domaines relevant de la sphère économique ;
– action n° 13 « Régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) » : représentant 2,2 % du programme (contre 2,7 % l’année précédente), elle connaît une très légère baisse budgétaire de seulement 0,125 % puisqu’elle passe de 22 884 064 € en 2013 (tant en AE qu’en CP) à 22 855 385 €. Finançant principalement les missions menées par l’ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes), l’action n° 13 connaît également une très légère diminution de ses effectifs qui passent de 173 à 171 ETPT en un an ;
– l’action n° 14 « Régulation et contrôle des marchés de l’énergie », ne représente que 1,9 % du programme n° 134 avec une dotation de 18 939 304 € (en AE comme en CP) contre 19 351 869 € en 2013 (soit 412 565 € en moins, somme tout à fait comparable aux 417 000 € de moins entre les budgets 2012 et 2013). Principalement destinée à financer les actions conduites par la CRÉ (Commission de régulation de l’énergie), elle permet ainsi aux différents acteurs du secteur de garantir à la fois la liberté de choix du fournisseur et l’accès régulé des tiers aux réseaux. Cette année, ce sont essentiellement les « dépenses spécifiques liées à l’activité » (- 74 017 €) et surtout les « dépenses de fonctionnement courant » (- 275 000 €) qui baissent ;
– l’action n° 15 « Mise en œuvre du droit de la concurrence (Autorité de la concurrence) » connaît de nouveau une légère augmentation par rapport au précédent exercice. Bien que ne représentant que 2 % du programme, l’action n° 15 est en hausse de 105 760 €, ses crédits passant ainsi de 20 646 141 € à 20 751 901 € (+ 0,51 %). Même si le projet annuel de performance ne détaille rien à ce sujet, on peut supposer que l’évolution des dépenses du Titre 2 provient essentiellement d’une revalorisation salariale puisque, tout en bénéficiant d’une hausse de 321 837 €, elle supporte la disparition d’un ETPT (leur nombre passant de 186 à 185). Quant aux dépenses hors Titre 2, elles connaissent une diminution de 216 077 €, le poste de dépenses ayant connu la plus forte baisse étant celui des dépenses immobilières (- 200 000 €) ;
– l’action n° 16 « Régulation concurrentielle des marchés » bénéficie de crédits importants cette année encore, à hauteur de 72 097 518 € (AE=CP) contre 70 484 600 € l’année précédente (soit une augmentation de 1 612 918 €, équivalent à près de + 2,29 %), la part dans le programme passant de 8,5 % en 2013 à 7,1 % en 2014. Vos rapporteurs approuvent l’octroi de nouveaux moyens à la DGCCRF (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), les ETPT portant sur cette action passant de 946 en 2013 à 986 dans le présent PLF, répondant ainsi à un souhait de tous les parlementaires qui s’inquiétaient de voir depuis plusieurs années la DGCCRF accueillir sans cesse de nouvelles missions sans pour autant bénéficier des effectifs correspondants ;
– l’action n° 17 « Protection économique du consommateur » bénéficie également d’une hausse conséquente dans le cadre du présent projet de loi de finances puisque, dotée de 121 086 013 € en 2013, elle voit ses crédits portés à 122 182 981 €, sa part atteignant ainsi 12 % du programme (la hausse étant légèrement supérieure à 0,9 %). Conduite principalement par la DGCCRF, cette action vise à garantir une bonne information du consommateur afin qu’il accomplisse ses achats en parfaite transparence et en toute connaissance de cause. Là encore, on ne peut que saluer la hausse des effectifs de cette administration, l’action n° 17 passant de 1 482 ETPT en 2013 à 1 504 dans le présent PLF ;
– l’action n° 18 « Sécurité du consommateur » bénéficie, dans le même ordre d’idées que les deux précédentes actions, d’une hausse budgétaire, ses crédits passant de 42 715 905 € (AE=CP) à 45 268 419 € (idem), soit une augmentation de 5,97 % (+ 2 552 514 €). Vos rapporteurs se félicitent de la hausse des moyens dévolus à la DGCCRF, qui met en œuvre cette action, et qui connaît dans ce cadre une forte hausse de ses effectifs qui passent de 573 à 619 ETPT ;
– l’action n° 20 « Financement des entreprises et attractivité du territoire » contribue au développement des PME et des ETI grâce notamment à des interventions en garantie et en cofinancement, ainsi que grâce à une promotion du territoire visant à favoriser les investissements internationaux dans notre pays. Principalement conduite par l’AFII (Agence française pour les investissements internationaux), cette action connaît un essor tout particulier dans le cadre du présent projet de loi de finances puisque, passant de 19 700 000 € en 2013 à 43 712 807 €, elle est en hausse de plus de 218,9 %. Si la subvention pour charges de service public d’un montant de 13,95 M€ affectée à l’AFII est en légère baisse (- 1,76 %), cette action bénéficie surtout désormais d’une dotation de 25 M€ afin de permettre à la Banque publique d’investissement de garantir efficacement les prêts qu’elle peut être amenée à concéder aux entreprises qui le souhaiteraient ;
– l’action n° 21 « Développement du tourisme », nouvelle au sein du programme n° 134 depuis l’année dernière, connaît une sérieuse diminution de crédits (9 433 750 €) qui sera analysée par notre collègue Éric Straumann dans son avis budgétaire spécifiquement consacré au tourisme.
Au final, vos rapporteurs constatent que le Programme n° 134 bénéficie bel et bien d’une hausse de crédits dans le cadre du présent projet de loi de finances (+ 22,053 %). Or, l’analyse des actions ci-dessus montre que cette augmentation provient essentiellement des actions n° 4 (avec le rapatriement des aides à la Presse vers la Mission « Économie »), n° 5 nouvellement créée (Fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des produits structurés) et n° 20 (afin d’aider Bpifrance à garantir certaines opérations de prêts).
Sans pour autant contester l’utilité de ces deux dernières hausses, vos rapporteurs regrettent néanmoins que les actions n° 2 et 3 permettant de soutenir très directement les entreprises voient leurs dotations baisser de, respectivement, près de 13 % et 8,5 %. Il importe que le fléchage de ces deux actions soit renforcé à l’avenir afin d’en faire bénéficier immédiatement les entreprises, l’amélioration du contexte économique et du milieu dans lequel elles exercent leur activité ne pouvant seule suffire à faire repartir la croissance de notre pays.
II. FAVORISER LA COMPÉTITIVITÉ DES ENTREPRISES FRANÇAISES : UN ENJEU FONDAMENTAL POUR LES ANNÉES À VENIR
Bien évidemment, ce n’est pas dans le cadre d’un avis budgétaire que l’on pourra analyser en profondeur l’ensemble des aspects la compétitivité de notre économie. L’ambition de cette contribution, outre qu’elle souhaite participer aux débats qui agitent notre pays sur ce sujet depuis plusieurs années, est surtout de se focaliser sur les pistes essentielles de nature à favoriser durablement l’activité de nos entreprises.
Quel que soit l’angle d’attaque utilisé pour l’appréhender, celles-ci souffrent indéniablement d’un manque de compétitivité. Aux yeux de vos rapporteurs, il faudrait se focaliser sur deux priorités absolues que sont d’une part le rétablissement du taux de marge de nos entreprises (A) et, d’autre part, la simplification de l’environnement normatif dans lequel elles évoluent (B).
Le taux de marge est, à bien des égards, la condition centrale d’une restauration durable de la compétitivité des entreprises. De façon assez mécanique, un taux de marge important peut seul permettre de faire les investissements nécessaires à la conquête de nouveaux marchés, entraînant de ce fait une baisse des prix qui agira de manière positive sur la consommation et la croissance dans son ensemble. Or, depuis plusieurs années, le taux de marge de nos entreprises est notoirement insuffisant (1) ce qui doit conduire à s’engager résolument dans de nouvelles pistes afin de le restaurer et de parvenir ainsi à un sentier de croissance positive et durable (2).
1. Le taux de marge insuffisant comme facteur principal du manque de compétitivité de nos entreprises
Le taux de marge (qui mesure le rapport entre l’excédent brut d’exploitation et la valeur ajoutée) est un élément essentiel pour rendre compte de la compétitivité d’une entreprise.
Si un taux de marge élevé est susceptible d’avoir plusieurs significations (puisqu’il prend notamment en compte le prix de l’énergie ou les effectifs de l’entreprise, une TPE pouvant recourir à des prestataires extérieurs qui ne sont pas rémunérés sur les fonds de l’entreprise mais en fonction des résultats ce qui accroît mécaniquement le numérateur), il est bien souvent l’indicateur le plus parlant de la capacité qu’ont les entreprises à pouvoir investir. Or, l’investissement étant un indicateur de la compétitivité d’une économie, il en résulte logiquement que les deux notions sont intimement liées. En France, les entreprises ont connu en 2011 un taux de marge d’environ 27,5 %, celui-ci ayant quelque peu remonté depuis pour s’établir à 28,3 % au premier trimestre 2013 (6).
Les études les plus récentes font néanmoins apparaître une diminution relativement continuelle du taux de marge des entreprises françaises qui, si elle est en partie due à des facteurs structurels de notre économie (par exemple un mauvais positionnement sur certains marchés privilégiant le « moyen de gamme » sur le « haut de gamme »), a surtout été tributaire de la situation économique globale. Ainsi, après avoir fortement augmenté dans les années 1997-1998 (conséquence à la fois d’un rattrapage économique et d’une croissance mondiale revigorée), le taux de marge s’est stabilisé à un niveau d’environ 30 % avant de connaître une nouvelle hausse à compter de 2006 (atteignant alors un niveau de presque 35 %) qui, avec la crise de 2008, s’est arrêtée puis métamorphosée en baisse continuelle depuis.
Si l’on regarde l’évolution du taux de marge des entreprises dans le secteur de l’industrie depuis près de 15 ans, on observe les évolutions suivantes :
Base AMECO, Commission européenne et exploitation CGSP :
Or, pour vos rapporteurs, la reconstitution du taux de marge est certainement l’élément-clé de nature à permettre à nos entreprises de gagner en compétitivité même si, comme le reconnaissent plusieurs analystes, comparer les taux de marge d’un pays à l’autre reste délicat compte tenu des éléments qui y sont inclus et des méthodes de calcul utilisées (7) .
Le taux de marge est en effet l’élément fondamental à partir duquel découlent plusieurs autres indicateurs économiques qui, par voie de conséquence, témoignent également d’une baisse de la compétitivité. En effet, contrairement à ce que l’on peut souvent penser, la baisse du taux de marge des entreprises françaises ces dernières années est moins due à la dégradation de la productivité globale des facteurs de production ou de la hausse du coût du travail qu’à une baisse de la demande tant intérieure qu’extérieure (8) . Elle est donc avant tout une conséquence de la baisse de la consommation. En effet, une baisse de la demande conduit immédiatement à un ralentissement de l’investissement et de la production, dégradant ainsi mécaniquement la productivité en tant que telle ; en termes relatifs, le coût du facteur travail va alors augmenter (puisque, avant de licencier ou de baisser les salaires, le chef d’entreprise va maintenir le même niveau des salaires pour une production moindre) ce qui correspond en réalité et très directement à une dégradation du taux de marge.
Même si le taux de marge ne tient compte que des effets-prix et ne permet pas d’apprécier les arbitrages que peut par exemple être conduite à faire l’entreprise entre prix et volume, il est au centre de la compétitivité d’une entreprise. Bien qu’un faible taux de marge puisse parfois correspondre à une position dominante sur le marché, son évolution va, par exemple, souvent de pair avec celle du solde de la balance commerciale. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si, lors de sa dernière étude sur le monde des entreprises, l’INSEE commence par analyser la compétitivité des entreprises françaises à travers le volume des exportations françaises dans les exportations mondiales. Cette part a diminué de 35,7 % en valeur depuis 2000 et reste stable depuis 2010, aux alentours de 3,3 %. En 2012, la France a néanmoins bénéficié d’un recul du déficit commercial de 7 Mds€ pour atteindre 67 Mds€, l’amélioration du solde (la première depuis 2009) s’expliquant tant par la croissance de nos exportations (+ 3,2 %) que par la stabilité de nos importations (+ 1,3 %). Cette année, les chiffres devraient être encore meilleurs puisque, pour prendre les données les plus récentes, le déficit de la balance commerciale s’est établi à 4,91 Mds€ au mois d’août, contre 5,08 Mds€ en juillet.
Or, le fait que la balance commerciale ait été excédentaire en 1997 (+ 23,121 Mds€) et que le déficit ait été historique en 2011 (- 73,658 Mds€) correspond parfaitement à l’évolution du taux de marge des entreprises de notre pays. En effet, l’amélioration des chiffres en 2012 tient en partie au fait que la situation économique globale s’est dégradée au plan mondial (hausse des échanges de 2,3 % en volume contre plus de 6 % en 2011) et que, en période de faible activité, les importations ralentissent en raison d’une consommation atone, réduisant mécaniquement le déficit commercial à volume d’exportations constant. Or, comme on l’a vu, et même si l’analyse de la balance commerciale comme indicateur de la compétitivité d’un pays doit être effectuée avec précaution, l’évolution de la consommation est en grande partie la cause d’un taux de marge positif ou négatif (9).
2. Rétablir le taux de marge des entreprises : les pistes à explorer afin de retrouver un sentier de croissance positif et durable
En guise de conclusion du présent avis, vos rapporteurs souhaitent insister sur les grands principes qui doivent être suivis afin de contribuer à l’amélioration de la compétitivité de nos entreprises.
Si l’on souhaite restaurer le taux de marge des entreprises, vos rapporteurs estiment tout d’abord que la politique économique doit favoriser la demande. Outre une baisse du niveau des prélèvements obligatoires qui pèse sur les ménages, il convient également de mettre en place une politique de l’offre qui, en favorisant l’environnement des entreprises, les incite à favoriser cette demande, notamment par le biais du niveau des salaires.
Pour ce faire, la France doit sans nul doute revoir en partie son modèle entrepreneurial. En effet, notre pays souffre d’un manque cruel de PME et PMI (petites et moyennes industries), par ailleurs moins dynamiques que leurs consœurs allemandes, alors qu’elle dispose en revanche de grandes entreprises parfaitement compétitives sur la scène internationale. Sans pour autant rechercher la création d’un « Mittelstand » français à brève échéance, c’est pourtant dans cette direction qu’il faut s’engager (10). À ce titre, vos rapporteurs souhaitent que l’effort des pouvoirs publics, notamment en termes budgétaires, pour soutenir la création et surtout accompagner les jeunes entreprises, prenne de l’ampleur et soit maintenu sur le long terme.
Vos rapporteurs pensent également qu’une baisse de la fiscalité sur les entreprises est nécessaire. Il ne s’agit pas de se concentrer uniquement sur une amélioration de la compétitivité par le seul biais d’une diminution des coûts salariaux, la France n’ayant pas vocation à concurrencer les pays pratiquant les salaires les plus bas à travers le monde. Il s’agit bien davantage, comme cela a été précisé précédemment, de permettre aux entreprises de restaurer leurs marges afin qu’elles puissent investir de nouveau à grande échelle.
Enfin, vos rapporteurs souhaitent également interpeller le monde entrepreneurial qui ne peut ni ne doit tout attendre de l’État. Comme l’a par exemple souligné M. Jean-Philippe Cotis, alors directeur général de l’INSEE, les problèmes de compétitivité des entreprises françaises « relèvent plus de la qualité des produits que de leurs coûts » (11). La France s’est essentiellement positionnée sur le moyen de gamme, secteur qui ne trouve guère de marché et qui est moins riche en investissements que le haut de gamme. De plus, les entreprises françaises souffrent d’une véritable spécialisation sectorielle, principalement composée de filières peu intensives en R&D. Un repositionnement est plus que jamais nécessaire : il convient que de nouvelles filières se créent pour conquérir de nouveaux marchés, de nature à retrouver une compétitivité perdue mais qui n’en demeure pas moins à notre portée.
Ces efforts peuvent d’autant plus facilement être effectués que la France compte de nombreux atouts.
Dans un pays où les citoyens n’ont plus confiance en leurs élites (qu’il s’agisse des personnels politiques et économiques, des acteurs sociaux ou culturels…), il est facile et même naturel de céder à une certaine « sinistrose ». Dans ce contexte, vos rapporteurs souhaitent rappeler que les entreprises françaises bénéficient de nombreux atouts qui contribuent à les rendre compétitives dans l’économie mondiale.
Sans prétendre en établir une liste exhaustive, vos rapporteurs souhaitent tout d’abord rappeler que les entreprises peuvent compter en France sur une main-d’œuvre de haut niveau que plusieurs pays, dont la population est vieillissante, souhaitent d’ailleurs attirer, à commencer par l’Allemagne qui recherche depuis plusieurs mois plus de 90 000 postes d’ingénieurs (notamment dans les régions du Bade-Wurtemberg, de la Rhénanie et de la Bavière), le manque de main-d’œuvre qualifiée représentant un manque à gagner de près de 30 Mds€ pour les PME outre-Rhin. Les 25-34 ans constituent en France une population particulièrement qualifiée puisque 43 % d’entre eux ont atteint un niveau d’éducation supérieure, un pourcentage supérieur à celui observé en Suède (42 %) ou aux États-Unis (41 %), et très supérieur à celui de l’Allemagne (26 %) ou de l’Italie (20 %).
En dépit d’un coût du travail plus élevé que chez ses voisins et concurrents (en 2012, les coûts salariaux unitaires étaient de 103 en France sur une base = 100 en 2000, alors qu’ils ont baissé en Espagne et en Allemagne, même s’ils ont remonté dans ce dernier pays pour atteindre un niveau de 97 en 2012 également), la France bénéficie de la quatrième productivité horaire en Europe.
Les entreprises françaises sont également en pointe en matière de R&D, grâce notamment au dispositif du CIR (crédit d’impôt-recherche). L’importance de la R&D, qui résulte notamment de fortes collaborations entre recherche publique et recherche privée dans le cadre de structures publiques ou de clusters comme il en existe notamment sur le Plateau de Saclay en région parisienne, est d’ailleurs reconnue à l’étranger comme étant un des principaux atouts de notre économie. Une récente étude menée par l’AFII (Agence française pour les investissements internationaux) a mis en évidence les atouts de la recherche française pour attirer les investissements étrangers, la France étant en 2012 la deuxième destination de ce type d’investissements après la Grande-Bretagne (12). L’étude de l’AFII a également pointé la très forte implication des acteurs étrangers présents sur notre territoire dans la R&D française, les filiales étrangères contribuant à hauteur de 29 % à l’effort national de R&D (en 2010), soit 15 points de plus qu’aux États-Unis et 24 points de plus qu’au Japon ! En outre, conséquence directe des éléments susmentionnés, la France bénéficie d’une population de chercheurs très importante avec 8,3 chercheurs pour 1 000 actifs en 2009, devant l’Allemagne (7,9) et le Royaume-Uni (7,5), cette part ayant d’ailleurs fortement progressé au fil du temps (+ 12 % depuis 2005).
Enfin, il importe de rappeler que les entreprises françaises bénéficient d’infrastructures de tout premier plan, élément également considéré comme faisant partie des atouts de notre pays aux yeux des investisseurs étrangers.
La mise en œuvre de l’ensemble de ces leviers devrait ainsi permettre à nos entreprises, soutenues par les pouvoirs publics, de restaurer leurs marges et de pouvoir de nouveau intervenir à bon escient sur la scène économique mondiale.
L’un des maux dont souffre la France est sans nul doute la profusion des normes, tant législatives que réglementaires, aussi bien nationales qu’européennes, qui s’y appliquent. Cette situation est connue depuis longtemps et régulièrement dénoncée. Pourtant, les efforts mis en œuvre pour ralentir l’inflation législative et pour diminuer le stock normatif sont relativement anciens (1). S’ils doivent bien évidemment être poursuivis, ces efforts doivent aujourd’hui emprunter de nouvelles pistes afin de permettre aux entrepreneurs de se préoccuper davantage de leurs projets que des règles qui leur sont applicables (2).
Que l’on permette à l’un de vos rapporteurs, dont la profession est d’être professeur de droit, de citer le doyen Ripert qui, dans son ouvrage Le déclin du droit (1949), écrivait : « Les esprits critiques dénoncent la mauvaise rédaction des lois, la confusion des pouvoirs, les conflits de juridiction, l’arbitraire des décisions. Mais on ne veut pas dénoncer la source même de ce mal : l’excès de réglementation ».
Force est de constater que cet excès de réglementation n’a cessé de prendre de l’ampleur au point que l’on estime aujourd’hui à 400 000 le nombre de normes en stock applicables en France(13). Or, au-delà des complexités engendrées tant pour connaître la loi que pour bien l’appliquer, cet « impôt papier » (14) constitue un sérieux handicap pour les entreprises de notre pays. Au-delà des nombreuses lois de simplification du droit qui ont pu être adoptées notamment au cours notamment de la précédente législature, les Gouvernements se sont tous préoccupés d’endiguer ce mouvement inflationniste. Ainsi, le précédent Gouvernement avait fait de la lutte contre « l’impôt papier » un chantier prioritaire, d’ailleurs présenté comme tel dans le cadre du premier Conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP) qui s’était tenu le 12 décembre 2007. Par la suite, un rapport avait été demandé à notre collègue Mme Laure de La Raudière afin d’identifier plusieurs simplifications du droit applicables aux entreprises industrielles qui seraient susceptibles de faciliter leur activité et d’améliorer leur compétitivité.
Cette volonté s’est ensuite concrétisée par la nomination, le 2 novembre 2010, de M. Rémy Bouchez conseiller d’État, au poste de Commissaire à la simplification, au sein du Secrétariat général du Gouvernement. Sa lettre de mission était alors explicite, M. Bouchez se voyant en effet confier la tâche visant « en application avec le ministère chargé de l’industrie, à ce que l’impact des normes applicables à l’activité des entreprises soit efficacement évalué, en prêtant une attention particulière à la situation du secteur de l’industrie et des petites et moyennes entreprises ». Le 25 janvier 2013, un décret nommait Mme Célia Vérot, maître des requêtes au Conseil d’État, au poste de directrice, adjointe au secrétaire général du Gouvernement, chargée de la simplification. Vos rapporteurs ne peuvent que se féliciter d’une pareille continuité, nécessaire pour mettre fin à une inflation normative fortement déstabilisatrice pour nos concitoyens.
Au-delà de cette volonté de simplification, vos rapporteurs souhaitent insister sur la bonne direction qui a été donnée à ce vaste chantier concernant les entreprises. Ainsi, dès la précédente législature, les rapports rendus par nos collègues Bruno Retailleau et Éric Doligé militaient en faveur d’une simplification des règles à l’attention des entreprises (15). Dans la même veine, le rapport Lambert – Boulard vient de souhaiter une rapide mise en œuvre de la simplification normative au bénéfice notamment des entreprises afin de créer « un choc de compétitivité juridique ». C’est dans cette optique que, après que le Président de la République a lancé un « choc de simplification », Mme Vérot a procédé à de très nombreuses consultations à l’adresse de différents acteurs, dont les fédérations, les organisations patronales et syndicales, les entreprises elles-mêmes dans la perspective du CIMAP (Comité interministériel pour la modernisation de l’action publique) qui s’est tenu le 17 juillet dernier.
Sachant qu’une réduction de 25 % des charges administratives pesant sur les entreprises permettrait une augmentation du PIB européen de 0,8 % à court terme (1,4 % à plus long terme) selon les estimations de la Commission européenne, ce sujet a été fortement relancé. C’est également dans ce contexte que notre collègue Thierry Mandon a été chargé par le Premier ministre d’une étude sur la simplification administrative et fiscale au bénéfice des entreprises, son rapport ayant été remis le 1er juillet dernier (16).
Lors de son audition par l’un de vos rapporteurs, Mme Célia Vérot a très clairement souhaité aller dans le sens d’une simplification administrative au bénéfice des entreprises. Ainsi, le Commissariat à la simplification, dans une démarche de dialogue avec les entreprises et leurs représentants, a confirmé la procédure dite du « DCEV » (date commune d’entrée en vigueur) qui, sur le site de Légifrance, avertit les entreprises de l’entrée en vigueur à date fixe (les 1er janvier, 1er avril, 1er juillet ou 1er octobre) des textes réglementaires, évitant ainsi une adaptation trop dispersée et trop continue à la réglementation en vigueur. En outre, un délai de deux mois est également toujours prévu pour permettre aux entreprises de s’adapter aux changements législatifs et réglementaires.
En outre, le SGMAP (Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique) a mis en place une procédure de « test PME » qui permet, en cours d’élaboration d’un texte (et notamment d’un projet de loi), de consulter les acteurs économiques sur la mise en œuvre concrète d’une disposition envisagée et, ainsi, de la modifier avant sa rédaction définitive.
Vos rapporteurs approuvent vivement cette démarche de dialogue qui conduit à éviter toute erreur d’interprétation ou toute inapplication des textes en cours d’élaboration. Ils souhaitent par ailleurs un développement des télé-déclarations et télétransmissions qui, outre qu’elles facilitent les démarches par le biais de portails détaillés et extrêmement didactiques, font gagner un temps précieux aux entreprises, notamment aux TPE et PME. Ainsi, il convient de rappeler que près de 40 % des TPE ont désormais pris l’habitude de remplir et d’envoyer leurs déclarations sociales (notamment la DADAS-U) par internet. Vos rapporteurs souhaitent également attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité de diffuser cette culture de la simplification à l’ensemble des acteurs et notamment à l’égard du monde judiciaire. En effet, les entreprises peuvent être bien souvent parties à un procès et, faute de clarté dans la norme ou dans la manière dont il convient de l’appliquer, se voir engagées dans des procédures particulièrement longues et coûteuses, les entreprises devant même provisionner une partie de leur trésorerie pour faire face à leurs frais de justice.
Si l’on souhaite faire le lien entre l’amélioration de la compétitivité de notre économie et la simplification normative, il convient également d’assurer, outre la baisse de l’inflation législative, une meilleure stabilité de la norme. Rien n’est en effet plus perturbant et déstabilisateur qu’un changement incessant des règles, certaines intervenant alors même que les précédentes n’auraient pas encore reçu toutes leurs mesures d’application.
À l’issue de la commission élargie du 6 novembre 2013, la commission des affaires économiques a examiné pour avis les crédits de la mission « Économie », sur les rapports de M. Jean Grellier, Mme Anne Grommerch et M. Daniel Fasquelle, M. Éric Straumann, M. Damien Abad, Mme Corinne Erhel, Mme Michèle Bonneton et M. Joël Giraud (voir le compte rendu officiel de la commission élargie, sur le site internet (17)de l’Assemblée nationale).
La Commission est saisie d’un amendement n° II-CE12 de Mme Sophie Dion et plusieurs de ses collègues.
M. Daniel Fasquelle, rapporteur pour avis. Cet amendement a trait à un sujet que nous avons été nombreux à évoquer cet après-midi, et qui concerne le FISAC. Alors que nous souhaitons tous sa mobilisation au service de nos commerces de proximité, le budget du FISAC baisse cette année encore pour n’être plus que de 20 M€. Le présent amendement, en augmentant les crédits du FISAC de 5 M€, vise à porter son budget au niveau de celui qui était le sien l’année dernière.
M. le président François Brottes. Je crains, Monsieur le rapporteur, que l’avis de la Commission ne soit négatif.
La Commission rejette l’amendement de M. Daniel Fasquelle.
Puis elle examine l’amendement n° II-CE13 de Mme Laure de La Raudière et plusieurs de ses collègues.
M. Daniel Fasquelle, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à alerter les pouvoirs publics sur la diminution des aides apportées à La Poste pour la distribution de la presse. La subvention pour La Poste au titre du transport de la presse est passé de 249 M€ en 2013 à 150 M€ dans le projet de loi de finances pour 2014, soit une baisse de près de 100 M€. Cette diminution est extrêmement problématique pour la presse spécialisée qui représente 1 300 publications imprimées, diffusées à 341 millions d’exemplaires par an, presque exclusivement par voie postale. C’est une presse de proximité qui a besoin de La Poste pour être diffusée, Internet n’étant pas un canal adapté pour ce genre de produits.
Mme Michèle Bonneton, rapporteure pour avis. Cette question a déjà été évoquée tout à l’heure en présence de Mme la ministre.
Comme vous, je m’interroge sur la chronologie.
Comme j’ai eu l’occasion de le souligner, le contrat d’entreprise signé le 1er juillet dernier prévoyait que la compensation versée par l’État à La Poste au titre de sa mission de transport et de distribution de la presse serait de 200 M€ pour 2014. Quelques jours plus tard, le Gouvernement a décidé de réduire de 50 M€ cette dotation afin de faire supporter par La Poste une partie du financement du CICE dont elle bénéficie.
On peut en discuter mais, néanmoins, sur le fond, il me semble plutôt légitime que les entreprises chargées d’une mission de service public et bénéficiaires du CICE participent elles aussi à l’effort budgétaire de l’État. Il s’agit d’ailleurs d’une mesure transversale. De plus, il me semble plutôt injuste de faire supporter à l’INSEE et à la Direction générale du Trésor (essentiellement via les études réalisées par la Banque de France), comme vous le proposez, le financement d’une fraction du CICE dont bénéficie La Poste ! Cela voudrait dire que ces organismes paieraient une partie du CICE dont bénéficie La Poste : il y a là quelque chose de paradoxal.
Enfin, j’indique que des négociations sont d’ailleurs en cours entre les éditeurs de presse et La Poste à ce sujet et il me semble légitime de les laisser aller à leur terme. Pour toutes ces raisons, je donne un avis défavorable à cet amendement.
M. le président François Brottes. Je vous remercie pour cet éclairage, Madame la rapporteure. Je crois que M. Daniel Fasquelle n’ignore en rien la teneur des accords Schwartz signés en 2008 qui s’engageaient effectivement vers une diminution des aides à la presse. La diminution de 50 M€ devrait sans difficulté garantir cet équilibre compte tenu de ce que La Poste va recevoir au titre du CICE.
Ce qui me semble plus problématique, M. Fasquelle, c’est ce que vous enlevez aux autres programmes de la Mission « Économie »…
M. Daniel Fasquelle, rapporteur pour avis. Je préfère que l’on s’assure du soutien apporté à la presse. Vous nous dites, Monsieur le Président, qu’il faut attendre un hypothétique accord signé en tenant compte de ce que La Poste pourrait avoir dans le cadre du CICE : nous y voyons pour notre part une vraie usine à gaz qui démontre par ailleurs que ce Gouvernement donne d’un côté ce qu’il reprend de l’autre. C’est extrêmement problématique et je maintiens donc cet amendement.
La Commission rejette l’amendement de M. Daniel Fasquelle.
*
À l’issue de la commission élargie, la commission des affaires économiques a délibéré sur les crédits de la mission « Économie ».
Conformément à l’avis de M. Jean Grellier, Mme Corinne Erhel, Mme Michèle Bonneton et M. Joël Giraud, rapporteurs pour avis, et contrairement à l’avis de MM. Daniel Fasquelle, Éric Straumann et Damien Abad, rapporteurs pour avis, la Commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Économie » pour 2014.
CGPME
M. Pascal Labet, directeur des affaires économiques et fiscales
Commissariat général à la stratégie et à la prospective
M. Jean-Paul Nicolaï, chef du département Économie-Finances
M. Mouhamadou Sy, chargé de mission
Commissariat à la simplification
Mme Célia Vérot, directrice, adjointe au secrétaire général du Gouvernement, chargée de la simplification
MEDEF
M. Jérôme Frantz, président de la Commission compétitivité et attractivité du territoire
Mme Ophélie Dujarric, chargée de mission senior, direction des affaires publiques