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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2014
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2015 (n° 2234),
TOME I
ACTION EXTÉRIEURE DE L’ÉTAT
Action de la France en Europe et dans le monde ;
Français à l’Étranger et affaires consulaires
PAR M. Philippe BAUMEL
Député
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Voir le numéro 2260
SOMMAIRE
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Pages
INTRODUCTION 7
I. L’ÉVOLUTION GLOBALE DU BUDGET DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL 9
II. LE PROGRAMME 105 : LA DIPLOMATIE GÉNÉRALE 11
A. LA PARTICIPATION DU PROGRAMME À L’EFFORT GÉNÉRAL DE RÉDUCTION DES DÉPENSES PUBLIQUES 11
1. La poursuite de la diminution des effectifs 11
2. La poursuite des économies sur les crédits de représentation 12
3. La baisse des crédits de coopération de sécurité et de défense 12
4. La baisse de la dotation aux contributions internationales 13
B. LES INCERTITUDES DUES AUX FLUCTUATIONS DE CHANGE 15
C. LE FINANCEMENT DES PRIORITÉS : LE RÉSEAU ET EN PARTICULIER SA SÉCURITÉ 16
1. Le fonctionnement des ambassades : des moyens sauvegardés 16
2. La continuation d’une politique active de sécurisation du réseau 17
3. La poursuite de l’effort en faveur des agents de droit local 17
D. LA PRÉSERVATION DE L’UNIVERSALITÉ DE NOTRE RÉSEAU DIPLOMATIQUE 17
1. L’adaptation du réseau à des moyens contraints 18
E. LA GESTION IMMOBILIÈRE : UNE POLITIQUE DYNAMIQUE, MAIS UNE FRAGILITÉ PERSISTANTE 22
1. Des programmes immobiliers ambitieux pour nos ambassades 22
a. Le projet de reconstruction de notre ambassade à Tripoli 22
b. La poursuite de la politique de mutualisation ave l’Allemagne 22
2. La relocalisation des bureaux parisiens : un programme qui reste inachevé 23
3. Un financement qui reste assuré, y compris pour l’entretien, par un programme de cessions très actif et parfois controversé 24
III. LE PROGRAMME 151 : L’ACTION CONSULAIRE 27
A. LA POURSUITE DE L’ADAPTATION DU RÉSEAU ET DES SERVICES RENDUS 28
B. LA RÉFORME DE L’AIDE À LA SCOLARITÉ 28
1. La réforme des bourses 29
a. Des dépenses dont l’augmentation était incontrôlée 29
b. Le nouveau dispositif 29
c. Le premier bilan : des dépenses maîtrisées et un système plus progressif 30
2. Le respect de l’engagement de « recyclage » des crédits de la PEC 31
C. UNE POLITIQUE DES VISAS PLUS FAVORABLE AU RAYONNEMENT DE LA FRANCE 31
1. Les constats 32
a. Une demande en forte croissance 32
b. Un taux de refus assez stable. 32
c. Une composante géographique qui évolue plus lentement 33
2. Une politique cohérente, tournée vers l’attractivité de notre pays 34
a. Une constante : la politique d’externalisation 34
b. Le renforcement des services chargés des visas 35
c. Un plan d’action pour une gestion plus fluide des visas 35
d. Les décisions du conseil supérieur de l’attractivité du 17 février 2014 37
e. Les mesures du projet de loi relatif au droit des étrangers en France 37
3. Les résultats très perceptibles de certaines des mesures prises 38
a. L’expérimentation de la délivrance des visas en 48 heures en Chine 38
b. La généralisation des visas de circulation 38
4. La gestion des visas pour études : un enjeu essentiel d’attractivité 39
a. Des progrès incontestables : la France a retrouvé son rang de troisième pays d’accueil 39
b. Un risque migratoire faible 40
c. Les dispositions du projet de loi relatif au droit des étrangers en France 41
d. Cependant, des taux de refus qui restent élevés sur les visas pour études 41
e. Une baisse récente mais hétérogène des refus de visas pour études 43
IV. LE PROGRAMME 341 : L’ORGANISATION DE LA CONFÉRENCE « PARIS CLIMAT 2015 » 45
Le projet de loi de finances pour 2015 propose une légère augmentation des moyens de la mission « Action extérieure de l’État ». Cette évolution rend compte, budgétairement, de deux faits politiques très importants : l’extension des compétences du ministère des affaires étrangères au tourisme et au commerce extérieur – de sorte qu’il est devenu le ministère des affaires étrangères et du développement international, le MAEDI – et l’organisation en 2015 de la conférence « Paris Climat 2015 ».
Cependant, le MAEDI prendra sa part de l’effort nécessaire de maîtrise des dépenses publiques : si l’on raisonne à périmètre et structure de dépenses constants, ses moyens devraient baisser en 2015 de 2,06 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2014.
Ce contexte budgétaire difficile devrait néanmoins autoriser le financement des priorités : les moyens de fonctionnement de nos ambassades seront préservés et leur sécurisation, nécessaire dans un monde où se développe le terrorisme, sera poursuivie, de même que celle des communautés françaises à l’étranger. L’universalité de notre réseau diplomatique, le 3ème du monde, sera également préservée : au prix d’un allégement très fort de notre présence dans plus d’une vingtaine de pays, la fermeture d’ambassades sera évitée. Quant à la politique immobilière, elle restera très active, les cessions très nombreuses programmées permettant – pour le moment – de financer les acquisitions et relocalisations de nos locaux diplomatiques.
S’agissant de l’action menée par les consulats en direction des Français de l’étranger, les engagements pris sur le montant des crédits alloués aux bourses scolaires seront respectés.
Enfin, les services consulaires bénéficieront de moyens renforcés pour faire face à une demande de visas très dynamique, puisque son rythme de croissance annuelle a dépassé 8 % depuis cinq ans et semble encore s’accélérer en 2014. Les conditions de délivrance des visas sont un élément déterminant de l’attractivité des pays pour les touristes, les hommes et femmes d’affaires, les étudiants et chercheurs, et il faut saluer le changement de politique opéré de ce point de vue depuis deux ans. La gestion des visas est clairement devenue une part de notre politique d’attractivité et les mesures déjà prises portent leurs fruits, notamment la multiplication des visas de circulation et l’accélération de la procédure de délivrance dans les pays stratégiques tels que la Chine.
Des interrogations subsistent cependant quant à la gestion des visas pour études : si le nombre d’étudiants étrangers dans notre pays a repris sa croissance à le rentrée 2013, le maintien pour certaines nationalités de niveaux de refus de ces visas souvent élevés, et évoluant de manière hétérogène selon les consulats, appelle sans doute une analyse plus approfondie avant d’éventuelles mesures correctives.
Il est enfin rappelé que le présent avis ne traite pas des moyens du programme « Diplomatie culturelle et d’influence », bien qu’il soit une partie de la mission « Action extérieure de l’État » : la commission des affaires étrangères a désigné M. François Loncle en tant que son rapporteur pour avis sur ce programme.
I. L’ÉVOLUTION GLOBALE DU BUDGET DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL
Le tableau qui suit permet de mesurer l’évolution des crédits de paiement tels qu’ils figurent dans les documents budgétaires : ceux de la mission « Action extérieure de l’État » dans son ensemble, ceux de ses quatre programmes et ceux des différentes « actions » qui composent ceux-ci (la décomposition du programme « Diplomatie culturelle et d’influence » n’est pas présentée, car il ne relève pas de votre rapporteur).
Évolution des crédits de paiement par programme et action
(en millions d’euros)
LFI 2014 |
PLF 2015 |
2015/2014 en % | |
Mission Action extérieure de l'État |
2 949,4 |
2 962,3 |
0,44 |
Mission hors programme Conférence « Paris climat 2015 » |
2 949,4 |
2 918,9 |
- 1,03 |
Mission hors « Paris climat 2015 » et hors transfert de la subvention à Atout France |
2 949,4 |
2 888,6 |
- 2,06 |
Programme 105 : Action de la France en Europe et dans le monde, dont (« actions ») : |
1 847,9 |
1 799,7 |
- 2,61 |
– Coordination de l’action diplomatique |
88 |
82,7 |
- 5,94 |
– Action européenne |
49,8 |
49,4 |
- 0,73 |
– Contributions internationales |
799,1 |
756,3 |
- 5,36 |
– Coopération de sécurité et de défense |
94,3 |
93,8 |
- 0,59 |
– Soutien |
236,7 |
235,6 |
- 0,49 |
– Réseau diplomatique |
580 |
581,9 |
0,33 |
Programme 185 : Diplomatie culturelle et d'influence |
725,5 |
745,5 |
2,75 |
Programme 151 : Français à l’étranger et affaires consulaires, dont (« actions ») : |
376 |
373,8 |
- 0,6 |
– Offre d’un service public de qualité aux Français de l’étranger |
211,3 |
200,2 |
- 5,23 |
– Accès des élèves français au réseau AEFE |
118,8 |
125,5 |
5,63 |
– Instruction des demandes de visa |
45,9 |
48,1 |
4,6 |
Programme 341 : Conférence « Paris Climat 2015 » |
- |
43,4 |
- |
Globalement, les moyens prévus pour la mission « Action extérieure de l’État » apparaissent dans le projet de loi de finances en augmentation de 0,4 %, à près de 3 milliards d’euros. Cependant cette augmentation apparente est due :
– d’une part à l’inscription sur le budget du MAEDI des crédits liés à une charge nouvelle, l’organisation de la conférence « Paris Climat 2015 » (43 millions d’euros de crédits de paiement) – un programme budgétaire spécifique y est dédié ;
– d’autre part au transfert sur le budget du MAEDI de crédits antérieurement inscrits sur la mission « Économie » correspondant à une part du financement public de l’opérateur Atout France, chargé de la promotion touristique internationale de notre pays, pour 30 millions d’euros. Ce transfert, intégré au programme « Diplomatie culturelle et d’influence », est la conséquence des nouvelles compétences attribuées au ministre des affaires étrangères et du développement international depuis avril 2014 : le décret n° 2014-400 du 16 avril 2014 lui donne la mission de définir et de mettre en œuvre la politique du commerce extérieur et du tourisme.
À structure de charges et périmètre constants, le budget proposé pour la mission « Action extérieure de l’État » en 2015 ressort plutôt en baisse (de 61 millions d’euros, soit un peu plus de 2 %) par rapport à la loi de finances initiale pour 2014. Certes, les crédits ouverts par celle-ci ont été l’objet de mesures de « gel » de précaution et d’annulations (à hauteur de 40 millions d’euros en loi de finances rectificative pour 2014 s’agissant du MAEDI), ce qui pourrait conduire à relativiser l’effort supplémentaire prévu pour 2015, mais il faut bien voir aussi que les crédits votés pour cet exercice feront à leur tour l’objet des mêmes mesures de gel partiel… Le MAEDI prend donc toute sa part de l’effort de réduction des dépenses publiques.
Le programme 105 correspond au financement de notre diplomatie générale, c’est-à-dire :
– le fonctionnement de l’administration centrale du ministère des affaires étrangères ;
– le fonctionnement d’un réseau diplomatique constitué de 162 ambassades bilatérales, 16 représentations permanentes et 2 antennes diplomatiques ;
– les contributions que la France verse à plus d’une vingtaine d’organisations internationales et autres instruments internationaux, dont les opérations de maintien de la paix onusiennes.
La masse de crédits du programme connaît dans le projet de budget pour 2015 une diminution significative, puisqu’ils passent de 1,848 milliard d’euros à 1,800 milliard. Cette baisse de 48 millions, soit 2,6 %, est essentiellement imputée sur les contributions internationales (– 43 millions d’euros).
Globalement, le programme 105 participe donc à l’effort général de réduction des dépenses publiques tout en parvenant à financer des priorités, en particulier dans notre réseau d’ambassades, et à préserver l’universalité de celui-ci.
À 604 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2015, les crédits de personnel absorbent environ le tiers des moyens du programme 105.
À 1,196 milliard d’euros, les crédits hors rémunérations proposés pour 2015 sur le programme 105 sont en diminution de 3,5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2014.
Sur la période triennale 2013-2015, le MAEDI s’est engagés à diminuer ses effectifs de 600 emplois (équivalents temps plein-ETP). Dans ce cadre, pour l’année 2015, la réduction devrait atteindre 220 ETP (soit – 1,5 %).
Le programme 105 contribuera à cet engagement à hauteur de 109 emplois en 2015.
Toutefois, la revalorisation de la masse salariale pour prendre en compte les variations de change-prix dans les rémunérations à l’étranger neutralise en partie les économies liées à ces suppressions d’emplois pour 2015 : les crédits de rémunérations du programme ne devraient diminuer en 2015 que de 0,7 % (un peu plus de 4 millions d’euros).
L’année 2015 verra se poursuivre un mouvement engagé depuis plusieurs années : la réduction des dotations destinées aux frais de représentation et aux dépenses dites de protocole, qui correspondent notamment à l’organisation d’événements internationaux.
De 2007 à 2014, les crédits de représentation de l’Hôtel du ministre sont passés de 3,62 millions d’euros à 1,99 million, soir une baisse de 45 %. Dans le projet de loi de finances pour 2015, il est prévu 1,6 million d’euros pour le fonctionnement de l’Hôtel du ministre (s’y ajoutent 80 000 euros pour les dépenses des cabinets à l’extérieur de l’Hôtel du ministre et 461 000 euros pour les frais de représentation des services parisiens et de la représentation permanente auprès de l’UNESCO).
Dans les ambassades, le recours au sponsoring (des entreprises françaises) a en partie compensé la baisse des moyens de représentation : les dotations budgétaires à ce titre sont passées de 10,79 millions d’euros en 2007 à 8,41 millions d’euros en 2014 ; cependant, la montée en charge des ressources externes (1,17 millions d’euros en 2012, 1,67 million en 2013) a conduit à une réduction moins marquée des moyens effectivement disponibles.
Pour 2015, la forte diminution des crédits dits de protocole, qui passent de 11 millions d’euros en 2014 à 6,5 millions, soit – 4,5 millions, s’explique par la non-reconduction sur cette ligne de deux dépenses ponctuelles inscrites en 2014 : le sommet de la francophonie qui a eu lieu à Dakar et la préparation de la conférence « Paris Climat 2015 » (celle-ci faisant l’objet en 2015 d’un programme budgétaire ad hoc).
Les crédits de fonctionnement dits d’état-major augmenteront en revanche du fait de la modification de l’architecture gouvernementale, avec le rattachement au MAEDI du commerce extérieur – donc du secrétaire d’État qui en est chargé et de son cabinet.
Les crédits de coopération de sécurité et de défense permettent notamment d’offrir des formations à des responsables étrangers dans ces domaines. En 2013, 976 « hauts responsables » étrangers en activité en ont bénéficié, ainsi que 2 194 stagiaires à « haut potentiel ».
Ces crédits devraient baisser de 3,6 % en 2015, pour s’élever à 29,47 millions d’euros. Comme ils peuvent aisément être ajustés – on peut organiser plus ou moins de stages, de missions…–, il n’est pas étonnant qu’ils contribuent classiquement à l’effort budgétaire. Cependant, la coopération de sécurité et de défense constitue un outil d’influence qu’il convient de préserver. Et l’on peut se demander comment, avec des moyens en diminution régulière, le MAEDI entend tenir les objectifs qu’il se donne, à savoir augmenter le nombre de cadres étrangers formés (ces objectifs étant d’atteindre en 2017 un niveau annuel de 1 170 « hauts responsables » étrangers en activité formés, ainsi que 2 480 stagiaires à « haut potentiel »). En effet, la sous dotation prévisionnelle affectée à la formation des élites et cadres est également en baisse : elle passe de 15,09 millions d’euros en projet de loi de finances pour 2014 à 14,75 millions en projet de loi de finances pour 2015 (– 2,2 %). Selon les responsables administratifs auditionnés par votre rapporteur, il serait toutefois possible de maintenir la priorité sur la formation des cadres étrangers en réduisant le nombre de nos coopérants militaires et en recourant à des formes moins coûteuses de stages (moins d’accueil de stagiaires étrangers à l’École de guerre).
On l’a dit, l’essentiel des économies proposées sur le programme 105 sont localisées sur les contributions internationales.
Pour être plus précis, l’économie la plus substantielle est opérée sur la quote-part française du financement des opérations de maintien de la paix : pour 2015, cette charge est prévue à 378,5 millions d’euros, soit une baisse de plus de 36 millions d’euros (– 8,7 %). Le projet annuel de performances indique que « le choix a été fait d’un report sur l’exercice 2016 du paiement de deux appels à contribution qui seront normalement reçus en fin d’années 2015 » (missions MINUSTAH et AMISOM, respectivement à Haïti et en Somalie). Il observe aussi qu’une grande partie des appels à contribution pour les OMP sur la période juillet 2015-juin 2016 que l’ONU adoptera en juin 2015 sera reportée à 2016 et se verra appliquer le nouveau barème de répartition des contributions qui devrait être acté fin 2015 et sera plus favorable à la France (sa part du PIB mondial baissant). L’impact budgétaire de ces deux faits – report du paiement de certaines contributions et effet anticipé au 1er juillet 2015 de la révision du barème sur certains appels de fonds – est chiffré respectivement à 38 millions d’euros et 12 millions d’euros.
On peut bien sûr discuter de l’estimation de ces économies, qui reposent sur le report à plus tard de dépenses obligatoires et sur l’anticipation du résultat incertain de la négociation sur les quotes-parts des membres de l’ONU, mais il faut bien voir qu’en tout état de cause, la prévision de ces charges liées au système onusien est difficile :
– d’abord, il est évidemment impossible de savoir quelles opérations de maintien de la paix nouvelles seront éventuellement décidées en urgence. Pour l’année présente, les crédits votés dans la loi de finances pour 2014 se révéleront sans doute insuffisants (du moins tels qu’ils ont de plus été partiellement « gelés »), du fait notamment de la création en avril 2014 d’une mission fortement demandée par la France, la MINUSCA en Centrafrique ;
– ensuite, la gestion de l’ONU n’est pas toujours très rigoureuse. Certains appels de fonds sont tardifs. D’autres sont surestimés, l’ensemble des fonds n’étant finalement pas dépensés ;
– enfin, ces charges étant souvent à payer en dollars, les fluctuations des taux de change constituent un facteur d’incertitude supplémentaire (voir infra).
S’agissant des contributions aux organisations internationales et européennes, le tableau ci-dessous en présente les principales.
Principales contributions aux organisations internationales et européennes : montants programmés pour 2015
(en millions d’euros)
Organisation des Nations-Unies (ONU) |
104,4 |
Organisation du traité de l’Atlantique-Nord (OTAN) |
37,2 |
Conseil de l’Europe |
35,2 |
Organisation des Nations-Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) |
21,7 |
Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) |
21,5 |
Organisation mondiale de la santé (OMS) |
20,9 |
Organisation internationale du travail (OIT) |
17,4 |
Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) |
16,6 |
Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) |
15,4 |
Organisation des Nations-Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) |
14,6 |
ONU-CMP (plan cadre d’équipement) |
12,5 |
Institut du monde arabe |
11,4 |
Cour pénale internationale |
10,7 |
Source : projet annuel de performances Action extérieure de l’État.
Il faut rappeler que la grande majorité de ces dépenses présentent un caractère obligatoire : la France s’est engagée à financer les organisations concernées et la répartition des quotes-parts de financement est déterminée par un barème.
L’année 2015 devrait être marquée par une augmentation des contributions à la Cour pénale internationale, dont l’activité continue à croître, et à l’Organisation internationale du travail, en comparaison de la prévision faite en loi de finances initiale pour 2014, car celle-ci était insuffisante et un abondement en cours de gestion a été nécessaire à hauteur de 3,3 millions d’euros (compte tenu notamment des dépenses de rénovation du siège de l’organisation) – il s’agit donc d’éviter en 2015 la même sous-budgétisation.
La subvention à l’Institut du monde arabe, qui ne présente pas le caractère d’une dépense obligatoire, serait en revanche en diminution.
Par ailleurs, il est à noter que, pour des raisons d’économies budgétaires, la France a décidé de se retirer d’une organisation onusienne, l’Organisation des Nations-Unies pour le développement industriel (ONUDI). Cette décision prise l’an dernier se traduit en 2015 par une économie de 6,3 millions d’euros, la contribution française à cette organisation disparaissant après un préavis d’un an.
L’ONUDI L’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel est une institution spécialisée des Nations Unies. Créée en 1966, elle a pour mission de promouvoir et d’accélérer la croissance industrielle durable des pays en voie de développement et des économies en transition et d’œuvrer à l’amélioration des conditions de vie des pays les plus pauvres. Selon le rapport annuel de l’organisation pour 2013, sur l’ensemble des projets de coopération technique présentés durant cet exercice, 35 % devaient être exécutés en Afrique, 22 % en Asie et dans le Pacifique, 11 % dans le monde arabe, 11 % en Europe et dans la CEI et 9 % en Amérique latine et dans les Caraïbes. S’agissant de la répartition par domaine thématique, 45 % des projets présentés concernaient l’environnement et l’énergie, 37 % la réduction de la pauvreté par le développement des activités productives et 10 % le renforcement des capacités commerciales. L’ONUDI emploie près de 700 fonctionnaires internationaux et recourt à des experts pour la mise en œuvre de ses projets. Son siège est à Vienne. En 2012, les dépenses attachées au siège se sont élevées, selon le rapport d’activité de l’organisation, à 77 millions de dollars et celles des programmes de coopération technique à 189 millions. Le financement provient de contributions obligatoires des membres et de contributions volontaires aux projets. Les premiers contributeurs à ces projets ont été en 2013 le Japon (16,7 millions de dollars), l’Union européenne (13,9 millions) et la Suisse (11,5 millions) ; la France a contribué dans ce cadre pour 1,5 million de dollars. L’organisation compte 172 membres, dont la plupart des pays européens. Il est toutefois à noter que, suite à des critiques récurrentes sur son coût et son utilité jugée faible, plusieurs pays occidentaux l’ont quittée au fil des ans : le Canada (1993), les États-Unis (1996), le Royaume-Uni et l’Australie (1997), la Nouvelle-Zélande, qui a déposé l’instrument de dénonciation de son adhésion en décembre 2012, enfin, ainsi qu’on l’a dit, la France. On doit aussi signaler que la France intervient aussi et continuera à intervenir par d’autres canaux sur les thématiques qui sont celles de l’ONUDI, par exemple par le biais du Fonds français pour l’environnement mondial. |
Il faut rappeler que la capacité du MAEDI à programmer des économies et à les tenir est handicapée par une difficulté qui lui est propre : la problématique de l’effet de change. En effet, une grande partie des dépenses du ministère doivent être payées en devises, notamment en dollars ou dans des monnaies liées. C’est le cas de :
– environ 75 % des contributions internationales ;
– environ 45 % des dépenses de fonctionnement du réseau et 30 % de ses loyers ;
– 15 % des bourses scolaires aux Français de l’étranger, etc.
Quant aux rémunérations des agents en poste dans le réseau, elles doivent aussi être ajustées en fonction des variations de change et de l’inflation des différents pays pour préserver leur pouvoir d’achat.
Les prévisions budgétaires sont fondées sur des taux de change dits de budgétisation. S’agissant du plus important, le change avec le dollar, le taux de budgétisation est de 1,31 dollar pour un euro en ce qui concerne 2014, mais sera porté à 1,36 pour la période triennale 2015-2017.
En 2013, l’euro s’est largement apprécié, ce qui a eu un impact positif sur les dépenses payables en devises. Ainsi, le gain au change est-il estimé à près de 5 millions d’euros pour 2013 sur les dépenses de fonctionnement du réseau diplomatique et près de 8 millions d’euros pour 2013-2014 sur les rémunérations des agents de droit local. Mais il est loin d’être évident que ce scénario se reproduira en 2015, puisque, depuis le printemps 2014, l’euro est reparti à la baisse face au dollar : en moins de six mois, on est passé de de 1,39 à 1,26 dollar pour un euro. Cette baisse de l’euro conduit à s’interroger sur la pertinence du taux prévisionnel de change de 1,36 retenu pour 2015.
Il existe certes des mécanismes de couverture qui limitent l’effet des fluctuations de change sur les montants dépensés en euros, mais ils ne peuvent amortir que des fluctuations infra-annuelles : il s’agit de l’achat anticipé de devises par l’Agence France Trésor (AFT). Par exemple, en 2014, le mécanisme de couverture mis en place avec l’AFT a abouti à l’achat de 680 millions de dollars au titre du financement des contributions internationales.
Comme les années précédentes, les moyens dédiés au réseau des ambassades sont sauvegardés dans le projet de loi de finances pour 2015.
Les moyens de fonctionnement du réseau diplomatique bénéficieront d’une priorité en 2015 : à 224 millions d’euros, ils augmenteront de 1,5 % (après une augmentation de 5,5 % en 2014). Cela permettra, comme l’année précédente, d’accroître les moyens de fonctionnement courant des postes (+ 2 %), qui sont soumis à des facteurs de coût exogènes.
Il convient cependant de rappeler que les dépenses de nos postes sont largement effectuées en devises, avec les incertitudes que cela entraîne, comme on l’a dit.
La priorité donnée les années précédentes à la sécurité du réseau sera également maintenue : après la très forte hausse des années précédentes et en particulier de 2014 (+ 28 %), celle prévue pour 2015 est certes plus faible (+ 2,2 %), mais permet de conserver le haut niveau de crédits qui a été atteint (42,7 millions d’euros).
En 2015, l’accent sera mis sur l’investissement : la mise en place de moyens de surveillance modernes (alarmes, vidéo-surveillance, contrôle d’accès par badge…) permet d’augmenter le niveau de sécurité tout en conduisant à une réduction des effectifs consacrés à la sécurité, donc des moyens de fonctionnement. Par ailleurs, il sera recouru plus largement aux prestations de gardiennage : une réforme des gardes de sécurité conduit à supprimer des emplois qui seront remplacés par des prestataires extérieurs.
L’effort de revalorisation des rémunérations des agents recrutés localement par les postes, dits « de droit local », sera poursuivi.
En effet, ces rémunérations sont généralement modestes. La majorité de ces agents – près de 2 800 sur 4 500 – perçoivent un salaire mensuel inférieur à 1 400 euros. La situation est naturellement très variable selon les pays et il est vrai que la modestie des salaires versés est corrélée avec le niveau général des salaires dans les pays concernés. Pour autant, porter une attention particulière à ces personnels très utiles et souvent faiblement rémunérés constitue une mesure de justice.
Sur la période triennale 2013-2015, une norme annuelle d’évolution de 3,5 % de cette masse salariale a donc été posée. Le cadre salarial entré en vigueur en 2010, qui a remplacé la grille des salaires dans 142 postes sur 170, garantit une augmentation annuelle minimale de 0,8 % du salaire de chaque agent de droit local au titre de l’ancienneté. S’y ajoutent des augmentations au mérite dans la limite de 0,2 % de la masse salariale de chaque poste, ainsi qu’une compensation des différentiels d’inflation avec la France.
L’objectif de conserver un réseau diplomatique très vaste a pu être atteint, jusqu’à présent, par le recours à des solutions innovantes.
Sur la période 2013-2015, aucune ambassade n’a ou ne sera fermée.
Confronté à l’exigence de réduire ses effectifs et ses dépenses, le MAEDI a pris des mesures de « recalibrage » de son réseau.
Celles engagées en septembre 2008 ont débouché sur une cartographie des postes selon trois catégories :
– 8 ambassades « à mission élargies et à format d’exception » : Allemagne, Espagne, États-Unis, Italie, Madagascar, Maroc, Royaume-Uni et Sénégal ;
– 29 postes « à missions élargies », qui assurent l’ensemble des missions de l’État à l’étranger : Afrique du Sud, Algérie, Arabie Saoudite, Argentine, Australie, Brésil, Cameroun, Canada, Chine, Corée, Côte d’Ivoire, Égypte, Émirats-Arabes-Unis, Éthiopie, Inde, Indonésie, Israël, Japon, Kenya, Liban, Mexique, Nigéria, Pakistan, Pologne, Russie, Thaïlande, Tunisie, Turquie et Ukraine ;
– 95 postes « à missions prioritaires », dont l’action est centrée sur un nombre restreint de sujets ;
– 31 postes de présence diplomatique, là où il s’agit avant tout de préserver une capacité de veille et d’analyse politique.
On décompte par ailleurs 16 représentations permanentes auprès d’organisations internationales, les plus importantes étant naturellement celles localisées à Bruxelles (auprès de l’Union européenne et de l’OTAN : 117 agents au total) et aux États-Unis (auprès de l’ONU et de ses organisations : 67 agents).
Les tableaux qui suivent montrent la répartition des plus de 10 000 agents du MAEDI qui travaillent à l’étranger entre les catégories de postes, ainsi que les vingt pays qui en accueillent le plus grand nombre. On constate, sans surprise, la très grande hétérogénéité des effectifs entre les grands postes et les plus modestes. Les 37 postes dits « à missions élargies » accueillent plus de la moitié du total des effectifs.
La répartition des emplois et le nombre moyen d’emplois par catégorie de postes diplomatiques
Catégories de postes |
Nombre d’emplois par catégorie de postes (ETP) |
Nombre d’emplois par catégorie de postes en % du total |
Nombre moyen d’emplois par poste |
Postes à format d’exception |
1 787 |
17 |
223 |
Postes à missions élargies |
3 603 |
34 |
124 |
Postes à missions prioritaires |
4 458 |
42 |
47 |
Postes à présence diplomatique |
456 |
4 |
15 |
Représentations permanentes |
289 |
3 |
18 |
Représentation assurée par un autre poste |
77 |
1 |
|
Total |
10 669 |
100 |
Source : élaboré à partir des réponses du MAEDI au questionnaire budgétaire.
Les vingt premiers postes pour le nombre d’emplois (ETP)
ETP au 31/12/2013 |
ETP au 31/12/2012 |
Évolution de 2012 à 2013 | ||
1 |
États-Unis |
376 |
412 |
– 36 |
2 |
Maroc |
336 |
334 |
+ 2 |
3 |
Chine |
311 |
301 |
+ 10 |
4 |
Algérie |
292 |
284 |
+ 8 |
5 |
Inde |
221 |
217 |
+ 4 |
6 |
Russie |
213 |
208 |
+ 5 |
7 |
Allemagne |
211 |
217 |
– 6 |
8 |
Sénégal |
208 |
231 |
– 23 |
9 |
Brésil |
177 |
196 |
– 19 |
10 |
Royaume-Uni |
176 |
175 |
+ 1 |
11 |
Madagascar |
169 |
181 |
– 12 |
12 |
Espagne |
162 |
164 |
– 2 |
13 |
Canada |
158 |
159 |
– 1 |
14 |
Liban |
153 |
154 |
– 1 |
15 |
Tunisie |
152 |
157 |
– 5 |
16 |
Italie |
150 |
149 |
+ 1 |
17 |
Cameroun |
143 |
148 |
– 5 |
18 |
Turquie |
140 |
137 |
+ 3 |
19 |
Mali |
132 |
127 |
+ 5 |
20 |
Japon |
124 |
126 |
– 2 |
Source : exploitation des questionnaires budgétaires.
Une redéfinition des missions de certains postes diplomatiques a été engagée à l’automne 2012. Elle a conduit à la décision, annoncée en mai 2013, de recentrer, dans un premier temps dans 13 pays sur la période 2013-2015, notre représentation autour d’un nombre limité de missions prioritaires. Sont concernés les postes situés dans les pays suivants : Brunei, Cap-Vert, Érythrée, Guinée-Bissau, Honduras, Jamaïque, Kirghizstan, Libéria, Népal, Papouasie-Nouvelle Guinée, Tadjikistan, Trinité et Tobago et Zambie.
Chaque ambassade concernée par ce format a un poste de rattachement susceptible de lui apporter un appui logistique en cas de crise, de circonstances exceptionnelles ou de visites de haut niveau.
Pour ce qui est de la gestion des Français de l’étranger, seule la protection consulaire (cas d’urgence, assistance aux compatriotes détenus…) demeure dans le champ de compétence de ces postes. Ces derniers ne disposent plus de section consulaire : les sections consulaires de ces postes auront toutes été fermées à l’automne 2015. Les activités consulaires, qu’elles concernent les Français (état civil, inscription au registre, délivrance de titres d’identité et de voyage, aides sociales et à la scolarité, notariat, etc.) ou les étrangers (visas) sont transférées au poste de rattachement (ou aux postes consulaires de pays partenaires).
Cette réforme a permis d’éviter la fermeture de postes diplomatiques tout en économisant environ 160 emplois.
Cette politique pourrait être étendue dans les années prochaines à 12 autres postes.
Enfin, les missions assurées par les deux dernières antennes diplomatiques sont en cours de rapatriement vers leurs capitales de rattachement : Freetown en 2014 (rapatriement vers Conakry), Sao-Tomé-Et-Principe en 2015 (rapatriement vers Libreville).
Le développement des renforts temporaires en personnel constitue une autre adaptation à la nécessité de réduire globalement les effectifs, donc de les gérer au plus près.
Au cours des dernières années, le MAEDI a augmenté sa capacité à mobiliser des personnels de renfort. L’envoi de ces agents en mission à l’étranger intervient pour l’essentiel en réponse à des crises ou à des situations d’urgence. Il peut aussi, dans un contexte de resserrement des effectifs dans le réseau, répondre à des besoins temporaires en personnels. Pour ce faire, le ministère a constitué un vivier d’agents qui, à tout moment, peuvent être envoyés à l’étranger pour une mission de courte durée. Le nombre de ces personnels de renfort a été dans un premier temps multiplié par deux en 2011-2012 (22 agents) et les effectifs ont encore été renforcés en 2013-2014 pour être portés à 26 « missionnaires de renfort permanents ». Peuvent s’y ajouter des agents sollicités pour répondre à des besoins urgents supplémentaires.
En 2013 et au cours du 1er semestre 2014, près de 180 missions de renfort d’une durée moyenne de deux mois ont été effectuées. Certaines ont été mises en place dans des contextes de crise ou post-crise (Tripoli, Sanaa, Erbil, Kiev, Bangui, Bamako et Le Caire). D’autres ont pu correspondre à des échéances particulières ayant ponctué l’agenda international. Il a fallu également renforcer les services des visas dans plusieurs pays (Chine, Tunisie, Sénégal). Enfin, comme chaque année, une équipe de renfort a été constituée afin de suivre les travaux de l’Assemblée générale des Nations-Unies.
Par ailleurs, notre réseau diplomatique doit continuer à s’adapter aux évolutions du monde.
Bien que les redéploiements soient plus difficiles dans un contexte de baisse des effectifs globaux, plus de 300 ETP, auront été redéployés sur la période 2013-2015. Les pays ciblés sont notamment les suivants : Qatar, Arabie saoudite, Émirats-Arabes-Unis, Koweït, Malaisie, Singapour, Indonésie, Corée du Sud, Chine, Inde, Birmanie, Mali, Rwanda, Chili, Colombie, Afrique du Sud, Kazakhstan, Azerbaïdjan et Turquie.
Pour autant, on est en droit de s’interroger sur le rythme de ces redéploiements. Quand on constate, pour prendre un exemple, qu’en Afrique subsaharienne, le MAEDI conservait fin 2013 plus d’agents au Sénégal (208 emplois en ETP), à Madagascar (169 ETP) et au Cameroun (143 ETP), qu’au Mali (132 ETP), en Côte d’Ivoire (123 ETP) et en Centrafrique (62 ETP), ou a fortiori dans les pays anglophones émergents tels que l’Afrique du Sud (100 ETP), le Nigeria (85 ETP) et le Kenya (54 ETP), on peut s’interroger sur l’adaptation du format de certains postes aux priorités politico-militaires ou économiques actuelles, même si la comparaison avec l’année précédente montre un effort réel d’adaptation : on a ainsi – 23 ETP au Sénégal, – 12 à Madagascar, – 5 au Cameroun, + 2 en Afrique du Sud, + 3 au Nigeria, + 5 en Côte d’Ivoire, + 5,5 au Mali…
Avec 163 ambassades bilatérales (en comptabilisant notre ambassade en Syrie, temporairement fermée depuis mars 2012), la France dispose toujours du troisième réseau diplomatique au monde, derrière les États-Unis (168 ambassades bilatérales ; près de 30 000 diplomates, soit deux fois plus que la France) et la Chine (164 ambassades). Le Royaume-Uni et l’Allemagne, avec des effectifs de diplomates sensiblement équivalents à ceux de la France, entretiennent respectivement 148 et 145 ambassades bilatérales.
Le MAEDI poursuit une politique immobilière dynamique, marquée par de nombreuses cessions de biens qui permettent de financer les grands programmes immobiliers nécessaires pour nous doter de locaux diplomatiques adaptés et sécurisés. L’interrogation demeure pour l’avenir : jusqu’où pourra aller cette politique de cessions, qui suscite parfois des réactions, qui finance non seulement les nouveaux bâtiments mais aussi l’entretien de l’existant et dont une large part du rendement est ponctionnée par le budget général ?
Plusieurs grands programmes d’immobilier « diplomatique » ont pu être conduits dans la période récente ou sont en cours. Parmi eux, celui de la reconstruction de notre ambassade à Tripoli, endommagée par un attentat, doit bien sûr être mentionné.
À la suite de l’attentat à la voiture piégée du 23 avril 2013, il a été décidé de réinstaller l’ambassade et la résidence de l’ambassadeur sur un nouveau campus diplomatique. En effet, outre l’importance des travaux de réhabilitation que demandait le bâtiment de l’ambassade, aussi bien celui-ci que la résidence ne pouvaient être sécurisés dans de bonnes conditions (manque de recul, constructions à proximité, nombre d’issues insuffisant…).
Un terrain satisfaisant a pu être trouvé. Le programme global de construction a été évalué à 13,3 millions d’euros. Cependant, le chantier est aujourd’hui à l’arrêt compte tenu de la situation politico-militaire actuelle à Tripoli. Les agents expatriés qui le suivaient ont été rapatriés en juillet 2014.
Une mutualisation de nos implantations immobilières avec nos partenaires européens a été engagée depuis plusieurs années. C’est avec l’Allemagne que les projets sont le plus avancés. Jusqu’en 2011, il s’est surtout agi de colocalisations culturelles, mais une nouvelle étape vient d’être franchie avec des opérations lancées pour des colocalisations d’ambassades.
Trois implantations conjointes franco-allemandes ont été finalisées à ce jour :
– la France héberge la représentation allemande à Brazzaville (Congo) au sein de son ambassade depuis novembre 2012 ;
– le Bureau de coopération français de Pyongyang (Corée du Nord) est installé depuis septembre 2013 avec la représentation suédoise au sein de la chancellerie allemande ;
– l’Allemagne a ouvert le 13 décembre 2013 son consulat général à Rio de Janeiro (Brésil) au sein de la maison de France.
Cinq autres projets pourraient être finalisés en 2015 :
– le projet de construction d’une ambassade franco-allemande à Dacca (Bengladesh), lancé en 2009, est le plus avancé et prévoit un regroupement sur un site unique de l’ensemble des services français et allemands. Les travaux ont débuté en octobre 2013 et la livraison du projet est programmée pour septembre 2015 ;
– les deux pays sont convenus en février 2014 de relocaliser leurs ambassades au sein d’un plateau de bureaux à Koweït. Le bail a été signé le 1er juillet 2014 et les ambassades pourraient ouvrir leurs portes à l’automne 2015 après des travaux d’aménagement ;
– d’autres projets sont également engagés, à Asmara (Érythrée), Bandar Seri Begawan (Brunei) et Kingston (Jamaïque). Enfin, il y a aussi des projets franco-allemands en phase d’étude (notamment à Khartoum au Soudan).
*
Plus généralement, la programmation des grandes opérations pour 2015 comprend encore, selon le projet annuel de performances relatif au compte d’affectation spéciale consacré à la gestion du patrimoine immobilier de l’État, la relocalisation de l’ambassade et de la résidence à Helsinki (Finlande) et la rénovation de l’Hospice Wallon à Amsterdam (Pays Bas).
Pour ce qui est des implantations parisiennes du MAEDI, l’avancée des projets est moins évidente, du fait d’un problème récurrent depuis plusieurs années et toujours pas réglé.
Le schéma pluriannuel de stratégie immobilière du ministère validé en 2009 prévoit à terme le regroupement des services sur trois sites : le site principal du Quai d’Orsay, le site de la rue de la Convention (ex-Imprimerie Nationale) et le site de La Courneuve, qui abrite désormais les archives diplomatiques.
De fait, des résultats ont été obtenus, puisque, depuis 2006, le MAEDI est passé de onze à quatre sites parisiens.
Mais le dernier volet reste à réaliser. Il concerne la rénovation et la mise aux normes du site du Quai d’Orsay. Les études et diagnostics préliminaires ont été finalisés et l’aménagement des locaux tampons nécessaires pour reloger les agents pendant les travaux est en cours. Cependant, cette opération a été ralentie en raison du non-versement par le ministère de l’Écologie d’une indemnisation de 69 millions d’euros prévue en contrepartie de l’abandon par le MAEDI, en 2009, de ses locaux du 244 boulevard Saint-Germain. À l’automne 2013, une solution partielle de financement a été négociée avec le ministère du budget pour l’opération de restructuration de l’aile des archives et du centre enterré du Quai d’Orsay. Elle consiste en l’attribution de 28 millions d’euros sur l’enveloppe mutualisée du compte d’affectation spéciale consacré à la gestion du patrimoine immobilier de l’État.
3. Un financement qui reste assuré, y compris pour l’entretien, par un programme de cessions très actif et parfois controversé
Les cessions immobilières opérées en 2013 et au début 2014 ont rapporté 59 millions d’euros pour les biens du MAEDI situés à l’étranger et 6 millions pour ceux situés en France. Ce montant ne comprend toutefois pas certaines cessions effectuées à ce jour, mais pas encore prises en compte dans les états transmis à votre rapporteur, notamment celle pour plus de 50 millions d’euros de la résidence de notre ambassadeur auprès de l’ONU à New-York.
Le rendement des cessions à l’étranger programmées en 2014 est évalué à environ 150 millions d’euros (dont plus de la moitié provenant de la vente de logements à New York, dont la prestigieuse résidence mentionnée ci-dessus). Pour 2015, le niveau de cessions envisagé est encore plus élevé, avec un rendement attendu de 233 millions d’euros, du fait notamment de la vente envisagée de notre vaste campus diplomatique en Malaisie !
Ces cessions financent largement la politique immobilière du ministère. En 2013, le MAEDI a ainsi pu bénéficier de l’affectation de 88,6 millions d’euros sur le compte d’affectation spécial qui regroupe tous les produits des cessions de l’État ; 76 millions d’euros ont été comptabilisés au titre des paiements faits sur ces crédits par le MAEDI.
Certaines des cessions envisagées suscitent toutefois des réactions dans les communautés françaises locales, voire les milieux culturels. Il en est ainsi de celle, programmée pour 2015 et valorisée à 12 millions d’euros, du palais Clam-Gallas, hôtel particulier du XIXème siècle qui abrite l’Institut français et, dans son parc, le lycée français de Vienne (dont certaines installations se trouvent dans le palais susceptible d’être vendu). Dans une réponse à une question écrite du sénateur Richard Yung, publiée le 10 juillet 2014, le ministre des affaires étrangères et du développement international produit les justifications et éléments d’information suivants : « [la politique d’influence française] à Vienne, comme ailleurs en Europe, doit être recentrée sur le développement de son attractivité (mobilité étudiante, recherche), la promotion de la langue française ou encore la valorisation de ses industries culturelles. En Autriche, où les institutions culturelles sont nombreuses et solides, l’action française doit par conséquent favoriser le développement d’une présence "hors les murs" plus affirmée et s’appuyer pour cela sur des partenariats durables. De même, convient-il de valoriser au mieux l’ensemble des outils numériques (…). Il s’agit donc de chercher un nouvel emplacement qui tienne compte de ces évolutions. La vente du palais Clam Gallas ne sera mise en œuvre qu’une fois cette relocalisation définie (…). De nombreux acheteurs potentiels se sont déjà fait connaître, laissant présager une opération immobilière très intéressante pour l’État français. La réflexion destinée à déterminer le format adapté aux nouvelles missions qui incombent à l’Institut français est en cours. Une mission réunissant les services du ministre des affaires étrangères et du développement international, compétents sur ce sujet, s'est rendue à Vienne le 9 mai 2014 (…) ».
Par ailleurs, il faut garder à l’esprit que les cessions immobilières du MAEDI ne sont pas intégralement recyclées en investissements immobiliers du même ministère, car il y a deux « fuites ».
D’une part, les produits de cessions servent aussi à financer l’entretien lourd du patrimoine existant. En 2014, sur une enveloppe globale de programmation pour l’immobilier à l’étranger du MAEDI s’élevant à 72 millions d’euros sur les produits de cessions (compte d’affectation spéciale consacré à la gestion du patrimoine immobilier de l’État), environ 11 millions d’euros seront dédiés à l’entretien. Les crédits budgétaires classiques (du programme 105) affectés par ailleurs à cet entretien sont en effet très insuffisants : 2 millions d’euros, quand, selon certaines estimations, il faudrait y consacrer 30 millions ! Une rebudgétisation progressive des dépenses d’entretien lourd, pour atteindre une cible de 12 millions par an en 2017, est en principe programmée, mais dépendra de la situation budgétaire générale…
D’autre part, les produits des cessions immobilières sont également ponctionnés au titre du désendettement de l’État : sur les cessions du MAEDI, ces ponctions devraient représenter 22 millions d’euros en 2014 et 25 millions en 2015. Cette contribution est fixée au taux de 30 % sur chaque cession depuis le 1er janvier 2014 pour l’ensemble des ministères. Le MAEDI a toutefois obtenu que sa contribution soit forfaitaire (les 25 millions d’euros susmentionnés), de sorte que toute cession supplémentaire lui revient intégralement.
Le programme 151 finance essentiellement des services publics destinés aux quelque 2 millions de Français résidant à l’étranger (dont 1,6 million d’inscrits au registre mondial des Français établis hors de France), aux Français qui se déplacent à l’étranger et enfin aux étrangers qui, souhaitant se rendre en France, doivent obtenir un visa. Il repose sur un réseau de 230 postes consulaires dans le monde.
Les crédits proposés pour 2015 sur le programme 151, soit 373,8 millions d’euros, sont en léger recul (– 0,6 %) sur ceux de la loi de finances initiale pour 2014.
Cette évolution recouvre plusieurs mouvements :
– une économie de 0,7 million d’euros sur les crédits de l’Assemblée des Français de l’étranger, soit plus de 20 % de baisse de la dotation de cette instance, du fait de la réforme de l’indemnisation de ses membres ;
– une économie de constatation de près de 6 millions d’euros, par rapport à 2014, du fait qu’aucune dotation pour l’organisation d’élections n’a à être prévue en 2015 ;
– l’augmentation des moyens dévolus aux bourses conformément aux engagements pris (voir infra) ;
– une contraction de 6,7 % des crédits sociaux (ramenés à 18 millions d’euros après 1,3 million d’euros d’économie) ;
– un effort significatif (+ 8,1 %) sur les moyens de fonctionnement des services.
Ce double mouvement de réduction des crédits sociaux et d’augmentation des moyens de fonctionnement est notamment dû au transfert, dès la loi de finances, de 0,5 million d’euros des premiers aux seconds, sachant que ce transfert était généralement opéré en cours de gestion les années précédentes pour faire face aux besoins des services.
La réduction des crédits sociaux est également due à la suppression de l’enveloppe de 0,8 million d’euros antérieurement prévue pour le financement des comités consulaires pour l’emploi et la formation professionnelle. La principale justification avancée pour la suppression de cette dotation réside dans le fait que ses comités peuvent trouver des financements propres, notamment en facturant leurs prestations de recrutement de personnels aux entreprises bénéficiaires.
Dans un contexte de baisse globale des effectifs dans les services consulaires, les crédits de personnel sont quant à eux en faible recul (– 0,3 %). Cette stabilité recouvre en fait deux évolutions contraires : les crédits de rémunérations de l’action « Instruction des demandes de visa » ressortent en hausse de 4,6 %, tandis que ceux correspondant aux prestations aux Français de l’étranger baissent. De 2013 à 2015, 70 emplois (ETP) auront été supprimés dans les services s’occupant des Français de l’étranger pour 14 créations nettes dans les services chargés des visas, ceci donnant un solde net négatif de 56 emplois pour le programme 151, dont l’effectif budgétaire global serait de 3 334 emplois en 2015.
Le contexte budgétaire, mais aussi l’évolution technologique, amènent le réseau consulaire à faire évoluer ses implantations et ses modes de travail. Outre la fermeture des sections consulaires de certains postes diplomatiques dans le cadre de leur transformation en postes de présence diplomatique (voire supra), plusieurs transformations de consulats généraux en sections ou agences consulaires restent prévues.
S’agissant des procédures, il est envisagé de dématérialiser l’inscription au registre des Français de l’étranger et un texte réglementaire prochain devrait autoriser, dans les pays « sûrs », l’envoi postal des passeports biométriques à nos concitoyens (ils n’auront plus à se présenter deux fois au consulat, la première pour la prise de leurs empreintes biométriques, la seconde pour le retrait du document).
Par ailleurs, deux politiques méritent un développement plus détaillé : celle des bourses scolaires, où la réforme de 2013 est entrée en rythme de croisière, et celle des visas, qui a été profondément réformée.
L’une des premières mesures prises en 2012 par la nouvelle majorité a été de mettre fin à la prise en charge (« PEC ») des frais de scolarité des élèves français des lycées français à l’étranger, qui avait été instituée sous la précédente législature. Cette décision était motivée par des considérations à la fois budgétaires et d’équité : la PEC étendue à tous les niveaux scolaires aurait représenté à terme des coûts considérables (jusqu’à 700 millions d’euros par an selon certaines estimations) ; à plus court terme, telle qu’elle était appliquée, elle conduisait à concentrer beaucoup d’argent public (du fait de l’importance des frais de scolarité dans certains établissements) sur un petit nombre de nos compatriotes à l’étranger, indépendamment de tout critère social ou même objectif, au risque en outre de nuire à l’attractivité des établissements français à l’étranger en réduisant le nombre de places disponibles pour les non-Français.
En même temps étaient pris plusieurs engagements : accompagner cette suppression par des mesures spécifiques ; réformer le système des bourses scolaires versées à nos compatriotes résidant à l’étranger ; « recycler » les moyens économisés du fait de la suppression de la PEC en dépenses de bourses. Ces engagements ont été tenus.
Avant la réforme mise en œuvre depuis 2013, la dépense relative aux bourses à l’étranger connaissait une croissance très rapide, incompatible avec les contraintes budgétaires. Cette dépense a en effet triplé depuis le milieu des années 1990 et était passée, en cinq ans, de 2007 à 2012, de 48,2 millions d’euros à 92,6 millions, ce qui correspond à près de 14 % de croissance annuelle moyenne. Cette forte croissance de la dépense était due tout à la fois à celle du nombre de boursiers et à celle du montant des bourses.
Le nouveau dispositif a été mis en place à la rentrée de septembre 2013 pour le « rythme nord » et à la rentrée 2014 pour les pays du « rythme sud » (1).
Il repose sur :
– un nouveau barème de calcul prenant mieux en compte la réalité des ressources des familles ;
– la possibilité de correctifs permettant la maîtrise de la dépense.
Le nouveau barème est fondé sur le revenu net disponible par unité de consommation (membre du foyer), après déduction des impôts, charges sociales et frais de scolarité. Il a été introduit une correction à l’aide d’un indice de parité de pouvoir d’achat : dans un souci d’équité, il s’agit de compenser les différences de coût de la vie entre pays de résidence et d’assurer l’égalité de pouvoir d’achat des familles.
Dans une optique de pilotage de la dépense, un mécanisme de participation des familles à l’équilibre budgétaire a été instauré (contribution progressive de solidarité). S’il devait être mis en œuvre, il fonctionnerait comme un abattement progressif sur la quotité de bourse : il ne toucherait pas les boursiers à 100 % et augmenterait progressivement pour atteindre son niveau maximal pour les familles qui bénéficient d’une quotité de bourse de 80 % ou moins.
De plus, une péréquation des moyens entre les postes après recensement des besoins est désormais prévue. Le cas échéant, les frais de scolarité couverts peuvent être plafonnés, les seuils d’exclusion concernant le patrimoine peuvent être modifiés et la contribution de solidarité peut être ajustée.
Les responsabilités quant à la maîtrise des coûts ont été clarifiées en créant une phase de dialogue de gestion entre l’AEFE, l’administration centrale et les ambassades. En cas d’inadéquation des besoins constatés avec les moyens disponibles, cette phase est l’occasion de recourir aux outils de pilotage budgétaire susmentionnés.
Après une première année de mise en œuvre du nouveau dispositif d’aide à la scolarité, les premiers résultats montrent que les objectifs de la réforme ont été atteints :
– pour la première fois, en 2013, la dépense de bourses a été contenue dans les crédits inscrits en loi de finances. Cela s’est traduit par une évolution beaucoup plus mesurée qu’auparavant du coût moyen de l’aide accordée par boursier : + 0,2 % en 2013-2014 dans le « rythme nord » (contre + 8 % l’année précédente) et + 5,7 % en 2014 dans le « rythme sud » (contre + 11 % l’année précédente) ;
– le nouveau dispositif est également plus progressif, donc plus juste. Comme on le voit sur le graphique ci-après, le pourcentage des familles ayant bénéficié d’une bourse à 100 % est passé de 59 % en 2012-2013 à 45 % en 2013-2014. La répartition des quotités de bourses est donc plus progressive et en conséquence mieux corrélée à la situation économique des familles.
De plus, les ajustements effectués lors de la commission nationale des bourses de décembre 2013 ont permis de donner certaines souplesses au dispositif. Ainsi, certains seuils d’exclusion liés aux patrimoines mobilier ou immobilier ont-ils été ajustés pour tenir compte des réalités locales ; une « réserve d’intervention » destinée à soutenir les postes confrontés à des difficultés spécifiques a été créée ; enfin, le rôle des commissions locales des bourses a été conforté.
En 2014, 118,8 millions d’euros de crédits ont été ouverts en loi de finances initiale pour le financement de l’aide à la scolarité et devraient largement couvrir les besoins. Compte tenu d’une situation favorable des taux de change (appréciation de l’euro), une annulation de crédits de 4 millions d’euros a même été possible dans le cadre de la loi n° 2014-891 du 8 août 2014 de finances rectificative pour 2014 ; elle constitue une partie de la contribution du programme 151 au Pacte de responsabilité.
Pour 2015, la dotation budgétaire prévue s’élève à 125,5 millions d’euros, de sorte que l’engagement de reverser sur les bourses la dotation PEC supprimée aura été respecté : la différence positive entre ce montant et celui des dépenses de bourses en 2012, qui s’étaient élevées à 92,6 millions d’euros, représentera près de 33 millions d’euros, soit un peu plus que la dotation budgétaire pour la PEC qui était initialement prévue en 2012, qui était de 31,9 millions d’euros.
La politique des visas est nécessairement un compromis entre des objectifs difficiles à concilier : la maîtrise des flux migratoires et la sécurité publique ; mais aussi l’internationalisation de nos entreprises, de nos laboratoires de recherche et de nos universités, nécessaire à leur développement ; plus généralement, le rayonnement de notre pays, qui est d’autant plus inséparable de l’ouverture aux talents du monde entier que la tradition d’ouverture au monde est au cœur de l’image internationale de la France.
Avant 2012, on avait pu avoir le sentiment que la dimension restrictive de la politique des visas l’emportait presqu’exclusivement. La nouvelle majorité a engagé des réformes visant à une politique plus équilibrée, dont l’impact est désormais tout à fait visible dans les données chiffrées.
Le nombre de visas délivrés par la France reste en constante et rapide augmentation : de 2009 à 2013, on est passé de 1,8 million à plus de 2,4 millions de visas délivrés annuellement, soit une augmentation de 38 % en quatre ans, qui correspond à un rythme moyen annuel de croissance dépassant 8 %.
En 2013, les services consulaires ont traité plus de 2,8 millions de demandes. Cela correspond à près de 3 700 dossiers à traiter dans l’année par agent à temps plein.
Les premiers chiffres disponibles pour 2014, concernant le premier semestre, confirment la rapidité de cette croissance : le nombre de visas délivrés pendant les six premiers mois de l’année en cours a dépassé de 11,5 % celui des visas délivrés sur la même période de 2013.
Il faut noter que cette augmentation a concerné essentiellement les visas de court séjour, dits « Schengen ». S’agissant des visas de long séjour, on est seulement passé de 2009 à 2013 de 160 000 à 167 000 délivrances, soit une augmentation cumulée de moins de 5 %. C’est donc bien l’augmentation du tourisme et des déplacements d’affaires qui explique cette évolution, et non une croissance de l’entrée des étrangers qui souhaitent séjourner plus durablement en France pour y étudier, travailler ou rejoindre leur famille.
En 2013, 89 % des visas délivrés ont été des visas de court séjour et 6,6 % des visas de long séjour. Le reliquat se répartit entre les visas délivrés pour l’Outre-mer et les visas officiels (diplomatiques et de service). Les visas pour études ont représenté 39 % des visas émis pour long séjour. Les visas pour affaires ont représenté quant à eux 17 % des visas de court séjour.
Il faut enfin rappeler que les visas apportent une recette dynamique au budget général de l’État. La ligne budgétaire « Produit des chancelleries diplomatiques et consulaires », alimentée pour l’essentiel par les frais de visas, après avoir atteint 155,3 millions d’euros en 2013, s’élèverait à 165 millions en 2014 puis 170 millions en 2015 selon les estimations du projet de loi de finances. Ces ressources sont très supérieures au coût administratif des visas, évalué dans le projet de loi de finances à 48 millions d’euros (action « Instruction des demandes de visa »).
Le taux global de refus de visas a peu évolué ces dernières années : depuis 2008, il connaît de faibles variations entre 9,3 % et 9,8 % (à l’exception d’une année un peu atypique : ce taux a atteint 10,9 % en 2009).
Du fait de l’ampleur de la demande de visas exprimée par les Algériens et du niveau du taux de refus (voir tableau ci-après), l’Algérie est de loin le pays où le plus de visas sont refusés par la France : 83 000 refus en 2013, soit environ 30 % de tous les visas refusés par la France dans le monde (au nombre de 275 000).
Le tableau ci-après permet d’analyser l’origine géographique de la demande de visas.
Les vingt-cinq premiers pays pour les demandes de visa adressées à la France
2013 |
2012 |
2013 | |||||||
Visas demandés |
Refus |
Taux de refus |
Visas demandés |
Refus |
Taux de refus |
ETP consacrés aux visas |
Ratio Visas/ETP | ||
1 |
Russie |
422 260 |
5 967 |
1,4 |
410 012 |
6 465 |
1,6 |
60,2 |
7 018 |
2 |
Chine |
381 328 |
23 859 |
6,3 |
321 893 |
24 501 |
7,6 |
65,4 |
5 829 |
3 |
Algérie |
321 877 |
83 138 |
25,8 |
280 164 |
65 284 |
23,3 |
94,5 |
3 406 |
4 |
Maroc |
219 627 |
20 050 |
9,1 |
204 586 |
18 449 |
9 |
54,6 |
4 025 |
5 |
Tunisie |
113 805 |
13 543 |
11,9 |
97 417 |
10 716 |
11 |
25,3 |
4 498 |
6 |
Turquie |
109 993 |
5 053 |
4,6 |
105 309 |
4 212 |
4 |
24,5 |
4 490 |
7 |
Royaume-Uni |
81 495 |
4 705 |
5,8 |
71 162 |
3 674 |
5,2 |
25,4 |
3 206 |
8 |
Arabie Saoudite |
78 971 |
2 540 |
3,2 |
84 100 |
2 298 |
2,7 |
13,3 |
5 938 |
9 |
Inde |
74 196 |
5 280 |
7,1 |
71 971 |
5 330 |
7,4 |
26,1 |
2 846 |
10 |
Ukraine |
52 370 |
632 |
1,2 |
48 024 |
548 |
1,1 |
10,9 |
4 796 |
11 |
Thaïlande |
49 187 |
2 615 |
5,3 |
41 457 |
2 962 |
7,1 |
9,3 |
5 272 |
12 |
Égypte |
47 148 |
5 553 |
11,8 |
44 964 |
4 878 |
10,8 |
13,4 |
3 513 |
13 |
Etats-Unis |
43 351 |
718 |
1,7 |
43 396 |
916 |
2,1 |
21 |
2 064 |
14 |
Koweït |
42 523 |
2 066 |
4,9 |
37 642 |
349 |
0,9 |
6,2 |
6 914 |
15 |
Liban |
39 981 |
3 066 |
7,7 |
37 429 |
2 446 |
6,5 |
4,3 |
9 407 |
16 |
Émirats-Arabes-Unis |
37 791 |
1 548 |
4,1 |
28 635 |
885 |
3,1 |
6,4 |
5 905 |
17 |
Nigeria |
37 276 |
12 197 |
32,7 |
35 978 |
11 613 |
32,3 |
10,6 |
3 523 |
18 |
Indonésie |
35 358 |
108 |
0,3 |
34 106 |
219 |
0,6 |
5,7 |
6 236 |
19 |
Afrique du sud |
33 884 |
290 |
0,9 |
33 803 |
255 |
0,8 |
7,9 |
4 278 |
20 |
Sénégal |
30 966 |
7 902 |
25,5 |
30 228 |
9 231 |
30,5 |
15,3 |
2 020 |
21 |
Côte d’Ivoire |
27 445 |
6 049 |
22 |
23 744 |
5 668 |
23,9 |
7,1 |
3 865 |
22 |
Biélorussie |
24 905 |
122 |
0,5 |
20 783 |
196 |
0,9 |
6,7 |
3 734 |
23 |
Cameroun |
23 351 |
6 114 |
26,2 |
23 023 |
5 888 |
25,6 |
15,5 |
1 508 |
24 |
Madagascar |
21 912 |
4 324 |
19,7 |
21 835 |
3 264 |
14,9 |
10,3 |
2 138 |
25 |
Vietnam |
21 318 |
2685 |
12,6 |
18 637 |
1 781 |
9,6 |
7,1 |
3 003 |
Source : MAEDI, questionnaire budgétaire.
La présentation des données pour 2012 et 2013 permet de constater qu’il n’y a pas d’évolution rapide de la composante géographique de la demande de visas pour la France, sauf peut-être en ce qui concerne la Chine et la Russie (voir infra). Cette demande augmente à peu près partout à un rythme soutenu.
La Russie est restée en 2013 le premier pays pour le nombre de visas français demandés, soit 422 000, mais elle était en cours de rattrapage par la Chine : les 381 000 demandes comptabilisées en 2013 dans ce pays représentent une augmentation de 18,5 % par rapport à 2012. Il apparaît qu’au premier semestre 2014, plus de visas ont été demandés en Chine (263 000) qu’en Russie (180 000) ; on pourrait rapidement atteindre le demi-million de visas délivrés à des Chinois annuellement, alors que, dans le même temps, la Russie est l’un des rares pays où la demande de visas français est en baisse, ce qui s’explique vraisemblablement par la crise politique actuelle de ce pays avec l’Occident ainsi que par ses difficultés économiques (notamment la dépréciation du rouble).
Viennent ensuite, avec une demande également en forte croissance, les pays du Maghreb : l’Algérie (322 000 demandes), le Maroc (220 000) et la Tunisie (114 000). Le nombre de demandes déposées au premier semestre en Algérie, soit près de 207 000, laisse présager pour 2014 une très forte croissance de la demande venant de ce pays.
Il est à noter que viennent juste après un certain nombre de grands pays émergents (Turquie, Arabie Saoudite, Inde, Ukraine, Thaïlande, etc.), dont les touristes et les hommes d’affaires sont nombreux à venir en France.
Le fait que de nombreux visas français soient demandés en Grande-Bretagne, alors même que cette obligation ne s’y applique qu’aux étrangers extra-communautaires (la Grande-Bretagne n’appartenant pas à l’« espace Schengen »), rend compte du cosmopolitisme de l’agglomération londonienne et de la densité de la circulation des hommes entre les deux pays.
Contrairement à ce que l’on croit souvent, la demande de visas en provenance d’Afrique subsaharienne est relativement modérée et, la-aussi, les chiffres réservent une surprise : les deux pays de la zone qui demandent le plus de visas à la France ne sont pas francophones ; ce sont le Nigeria et l’Afrique du Sud, dont la prépondérance démographique et économique apparaît là clairement.
Depuis 2012, la volonté est clairement de mettre la politique des visas au service de la croissance économique et de l’attractivité de la France. Plusieurs mesures ont d’ores et déjà été adoptées.
La politique d’externalisation de la gestion des dossiers de demandes de visa, engagée depuis plusieurs années, se poursuit. Destinée à améliorer la qualité du service rendu aux demandeurs sans coûts budgétaires excessifs ni recrutements en nombre, elle a, selon les services du ministère des affaires étrangères, un bilan très positif sur plusieurs points : une amélioration des conditions d’accueil des demandeurs, moins d’attente, une réduction des délais d’instruction, une meilleure productivité des agents. L’externalisation a permis de libérer les consulats de certaines activités chronophages et de consacrer davantage de temps aux tâches régaliennes (contrôles, instruction, prise de décision).
À ce jour, 38 consulats ont externalisé la collecte des dossiers de demandes de visas. L’externalisation des postes délivrant plus de 10 000 visas par an a été privilégiée. Les tâches externalisées comprennent la gestion des flux de demandeurs, leur accueil, la vérification de la présence des pièces justificatives nécessaires, la collecte des frais de dossiers et, le cas échéant, la saisie informatique des données concernant l’état civil des demandeurs ainsi que le recueil des données biométriques. La décision d’attribution des visas reste bien sûr de la compétence exclusive des consulats.
L’externalisation se poursuit dans les postes où la demande est forte. Les cinq postes consulaires du Maroc devraient être externalisés d’ici la fin 2014 ainsi qu’Abuja au Nigeria. D’autres postes pourraient faire l’objet d’une externalisation dans les deux prochaines années, dans divers pays africains et asiatiques.
Par ailleurs, afin de faciliter les démarches des demandeurs en leur évitant des déplacements lointains, des centres de collecte des demandes dans des villes sans consulat ont été créés dans certains pays, ou vont l’être prochainement : Turquie (Izmir), Russie (cinq villes), Arabie Saoudite, Afrique du Sud, Égypte (Alexandrie), Territoires Palestiniens (Ramallah)…
Au recours accru à l’externalisation s’ajoute cependant, comme on l’a dit supra et malgré la contrainte budgétaire, la création de quelques postes d’agents dans les services chargés des visas : 14 créations nettes d’emplois de 2013 à 2015 (+ 1,7 %).
Un plan d’action conjoint pour les visas a été élaboré par les ministères des affaires étrangères et de l’intérieur au mois de janvier 2013 et est progressivement mis en œuvre. Il s’agit de trouver un nouvel équilibre entre les exigences de contrôle migratoire et de sécurité et l’objectif d’attractivité – et accessoirement un nouvel équilibre entre les administrations, un principe de codécision systématique entre les ministères étant posé pour toutes les décisions de portée générale.
Ce plan repose d’abord sur la simplification des procédures :
– des instructions conjointes des deux ministres ont été adressées fin mars 2013 à l’ensemble du réseau pour faciliter les déplacements des hommes d’affaires, universitaires, scientifiques, chercheurs, artistes et touristes dans des pays à fort potentiel ou ayant la France pour destination privilégiée ou récurrente. Il s’agit d’augmenter le recours aux visas « de circulation », qui permettent des entrées multiples pour des courts séjours (trois mois au plus), ainsi que leur durée de validité (de six mois à cinq ans selon la réglementation en vigueur). La détermination des publics concernés repose notamment sur la conclusion d’accords de partenariats avec les chambres de commerce, entreprises françaises à l’étranger, cercles d’entrepreneurs, universités, agences de voyage, etc ;
– il a été décidé de suspendre provisoirement la délivrance des visas biométriques à partir du 1er août 2013 dans 45 postes, où la France se trouvait être le seul ou parmi les seuls États de l’« espace Schengen » à délivrer des visas de ce type. Cette mesure concerne surtout des postes situés en Europe – à l’exception du consulat général à Londres –, en Amérique du Nord, en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Corée du Sud et au Japon. Elle est provisoire car, à terme, le déploiement progressif du Visa Information System (VIS) conduira à la délivrance de visas biométriques par l’ensemble des États de l’« espace Schengen ». Actuellement, en plus de ces postes, la biométrie n’est également pas pratiquée en matière de visas dans nos postes situés en Russie, Ukraine, Chine et Inde : les demandeurs n’y seront soumis que dans le courant du premier semestre 2015 conformément au calendrier fixé par la Commission européenne pour le déploiement du dispositif VIS précité. Il faut bien voir que, la biométrie exigeant la présence physique des demandeurs (pour la collecte de leurs données), sa généralisation n’est compatible avec la poursuite de la politique de facilitation des visas que si les centres de collecte des données biométriques peuvent être multipliés, ce qui n’est pas évident dans tous les États (certains n’autorisent pas l’ouverture de tels centres en l’absence de consulat).
Le plan interministériel vise aussi à poursuivre l’amélioration des conditions d’accueil des demandeurs de visa. Un objectif chiffré a été fixé pour le délai maximum auquel un rendez-vous de dépôt de dossier doit être proposé aux demandeurs : sept jours. Quant au délai moyen entre le dépôt du dossier et l’émission du visa, il constitue, s’agissant des visas de court séjour (dits « Schengen »), un des objectifs suivis par le ministère dans le cadre budgétaire. Ce délai, passé de 3,8 jours en 2011 à 3,3 en 2012, est toutefois remonté à 3,5 en 2013 dans un contexte de croissance constante de la demande de visas. Il est prévu d’être à trois jours en 2014 et entre deux et trois pour les exercices suivants.
Enfin, il est prévu une refonte des outils informatiques liés au traitement des demandes de visa, afin d’aboutir à la dématérialisation de certaines procédures et de disposer d’une meilleure connexion informatique entre les consulats et les services compétents du ministère de l’intérieur. Ce projet devrait aboutir d’ici 2017.
Un grand nombre de mesures ont été actées, en matière de visas et de droit au séjour, dans leur principe lors du conseil supérieur de l’attractivité du 17 février 2014, notamment :
– le remplacement de l’autorisation provisoire de travail (APT) par un régime déclaratoire pour les courts séjours ;
– l’accélération de la délivrance en 48 heures de visas valables cinq ans pour les clients, fournisseurs et collaborateurs des 4 000 exportateurs agréés ;
– l’allégement de certaines obligations procédurales pour les demandes de visas de tourisme, notamment dans les pays émergents (par exemple, suppression de la présentation d’une réservation hôtelière) ;
– la création d’un titre de séjour « talents » unique, valable quatre ans et couvrant aussi la famille des bénéficiaires, et la suppression de l’obligation de visite médicale pour eux ;
– la mise en place d’un guichet unique pour les étudiants étrangers ;
– la généralisation de la délivrance de titres de séjour pluriannuels égaux à la durée prévisionnelle du cycle d’études pour tous les étudiants.
Certaines de ces mesures ont déjà fait l’objet d’instructions, notamment l’allégement de certaines pièces justificatives demandées pour les visas de tourisme. Il faut toutefois noter que les plus significatives exigent une modification législative, qui trouvera place dans le projet de loi relatif au droit des étrangers en France, lequel a été déposé en juillet 2014 et devrait être adopté par le Parlement au cours de la session 2014-2015.
Ce projet de loi propose notamment :
– le développement de cartes de séjour pluriannuelles de quatre ans (article 11), délivrées à l’expiration d’un premier titre de séjour d’un an. De la sorte, les personnes concernées, notamment les étudiants étrangers, n’auront plus à renouveler tous les ans leur titre de séjour ;
– la création d’une carte de séjour unique et pluriannuelle, d’une durée de quatre ans, pour tous les « talents » étrangers ainsi que, le cas échéant, pour leur famille (article 11). Ce « passeport talent » sera délivré dès la première admission au séjour, se distinguant ainsi de la carte de séjour pluriannuelle générale délivrée à l’issue d’une première année de séjour ;
– la dispense d’autorisation de travail pour les séjours professionnels de moins de trois mois (article 12) ;
– des adaptations spécifiques pour les étudiants étrangers, sur lesquelles on reviendra ultérieurement.
L’analyse des statistiques de délivrance des visas permet de constater l’effet positif, rapidement obtenu, de plusieurs des décisions prises.
La Chine, compte tenu de son rythme de croissance et de son ouverture de plus en plus grande au monde, est naturellement un pays où la demande de visas français est spécialement dynamique. En 2013, la France a délivré plus de 355 000 visas en Chine, soit 60 000 de plus qu’en 2012 (+ 20,5 %). Le taux de refus de visa par nos postes sur l’ensemble de la Chine a continué à diminuer (de 7,6 % à 6,3 % des demandes) et demeure inférieur à la moyenne mondiale (9,7 %).
Des instructions ont été données aux consulats en Chine pour qu’ils délivrent les visas de tourisme aux demandeurs individuels en 48 heures dès le début de l’année 2014. Cette mesure a été étendue par les postes au cas des groupes de touristes (visas dits ADS). À part Hong Kong qui rencontre des difficultés, probablement dues au fait que c’est le seul de nos postes en Chine où la biométrie est appliquée, le délai de 48 heures est tenu – grâce au renfort temporaire d’une quinzaine d’agents, puis à des ouvertures de postes.
On observe cette année une véritable explosion de la demande de visas français en Chine, dont l’augmentation s’est considérablement accélérée par rapport aux années précédentes : on en est sur le premier semestre 2014 à + 50,5 % ! Ceci laisse penser que les mesures de facilitation qui ont été prises ont eu un effet immédiat.
Le ministre des affaires étrangères et du développement international a annoncé, dans son discours de clôture des Assises du tourisme le 19 juin 2014, l’extension à plusieurs pays du Golfe, à l’Afrique du Sud et à l’Inde de la délivrance des visas de tourisme en 48 heures. Cette extension pourrait être effective au 1er janvier 2015.
On relève depuis deux ans une augmentation particulièrement rapide du nombre de visas de circulation délivrés, conformément aux instructions données (voir supra).
Leur nombre annuel est passé de 453 000 en 2011 à 513 000 en 2012 et 632 000 en 2013, soit + 40 % en deux ans. Ce constat est encore plus accentué si l’on prend en compte le premier semestre 2014, puisque l’on en est alors à + 27 % de visas de circulation délivrés par rapport au premier semestre 2013 et + 71 % en comparaison avec le premier semestre 2011. Cette priorité de la politique du Gouvernement, destinée comme on l’a vu à faciliter les déplacements des étrangers que leurs liens professionnels ou familiaux amènent à voyager fréquemment en France, est donc bien appliquée par les services. Outre que la délivrance de tels visas allège le travail des services, elle facilite la venue régulière en France de personnes – hommes d’affaires, chercheurs… – qui contribuent à notre rayonnement économique et culturel et sont en général des amis de notre pays.
L’accueil d’étudiants étrangers nombreux et de bon niveau est essentiel pour l’attractivité des grands pays. Accessoirement, lorsque les frais de scolarité sont principalement à la charge des étudiants, cet accueil procure des ressources substantielles à leurs établissements. Il leur permet de diffuser leur langue, leur culture, plus généralement une sympathie pour eux dans les futures élites du monde entier. Les États-Unis notamment, où étudient environ 700 000 étudiants étrangers, l’ont compris depuis longtemps.
La France a parfois eu une attitude plus ambivalente. Sous la précédente majorité, la crainte, manifestement très excessive, d’une immigration détournée et incontrôlée par le biais des titres de séjour pour études a conduit à des gestes qui ont eu un impact très négatif, comme la célèbre « circulaire Guéant ».
La politique conduite depuis deux ans est plus équilibrée. Ella a déjà donné des résultats, mais des mesures restent à prendre, ce qui devrait être le cas dans le cadre de la future loi sur le droit des étrangers en France.
Durant l’année universitaire 2013-2014, la France a accueilli 295 000 étudiants étrangers, soit 6 000 de plus que l’année précédente (+ 2 %). Ils ont représenté 12 % du total des étudiants et 41 % du total des doctorants. Quatre nationalités avaient durant cet exercice plus de 10 000 étudiants présents en France : le Maroc (33 900 étudiants), la Chine (30 200), l’Algérie (21 900) et la Tunisie (11 900) (2). Cette hiérarchie des pays d’origine est d’ailleurs la même que les années précédentes.
En 2012, l’UNESCO dénombrait 4 millions d’étudiants en mobilité internationale dans le monde. Ce nombre pourrait atteindre 20 millions d’ici quelques années. Les pays qui accueillaient le plus de ces étudiants internationaux étaient les États-Unis (19 % du total), le Royaume-Uni (11 %), la France (7 %), l’Australie (6 %) et l’Allemagne (5 %). La France est donc revenue à la troisième place, alors qu’elle n’occupait que la quatrième en 2010 dans le même classement (et la cinquième selon un classement fait par l’OCDE).
Sur le terrain, un progrès concret est salué par les acteurs : la mise en place d’une vingtaine de « guichets uniques » sur le territoire où sont regroupées les différentes démarches que doivent faire les étudiants étrangers (démarches administratives, mais aussi, par exemple, recherche de logement). Il reste toutefois une difficulté réglementaire, qui devrait prochainement être levée : pour que ces guichets uniques puissent fonctionner pour tous les étudiants, il faudrait que la préfecture territorialement compétente pour leur délivrer ou renouveler les documents de séjour soit celle de leur établissement universitaire et non celle de leur domicile.
La caution locative étudiante (CLÉ) est un autre dispositif nouveau qui apparaît comme particulièrement utile pour les étudiants étrangers, même s’il ne les cible pas spécifiquement. La CLÉ, testée en 2013 et désormais généralisée, permet aux étudiants dépourvus de garants personnels de bénéficier d’une garantie de l’État pour accéder à un logement locatif : de fait, les étudiants étrangers sont plus souvent que les autres sans caution familiale, amicale ou bancaire et donc susceptibles de solliciter ce dispositif. De plus, la réglementation, prenant en compte cette réalité, les favorise sur un point : alors que, normalement, l’âge limite de bénéfice de la CLÉ est de 28 ans, une dérogation est prévue pour les doctorants ou post-doctorants de nationalité étrangère.
Il faut également signaler qu’une mesure législative significative a déjà été prise : l’article 86 de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche dispose que les titulaires d’un master pourront bénéficier d’une autorisation de séjour de douze mois, au lieu de six précédemment, pour chercher un emploi en vue d’une première expérience professionnelle. En effet, le plafonnement à six mois de la recherche d’emploi pour ces jeunes diplômés conduisait un grand nombre d’entre eux à chercher un emploi dans d’autres pays développés après avoir été formés, souvent presque gratuitement, par la France, ce qui était une absurdité pour nos finances publiques. Cette première expérience professionnelle aura également une acception plus large : elle pourra dorénavant être effectuée auprès d’un ou plusieurs employeurs et n’aura plus obligatoirement pour visée théorique la préparation d’un retour au pays.
Les données chiffrées disponibles établissent clairement que l’accueil d’étudiants étrangers n’est pas un canal massif d’immigration durable dans notre pays.
En effet, 58 000 à 65 000 visas pour études sont délivrés annuellement (sur la période 2009-2013), étant rappelé que cette obligation ne s’applique pas à tous les étudiants étrangers. Au total, près de 300 000 étrangers étudient à un moment donné en France. Or, d’après les chiffres présentés dans l’étude d’impact du projet de loi relatif au droit des étrangers en France, le nombre d’étudiants étrangers qui changent de statut en obtenant un titre de séjour pour un autre motif (en général pour travailler) est seulement de l’ordre de 14 000 à 15 000 par an. Quant aux autorisations provisoire de séjour pour recherche d’emploi, réformées par la loi précitée du 22 juillet 2013 (voir supra), leur nombre est encore plus limité (3 060 en 2012). Et il faut bien voir que les ex-étudiants qui sont ainsi autorisés à poursuivre leur séjour en France ne vont pas, pour la plupart, y rester durablement.
Plusieurs dispositions du projet de loi relatif au droit des étrangers en France visent à faciliter ou alléger les démarches des étudiants étrangers soumis à l’obligation de titre de séjour :
– tout d’abord, ils bénéficieront de l’instauration, par l’article 11, d’une carte de séjour pluriannuelle adaptée à la durée de leurs études. Il faut savoir que, pour l’heure, plus de 100 000 renouvellements de titres de séjour « étudiant » sont opérés annuellement, ce chiffre étant en constante augmentation (plus de 128 000 en 2012). Ces démarches prennent du temps aux intéressés et mobilisent des moyens administratifs ; elles seront fortement réduites ;
– l’article 5 du projet prévoit la délivrance d’une autorisation provisoire de séjour à l’étudiant titulaire d’un diplôme au moins équivalent au grade de master justifiant d’un projet de création d’entreprise dans un domaine correspondant à sa formation ;
– l’article 9 vise à régulariser la situation des étudiants étrangers qui trouvent un emploi sans avoir demandé une autorisation provisoire de séjour pour ce faire : sous réserve d’être de niveau master, ils pourront obtenir un titre de séjour en qualité de salarié s’ils présentent, à l’expiration de leur carte portant la mention « étudiant », un contrat de travail en cohérence avec leurs études assorti d’une rémunération au moins égale à un seuil fixé par décret.
Les taux de refus des visas pour études par nos consulats restent beaucoup plus élevés que sur la masse des visas : comme on peut le voir sur le tableau ci-après, portant sur un certain nombre de pays « significatifs », ils approchent ou dépassent parfois les 50 %.
Source : MAEDI, questionnaire budgétaire.
Ce niveau élevé de refus amène à s’interroger sur la procédure de délivrance des visas pour études.
Dans les 33 pays où la demande est forte, une procédure spécifique a été mise en place, en s’appuyant sur l’établissement Campus France, dont la vocation est d’accompagner le parcours d’études des jeunes étrangers en France : la procédure des « centres pour les études en France ». Ces centres, localisés dans les « espaces Campus France », permettent aux candidats aux études en France de formuler, sur internet, des demandes de formation et de solliciter une pré-inscription avec les établissements supérieurs qui ont conventionné pour ce faire avec Campus France.
La mission de Campus France, dans ce processus, est d’informer les candidats, de tester leur niveau linguistique, de procéder à un examen administratif de leur dossier et de leur faire passer un entretien.
Les établissements d’enseignement supérieur ayant conventionné avec Campus France peuvent consulter en ligne le dossier des étudiants et leur compte-rendu d’entretien, avant de les préinscrire éventuellement.
Le service de coopération et d’action culturelle de l’ambassade est chargé de donner un avis sur le projet d’études.
Enfin, l’attribution du visa reste de la responsabilité du service consulaire.
Dans la mesure où les dossiers de demande de visa pour études sont ainsi filtrés, on peut s’étonner qu’il y ait un tel taux de refus en fin de parcours. Des personnes auditionnées par votre rapporteur ont mis en avant :
– l’insuffisance de niveau en français de nombreux demandeurs, notamment depuis quelques années dans les pays où l’enseignement a été « arabisé », ce malgré les diplômes locaux apparemment flatteurs qu’ils présentent,
– le fait que certains établissements d’enseignement supérieur, en particulier des établissements payants désireux de recruter des élèves, resteraient insuffisamment rigoureux dans leurs décisions de pré-inscription.
Dans l’autre sens, les universités françaises, représentées par la Conférence des présidents d’université, revendiquent une plus grande responsabilité des établissements dans le choix de leurs étudiants : de leur point de vue, la pré-inscription devrait déboucher sauf exceptions sur la délivrance du visa pour études, au moins dans les cas où elle s’inscrit dans le cadre d’une mobilité organisée par convention entre un établissement français et un établissement étranger.
Des cas assez absurdes de refus de visa sont également rapportés, par exemple des refus pour insuffisance de ressources alors même que les demandeurs peuvent attester qu’ils bénéficieront en France d’une bourse d’études généreuse qui leur a déjà été attribuée…
L’hétérogénéité des taux de refus selon les pays et surtout de leur évolution la plus récente conduit également à s’interroger. Si l’on regarde (voir tableau supra) l’évolution des refus de visas pour études en 2013 par rapport à 2012, puis au premier semestre 2014, on constate en général un certain recul des taux de refus. Mais les évolutions restent très variables selon les pays : en Russie, où le représentant spécial Jean-Pierre Chevènement s’était investi sur la question, on est passé de 28 % à 11 % de refus de 2012 à 2013. La baisse du taux de refus a également été forte au Sénégal (taux de refus passé de 2012 à 2013 de 46 % à 30 %), en Tunisie (taux passé de 30 % à 18 %), au Mali (taux passé de 60 % à 45 %) ou encore en Côte d’Ivoire (taux passé de 46 % à 31 %). Dans d’autres pays, cependant, comme l’Algérie, le Maroc ou l’Égypte, le taux de refus a en revanche augmenté (modérément) sur la même période.
Cette hétérogénéité des évolutions justifierait sans doute une analyse plus détaillée des pratiques des postes, dans la perspective d’un éventuel « recadrage » de ces pratiques.
Le projet de loi de finances pour 2015 voit par ailleurs la création d’un nouveau « programme » budgétaire, destiné à porter l’organisation de la conférence « Paris Climat 2015 » ou « COP 21 » (formellement la 21ème conférence des parties à la Convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques).
L’importance de cet événement n’échappe à personne. Cette réunion sera l’une des plus grandes conférences sur le climat jamais organisée. Son objectif est de progresser vers un accord international qui engagerait tous les grands pays émetteurs de gaz à effet de serre – pays développés comme pays en développement – en trouvant un équilibre entre l’approche du Protocole de Kyoto (une division mathématique des engagements de réduction d’émissions, à partir d’un plafond commun) et celle de Copenhague (soit un ensemble d’engagements nationaux non contraignants). Il s’agirait aussi d’adopter une approche plus positive, mettant en valeur les opportunités de création d’emplois et de richesses et d’innovation que représente le défi du changement climatique.
La Conférence devrait se tenir du 30 novembre au 11 décembre 2015 sur le site du Parc des expositions du Bourget. Un sommet de la société civile sera également organisé et 20 000 personnes sont attendues.
Cela explique les coûts considérables prévus : 187 millions d’euros, lesquels seront étalés sur deux ans (2015 et 2016 – l’événement ayant lieu à la charnière des deux exercices). Pour 2015, le projet de loi de finances inscrit donc 179 millions d’euros d’autorisations d’engagement, mais seulement 43,4 millions d’euros de crédits de paiement sur le nouveau programme 341 : l’essentiel des paiements auront lieu en 2016.
Les principales dépenses programmées correspondent :
– à la location du Parc des expositions, pour 13,2 millions d’euros (en autorisations d’engagement) ;
– à l’aménagement des espaces du « Village de la conférence », qui accueillera les délégations, la société civile et les medias, pour 51,1 millions d’euros ;
– au fonctionnement du site (réseaux divers, communications, aménagements de sites externes…), pour 79,5 millions d’euros.
À l’issue de l’audition, le 21 octobre 2014, en commission élargie, de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international (3), la commission des affaires étrangères examine, pour avis, les crédits pour 2015 des programmes « Action de la France en Europe et dans le monde » et « Français à l’étranger et affaires consulaires », sur le rapport de M. Philippe Baumel, et du programme « Diplomatie culturelle et d’influence », sur le rapport de M. François Loncle.
Suivant l’avis des rapporteurs, la Commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l’Etat », tels qu’ils figurent à l’état B annexé à l’article 32 du projet de loi de finances pour 2015.
– Conférence des présidents d’université : MM. Jean-Loup Salzmann, président, Khaled Bouabdallah, vice-président, et Karl Stoeckel, conseiller parlementaire
– Cabinet de la secrétaire d’État à l’enseignement supérieur et à la recherche : M. Jean-Baptiste Prévost, conseiller social et pour la vie étudiante, et Mmes Elsa Comby, conseillère diplomatique, et Alexandrine Fadin, assistante parlementaire
– Campus France : M. Antoine Grassin, directeur général
– Ministère des affaires étrangères et du développement international – direction générale des affaires politiques et de sécurité : MM. Nicolas de Rivière, directeur général, et Pierre Cochard, directeur général adjoint, et Mmes Mathilde Lamoureux, chef de la mission de coordination financière et administrative, et Célia Alfonsi, son adjointe
– Ministère des affaires étrangères et du développement international – direction des Français à l’étranger et de l’administration consulaire : MM. Christophe Bouchard, directeur, et Christian Reigneaud, chef de la mission de gestion administrative et financière