N° 4129 tome VII - Avis de M. Gilles Lurton sur le projet de loi de finances pour 2017 (n°4061).


ogo2003modif

N° 4129

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈMELÉGISLATURE

EnregistréàlaPrésidencedel’Assembléenationalele 13 octobre 2016.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2017,

TOME VII

TRAVAIL ET EMPLOI

FINANCEMENT NATIONAL DU DÉVELOPPEMENT
ET DE LA MODERNISATION DE L’APPRENTISSAGE

PAR M. Gilles LURTON,

Député.

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 4061, 4125 (annexe n° 47).

SOMMAIRE

___

PAGES

I. UN FINANCEMENT DE L’APPRENTISSAGE EN AUGMENTATION EN 2017 MAIS QUI NE PERMET PAS UN RETOUR DES ENTRÉES EN APPRENTISSAGE AU NIVEAU DE 2012 7

A. UNE AUGMENTATION DES ENTRÉES EN APPRENTISSAGE EN 2015 ET 2016 MAIS QUI DEMEURE EN DEÇÀ DES ENTRÉES ENREGISTRÉES EN 2012 7

1. Une importante chute des entrées en apprentissage en 2013 et 2014 suivie d’un rattrapage en 2015 7

2. Un rattrapage confirmé pour 2016 9

B. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS DU CAS FNDMA EN 2017 9

1. La réforme du financement de l’apprentissage 9

2. Des crédits du CAS FNDMA en augmentation en 2017 16

3. Les crédits en faveur de l’apprentissage inscrits au programme 103 Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi 18

4. Des acteurs de l’apprentissage fragilisés : l’exemple des chambres de commerce et d’industrie (CCI) 19

II. PAS DE GRAND BOULEVERSEMENT DE L’APPRENTISSAGE MAIS DES MESURES CONCRÈTES DESTINÉES À RÉTABLIR LA CONFIANCE DES ENTREPRISES SUR LE TEMPS LONG 20

A. UN SECTEUR TRÈS SENSIBLE AUX MESURES LÉGISLATIVES ET RÉGLEMENTAIRES 20

1. Une série de mesures préjudiciables à l’apprentissage prises en début de législature avant une prise de conscience 20

2. Des mesures en faveur de l’apprentissage encore insuffisantes 22

a. Un manque de souplesse persistant dans l’organisation de la journée de travail de l’apprenti 22

b. La question du travail de nuit des apprentis 23

c. Le dispositif d’initiation aux métiers en alternance (DIMA) 24

d. Apprentissage dans le secteur public 25

B. PRENDRE ENFIN LES MESURES VISANT À RÉTABLIR LA CONFIANCE DANS LE SYSTÈME DE FORMATION PAR APPRENTISSAGE 26

1. Rapprocher l’école de l’entreprise 26

2. Intégrer pleinement les établissements de formation des apprentis dans un système traditionnel de formation. 27

3. Orienter vers l’apprentissage des élèves en situation de réussite scolaire 27

4. Neutraliser le facteur de l’âge des apprentis 28

5. Accompagner les jeunes en apprentissage et renforcer le rôle de l’employeur 29

6. Valoriser les tuteurs d’apprentissage 30

7. Régler la question de la réticence des entreprises à s’engager avec un apprenti pour 3 ans 30

8. Réduire les délais d’instruction des nouvelles formations 30

TRAVAUX DE LA COMMISSION 33

EXAMEN DES CRÉDITS 33

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS 35

INTRODUCTION

Alors que l’objectif de 500 000 apprentis en 2017 ne cesse d’être réaffirmé à chaque occasion, les paramètres du soutien financier à l’apprentissage et l’environnement législatif et réglementaire n’ont cessé d’être bouleversés depuis 2013 – par la suppression de l’indemnité compensatrice forfaitaire (ICF) et son remplacement par une prime de 1 000 euros réservée aux seules entreprises de moins de 11 salariés, par le resserrement du crédit d’impôt apprentissage mais également par un certain nombre de décrets restreignant les marges de manœuvre des employeurs – apportant toujours moins de visibilité à moyen et long terme.

Ces mesures, intervenues à un moment où la situation de l’emploi était déjà difficile, ont donc entraîné les conséquences que l’on connaît, à savoir une chute des entrées en apprentissage de plus de 8 % en 2013 et de l’ordre de 3 % en 2014. Mesures sur lesquelles le Gouvernement est partiellement revenu et qui expliquent en partie le rattrapage en termes d’entrées dans l’apprentissage enregistré en 2015 et 2016. Le nombre d’apprentis risque toutefois d’être plus faible en 2017 qu’il ne l’était en 2012 et, en tout état de cause, l’objectif des 500 000 apprentis ne sera pas atteint.

Le présent rapport propose un bilan et livre quelques pistes tant il apparaît aujourd’hui évident qu’il ne faut pas attendre de bouleversement de l’apprentissage mais essayer de lever un à un les freins qui ne permettent toujours pas de faire de cette voie de formation professionnalisante une voie d’excellence prisée par les jeunes et leurs familles.

Le compte d’affectation spéciale Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage (CAS FNDMA) traduit sur le plan du financement les modifications qui ont affecté la politique de l’apprentissage en 2013 et 2014. La réforme de la taxe d’apprentissage s’est traduite en particulier par une très importante majoration des recettes du CAS pour 2015 et 2016, à la faveur de l’affectation aux régions d’une fraction de 51 % de la nouvelle taxe qui a réuni les deux contributions préexistantes, ce qui a représenté un total de 1,49 milliard d’euros en 2016, stable par rapport à 2015. L’année 2017 enregistre une augmentation de 5,3 % avec 1,57 milliard d’euros.

Le périmètre du CAS est stable depuis 2015. Il retrace depuis cette date uniquement les modalités de la répartition, au niveau régional, de la ressource consacrée au développement de l’apprentissage avec « une part fixe » qui maintient pour chaque région le montant des ressources précédemment affectées au titre de la taxe d’apprentissage comme au titre de la compensation des compétences transférées aux régions et en particulier des primes d’apprentissage qu’elles versent, et « une part dynamique », destinée à assurer une péréquation entre les régions.

Il a tout de même paru opportun de préserver le principe d’un compte spécial, qui permet de conserver une plus grande lisibilité des modalités de répartition entre les régions des crédits pour l’apprentissage qui leur sont affectés, et en particulier, de l’ampleur de la péréquation ainsi opérée.

Le rapporteur pour avis approuve le choix du maintien de cette présentation budgétaire, qui permet aussi au Parlement d’assurer le suivi nécessaire de la mise en œuvre de la réforme du financement de l’apprentissage.

Le contrat d’apprentissage est destiné principalement aux jeunes de 16 à 25 ans, et vise l’acquisition d’un diplôme du Répertoire national des certifications professionnelles. Toutefois, la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a étendu la possibilité de conclure un contrat d’apprentissage jusqu’à 30 ans dans les régions volontaires et à titre expérimental sur une période allant du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2019. Il apparaît à ce titre assez peu explicable de reculer l’âge des entrées en apprentissage afin de permettre à chacun de trouver la voie qui lui convient quel que soit son âge et de refuser dans ce même temps d’ouvrir le débat sur l’entrée en apprentissage avant 15 ans.

Alors que les entrées en apprentissage sont passées d’environ 230 000 en 2003 à 297 000 en 2012 – avec, dans l’intervalle, une augmentation constante à peine relativisée par un léger recul avec la crise de 2008 –, l’année 2013 a enregistré une véritable chute de plus de 8 % avec moins de 273 000 entrées. En 2014, 265 000 nouveaux contrats d’apprentissage ont été comptabilisés dans le secteur privé, soit une nouvelle baisse de 3 % par rapport à 2013. Si la baisse a été freinée par rapport à 2013, l’apprentissage a continué à reculer en 2014. Il a fallu attendre l’année 2015 pour voir enfin les entrées en apprentissage repartir à la hausse (+ 2,3 %).

Les entreprises de moins de 50 salariés restent en 2015 les principaux employeurs d’apprentis, avec 74 % des nouveaux contrats. Par ailleurs, 32 % des nouvelles entrées en contrats d’apprentissage concernent des jeunes sans diplôme ou titre à la signature du contrat.

La part des jeunes femmes préparant un diplôme par la voie de l’apprentissage reste stable à près d’un tiers des entrées en apprentissage dans le secteur privé. Dans le secteur public, les entrées en contrat d’apprentissage ont progressé de 24,8 % (10 000 entrées pour la rentrée 2016), où cette proportion s’établit à 47 %.

Le tableau ci-après présente l’évolution du nombre de bénéficiaires dans le secteur privé par région et par année :

Régions

Entrées 2012

Entrées 2013

Entrées 2014

Entrées 2015

Alsace

10 767

9 145

8 692

9 555

Aquitaine

13 236

12 586

12 452

12 844

Auvergne

7 472

7 596

7 239

5 812

Bourgogne

7 607

6 651

6 491

6 667

Bretagne

12 727

10 681

11 208

12 351

Centre

13 641

13 281

12 486

12 298

Champagne-Ardenne

5 883

5 494

5 146

4 995

Corse

1 502

1 326

1 471

1 307

Franche-Comté

6 406

5 842

5 824

6 278

Ile-de-France

62 762

55 656

55 123

55 687

Languedoc-Roussillon

10 941

9 529

10 026

10 091

Limousin

2 757

1 971

2 518

2 450

Lorraine

9 781

10 470

9 508

8 862

Midi-Pyrénées

12 266

12 279

11 062

11 270

Nord-Pas-de-Calais

12 263

12 351

11 410

13 344

Basse-Normandie

7 834

7 219

6 674

6 713

Haute-Normandie

9 139

7 931

8 252

7 676

Pays de la Loire

8 178

16 153

15 856

16 976

Picardie

8 136

7 624

6 726

7 107

Poitou-Charentes

10 118

8 605

8 411

8 307

Provence-Alpes-Côte d’Azur

22 173

20 593

19 975

19 049

Rhône-Alpes

28 139

26 639

26 049

26 296

Guadeloupe

633

915

853

631

Guyane

121

142

42

159

La Réunion

1 932

1 899

1 259

2 051

Martinique

877

415

647

772

Total France entière

297 291

272 993

265 400

269 548

Source : ministère du travail – DARES.

La reprise des entrées est visible dans les secteurs de l’industrie et du tertiaire. Le secteur de la construction connaît toujours un recul, mais moins marqué qu’en 2014.

Le tableau ci-dessous présente la répartition des employeurs utilisateurs des contrats d’apprentissage en pourcentage selon le secteur d’activité :

Secteurs d’activité

2012

2013

2014

2015
(provisoire)

Agriculture, sylviculture, pêche

3,0

2,9

3,3

3,5

Industrie

21,2

22,1

22,1

22,1

Construction

19,7

18,7

16,9

15,9

Commerce, réparation d’automobiles et de motocycles

18,8

18,8

19,2

20,1

Hébergement et restauration

11,5

11,6

11,9

11,9

Soutien aux entreprises

7,7

7,8

8,1

8,0

Coiffure, soins de beauté

5,8

5,8

5,4

5,7

Autres secteurs du tertiaire

12,3

12,3

13,2

12,7

Source : ministère du travail – DARES.

Les premiers chiffres de l’apprentissage pour 2016 semblent confirmer la tendance. En effet, sur la période de juin 2015 à mai 2016, 283 250 contrats d’apprentissage ont été enregistrés, ce qui représente une hausse de 4,9 % par rapport à la même période de 2014/2015.

Le rapporteur pour avis salue bien évidemment ces évolutions enfin positives après deux années de fortes baisses même si elles résultent d’un effet de rattrapage après ces fortes baisses. La ministre du travail, de l’emploi et de la Formation Professionnelle l’a d’ailleurs reconnu dans un certain nombre de ses interventions en affirmant : « Il y a sans doute eu des erreurs, je le reconnais volontiers, notamment s’agissant des aides financières aux entreprises. Des décisions successives ont déstabilisé les employeurs qui n’avaient plus confiance dans le soutien que le Gouvernement apportait à l’apprentissage ». (1). Néanmoins, pour atteindre l’objectif ambitieux des 500 000 apprentis, il est nécessaire d’aller plus loin et de rétablir la confiance des entreprises dans cette voie de formation.

Le financement de l’apprentissage a été réformé par pas moins de quatre textes depuis 2013 : la loi de finances pour 2014, la loi de finances rectificative pour 2013 (2), la loi relative à la formation professionnelle précitée et la loi de finances rectificative pour 2014 (3).

Ces évolutions se caractérisent par l’affirmation de la place centrale des régions et l’augmentation de l’effort en direction des centres de formation d’apprentis (CFA) avec comme objectif le retour de la totalité de l’argent de l’apprentissage à celui-ci :

– la taxe d’apprentissage (0,5 % de la masse salariale) et la contribution au développement de l’apprentissage (0,18 % de la même assiette) ont été fusionnées en une taxe d’apprentissage unique, au taux de 0,68 % (0,44 % en Alsace-Moselle). Avant la réforme, la taxe d’apprentissage représentait 1 929 millions d’euros ;

– le produit de cette taxe est affecté majoritairement (51 %) aux régions, et ne transite plus depuis cette date par le compte d’affectation spéciale Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage (CAS FNDMA) (4).

La première fraction, dédiée aux régions, est fixée à 51 % du produit de la taxe d’apprentissage, soit 1 573,2 millions d’euros au total. Elle a vocation à être complétée par une fraction de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) de 150,5 millions d’euros, pour atteindre 1 723,7 millions d’euros au total pour 2017, somme qui représente donc la « ressource régionale pour l’apprentissage ».

Cette première fraction se décompose en deux parts : une part fixe, qui représente 1 544 millions d’euros pour 2017 (1 393,6 millions d’euros de fraction régionale de taxe d’apprentissage plus la fraction de TICPE de 150,5 millions d’euros), est reversée entre les 18 régions, les montants correspondant, pour chaque collectivité, à la somme des financements perçus antérieurement ; et une part variable, qui représente 179,7 millions d’euros en 2017 contre 98,2 millions d’euros pour 2016, correspondant à l’excédent du produit de la fraction régionale au-delà du montant de la part fixe, qui a vocation à être répartie entre les régions. Cette répartition se fait en fonction de critères prenant en compte les disparités régionales dans le versement de la taxe d’apprentissage, mais également l’évolution des effectifs régionaux d’apprentis inscrits dans les CFA et les sections d’apprentissage et leur répartition entre les formations conduisant aux premiers niveaux de qualification (niveaux IV et V) et celles de niveau supérieur (post bac) ;

RECETTES AFFECTÉES AUX RÉGIONS EN 2017 POUR L’APPRENTISSAGE

Ressource régionale pour l’apprentissage

(1)

Fraction régionale pour l’apprentissage

(2)

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

(3)

Solde dynamique de la ressource régionale pour l’apprentissage

(4) = (1) – [(2) +(3)]

1 723 780 075

1 393 550 853

150 540 000

179 689 222

RESSOURCE RÉGIONALE DE L’APPRENTISSAGE
(ARTICLE L. 6241-2 DU CODE DU TRAVAIL)

Source : ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Le reste du produit de la taxe est partagé entre le « quota » (26 %) et le « hors quota » (23 %) (5). Le quota finance pour l’essentiel les CFA et les sections d’apprentissage des établissements d’enseignement ; le hors quota permet le financement d’établissements de formation professionnelle initiale, sur la base de listes déterminées par les préfets.

Le produit de la contribution supplémentaire à l’apprentissage, taxe additionnelle à la taxe d’apprentissage qui pèse sur les entreprises de plus de 250 salariés, n’est plus affecté au CAS FNDMA, mais directement au financement des CFA.

Les ressources des régions destinées au financement de l’apprentissage sont maintenues au même niveau qu’avant la réforme, grâce à l’affectation d’une fraction de TICPE.

Deux remarques peuvent être formulées :

– l’affectation aux régions de la majorité du produit de la taxe fait peser sur l’apprentissage le risque de devenir une activité « administrée » alors que les métiers sont souvent mouvants et que l’offre doit s’ajuster en permanence pour correspondre aux besoins des entreprises.

Il sera nécessaire de veiller à mettre le plus de fluidité possible entre les conseils régionaux, les CFA et les entreprises. En effet, au cours des entretiens qu’il a menés à Saint-Malo, Combourg et Rennes, le rapporteur pour avis a été à de multiples reprises sensibilisé au délai pouvant aller jusqu’à 15 mois entre une demande d’ouverture de formation et sa mise en place sur le terrain. Ce délai a pour conséquence que les entreprises ont souvent dû renoncer au marché faute de personnels qualifiés formés à temps.

– le « hors quota » doit également faire l’objet d’une attention particulière. En effet, s’il donne aux entreprises la liberté d’affecter une partie de la taxe d’apprentissage aux CFA ou à l’établissement de formation de leur choix à condition qu’il figure sur les listes préfectorales, beaucoup d’entre elles qui n’ont que peu d’intérêt à financer l’apprentissage, utilisent le « hors quota » à d’autres fins notamment pour financer des formations hors apprentissage.

Par ailleurs, la réforme du financement de l’apprentissage avait deux objectifs qui n’ont été que partiellement atteints :

– orienter davantage de taxe vers l’apprentissage : cet objectif a été partiellement atteint dès 2015 avec 95 M€ de ressources supplémentaires versées aux régions au titre de la ressource dynamique. De leur côté, les CFA ont perçu davantage de financement pour un montant total de financement estimé à 1 060 millions d’euros. Toutefois, le produit de la taxe d’apprentissage n’est toujours pas dévolu entièrement à l’apprentissage stricto sensu. Le « hors quota » continue de financer des formations qui ont peu à voir avec l’apprentissage ;

– simplifier la vie des entreprises : cette simplification est intervenue d’une part avec la fusion, effective depuis le 1er janvier 2015, de la taxe d’apprentissage et de la contribution au développement de l’apprentissage et, de ce fait, la création d’un taux unique de 0,68 %. Par ailleurs, le réseau de collecte de la taxe d’apprentissage a été rénové le 1er janvier 2016. Pour améliorer la transparence et la lisibilité des circuits de financement de l’apprentissage, le nombre de collecteurs a été réduit de 150 à 46. L’entreprise a désormais un seul interlocuteur pour la collecte de sa taxe, qu’elle choisit entre un organisme national, généralement son organisme collecteur paritaire agréé (OPCA), et un organisme régional inter-consulaire.

La simplification est bienvenue mais elle n’efface toujours pas les effets désastreux des mesures prises en début de législature. Le rapporteur pour avis estime que la simplification de la vie des entreprises, particulièrement en termes d’embauche d’apprentis, est une clé majeure pour relancer l’apprentissage. Le présent rapport procède à une analyse des différentes pistes en seconde partie.

Les OCTA, acteurs majeurs du financement dès l’apprentissage

Issus de la loi du 16 juillet 1971 relative à l’apprentissage, les organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage (OCTA) sont chargés de sa collecte.

La loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale a procédé à une première rénovation du régime juridique de la collecte de la taxe d’apprentissage en définissant les conditions d’habilitation des organismes collecteurs, ce qui a conduit à une réduction significative du nombre d’organismes autorisés à collecter. La réforme a visé une simplification de l’appareil de collecte, la mise en place de mesures de nature à améliorer la transparence du système et une meilleure allocation des ressources dont dispose l’apprentissage.

Dans ce cadre, une grande partie de l’appareil de collecte résultant de l’ancienne réglementation (organismes consulaires départementaux, organismes agréés par les préfets de département) a disparu en 2003.

La loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale a rationalisé à nouveau le réseau des OCTA au niveau national et régional, ramenant leur nombre de 144 au total à 19 au niveau national et à 1 par région.

Au niveau national, seuls les organismes paritaires collecteurs agréés au titre de la formation professionnelle continue peuvent désormais être habilités, dans leur champ de compétence professionnelle ou interprofessionnelle, à collecter et reverser la taxe d’apprentissage. Dans ce cadre, des conventions-cadres de coopération peuvent être conclues avec les ministères pour développer les formations professionnelles et technologiques initiales.

Au niveau régional, une seule chambre consulaire peut être habilitée à collecter les versements donnant lieu à exonération de la taxe d’apprentissage et à les reverser aux établissements autorisés à les recevoir, selon des modalités définies dans le cadre d’une convention conclue avec les autres chambres consulaires de la région.

Le ministre chargé de la formation professionnelle au niveau national et le préfet de région au niveau régional sont les seules autorités administratives autorisées à habiliter ces nouveaux collecteurs.

Depuis 2016, les entreprises versent la totalité de la taxe d’apprentissage et de la contribution supplémentaire à l’apprentissage dont elles sont redevables à un OCTA unique disposant en la matière d’un choix entre le collecteur national et le collecteur régional.

La loi a établi des règles de transparence en imposant aux OCTA la tenue d’une comptabilité analytique afin de pouvoir assurer une traçabilité des versements perçus et effectués au titre de l’apprentissage, mais également en prévoyant une interdiction de cumul d’activités pour les salariés et administrateurs des OCTA, chargés du reversement des fonds non affectés de la taxe d’apprentissage et ceux des CFA, bénéficiaires de ces reversements.

La loi a également précisé les conditions dans lesquelles les OCTA procèdent à l’affectation des fonds dits libres, non affectés par les entreprises, de la fraction quota dédiée au financement des CFA et sections d’apprentissage, en fixant une procédure nouvelle associant la gouvernance régionale, en particulier le conseil régional, afin d’assurer la meilleure complémentarité des financements.

Le nouveau schéma de financement, qui s’applique depuis l’exercice 2015, est retracé par le graphique suivant. Les chiffres sont ceux de l’exercice 2016. Les chiffres prévisionnels de l’exercice 2017 n’ont pas été reçus par le rapporteur pour avis.

Schéma de répartition en 2016 de la taxe d’apprentissage
























À la suite de la réforme de la taxe d’apprentissage, le compte d’affectation spéciale Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage (CAS FNDMA) a vu son périmètre profondément modifié en loi de finances initiale pour 2015.

Depuis, ce compte retrace :

1° En recettes :

– la fraction régionale pour l’apprentissage – 51 % de la taxe d’apprentissage – mentionnée au I de l’article L. 6241-2 du code du travail ;

– les versements opérés au Trésor public en application des articles L. 6252-10 et L. 6252-12 du même code, à savoir les sanctions prévues en matière d’apprentissage ;

– les fonds de concours.

2° En dépenses :

– le versement aux régions, à la collectivité territoriale de Corse et au département de Mayotte d’une partie de la ressource régionale pour l’apprentissage prévue à l’article L. 6241-2 du code du travail, c’est-à-dire la ressource régionale pour l’apprentissage ;

– le reversement de recettes perçues au titre des années antérieures à l’exercice budgétaire en cours.

Jusqu’au 31 décembre 2016, le CAS assure également le reste à payer des dépenses engagées avant le 1er janvier 2015 sur les postes de dépenses antérieurement financés au titre du compte spécial.

Au total, les recettes du compte s’établiraient à 1,57 milliard d’euros pour 2017 au titre de la fraction régionale de 51 % de la taxe d’apprentissage ; le tableau suivant retrace la répartition prévisionnelle des dépenses du CAS, désormais réparties en deux programmes.

PRÉVISIONS DE DÉPENSES DU CAS FNDMA POUR 2016

(en millions d’euros)

 

LFI 2016
AE = CP

PLF 2017
AE = CP

Évolution

Programme n° 787 – Répartition régionale de la ressource consacrée au développement de l’apprentissage

1 395,77

1 393,55

– 0,1 %

Programme n° 790 – Correction financière des disparités régionales de taxe d’apprentissage et incitations au développement de l’apprentissage

95,07

179,69

+ 89 %

Total

1 490,85

1 573,24

+ 5,5 %

Source : projet annuel de performances pour 2016.

La répartition des crédits entre régions est prévue selon la même clé de répartition que celle inscrite au I de l’article L. 6241-2 du code du travail. L’article en question fixe une répartition d’une somme totale de 1 544 093 400 euros qui correspond à la part fixe.

Pour 2017, la fraction de TICPE complétant la part régionale de la taxe d’apprentissage étant de 150,54 millions d’euros, le montant de la part fixe de la ressource régionale versé par le CAS FNDMA est de 1 393,55 millions d’euros. Sa répartition est la suivante :

RÉPARTITION DE LA PART FIXE DE LA RESSOURCE RÉGIONALE À L’APPRENTISSAGE POUR 2016

(en euros)

Grand Est

9,20617 %

128 292 637

Nouvelle Aquitaine

9,44007 %

131 552 167

Auvergne et Rhône-Alpes

11,13400 %

155 157 927

Bourgogne et Franche-Comté

4,42505 %

61 665 339

Bretagne

4,43524 %

61 807 340

Centre Val de Loire

4,16195 %

57 998 955

Corse

0,47427 %

6 609 159

Île-de-France

15,35530 %

213 983 965

Occitanie

7,44523 %

103 753 089

Haut de France

8,65773 %

120 649 784

Normandie

5,46579 %

76 168 607

Pays de la Loire

6,33739 %

88 872 230

Provence-Alpes-Côte d’Azur

6,79127 %

94 639 792

Guadeloupe

1,65956 %

23 126 827

Guyane

0,43923 %

6 120 880

Martinique

1,83502 %

25 571 977

La Réunion

2,67429 %

37 267 601

Mayotte

0,02243 %

312 612

Total

100 %

1 393 550 853

Source : article L. 6241-2 du code du travail et PAP 2017.

Ces montants doivent a priori garantir, pour chacune des régions, la collectivité territoriale de Corse et le département de Mayotte, le maintien des ressources perçues en 2013 au titre de :

– la contribution au développement de l’apprentissage (CDA) ;

– la péréquation des disparités de la taxe d’apprentissage ;

– les contrats d’objectifs et de moyens (COM) 2011-2015, correspondant à la moyenne des enveloppes versées de 2011 à 2013 et des enveloppes plafonds 2014 et 2015, inscrites dans les COM, lesquels ne seront plus conclus à compter de 2015 ;

– ainsi que la compensation au titre des compétences transférées aux régions en matière d’apprentissage.

S’agissant de la part dynamique de la ressource régionale pour l’apprentissage, 179,7 millions d’euros pour 2016, l’article L. 6241-2 du code du travail fixe les modalités de sa mise en œuvre selon les critères de répartition suivants :

– pour 60 %, à due proportion du résultat du produit calculé à partir du nombre d’apprentis inscrits dans les CFA et les sections d’apprentissage dans la région au 31 décembre de l’année n-1, selon un quotient dont le numérateur est la taxe d’apprentissage par apprenti perçue en n-1 par les CFA et sections d’apprentissage (SA) pour l’ensemble du territoire national, et dont le dénominateur est la taxe d’apprentissage par apprenti perçue en n-1 par les CFA et les sections d’apprentissage de la région ;

– pour 26 %, au prorata du nombre d’apprentis inscrits dans les CFA et les sections d’apprentissage dans la région au 31 décembre de l’année n-1 et préparant un diplôme ou un titre à finalité professionnelle équivalent au plus au bac professionnel enregistré au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) ;

– et enfin, pour 14 %, au prorata du nombre d’apprentis inscrits dans les CFA et SA dans la région au 31 décembre de l’année n-1 et préparant un diplôme ou un titre à finalité professionnelle supérieur au bac professionnel enregistré au RNCP.

Le montant des exonérations de cotisations sociales dont bénéficient les contrats d’apprentissage est compensé aux organismes sociaux sur ce programme budgétaire. L’évolution est liée au rythme des entrées en apprentissage et à la typologie des entreprises embauchant des apprentis.

En 2017, 1 254,48 millions d’euros sont destinés à la compensation de l’exonération pour les contrats d’apprentissage et 204,34 millions d’euros pour l’aide TPE-Jeunes apprentis.

Le rapporteur estime que cette dernière aide pourrait être utilement étendue aux entreprises de moins de 250 salariés. Cette extension est cohérente avec la volonté de faire de l’apprentissage une voie d’excellence et de viser ainsi les ETI innovantes. Il est en effet nécessaire de sortir lieu commun qui assimile l’apprentissage uniquement aux métiers de bouche et du bâtiment. L’extension de cette aide demanderait à être évaluée financièrement mais également du point de vue de son efficacité.

Enfin 350 millions d’euros viennent abonder les crédits de l’action 2 Amélioration de l’insertion dans l’emploi par l’adaptation des qualifications et la reconnaissance des compétences. Ces crédits sont ponctionnés sur les crédits de la formation professionnelle.

L’apprentissage est le fait des CFA et des entreprises mais également d’un certain nombre d’acteurs intermédiaires qui mettent en relation l’entreprise et le futur jeune apprenti.

Les chambres de commerces et d’industrie jouent bien évidemment un rôle majeur dans le développement de l’apprentissage. Or, leur principale ressource – la taxe pour frais de chambres (TFC) versée aux CCI par les entreprises – ne cesse de diminuer à la suite de son plafonnement par l’État en 2012.

En effet, celle-ci a diminué de 35 % depuis cette date, passant de 1 339 millions d’euros en 2013 à 896 millions d’euros en 2016. Chaque année, la loi de finances prend le parti d’exiger des CCI des efforts bien plus importants que la moyenne observée pour les opérateurs de l’État ou les autres acteurs publics.

Le rapporteur estime que cette politique fragilise l’apprentissage dans son ensemble. En effet, il ne sert à rien de prévoir des dispositifs financiers pour favoriser celui-ci si les acteurs reconnus du secteur l’abandonnent à la suite d’une diminution de leurs moyens financiers.

Après la forte chute des entrées en apprentissage constatée en 2013 et 2014, l’apprentissage a été réaffirmé comme une priorité. Les mesures annoncées dans le cadre du Plan de relance de l’apprentissage présenté lors de la Grande conférence sociale des 7 et 8 juillet 2014, ainsi que lors des Assises de l’apprentissage du 19 septembre 2014 ont partiellement rétabli une situation qui avait été sérieusement mise à mal notamment par la suppression de l’indemnité compensatrice forfaitaire mais n’ont pas encore fait de notre pays un pays phare pour l’apprentissage et les apprentis. En effet, l’objectif affiché de 500 000 apprentis d’ici 2017 apparaît clairement inatteignable au regard de la situation actuelle, qui reste très dégradée. Pour parvenir à cet objectif, il est nécessaire d’aller encore plus loin encore que les engagements qui ont été pris. Ceux-ci doivent en outre être résolus et constants, car les entreprises sont plus que jamais soucieuses d’obtenir les garanties de la stabilité des règles pour l’avenir, afin que la confiance puisse être rétablie.

Le début de la législature a été marqué par une remise en cause brutale du soutien financier à l’apprentissage, à travers le resserrement du crédit d’impôt apprentissage et la suppression de l’indemnité compensatrice forfaitaire (ICF). Ces avantages fiscaux ont trop tardivement été remplacés par une nouvelle prime qui reste en tout état de cause inférieure au niveau antérieur du soutien à l’apprentissage.

Les personnes auditionnées par le rapporteur pour avis ont attribué à ces mesures la responsabilité mécanique de la baisse des d’entrées dans l’apprentissage. En tout état de cause, les atermoiements qui ont caractérisé les mesures prises successivement depuis la mi-2013 ont indéniablement introduit un climat de méfiance en donnant aux entreprises le sentiment que l’État se désengageait de l’apprentissage. La baisse drastique du nombre d’entrées dans l’apprentissage en 2013 et 2014 n’a pas d’autre explication.

Au-delà des aspects financiers, une série de mesures défavorables ont contribué à complexifier le recrutement et la formation des apprentis, et cela, alors même que des freins importants préexistaient.

S’agissant des mineurs qui constituent la majorité des apprentis, le décret n° 2013-914 du 11 octobre 2013 relatif à la procédure de dérogation prévue à l’article L. 4153-9 du code du travail est venu modifier le régime applicable, prétendument pour l’assouplir : en effet, il prévoit de passer d’une procédure de dérogation annuelle et individuelle demandée à l’inspection du travail par l’employeur à une dérogation triennale et collective, attachée à un lieu de travail. La nouvelle procédure s’est révélée, dans les faits, quasiment impraticable dans certains secteurs d’activité, en particulier pour les petites entreprises. Les employeurs ont mis en avant à juste titre le fait qu’une telle procédure d’autorisation préalable a conduit à déporter la responsabilité de l’employeur vers un tiers, l’inspecteur du travail. Cela a eu des conséquences dans de nombreux secteurs d’activité, notamment le secteur agricole et celui de la forêt où l’accidentalité est encore importante, et où les exploitants maîtres d’apprentissage peuvent aujourd’hui se montrer réticents à recruter des apprentis en raison de cette réglementation. De ce fait, les employeurs ont refusé de recruter un apprenti mineur, ce qui a affecté le profil des apprentis et a évincé les tout jeunes apprentis issus de milieux sociaux souvent moins avantagés que leurs aînés.

Dans le cadre du plan de relance de l’apprentissage présenté à la grande conférence sociale des 7 et 8 juillet 2014, plusieurs mesures ont été prises :

– L’aide « TPE jeune apprenti », permettant à toute entreprise de moins de 11 salariés employant un apprenti mineur de percevoir 1 100 euros par trimestre pour tenir compte de son investissement en matière de formation, pour la première année du contrat. L’aide est effective pour tous les contrats conclus depuis le 1er juin 2015. Pour assurer la cohérence des aides aux employeurs, l’aide au recrutement d’un apprenti supplémentaire, dans les entreprises de plus de 11 salariés, devrait être accessible sans condition d’accord de branche ;

– La prestation « réussite apprentissage », ciblée sur des territoires prioritaires, qui devrait permettre à 10 000 jeunes de se préparer à l’apprentissage, et à l’employeur de les aider à s’intégrer durablement dans leur milieu de travail. L’appel à projets a été lancé en juillet.

Enfin, le rapporteur pour avis souligne que ces mesures pourraient être financées en restreignant l’accès aux contrats aidés qui ont une efficacité relative sur l’emploi à long terme du fait de l’insuffisance de la formation. Le Gouvernement lui-même demande dans une circulaire récente modifie les prescriptions des contrats aidées, en supprimant la possibilité de conclure des contrats emploi avenir au quatrième trimestre 2016, hormis le cas de renouvellement, et en limitant les cas de recours aux CUI-CAE (contrat d’accompagnement dans l’emploi) et CUI-CIE (contrat initiative emploi) (6).

Diverses mesures ont été prises pour rétablir une situation compromise, notamment des mesures financières : fraction régionale, augmentation du quota, aide au recrutement.

Toutefois, les blocages demeurent.

En matière de durée du travail, aujourd’hui, en droit français, les apprentis mineurs ne peuvent être employés plus de 8 heures par jour et 35 heures par semaine aux termes de l’article L. 3162-1 du code du travail. Il est cependant possible de déroger à la durée maximale hebdomadaire à titre exceptionnel, sur accord de l’inspecteur du travail et après avis conforme du médecin du travail dans la limite de 5 heures supplémentaires par semaine. En revanche, l’article L. 3162-1 du code du travail ne prévoit pas de dérogation possible aux 8 heures quotidiennes.

La première version de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 prévoyait d’étendre le champ de la dérogation à la durée quotidienne avec une possibilité de dérogation à la durée de 8 heures dans la limite de 10 heures à titre exceptionnel ou lorsque des raisons objectives le justifient, dans les secteurs définis par décret en Conseil d’État. La première version de la loi précitée prévoyait aussi que les dérogations à la durée maximale hebdomadaire puissent être accordées par principe aux titulaires d’un contrat d’apprentissage pour les secteurs définis par décret en Conseil d’État et non plus à titre exceptionnel et que l’employeur informait l’inspecteur du travail et le médecin du travail pour les dérogations accordées aux apprentis dans certains secteurs.

La deuxième version du projet de loi a cependant supprimé ces dispositions. Il n’est pas actuellement envisagé d’évolution en matière de durée de travail des apprentis.

En matière de conditions de travail, certains travaux sont interdits aux apprentis de moins de 18 ans, comme à tous les jeunes travailleurs de moins de 18 ans, en raison de leur dangerosité. Ces interdictions sont prévues aux articles L. 4153-8 et D. 4153-15 à D. 4153-37 du code du travail. Toutefois, les établissements d’enseignement technologique ou professionnel, y compris agricole, peuvent déroger à l’interdiction frappant certains de ces travaux, pour les besoins de la formation des jeunes qu’ils accueillent. Les employeurs peuvent également bénéficier de cette dérogation pour ces élèves lorsqu’ils effectuent un stage dans leur entreprise ainsi que pour leurs apprentis. Ces travaux interdits susceptibles de dérogation sont dits réglementés (articles L. 4153-8 et L. 4153-9).

Enfin, le Gouvernement a publié le décret n° 2015-443 du 17 avril 2015 relatif à la procédure de dérogation prévue à l’article L. 4153-9 du code du travail pour les jeunes âgés de moins de dix-huit ans. Aux termes dudit décret, les employeurs pourront affecter des jeunes de moins de 18 ans à des travaux dangereux non plus après autorisation par l’inspection du travail, mais sur simple déclaration préalable dans le but de protéger les apprentis « sans créer de contrainte nouvelle de gestion (7) ». Le Gouvernement a fini par comprendre mais que de temps perdu.

L’article L. 3163-2 du code du travail interdit le travail de nuit pour les jeunes de moins de 18 ans. Les apprentis mineurs sont concernés par cette interdiction en vertu de l’article L. 6222-26.

Est considéré comme tel par l’article L. 3163-1 le travail effectué :

– entre 22 heures et 6 heures du matin, pour les jeunes de plus de 16 ans et moins de 18 ans ;

– entre 20 heures et 6 heures du matin, pour les jeunes de moins de 16 ans.

En dehors de ces limites, c’est selon les cas la législation de droit commun sur le travail en soirée (entre 21 heures et 22 heures) ou sur le travail de nuit (entre 6 heures et 7 heures) qui s’applique.

Il peut toutefois être dérogé à l’interdiction du travail de nuit pour l’emploi de jeunes de plus de 16 ans dans les établissements des secteurs « dans lesquels les caractéristiques particulières de l’activité le justifient » (article L. 3163-2 du code du travail) et dont la liste est fixée par l’article R. 3163-1 du code du travail. Les dérogations obéissent aux règles suivantes (articles R. 3163-2 et suivants) :

– dans les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration, le travail de nuit ne peut être autorisé que de 22 heures à 23 heures 30 ;

– dans le secteur de la boulangerie ou de la pâtisserie, le travail de nuit peut être autorisé avant 6 heures et, au plus tôt, à partir de 4 heures pour permettre aux jeunes travailleurs et aux apprentis de moins de 18 ans de participer à un cycle complet de fabrication du pain ou de la pâtisserie. Seuls les établissements où toutes les phases de la fabrication de pain ou de pâtisseries ne sont pas assurées entre 6 heures et 22 heures peuvent bénéficier de cette dérogation ;

– dans les secteurs des courses hippiques et du spectacle, le travail de nuit ne peut être autorisé que jusqu’à 24 heures, y compris, dans le secteur du spectacle, pour les jeunes de moins de 16 ans. Dans le secteur des courses hippiques, cette dérogation ne peut être utilisée que deux fois par semaine et 30 nuits par an au maximum.

– en pratique, les dérogations sont accordées par l’inspecteur du travail pour une durée maximale d’une année, renouvelable. Celui-ci apprécie si le travail de nuit de ces jeunes travailleurs ou apprentis tient compte des caractéristiques particulières de leur activité. À défaut de réponse dans le délai d’un mois suivant le dépôt de la demande, l’autorisation est réputée accordée.

Il n’est pas envisagé d’étendre à d’autres métiers les dérogations prévues à l’article R. 3163-1 du code du travail qui établit de manière limitative la liste des secteurs où sont applicables les dérogations. Concernant le secteur de la pêche, l’article L. 5544-27 du code des transports prévoit que : « le travail de nuit est interdit aux jeunes travailleurs. Les services de quart de nuit de 20 h à 6 h sont considérés comme travail de nuit. Lorsque la formation le justifie, une dérogation peut être accordée par l’inspecteur du travail, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. Le travail de nuit est interdit entre 20 h et 6 h aux jeunes gens en formation âgés de moins de 15 ans ».

Le décret n° 2006-534 du 10 mai 2006, transposant la directive 94/33/CE du 22 juin 1994, fixe les dispositions particulières pour les jeunes travailleurs âgés de moins de 18 ans embarqués à bord des navires à titre professionnel ou dans le cadre de leur formation. Ce décret prévoit dans son article 14, qu’une demande de dérogation à l’interdiction du travail de nuit des jeunes travailleurs peut être demandée à l’inspecteur du travail lorsque la formation le justifie. À la demande du rapporteur pour avis, ce décret est en cours de réécriture. Le rapporteur suivra avec attention la sortie du décret dans les plus brefs délais.

Le dispositif d’initiation aux métiers en alternance (DIMA) est un dispositif préparant à l’apprentissage sous statut scolaire, en CFA ou en lycée professionnel et destiné aux élèves des collèges qui, à la rentrée, n’ont pas l’âge requis pour pouvoir conclure un contrat d’apprentissage.

Depuis la loi du 5 mars 2014, l’article L. 6222-1 du code du travail prévoit que « nul ne peut être engagé en qualité d’apprenti s’il n’est âgé de seize ans au moins à vingt-cinq ans au début de l’apprentissage. Toutefois, les jeunes âgés d’au moins quinze ans peuvent souscrire un contrat d’apprentissage s’ils justifient avoir accompli la scolarité du premier cycle de l’enseignement secondaire. Les jeunes qui atteignent l’âge de quinze ans avant le terme de l’année civile peuvent être inscrits, sous statut scolaire, dans un lycée professionnel ou dans un centre de formation d’apprentis pour débuter leur formation, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. » Pour les élèves n’ayant pas atteint l’âge requis, il est désormais exigé que l’élève ait accompli la scolarité du premier cycle de l’enseignement secondaire et qu’il ait atteint l’âge de 15 ans entre la date de la rentrée scolaire et le 31 décembre.

L’élève est alors inscrit, soit dans un lycée professionnel, soit dans un centre de formation d’apprentis sous statut scolaire, pour commencer une formation conduisant à la délivrance d’un diplôme ou d’un titre à finalité professionnelle enregistré au répertoire national des certifications professionnelles. La formation comprend des périodes de formation en milieu professionnel, qui sont régies par les articles D. 331-3, D. 331-4 et D. 331-15 du code de l’éducation et R. 715-1 et R. 715-1-5 du code rural et de la pêche maritime.

De telles dispositions ont ainsi permis d’orienter valablement les jeunes postulants n’ayant pas atteint l’âge de quinze ans lors de la réforme de l’âge d’entrée en apprentissage.

Toutefois, comme le montrent les chiffres ci-dessous, les effectifs des bénéficiaires du DIMA ont diminué de 10,26 % entre la fin de l’année 2014 et la fin de l’année 2015. Il s’agit de la conséquence directe de la modification des conditions d’accès au dispositif. En effet, avant 2014, les jeunes ayant accompli complètement le premier cycle de l’enseignement secondaire pouvaient souscrire un contrat d’apprentissage à 15 ans.

Le rapporteur pour avis estime en conséquence souhaitable de revenir au dispositif en vigueur en 2011.

 

Effectifs au 31/12/2013

Effectifs au 31/12/2014

Effectifs au 31/12/2015

DIMA en CFA et en SA

5 769

5 932

5 323

Source : MENESR – DEPP – Système d’information sur la formation des apprentis.

L’apprentissage dans le secteur public a connu un accroissement de 7,3 % sur la période 2009-2010, supérieur à celui du secteur privé (2,5 % sur la même période). Après 9 800 entrées en 2012, ce sont seulement 8 700 nouveaux contrats qui ont été comptabilisés en 2014, ce qui ne représente qu’à peine 2 % du total de l’apprentissage.

L’apprentissage dans le secteur public présente deux caractéristiques qui s’accentuent : les apprentis sont plus âgés (24,2 % ont plus de 22 ans contre 13,5 % dans le privé) et sont plus diplômés à leur entrée en apprentissage (20,1 % possèdent déjà un diplôme de niveau Bac+2 contre 14,2 % dans le privé).

Ce sont les collectivités locales et leurs établissements publics qui assurent l’essentiel des emplois en apprentissage, et plus particulièrement les communes. Elles totalisent près de 70 % des entrées. Les jeunes sans qualification reconnue y restent plus nombreux que dans les autres administrations et établissements publics : 53,6 % des apprentis recrutés par les collectivités territoriales sont de niveaux VI et V contre 17 % pour l’ensemble des nouveaux apprentis du secteur public.

Les freins au développement de l’apprentissage dans le secteur public, identifiés dans plusieurs rapports, subsistent. Il s’agit en premier lieu des questions de financement : le coût de la formation en CFA est à la charge de l’employeur, la rémunération devant être versée à l’apprenti est plus élevée que dans le privé, les aides pour l’employeur public sont également moins importantes. En second lieu, le contrat d’apprentissage ne constitue pas un mode d’entrée dans la fonction publique, le bénéficiaire ne s’insérant que marginalement dans la construction d’une carrière dans la fonction publique. Ceci explique le faible développement de l’apprentissage alors que la fonction publique connaît déjà des besoins en recrutement importants dans certains secteurs (hôpitaux, collectivités locales…).

L’objectif modeste annoncé de 4 000 recrutements d’apprentis pour la seule fonction publique d’État pour la campagne 2015/2016 a été atteint et dépassé pour atteindre 4 307.

Pour l’entrée en campagne 2016, les apprentis seront pris en compte dans le plafond d’emplois et le financement de la formation et de la rémunération sera assuré pour moitié par redéploiement des crédits des ministères et pour moitié par le programme 148 « Fonction publique ».

L’objectif de 6 000 apprentis supplémentaires dans la fonction publique d’État a été fixé pour l’entrée en campagne 2016, portant ainsi à 10 000 contrats d’apprentissage, sur deux années, l’objectif global.

Le Gouvernement a annoncé plusieurs mesures visant à faire de l’apprentissage une voie de formation comme une autre :

– plusieurs campagnes de communication ont été diffusées et relayées par les différents réseaux institutionnels, y compris au sein de l’Éducation nationale ;

– pour favoriser l’orientation scolaire vers l’apprentissage, les moyens d’information des collégiens et lycéens ont été renforcés. Outre la journée d’information des métiers, les professeurs principaux de collège et les conseillers d’orientation disposent désormais d’outils de formation leur permettant de mieux connaître cette voie de formation et le parcours d’avenir qui s’adresse à tous les collégiens et lycéens, intégrera l’apprentissage. L’outil d’affectation AFFELNET permettra de formuler un vœu d’orientation vers l’apprentissage et 8 académies prévoient de proposer, à titre expérimental, près de 3 000 places en CFA via cet outil, tout en assurant une affectation en lycée professionnel en l’absence de contrat d’apprentissage ;

– un travail de mobilisation et de formation des enseignants a été engagé dès septembre pour créer 20 000 places supplémentaires d’apprentis dans les établissements publics locaux d’enseignement.

Ces initiatives sont louables. Néanmoins, au cours de ses auditions aussi bien à Paris que dans le département d’Ille-et-Vilaine, les responsables de CFA ont fait part au rapporteur pour avis de leur difficulté à approcher les établissements scolaires afin de présenter les filières de formation par le biais de l’apprentissage. En effet, ils essuient trop souvent un refus sans explication et sans appel à leur demande de sensibilisation auprès des collégiens.

Il conviendrait de mobiliser plus encore les établissements scolaires par des directives plus claires aux chefs d’établissement de la part des autorités de tutelle.

Par ailleurs, les auditions organisées en région ont aussi montré la nécessité d’aller plus loin en créant un parcours de découverte de l’apprentissage dans l’entreprise. Si ce parcours existe déjà, il nécessite au préalable une inscription à Pôle Emploi et son autorisation. Ce parcours pourrait pourtant facilement être élargi à tous les jeunes de 18 à 25 ans et devenir un véritable acte d’orientation.

De même, le rapporteur propose de donner la possibilité aux enseignants de pouvoir accomplir des stages en entreprises durant la formation initiale ou continue.

La visite du CFA INHNI Ouest sur le Campus de Ker Lann à Bruz, spécialisé dans la formation de jeunes apprentis aux métiers du nettoyage, a montré combien un CFA pouvait pleinement s’intégrer dans un système classique de formation. Les jeunes apprentis se sentent ainsi pleinement acteurs d’un milieu universitaire ce qui contribue grandement à la valorisation de l’apprentissage. À ce stade, le rapporteur pour avis souhaite saluer l’initiative de Pierre Méhaignerie alors qu’il était président du Conseil général d’Ille-et-Vilaine du 22 mars 1982 au 18 mars 2001 qui a expressément souhaité dans le cadre de la création d’un campus universitaire privé, placer un CFA au sein même de ce campus et permettre ainsi aux jeunes apprentis de vivre dans un cadre universitaire classique avec tous les services universitaires qui accompagnent un tel campus.

Les études économiques les plus robustes tendent à démontrer le lien très fort entre le nombre d’apprentis ou personnes en contrat d’alternance et le taux d’emploi des jeunes dans un pays donné. Enfin, des pays comme l’Allemagne et l’Autriche dans lesquels respectivement près de 40 salariés sur 1 000 et 35 salariés sur 1 000 sont en formation par alternance connaissent également un chômage des jeunes de moins de 25 ans de 7,3 % et de 10,8 %. Ce chiffre est à comparer avec les 23 pour 1 000 de formation en alternance et les 25 % de chômage des jeunes que connaît la France.

Certes, les pays qui ont fait de l’apprentissage une voie de formation d’excellence ont mis en place un système simple, lisible et surtout prévisible pour l’ensemble des acteurs et notamment pour les entreprises.

Cependant, la différence principale réside dans le fait qu’ils n’assignent pas à leur système d’apprentissage de double objectif comme en France, c’est-à-dire la formation des jeunes à un métier d’une part et la récupération des jeunes en échec scolaire d’autre part. En effet, le profil des jeunes en apprentissage dans un pays comme l’Allemagne est bien plus diversifié qu’en France où on concentre trop souvent dans ces filières les jeunes en rupture avec le système scolaire.

Pour atteindre l’objectif fixé de 500 000 apprentis, et par là même réduire sensiblement et durablement le chômage des jeunes, il convient de mixer les profils des jeunes apprentis en revalorisant l’image de cette voie de formation auprès de jeunes et de leur famille.

De nombreux interlocuteurs entendus par votre rapporteur pour avis se sont prononcés en faveur d’une refonte du système de rémunération des apprentis, qui est aujourd’hui déterminée, en pourcentage du SMIC, en fonction de l’âge de l’apprenti et de sa progression dans le cycle de formation : de l’ordre de 364 euros par mois pour un mineur en première année de formation, le salaire d’un apprenti est fixé à 772 euros pour un mineur en 3ème année de formation ou pour un apprenti de 21 ans ou plus en première année de formation ; il atteint environ 1 136 euros pour un apprenti de 21 ans ou plus en 3ème année de formation. Par ailleurs, depuis le 1er juillet 2015, les très petites entreprises de moins de 11 salariés sont exonérées de charges lorsqu’elles embauchent un apprenti mineur.

Ce système présente cinq inconvénients majeurs :

– il est relativement dévalorisant pour les apprentis les plus jeunes ;

– l’exonération de charges favorise l’entrée en apprentissage des mineurs mais crée un effet de seuil à 18 ans et 1 jour ;

– il peut constituer un obstacle à l’embauche pour les apprentis plus âgés. En effet, si le coût d’un apprenti avoisine le SMIC alors que celui-ci ne passe pas l’intégralité de son temps dans l’entreprise, l’apprentissage est découragé alors qu’il existe une réelle demande la part de jeunes ayant décroché un baccalauréat puis effectué une ou deux années d’études universitaires avant de s’orienter vers une voie professionnalisante ;

– de plus, il ne tient pas compte du niveau du diplôme préparé, ce qui revient toutes choses égales par ailleurs, à une dévalorisation des niveaux de qualification les plus élevés ;

– enfin, il peut conduire des employeurs à préférer recruter des apprentis sur des contrats plus courts, le coût de l’apprenti s’élevant au fur et à mesure de la durée de sa formation.

Une refonte de la grille de rémunération des apprentis serait donc opportune, pour tenir davantage compte du cursus et gommer les effets pervers produits par le système actuel. En effet, le système actuel est trop discriminant à l’égard des jeunes majeurs et empêche la fluidité entre enseignement classique et apprentissage contrairement aux systèmes suisse, autrichien et allemand où l’âge est un facteur neutre.

Un contrat d’apprentissage sur trois est rompu avant son terme (8). Ce constat alarmant montre que le seul critère du nombre d’entrée en apprentissage est insuffisant pour appréhender l’efficacité de notre politique d’apprentissage.

Le maintien des jeunes en contrat d’apprentissage nécessite par conséquent un accompagnement renforcé. Un nombre trop important d’entre eux passe brutalement d’un statut scolaire à un statut de salarié avec toutes les contraintes qui y sont liées (nombre de jours de vacances, hébergement, déplacement…) sans y être véritablement préparé.

Les chefs d’entreprises ne sont pas toujours forcément en capacité de répondre aux besoins du jeune apprenti et il apparaît nécessaire de trouver les moyens de désigner un interlocuteur sur qui le jeune, mais aussi le chef d’entreprise, puisse s’appuyer.

Aujourd’hui, le lien entre le chef d’entreprise et le CFA est quasi inexistant. En effet, le choix de confier la gestion des fonds libres de la taxe d’apprentissage à la région écarte l’employeur du système d’apprentissage et ne lui permet pas de jouer son rôle d’accompagnant du jeune apprenti.

Au cours des auditions en Ille-et-Vilaine, trois auditions ont été consacrées à l’apprentissage de personnes handicapées. (CAP Emploi, AGEFIPH et GRAFIC). Ces auditions ont clairement démontré que pour les personnes handicapées en apprentissage, un véritable système d’accompagnement est mis en place grâce à des associations comme GRAFIC. Le rapporteur suggère d’étendre ce système d’accompagnement à l’ensemble des jeunes apprentis et les associations comme GRAFIC sont pleinement disposées à faire des propositions en ce sens.

La loi du 8 août 2016 a créé le compte d’engagement citoyen. Le rapporteur regrette que les tuteurs d’apprentissage n’y aient pas été intégrés.

La valorisation de l’apprentissage suppose également de valoriser ceux qui assument le rôle de tuteurs des apprentis dans l’entreprise. Or, il n’existe pas aujourd’hui de véritable statut du maître d’apprentissage. La plupart des grandes entreprises entendues par le rapporteur pour avis estiment que la valorisation du rôle du tuteur ne doit pas passer par une rémunération spécifique, mais par une reconnaissance interne à l’entreprise.

Le rapporteur pour avis appelle à l’ouverture d’une vraie réflexion sur la valorisation des maîtres d’apprentissage et la définition d’un vrai statut.

Lors de ses auditions, le rapporteur pour avis a recueilli de nombreux témoignages faisant état de la réticence des entreprises à s’engager à embaucher un jeune apprenti pour 3 ans.

En effet, en 2009 est venue se substituer à la préparation d’un CAP ou d’un BEP en 2 ans puis celle d’un baccalauréat professionnel en 2 ans, la préparation d’un baccalauréat professionnel en 3 ans. Cette réforme, qui a sa cohérence en ce qu’elle aligne le régime du baccalauréat professionnel sur celui du baccalauréat général, a eu des effets pervers sur l’apprentissage.

En effet, là ou une entreprise s’engageait sur deux années pour former un jeune jusqu’au CAP puis éventuellement deux années supplémentaires, elle doit aujourd’hui s’engager directement pour trois ans, ce que nombre d’elles hésite à faire en raison d’une absence de visibilité à long terme.

Il ne s’agit pas de remettre en cause le baccalauréat professionnel en trois ans mais simplement de faciliter les cursus mixtes apprentissage/éducation nationale en permettant de vrais allers et retours entre les deux systèmes.

Le rapporteur pour avis souhaite enfin mettre en lumière la durée d’instruction des conseils régionaux avant d’autoriser une nouvelle formation qui varie entre 12 et 15 mois en moyenne.

Lorsqu’une entreprise est prête à prendre en apprentissage des jeunes sur un métier nouveau ou spécifique, le CFA doit demander l’autorisation d’ouvrir la formation afférente au conseil régional qui instruit dans un délai beaucoup trop long. Le résultat en est que souvent, les entreprises ont recruté hors de nos frontières ou ont renoncé au nouveau marché. Le rapporteur pour avis constate ainsi tous les inconvénients d’une économie trop dépendante de l’administration, fût-elle régionale.

L’administration de l’État s’est engagée en 2013 dans une évolution dite « absence de réponse vaut approbation » ; le rapporteur pour avis propose de fixer un délai pouvant aller de 6 à 9 mois au-delà duquel le CFA pourra ouvrir sa formation avec l’approbation réputée acquise du conseil régional.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

À l’issue de l’audition, en commission élargie, de Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social (voir le compte rendu de la commission élargie du 3 novembre 2016 à 15 heures (9)), la commission des affaires sociales examine, pour avis, les crédits pour 2017 de la mission « Travail et emploi » sur les rapports de Mme Chaynesse Khirouni (Emploi), de M. Francis Vercamer (Travail), et de M. Gilles Lurton (Compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage »).

M. Jean-Patrick Gille, président. Mes chers collègues, cinq amendements ont été déposés auprès de notre commission

La Commission est saisie de l’amendement II-AS14 de la rapporteure pour avis, Mme Chaynesse Khirouni.

Je rappelle que les amendements déposés l’ont été au terme d’échanges avec le rapporteur spécial de la commission des finances et que certains de nos débats vont naturellement faire écho à ceux qui viennent d’avoir lieu en commission des finances.

Cet amendement précédemment évoqué vise à majorer les crédits de l’aide aux postes pour les entreprises adaptées. Je tiens à souligner que notre objectif est l’insertion professionnelle des personnes handicapées. Le chemin est encore long.

La Commission adopte l’amendement II-AS14.

Puis elle examine l’amendement II-AS9 de la rapporteure pour avis, Mme Chaynesse Khirouni.

Mme Chaynesse Khirouni. Il s’agit de majorer les crédits destinés au financement des programmes sociaux innovants.

La Commission adopte l’amendement II-AS9.

Elle examine maintenant l’amendement II-AS8 de la rapporteure pour avis, Mme Chaynesse Khirouni.

Mme Chaynesse Khirouni. Cet amendement a pour objet de doter les missions locales de référents justice leur permettant d’accueillir le public des jeunes anciens détenus.

La Commission adopte l’amendement II-AS8.

Puis elle examine l’amendement II-AS15 de la rapporteure pour avis, Mme Chaynesse Khirouni.

Mme Chaynesse Khirouni. L’amendement II-AS15 vis à augmenter les moyens consacrés à la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences.

La Commission adopte l’amendement II-AS15.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Travail et emploi » modifiés et à celle des crédits du compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage » sans modification.

ANNEXE :

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS

(par ordre chronologique)

À Paris

Ø Ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social – Direction générale de l’emploi et de la formation professionnelle (DGEFP) – M. Hugues de Balathier-Lantage, chef de service, adjoint à la déléguée générale, M. Michel Ferreira-Mia, chef de mission en charge des politiques de formation et de qualification, et M. Nicolas Thierse, chef de mission des affaires financières

Ø Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat (APCMA) (*) – M. Alain Griset, président, M. François Moutot, directeur général, et Mme Valérie Chaumanet, directrice des relations institutionnelles

Ø Chambres françaises de commerce et d’industrie (CCI France) – M. Patrice Guezou, directeur emploi formation entrepreneuriat, Mme Nathalie Carra, chargée de mission apprentissage, et M. Jérôme Pardigon, directeur des relations institutionnelles

Ø Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) – M. Jean-Michel Pottier, vice-président

À Saint-Malo (35)

Ø Entreprise générale du bâtiment (EVEN) – M. Xavier Georgelin, directeur général à Pleurtuit

Ø Entreprise de travaux publics CCE – M. Yannick Ecobichon, directeur, et Mme Johanne Delalande, responsable des ressources humaines

Ø Chambre des métiers et de l’artisanat d’Ille-et-Vilaine – Mme Renée Fortin, directrice du site de Saint Malo, Mme Laurence Piquerel, directrice adjointe de la formation professionnelle pour l’Ille-et-Vilaine pour l’ensemble des entreprises et en charge de l’apprentissage

Ø Chambre de commerce et d’industrie (CCI 35) – M. Marc Bougeard, directeur des entreprises de Saint-Malo – Fougères, et Mme Martine Troussel, directrice du CFA de Saint-Jouan-des-Guérets

Ø AFPA de Saint-MaloMme Marie Le Roux, directrice, et Mme Sophie Meler, chargée de clientèle

Ø Mission locale de Saint-Malo – M. Michaël Corlou, directeur

À Combourg

Ø Centre de formation agricole CPSA – M. Emmanuel Brivot, directeur

À Rennes

Ø Conseil régional de Bretagne – Mme Georgette Bréard, deuxième vice-présidente chargée de la formation, de l’apprentissage et de l’orientation

Ø Pôle emploi Bretagne – M. Philippe Siebert, directeur régional

Ø Association départementale pour l’insertion des personnes handicapées (ADIPH 35) – Mme Lou Charlot, directrice

Ø Association de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapées (AGEFIPH) – Mme Catherine Logeais, déléguée régionale

Ø Faculté des métiers Ker Lann – Mme Sadia Anafal, directeur du CFA INHNI Ouest, directeur national de l’apprentissage INHNI, et Mme Estelle Querou, collaboratrice

Ø Association GRAFIC Bretagne – Mme Anne-Laure Duault, directrice

Ø M. et Mme Yannick Mary, gérants de L’Établi de Sainte-Anne, entreprise de menuiserie à Saint-Méloir-des-Ondes

(*) Ce représentant d’intérêts a procédé à son inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

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