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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 septembre 2013.
RAPPORT D’INFORMATION
DÉPOSÉ
PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES(1)
sur l’intégration des populations roms,
ET PRÉSENTÉ
PAR Mme Marietta KARAMANLI et M. Didier QUENTIN,
Députés
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La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Danielle AUROI, présidente ; Mmes Annick GIRARDIN, Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Pierre LEQUILLER, vice-présidents ; MM. Christophe CARESCHE, Philip CORDERY, Mme Estelle GRELIER, M. André SCHNEIDER, secrétaires ; MM. Ibrahim ABOUBACAR, Jean-Luc BLEUNVEN, Alain BOCQUET, Emeric BREHIER, Jean-Jacques BRIDEY, Mme Nathalie CHABANNE, M. Jacques CRESTA, Mme Seybah DAGOMA, M. Yves DANIEL, MM. Charles de LA VERPILLIÈRE, Bernard DEFLESSELLES, Mme Sandrine DOUCET, M. William DUMAS, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FROMION, Hervé GAYMARD, Mme Chantal GUITTET, MM. Razzy HAMMADI, Michel HERBILLON, Marc LAFFINEUR, Mme Axelle LEMAIRE, MM. Christophe LÉONARD, Jean LEONETTI, Arnaud LEROY, Michel LIEBGOTT, Mme Audrey LINKENHELD, MM. Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Jean-Claude MIGNON, Jacques MYARD, Michel PIRON, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Arnaud RICHARD, Mme Sophie ROHFRITSCH, MM. Jean-Louis ROUMEGAS, Rudy SALLES, Gilles SAVARY, Mme Paola ZANETTI.
SOMMAIRE
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Pages
RÉSUMÉ DU RAPPORT 11
REPORT SUMMARY 15
INTRODUCTION 19
PREMIÈRE PARTIE : DES AXES POUR L’INTÉGRATION DES ROMS PARFAITEMENT IDENTIFIÉS, MAIS BEAUCOUP PLUS DIFFICILES À METTRE EN ŒUVRE 25
I. LES AXES POUR L’INTÉGRATION DES ROMS 25
C. L’ACCÈS AU LOGEMENT 33
1. Les expulsions 35
2. Les obstacles à l’exercice des droits de l’homme 38
3. Lutter contre les idées reçues 41
II. LES STRATÉGIES NATIONALES D’INTÉGRATION 43
A. UN CADRE FIXÉ PAR L’UNION EUROPÉENNE 43
B. UN PREMIER BILAN 44
C. LA STRATÉGIE FRANÇAISE D’INTÉGRATION 46
1. Une nouvelle stratégie française pour l’intégration des Roms 46
2. La stratégie française d’intégration 47
DES MESURES D’INTÉGRATION ET D’INCLUSION SOCIALE A VOCATION GÉNÉRALE DEVANT PRENDRE ET PRENANT EN COMPTE LES POPULATIONS ROMS 50
a) Ne priver aucun enfant des chances d’une école de qualité 50
i. Des mesures générales applicables à tous au nom du principe d’égalité des chances 50
ii. Faire de la maîtrise des savoirs fondamentaux une priorité absolue : un plan de prévention de l’illettrisme 51
iii. Un accompagnement personnalisé tout au long de la scolarité 51
iv. Mobiliser les dispositifs de lutte contre le décrochage scolaire : les plateformes de suivi et d’appui 52
v. Bourses et aides financières 54
b) Cibler les instruments de la politique active du marché du travail sur les populations les plus éloignées de l’emploi 54
c) Promouvoir des actions partenariales de santé publique, en lien avec les acteurs associatifs 56
i. Le programme régional d’accès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies (PRAPS) sera l’instrument privilégié pour engager des programmes innovants de santé publique à destination des Roms 56
ii. Le gouvernement français soutiendra des programmes associatifs locaux de médiation sanitaire ou pour la production de guides d’informations 57
d) Développer les dispositifs d’accès et de maintien dans le logement des personnes sans abri ou mal logées 57
e) Renforcer la défense des droits fondamentaux des populations discriminées 59
i. Poursuivre l’objectif de lutte contre la traite des êtres humains 59
ii. Renforcer la lutte contre les discriminations, notamment avec le Défenseur des droits 60
iii. Une action qui passe par la lutte contre les inégalités sociales 60
3. La protection du Conseil constitutionnel 62
4. Le renforcement d’une stratégie interministérielle : l’opportunité de développer des initiatives entre acteurs sur une base conventionnelle. 64
a) Les mesures prises pour anticiper les évacuations : la nécessité de professionnaliser les diagnostics 65
b) L’évaluation des dispositifs de droit commun : des situations fragiles, des prises en charge partielles 66
c) Les dispositifs de stabilisation et d’insertion offrent des résultats transposables 67
d) Les conditions d’une évolution positive 69
DEUXIÈME PARTIE : LA COMPLEXITÉ DES CIRCUITS DE FINANCEMENT MOBILISABLES POUR LES ROMS 73
I. LA FAIBLE EFFICACITÉ DES FONDS EUROPÉENS 73
A. LA NÉCESSITÉ DE S’APPUYER SUR DES RESSOURCES NATIONALES ET DE MOBILISER EFFECTIVEMENT LES RESSOURCES DISPONIBLES AU NIVEAU EUROPÉEN 73
B. LES INSTRUMENTS FINANCIERS EUROPÉENS DISPONIBLES 76
II. LA NÉCESSITÉ D’AVOIR DES OUTILS FINANCIERS PLUS ADAPTÉS 79
A. LE FSE N’INTERVIENT QU’EN COFINANCEMENT RÉSIDUEL : L’EXEMPLE DE QUELQUES RÉALISATIONS 79
1. Parcours d’intégration professionnalisant des populations roms 79
a) Association Pact Arim (dossier géré par la DIRECCTE Ile-de-France), 1er janvier 2010 – 31 décembre 2011 79
b) Logement jeune 93, 1er janvier 2010 – 31 décembre 2011 80
c) Insertion professionnelle d’un public éloigné de l’emploi 80
2. Accompagnement à la création et à la consolidation d’entreprises des populations itinérantes 81
a) L’opération mise en œuvre par l’association APPONA 68 (Haut-Rhin) est gérée par la DIRECCTE 81
b) Le Conseil Général de l’Yonne associé au Service d’action sociale des travailleurs indépendants offre un accompagnement adapté aux gens du voyage bénéficiaires du RSA, situés dans l’Yonne et exerçant une activité indépendante en mettant en œuvre l’ensemble des moyens permettant l’officialisation des activités et l’ouverture des droits afférents 81
c) Le Conseil général du Morbihan a soutenu une opération, mise en œuvre par l’association Sauvegarde 56, pour un montant de 215 000 euros sur trois ans (janvier 2008 à décembre 2010) 81
d) Développée en 2007 et 2010 par l’association d’aide à l’insertion des gens du voyage et soutenue par le département du Tarn-et-Garonne : pour un coût total de 100 000 euros, l’opération consistait à accompagner les gens du voyage à pouvoir exercer des activités en qualité de travailleur indépendant. 82
e) L’association « Relais Accueil gens du voyage », sous l’égide du Conseil général de Seine-Maritime, a lancé une action d’un montant de 117 000 euros 82
3. Insertion des jeunes 82
a) L’Association Départementale des Gens du Voyage Citoyens a été créée en 2005, en Loire-Atlantique, sur l’initiative de voyageurs, afin d’être porte-parole pour la promotion et la défense de leurs droits. 82
b) Auto-école et garage associatifs 83
B. LA DIFFICILE MOBILISATION DU FEDER 83
1. Les premières réponses des 22 régions sur 26 recensées à ce stade font apparaître que : 83
2. À titre indicatif, les projets en cours de réflexion ou de validation au niveau des régions, pour les plus significatifs, concerneraient des mesures urbaines, des villages d’insertion, etc. 84
C. DÉVELOPPER DE NOUVEAUX OUTILS 85
TROISIÈME PARTIE : PRIVILÉGIER LES OUTILS D’INTÉGRATION QUI ONT FAIT LEURS PREUVES 87
I. LES INITIATIVES DES COLLECTIVITÉS LOCALES 87
A. LES VILLES MOBILISÉES POUR OFFRIR LES MEILLEURES CONDITIONS D’ACCUEIL POSSIBLES AUX ROMS 87
B. UN OUTIL DE PRÉDILECTION : LA MOUS 87
II. LE PARTAGE DES BONNES PRATIQUES : L’EXEMPLE ESPAGNOL 89
A. LE PROGRAMME DE L’ESPAGNE EN FAVEUR DE L’ÉDUCATION 89
1. Description de l’action 90
2. Les partenariats 91
3. La méthode suivie 91
4. Les acteurs du programme 92
5. Les résultats obtenus 93
6. Perspectives et viabilité sur le long terme 93
B. LE PROGRAMME DE L’ESPAGNE EN FAVEUR DE L’EMPLOI 94
1. Description de l’action 95
2. Les partenariats 95
3. La méthode suivie 95
4. Les actions menées 96
a) Itinéraires individuels vers l’emploi 96
b) Les actions pour l’intégration sociale et du marché du travail des immigrants roms 97
a) Les actions doivent être développées au niveau local et au niveau national. 98
b) Initiative de leadership social 98
c) Les solutions adaptées aux groupes cibles assurent et augmentent l’impact des actions 99
d) Un partenariat fort entre les organisations publiques et privées 99
e) Actions complémentaires 99
f) Une coordination appropriée et un système de gestion 99
g) Des fonds structurels, correctement utilisés 99
7. Les clés de la réussite de cette action 99
a) Approche intégrée et recherche de l’équilibre entre aspects économiques et sociaux 99
b) Implication et formation de la communauté rom 99
c) Planification à long-terme 100
d) Des services sur mesure mais sans ségrégation 100
e) Flexibilité et adaptation des services standardisés aux besoins des populations Roms 100
f) Équipes de travail interculturelles 100
g) Un partenariat fort, une relation de proximité avec les entreprises et un système de relations public/privé approprié 100
h) Mobilisation des ressources locales et régionales 100
i) Itinéraires individuels vers l’emploi 100
j) Dimension nationale des actions locales 100
k) Mise en place de comités de suivi pour diffuser l’information et assurer la pleine transparence 100
l) Large diffusion et visibilité des actions et des résultats du programme 101
8. Processus d’évaluation 101
C. LE PROGRAMME DE L’ESPAGNE EN FAVEUR DU LOGEMENT 101
a) Aide sociale et préparation au logement 104
b) Attribution d’un logement 104
c) Intégration dans le quartier et la communauté 105
4. La participation 105
a) « Emménagement et adaptation au logement » 105
b) « Adaptation » 105
c) « Intégration » 105
d) « Fin de l’aide sociale sur la durée » 106
e) Maintien de l’aide sociale suivie aux familles 106
f) Intervention auprès des familles après la fin de l’aide sociale suivie 106
5. Les résultats obtenus 106
6. Recommandations à des porteurs d’actions similaires 108
7. Les clés de la réussite de cette action 108
8. Évaluation 109
III. MÉDIATION ET PARTENARIAT : DES OUTILS À DÉVELOPPER 111
1. L’approche globale 114
2. La coordination des acteurs et des sources de financement 114
3. Privilégier une vision à long terme 115
IV. LA COOPÉRATION DÉCENTRALISÉE : FAVORISER LA RÉINTÉGRATION DANS LE PAYS D’ORIGINE AVEC L’AIDE DU PAYS D’ACCUEIL 117
V. INVITER LES ÉTATS MEMBRES DE L’UNION EUROPÉENNE À METTRE EN œUVRE DES MESURES EFFICACES 119
CONCLUSION 123
TRAVAUX DE LA COMMISSION 127
CONCLUSIONS ADOPTÉES PAR LA COMMISSION 165
ANNEXES 169
ANNEXE 1 : LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LES RAPPORTEURS 171
ANNEXE 2 : TABLEAU SUR LES POPULATIONS ROMS ÉLABORÉ À PARTIR DES DONNÉES DU CONSEIL DE L’EUROPE 173
ANNEXE 3 : DOCUMENT DE SYNTHÈSE SUR LES DROITS DE L’HOMME DES ROMS, PAR LE COMMISSAIRE AUX DROITS DE L’HOMME DU CONSEIL DE L’EUROPE 177
ANNEXE 4 : CIRCULAIRE INTERMINISTERIELLE DU 26 AOÛT 2012 RELATIVE À L’ANTICIPATION ET À L’ACCOMPAGNEMENT DES OPÉRATIONS D’ÉVACUATION DES CAMPEMENTS ILLICITES 185
ANNEXE 5 : DÉCLARATION DE STRASBOURG DU CONSEIL DE L’EUROPE SUR LES ROMS DU 20 OCTOBRE 2010 191
ANNEXE 6 : PROPOSITION DE RECOMMANDATION DU CONSEIL RELATIVE À DES MESURES EFFICACES D’INTÉGRATION DES ROMS DANS LES ÉTATS MEMBRES 195
Selon la définition du Conseil de l’Europe, le terme « Roms » désigne les Roms, les Sintés (Manouches), les Kalés (Gitans) et les groupes de population apparentés en Europe, dont les Voyageurs et les branches orientales (Doms, Loms) ; il englobe la grande diversité des groupes concernés, y compris les personnes qui s’auto-identifient comme « Tsiganes » et celles que l’on désigne comme « Gens du voyage ».
Les Roms sont très généralement méconnus, et les attitudes adoptées à leur égard, ou les décisions politiques prises à leur encontre, ont été, au fil des siècles, davantage inspirées par les préjugés que par la connaissance des réalités historiques ou culturelles.
Le Conseil de l’Europe considère que son objectif principal est de promouvoir une approche globale des questions roms par les États membres. À cet effet, il s’est fixé trois priorités essentielles :
- la protection des minorités ;
- la lutte contre le racisme, l’antitsiganisme et l’intolérance ;
- le combat contre l’exclusion sociale.
L’Union européenne considère quant-à-elle que les institutions européennes et les États membres ont une responsabilité conjointe en termes d’amélioration de l’intégration et de l’inclusion sociales des Roms. À cette fin, ils sont tenus de faire usage de tous les instruments et de toutes les politiques relevant de leur compétence.
Si les axes pour l’intégration des roms sont parfaitement identifiés, ils sont cependant beaucoup plus difficiles à mettre en œuvre (1re partie).
La Commission européenne a fixé un « cadre de l’Union européenne » pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020 (2). Elle y souligne la nécessité d’une approche ciblée.
Les objectifs de l’Union européenne pour l’intégration des Roms doivent couvrir, en fonction de la taille des populations roms, les quatre domaines essentiels que sont l’accès à l’éducation, l’emploi, les soins de santé, le logement, auxquels il convient d’ajouter la lutte contre les discriminations.
Selon la Commission européenne (3), les stratégies nationales d’intégration des Roms requièrent un engagement politique clair de la part des États membres.
En outre, les circuits de financements mobilisables pour les Roms sont complexes et relativement peu efficaces (2e partie).
La mise en œuvre et la réussite des stratégies nationales d’intégration des Roms passent nécessairement par une allocation efficace et suffisante de ressources nationales. Le financement de l’Union européenne ne peut certainement pas résoudre à lui seul les difficultés des populations roms.
De façon plus globale, il existe toutefois à l’heure actuelle une programmation de 26,5 milliards d’euros de concours financier de l’Union européenne pour soutenir les efforts d’ensemble des États membres dans le domaine de l’intégration sociale. Ces fonds comprennent ceux mobilisables y compris pour l’aide à la population rom ; elle est loin d’être intégralement mobilisée.
En matière de financement, de nouveaux outils sont à développer. Les partenariats sont également nécessaires : des partenariats efficaces doivent impliquer les autorités nationales, régionales et locales et les représentants d’entreprises, de la société civile et des communautés roms.
C’est pourquoi il est souhaitable de mobiliser les outils qui ont fait leurs preuves (3e partie), par exemple en développant les « bonnes pratiques » (c’est-à-dire des « procédés ou des méthodologies qui se sont montrés efficaces dans un certain contexte et pourraient également l’être dans un autre », ou encore la coopération décentralisée.
La situation des Roms préoccupe toute l’Union européenne. Cependant, malgré la volonté de la Commission européenne de favoriser l’intégration des Roms dans leur pays d’origine comme dans leur pays d’accueil, aucune incitation ou contrainte n’est imposée aux États membres.
Comme l’a noté le Comité économique et social européen en 2008 (4), la prise en compte de la problématique des Roms dans toutes les politiques européennes et nationales pertinentes est la voie la plus prometteuse vers l’intégration.
Un réel changement ne peut découler que d’une application efficace des politiques. Des politiques efficaces nécessitent quant à elles une planification cohérente qui exige elle-même la participation de toutes les parties concernées, un appui politique et l’allocation, aux différents niveaux de décision, des ressources nécessaires. Ces considérations, conjuguées à l’analyse des enjeux à venir, montrent qu’il y a lieu d’accroître l’ampleur et l’efficacité de la coordination, ainsi que de concentrer les moyens.
À cet égard, s’il est souhaitable que la proposition de recommandation européenne relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres soit adoptée, celle-ci ne constitue qu’une étape clef qui s’inscrit dans un long processus, dont l’aboutissement dépendra de la volonté politique de l’Union européenne et de ses États membres.
The term “Roma” used at the Council of Europe refers to Roma, Sinti, Kale and related groups in Europe, including Travellers and the Eastern groups (Dom and Lom), and covers the wide diversity of the groups concerned, including persons who identify themselves as Gypsies.
Roma are broadly speaking misunderstood, and the attitudes adopted and political decisions taken in their regard have been, over the centuries, inspired rather by prejudice than by knowledge of the historic or cultural realities.
The Council of Europe considers that its main goal is to promote a global approach to Roma issues by the Member States. It has therefore set itself three main priorities :
- Protecting minorities ;
- Combating racism, antiziganism and intolerance ;
- Fighting against social exclusion.
The European Union considers, for its part, that the European institutions and the Member States are jointly responsible in terms of the improvement of the social integration and inclusion of Roma. They thus have the obligation to make use of all the instruments and all the policies within their competence.
While the avenues to integrate Roma are clearly identified, they are however far more difficult to implement (1st part).
The European Commission has drawn up an ‘EU Framework for National Roma Integration Strategies up to 2020’ (5), in which it emphasises the need for a targeted approach.
The European Union goals for the integration of Roma must cover, in proportion to the size of the Roma populations, the four main fields of access to education, employment, healthcare, and housing, to which should be added the fight against discriminations.
According to the European Commission (6), the national Roma integration strategies require a clear political commitment on the part of the Member States.
Further, the funding circuits deployable for Roma are complex and relatively ineffective (2nd part).
The implementation and success of national Roma integration strategies necessarily entail an effective and sufficient allocation of national resources. European Union funding alone can clearly not solve the difficulties of Roma populations.
More globally, up to € 26.5 billion is however currently programmed to support Member States’ overall efforts in the field of social integration, including to support efforts to help the Roma. This allocation is far from being totally deployed. Available EU funds in this field are currently not yet being sufficiently used.
As regards funding, new instruments are to be developed. Partnerships are also necessary : effective partnerships must involve the national, regional and local authorities and the representatives of companies, civil society and Roma communities.
It is therefore advisable to deploy tried and tested instruments (3rd part), for example by developing ‘good practices’ (in other words ‘processes or methods which have proved their worth in a given context and which could be equally effective in another’, or else decentralised cooperation.
The situation of Roma is an issue of concern throughout the European Union. However, despite the European Commission’s determination to promote the integration of Roma in their country of origin and their host country, no incentives or constraints are imposed on the Member States.
As noted by the European Economic and Social Committee in 2008 (7), Roma issues should be systematically mainstreamed into all relevant European and national policies. That is the most promising avenue towards integration.
A real change can result only from the effective implementation of policies. Effective policies, for their part, require coherent planning which in turn requires the participation of all the parties concerned, political support and the allocation, at the various decisional levels, of the necessary resources. These considerations, combined with the analysis of the challenges ahead, demonstrate the need to increase the scale and effectiveness of coordination and to focus the resources.
In this respect, it is advisable that the Proposal for a Council Recommendation on effective Roma integration measures in the Member States be adopted. That proposal is merely a key stage in a long process, the completion of which will depend on the political determination of the European Union and of its Member States.
Mesdames, Messieurs,
Selon la définition du Conseil de l’Europe, le terme « Roms » désigne les Roms, les Sintés (Manouches), les Kalés (Gitans) et les groupes de population apparentés en Europe, dont les Voyageurs et les branches orientales (Doms, Loms) ; il englobe la grande diversité des groupes concernés, y compris les personnes qui s’auto-identifient comme « Tsiganes » et celles que l’on désigne comme « Gens du voyage ».
Les Roms sont très généralement méconnus, et les attitudes adoptées à leur égard, ou les décisions politiques prises à leur encontre, ont été, au fil des siècles, davantage inspirées par les préjugés que par la connaissance des réalités historiques ou culturelles.
Les premières traces écrites de l’arrivée des Roms en Europe remontent au XIVe siècle mais il n’est pas exclu que certains y étaient présents dès le XIIe siècle. Ce n’est qu’à la fin du XVIIIe siècle que la linguistique découvre que leur langue, le romani (romani ćhib), est une langue de l’Inde - plus précisément du nord-ouest du pays - dérivée de parlers populaires proches du sanskrit.
Les premières migrations de ce peuple semblent avoir lieu à partir du IXe siècle (certains auteurs situent ce départ autour de l’An 1000) pour des raisons encore incertaines. Les ancêtres des Roms qui ont quitté l’Inde, ont migré via la Perse, l’Arménie et l’empire byzantin pour progressivement atteindre toute l’Europe (ils sont toutefois également présents en Amérique, en Afrique, en Australie, etc.).
Les Roms européens peuvent être divisés en trois grandes branches : les Roms, les Sintés (appelés aussi Manouches) et les Kalés (ou Gitans).
Les Roms européens, les Doms (qui se sont installés dans les pays du Moyen-Orient ainsi qu’en Turquie) et les Loms (qui sont restés dans les pays du Caucase) semblent partager, si ce n’est des origines géographiques et linguistiques communes, au moins une identité socio-ethnique commune.
« Roms » est aussi devenu le terme générique en usage au niveau international depuis le premier Congrès international de Londres en 1971, date à laquelle les représentants de ces communautés ont également adopté le 8 avril comme Journée internationale des Roms, un hymne, Djelem, et un drapeau.
Il existe en outre, notamment dans les Balkans, des groupes qui sont identifiés ou parfois s’auto-identifient comme des Roms mais qui ne parlent pas le romani et qui n’ont pas la même origine nord-indienne. C’est le cas des Boyash (appelés aussi Beash, Bayash, Banyash, Baiesi ou Rudari, selon les pays) dont le parler dérive du moéso-roumain, ou de certains Ashkali qui parlent albanais. D’autres groupes, comparables sur certains points aux Roms, tels les Egyptiens (appelés ainsi car supposés venir d’Egypte et albanophones) et certains Ashkali, tiennent à afficher leur différence ethnique.
En Europe occidentale, il faut distinguer les Roms/Sintés/Kalés de populations qui partagent parfois leur mode de vie, ou leur sort (difficultés d’intégration, discrimination, etc.) mais qui, là encore, n’ont pas la même origine ethnique ou la même langue, tels que les Yéniches (présents en Suisse et certains pays limitrophes) ou les Travellers irlandais.
Selon les estimations moyennes, il existe environ 11 millions de Roms dans toute l’Europe (espace géographique couvert par le Conseil de l’Europe), soit environ 6 millions au sein des vingt-sept États membres de l’Union européenne (8). Les estimations chiffrées pour toute l’Europe variant de 8 à 15 millions, le Conseil de l’Europe estime que la formulation « de 10 à 12 millions » est la plus adaptée.
La grande majorité des Roms en Europe (80 % à 85 %) sont aujourd’hui sédentaires. Ceux qui conservent un mode de vie itinérante ne se trouvent plus guère qu’en France, au Benelux, en Suisse, en Irlande et au Royaume-Uni. Beaucoup sont déjà en voie de sédentarisation.
La Commission européenne a également souligné (9) que les communautés roms dans l’Union européenne à vingt-sept, dans les pays candidats et candidats potentiels, ne forment pas une population homogène. Du fait de cette hétérogénéité, il ne peut y avoir une seule stratégie ; il convient au contraire d’élaborer des méthodes différenciées qui tiennent compte du contexte géographique, économique, social, culturel et juridique.
Bien que chaque contexte soit unique, elle propose d’établir une subdivision en quatre grands types :
- les communautés roms qui vivent dans des zones (péri)urbaines densément peuplées, éventuellement à proximité d’autres minorités ethniques et de groupes défavorisés de la population majoritaire ;
- les communautés qui vivent dans les quartiers défavorisés de petites villes ou de villages en zone rurale, ou dans des campements ségrégués en zone rurale, à l’écart des agglomérations ;
- les communautés roms nomades ayant la nationalité d’un État membre de l’Union européenne ;
- les communautés roms nomades ou sédentaires dont les membres sont des ressortissants de pays tiers, des réfugiés, des apatrides ou des demandeurs d’asile.
Le Conseil de l’Europe considère que son objectif principal est de promouvoir une approche globale des questions roms par les États membres. À cet effet, il s’est fixé trois priorités essentielles :
- la protection des minorités ;
- la lutte contre le racisme, l’antitsiganisme et l’intolérance ;
- le combat contre l’exclusion sociale.
Pour parvenir à un progrès durable, les actions du Conseil de l’Europe sont basées sur le principe de la participation des communautés concernées, par le biais des représentants et associations Roms et Gens du voyage. Depuis 1995, le Comité d’experts sur les Roms et les Gens du voyage (MG-S-ROM) est chargé de conseiller les États membres dans ce domaine. Son rôle est complémentaire de celui du Coordonnateur du Secrétaire Général pour les activités concernant les Roms, mis en place en 1994. Ce dernier est chargé de promouvoir la coopération avec d’autres organisations internationales concernées et de développer des relations de travail avec les associations roms et Gens du voyage.
L’Union européenne considère quant-à-elle que les institutions européennes et les États membres ont une responsabilité conjointe en termes d’amélioration de l’intégration et de l’inclusion sociales des Roms. À cette fin, ils sont vivement invités à faire usage de tous les instruments et de toutes les politiques relevant de leur compétence.
Dans toute l’Europe, les Roms, qui sont le principal groupe minoritaire du continent, ont du mal à exercer leurs droits fondamentaux. Que ce soit en matière d’éducation, de santé, d’emploi, de logement et de participation politique, les conditions de vie de la population rom – citoyens, personnes déplacées ou migrants – sont parmi les pires d’Europe.
Les Roms continuent d’être victimes d’une discrimination systématique dans tous les domaines. L’antitsiganisme vient resserrer l’étau de l’exclusion, du dénuement, de la ségrégation et de la marginalisation dont ils souffrent. La rhétorique dont usent occasionnellement quelques personnalités publiques et parfois des médias contribue à aggraver la marginalisation et à nourrir l’extrémisme à l’encontre des Roms ; on constate notamment une violence et des abus inquiétants de la part des forces de l’ordre.
Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe considère ainsi que « les Roms - qu’ils soient citoyens du pays dans lequel ils vivent, déplacés ou migrants - sont plus défavorisés que tout autre groupe en Europe dans les domaines de l’éducation, de la santé, de l’emploi, du logement et de la participation politique. Les Roms continuent de souffrir d’une discrimination et d’un antitsiganisme de grande ampleur, qui les enferme dans une situation défavorisée, caractérisée par l’exclusion, la ségrégation et la marginalisation » (10).
Le Commissaire a appelé les États à « prendre des mesures énergiques pour mettre fin à la ségrégation scolaire des Roms » (11), soulignant que, « pour faire évoluer la situation de cette population, il est indispensable de veiller à ce que les enfants roms aient accès au système éducatif ordinaire et y mènent leur scolarité à terme ».
Il a rappelé aussi que la ségrégation coûte cher aux États membres et que c’est l’une des pires formes de discrimination à l’encontre des Roms, qui perpétue leur marginalisation. Il a appelé les États concernés à interdire la ségrégation dans l’éducation, à lancer d’ambitieux programmes de déségrégation et à promouvoir l’accès de tous les enfants à des formes d’éducation inclusives.
Constatant que les expulsions de Roms se multiplient en Europe, sans qu’aucune solution de relogement adéquate et durable ne soit proposée à ces personnes, il a déploré ces pratiques qui sont contraires aux normes internationales des droits de l’homme.
Le Commissaire estime que les États devraient plutôt se préoccuper de combattre le racisme et la discrimination à l’encontre des Roms et de mettre en œuvre des stratégies d’intégration, qui répondent aux besoins de cette population en matière de logement.
Selon lui, les problèmes devant être traités en priorité, sont notamment :
- le racisme et les préjugés anti-Roms ;
- la ségrégation scolaire, qui touche de nombreux élèves roms ;
- les violations des droits de l’homme dont sont victimes les Roms qui migrent en Europe.
Si les axes pour l’intégration des Roms sont parfaitement identifiés, ils sont cependant beaucoup plus difficiles à mettre en œuvre (1re partie).
En outre, les circuits de financements mobilisables pour les Roms sont complexes et relativement peu efficaces (2e partie).
C’est pourquoi il est souhaitable de mobiliser les outils qui ont fait leurs preuves (3e partie).
PREMIÈRE PARTIE : DES AXES POUR L’INTÉGRATION DES ROMS PARFAITEMENT IDENTIFIÉS, MAIS BEAUCOUP PLUS DIFFICILES À METTRE EN ŒUVRE
I. LES AXES POUR L’INTÉGRATION DES ROMS
La Commission européenne a fixé un « cadre de l’Union européenne » pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020 (12). Elle y souligne la nécessité d’une approche ciblée.
Pour réaliser des progrès majeurs en termes d’intégration des Roms, il est selon elle à présent essentiel de passer à la vitesse supérieure et de faire en sorte que des politiques d’intégration nationales, régionales et locales soient clairement et spécifiquement centrées sur les Roms, et répondent à leurs besoins à l’aide de mesures explicites, en vue de prévenir et de compenser les inégalités auxquelles ils sont confrontés. Une approche ciblée, s’inscrivant dans la stratégie plus large de lutte contre la pauvreté et l’exclusion, qui n’exclut pas une aide pour d’autres groupes de personnes vulnérables et défavorisées, est compatible avec le principe de non-discrimination, tant au niveau de l’Union européenne qu’au niveau national. Le principe d’égalité de traitement n’empêche pas les États membres de maintenir ou d’adopter des mesures spécifiques destinées à prévenir ou à compenser les inégalités liées à l’origine raciale ou ethnique (13). Certains États membres ont déjà appliqué avec succès des mesures d’action positive en faveur des Roms, car ils estimaient que les mesures traditionnelles d’intégration sociale n’étaient pas suffisantes pour répondre à leurs besoins spécifiques (14).
Pour que la mise en place de politiques efficaces soit assurée dans les États membres, la Commission propose de concevoir, ou d’adapter lorsqu’elles existent déjà, des stratégies nationales d’intégration des Roms, afin d’atteindre les objectifs de l’Union européenne pour l’intégration des Roms au moyen d’actions ciblées et de financements suffisants (nationaux, européens et autres) pour y parvenir. Elle présente des solutions pour surmonter les obstacles actuels à une utilisation plus efficace des fonds européens, et jette les bases d’un mécanisme de suivi solide visant à garantir des résultats concrets pour les Roms.
Il s’agit d’exprimer l’ambition de l’Union européenne en fixant des objectifs pour l’intégration des Roms.
L’examen annuel de la croissance de la Commission européenne (15) a montré que les États membres et l’Union ont beaucoup à faire pour mettre en œuvre la stratégie Europe 2020 et atteindre ses principaux objectifs, à l’aide d’initiatives phares (16). Pour un certain nombre d’États membres, l’amélioration de la situation des Roms en termes d’emploi, de pauvreté et d’éducation contribuera à la poursuite des objectifs de la stratégie Europe 2020 en matière d’emploi, d’intégration sociale et d’éducation.
Les objectifs de l’Union européenne pour l’intégration des Roms doivent couvrir, en fonction de la taille des populations roms, quatre domaines essentiels :
- l’accès à l’éducation (A) ;
- l’emploi (B) ;
- les soins de santé (D) ;
- le logement (C).
Les conditions minimales devraient s’appuyer sur des indicateurs communs, comparables et fiables. Il est important de réaliser ces objectifs afin d’aider les États membres à atteindre les objectifs généraux de la stratégie Europe 2020.
En Europe orientale, environ 50 % de la population rom est âgée de moins de 20 ans et cette proportion ne cesse d’augmenter. Compte tenu du faible taux d’assiduité scolaire et de la surreprésentation de cette population dans les écoles spéciales pour les enfants handicapés mentaux et physiques, il est fort probable que, sans interventions politiques fortes accompagnées de programmes de grande envergure de renforcement des capacités et d’investissements, la prochaine génération de Roms vivra toujours dans une grande pauvreté et sera de plus en plus marginalisée et exclue. D’un pays à l’autre, 70 % à 80 % de la population rom ne dispose pas même d’un certificat d’enseignement primaire, tandis que très peu de Roms terminent les cycles de l’enseignement primaire et secondaire.
La Commission européenne insiste sur la nécessité de veiller à ce que chaque enfant rom achève au moins sa scolarité primaire (17).
Le niveau d’instruction de la population Rom est beaucoup plus faible que celui des autres habitants de l’Union, bien que les situations varient d’un État membre à l’autre (18).
Comme la scolarité primaire est obligatoire dans l’ensemble des États membres, ces derniers ont le devoir de veiller à ce que cette éducation soit accessible à tous les enfants ayant les âges visés. Selon les éléments les plus probants fournis par l’enquête de 2009 sur les forces de travail (19), 97,5 % des enfants en moyenne achèvent leur scolarité primaire dans l’Union européenne.
Les enquêtes montrent que, dans certains États membres, seul un nombre limité d’enfants roms termine l’éducation primaire (20). Les enfants roms ont tendance à être surreprésentés dans les établissements d’enseignement spécialisé ou faisant l’objet d’une ségrégation. Il importe de renforcer les liens avec les communautés grâce à des médiateurs culturels/scolaires, aux églises, aux associations et communautés religieuses, et par une participation active des parents roms, afin d’améliorer les compétences interculturelles des enseignants, de réduire la ségrégation et de veiller au respect de l’obligation d’éducation primaire. La Commission européenne prévoit une action conjointe avec le Conseil de l’Europe, destinée à former environ 1 000 médiateurs en deux ans. Ces derniers peuvent fournir des informations et des conseils aux parents concernant le fonctionnement du système scolaire local, et assurer une transition pour les enfants entre les différentes étapes de leur scolarité.
Chacun sait que les enfants non scolarisés, ou qui rejoignent tardivement ou abandonnent trop tôt le système scolaire, rencontreront par la suite de graves difficultés, allant de l’illettrisme et des problèmes linguistiques jusqu’au sentiment d’exclusion et d’inadéquation. De ce fait, il sera plus difficile pour eux de compléter leur scolarité, d’accéder à l’université ou de trouver un bon emploi. Par conséquent, des initiatives portant sur des programmes de seconde chance pour de jeunes adultes déscolarisés sont encouragées, y compris des programmes explicitement axés sur les enfants roms. Un appui devrait également être fourni pour modifier la formation des enseignants et créer des méthodes d’enseignement innovantes. La participation des enfants connaissant des difficultés multiples exige une coopération intersectorielle et des programmes de soutien adaptés. Le groupe de haut niveau sur la lutte contre l’illettrisme et la campagne d’alphabétisation prévus par la Commission européenne dans le cadre de l’initiative phare Europe 2020 « Une stratégie pour les nouvelles compétences et les nouveaux emplois » soulignera l’importance de la lutte contre l’illettrisme parmi les enfants et adultes roms.
La Commission européenne a adopté une communication sur l’éducation et l’accueil de la petite enfance (21), soulignant que le taux de présence des enfants roms dans ces structures est généralement bien moindre que celui des autres enfants, alors qu’ils ont davantage besoin d’aide. Un accès plus étendu à des services d’enseignement de grande qualité et non discriminants pour la petite enfance peut aider de manière déterminante les enfants roms à combler leurs lacunes en matière d’éducation, comme le mettent en évidence les actions pilotes sur l’intégration des Roms actuellement menées dans certains États membres avec des contributions à charge du budget de l’Union européenne (22).
C’est pourquoi la Commission européenne considère que les États membres devraient veiller à ce que tous les enfants roms aient accès à un enseignement de qualité et ne fassent pas l’objet d’une discrimination ou d’une ségrégation, qu’ils soient sédentaires ou non. Les États membres devraient au moins faire en sorte que ces enfants achèvent leur scolarité primaire. Ils devraient également élargir l’accès à une éducation et à un accueil de qualité pour la petite enfance, et réduire le décrochage scolaire prématuré dans l’enseignement secondaire, conformément à la stratégie Europe 2020. Les jeunes Roms devraient être fortement incités à suivre également un enseignement secondaire et supérieur (23).
S’agissant du financement, les Fonds structurels européennes peuvent notamment soutenir soutiennent :
- l’infrastructure scolaire ;
- les infrastructures et le matériel préscolaires ;
- la formation des enseignants et des assistants ;
- des activités extrascolaires ;
- l’enseignement supérieur.
Ils peuvent donc être utilisés pour compléter les programmes nationaux, régionaux et internationaux.
La pleine intégration des élèves et étudiants roms dans tous les établissements scolaires requiert une stratégie à long terme visant l’abolition des écoles ségrégationnistes aux abords des concentrations de Roms, des mesures efficaces en faveur de l’accès gratuit des enfants roms aux écoles « ordinaires » et la prévention de la ségrégation des enfants roms dans des classes séparées.
Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a ainsi relevé que dans la majorité des quarante-sept États membres du Conseil de l’Europe, les enfants roms sont victimes de ségrégation scolaire et reçoivent un enseignement de moindre qualité, ce qui a des conséquences catastrophiques. En effet, dans ces conditions, ces enfants n’ont guère de chances d’échapper à la pauvreté et à la marginalisation une fois adultes. De plus, la non-intégration génère des coûts importants (et inutiles) pour la société tout entière.
La ségrégation prend plusieurs formes. Ainsi, les enfants roms sont surreprésentés dans les établissements destinés aux enfants ayant des déficiences intellectuelles ou autres, où ils sont placés sur la base de tests discriminatoires. Des enfants roms sont envoyés dans des écoles réservées aux Roms ou accueillant une majorité d’élèves roms, ou sont regroupés dans des classes séparées. La ségrégation se poursuit souvent hors de la salle de classe, dans la cour de récréation et à la cantine. En Hongrie, des enfants roms peuvent même être exclus physiquement des établissements scolaires, au moyen de systèmes de cours « privés », à domicile. De plus, le personnel qui enseigne dans les classes séparées serait moins exigeant avec les élèves roms et leur fixerait des objectifs moins ambitieux.
La pratique consistant à regrouper les enfants roms dans des écoles ou des classes spéciales s’observe partout en Europe, du Portugal à la Russie, mais le problème est plus grave encore dans les pays d’Europe centrale et orientale, notamment en Slovaquie, en République tchèque et en Serbie.
D’une manière générale, il y a discrimination lorsqu’une personne est traitée différemment en raison d’une caractéristique identitaire, comme son origine ethnique, sans motif raisonnable. La discrimination touche de nombreux domaines, et en particulier l’éducation ; il n’est en effet pas rare d’observer un refus de scolarisation des populations Roms, quand bien même ces populations cherchent à fuir cette situation…
L’Union européenne a pris des mesures afin de promouvoir les droits humains et de lutter contre la discrimination (24). En 2000, elle a adopté la directive sur l’égalité raciale, qui interdit toute discrimination fondée sur la race ou l’appartenance ethnique sur le lieu de travail et dans l’éducation, ainsi que dans l’accès aux biens, aux services, au logement et à la santé. C’est un texte législatif européen à caractère contraignant que les pays membres sont tenus de transposer dans leur législation nationale et de mettre en application. La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne est entrée en vigueur en 2009. Elle interdit la discrimination et consacre de nombreux droits, notamment les droits à l’éducation, à une assistance sociale, à une aide au logement et au travail. La Charte est un instrument juridiquement contraignant et doit être respectée par les institutions de l’Union européenne et les États membres dans le cadre de la mise en œuvre du droit européen.
Le taux de chômage élevé parmi les Roms est l’un des principaux facteurs d’exclusion sociale du groupe. Il est dès lors nécessaire de mettre rapidement en place des programmes de formation et pour l’emploi qui répondent aux exigences du marché du travail. Il convient de noter que l’offre de services sociaux pour les enfants et les personnes âgées est une condition de l’emploi des femmes.
Par ailleurs, le travail d’indépendant ou la création de coopératives ou de sociétés s’inscrivent également davantage dans la culture de travail et les pratiques des Roms. Les microcrédits peuvent donc se révéler utiles. Les coopératives et les sociétés existantes gérées par des Roms en Europe orientale pourraient servir de référence.
Enfin, en règle générale les Fonds structurels sont susceptibles de soutenir toutes les mesures susmentionnées.
La Commission européenne souhaite pour sa part réduire l’écart en matière d’emploi entre les Roms et le reste de la population (25).
La stratégie Europe 2020 fixe comme objectif global l’emploi de 75 % de la population âgée de 20 à 64 ans (en moyenne, le taux d’emploi dans l’Union européenne est de 68,8 % (26)). L’examen annuel de la croissance 2011 a décrit la manière dont les États membres fixent des objectifs nationaux d’emploi, dans des programmes de réforme nationaux permettant d’évaluer les progrès. Des éléments probants et des recherches empiriques concernant la situation socioéconomique des Roms montrent qu’il existe un écart important entre le taux d’emploi des Roms et celui du reste de la population.
La Banque mondiale a constaté que les taux d’emploi des Roms (en particulier des femmes) restaient nettement inférieurs à ceux du reste de la population. Une enquête de l’Agence européenne des droits fondamentaux réalisée dans sept États membres met également en exergue des écarts notables et montre que les Roms se considèrent eux-mêmes comme fortement visés par des discriminations dans le domaine de l’emploi (27).
C’est pourquoi les États membres devraient donner aux Roms un plein accès de manière non discriminatoire à la formation professionnelle, au marché du travail, ainsi qu’aux outils et initiatives de travail indépendant. Il convient de favoriser l’accès au microcrédit. Dans le secteur public, une attention particulière devrait être accordée à l’emploi de collaborateurs roms qualifiés. Les services publics d’emploi peuvent s’adresser aux Roms en fournissant des services et une médiation personnalisés. Cela peut contribuer à les attirer sur le marché du travail et accroître ainsi leur taux d’emploi.
Dans la mise en œuvre de sa politique européenne d’intégration des populations Roms, la Commission européenne a encouragé la levée des mesures transitoires qui limitent l’accès des Roumains et des Bulgares au marché du travail en France, considérant que cette mesure enverrait un signal fort aux Roms originaires de ces pays.
La circulaire interministerielle du 26/08/2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites (28) disposait qu’« en matière d’insertion professionnelle, vous disposez désormais d’un nouveau cadre. Le Gouvernement a, en effet, décidé de faciliter les conditions d’accès au marché de l’emploi pour les ressortissants roumains et bulgares, pour les rapprocher des conditions applicables à l’ensemble des ressortissants communautaires. Ainsi, pour les personnes présentes dans les campements qui relèveraient de ces deux nationalités, la liste des métiers qui leur sont ouverts sans que la situation de l’emploi ne leur soit opposable sera prochainement élargie, après mise en oeuvre des procédures de consultation des partenaires sociaux. »
L’arrêté du 1er octobre 2012 modifiant l’annexe de l’arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l’emploi, des autorisations de travail aux ressortissants des États de l’Union européenne soumis à des dispositions transitoires, dispose donc que « la liste annexée à l’arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l’emploi, des autorisations de travail aux ressortissants des États de l’Union européenne soumis à des dispositions transitoire visé ci-dessus est remplacée par la liste annexée au présent arrêté. »
En France, Roumains et Bulgares sont ainsi soumis à des à des règles qui restreignent leur accès à l’emploi, donc leur intégration. En théorie, tous les citoyens européens sont libres de circuler et de travailler sans autorisation particulière dans l’ensemble de l’Union européenne, mais pour éviter une destabilisation des marchés de l’emploi, des restrictions ont été adoptées lors de l’entrée de plusieurs pays de l’Est, dont la Roumanie et la Bulgarie, en 2007. Prévues pour une durée de cinq ans, elles ont été prolongées dans huit États, dont la France, jusqu’au 31 décembre 2013. L’Irlande vient de lever ces contraintes le 22 juillet dernier.
Les 15 000 Roms vivant sur le territoire français n’ont ainsi le droit d’exercer qu’un certain nombre de métiers considérés comme sous tension, c’est à dire où les besoins sont les plus grands. Il s’agit d’activités qui concernent principalement le BTP et les services. Pour les embaucher, l’employeur doit verser une taxe, comprise entre 800 et 1500 euros, à l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) et attendre l’autorisation de travail délivrée par la préfecture. Selon le collectif Romeurope, il faut parfois « plusieurs mois » avant d’obtenir ces documents, ce qui décourage de nombreux employeurs. Par ailleurs, les Roms n’ont pas accès aux services de Pôle emploi.
Selon les associations, ces mesures transitoires pénalisent fortement les Roms, car faute de travail, elles ne peuvent pas obtenir de titre de séjour et sont donc expulsables à tout moment. Seuls un tiers des Roms présents en France occuperaient un emploi29.
La Commission européenne souhaite (30), afin de favoriser l’accès au logement et aux services de base, faire disparaître l’écart entre la proportion de Roms ayant accès au logement et aux réseaux publics (tels que ceux de l’eau, de l’électricité et du gaz) et celle de la population en général.
Dans l’ensemble de l’Union européenne, entre 72 % et 100 % des foyers sont reliés à un réseau public de distribution de l’eau (31). Or, la situation des Roms est bien plus grave. Leurs conditions d’habitation souvent précaires ne permettent pas un accès adéquat aux réseaux publics comme ceux de l’eau, de l’électricité et du gaz, et les Roms non sédentaires ont souvent des difficultés à trouver des aires équipées d’un accès à l’eau (32). Cette situation a un impact négatif sur leur santé et sur leur intégration globale dans la société.
C’est pourquoi les États membres devraient promouvoir un accès non discriminatoire au logement, y compris au logement social. L’action en matière de logement doit s’inscrire dans une approche intégrée couvrant, notamment, l’éducation, la santé, les affaires sociales, l’emploi et la sécurité, et des mesures de lutte contre la ségrégation. Les États membres devraient également tenir compte des besoins spécifiques des Roms non sédentaires (par exemple leur fournir un accès à des aires d’accueil adaptées). Ils devraient intervenir activement dans des programmes ciblés impliquant les autorités régionales et locales.
Les quartiers roms isolés, qui ne sont pas inscrits à l’urbanisme et ne disposent pas d’infrastructures adéquates, constituent l’un des problèmes socio-économiques les plus importants des communautés roms et, en retour, des collectivités où ils s’installent.
Le logement des Roms doit être inscrit au système de logement de la société dans son ensemble, la ghettoïsation devant être évitée.
La résolution du problème du logement doit s’inscrire dans le cadre des autres programmes. La légalisation des camps illégaux des Roms doit être érigée en priorité, en tenant compte de la situation particulière de chaque camp.
La pleine participation des Roms à l’amélioration de la situation est nécessaire. Les projets de logement doivent être abordables.
Il faut tenir compte du fait que la période de mise en œuvre d’un projet de logement est relativement longue.
L’habitat est intimement lié au logement. Il implique l’offre de services tels que la distribution d’eau, le chauffage, l’électricité, l’évacuation des déchets et doit être géré en concertation avec les Roms.
Les Fonds structurels peuvent apporter une aide à toutes les mesures prises à cet égard, y compris et pour la première fois le logement social pour la période 2007-2013.
Afin d’atteindre un niveau de santé satisfaisant dans les communautés roms, il est nécessaire d’améliorer les normes sanitaires et d’intensifier les programmes de sensibilisation à la santé. Il faut particulièrement impliquer les Roms dans ces initiatives, dès lors qu’il s’agit d’un domaine fortement lié à la culture. Les Fonds structurels peuvent également être mis à contribution en l’occurrence.
La Commission européenne, pour permettre l’accès des Roms aux soins de santé, souhaite réduire l’écart en matière de santé entre les Roms et le reste de la population (33).
L’espérance de vie à la naissance dans l’Union européenne est de 76 ans pour les hommes et de 82 ans pour les femmes (34). Pour les Roms, elle est estimée à 10 ans de moins (35). En outre, alors que le taux de mortalité infantile dans l’Union européenne est de 4,3 pour mille naissances vivantes (36), certains éléments révèlent que ce taux est nettement plus élevé dans les communautés roms.
Un rapport du programme des Nations unies pour le développement concernant cinq pays a souligné que les taux de mortalité des enfants roms étaient de 2 à 6 fois plus élevés que ceux du reste de la population, le chiffre variant selon le pays.
Cette disparité reflète l’écart global en matière de santé qui sépare les Roms du reste de la population. Cette différence s’explique par des conditions de vie précaires, l’absence de campagnes d’information ciblées, un accès limité aux soins de santé de qualité, et une plus grande exposition aux risques. Dans l’enquête de l’Agence des droits fondamentaux, la discrimination mise en œuvre par les professionnels de la santé a été décelée comme un problème spécifique pour les Roms (37) : 17 % d’entre eux ont déclaré avoir fait l’objet de discriminations dans ce domaine au cours des 12 mois précédents. Le recours de la population rom à des services de prévention n’est pas courant, et, selon certaines études, plus de 25 % des enfants roms n’ont pas reçu de vaccination complète (38).
C’est pourquoi les États membres devraient faciliter l’accès à des soins de santé de qualité, notamment pour les femmes et les enfants, ainsi qu’à des soins préventifs et à des services sociaux, au même niveau et dans des conditions équivalentes pour les Roms que pour le reste de la population. Le cas échéant, les Roms qualifiés devraient participer à des programmes de santé ciblant leurs communautés.
Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a constaté encore très récemment (39) que les expulsions de Roms se multiplient en Europe.
Ces dernières années, la question des Roms a été largement débattue en Europe. Toutefois, cette attention portée à la minorité d’Europe la plus exposée aux discriminations ne s’est guère accompagnée de mesures gouvernementales concrètes. Face à cette situation d’urgence en matière de droits de l’homme, les pays européens appliquent trop souvent encore les vieilles méthodes, comme le montre la multiplication des expulsions, qui ont déjà touché des milliers de Roms dans toute l’Europe.
En France, près de 5 000 Roms auraient été évacués de leurs campements entre juillet et septembre 2012. Bien qu’une circulaire interministérielle diffusée en août dernier demande aux autorités de proposer une solution de relogement adéquate aux personnes évacuées, celles-ci ne reçoivent généralement aucune aide et se retrouvent souvent sans abri, à Paris, à Marseille et dans d’autres grandes villes françaises.
En Italie, les expulsions forcées se sont poursuivies, malgré l’engagement du gouvernement de cesser d’appliquer la politique de « l’urgence nomade ». Au cours du seul mois de septembre 2012, à Rome, 250 personnes ont été expulsées, avec pour seule perspective d’être regroupées sur des sites à l’écart du reste de la population.
En République tchèque, des familles roms ont été évacuées au cours de l’été 2012 des bâtiments délabrés où elles vivaient depuis des années, dans la ville d’Ostrava. Elles ont été relogées dans des hôtels qui, de l’avis des services sociaux, ne sont pas adaptés à l’hébergement d’enfants. Les Roms étant fréquemment expulsés des logements sociaux dans certaines régions du pays, de nombreuses familles roms sont contraintes de mener une vie itinérante.
En Serbie, 1 000 Roms ont été évacués de force de Belvil, un quartier de Belgrade, en avril 2012. Certains d’entre eux ont dû s’installer dans une autre ville, tandis que d’autres ont été relogés dans des conteneurs, à la périphérie de Belgrade, où ils n’ont aucune possibilité de travailler et aucun accès aux services de santé et aux autres services de base.
Au Royaume-Uni, des Gens du voyage qui avaient été expulsés de leur propre terrain à Dale Farm, dans l’Essex, en octobre 2011, ont de nouveau reçu des avis d’expulsion. Il leur est maintenant demandé de quitter le terrain privé, situé en bord de route, qu’ils occupent depuis leur évacuation. Ils affirment n’avoir nulle part où aller et craindre l’approche de l’hiver.
Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe estime nécessaire de briser le cercle vicieux des expulsions.
Les expulsions sont inefficaces si elles ne s’accompagnent pas d’un projet d’intégration et de protection sociale. Ce n’est pas en chassant les Roms que l’on règlera le problème de l’exclusion et de la misère extrême dans laquelle vivent nombre d’entre eux. Beaucoup de ces expulsions sont contraires aux normes internationales des droits de l’homme, qui prévoient des garanties spécifiques en cas d’expulsion, notamment la mise à disposition d’un logement de remplacement décent et l’accès à des voies de recours juridiques. En particulier, la Charte sociale européenne impose des obligations précises aux États parties concernant le logement, l’accès aux services de santé et aux services sociaux et, dans ce contexte, la protection des droits de l’enfant.
De plus, les expulsions sont contre-productives car elles perturbent souvent très sérieusement la scolarité des enfants, qui est un élément essentiel de l’intégration des Roms. Elles entravent aussi les efforts des personnes qui dispensent aux Roms des soins médicaux de base, en organisant des campagnes de vaccination, par exemple.
Lors de nombreuses expulsions, la police aurait eu recours à la force de manière excessive. En outre, des médias et des personnalités politiques ont profité des expulsions pour exacerber les préjugés et les sentiments anti-Roms de la population. Des groupes de Roms évacués qui devaient se réinstaller ailleurs ont été en butte à des manifestations d’hostilité, voire de violence, de la part de leurs nouveaux voisins.
Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe considère qu’il est temps d’abandonner les politiques répressives.
Il faut en priorité combattre la discrimination et les préjugés profondément enracinés, qui constituent un obstacle majeur à tout progrès dans l’insertion des Roms. En particulier, les responsables politiques et les décideurs devraient cesser de tenir des propos qui stigmatisent les Roms, y compris les migrants d’origine rom.
Les États européens devraient réorienter leur action en délaissant les mesures répressives pour des stratégies d’intégration. Les bonnes pratiques qu’appliquent certains devraient être davantage développées et diffusées.
L’une des mesures à prendre de toute urgence est de trouver des solutions adaptées aux problèmes de logement des Roms. Le droit à un logement décent détermine en effet la possibilité de bénéficier de nombreux autres droits de l’homme. Les États devraient donc investir dans des formes de logement sûres et abordables pour les Roms, en étroite concertation avec les intéressés.
Des programmes et pratiques de logement qui se traduisent par une ségrégation forcée sont contraires au principe de non-discrimination. De plus, l’expérience montre qu’ils ne peuvent jamais être considérés comme une solution viable.
Aucune expulsion ne devrait intervenir en l’absence d’une possibilité de relogement adéquate et abordable.
Il faut aussi s’attaquer aux causes profondes qui poussent les Roms à migrer, au rang desquelles figurent la discrimination institutionnalisée, la ségrégation, la répression et la pauvreté dans leurs pays d’origine. Collectivités locales, gouvernements nationaux, organisations internationales et société civile : nous sommes tous concernés par ces objectifs.
En plus d’être inefficaces et coûteuses, ces expulsions sont surtout inhumaines. Il faudrait y mettre un terme et passer à des politiques d’intégration effectives, dont ne bénéficieraient pas seulement les familles roms concernées, mais la société tout entière.
Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a constaté (40) la persistance d’obstacles majeurs à l’exercice, par les Roms et les Gens du voyage, de leurs droits de l’homme dans l’ensemble de l’Europe, le Commissaire a continué à déployer des efforts particuliers dans ce domaine en 2011. Dans un discours prononcé lors d’une conférence sur le thème « Le génocide des Roms et les dangers actuels : lutter contre la discrimination et les atteintes aux droits de l’homme des Roms », organisée en octobre à Chisinau, le Commissaire a mis en évidence les liens entre l’histoire des Roms, l’antitsiganisme profondément ancré auquel ils continuent d’être très largement soumis, et la discrimination et la marginalisation qui caractérisent leur situation aujourd’hui en Europe. Étant donné l’interdépendance des facteurs qui sont à l’origine des graves problèmes que connaissent de nombreux Roms d’Europe en matière de droits de l’homme, le Commissaire a conclu que, pour être efficace, la réponse des gouvernements doit obligatoirement prendre la forme d’une action systématique en faveur des droits de l’homme, qui traite tous les aspects, de manière à la fois complète et durable.
Les États européens devraient adopter des stratégies globales et dotées de ressources suffisantes pour améliorer la situation des Roms. Ces stratégies devraient reconnaître la complémentarité de l’intégration et de la non-discrimination. En particulier, elles devraient indiquer clairement que l’intégration des Roms dépend dans une large mesure de la population majoritaire. Il faudrait donc que les mesures d’intégration des Roms visent à la fois la population rom (en particulier par des mesures positives) et la population majoritaire (notamment pour réduire l’antitsiganisme et la discrimination). Il importe que des progrès raisonnables soient faits dans tous les domaines simultanément et qu’aucun domaine ne soit négligé.
Les stratégies nationales devraient mettre fortement l’accent sur le rôle des collectivités locales dans l’intégration des Roms. À cet égard, le Commissaire considère comme une initiative utile le Sommet des maires sur les Roms tenu le 22 septembre 2011 à Strasbourg, lors duquel a été créée une alliance de villes et de régions pour l’intégration des Roms.
Il est primordial de disposer d’un cadre juridique et institutionnel efficace pour combattre la discrimination et l’antitsiganisme. Ce cadre doit notamment comprendre une législation antidiscriminatoire efficace, ainsi que des organismes nationaux de promotion de l’égalité indépendants et dotés de ressources suffisantes, qui puissent contribuer à la mise en œuvre de la législation. Les gouvernements devraient exploiter tout le potentiel des nombreuses orientations qui leur ont été données en la matière. Il s’agit de compléter le cadre juridique en ratifiant le Protocole no 12 à la CEDH (qui prévoit l’interdiction générale de la discrimination) et en adoptant des dispositions adéquates contre le discours de haine, qui doivent aussi être appliquées de manière effective. Il faudrait veiller à l’exécution pleine et entière des arrêts rendus par la Cour de Strasbourg dans des affaires de discrimination à l’encontre de Roms (concernant, par exemple, la ségrégation scolaire et la violence dirigée contre les Roms) et diffuser plus activement cette jurisprudence.
La participation des Roms est primordiale. Les Roms doivent être des partenaires clés lors de l’élaboration, de la mise en œuvre et du suivi des politiques qui les concernent, aux niveaux local et national. Il faut trouver, en coopération avec eux, les meilleurs moyens de collecter dans la durée des données de qualité, ventilées par appartenance ethnique. Si l’on ne dispose pas de telles données (ou si les pouvoirs publics n’en font pas un bon usage et ne respectent pas les règles de protection des données), il est pratiquement impossible de mesurer l’efficacité des mesures prises en faveur de l’intégration des Roms et les progrès réalisés, ce qui rend d’autant plus difficile de garantir des avancées durables.
Il faudrait veiller à utiliser au mieux, au niveau national, les possibilités de financement existantes, notamment les crédits de l’Union européenne. Cela suppose d’avoir une capacité d’absorption satisfaisante, mais aussi de vérifier que les crédits servent effectivement à financer les projets auxquels ils étaient destinés.
Tout au long de l’année 2011, le Commissaire a continué à attirer l’attention des États membres sur les domaines spécifiques où une action déterminée s’impose.
Ainsi, il a souligné (41) la nécessité de combattre l’antitsiganisme dans le discours public, y compris dans les propos des responsables politiques et dans les contenus diffusés par les médias. Le Commissaire a rappelé que les dirigeants politiques devraient se sentir investis de la mission de lutter contre la discrimination et de créer des liens entre les différents pans de la société. Ils devraient éviter d’utiliser des propos stigmatisants à l’égard des Roms et des Gens du voyage et d’alimenter les stéréotypes anciens contre ces communautés. En donnant à la société l’exemple des préjugés et de la discrimination, les personnalités politiques qui utilisent cette rhétorique exposent les Roms et les Gens du voyage à des atteintes aux droits de l’homme et réduisent à néant les efforts déployés par les communautés roms elles-mêmes pour sortir de leur marginalité et établir des relations positives avec le reste de la population.
Le Commissaire a également souligné (42) que les médias ont un rôle important à jouer dans la lutte contre les préjugés, mais que certains journaux et organes de radiodiffusion européens n’assument pas leurs responsabilités s’agissant des Roms et des Gens du voyage. Bien au contraire, ils nourrissent la xénophobie à coups de reportages tendancieux et de sensationnalisme bon marché. Il est temps de promouvoir un journalisme éthique et des formes d’autorégulation, et de soutenir les médias qui s’adressent à la communauté rom. Il importe aussi que davantage de journalistes roms puissent se faire une place dans les médias majoritaires.
En outre, le Commissaire a continué à attirer l’attention) sur le problème de l’apatridie des Roms et sur leurs difficultés particulières à exercer leur liberté de circulation et à obtenir une protection internationale. Il rappelle (43) qu’en Europe, un grand nombre des apatrides sont des Roms, notamment dans les pays de l’ex-Yougoslavie, et que certains Roms qui ont quitté l’ex-Yougoslavie pour d’autres parties de l’Europe se trouvent dans une situation d’apatridie de fait car ils n’ont pas de documents personnels. En Italie, par exemple, ils sont environ 15 000 dans ce cas.
S’agissant des mesures que des pays des Balkans ont prises pour empêcher leurs ressortissants de se rendre sur le territoire de l’Union européenne et d’y demander l’asile, et pour tenter ainsi de préserver le régime d’exemption de visa applicable aux déplacements entre ces pays et l’Union européenne, le Commissaire constate (44) que, dans la pratique, ces mesures touchent plus particulièrement les Roms et portent atteinte à leur droit de quitter leur pays et à leur droit de demander l’asile, qui sont des droits de l’homme.
Dans la Déclaration de Strasbourg du Conseil de l’Europe adoptée le 20 octobre 2010 (45), les acteurs s’étaient engagés sur trois séries de principes :
- la non-discrimination, la citoyenneté, les droits des femmes et des enfants ;
- l’inclusion sociale, notamment en matière d’éducation, de logement et de soins de santé ;
- l’autonomisation, comme l’amélioration de l’accès à la justice.
La directive 2000/43/CE relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique interdit quant-à-elle toute discrimination directe et indirecte sur la base de la race et de l’origine ethnique et protège les Roms et les autres groupes ethniques de la discrimination dans le domaine de l’emploi, de l’enseignement et de la formation, de la sécurité sociale, des soins de santé, du logement et de l’accès aux biens et aux services.
L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe craint que les Roms ne fassent partie des groupes les plus défavorisés, discriminés, persécutés et brimés d’Europe (46). Cette situation perdure, voire empire, comme il est constaté dans de nombreuses études approfondies et souligné dans la Résolution 1740 (2010) de l’Assemblée sur la situation des Roms en Europe et les activités pertinentes du Conseil de l’Europe, ainsi que dans la Déclaration sur la montée de l’antitsiganisme et de la violence raciste envers les Roms en Europe, adoptée par le Comité des Ministres le 1er février 2012. Le fait d’être à la fois rom et migrant augmente encore les désavantages et les discriminations, conséquences de cette double stigmatisation.
Cette double stigmatisation peut être entendue et constatée lors de débats publics, de reportages dans les médias et de discussions politiques sur les Roms en Europe. Elle se fonde essentiellement sur trois préjugés fortement ancrés, à savoir que tous les Roms sont des nomades, qu’ils viennent tous de l’étranger et que leur migration est illégale.
Pour ce qui est du nomadisme, en réalité, moins de 20 % des Roms en Europe sont nomades. Pour ce qui est de leur origine étrangère, on peut constater qu’ils font partie de la société européenne depuis près de sept cents ans et qu’ils sont en grande majorité des ressortissants de leur pays de résidence. Enfin, à propos de leur migration illégale, il est évident que la plupart des Roms se déplacent dans le cadre de leur droit à la libre circulation inscrit dans la législation communautaire.
Ces préjugés, associés à une tendance répandue d’établir un lien entre les Roms et la criminalité, ont grandement contribué à la situation critique des Roms en Europe.
Il faut donc s’attaquer avec la plus grande urgence au problème de la discrimination. Les campagnes de lutte contre la discrimination qui visent les citoyens en général doivent sensibiliser aux pratiques discriminatoires et aux préjudices causés. Cette lutte s’inscrit dans la durée et revêt la plus haute importance. Les activités de sensibilisation parmi les Roms doivent illustrer les avantages de l’enseignement et de la formation en les encourageant à s’intégrer et en les informant sur leurs droits et leurs obligations.
En outre, les campagnes de lutte contre la discrimination doivent cibler la discrimination liée au sexe, présente dans les communautés roms.
D’une manière générale, il convient de promouvoir l’égalité des sexes en tant que valeur parmi les femmes roms afin qu’elles puissent participer à la vie sociale, économique, politique et publique et qu’elles puissent s’épanouir. Il est ainsi nécessaire d’améliorer la participation directe des femmes roms aux projets éducatifs en vue de lutter contre la discrimination. Il est nécessaire de faciliter l’accès des femmes roms à l’enseignement supérieur. Il faut mettre en œuvre des programmes en faveur des femmes roms chefs d’entreprise, etc. Il convient de promouvoir des campagnes de sensibilisation des hommes des communautés roms dans le cadre de la lutte contre l’inégalité des sexes au sein des communautés roms. Les Fonds structurels peuvent grandement y contribuer.
Enfin, le problème de la sous-représentation persistante des Roms dans la vie politique et dans les processus décisionnels doit bénéficier d’une plus grande reconnaissance. La mise en œuvre des Fonds structurels présente des perspectives (participation à des comités, affiliation à des partenariats, entre autres) et peut faciliter le recensement et la suppression des entraves, à la fois internes et externes, de manière à améliorer la participation des Roms à la vie politique et à développer leur culture politique. À cet égard, les problèmes des documents d’identité et de leur inscription en tant qu’électeurs doivent également être abordés.
II. LES STRATÉGIES NATIONALES D’INTÉGRATION
Selon la Commission européeenne (47), les stratégies nationales d’intégration des Roms requièrent un engagement politique clair de la part des États membres.
Partant de l’expérience des États membres, y compris ceux qui participent à la Décennie de l’inclusion des Roms (48), la Commission invite les États membres à aligner leurs stratégies nationales d’intégration des Roms sur l’approche ciblée décrite ci-dessus, et à étendre leur période de planification jusqu’en 2020. Les États membres qui n’ont pas encore instauré de stratégie nationale pour les Roms sont invités à fixer des objectifs similaires, en fonction de la taille de la population rom située sur leur territoire (49), de leurs points de départ respectifs, ainsi que des spécificités de cette population.
Les stratégies nationales des États membres devraient suivre une approche ciblée qui contribuera activement, conformément aux Principes fondamentaux communs en matière d’intégration des Roms (50), à l’intégration sociale de ces derniers dans la société ordinaire et à l’élimination des ségrégations existantes. Ces stratégies devraient s’inscrire dans le cadre plus général de la stratégie Europe 2020 et l’enrichir, et assurer par conséquent une cohérence par rapport aux programmes de réforme nationaux.
Pour instaurer des stratégies nationales d’intégration des Roms, les États membres devraient envisager les approches suivantes :
- fixer des objectifs nationaux d’intégration des Roms qui soient réalisables, afin de combler l’écart par rapport au reste de la population. Ces objectifs devraient porter au moins sur les quatre objectifs de l’Union européenne pour l’intégration des Roms, concernant l’accès à l’éducation, l’emploi, les soins de santé et le logement ;
- recenser, le cas échéant, les micro-régions désavantagées et les quartiers frappés de ségrégation dans lesquels les communautés sont les plus défavorisées, en utilisant des indicateurs socioéconomiques et géographiques déjà disponibles (à savoir, le très faible niveau d’instruction, le chômage de longue durée, etc.) ;
- allouer un financement suffisant à charge des budgets nationaux, à compléter le cas échéant par un financement international et européen ;
- inclure des méthodes de suivi solides afin d’évaluer l’impact des actions d’intégration des Roms, ainsi qu’un mécanisme de révision permettant d’adapter la stratégie ;
- être conçues, mises en œuvre et suivies dans le cadre d’une collaboration étroite et d’un dialogue permanent avec la société civile rom, les autorités régionales et locales ;
- désigner un point de contact national pour la stratégie nationale d’intégration des Roms, ainsi que l’autorité chargée de coordonner le développement et la mise en œuvre de la stratégie ou, le cas échéant, s’appuyer sur les structures administratives adaptées existantes.
Les États membres sont invités à élaborer ou à réviser leurs stratégies nationales d’intégration des Roms, et à les présenter à la Commission pour la fin décembre 2011. Au printemps 2012, avant la réunion annuelle de la plateforme sur les Roms, la Commission évaluera ces stratégies nationales et communiquera un rapport au Parlement européen et au Conseil sur leur état d’avancement.
Selon le rapport de suivi de la Commission publié le 26 juin 2013, les États membres doivent mieux mettre en œuvre les stratégies nationales d’intégration des Roms qu’ils ont présentées au titre du cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms.
La Commission européenne demande donc aux États membres de respecter leur engagement de garantir l’égalité et de redoubler d’efforts en vue d’une meilleure intégration économique et sociale des 10 à 12 millions de Roms que compte l’Europe.
Ce nouveau rapport s’accompagne d’une proposition de recommandation adressée aux États membres de l’Union (51), laquelle leur propose, d’une part, des mesures spécifiques, notamment des mesures d’action positive, et, d’autre part, des mesures horizontales, dont des actions locales pour améliorer la situation des populations roms. Les États membres disposeraient de deux ans pour mettre en pratique des mesures concrètes, de manière à obtenir des résultats tangibles sur le terrain en faveur des Roms.
« Si les États membres sont véritablement déterminés à voir leur stratégie nationale aboutir, ils doivent passer à la vitesse supérieure en matière d’intégration des Roms. Le cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms est en place depuis plus de deux ans maintenant. Il est temps que ces stratégies se traduisent en actions concrètes », a déclaré la vice-présidente et commissaire chargée de la justice (52). « Il y a certes eu quelques progrès, mais ils demeurent trop limités. C’est pourquoi nous proposons aujourd’hui des orientations spécifiques pour aider les États membres à intensifier et à accélérer leurs efforts : les mesures d’aide aux Roms doivent être locales, les États doivent coopérer et il est urgent d’intervenir pour améliorer la situation des jeunes Roms ».
« Les mesures d’inclusion des Roms doivent être mises en œuvre et faire l’objet d’un suivi avec la participation pleine et entière de la société civile, dont des représentants des communautés roms elles-mêmes. Ils doivent, avec les points de contact nationaux pour l’intégration des Roms, être également associés à la planification actuelle de l’utilisation des fonds européens pour la période 2014-2020 », a déclaré, pour sa part le commissaire chargé de l’emploi, des affaires sociales et de l’inclusion (53). « Les États membres, surtout ceux qui ont une importante communauté rom présente sur leur territoire, doivent promouvoir avec vigueur et célérité l’égalité d’accès des Roms à l’éducation et au marché du travail. La Commission a également adressé des recommandations spécifiques par pays aux États membres les plus concernés. En donnant aux Roms les mêmes chances qu’aux autres citoyens de l’Union, les États membres contribueront à atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020 dans les domaines de l’éducation, de l’emploi et de la réduction de la pauvreté ».
La Commission européenne constate que, si de nombreux États membres ont instauré des mécanismes pour mieux coordonner leurs efforts en matière d’intégration des Roms et approfondir le dialogue avec les autorités locales et régionales, des progrès restent à faire en ce qui concerne la participation des organisations de la société civile et l’adoption de méthodes rigoureuses de suivi et d’évaluation pour mesurer les résultats obtenus. La Commission constate également qu’une majorité d’États membres n’ont pas alloué une part suffisante de leur budget national à la mise en œuvre de leur stratégie. Les autorités publiques devraient, en outre, redoubler d’efforts pour combattre les discriminations et expliquer les effets bénéfiques, du point de vue social et économique, de l’intégration des Roms.
Malgré ces critiques, la Commission relève également une série d’exemples de bonnes pratiques nationales, telles que :
- le plan d’action régional pour l’inclusion des Roms, conçu et développé par le Land de Berlin ;
- la coopération entre autorités nationales et acteurs locaux en France ;
- le travail accompli en Bulgarie pour mieux utiliser les fonds de l’Union européenne ;
- la Hongrie, quant à elle, a conçu un solide système pour contrôler la mise en œuvre de sa stratégie nationale ;
- l’Espagne a formé 158 forces de police pour agir contre la discrimination ethnique ;
- la Roumanie a réservé 15 000 places aux Roms dans les écoles, universités et centres de formation professionnelle.
La nouvelle stratégie française pour l’intégration des Roms n’a pas, à la date de présentation de ce rapport, encore été rendue publique. Elle devrait présenter trois types de différences fondamentales par rapport à la précédente :
- elle porte sur les Roms migrants, et non sur les gens du voyage ;
- elle ne se limite pas au droit commun, mais aborde la question par le biais des campements ;
- elle comporte un fort volet européen.
Il est procédé à la suite un bref examen des principales mesures des politiques publiques sur lesquelles s’appuie la stratégie mise en œuvre ces dernières années. Cet examen ne constitue pas de par lui-même une évaluation des mesures mises en œuvre et des résultats auxquels celles-ci ont permis d’aboutir.
2. La stratégie française d’intégration (54)
La Commission européenne assimile sous le terme « Roms » diverses populations, telles que les Sintis (Manouches), Gens du voyage, Kalé, qui se heurtent à des défis communs en termes d’inclusion. Chacun de ces groupes a sa culture, son histoire, ses modes de vie et ses problématiques économiques et sociales spécifiques. Certains sont sédentaires, d’autres pas. Et il est apparu, aux termes des consultations qui ont été conduites par les autorités françaises, que cette approche englobante pouvait parfois contredire l’objectif même qui était poursuivi dans les conclusions adoptées par le Conseil des ministres des affaires sociales (EPSCO) du 19 mai 2011.
Deux problèmes se posent en particulier. Le premier est que cette assimilation peut venir contredire l’un des objectifs des politiques d’intégration, qui est précisément de reconnaître les cultures et des identités des différents groupes qui composent la société française pour leur permettre d’y trouver toute leur place dans une logique d’égalité des droits. Si l’on ne prend pas le temps de regarder dans le détail les particularités de chacun, on se privera des moyens efficaces pour construire une stratégie.
La deuxième difficulté est que le terme « Roms » renvoie à une notion ethnique qui est inopérante en droit français pour construire des politiques publiques. La tradition républicaine française, qui se traduit par une conception exigeante du principe d’égalité, ne permet pas d’envisager des mesures qui seraient spécifiquement ciblées sur un groupe ethnique. L’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 énonce en effet que la République assure l’égalité devant la loi sans distinction d’origine, de race ou de religion. Le gouvernement français se refuse donc avec une grande vigueur à toute différence des droits fondée sur l’appartenance à une communauté définie par son origine, et continuera de le faire dans le cadre des processus nationaux, communautaires et internationaux. De même, s’agissant du suivi des politiques qu’il présentera dans cette stratégie, il respectera scrupuleusement les prescriptions constitutionnelles telles qu’elles ont été récemment précisées dans une décision de son Conseil constitutionnel no 2007-557 DC du 15 novembre 2007. Comme l’a souligné le président de la République, dans son discours de Palaiseau du 17 décembre 2008, « répondre au défi de la diversité en recourant à des critères ethniques ou religieux conduirait à prendre le risque de dresser les unes contre les autres des communautés rivales et au fond à enfermer chacun dans son identité ». C’est précisément une orientation inverse qui inspire les actions qui seront conduites par le gouvernement français.
Il n’en reste pas moins que le nouveau cadre européen défini le 19 mai 2011 est de nature à permettre des réponses coordonnées des différents États de l’Union européenne pour aborder des défis sociaux et sociétaux qui nous sont à l’évidence communs et que nous échouons à traiter séparément depuis trop d’années. La situation économique et sociale des populations sur laquelle la Commission européenne attire l’attention est marquée par la pauvreté, une espérance de vie inférieure à la moyenne, des discriminations dans l’accès au marché du travail, des difficultés d’accès aux droits, de faibles taux de scolarisation voire, dans certains pays, des atteintes manifestes aux droits fondamentaux.
La France a adopté de longue date des mesures ambitieuses pour favoriser l’intégration républicaine des personnes qui vivent sur son sol, notamment en matière de logement et d’éducation. Elle a également développé un cadre juridique propre aux gens du voyage, pour tenir compte des particularités de leur mode de vie itinérant. Des mesures spécifiques ont été développées depuis la fin des années 1990 afin de favoriser la scolarisation des enfants, l’alphabétisation des adultes, l’accès aux soins et la promotion de la santé des familles, mais aussi afin de permettre l’adaptation économique des gens du voyage, d’aider ces derniers dans l’accomplissement de leurs démarches administratives pour l’accès aux droits, et de développer la fonction de médiation entre les familles et les services prestataires, administratifs et sociaux.
Cette approche demeure compatible avec un traitement de droit commun pour les gens du voyage qui le souhaitent. L’objectif est bien que l’intégration se fasse dans le cadre des politiques de droit commun, complétées, le cas échéant, par des mesures spécifiques pour tenir compte de leur mode de vie. Des progrès restent à faire en France, comme dans tous les États membres. Les engagements que le gouvernement français a pris dans le cadre des conclusions du Conseil du 19 mai 2011 en sont l’occasion. Sur la base des propositions formulées par la Commission européenne le 5 avril 2011, prend forme un cadre d’intervention européen qui doit permettre de répondre à des défis considérables.
Assurer l’intégration économique et sociale des citoyens de l’Union européenne est en premier lieu une responsabilité de chaque État membre. L’Union européenne dispose toutefois de divers outils juridiques et financiers qui pourraient être efficaces pour favoriser l’intégration sociale des Roms et le strict respect de leurs droits fondamentaux, obligation inhérente à l’appartenance à l’Union européenne régie par le Traité.
Le gouvernement français se félicite de l’action entreprise pour mettre ces outils au service d’une stratégie européenne, qui viendrait compléter plus efficacement l’action des États membres. De plus, l’analyse approfondie des différentes stratégies nationales renvoyées par les États membres devrait faire émerger des exemples de bonnes pratiques qui pourraient utilement faire l’objet d’actions conjointes communautaires dans les prochains mois. C’est dans ce cadre, tel qu’il a été fixé par les conclusions du Conseil européen du 23 et 24 février 2011, que se situent les mesures présentées. L’objet de cette contribution répond à la volonté des États membres et de la Commission européenne d’aborder exclusivement les outils nationaux et communautaires utiles à une inclusion sociale réussie.
Ces mesures couvrent une période allant jusqu’en 2020. Elles contribueront ainsi à l’atteinte des objectifs que le gouvernement français s’est fixé dans le cadre de la stratégie Europe 2020, en particulier les objectifs de réduction de la pauvreté, d’accroissement du taux d’emploi et de lutte contre le décrochage scolaire.
En phase avec l’objectif de réduction de la pauvreté fixé dans le cadre de la stratégie Europe 2020 et la déclinaison nationale de cet objectif, la France poursuit une politique visant à garantir l’inclusion sociale des personnes les plus vulnérables. Cette politique bénéficie aux citoyens européens, quelle que soit leur origine.
Les mesures présentées sont pensées comme une stratégie globale, intervenant dans tous les domaines concernés, en particulier l’accès à l’éducation, à l’emploi, à la santé et au logement, domaines considérés comme prioritaires dans la communication de la Commission et les conclusions du Conseil sur « un cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms jusqu’en 2020 ». Les politiques présentées sont parfois spécifiques ce qui signifie en France qu’elles prennent en considération des particularités du mode de vie. Mais le moteur le plus puissant d’intégration en France est celui des dispositifs de droit commun ou des dispositifs conçus pour permettre aux populations les plus marginalisées d’accéder aux politiques de droit commun. Des mesures d’accompagnement sont notamment prévues pour pallier les difficultés particulières quant à l’accès aux droits. Ne pas présenter ce cadre général conduirait à une vision déséquilibrée des actions entreprises et ne permettrait pas d’assurer le lien avec le Programme National de Réforme (PNR) attendu par la Commission.
Cette stratégie engage l’État français mais ne peut être mis en œuvre par lui seul. Compte tenu du mode de vie itinérant ou semi-itinérant, comme de la situation de précarité d’une partie de la population des gens du voyage, l’État poursuit le financement de dispositifs d’action sociale en direction de cette population. Son action doit étroitement s’articuler avec celle des collectivités locales et notamment des Conseils généraux, qui gardent la compétence de droit commun en matière d’accompagnement social. Les collectivités locales ont été consultées sur la première mouture de cette stratégie nationale le 6 janvier 2012. Certaines ont formulé des commentaires, d’autres ont fait le choix de transmettre des contributions écrites au gouvernement français, voire directement à la Commission européenne.
Les acteurs associatifs ont également été consultés le 25 janvier 2012, par l’intermédiaire des deux grands conseils consultatifs. Ils seront également des partenaires indispensables dans la mise en œuvre de ces mesures. Une partie du soutien financier de l’État est en effet réalisé, au niveau national, au bénéfice des têtes de réseau associatif qui structurent l’action des diverses associations locales sur le terrain, fournissent un appui juridique et promeuvent l’accès aux droits et la lutte contre les discriminations et l’exclusion des gens du voyage, notamment, par la diffusion de bonnes pratiques (formation, information, participation citoyenne). Il est complété par des aides financières aux initiatives des associations locales qui réalisent un accompagnement social sur le terrain avec pour objectif de favoriser l’insertion sociale et professionnelle des gens du voyage et de faciliter leur accès aux droits et prestations sociales.
DES MESURES D’INTÉGRATION ET D’INCLUSION SOCIALE A VOCATION GÉNÉRALE DEVANT PRENDRE ET PRENANT EN COMPTE LES POPULATIONS ROMS
a) Ne priver aucun enfant des chances d’une école de qualité
L’école vise à assurer l’égalité des chances et, autant que faire se peut, à corriger les effets des inégalités sociales et économiques sur la réussite scolaire. Conformément à la tradition républicaine française, elle met en place des mesures qui s’adressent également à tous les jeunes en difficulté (personnalisation des parcours, soutien individualisé, bourses et aides financières…).
Dans le contexte des objectifs que s’est donnée la France en application de la stratégie Europe 2020, des mesures seront adoptées qui viseront à atteindre un taux de décrochage scolaire de 9,5 %, le gouvernement français a présenté un premier ensemble de mesures dans le cadre de son programme national de réforme 2011-2014.
Dans le même temps, des dispositifs particuliers se concentrent plus particulièrement sur :
- les collèges et écoles implantés dans des territoires défavorisés (cf. infra) ;
- les primo-arrivants non francophones afin de leur permettre de s’intégrer dès que possible dans une classe normale.
Les Roms sont tout particulièrement concernés par les quatre axes généraux d’action en soutien tels qu’exposés ci-après :
ii. Faire de la maîtrise des savoirs fondamentaux une priorité absolue : un plan de prévention de l’illettrisme
En France, 3 100 000 personnes sont en situation d’illettrisme, soit 9 % de la population âgée de 18 à 65 ans. Face à ce constat, le plan de prévention de l’illettrisme présenté en mars 2011 par le ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et de la Vie associative, vise à :
- agir dès la maternelle, à l’âge où les enfants s’approprient le langage et découvrent l’écrit ;
- travailler tout au long de la scolarité pour que la lecture sous toutes ses formes soit perçue comme un plaisir.
Ce plan passe par la mobilisation de tous les acteurs de l’école primaire : les familles, les professeurs, les personnels d’encadrement, les partenaires associatifs et institutionnels.
Dans cette perspective, 30 correspondants académiques pour la prévention de l’illettrisme, qui ont d’ores et déjà été désignés, seront notamment chargés d’organiser des assises académiques de prévention de l’illettrisme. Ils sont ainsi appelés à relayer les actions nationales et à contribuer à la mutualisation des initiatives et des ressources.
L’accompagnement personnalisé existe désormais sous des formes différentes à tous les niveaux d’enseignement car il est considéré comme un levier fondamental pour réduire le décrochage scolaire, qui affecte particulièrement les populations marginalisées, notamment les Roms. Il s’accompagne d’un meilleur suivi des progrès des élèves aux moments clés de leur scolarité (évaluations nationales en fin de CE1 et de CM2, nouveau bilan des acquis en fin de 5e appelé à être généralisé en 2013).
À l’école primaire, l’accompagnement personnalisé consiste en deux heures hebdomadaires d’aide, ainsi qu’en stages de remise à niveau pendant les vacances scolaires pour chaque élève dont la scolarité pourrait se trouver entravée par des compétences insuffisantes en lecture, en écriture et en calcul. Ce dispositif est renforcé dans les réseaux de l’éducation prioritaire où a été mis en place un accompagnement éducatif décliné en aide aux devoirs, pratique sportive, activités artistiques et culturelles (deux heures/jour, quatre jours/semaine – avec concours d’intervenants externes par convention avec des institutions ou associations reconnues). Un effort particulier est fait sur la liaison école-collège :
- l’élaboration de « PPRE passerelle » (Projet Personnel de Réussite Educative) par le professeur des écoles et les professeurs de français et de mathématiques du collège ;
- des modules de mise à niveau qui débutent dès l’entrée en 6e.
Par ailleurs, des formations peuvent être accompagnées d’un rappel des traditions et de l’art rom et des réponses aux questions pratiques des enseignants. Ainsi l’académie de Bordeaux a proposé, en février 2010, une telle formation sur la scolarisation des enfants roms. Des actions similaires seront entreprises dans d’autres académies.
Les réformes du second cycle du second degré, entrées en vigueur en 2009 et 2010 prévoient des dispositifs qui concourent à réduire le décrochage scolaire, en améliorant l’orientation/la réorientation des élèves, renforçant l’aide personnalisée, personnalisant les parcours scolaires et créant des passerelles entre les différentes filières.
iv. Mobiliser les dispositifs de lutte contre le décrochage scolaire : les plateformes de suivi et d’appui
La loi no 2009-1437 du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie a, en son article 36, renforcé l’obligation de suivi des jeunes sortant sans diplôme, l’étendant à l’ensemble des institutions de formation initiale. En lien avec les mesures mises en œuvre dans le cadre du PNR pour atteindre les engagements pris par la France dans le cadre de la stratégie Europe 2020, ces dispositifs seront au cœur des mesures nationales visant à réduire le décrochage scolaire des enfants roms.
Des plates-formes partenariales sont organisées entre acteurs de l’éducation, de la formation et de l’insertion sur tout le territoire afin de trouver des solutions pour les jeunes sortis du système sans diplôme, afin de réinscrire le jeune décrocheur dans un parcours de formation, d’accompagnement ou dans des activités destinées à préparer au mieux son entrée dans la vie active.
Plusieurs dispositifs expérimentaux mis en place au service de la réussite de chaque élève, peuvent ainsi être cités, notamment le programme « Eclair » et l’opération « Ouvrir l’École aux parents pour réussir l’intégration ».
À la rentrée 2011, le programme Éclair (écoles, collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite) concerne 297 collèges et 28 lycées qui concentrent les plus graves difficultés socio-économiques ainsi que les écoles de leur secteur accueillant un public similaire (plus de 2 100). Avec les « réseaux pour la réussite scolaire » pilotés au niveau académique, ce programme a pour but d’agir au service de la réussite de chaque élève, en insistant sur la maîtrise du socle commun de connaissances et de compétences et sur le développement de l’ambition scolaire et professionnelle, ainsi que d’instaurer un climat scolaire apaisé.
Le programme Éclair innove :
- dans le champ de la pédagogie : il s’agit d’encourager les innovations et expérimentations concernant par exemple l’organisation de travaux interdisciplinaires, la conduite de projets, l’organisation différente du temps scolaire, la pratique régulière d’activités physiques et sportives et d’activités artistiques ;
- dans le champ de la vie scolaire : une approche plus globale et personnalisée de chaque élève est développée par des liens resserrés entre les domaines des enseignements et de l’éducation. De plus, les familles sont très largement associées à la vie de l’établissement et bénéficient d’actions d’accompagnement telles que la « mallette des parents ».
Dans le même esprit, au niveau national, l’opération « Ouvrir l’École aux parents pour réussir l’intégration » mise en place à la rentrée 2008 dans certains établissements (circulaire no 2011-123 du 11 juillet 2011), a pour objectif de permettre aux parents étrangers ou immigrés de maîtriser la langue française, de leur présenter des principes de la République et de ses valeurs et de les familiariser avec l’institution scolaire.
L’ensemble de ces programmes seront pleinement mobilisés au bénéfice des enfants roms. Dispositifs d’accueil destinés à favoriser la réussite scolaire des élèves motivés issus de milieux défavorisés, dont les Roms, filles et garçons, les internats d’excellence s’appuient sur un projet pédagogique et éducatif structurant et offrent un parcours scolaire complet du collège aux classes préparatoires ou au brevet de technicien supérieur pour toutes les filières. Un objectif de 20 000 places d’internat d’excellence a été fixé par le Président de la République. Pour l’année 2011-2012, 10 300 places sont proposées soit dans des internats d’excellence ex nihilo (au nombre de 26 dans 19 académies) soit dans des établissements classiques qui réservent des places d’internat à des élèves qui relèvent de la mesure Internat d’excellence.
Le constat a été fait par la Commission européenne des difficultés d’intégration au monde du travail des enfants roms qui ont quitté trop tôt le système scolaire et ne dispose pas d’un niveau de formation initiative suffisant. Dans le cadre de la lutte contre le décrochage, la création de « micro-lycées », qui répond à la double démarche des dispositifs de la deuxième chance et des structures scolaires expérimentales, constitue également une solution appropriée pour les élèves décrocheurs en mesure de reprendre des études générales, après quelques semaines ou quelques années d’interruption de scolarité. L’objectif est d’implanter au moins un micro-lycée par académie.
Le réseau des Écoles de la deuxième chance en France a pour vocation l’intégration professionnelle et sociale des jeunes sortis du système éducatif sans diplôme. Ces écoles sont développées en priorité dans les quartiers les plus difficiles avec l’objectif d’accueillir jusqu’à 12 000 jeunes à l’horizon 2012. Ces programmes bénéficieront pleinement aux enfants roms.
Un dispositif étendu d’aides financières (auquel certaines collectivités territoriales contribuent également) bénéficie aux familles aux revenus les plus modestes dont les enfants sont scolarisés de l’école au lycée. À titre d’exemple, une allocation de rentrée scolaire est attribuée chaque année à plus de 3 millions de familles et concerne plus de 5 millions d’élèves âgés de 6 à 18 ans.
De surcroît, les élèves issus de milieux défavorisés peuvent bénéficier de divers types de bourses (comme les bourses de collège et de lycée ou les bourses au mérite), ainsi que des aides proposées par le fonds social pour les cantines ou les fonds sociaux collégien et lycéen. Les enfants roms, comme les autres enfants, bénéficient de ces programmes.
b) Cibler les instruments de la politique active du marché du travail sur les populations les plus éloignées de l’emploi
La situation économique et financière précaire à laquelle ils sont le plus souvent confrontés aboutit au fait que la majorité des populations marginalisées, dont les Roms, à la recherche d’un emploi rencontre fréquemment des difficultés à suivre de longues formations professionnelles et privilégie des formations courtes. Une meilleure prise en compte du niveau actuel de formation et des compétences professionnelles, en parallèle avec une meilleure participation aux programmes visant à l’acquisition de nouvelles compétences professionnelles permettraient d’augmenter une meilleure insertion sur le marché du travail. Dans cet esprit, doivent prioritairement être développées les formations en apprentissage.
L’ensemble de la politique d’emploi et de ses dispositifs mis en œuvre en France, ne visent pas de communauté ethnique particulière, mais répondent à des besoins particuliers des personnes au regard de leur éloignement du marché du travail ou de leur difficulté d’accès à l’emploi (besoin de qualification, chômeur de longue durée, senior demandeur d’emploi, jeunes de moins de 26 ans, publics résidant dans les quartiers de la politique de la ville etc.). Il n’existe pas en effet en France une approche dite « ethnique » des dispositifs d’insertion dans l’emploi, mais une approche selon les besoins des individus au regard de leur éloignement du marché du travail et visant à lutter contre les discriminations du marché du travail.
L’ensemble des dispositifs d’insertion professionnelle existants -contrats aidés, accès aux dispositifs d’insertion par l’activité économique - est donc ouvert à toute personne « marginalisée ». Parallèlement aux prestations contributives de chômage et de sécurité sociale, la France présente la particularité d’avoir mis en place de longue date des minima sociaux versés sous conditions de ressources et visant notamment à assurer un revenu minimum. Ces dispositifs évoluent conformément à la recommandation de l’Union européenne sur l’inclusion active, afin de mieux assurer le lien entre la garantie d’un revenu minimum et l’accès à l’emploi. Le risque d’une situation de chômage prolongée, pour les personnes les plus vulnérables, est en effet de les exclure irrémédiablement du marché du travail. Une politique d’inclusion sociale efficace se doit donc d’agir de front sur les deux instruments que sont les minima sociaux et le retour à l’emploi.
La France est engagée dans un processus de rationalisation et de simplification des prestations sociales en faveur des plus démunis. Depuis 2009, elle a mis en place le revenu de solidarité active (RSA), qui instaure la possibilité d’un cumul pérenne entre revenus d’activité et huit allocations. Cette démarche vise un équilibre entre la nécessaire sécurisation des ressources d’existence et un encouragement des bénéficiaires à l’exercice ou au retour à une activité professionnelle dans un but d’insertion sociale.
Un enjeu essentiel pour les années à venir sera d’assurer le plein accès de tous, notamment des Roms, à leurs droits sociaux. Pour cela, le gouvernement français sera notamment attentif, en lien avec les collectivités locales, à permettre la reconnaissance de ces droits via des procédures de domiciliation appropriées.
Les dispositifs d’insertion professionnelle sont consolidés dans le contexte d’une croissance du chômage : c’est pourquoi des actions d’accompagnement personnalisées, le cas échéant dans des structures adaptées, constituent une étape avant l’emploi pour les publics les plus en difficulté. Le contrat unique d’insertion (CUI) mis en place en 2010 est la refonte des contrats aidés préexistants. Il se décline dans le secteur marchand et le secteur non marchand.
L’accompagnement personnalisé des publics jeunes les plus éloignés de l’emploi est également fortement soutenu. Il est mis en œuvre par le réseau des missions locales, présent sur l’ensemble du territoire, en partenariat avec Pôle Emploi. La large palette des outils d’insertion à destination des jeunes et notamment l’offre de formation construite avec les régions ou les contrats en alternance sont également mobilisés.
D’ici 2013, plusieurs leviers devaient être activés pour faciliter l’insertion professionnelle de ces publics. Ainsi, la mise en œuvre de nouvelles dispositions qualitatives en vue d’améliorer la performance du contrat unique d’insertion en termes d’insertion durable dans l’emploi est à l’étude. La poursuite du plan de modernisation du secteur de l’insertion par l’activité économique, la mise en œuvre de la convention cadre signée en 2010 sur les publics prioritaires, issue de la réforme de la formation professionnelle, et la promotion de la politique conduite en faveur des chômeurs créateurs ou repreneurs d’entreprises, sont autant de pistes possibles pour le renforcement de l’accompagnement de ces publics.
Le gouvernement français encouragera l’émergence de nouveaux programmes de santé pour accroître le niveau de vaccination, développer une alimentation de qualité et favoriser des prises en charge qui reposent sur une relation de confiance entre les professionnels de santé et les patients.
i. Le programme régional d’accès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies (PRAPS) sera l’instrument privilégié pour engager des programmes innovants de santé publique à destination des Roms
La mise en œuvre de la réforme structurelle du système de santé prévoit l’adoption par les agences régionales de santé du projet régional de santé (PRS). Celui-ci est notamment composé de trois programmes obligatoires, au rang desquels figure le programme régional d’accès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies (PRAPS).
Élaboré pour la première fois en 1999 et confirmé par la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (Loi HPST), le programme régional d’accès à la prévention et aux soins doit permettre aux personnes les plus démunies d’accéder au système de santé et médico-social de droit commun. Il répond à l’objectif prioritaire de réduction des inégalités de santé et au deuxième des neuf principes de la loi de santé publique du 9 août 2004, selon lequel la définition des objectifs et l’élaboration des plans stratégiques doivent systématiquement prendre en compte les groupes les plus vulnérables en raison de leur exposition à des déterminants spécifiques.
En mars 2011, un guide méthodologique a été proposé aux agences régionales de santé (ARS) en vue de l’élaboration du programme régional d’accès à la prévention et aux soins. Il définit le cadre commun et propose des repères méthodologiques. Il rappelle l’importance d’une bonne articulation des politiques et des dispositifs sanitaires et sociaux destinés aux publics les plus démunis, gage du succès de ce programme porteur d’enjeux de transversalité.
Ce programme régional d’accès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies (PRAPS) sera l’instrument privilégié pour engager des programmes innovants de santé publique à destination des Roms. Dans ce cadre, le gouvernement français encouragera notamment les actions visant à accroître le niveau de vaccination, développer une alimentation de qualité et favoriser des prises en charge qui reposent sur une relation de confiance entre les professionnels de santé et les patients. L’accompagnement et l’éducation des filles mères est par exemple un sujet sur lequel un travail pourra être entrepris de façon plus approfondie.
ii. Le gouvernement français soutiendra des programmes associatifs locaux de médiation sanitaire ou pour la production de guides d’informations
Le ministère de la santé soutient financièrement des associations par la mise en œuvre d’actions spécifiques de médiation sanitaire et pour la promotion de la santé auprès de publics défavorisés, dont les Roms. La médiation sanitaire a parfois visé plus particulièrement les femmes et les jeunes enfants résidant sur le territoire français dans des squats et bidonvilles. À titre d’exemples, quatre sites ont bénéficié de ces actions avec l’appui d’associations locales depuis 2009 : Bobigny, Nantes, Lille et Fréjus. Dans ce cadre, une méthodologie spécifique a été élaborée en vue de former les médiateurs locaux et de les recruter. A terme, leur action menée auprès des femmes et des enfants, roms pour la plupart et en direction des professionnels de santé et des acteurs institutionnels doit permettre de :
- faciliter l’accès aux soins et la prise en charge médicale de ces personnes par les services de santé de droit commun et les politiques de santé locales ;
- réduire le décalage entre l’offre médicale et la réalité de vie des personnes en favorisant une meilleure connaissance du public cible par les acteurs de santé ;
- favoriser un accès à la prévention et à l’éducation pour la santé pour ces personnes.
d) Développer les dispositifs d’accès et de maintien dans le logement des personnes sans abri ou mal logées
La loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable (DALO) et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale a marqué un tournant significatif pour la politique d’accès au logement à destination des ménages les plus modestes. L’effectivité du DALO repose sur une politique d’augmentation de l’offre et de gestion efficiente du parc de logement social. Ce socle législatif a été complété par la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion du 25 mars 2009 puis par la stratégie nationale d’hébergement et de l’accès au logement des personnes sans abri (2009-2012).
Dans le cadre de cette stratégie, de nouveaux outils se déploieront d’ici 2013, afin d’offrir une nouvelle structuration du dispositif d’accueil, d’hébergement et d’insertion des sans-abris. On peut citer en premier lieu la création d’un service intégré de l’accueil et de l’orientation qui coordonne, dans les départements, l’ensemble des acteurs de l’hébergement et du logement. De même, la planification territoriale de l’offre d’accueil, d’hébergement et d’insertion des personnes sans abri, engagée en décembre 2009, s’est traduite par l’élaboration en 2010 des Plan départementaux pour l’accueil, l’hébergement et l’insertion des personnes sans abri ou mal logées (PDAHI) en concertation avec les acteurs locaux. Les PDAHI, se structurent naturellement autour des trois axes fondateurs de la stratégie nationale pour l’hébergement et l’accès au logement : s’inscrire dans l’objectif du logement d’abord ; organiser l’offre pour mieux prendre en compte les besoins des personnes démunies ; améliorer l’orientation et assurer la continuité de la prise en charge des personnes qui sollicitent le dispositif d’hébergement.
D’ores et déjà, les acquis de ces premiers travaux sont la démarche partenariale et la déclinaison sur chaque territoire de la stratégie nationale au regard des besoins locaux. En 2011, s’engage une phase d’approfondissement afin d’établir une feuille de route partagée par l’ensemble des acteurs au niveau régional et départemental pour les années à venir (priorisation des actions à engager, définition des objectifs quantifiés et atteignables).
Certaines collectivités volontaires ont apporté une solution à la situation de précarité souvent rencontrée par des citoyens de l’Union européenne, le plus souvent d’origine rom, qui s’installent, sans autorisation, sur des terrains non aménagés.
En région Ile-de-France, le département de Seine St Denis qui compte plusieurs campements édifiés spontanément par des familles majoritairement roms, a favorisé le développement de villages d’insertion pour ceux qui sont appelés à vivre durablement en France. Les conditions de vie très précaires des familles posaient non seulement des problèmes de sécurité et d’ordre public mais également d’insalubrité et de santé publique. Plusieurs villages d’insertion ont été ouverts à Saint Denis, Aubervilliers, Saint Ouen, Bagnolet et Montreuil. Cela a nécessité un fort investissement de l’État en collaboration avec les collectivités locales concernées. Cette collaboration a permis de concrétiser plusieurs projets pour l’insertion durable des familles aussi bien sur le plan économique et social que sur le plan du logement.
Tout d’abord, il a été nécessaire de mettre en œuvre une première étape permettant leur accueil temporaire. L’État est intervenu en finançant des « Maîtrises d’Œuvre Urbaine et Sociale » (MOUS) pour effectuer le diagnostic social des familles et la recherche des solutions de logement durable. En 2010, six MOUS ont été engagées en Seine Saint Denis pour ces villages d’insertion, pour un montant total de 844 000 euros.
Cette même année 2010 ont été financés à Bordeaux, 40 chalets en bois pour reloger des populations marginalisées dont des Roms, ainsi qu’une maîtrise d’œuvre urbaine et sociale à hauteur de 150 000 euros pour l’établissement d’un diagnostic concernant une population estimée entre 400 et 600 personnes.
Deux dossiers de financement FEDER, pour une enveloppe totale de 470 184 euros, ont été validés lors du Comité Régional de Programmation le 8 avril 2011 pour le financement des 40 chalets.
Les villes de Lille, Marseille et Lyon réfléchissent également à la réalisation de villages d’insertion.
La protection des droits fondamentaux des personnes est à la fois un objectif et une finalité des politiques publiques : ainsi, la législation française, issue de la transposition, en 2006, de la directive du 29 avril 2004 relative « au titre de séjour délivré aux ressortissants de pays tiers qui sont victimes de la traite des êtres humains ou ont fait l’objet d’une aide à l’immigration clandestine et qui coopèrent avec les autorités compétentes », a créé la possibilité d’admettre au séjour en France des ressortissants étrangers dans le cadre de la lutte contre la traite des êtres humains. Sont notamment concernées les victimes de la prostitution, de l’esclavage domestique, du travail forcé, de la mendicité organisée ou du trafic d’organes. Ce dispositif est très soucieux d’assurer notamment la protection des enfants mineurs et la défense des droits des femmes.
Ainsi, dès lors qu’un ressortissant étranger a été identifié comme victime par un service de police ou de gendarmerie, qu’il accepte de coopérer avec les autorités administratives et judiciaires, en témoignant ou en portant plainte contre les auteurs des faits dénoncés, et qu’il a rompu tout lien avec les auteurs présumés des infractions, il bénéficie d’une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale », ouvrant droit au travail. Ce titre est renouvelable pendant toute la durée de la procédure judiciaire. Il peut être retiré si la victime reprend contact avec le milieu qui l’a exploitée. Si les auteurs des infractions sont définitivement condamnés, le préfet peut délivrer à la victime une carte de résident. S’agissant des étranger mineurs victimes d’infractions, ils bénéficient lorsqu’ils accèdent à la majorité, des mêmes conditions d’admission au séjour. La carte de séjour temporaire peut également être accordée à ceux âgés d’au moins seize ans, souhaitant exercer une activité salariée ou suivre une formation professionnelle.
Outre le rôle reconnu aux associations d’aide aux victimes, les victimes titulaires de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » bénéficient de l’ouverture des droits à une protection sociale, de l’allocation temporaire d’attente, d’un accompagnement social, d’un accès aux structures d’hébergement et d’une protection policière pendant la durée de la procédure pénale. Ces dispositions sont applicables aux ressortissants des États membres soumis à régime transitoire, sans d’ailleurs que les Roms fassent l’objet de dispositions ou de mentions particulières.
Le précédent Président de la République avait souhaité que les scientifiques soient consultés pour proposer une méthode de mesure de la diversité des origines qui réunisse un large accord et permette de suivre les progrès de la lutte contre les discriminations, sans privilégier la lecture ethnique. François Héran (55) a été chargé de constituer un comité pour la mesure de la diversité et des discriminations (Comedd), qui a remis son rapport le 5 février 2010. Ce comité comprenait vingt-cinq personnalités compétentes dans les domaines les plus divers : sciences sociales, statistique publique, magistrature, syndicalisme, mouvement associatif, journalisme, gestion des ressources humaines, administration du logement social, administration culturelle. Ce comité suggère la mise en place d’un observatoire de la discrimination au sein de la Haute autorité de lutte contre les discriminations (Halde), organisme indépendant mis en place en France en application des directives européennes sur la lutte contre les discriminations et désormais remplacée par le défenseur des droits, autorité constitutionnelle indépendante créée par la loi constitutionnelle du 28 juillet 2008, complétée par la loi organique du 29 mars 2011. Le Défenseur des droits reprend désormais les missions de la Halde, ainsi que celles du Médiateur de la République, du Défenseur des enfants, et de la Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité (CNDS). Cette autorité dispose de pouvoirs renforcés afin de veiller à la protection des droits et des libertés et de promouvoir l’égalité.
Le comité pour la mesure de la diversité et des discriminations (Comedd) précité, propose également d’enrichir les recensements existants par des investigations sur la nationalité et le pays de naissance de leurs parents. Les autres compléments d’enquête - sondages spécialisés, testings patronymiques, observations expérimentales in situ, enquêtes sur le ressenti d’appartenance - doivent être soumis au contrôle de la CNIL et être munies de solides garanties (consentement, anonymat strict). La mesure des discriminations devant se faire en lien avec les inégalités sociales, il s’agit de disposer de données représentatives sur la trajectoire sociale des enfants d’immigrés à l’échelle des bassins d’emploi. En outre, il s’agit de créer un outil spécifique aux entreprises et aux collectivités. Sur le modèle du « rapport de situation comparé » mis en œuvre par la loi sur l’égalité professionnelle entre hommes et femmes, le rapport préconise que soit défini un questionnaire « normalisé », qui serait rempli par les salariés des entreprises, administrations et collectivités d’au moins 250 salariés, « avec une garantie totale d’anonymat ».
En effet, les données ethniques objectives ne peuvent faire l’objet en France d’une collecte à des fins statistiques. Le Conseil constitutionnel a jugé contraire à l’article 1 de la Constitution la collecte de données ethniques objectives (56). La collecte de données personnelles est encadrée en France par la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, telle que modifiée en 2004. Cette loi a largement inspiré la convention 108 du Conseil de l’Europe du 28 janvier 1981 « pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé de données à caractère personnel ». Elle a aussi servi de fondement aux directives communautaires sur le sujet et notamment dans la reconnaissance de certaines catégories de données dites sensibles. Les données « qui font apparaître directement ou indirectement les origines raciales ou ethniques » (article 25 de la loi de 1978 telle que modifiée en 2004) ou « qui révèlent l’origine raciale ou ethnique » (article 8 de la directive 95/46) font partie de cette catégorie. Des dérogations existent dans des cas limitativement énumérés à l’article 8 de la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995. La collecte à des fins statistiques ne fait pas partie des finalités qui justifient une dérogation. Se raccrocher à d’autres cas semble contraire à la lettre de ce texte. Le point 4 de cet article prévoit en effet que « les États membres peuvent prévoir, pour un motif d’intérêt public important, des dérogations autres que celles prévues par cet article » mais on peut légitimement considérer que s’agissant d’un texte conçu pour assurer une protection adéquate des individus, la notion de « motif d’intérêt public important » doit être interprétée strictement et ne recouvre pas la collecte d’informations statistiques. C’est l’interprétation de la Commission Nationale Informatique et Liberté en France (CNIL), dans le cadre de la loi précitée du 6 janvier 1978 (57). La CNIL semble ainsi admettre la constitution d’enquêtes qui, parce qu’il est procédé à une anonymisation à bref délai, garantissent la confidentialité et l’anonymat des personnes interrogées (dans ces cas les données ne sont plus des données à caractère personnel et sortent du champ d’application de la loi de 78 et de la directive 95/46). Elle exige toutefois pour cela qu’un certain nombre de garanties soient fournies.
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 17 juillet 2012 par le Conseil d’État, dans les conditions prévues par l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Jean-Claude P. Cette question était relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions des articles 2 à 11 de la loi du 3 janvier 1969 relative à l’exercice des activités ambulantes et au régime applicable aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe.
Dans sa décision du 5 octobre 2012, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions de la loi du 3 janvier 1969 instaurant un carnet de circulation ainsi que celles imposant aux personnes sans domicile ni résidence fixe, trois ans de rattachement ininterrompu dans la même commune pour être inscrites sur les listes électorales. Il a, pour le surplus, déclaré les dispositions de la loi du 3 janvier 1969 conformes à la Constitution.
Décision du Conseil constitutionnel no 2012-279 QPC du 5 octobre 2012
I - Les dispositions de la loi du 3 janvier 1969 instaurant un carnet de circulation sont contraires à la Constitution
L’article 5 de la loi de 1969 institue un carnet de circulation. Celui-ci doit être détenu par les personnes dépourvues de domicile ou de résidence fixe depuis plus de six mois, qui logent de façon permanente dans un véhicule, une remorque ou tout autre abri mobile et qui ne justifient pas de ressources régulières leur assurant des conditions normales d’existence. Ces personnes doivent faire viser tous les trois mois par l’autorité administrative ce carnet de circulation. Est punie d’une peine d’un an d’emprisonnement la personne circulant sans ce carnet de circulation. Le Conseil constitutionnel a jugé que ces diverses dispositions sont contraires à la Constitution.
La loi de 1969, en imposant un titre de circulation à des personnes sans domicile ni résidence fixe de plus de six mois, a poursuivi des fins civiles, sociales, administratives ou judiciaires. Prévoir un carnet de circulation particulier pour des personnes ne justifiant pas de ressources régulières est sans rapport avec ces finalités et donc contraire à la Constitution. De même imposer un visa tous les trois mois de ce carnet et punir d’une peine d’un an d’emprisonnement les personnes circulant sans carnet porte à l’exercice de la liberté d’aller et de venir une atteinte disproportionnée au regard du but poursuivi.
L’annulation de ces dispositions prend effet immédiatement, dès la publication de la décision du Conseil constitutionnel.
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II - Les dispositions de la loi du 3 juin 1969 imposant aux personnes sans domicile ni résidence fixe trois ans de rattachement ininterrompu dans la même commune pour être inscrites sur les listes électorales sont contraires à la Constitution.
Le Conseil constitutionnel a une jurisprudence particulièrement vigilante, ancienne et constante, sur les mesures qui restreignent l’exercice de leurs droits civiques par les citoyens. Il en a fait application en l’espèce pour juger qu’en imposant pour l’inscription sur les listes électorales un délai de trois ans de rattachement ininterrompu, les dispositions de la loi de 1969 étaient contraires à la Constitution. L’annulation de ces dispositions prend effet immédiatement, dès la publication de la décision du Conseil constitutionnel.
III - Les autres dispositions de la loi de 1969 contestées sont conformes à la Constitution.
Le Conseil constitutionnel a jugé que l’existence et les règles de visa de titres de circulation applicables aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe ne sont pas, en elles-mêmes, contraires au principe d’égalité et à la liberté d’aller et de venir. Il s’agit pour l’État de pallier la difficulté de localiser les personnes qui se trouvent sur son territoire et qui ne peuvent être trouvées au moyen du domicile ou de la résidence, à l’instar de la population sédentaire. Le Conseil a ainsi jugé qu’en imposant aux personnes précitées d’être munies d’un titre de circulation, le législateur a entendu permettre, à des fins civiles, sociales, administratives ou judiciaires, l’identification et la recherche de ceux qui ne peuvent être trouvés grâce à un domicile ou à une résidence fixe d’une certaine durée, tout en assurant, aux mêmes fins, un moyen de communiquer avec ceux-ci.
En outre, le Conseil a jugé que la distinction opérée par la loi entre les personnes qui ont un domicile ou une résidence fixe de plus de six mois et celles qui en sont dépourvues repose sur une différence de situation et n’est donc pas contraire à la Constitution.
Enfin, le Conseil a jugé que l’obligation de rattachement à une commune ne restreint ni la liberté de déplacement des intéressés, ni leur liberté de choisir un mode de logement fixe ou mobile, ni celle de décider du lieu de leur installation temporaire. De plus, il a estimé qu’elle ne restreint pas leur faculté de déterminer un domicile ou un lieu de résidence fixe pendant plus de six mois et qu’elle n’emporte pas davantage obligation de résider dans la commune dont le rattachement est prononcé par l’autorité administrative. L’obligation d’avoir une commune de rattachement est une obligation purement administrative qui ne porte pas atteinte aux libertés invoquées par le requérant.
4. Le renforcement d’une stratégie interministérielle : l’opportunité de développer des initiatives entre acteurs sur une base conventionnelle.
Suite au changement de majorité gouvernementale, le Premier ministre a adopté la circulaire du 26 août 2012. Une véritable politique interministérielle pour l’accompagnement des Roms a été mise en place, avec une équipe de cinq personnes à temps plein.
La circulaire du 26 août 2012, relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites, indique les lignes directrices à suivre par les préfets pour tenter de mettre fin aux évacuations sans solution de relogement. Le Premier ministre a confié une mission interministérielle à l’inspection générale de l’administration (IGA), l’inspection générale des affaires sociales (IGAS), au conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et à l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR), avec pour mandat d’évaluer les conditions de mise en œuvre de ces instructions et de proposer des modalités d’évolution et d’amélioration, notamment à partir des bonnes pratiques et des expérimentations conduites localement.
Entre janvier et mars 2013, la mission a analysé, sur le terrain, les situations de 14 départements et recueilli les retours d’expérience des principaux acteurs impliqués dans la gestion des dossiers locaux. Après avoir constaté les difficultés inhérentes à la situation précaire des campements, la mission a examiné la coordination des acteurs et la mise en œuvre des mesures préconisées par la circulaire du 26 août 2012.
Cette évaluation interministérielle des dispositifs d’accompagnement des personnes présentes dans les campements, réalisée en mai 2013, a adopté les conclusions suivantes.
a) Les mesures prises pour anticiper les évacuations : la nécessité de professionnaliser les diagnostics
Le pilotage du comité de suivi mis en place par les préfets pour coordonner l’action de l’État et de ses partenaires apparaît inégal en raison de la disparité des moyens mis en œuvre par les administrations et de l’adhésion plus ou moins affirmée des collectivités locales à la conduite de projets d’insertion. Dans l’ensemble, la mission a constaté que la volonté d’agir des intervenants - pouvoirs publics, collectivités, associations et ONG - ne saurait être mise en cause. Néanmoins, certains dispositifs généraux ne sont pas adaptés ou s’avèrent peu efficients. Par ailleurs, dans certains départements, on relève un déficit de connaissance des publics Roms à l’origine d’une forme de passivité ou d’un sentiment de blocage devant les actions à entreprendre.
La première étape, qui est celle des diagnostics, dont la circulaire réaffirme l’importance, est diversement appréhendée. Le passage d’une approche antérieurement dominée par les problématiques d’ordre public et d’éloignement à un diagnostic plus global des situations individuelles et familiales ne peut être acquis sans un temps d’adaptation, voire d’apprentissage.
Selon les sujets, cette progression est plus ou moins aisée. Si les diagnostics relatifs à la santé ne semblent pas poser de difficulté majeure, la mission a relevé que le « diagnostic social », celui qui permet de prendre la mesure des situations personnelles et familiales, demeure difficile à réaliser sans une solide expérience des populations en grande précarité. La professionnalisation des intervenants est nécessaire.
Pour la mission, ce sont les diagnostics relatifs à l’emploi qui demeurent les plus embryonnaires. Cela manifeste une difficulté du service public de l’emploi à accompagner, en particulier dans le contexte économique actuel, un public qui cumule différents handicaps, dont assez souvent celui de l’absence de maîtrise de la langue française.
b) L’évaluation des dispositifs de droit commun : des situations fragiles, des prises en charge partielles
L’analyse de l’accès aux dispositifs de droit commun révèle des situations très fragiles et des prises en charge partielles. La vision qui s’en dégage est marquée par une grande hétérogénéité dans le recours effectif aux dispositifs existants.
S’agissant du droit à la santé, la mission a relevé que, comme pour d’autres publics caractérisés par une grande précarité, l’accès effectif au système de soins demeurait complexe et long, même avec un accompagnement social structuré. Si la mission n’a pas, par exemple, rencontré de cas de refus d’ouverture de droits à l’Aide Médicale d’État (AME), elle constate des délais majoritairement assez longs.
Dans le domaine de la scolarisation, la situation peut être considérée comme mieux appréhendée par les services compétents, notamment pour ce qui concerne l’accès à l’instruction dans le primaire, mais avec de fortes disparités selon les communes dans les départements observés. Formellement, les inscriptions scolaires sont obtenues dans la plupart des cas, mais la mission a constaté des oppositions manifestes de la part d’élus allant jusqu’au refus d’inscription. Ceci constitue sans doute un des points de vigilance majeurs.
Par ailleurs, la réalité des parcours scolaires se heurte à des obstacles importants. Il peut s’agir de difficultés dues à l’éloignement des écoles, au déséquilibre des capacités d’accueil, au manque de personnels disposant des compétences nécessaires à la prise en charge d’élèves non francophones. La mission a observé également le risque de blocage que pouvait entraîner la prise en charge de groupes importants et la nécessité de veiller à prévenir la tentation d’organiser des « classes à caractère ethnique » qui sont contraires aux principes de l’École républicaine. Enfin, et ceci doit également être rappelé, le travail d’accompagnement social doit aussi servir à faire évoluer l’appréhension par les familles elles-mêmes de ce qu’est l’obligation d’assiduité scolaire et de son caractère impératif.
S’agissant du marché de l’emploi, la mission note que l’accès effectif de ces publics est très inégal. Cette situation s’explique par un niveau de compétences assez faible par rapport aux exigences des employeurs. Les métiers déclarés dans le pays d’origine sont le plus souvent ceux d’ouvrier agricole, du bâtiment, d’artisan, de mécanicien. Souvent, les intéressés ne sont pas en mesure de présenter les certifications correspondantes, car ils ont appris et travaillé de façon informelle ou n’ont pas pu conserver leurs documents. La différence des standards de qualification entraîne dans la plupart des cas la nécessité d’une mise à niveau par une formation. Cette situation est aggravée par l’état du marché de l’emploi qui pénalise lourdement les publics peu ou pas qualifiés. De ce fait, dans les cas où les intéressés obtiennent des contrats de travail, ceux-ci sont le plus souvent des contrats à durée déterminée, en dépit de l’appui des associations qui les accompagnent.
La difficulté à obtenir une autorisation de séjour, nécessaire pour la délivrance de l’autorisation de travail, même lorsque l’intéressé fait l’objet d’un parcours d’insertion accompagné, est également caractéristique. Il faut signaler aussi le faible positionnement des services du travail et de l’emploi sur le public Rom, ainsi que la réticence de ces services à délivrer des autorisations de travail pour ces publics dans certains départements. La mission, sauf dans de rares cas, n’a pas été en mesure d’observer d’évolution notable dans ce domaine, même après l’élargissement de la liste des métiers en tension et l’ouverture des contrats aidés, alors que l’application des mesures transitoires cessera, en tout état de cause, à la fin de l’année 2013.
Une partie de ces populations est désireuse de continuer à exercer dans un cadre légal, mais non salarié, les activités de ferraillage, de mécanique et de bâtiment. Une action autour de l’aide à la création d’entreprise ou sous le statut de travailleur indépendant serait de nature à leur permettre de développer une activité économique régulière. La majorité des associations privilégient néanmoins l’insertion par l’emploi salarié, au moins dans un premier temps.
À l’issue de l’évacuation des campements, les dispositifs d’accueil d’urgence sont peu adaptés à la structure des familles et les difficultés des structures classiques ne permettent pas de trouver, dans la plupart des cas, un hébergement au-delà de quelques jours. Il arrive également qu’aucune solution de relogement ne soit proposée en raison de la saturation des dispositifs.
Un nombre significatif de collectivités locales offrent des alternatives à la prise en charge des populations Roms et proposent des parcours d’insertion en partenariat avec les associations et organismes sociaux. On dégage trois types d’opérations :
- l’accueil sur des sites mis à disposition par les collectivités locales, avec délibération du conseil municipal et dans le cadre d’une convention d’occupation temporaire, après l’évacuation d’un campement ;
- le relogement dans des bâtiments désaffectés à l’initiative des associations ou de l’Etat, dans l’attente d’une solution plus satisfaisante, site d’insertion ou offre dans le parc social diffus ;
- l’accueil sur un site d’insertion, dans le cadre d’une opération de type maîtrise d’œuvre urbaine et sociale (MOUS), qui permet l’accompagnement social des familles et le suivi de leur parcours en matière d’accès aux droits.
Ainsi, plusieurs initiatives locales ont permis d’apporter une réponse pragmatique pour sortir de la simple « addition » de dispositifs de droit commun et mettre en œuvre une approche intégrée, depuis le diagnostic jusqu’à l’accès à l’emploi et au logement, à travers un accompagnement social dans la durée. Les actions les plus complètes sont les dernières citées : connues sous le nom de site ou de « village » d’insertion, de site de stabilisation, adossées à une opération de type maîtrise d’œuvre urbaine et sociale (MOUS), ou simplement conduites dans le cadre de conventions, elles existent dans plusieurs des départements visités par la mission, souvent depuis plusieurs années. La plupart d’entre elles ont été mises en place à l’initiative de collectivités territoriales, s’appuyant sur des opérateurs associatifs, mais certaines l’ont été sous l’impulsion de l’État.
Ces dispositifs se fondent, à partir d’un diagnostic social, sur la volonté des personnes prises en charge de s’insérer durablement, au terme de leur parcours, dans la société française.
Il ne s’agit donc pas simplement de traiter la question sous l’angle de l’urgence, qui doit bien sûr être prise en compte, mais bien d’une logique d’insertion et d’intégration. Ces éléments sont essentiels dans la mesure où ils permettent de reconsidérer clairement la question de l’installation au regard d’un véritable projet de vie en France. Les expériences les plus anciennes montrent bien que le concept lui-même peut fonctionner, dès lors qu’il repose sur une relation fondée sur des droits et obligations reconnus de part et d’autre.
Deux conditions préalables sont en effet réalisées :
- les associations accompagnent les familles ou les personnes isolées dans un parcours d’accès aux droits (santé, scolarité, emploi) qui leur permet de s’adapter et d’être orientées vers un logement pérenne ; elles ont une convention d’objectifs avec la ou les collectivités partenaires ;
- les familles, qu’elles aient été choisies ou non après un diagnostic social, signent un engagement à appliquer des règles telles que la scolarisation des enfants et le respect de prescriptions pour la vie du site qui garantit leur adhésion au projet et met en jeu leur responsabilité.
Dans la majorité des cas, à l’exception de quelques ménages, ces processus recueillent une forte adhésion des intéressés et les échecs apparaissent limités, à l’exception d’un allongement de la durée de résidence quand un emploi n’a pu être trouvé, notamment pour les raisons exposées ci-dessus. Généralement, les familles parviennent à régler leur situation et accèdent à un logement au bout de deux à trois ans. Le rapport expose en détail des expériences conduites en province et en région parisienne.
Les difficultés de montage de ces opérations tiennent généralement à des facteurs externes :
- négociations complexes avec les partenaires publics pour la recherche de terrains disponibles ;
- réticence des élus en raison du faible seuil d’acceptabilité sociale de leurs administrés ;
- insuffisante mobilisation des financements, comme les fonds européens, pour la mise en œuvre.
L’amélioration de la connaissance concernant ces populations constitue un préalable indispensable. Le manque de données prive actuellement les autorités publiques d’indicateurs pour conduire leur action, et contribue à alimenter les controverses sur une question qui reste polémique. Il n’y a pas de consensus sur les finalités d’une action publique dans ce domaine. Le développement des enquêtes et des études pour recueillir des données objectives, l’établissement d’éléments de diagnostic partagés au niveau local et national, l’évaluation des actions menées doivent être considérés comme des priorités. Ce n’est que sur cette base que les pouvoirs publics pourront développer une approche pragmatique visant à organiser et faire converger les efforts de tous les acteurs.
L’addition des mesures de droit commun ne suffit pas à garantir un accès aux droits correct des populations Roms, souvent peu familiarisées avec les circuits administratifs. La circulaire du 26 août 2012 en instaurant un comité de suivi a lancé une approche partenariale qui doit être beaucoup plus globale. Pour améliorer la situation constatée par la mission, des lignes directrices peuvent être fixées :
- l’État devrait définir plus clairement sa feuille de route vis-à-vis de populations qui ont la particularité d’être des ressortissants européens et ne bénéficient pas, de ce fait, du droit d’asile, mais présentent souvent les mêmes caractéristiques que les demandeurs d’asile et peuvent connaître les mêmes situations de grande précarité que les ressortissants de pays tiers immigrant en France ; la majeure partie des interlocuteurs rencontrés ont souhaité que le positionnement des pouvoirs publics soit plus clair en ce sens ;
- les autorités doivent faire appliquer sans réserve les droits essentiels attachés à la scolarisation et à la santé.
Le principe de scolarisation des enfants de familles présentes dans les campements ne doit souffrir aucun manquement. C’est un droit inaliénable de l’enfant et il doit être une priorité de l’action des pouvoirs publics en accord avec l’esprit de l’École de la République.
Même si les conditions de déroulement d’une scolarité normale ne sont pas réunies dans les campements, l’inclusion dans les classes ordinaires doit constituer la modalité principale de scolarisation et demeurer en tout état de cause le but à atteindre, tout en recourant temporairement à des aménagements et à des dispositifs particuliers. La double entrée - scolarisation des enfants et alphabétisation des parents observée avec intérêt par la mission - devrait être encouragée et systématisée dans tous les projets de contractualisation mis en place sur les sites d’insertion.
L’amélioration de la condition sanitaire de ces populations passe par un meilleur accès aux droits et aux soins et s’inscrit donc dans le cadre plus général de la gestion des dispositifs de l’AME, de la CMU et d’accès aux soins des populations précaires qui a fait l’objet de recommandations, notamment dans divers rapports antérieurs de l’inspection générale des affaires sociales. Il s’agit en particulier de développer des actions vers et dans les campements, notamment autour de la santé des femmes et des enfants.
Ensuite, l’État et les collectivités territoriales ne peuvent agir pour ces sujets que dans le cadre d’une coopération permettant de définir des lieux d’accueil et des méthodes de prise en charge partagées. Le face à face, trop souvent constaté, de collectivités de plus en plus réticentes à s’engager et des préfets de département désireux de débloquer les situations de campements illicites impossibles à pérenniser, doit être dépassé. Un espace de concertation et d’arbitrage plus large doit être trouvé, notamment au niveau régional, encore trop peu utilisé. Une plate-forme de travail associant les pouvoirs publics, l’État et les collectivités, devrait être située à ce niveau. Cette évolution est d’autant plus nécessaire en Ile-de-France où les départements confrontés à la circulation des populations évacuées des campements ne parviennent plus à trouver de solution au sein de leur espace territorial.
Pour faciliter l’insertion des populations concernées qui ont un projet de vie en France, le choix des moyens appartient aux pouvoirs publics, en lien avec les opérateurs désignés, mais des outils permettant de fédérer ces actions sont nécessaires. Ce peut être la mise en place de plates-formes locales d’accueil, d’orientation et d’information, permettant d’identifier la population intéressée dans un département ou à cheval sur plusieurs départements dans les régions importantes (Ile-de-France, Nord). À cet égard, le projet d’une association opératrice d’insertion en Seine-Saint-Denis est exposé dans le rapport. Localement, ce projet a recueilli l’accord des autorités de l’État et des collectivités territoriales.
Une meilleure identification des populations pour améliorer leur connaissance est souhaitable. Les collectivités locales peuvent jouer un rôle dans cette optique et leur expérience devrait être mieux et plus largement partagée. La définition d’un cadre pour l’accueil et l’intégration des Roms, qui pourrait être élargi aux citoyens européens en situation de précarité et présentant un projet de vie en France, pourrait être proposée, notamment pour l’accès à la langue, à la formation, et à l’apprentissage de la citoyenneté.
La mission a également constaté sur le terrain la multiplication des opérations de coopération menées par les associations d’insertion pour faciliter le retour dans leur pays des personnes qui ne peuvent pas réaliser celui-ci sans appui et ne sont pas en mesure de s’établir dans un autre pays européen : familles séparées, personnes âgées ou isolées. Cet appui pour un retour est un parallèle à l’appui des familles et des personnes qui n’envisagent pas de retour et dont tous les liens familiaux se trouvent dans les pays européens autres que leur pays d’origine. Il existe donc bien des situations et des projets d’avenir très différents qui peuvent être mieux cernés à l’issue du travail social.
Le travail de la France dans le cadre de la coopération décentralisée et du groupe de réflexion des ambassadeurs européens sur la question des Roms va dans le sens de ces initiatives. Établir les minorités Roms dans leur pays d’origine nécessite de réaliser des actions d’appui aux collectivités locales et aux territoires d’où elles viennent, eux-mêmes désireux de développer cette coopération, mais implique aussi la mise en œuvre effective des programmes européens d’inclusion destinées à ces minorités dans leurs pays, afin de les intégrer pleinement. Cet aspect se situe aux limites de l’étude demandée à la mission, mais il est important pour le déterminisme des situations, de nombreuses familles effectuant encore des allées-et-venues régulières entre pays d’accueil et pays d’origine.
DEUXIÈME PARTIE : LA COMPLEXITÉ DES CIRCUITS DE FINANCEMENT MOBILISABLES POUR LES ROMS
I. LA FAIBLE EFFICACITÉ DES FONDS EUROPÉENS
A. La nécessité de s’appuyer sur des ressources nationales et de mobiliser effectivement les ressources disponibles au niveau européen
Selon la Commission européenne (58), la mise en œuvre et la réussite des stratégies nationales d’intégration des Roms passent nécessairement par une allocation efficace et suffisante de ressources nationales. Le financement de l’Union européenne ne peut certainement pas résoudre à lui seul les difficultés des populations roms ; la Commission rappelle toutefois qu’il existe à l’heure actuelle une programmation de 26,5 milliards d’euros de concours financier de l’Union européenne pour soutenir les efforts des États membres dans le domaine de l’intégration sociale, comprenant l’aide à la population rom (59).
En avril 2010, la Commission (60) a invité les États membres à garantir aux Roms l’accès aux instruments financiers existants de l’Union européenne, et notamment aux Fonds structurels et au Fonds européen agricole pour le développement rural. Cette approche a été approuvée par le Conseil en juin 2010 (61). Or la plupart des États membres n’utilisent pas suffisamment à l’heure actuelle les crédits de l’Union européenne disponibles pour les besoins des Roms.
La Commission européenne a invité les États à progresser dans le cadre de l’actuelle période de programmation (2007-2013).
Afin de surmonter les lacunes dans le développement de stratégies appropriées et de mesures efficaces pour mettre ces stratégies en œuvre lorsqu’elles existent, les États membres sont invités à modifier leurs programmes opérationnels cofinancés par les Fonds structurels et le Fonds européen agricole pour le développement rural, de manière à mieux soutenir les projets spécifiquement axés sur les Roms et à les aligner sur leurs stratégies nationales d’intégration des Roms.
La Commission examinera, avec les États membres, les changements qu’ils apporteront à leurs programmes opérationnels pour tenir compte des nouveaux besoins, simplifier l’exécution et accélérer la mise en œuvre des priorités, y compris l’utilisation de l’approche intégrée en matière de logement, prévue dans le règlement modifié concernant le Fonds européen de développement régional (62). La Commission examinera dans les meilleurs délais les demandes de modification des programmes qui sont en rapport avec les stratégies nationales d’intégration des Roms.
Sur les montants significatifs au titre de l’assistance technique de l’Union européenne dont ils disposent (4 % de l’ensemble des Fonds structurels), les États membres n’avaient utilisé en moyenne que 31 % de leur allocation prévue jusqu’à la fin 2009. S’ils ne sont pas utilisés, ces montants seront perdus. Lors de la conception de leurs stratégies nationales d’intégration des Roms, les États membres devraient dès lors recourir davantage à l’assistance technique (63) de l’Union européenne pour améliorer leurs capacités de gestion, de suivi et d’évaluation, en ce qui concerne également les projets spécifiquement axés sur les Roms. Cet instrument pourrait éventuellement être utilisé également par les États membres pour avoir accès au savoir-faire des organisations régionales, nationales et internationales lors de la préparation, de la mise en œuvre et du suivi des interventions.
Pour surmonter les questions liées à la capacité, telles que l’absence de savoir-faire et de capacité administrative des autorités gestionnaires et la difficulté de combiner des fonds pour soutenir les projets intégrés, la Commission invite les États membres à envisager de confier la gestion et la mise en œuvre de certaines parties de leurs programmes à des instances intermédiaires, telles que les organisations internationales, les organes de développement régionaux, les églises et les organisations ou les communautés religieuses, ainsi que les organisations non gouvernementales ayant une expérience avérée dans l’intégration des Roms et une connaissance des acteurs sur le terrain (64). À cet égard, le réseau du Comité économique et social européen pourrait être un instrument utile (65).
Les États membres devraient aussi envisager d’utiliser l’instrument européen de microfinancement Progress (66), lequel dispose d’un financement total de 100 millions d’Euros pour la période 2010-2013. La Commission estime que ce montant peut être porté à plus de 500 millions d’Euros en microcrédits sur les huit années à venir. Les communautés de Roms constituent l’un des plus grands groupes relevant de cet instrument (67). Donner aux communautés roms l’occasion de commencer des activités productives autonomes pourrait motiver les personnes impliquées à participer activement à un travail régulier, réduire la dépendance à l’égard de l’assistance sociale et inspirer les générations futures.
Pour concevoir et mettre en œuvre leurs stratégies nationales d’intégration des Roms, les États membres sont encouragés à se fonder sur l’initiative européenne en faveur de l’innovation sociale, que la Commission entend lancer en 2011, comme annoncé dans l’initiative phare « Plateforme européenne contre la pauvreté et l’exclusion sociale ». Cette approche basée sur l’innovation peut contribuer à améliorer l’efficacité des politiques d’intégration sociale.
La Commission européenne invite également les États à progresser après 2013.
Les stratégies d’intégration des Roms devant porter sur la période de 2011-2020, il importe d’utiliser au mieux le financement qui sera rendu disponible en vertu du nouveau cadre financier pluriannuel (CFP). Ce dernier établira les modalités de soutien, dans le futur budget de l’Union européenne, des objectifs d’Europe 2020.
Dès sa conception, la stratégie Europe 2020 a pris en considération la situation de la population rom (68). Les actions visant à soutenir l’intégration des Roms feront partie des instruments financiers applicables de l’Union européenne, en particulier les fonds de la politique de cohésion. Lors de l’élaboration de ses propositions relatives au cadre réglementaire de la future politique de cohésion, sur la base des orientations fixées dans la révision du budget (69) et dans les conclusions du cinquième rapport de cohésion, la Commission s’efforcera de lever les obstacles potentiels actuels à une utilisation efficace des fonds de la politique de cohésion afin de soutenir l’intégration des Roms.
Il importera de veiller à ce que les priorités d’investissement des différents fonds pouvant être utilisés dans les domaines de l’inclusion sociale et de la lutte contre la pauvreté soient à la base de la mise en œuvre des programmes nationaux de réforme et des stratégies nationales d’intégration des Roms. Ces programmes devront également établir les conditions préalables nécessaires à un soutien efficace et axé sur les résultats, y compris au moyen d’une meilleure évaluation. La possibilité d’utiliser des mesures d’incitation positives pour réduire les inégalités sera également examinée. Simultanément, la simplification des procédures au bénéfice des utilisateurs du programme sera un des principaux éléments pris en compte par la Commission lors de l’élaboration des futures propositions. Ce point est essentiel pour les projets concernant les besoins des Roms.
D’après la Commission européenne (70), les Fonds structurels de l’Union européenne, le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) et l’instrument d’aide de préadhésion (IAP) représentent près de la moitié du budget annuel de l’Union européenne et constituent des leviers importants pour le changement.
Les données sur la mise en œuvre de ces instruments montrent que, d’une manière générale, les ressources ne manquent pas pour soutenir les actions et programmes prometteurs. Divers obstacles empêchent néanmoins certains États membres de les utiliser pour des interventions ciblées sur l’intégration des Roms, parmi lesquels des problèmes de planification et de programmation ainsi que des lourdeurs administratives. À la lumière des exemples de réussite, on constate que les stratégies intégrées qui tiennent compte de la dimension complexe des problèmes à la base de la marginalisation des communautés roms sont beaucoup plus efficaces que des projets isolés qui n’abordent qu’un ou deux aspects. Parmi les obstacles en question, on compte aussi des réticences au niveau local, ainsi qu’une sensibilisation politique et des capacités insuffisantes des administrations locales comme des communautés roms. Ces difficultés peuvent être surmontées grâce à des mesures d’incitation ou à l’apport d’aides et de compétences adaptées, y compris par l’intermédiaire d’une assistance technique au titre des Fonds structurels de l’Union européenne. La Commission encourage les ONG à élaborer des projets de renforcement des capacités, comme le projet « Making the Most of EU Funds for Roma » (exploiter pleinement les fonds de l’Union en faveur de Roms), de l’organisation Open Society Institute. De plus, l’émancipation des Roms, et en particulier la participation aux processus décisionnels des femmes roms, qui établissent un lien entre la famille et la société, s’est avérée être un facteur de réussite important, quel que soit le type de mesure.
Pour aider les États membres à mettre en œuvre des politiques avec une incidence concrète sur le terrain, la Commission a lancé, en 2009, une série de manifestations bilatérales de haut niveau dans les États membres pour réunir des hauts responsables des pouvoirs publics et de l’administration et des représentants des parties prenantes, à l’échelle nationale et européenne, ainsi que des représentants des communautés roms. Ces manifestations préparent le terrain pour la fixation d’objectifs en vue d’une utilisation accrue des Fonds de l’Union européenne en faveur de l’intégration des Roms en établissant des échéances spécifiques.
La Commission a encouragé le recours à une programmation intégrée à plus grande échelle combinant des actions relevant de plusieurs programmes opérationnels pour appuyer les interventions qui adoptent une démarche transversale pour résoudre les problèmes des communautés roms. Elle soutient également les initiatives des États membres qui visent à faire des mesures de déségrégation une condition d’accès aux financements structurels, une position qu’elle considère pleinement conforme à l’obligation d’éviter toute discrimination dans la mise en œuvre des Fonds (71).
La Commission incite également les États membres à faire participer les communautés roms à la planification de l’utilisation des Fonds sur la base du principe de partenariat, de façon à ce que les Roms prennent part à toutes les étapes du processus, de la conception du programme à son évaluation, ainsi qu’à favoriser le renforcement des capacités au sein des communautés roms et des administrations locales. Elle est également favorable à la simplification des procédures de demande et à l’application plus systématique du mécanisme de préfinancement pour les candidats retenus.
Les fonds européens existent donc, mais il faut améliorer leur efficacité. Les Fonds structurels, les donateurs internationaux et les sources nationales fournissent une grande part de l’aide financière. Le défi repose dans l’utilisation efficace des fonds en vue de l’amélioration effective et durable des conditions de vie des Roms. Il faut fixer des objectifs clairs, concevoir des indicateurs et suivre étroitement l’évolution de la situation.
La plupart des interventions en faveur des Roms sont menées par le Fonds social européen (FSE). Le Fonds européen de développement régional peut également soutenir un large éventail d’actions, y compris en faveur des entrepreneurs, de l’octroi de microcrédits et de la création d’infrastructures.
Le règlement (UE) no 437/2010 du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 2010 modifiant le règlement (UE) no 1080-2006 relatif au FEDER ouvre ainsi de nouvelles perspectives en matière de cohésion économique et sociale en permettant, à travers la mobilisation du FEDER, de financer des logements en direction des groupes vulnérables afin de combattre l’exclusion. Cette nouvelle réglementation prévoit un élargissement du champ d’application du FEDER en s’adaptant à la logique de financement du logement et vise à corriger les disparités entre les opportunités actuelles du FEDER et les conditions de vie des communautés marginalisées.
II. LA NÉCESSITÉ D’AVOIR DES OUTILS FINANCIERS PLUS ADAPTÉS
Dans le cadre de la communication de la Commission du 5 avril 2011 et des conclusions du Conseil du 19 mai 2011, le Gouvernement français avait identifié (72) ses projets cofinancés par le FSE (programme opérationnel FSE 2007-2013, objectif Compétitivité et emploi), destinés à favoriser l’inclusion sociale des populations roms.
46 projets d’insertion professionnelle (pour 14 régions et le volet central du programme) cofinancés par le FSE en direction des gens du voyage ou des Roms, pour un coût total supérieur à 4 millions d’euros dont quelques exemples sont présentés ci-après.
a) Association Pact Arim (dossier géré par la DIRECCTE Ile-de-France), 1er janvier 2010 – 31 décembre 2011
Au cours de l’année 2006, deux campements avaient été identifiés dans la Ville de Saint-Ouen et accueillaient environ 700 personnes dans des conditions d’hygiène et de sécurité préoccupantes. Un projet d’intervention a alors été mis en œuvre par l’État et la Ville de Saint-Ouen, sous la forme d’une maîtrise d’œuvre sociale urbaine (MOUS), conduite par l’association PACT ARIM 93. Le projet d’intervention consistait à prendre en charge les besoins de personnes, majoritairement des Roms, notamment en termes de scolarité et d’éducation, d’accès aux soins, aux activités économiques et au logement. Le Pact Arim 93 intervient sur le site d’insertion de Saint-Ouen depuis le 1er septembre 2008 pour réaliser une mission d’accompagnement social global des personnes et familles intégrées au projet.
Les principaux objectifs visés dans ce projet sont l’insertion par l’économique et l’accès au logement autonome. Ces objectifs ne peuvent être atteints sans un accompagnement spécifique lié à l’appropriation de la langue et des normes sociales et culturelles françaises. Les résultats attendus sont, pour toutes les familles, la possibilité de s’intégrer socialement et professionnellement en France, d’obtenir la régularisation de leur situation administrative (autorisation de résidence et de travail), d’avoir accès aux soins, à la formation, à l’emploi et aux organismes de droit commun (pôle emploi, caisse d’allocation familiale). Dix-huit entités familiales résident dans le village d’insertion de Saint-Ouen, ce qui correspond à 34 adultes, 7 jeunes majeurs et 31 enfants. Le coût total prévisionnel du projet est de 641 912 euros.
En présence d’un public migrant vivant auparavant en bidonville ou en squat à Montreuil, dont aucun n’est en situation d’emploi à l’entrée dans le projet, il s’agit de mettre en situation d’emploi ou de formation l’ensemble des 118 bénéficiaires concernés dans un délai de 36 mois. À cette fin, une équipe spécifiquement dédiée à l’insertion professionnelle est mise en place et est composée de deux chargés d’insertion à temps plein, d’un chef de projet et de deux médiateurs-interprètes. L’équipe est chargée de la mise en place d’ateliers de constitution de CV, de l’organisation d’évaluation en milieu de travail dans les entreprises, de groupe de travail sur la présentation, la façon de s’exprimer face à l’employeur, la définition par type de métier des besoins en langue française professionnelle et de la constitution d’un fichier d’entreprise dans les métiers ouverts pour créer une dynamique de collecte d’offre d’emplois en direction du public suivi.
Une approche linguistique autour du projet d’insertion est nécessaire pour favoriser sa réussite en donnant à chacun les éléments nécessaires à une insertion facilitée avec le concours de l’association prestataire retenue « Coup de main ». Ainsi, l’évaluation individuelle des besoins en français des 118 bénéficiaires concernés, l’élaboration d’outils de français professionnel, des cours semi collectifs et individuels et un accompagnement auprès de l’entreprise si besoin contribueront-ils à la réussite de ce projet d’insertion. Le coût total de l’action est de près de 250 000 euros pour l’année 2010.
Le public ciblé par le projet est composé essentiellement de migrants roms roumains éloignés de l’emploi dans les agglomérations de Grenoble et Nantes. Ce public se heurte à de nombreux obstacles pour trouver un emploi : absence de formation, méconnaissance ou connaissance approximative de la langue française, manque de connaissances du système administratif français. Le travail de terrain mené par les associations Habitat-Cité et Roms Action depuis 2003 a permis de constater que les besoins spécifiques de ces populations ne sont que très insuffisamment pris en compte. Le projet qui s’est déroulée en 2010, consistait à suivre et accompagner ces personnes en vue de leur insertion sociale et professionnelle en France. Le caractère transnational du projet doit permettre le transfert de certaines pratiques et outils innovants entre les deux pays ainsi qu’une réflexion commune autour des pratiques d’insertion professionnelle d’un public éloigné de l’emploi. Le coût total est de 236 279 euros pour l’année 2010.
Alsace. Elle est reconduite d’année en année. Concrètement, il s’agit de mettre en place un atelier de type guichet unique pour permettre aux gens du voyage de s’insérer professionnellement grâce à un emploi indépendant - par le biais de la création d’une entreprise individuelle - et de trouver l’accompagnement nécessaire à son développement :
- en amont de la création d’entreprise, évaluation des motivations du porteur de projet et des conditions de démarrage (existence de marché potentiel et validation de la démarche) pour la mise en place de l’activité, appui concret dans les démarches commerciales, administratives, juridiques et financières et pour la promotion de leur activité ;
- en aval de la création, suivi de gestion et de fonctionnement de l’entreprise.
Ainsi, 125 personnes ont été accueillies en 2010 dans le cadre du guichet unique proposé par APPONA 68. Le coût total sur trois ans est de 115 000 euros.
b) Le Conseil Général de l’Yonne associé au Service d’action sociale des travailleurs indépendants offre un accompagnement adapté aux gens du voyage bénéficiaires du RSA, situés dans l’Yonne et exerçant une activité indépendante en mettant en œuvre l’ensemble des moyens permettant l’officialisation des activités et l’ouverture des droits afférents
Le coût total éligible est de 60 000 euros pour une période allant de janvier 2010 à mi-juin 2012.
c) Le Conseil général du Morbihan a soutenu une opération, mise en œuvre par l’association Sauvegarde 56, pour un montant de 215 000 euros sur trois ans (janvier 2008 à décembre 2010)
L’opération cherchait à favoriser l’insertion professionnelle et économique de membres de la population des gens du voyage. L’équipe était composée d’intervenants sociaux du service chargés des contrats aidés et de deux intervenants spécifiques pour les micro-entreprises et activités professionnelles. L’organisation de l’équipe prévoit un suivi commun par le référent social et le référent chargé de l’insertion professionnelle et économique au travers de la création d’entreprise.
L’action comprenait plusieurs thématiques :
- une évaluation des projets proposés et une aide à leur montage ;
- l’organisation d’action de formation (individuelle ou collective) ;
- liens de médiation avec les administrations ;
- fonction de secrétariat auprès des bénéficiaires.
d) Développée en 2007 et 2010 par l’association d’aide à l’insertion des gens du voyage et soutenue par le département du Tarn-et-Garonne : pour un coût total de 100 000 euros, l’opération consistait à accompagner les gens du voyage à pouvoir exercer des activités en qualité de travailleur indépendant.
Pour cela, il s’agissait de les aider à se déclarer au Registre du Commerce et des Sociétés afin qu’ils puissent exercer ces activités. Le chargé de mission assure un suivi administratif, la mise à jour des divers documents à fournir aux administrations, l’ouverture de leurs droits et la conformité avec les différents organismes chargés du contrôle (obligations fiscales et sociales, etc.).
e) L’association « Relais Accueil gens du voyage », sous l’égide du Conseil général de Seine-Maritime, a lancé une action d’un montant de 117 000 euros
Cette dernière a consisté à accueillir individuellement en 2008 et 2009, les gens du voyage pour : les informer sur les principes de la création d’entreprises, les aider à finaliser des projets, les appuyer dans toutes les démarches nécessaires, fournir une aide administrative, les orienter pour les diagnostics financiers et toute demande d’aide financière.
a) L’Association Départementale des Gens du Voyage Citoyens a été créée en 2005, en Loire-Atlantique, sur l’initiative de voyageurs, afin d’être porte-parole pour la promotion et la défense de leurs droits.
Elle rencontre de nombreuses familles qui sont confrontées à l’inactivité de certains jeunes de 16 à 25 ans, déscolarisés ou n’ayant pas été scolarisés, sans activité professionnelle et/ou en situation de rupture avec les services publics de l’emploi. D’un coût de 22 500 euros et soutenue par la CRESS Pays-de-la-Loire, l’opération « un pas vers l’emploi » se déroule en 2011 et se décline en trois actions :
- repérer les jeunes inactifs et les orienter vers la permanence de l’association ;
- travailler sur le projet du jeune ;
- orienter le jeune vers les services compétents et sensibiliser les partenaires au monde du voyage.
L’association pour les gens du voyage de la région de Cognac a fondé une auto-école et un garage associatifs afin de contribuer à l’insertion et à la réinsertion sociale et professionnelle de jeunes et/ou adultes en difficulté, de réduire les inégalités liées aux problèmes de mobilité et de lutter contre la discrimination dans l’accès à l’emploi. Le garage associatif procède ainsi à des prêts de véhicules. L’action soutenue par le Conseil général de Charente a un coût total de près de 550 000 euros pour les années 2008, 2009, 2010.
Dans le cadre de la communication de la Commission du 5 avril 2011 et des conclusions du Conseil du 19 mai 2011, le Gouvernement français avait recensé (73) ses projets de mise en application de la circulaire « financement FEDER des logements pour les communautés marginalisées », destinés à favoriser l’inclusion sociale des populations roms.
Un questionnaire a été adressé aux régions pour ce qui concerne la mise en oeuvre du financement des logements des populations marginalisées, visée par le règlement CE du 19 mai 2010 modifiant le règlement FEDER 1083/2006 ainsi que par la circulaire DATAR du 16 mars 2011.
- 6 régions sont en cours de réflexion mais de toute évidence n’envisagent pas de mettre en application dans l’immédiat la mesure. Pour ces régions, en hypothèse haute, la mobilisation du FEDER pourrait atteindre environ 7 millions d’euros ;
- 7 régions (Basse Normandie, Lorraine, Rhône Alpes, Corse, Nord Pas de Calais, Aquitaine, Ile de France) ont procédé à une intégration de la mesure, soit par le biais d’une modification de leur PO soit par une intégration des dispositions de la circulaire dans une mesure existante, ce, pour un montant cumulé d’environ 9,2 millions d’euros.
2. À titre indicatif, les projets en cours de réflexion ou de validation au niveau des régions, pour les plus significatifs, concerneraient des mesures urbaines, des villages d’insertion, etc.
- Nord pas de Calais : mesure intégrée dans le PO modifié. 1 million d’euros prévus à ce jour. Opérations en cours d’élaboration (DREAL) – exemple important : dossier porté par la LMCU (village d’insertion) programmation prévue à partir de décembre 2011, début 2012.
- Corse : mesure intégrée dans le PO dans le cadre de la révision en cours. La mesure n’est pas individualisée de la mesure, intégrée dans une sous-mesure maquettée à 12 M€ FEDER. 10 projets déjà recensés dont les suivants : foyer de Furiani : restructuration et création de 15 places d’accueil (coût total de 72 000 €) ;maison-relais (25 places) dans le cadre de la réhabilitation d’un ancien couvent (3 millions euros ; accueil de nuit pour les populations marginalisées (80 000 €) ; réfection d’appartements par un bailleur social en vue du relogement de personnes très défavorisées, ainsi que suivi et détermination de programmes d’accompagnement individualisés (3,6 millions euros).
- Centre : projet qui reste encore à matérialiser de dégagement d’une enveloppe d’1 M€ sur la mesure urbaine.
- Basse Normandie : la prochaine révision du PO BN (en cours de préparation) intégrera les dispositions de la circulaire en ouvrant une mesure spécifique sur l’axe 3. Il est envisagé de doter la mesure à hauteur de 1 million d’euros de FEDER. Donc pas de programmation effective aujourd’hui mais des projets en cours de dépôt.
- Aquitaine : 1,7 millions d’euros prévus et 2 opérations déjà programmées : DomoFrance (bailleur social) pour la réhabilitation d’un bâtiment abandonné et l’installation de chalets bois : le projet financé porte exclusivement sur la construction d’une pension de famille composée de 10 chalets bois et la réhabilitation d’un foyer d’accueil pour un coût total de 1 294 000 euros et un cofinancement FEDER de 396 180 euros (30,6 %) ; Emmaüs Gironde pour l’installation de chalets bois d’accueil des communautés marginalisées : opération innovante à la fois sur le plan social et environnemental, devant permettre la fermeture et le remplacement des squats de l’agglomération bordelaise par des structures d’accueil de type « chalets bois » ou maisons relais. La demande de subvention porte exclusivement sur la construction de maisons en bois dans un quartier de Bordeaux pour un coût total de 189 900,00 euros et un cofinancement FEDER de 75 960,00 (40 %).
L’expérience acquise dans la mise en œuvre d’autres sources de financement a montré que la participation des Roms est un facteur essentiel à la réussite des projets. Il faut garantir et renforcer leur participation à toutes les étapes, de la programmation au suivi, en passant par la planification et la mise en œuvre. L’absence des Roms dans les débats sur le cadre de référence stratégique national et les programmes opérationnels risque de porter préjudice aux projets par la suite. Leur participation à la programmation est particulièrement importante. Elle doit être facilitée, par exemple, par la participation aux débats d’organisations roms de la société civile.
En outre, l’élaboration des projets doit faciliter la collaboration entre les Roms et les autres intervenants, à l’instar de projets en faveur de l’égalité des chances tels que le programme PEACE. Les organisations qui prévoient déjà ce type de collaboration sont considérées comme des partenaires privilégiés. Les femmes des communautés roms jouent un rôle clé dans la résolution des problèmes liés à leurs communautés.
Les partenariats sont nécessaires non seulement avec les Roms, mais aussi avec les intervenants à tous les niveaux. Des partenariats efficaces doivent impliquer les autorités nationales, régionales et locales et les représentants d’entreprises, de la société civile et des communautés roms. La création de partenariats et l’augmentation de la participation nécessitent la mise en place de mécanismes appropriés et une approche étape par étape. Des ateliers réunissant les membres partenaires constituent un lieu propice à l’élaboration de méthodes de travail reposant sur la collaboration et à la résolution des problèmes de diversité.
Des formes de financement innovantes pourraient se révéler particulièrement intéressantes pour les communautés roms. Les microcrédits pour l’entrepreneuriat individuel et collectif pourraient se révéler particulièrement utiles dans le cadre, par exemple, de l’initiative Jessica, qui prévoit un soutien communautaire pour un investissement durable dans les zones urbaines.
TROISIÈME PARTIE : PRIVILÉGIER LES OUTILS D’INTÉGRATION QUI ONT FAIT LEURS PREUVES
I. LES INITIATIVES DES COLLECTIVITÉS LOCALES
Les autorités municipales et les représentants des Roms sont des partenaires importants. Les autorités municipales peuvent souvent servir de médiateur pour concilier les intérêts des différentes communautés locales, en particulier au cours des phases de planification et de mise en œuvre. Leurs capacités et leur sensibilité à la situation des Roms sont souvent essentielles à la réussite des interventions sur le terrain.
Ainsi les villes d’Aubervilliers, Lyon, Nantes, Bordeaux, Montreuil et Marseille, pour ne citer que ces exemples, ont mis en place des programmes spécifiques d’insertion sociale des Roms.
On pourrait recourir à des services d’assistance technique à la mise en œuvre, à l’échelle locale, d’incitations institutionnelles et financières (par exemple, la suppression de l’obligation de cofinancement) pour conseiller les autorités municipales et les pouvoirs publics et les encourager à mettre au point et à mettre en œuvre des projets.
La circulaire interministérielle du 26 août 2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites (74) dispose que « lorsque le partenariat local est suffisamment construit, il peut être utile de recourir à la mise en place d’une maîtrise d’œuvre urbaine et sociale (MOUS) pour déterminer et mettre en œuvre les solutions appropriées en matière d’habitat ».
Mise en place en 2010, la « MOUS » Roms de Montreuil a ainsi été destinée à créer un cadre de mobilisation efficace pour permettre des financements croisés des différents partenaires (Europe, État, Région, Département) soutenants les efforts de la ville.
Afin de tenter de déterminer si l’argent mobilisé l’est de manière efficiente, une mission d’information et d’évaluation de la MOUS Roms a ensuite été créée. Cette mission a eu le mérite de poser sur le papier l’historique de la situation des Roms sur notre ville depuis 2008, d’expliquer les enjeux qui ont présidé à la création d’une MOUS, et de pointer certaines difficultés (légales, règlementaires, techniques) qui rendent le travail mené extrêmement fragile.
Des problèmes ont ainsi été mis en exergue, comme la propreté aux abords des terrains, les opérations de mécanique sauvage, le stationnement anarchique, les problèmes récurrents à la déchetterie, les échecs de l’insertion, l’assiduité scolaire laissant à désirer, les tensions avec le voisinage ou les services municipaux, etc.
Au total, en quatre ans, ce sont au moins 5,5 millions d’euros qui ont été investis par les pouvoirs publics dans cette MOUS, dont au moins 3,3 millions à la seule charge de la ville de Montreuil. La MOUS prendra fin en 2014.
D’une manière générale, la MOUS Roms peut s’avérer être un outil pertinent d’insertion et d’émancipation pour les familles concernées.
II. LE PARTAGE DES BONNES PRATIQUES : L’EXEMPLE ESPAGNOL
Une « bonne pratique » est « un procédé ou une méthodologie qui s’est montré efficace dans un certain contexte et pourrait également l’être dans un autre » (David Skyrme Associés. 2008), « une méthode ou une technique qui a constamment montré des résultats supérieurs à ceux obtenus par d’autres moyens, et qui est utilisée comme référence » (Dictionnaire des Affaires), « une bonne pratique est définie comme quelque chose dont il a été testé et prouvé que ça fonctionnait d’une certaine façon - soit complètement ou en partie mais avec au moins quelques preuves d’efficacité - et qui peut avoir un impact concret dans n’importe quel autre contexte. Trois niveaux possibles de bonnes pratiques ressortent de ceci : les pratiques prometteuses, les pratiques démontrées et les pratiques reproduites (ou meilleures) » (Olivier Serrat).
Il s’agit du programme PROMOCIONA : « une éducation réussie pour la communauté rom ».
De 2000 à 2006, la FSG (75) a géré des interventions ciblant la population rom au moyen d’un Programme opérationnel multirégional de lutte contre la discrimination financé par le Fonds social européen (Programme Accéder). Ce programme a pour objectif principal de permettre l’accès de la population rom d’Espagne à l’emploi par la formation.
Dans le cadre de la période 2007-2013 en cours, un nouveau Programme opérationnel est mis en œuvre. Il porte toujours sur l’intégration au marché du travail, mais comporte aussi une nouvelle ligne d’action dans le domaine de l’éducation.
Le but de cette nouvelle ligne d’action n’est pas seulement d’encourager les élèves roms à terminer leur scolarité obligatoire, mais aussi à s’engager dans des niveaux d’enseignement plus élevés, ce qui suppose de faire reculer l’abandon précoce de la scolarité, qui est un problème touchant une proportion significative des élèves roms.
À cet effet, le programme Promociona - soutenu en grande partie par le Fonds social européen et le ministère espagnol de la Santé et des Affaires sociales, grâce à l’affectation d’une part des recettes de l’impôt sur le revenu - cible les différentes parties prenantes au processus éducatif des jeunes : les élèves eux-mêmes, leurs familles, les écoles et d’autres professionnels de l’éducation et de l’action sociale.
L’objectif du Programme Promociona est de garantir une offre satisfaisante de services renforçant la prévention de la déscolarisation précoce et permettant d’obtenir des taux plus élevés d’élèves parvenant à la fin de la scolarité secondaire obligatoire.
Le Programme PROMOCIONA, qui promeut la réussite scolaire pour la communauté rom, est développé sous l’égide du Programme multi-objectifs de lutte contre la discrimination pour la période 2007-2013 du FSE en Espagne.
Ce programme cherche à promouvoir l’intégration scolaire des élèves roms afin d’élever leur niveau à la fin de l’enseignement primaire et pendant tout l’enseignement secondaire obligatoire, ainsi que la poursuite d’études de niveau intermédiaire et/ou supérieur et la formation professionnelle.
Il poursuit deux objectifs spécifiques :
- faciliter la transition entre l’enseignement primaire et l’enseignement secondaire obligatoire, la présence continue dans le système éducatif et la poursuite des études ;
- créer et renforcer les conditions nécessaires à la réussite scolaire dans la communauté rom et, de manière générale, dans l’ensemble de la communauté éducative en intervenant auprès des différentes parties prenantes : élèves, familles, écoles et autres acteurs sociaux.
Les lignes d’action du programme Promociona sont les suivantes :
- interventions ciblant les élèves qui quittent prématurément l’école au niveau secondaire en mettant en œuvre des moyens d’action adaptés à leur réalité et aboutissant à la poursuite et/ou à la reprise des études ;
- interventions visant à renforcer et soutenir la continuité dans le processus éducatif : programmes et interventions ciblant les adolescents roms et leurs familles à partir d’éléments de sensibilisation et de soutien et, donc, intégrés à la « compensation extérieure », avec la participation du système éducatif et des services sociaux et la collaboration entre ces derniers, et en partenariat actif avec des organisations sociales et actions telles que la formation de promoteurs de l’école et de facilitateurs parmi les pères et mères roms, l’encouragement à la participation des parents aux associations de parents d’élèves (AMPA) et aux conseils de classe ; promotion de la formation professionnelle et, à moyen et long terme, de l’accès des jeunes Roms à l’enseignement professionnel, en commençant par des mesures facilitant l’accès à l’information et à l’orientation professionnelle.
Les principales interventions du programme Promociona visent les élèves et leurs familles dans les dernières étapes de l’enseignement primaire (années 5 et 6) et pendant la scolarité obligatoire dans le secondaire (années 7 à 10).
La collaboration avec les écoles et le travail avec les enseignants constituent un autre des piliers essentiels de la mise en œuvre de ces actions.
Ces actions ciblent spécifiquement les enfants scolarisés dans des établissements classiques mais pour lesquels un accompagnement est jugé nécessaire pour accroître les probabilités qu’ils arrivent au brevet de fin de scolarité obligatoire et poursuivent ensuite des études.
Les partenariats concernent les institutions européennes, gouvernementales, locales ou régionales, société civile y compris - communauté rom, etc.
Il s’agit d’une action développée dans le cadre d’un projet européen :
- le programme est financé partiellement par le Programme espagnol FSE 2007 - 2013 de lutte contre la discrimination, avec les objectifs spécifiques suivants : faciliter le passage entre l’enseignement primaire et l’enseignement secondaire obligatoire, la présence continue dans le système éducatif et la poursuite d’études supérieures ; créer et renforcer les conditions nécessaires à la réussite scolaire, en particulier au sein de la communauté rom, grâce à une action impliquant les différentes parties prenantes ;
- la Fundación Secretariado Gitano qui milite pour l’accès de la population rom aux droits, aux services et aux ressources sociales dans les mêmes conditions que les autres citoyens, est l’organisme chargé de ce programme.
Les conditions nécessaires à la mise en œuvre du programme PROMOCIONA sont les suivantes :
- les élèves devraient être dans les deux dernières années d’enseignement primaire ou dans l’enseignement secondaire obligatoire ;
- les élèves doivent être assidus, c’est-à-dire avoir été présents à au moins 80 % des classes au cours du dernier trimestre ;
- il doit y avoir un accord entre la famille de l’élève et les responsables du programme ;
- l’école où l’élève est inscrit doit s’engager à l’avance à participer aux actions menées par le programme Promociona.
Les étapes du processus sont les suivantes :
- diffusion de l’information et recrutement ;
- sélection des élèves ;
- accueil ;
- accueil et diagnostic ;
- élaboration du Plan d’intervention individualisé ;
- intervention ;
- suivi et évaluation.
Avec des conseillers d’éducation, des intervenants spécialisés pour des sessions de soutien scolaire en petits groupes et des coordinateurs, les actions prioritaires sont menées à trois niveaux :
- niveau individuel : incluant un suivi individualisé et des sessions d’orientation ;
- niveau du groupe : classes Promociona. Soutien et renforcement scolaire axé sur l’acquisition d’habitudes ; d’apprentissage, sur les rythmes et les règles scolaires et la présence continue dans le système éducatif ;
- niveau de la collectivité : action visant l’environnement des élèves et les agents sociaux proches d’eux et des milieux scolaires.
Les principaux acteurs sont :
- les élèves roms et leurs familles (dans les dernières étapes de l’enseignement primaire et dans l’enseignement secondaire obligatoire) ;
- les écoles, dans une action commune avec les enseignants ;
- d’autres agents, ressources et services intervenant dans l’éducation.
La participation des familles et des écoles est cruciale pour la réussite de ce programme. L’intervention se fait toujours en étroite coordination avec les écoles, d’autres agents et services.
80 % des élèves de la dernière année d’enseignement primaire sont passés en première année d’enseignement secondaire.
79 % des élèves de la dernière année d’enseignement secondaire ont obtenu leur diplôme. La plupart d’entre eux vont poursuivre leurs études.
Quelques données intéressantes ont été relevées sur la période 2010 – 2011 :
- centres éducatifs agréés : 96 ;
- familles participantes : 215 ;
- élèves : 248 ;
- répartition géographique : 12 régions (l’Andalousie et Madrid sont les plus représentatives) et 28 villes ;
- répartition par sexe : 43 % de garçons et 57 % de filles.
La mise en œuvre du programme Promociona passe par la promotion de politiques proactives à destination de la population rom. Quelques chiffres illustrent sa généralisation :
- formation de professionnels de l’action sociale et organisation de discussions et de forums de réflexion : 150 actions, dont conférences, séminaires et autres événements ; 8 000 participants ;
- actions de sensibilisation contribuant à combattre les stéréotypes et à améliorer l’image sociale de la communauté rom ;
- campagnes de sensibilisation « Conócelos antes de juzgarlos » (Apprenez à les connaître avant de les juger), « Tus prejuicios son las voces de otros » (Tes préjugés sont les mots des autres) ; « El empleo nos hace iguales » (Le travail nous rend égaux) ; « De mayor quiero ser » (Quand je serai grand, je serai...) ;
- assistance technique à l’administration publique et aux organismes sociaux espagnols pour la conception de plans et mesures ;
- élaboration de projets d’études et de recherches pour améliorer les connaissances sur la population rom espagnole ;
- création d’un système d’information - Observatoire de l’intégration des Roms au marché du travail - qui renseigne sur les progrès de la situation des Roms au regard de l’emploi.
Les clés de la réussite de cette action sont les suivantes :
- démocratisation, accès à la citoyenneté ;
- amélioration du niveau de vie ;
- mobilisation en faveur de la communauté rom ;
- reconnaissance institutionnelle ;
- participation des Roms ;
- politiques sociales universelles et inclusives ;
- développement de programmes spécifiques (logement, éducation, emploi, etc.) adaptés à la communauté rom.
Il s’agit du programme « ACCEDER pour l’emploi de la population gitane ».
Une étude récente intitulée « Population gitane et emploi » publiée par la Fundación Secretariado Gitano (FSG) souligne le potentiel de la population gitane sur le marché du travail. Les Gitans sont une force de travail importante d’autant plus si celle-ci s’appuie sur une formation. Quelques conclusions du rapport :
- la population gitane entre sur le marché du travail plus tôt que le reste de la population et a un nombre d’années de travail plus long que la moyenne ;
- 51 % des Gitans qui travaillent sont salariés (à comparer avec 81,6 % pour toute la population espagnole) ;
- la précarité est fréquente parmi la population gitane ;
- le taux d’emploi temporaire est de 70,9 % parmi la population gitane ; elle est comparativement de 30,9 % pour toute la population espagnole.
L’accès au marché du travail est une priorité pour promouvoir la pleine intégration sociale de la communauté gitane. Pour cette raison la FSG a lancé en 2000 le Programme ACCEDER, un programme accès sur l’emploi qui vise à intégrer de manière efficace la population gitane sur le marché du travail en tant que salariés.
L’objectif du programme est de permettre l’insertion professionnelle de la population gitane, de faire de l’emploi une réalité pour tous, de promouvoir l’employabilité, l’intégration sociale et l’égalité homme-femme, et d’encourager en particulier l’intégration socio-économique de jeunes confrontés au risque d’exclusion du marché de l’emploi.
L’objectif est également de proposer des formations professionnelles adaptées aux attentes du marché du travail et des entreprises tout en répondant aux souhaits des Gitans, puis de leur permettre d’accéder à des emplois. Cela passe par une sensibilisation de la population concernée et des employeurs et par une adaptation des services liés à la formation professionnelle et à l’emploi pour permettre aux Gitans en difficulté d’y accéder comme n’importe quel autre citoyen.
En résumé, les orientations du programme sont les suivantes :
- appui individuel à la formation et à l’insertion professionnelle ;
- prospection et intermédiation sur le marché du travail ;
- sensibilisation et promotion de politiques pro-actives pour l’insertion professionnelle des populations gitanes.
Les partenariats concernent les institutions européennes, gouvernementales, locales ou régionales, société civile y compris - communauté rom, etc. Il s’agit d’une action développée dans le cadre d’un projet européen : le programme est financé par le Fonds social européen (FSE).
Le Programme ACCEDER mène des actions en faveur de la population gitane et s’inscrit dans le cadre du programme opérationnel multirégional de lutte contre les discriminations. Il est financé par le Fonds Social Européen et le Gouvernement espagnol.
Premièrement, le programme vise à promouvoir l’accès effectif aux droits économiques et sociaux des Gitans au travers de mesures spécifiques pour améliorer l’intégration sur le marché du travail.
Deuxièmement, des activités de soutien éducatif permettent aux étudiants gitans de pleinement bénéficier de leur droit à l’éducation et leur permet d’accéder à des formations professionnelles.
Troisièmement, la formation professionnelle, des actions de sensibilisation et des projets de recherche contribuent à dépasser les stéréotypes à l’égard des Gitans et de combattre l’intolérance et l’antitsiganisme vécues par les Gitans. Par conséquent, le programme lutte contre la discrimination des Gitans de manière générale, et participe à leur pleine intégration sociale. Il permet aux Gitans de jouir d’une vague gamme de droits de l’homme et promeut une vraie égalité au sein de la société.
50 dispositifs sont mis en place dans l’ensemble des régions :
- création de partenariats avec les administrations publiques ;
- organisation de formations professionnelles ;
- action de sensibilisation des employeurs ;
- action de sensibilisation à l’emploi des populations gitanes ;
- campagne de sensibilisation : « El empleo nos hace iguales » (le travail nous rend égaux).
Les actions menées dans le cadre de ce programme ont deux orientations principales.
L’orientation, la formation et l’intégration du marché du travail se caractérise par :
- recrutement des Gitans et prise de conscience de la nécessité de chercher un emploi. L’accueil et les activités d’information se composent d’une introduction initiale aux services offerts par le programme ACCEDER et de la mise à disposition d’informations sur le monde de l’emploi et de la formation ;
- orientation, conseil et suivi. Ces actions impliquent le développement d’un diagnostic initial et de sessions d’orientation, la mise en place d’itinéraires individuels vers l’emploi et le suivi des différentes phases auxquelles en sont les participants ;
- actions pour tirer profit et assurer le suivi des actions de formation standardisées ;
- actions de mise en place d’activités spécifiques de préformation et de formation professionnelle pour les populations gitanes.
L’exploration du marché du travail et intermédiation se caractérise par :
- actions focalisées sur l’analyse et la recherche d’emploi. Une exploration du marché du travail et des emplois vacants est mise en place, pendant qu’un système d’intermédiation est proposé aux entreprises dans le but de se faire rencontrer l’offre et la demande ;
- actions de soutien à l’embauche, fournissant des informations et du conseil technique ;
- action de soutien au marché du travail. Suivi et soutien des personnes qui commencent à travailler dans le but d’assurer leur maintien dans l’emploi ;
- conseil et soutien à la création d’auto-entreprises.
Les actions pour l’intégration sociale et du marché du travail des immigrants roms poursuivent les objectifs suivants :
- mettre en place une intervention sur les immigrants roms de pays de l’Union Européenne qui permette et encourage des modèles de « soutien » à leur intégration.
- mettre en place une méthodologie de travail spécifique adaptée à leurs conditions particulières, qui prenne en compte leur accueil ainsi que le diagnostic individuel et de groupe de cette population, en commençant par le développement d’actions d’informations et de conseils.
- attirer les immigrants Roms vers le marché du travail, faire de l’emploi une réelle possibilité pour tous, promouvoir l’employabilité, l’intégration sociale et l’égalité homme-femme, encourager en particulier l’intégration sociale et l’intégration du marché du travail pour ces personnes.
Les actions développées sont les suivantes :
- itinéraires personnels pour l’intégration sociale et l’intégration du marché du travail par les immigrants roms, à travers des plans d’actions individuels spécifiques pour correspondre à leurs besoins et à leurs caractéristiques, et en accord avec leur situation personnelle, familiale, sociale et en terme d’emploi. Ceci par des actions sur : l’orientation, la formation en langues, l’enseignement de la lecture et l’écriture, la formation, incluant des mesures de soutien et, lorsque c’est approprié, des mesures en terme de protection sociale ;
- actions pour l’intégration sociale et l’intégration du marché du travail des Roms venants des pays de l’Union Européenne, mais aussi pour favoriser la coordination entre les organisations publiques et privées interagissant avec cette population, à travers des séminaires, des conférences, des ateliers, etc..
Les résultats obtenus ont été les suivants :
- bénéficiaires du programme ACCEDER : 58 060 (35 000 entre 2000 et mai 2007) ;
- personnes ayant obtenu un emploi : 39 797 (26 000 entre 2000 et mai 2007) ;
- le changement de mentalité de la part de certaines familles gitanes, d’entreprises et de la société dans son ensemble, la création de réseaux de coopération avec les administrations et les entreprises, et la mise en œuvre de politiques actives d’accès à l’emploi sont quelques-uns des résultats de ce programme qui est devenu aujourd’hui une référence pour les politiques sociales européennes ;
- 39 588 bénéficiaires de l’aide personnalisée à la recherche d’emploi, dont 18 457 hommes et 21 131 femmes ;
- nombre de contrats de travail atteint : Roms aidés par le programme 38 265 dont 19 848 femmes et 18 417 hommes.
- de 2006 à juin 2010 : 6415 Roms aidés par le programme (Roumains 93 %, Bulgares 6 %, Bosniaques 1 %).
La mise en place de programmes multirégionaux pour combattre la discrimination incluant des actions dirigées vers ces groupes victimes de discrimination sociale et d’exclusion. Comme la dimension nationale aborde certaines questions, ceci fournit et favorise une meilleure cohésion et un meilleur équilibre territorial.
Les ONG doivent être activement impliquées dans les programmes régionaux et nationaux opérationnels (à partir de la planification jusqu’à la mise en place) et occuper une nouvelle place de fournisseur de services publiques. Ce leadership doit être entre les mains d’organisations expérimentées.
Une approche intégrée et individuelle des actions, comprenant le parcours individuel global vers l’emploi.
Ceci favorise l’amélioration des systèmes de gestion, les apprentissages mutuels et l’échange d’expériences.
La conscientisation et l’implication des employeurs, des medias et des autres organisations sont indispensables pour réussir à renouveler la perception sociale des populations gitanes et leur intégration sur le marché du travail.
Ceci est un élément clé du succès.
Ceci peut avoir un impact important sur les groupes socialement exclus, tout en favorisant leur intégration sociale. Le nouvel objectif de Coopération Européenne Territoriale est le meilleur cadre pour développer des actions transnationales sur des questions thématiques telles que l’intégration sociale des communautés gitanes et leur intégration sur le marché du travail.
Il est important de tenir compte du profil du demandeur d’emploi lors de l’élaboration de son parcours d’intégration.
Il ne s’agit pas d’un programme pour les Gitans mais plutôt d’un programme qui implique tout le monde, y compris la communauté gitane.
C’est un programme qui a une durée de 7 ans, ce qui permet un plus grand impact.
Les mesures visent la population cible, mais sans exclusivité, et vont dans le sens de la normalisation.
L’objectif est de construire un pont entre les besoins de la population gitane et le système, trouvant ainsi un équilibre entre populations cibles et services standardisés.
Toutes les équipes de travail sont ethniquement diversifiées et peuvent profiter des deux cultures.
g) Un partenariat fort, une relation de proximité avec les entreprises et un système de relations public/privé approprié
Le but est de coopérer avec toutes les parties prenantes importantes : administrations publiques espagnoles ; entreprises, médias, politiques, etc.
Toutes les ressources doivent participer à l’atteinte du même objectif, créant des synergies parmi toutes les ressources disponibles.
La situation personnelle de chacun doit être au-dessus des origines ethniques. Les itinéraires doivent être définis selon chaque personne, sans impact de l’origine ethnique.
Le programme inclut une combinaison d’approches nationales et locales.
Ces comités doivent assurer la transparence et un flux constant d’information, qui sont essentiels à la réussite du programme.
Visibilité et communication ouverte facilitent la prise de conscience sur la question.
Comme pour tous les autres programmes financés par la Commission européenne et le budget national, le Programme ACCEDER est l’objet d’audits et d’évaluations. Le but de cet audit et de cette évaluation est, d’une part, d’assurer un suivi du programme et, d’autre part, de s’assurer de l’utilisation cohérente et efficace des fonds structurel européens.
En 2009, une évaluation ex-ante a été menée pour la période 2000-2006. Une évaluation intermédiaire avait eu lieu en 2002 avec une mise à jour en 2005, suivie par une évaluation ex-post en 2007. Pour la période 2007-2013, une évaluation ex-ante a été menée pour l’année 2008. Par la suite, des évaluations continues et des audits trimestriels des opérations menées par chacune des organisations concernées par le programme ont eu lieu.
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Le projet s’adresse aux familles qui résident dans les campements de Cañaveral (District de Vicálvaro), de Santa Catalina (District de Puente de Vallecas), de Mimbreras (District de Latina) et de Ventorro (District de Villaverde).
Il fait partie d’un accord de collaboration signé en octobre 2008 avec la Ville de Madrid. L’objectif est de collaborer pour mener ensemble le processus de suppression définitive du problème des bidonvilles qui touchent les familles installées dans ces quartiers.
Par ailleurs, ledit accord fixe les critères d’attribution d’un logement et organise une aide sociale suivie dans le quartier et le processus d’intégration locale.
Les objectif(s) du projet sont les suivants :
- résoudre définitivement le problème des bidonvilles dans les quartiers de Cañaveral, Santa Catalina, Mimbreras et Ventorro ;
- attribuer des logements dignes, adaptés aux besoins des familles qui vivent dans les bidonvilles ;
- préparer les familles à vivre dans des logements standards et dans des quartiers résidentiels ;
- apporter une aide continue aux familles dans le domaine de l’éducation et de l’emploi, en normalisant l’utilisation des services publics : sociaux, éducatifs, santé etc. - une aide nécessaire en raison de leur situation d’exclusion ;
- aider les quartiers résidentiels à recevoir les familles qui y sont relogées en vue de prévenir les conflits et médiation entre voisins.
Le projet a débuté en octobre 2008 et devait s’achever en décembre 2011 (Cañaveral : octobre 2008 - avril 2009 ; Santa Catalina : octobre 2008 - mai 2011 ; Mimbreras : octobre 2008 - mai 2011 ; Ventorro : octobre 2008 - décembre 2011).
Le projet prévoit les objectifs suivants :
- sensibilisation et suivi du problème des bidonvilles : recensement de la population concernée ;
- attention sociale portée aux familles des bidonvilles : diagnostiquer les insuffisances dans divers domaines : social, éducation, santé et emploi ;
- le logement, outil d’intégration : acquisition d’un logement sur le marché immobilier ou attribution d’un logement par la Direction générale du logement et de la réhabilitation de la Communauté autonome de Madrid ;
- relogement : octroi de logements par une équipe de travailleurs/éducateurs sociaux qui présentent la famille aux habitants du quartier ;
- aide sociale pendant toute la durée du processus d’intégration : développement d’actions pour soutenir les familles et les habitants du quartier ;
- supervision de l’occupation adaptée du logement comme capital social : vérification que les obligations fixées dans le contrat de location sont bien respectées.
BUDGET ALLOUÉ AU DEVELOPPEMENT DU PROJET : | |||
QUARTIER / CAMPEMENT |
POSTE |
TOTAL ENTITÉ (euros) | |
VILLE DE MADRID |
IRIS (CM) | ||
AVANT ET PENDANT LE RELOGEMENT | |||
« CAÑAVERAL » (1) |
Contribution prévue dans l’accord : logement |
8.690.000 |
8.690.000 |
Personnel d’appui |
136.452,24 | ||
MIMBRERAS (1) |
Contribution prévue dans l’accord : logement |
7.040.000 |
7.040.000 |
Personnel d’appui |
195.859,60 | ||
SANTA CATALINA (1) |
Contribution prévue dans l’accord : logement |
11.110.000 |
11.110.000 |
Personnel d’appui |
195.859,60 | ||
VENTORRO (2) |
Contribution prévue dans l’accord : logement |
9.790.000 |
9.790.000 |
Personnel d’appui |
268.018,40 | ||
APRÈS LE RELOGEMENT | |||
INTÉGRATION DANS LE QUARTIER |
Personnel d’appui |
2.420.428,40 | |
TOTAL |
36.630.000 |
39.846.618,24 |
(2) coûts estimés
Les méthodes de travail sont les suivantes :
- diagnostic de la situation familiale ; à partir des besoins identifiés, identifier les domaines d’intervention ;
- élaboration de concepts d’intervention sociale qui définissent : les objectifs à atteindre, le calendrier approximatif, les engagements pris par les familles et les experts dans les différents domaines d’intervention (formation, santé, situation économique de la famille, occupation/entretien du logement et cohabitation) ;
- coordination avec les services publics : éducation, social, santé, emploi, etc. ;
- développement d’actions de groupe et/ou locales à l’occasion d’événements majeurs : Journée internationale de la femme, Journée internationale contre les violences faites aux femmes, Journée internationale des Roms ; ou axées sur la communauté, notamment : redynamisation locale, actions de développement local.
C’est la manière dont l’action est organisée, de l’ » exclusion vers l’inclusion des familles », qui, est nouvelle. Pour ce faire, il faut une aide professionnelle dans différents domaines, assurée par plusieurs équipes qui interviennent de façon coordonnée en fonction des compétences requises à chaque étape du processus.
La structure de l’équipe s’appuie sur ces critères :
- équipe chargée de l’aide sociale dans les bidonvilles et interne, et de certains types de quartiers ;
- équipe chargée de l’attribution des logements ;
- équipe chargée du voisinage et de l’intégration dans certains types de quartiers.
Il ne suffit pas d’attribuer un logement pour qu’une famille s’intègre. Si le logement est l’outil de base du processus d’intégration, une aide à la famille et aux habitants du quartier est nécessaire pour que l’intégration soit effective et se poursuive au-delà du travail effectué pendant la phase de préparation du logement.
Un élément clé de l’intégration est de travailler avec les voisins et de les assurer de l’aide nécessaire pour permettre une cohabitation adaptée et un rapprochement entre voisins, pour en finir avec les préjugés qui rendent la cohabitation difficile. Un autre aspect essentiel est de faire en sorte que les familles assument leurs responsabilités, améliorent leurs compétences pour faciliter leur insertion professionnelle et prévenir la dépendance financière des institutions.
A partir de là, le travail s’organise selon les phases suivantes.
IRIS met en place une action sociale dans les bidonvilles et/ou interne et dans certains types de quartiers en passant des accords avec les Conseils municipaux de la Communauté autonome de Madrid. Pendant ce processus, un travail est fait en collaboration étroite avec les services sociaux, les ressources de l’éducation, de la santé et de l’emploi. De la même manière, des actions sont menées pour améliorer le niveau d’intégration des familles, dans le cadre d’un plan d’action individuel. Cette phase prend fin avec les « stages de préparation au logement » qui réunissent les familles qui répondent aux critères du relogement.
L’attribution d’un logement signifie que la famille a la possibilité de prendre un nouveau départ dans un environnement normalisé, en laissant derrière elle les facteurs d’exclusion sociale et par le logement. Pour cela, les demandes de logement sont examinées et le droit au relogement est accordé aux familles qui répondent aux critères prévus dans l’accord.
En signant un contrat de location, la famille accepte toute une série d’obligations, d’engagements et bénéficient de droits sociaux.
Cela commence par l’attribution du logement et le début de la cohabitation dans le quartier.
Pendant cette phase, l’intervention doit être planifiée dans le temps et une aide sociale suivie est par conséquent prévue dès l’attribution du logement et jusqu’à l’intégration de la famille.
Le rythme de l’intervention dépend des processus suivis par les familles. L’aide sociale ne dépasse pas 3 à 5 ans, sauf cas exceptionnel.
Les procédures suivies par la famille suivent plusieurs étapes.
Cette période comprend la remise du logement, la présentation aux habitants du quartier et l’acceptation d’engagements à respecter envers le nouveau quartier et ses habitants, afin de développer l’autonomie personnelle. Cette phase est importante pour la réussite de l’intégration dans le quartier et implique un travail de prévention, une aide étant apportée à la famille et aux habitants du quartier afin d’identifier les dysfonctionnements éventuels et d’y remédier avant que la situation ne devienne chronique. La durée est de 3 mois maximum et l’aide est de type intensif (intervention : une fois par semaine ou tous les 15 jours).
Après la première phase de régularisation des questions administratives (inscription à la mairie et à l’école, transfert des dossiers aux services sociaux), de présentation de la famille aux habitants du quartier et des ressources, l’accent est mis sur le développement de l’autonomie personnelle, l’acceptation des engagements et des obligations, et des relations de la famille avec son environnement (habitants, voisinage, services publics).
Pendant cette phase, des objectifs à long terme sont fixés et sa durée ne doit pas excéder 24 à 36 mois. Le rythme de l’intervention dépend des besoins de la famille, les aides proposées sont de type intensif et de base (intervention : une fois par mois) en fonction des besoins identifiés et de l’évolution de l’intervention.
Cette phase se concentre sur le renforcement des objectifs fixés pendant la phase précédente. Elle précède la fin du suivi (fin de l’aide sociale continue), l’intervention est ponctuelle afin que la famille devienne aussi autonome que possible. Les obligations de base font l’objet d’un suivi, les situations comme la scolarisation, l’autonomie financière, etc., étant supposées réglées. L’aide est de type administratif (intervention : entre 2 semaines et 3 mois) et ne devrait pas excéder 9 à 12 mois. Le calendrier n’est fixé qu’à titre d’information, atteindre les objectifs d’intégration reste toujours une priorité. Cette période ne doit pas dépasser la durée estimée pour l’aide sociale suivie (36 mois/60 mois).
Le processus d’intégration est terminé quand l’aide sociale suivie prend fin. Cela signifie que les objectifs ont été atteints dans les différents domaines de résultats.
Si des familles ayant de graves problèmes ont toujours de sérieuses difficultés à s’intégrer au bout de 5 ans d’aide sociale continue, IRIS s’engage à les suivre et à prendre d’autres mesures pour minimiser les conséquences et éviter que la deuxième génération ne connaisse les mêmes problèmes.
Dans ce cas, conformément aux principes méthodologiques du Programme social et après évaluation du processus de l’aide sociale suivie aux familles, décision est prise de maintenir le suivi social en raison des difficultés rencontrées par la famille.
Cela peut être le cas de toute famille qui, pendant le processus, n’a jamais franchi le cap de l’aide social de base et intensive pour accéder à celui de l’aide administrative et qui ont besoin d’une intervention très intensive.
Dès lors que la famille n’a plus besoin de l’aide sociale, le niveau d’intervention auprès de cette famille dépend des demandes auprès de l’équipe chargée d’intervenir dans le quartier et auprès des habitants.
De la même manière, l’équipe chargée de l’attribution des logements continue d’intervenir auprès de la famille pour tous ce qui concerne les engagements fixés dans le contrat de location.
Le projet répond aux critères suivants :
- améliorer l’accès effectif des Roms aux droits sociaux : attribution d’un logement social dans un environnement urbain ; veiller à la pleine scolarisation des mineurs de 6 à 16 ans (scolarité obligatoire), prévenir l’absentéisme et l’abandon scolaire ; promouvoir la scolarisation dès la petite enfance (0-3 ans) ; santé : collaboration avec le système de santé publique pour la prise en charge de la population dans les bidonvilles ; développement de campagnes de prévention sanitaire ou d’hygiène ; développement d’itinéraires d’insertion professionnelle ; promotion d’actions axées sur l’insertion par la formation et l’emploi ; traitement des offres d’emploi ;
- développer le dialogue interculturel et interethnique : développement d’actions de groupe visant la population générale, afin de sensibiliser l’opinion aux coutumes et à la culture des différents groupes ou nationalités, et à leur respect ; promotion de la diversité dans la vie locale (attribution de logements sociaux dans les quartiers et localités de Madrid, promotion d’actions qui facilitent et favorisent la cohabitation au niveau des quartiers) ;
- promouvoir une participation active à la démocratie : travail auprès des personnes pour qu’elles assument leurs droits et obligations dans différents domaines - quartier, district, éducation, emploi, etc. - comme autant d’éléments essentiels qui favorisent leur participation sociale en tant que citoyens à part entière ;
- sensibiliser l’opinion aux droits et à la culture des Roms pour lutter contre les stéréotypes et les préjugés à leur égard : le fait d’être issu de quartiers radicalement différents des quartiers urbains standards complique le partage dans les domaines de la cohabitation, de l’échange et du savoir ; et favorise l’émergence des stéréotypes et des préjugés à l’égard des Roms ; collaboration pour le développement d’activités qui diffusent les références culturelles des Roms, promotion d’actions qui créent des domaines de cohabitation (conférences locales, activités sportives ou de loisirs), favorisent la sensibilisation et donc changent le regard sur les Roms.
Les mesures prises pour promouvoir le projet ont été les suivantes :
- soutien spécialisé en continu de la part des travailleurs et des éducateurs sociaux, dont la mission principale varie selon le domaine d’intervention ;
- travail auprès de la famille dans les bidonvilles ou travaille interne : leur mission est de faire en sorte que la famille utilise les services publics (sociaux, éducation, santé, emploi) de façon adaptée, comme n’importe quel citoyen, en traitant les cas graves d’exclusion sociale qui demandent une attention intensive. À ce stade, des règles sont établies en liaison avec la mission future pour favoriser le développement des compétences personnelles, familiales et sociales en vue de la réussite de l’intégration sociale ;
- intervention à domicile de la famille relogée : ils ont pour mission d’aider la famille à examiner les changements induits par leur nouvelle vie dans un environnement radicalement différent : nouveaux voisins, nouvelles écoles, etc. Normalisation d’une utilisation adaptée des ressources sociales et éducatives. Suivi de la scolarité obligatoire des enfants, repérer les cas d’absentéisme et d’abandon scolaire. Autant de tâches fondamentales visant à encourager l’intégration sociale des familles relogées ;
- travail avec les habitants du quartier : dès le relogement de la famille. Le jour même de son emménagement, la famille et le professionnel chargé de l’aide sociale suivie sont présentés aux habitants. Les règles d’une bonne cohabitation entre voisins sont fixées et les nouveaux arrivants sont informés du règlement de l’association des résidents. En cas de conflits entre voisins, recours à la médiation ;
- aide continue à l’emploi : par les conseillers à l’emploi. Ils élaborent des itinéraires d’insertion sociale et par l’emploi dans le cadre de séances de travail individuelles de tutorat sur l’amélioration des compétences opérationnelles de base, d’une formation professionnelle assurée par les conseillers, ou de stages de formation et de l’insertion professionnelle confiés à une partie tierce. Ce travail est individuel et renforcé une fois que la famille est installée dans un logement standard.
Il faut repérer les éléments qui entravent l’adaptation de la famille dans le quartier, les établissements scolaires de leurs enfants, les ressources de santé, les ressources sociales, etc. L’autre élément essentiel est l’amélioration de leurs compétences opérationnelles : il faut garantir aux mineurs l’exercice de leur droit à l’éducation, prévenir l’absentéisme et l’abandon scolaire précoce ; et garantir aux jeunes et aux adultes l’exercice de leur droit à l’éducation par le biais de l’insertion professionnelle, soit en développant nos propres actions, soit par le biais de formations dispensées par une partie tierce, qui faciliteront leur insertion sur le marché de l’emploi.
Ce projet vise à changer les causes qui génèrent l’exclusion sociale des Roms, en respectant les composants culturels du groupe et en favorisant la création de domaines de cohabitation basés sur le respect des valeurs de chaque individu, indépendamment de son groupe social ou de sa nationalité.
Les facteurs d’exclusion étant nombreux - lieu de résidence, éducation, appartenance sociale, emploi, etc. - il faut trouver une solution qui permette de changer ou d’atténuer les incidences de ces facteurs et qui favorisent l’intégration sociale des Roms. Étendre l’intervention aux personnes qui accueillent chaque famille rom relogée - les habitants du quartier - est essentiel pour permettre au processus de se dérouler naturellement.
QUARTIER / CAMPEMENT |
DISTRICT |
NOMBRE DE FAMILLES |
NOMBRE DE DEMANDES DE LOGEMENTS REÇUES |
NOMBRE DE FAMILLES REPONDANT AUX CRITERES |
NOMBRE DE FAMILLES RELOGÉES |
NOMBRE DE FAMILLES EN ATTENTE D’ETRE RELOGÉES |
« CAÑAVERAL » |
Vicálvaro |
118 |
102 |
79 |
79 |
0 |
« MIMBRERAS » |
Latina |
121 |
121 |
64 |
59 |
5 |
« SANTA CATALINA » |
Puente de Vallecas |
171 |
164 |
101 |
87 |
14 |
« VENTORRO » |
Villaverde |
89* |
0 |
0 |
0 |
0 |
TOTAL |
499 |
394 |
244 |
225 |
19** |
*Chiffre soumis à l’examen des demandes et à l’évaluation des critères d’attribution.
** Familles en attente d’être relogées dont les dossiers ont été examinés.
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III. MÉDIATION ET PARTENARIAT : DES OUTILS À DÉVELOPPER
En Seine-Saint-Denis, des médiateurs culturels ont été mis en place. Il s’agit d’un moyen jugé efficace pour promouvoir le respect des droits de l’homme et l’intégration sociale des Roms, ainsi que l’a souligné le Conseil de l’Europe.
Recommandation du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe aux États membres sur la médiation comme moyen efficace de promouvoir le respect des droits de l’homme et l’intégration sociale des Roms
(adoptée par le Comité des Ministres le 12 septembre 2012, lors de la 1149ème réunion des Délégués des Ministres)
Le Comité des Ministres, conformément à l’article 15.b du Statut du Conseil de l’Europe,
Considérant que le but du Conseil de l’Europe est de réaliser une union plus étroite entre ses membres et que ce but peut être poursuivi, notamment, par une action commune dans le domaine des droits de l’homme et de la cohésion sociale, valeurs et objectifs qui sont au cœur de la mission du Conseil de l’Europe ;
Reconnaissant, depuis plus de cinq siècles, que les Roms font face, à travers l’Europe, à une discrimination, un rejet et une marginalisation généralisés et permanents, qui touchent tous les domaines de leur vie ;
Conscient que la discrimination et l’exclusion sociale peuvent être éradiquées de la manière la plus efficace par des politiques globales, cohérentes et proactives visant à la fois les Roms et la majorité, qui assurent l’intégration des Roms et leur participation à la société dans laquelle ils vivent, ainsi que le respect de leur identité, et reconnaissant que le recours à la médiation peut être utile pour améliorer leur intégration ;
Considérant que tous les droits de l’homme sont universels, indissociables, interdépendants et intimement liés, et que les droits économiques et sociaux sont des droits fondamentaux qui devraient être étayés par des efforts concrets aux niveaux local et gouvernemental pour faire en sorte qu’ils soient accessibles également aux membres des groupes et communautés les plus pauvres et les plus défavorisés ;
Rappelant ses recommandations précédentes qui préconisaient d’avoir recours à des médiateurs roms pour améliorer la communication et les relations entre les Roms et les institutions publiques, ce qui peut, en retour, contribuer à lever les obstacles à l’intégration sociale et à l’exercice effectif des droits de l’homme ainsi qu’à améliorer l’accès des Roms aux services publics ;
…/…
…/…
Gardant à l’esprit la Déclaration de Strasbourg sur les Roms, adoptée à la réunion à haut niveau des États membres du Conseil de l’Europe, le 20 octobre 2010, qui fait référence à la médiation dans le contexte de l’éducation, de l’emploi et des soins de santé, et dans laquelle les États membres conviennent de créer un programme de formation européen pour les médiateurs roms ;
Notant que le recours des communes et des régions à des médiateurs roms figure parmi les mesures préconisées dans la Résolution 333 (2011) du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe intitulée « La situation des Roms en Europe : un défi pour les pouvoirs locaux et régionaux » et dans la Déclaration finale du Sommet des maires sur les Roms, organisé par le Congrès le 22 septembre 2011 ;
S’appuyant sur l’expérience concluante du programme ROMED intitulé « Médiation interculturelle pour les communautés roms », mis en œuvre depuis 2011 sous la forme d’une action conjointe du Conseil de l’Europe et de l’Union européenne, qui livre des enseignements importants sur la manière d’instaurer une médiation interculturelle efficace entre les communautés roms et les institutions publiques ;
Constatant avec satisfaction que le Conseil de l’Europe et l’Union européenne coopèrent pour promouvoir une médiation efficace avec les communautés roms et encouragé par le fait que cette médiation, même si elle n’est pas toujours appelée ainsi, est pratiquée de plus en plus largement dans les États membres et de plus en plus souvent prévue explicitement dans les stratégies et plans d’action nationaux en faveur de l’intégration des Roms ;
Convaincu que le recours à des personnes d’origine rom pour servir de médiateurs entre les communautés roms et les institutions publiques présente de nombreux avantages et permet notamment d’améliorer la fréquentation scolaire et l’accès à une éducation de qualité, l’accès aux soins de santé et aux autres services publics, ainsi que la communication entre les membres des communautés roms et les institutions publiques ;
Soulignant l’importance de respecter l’égalité entre les femmes et les hommes lors du recours à des médiateurs et notant que, dans certaines situations, le travail de médiation n’aura peut-être pas la même efficacité selon qu’il est accompli par un homme ou par une femme ;
Constatant que l’expérience montre qu’il est important de veiller à ce que la médiation produise les résultats souhaités sans effets secondaires indésirables ;
Considérant, par conséquent, qu’il est utile et opportun – vu le recours croissant des Etats membres à la médiation avec les communautés roms et compte tenu de l’expérience acquise en la matière – de promouvoir une conception commune de quelques principes de base qui peuvent rendre la médiation efficace et en maximiser les effets ;
Recommande que les gouvernements des États membres, dans le respect de leurs systèmes constitutionnels et, au besoin, de leurs situations nationales, régionales et locales respectives :
1. développent un dispositif de médiation efficace et de qualité avec les communautés roms et en assurent la pérennité, sur la base des principes suivants :
a. droits de l’homme : la pleine jouissance des droits de l’homme par les membres des communautés roms, sans aucune forme de discrimination, est un principe essentiel qui sous-tend et régit la médiation ;
…/…
…/…
en conséquence, le but de la médiation devrait être de donner aux Roms les moyens d’exercer leurs droits et de renforcer la capacité des institutions publiques à garantir ces droits en pratique et non de faire en sorte que les Roms ou les institutions publiques deviennent ou restent dépendants de la médiation ;
b. consultation systématique et conception et évaluation participatives permettant aux membres des communautés roms d’exprimer leurs besoins et préoccupations et de participer activement à la recherche des solutions les mieux adaptées aux problèmes que rencontre leur communauté locale, en coopération avec les représentants des institutions publiques ;
c. sensibilité interculturelle, communication non violente et médiation des conflits, fondées sur une bonne connaissance des « codes culturels » de la communauté et des institutions concernées ;
d. impartialité : le médiateur devrait travailler – et être en mesure de travailler – de façon équilibrée à la fois avec l’institution publique et avec les membres de communautés roms, pour les aider à surmonter les différences de culture et de statut ; il devrait s’employer principalement à améliorer la communication et la coopération, ainsi qu’à encourager les deux parties à prendre des responsabilités et à travailler ensemble ; les intérêts légitimes des deux parties devraient être reconnus ;
2. reconnaissent que la réglementation de la profession par les médiateurs eux-mêmes (par exemple, le Code de conduite européen pour les médiateurs publié par le Conseil de l’Europe et l’Union européenne) est importante pour établir une conception claire du rôle et des responsabilités des médiateurs et encouragent les pouvoirs publics de tous niveaux à les respecter, y compris dans les contrats de travail, en s’abstenant notamment d’intervenir dans leurs missions et de leur demander de mener des actions qui ne relèvent pas de leur compétence ;
3. garantissent ou, lorsque cela ne relève pas de la responsabilité directe de l’État, encouragent :
- la reconnaissance officielle du statut professionnel des médiateurs, en prenant, au besoin, des mesures pour rendre leur emploi plus stable et leur assurer une juste rémunération et de bonnes conditions de travail ;
- la certification ou l’accréditation des programmes de formation initiale et continue des médiateurs roms sur la base des principes énoncés au paragraphe 1 de la présente recommandation ;
- la reconnaissance de l’expérience professionnelle acquise par les médiateurs, afin d’améliorer leurs perspectives de carrière ;
- des possibilités de travail en réseau et de soutien régulier par les pairs pour les médiateurs roms et des mesures visant à stimuler la participation des divers professionnels qui travaillent avec eux (formateurs, superviseurs, etc.) ;
4. favorisent la création, au niveau local, d’un contexte favorable au travail des médiateurs, notamment en renforçant la capacité des collectivités locales et régionales à élaborer et mettre en œuvre des politiques efficaces en faveur de l’intégration des Roms, au besoin en étroite coopération avec d’autres États membres, avec le Conseil de l’Europe et d’autres organisations internationales actives dans ce domaine, dont l’Union européenne et l’OSCE.
La combinaison d’approches descendantes et ascendantes est importante et favorise la compréhension mutuelle et la coopération.
En raison des multiples privations dont souffrent les communautés roms, la meilleure façon de s’attaquer à leur problématique est d’appliquer une approche globale multidimensionnelle, également appelée approche synergique, qui tente de considérer les diverses facettes du problème comme un tout.
L’approche globale, à savoir la combinaison de mesures d’amélioration matérielle et de mesures non contraignantes, doit dans l’idéal combiner des activités dans le domaine de l’enseignement, de l’emploi, de la santé, de la lutte contre la criminalité, du logement, de la législation concernant les concentrations et de la lutte contre toute forme de discrimination, etc.
Cette approche globale doit être assortie d’une analyse approfondie et de mesures d’intervention de grande envergure qui doivent être transposées dans un plan d’action à l’échelle des municipalités, des régions, des pays. Par exemple, chaque municipalité ou chaque groupe de municipalités concerné par le problème pourrait élaborer un plan de régénération à long terme destiné à lutter contre la discrimination envers les Roms. Le renforcement des capacités institutionnelles est susceptible de contribuer à l’élaboration de ce type de plans.
Il faut assurer la coordination et la complémentarité de toutes les sources de financement disponibles, notamment celles de l’Union européenne, des autorités nationales, régionales et locales, des institutions internationales, des ONG, etc. Elles doivent s’inscrire dans le cadre de la décennie pour l’intégration des Roms et des plans nationaux, régionaux et locaux.
Il faut veiller à ce que l’approche intégrée d’utilisation des Fonds structurels permette de résoudre les problèmes des Roms. Elle empêche la ghettoïsation et soutient l’objectif d’intégration des Roms dans la société. Dans le même temps, rien n’empêche de l’utiliser pour résoudre des situations spécifiques. Il faut tenir compte de la situation spécifique des Roms, par exemple le faible taux d’assiduité scolaire dans les écoles primaires, le taux élevé de décrochage scolaire, le taux élevé de mortalité et les conditions de vie difficiles en général.
Tout le monde s’accorde sur le fait que la planification de toute intervention à court terme en faveur des Roms doit se faire dans le cadre de plans à long terme. Les actions à court terme confèrent de la crédibilité et des avantages sur le plan politique. Il convient d’adapter les interventions individuelles aux objectifs de développement à long terme et à d’autres politiques.
La programmation des Fonds structurels, les programmes de la décennie pour l’intégration des Roms et les programmes nationaux pour la réforme de Lisbonne encouragent l’élaboration de plans à long terme relatifs à l’amélioration des conditions des Roms et à leur intégration dans les cadres de référence stratégiques nationaux pour la politique de cohésion.
IV. LA COOPÉRATION DÉCENTRALISÉE : FAVORISER LA RÉINTÉGRATION DANS LE PAYS D’ORIGINE AVEC L’AIDE DU PAYS D’ACCUEIL
Beaucoup de communes ont fait le choix d’inclure une dimension « coopération décentralisée » dans leur programme d’insertion pour les Roms.
Ainsi, à Lyon, depuis 2011, le traitement de la question Roms fait l’objet d’une coopération décentralisée. Le Grand Lyon a en effet investi 300 000 euros sur trois ans dans le développement économique de la région de Tinca en Roumanie pour réintégrer juridiquement et matériellement 60 familles roms à leur pays.
Les responsables dressant le bilan de cette première année, les responsables considèrent qu’il s’agit d’« une première réponse positive à une question épineuse ». Plus de 500 Roms bénéficieront bientôt du projet de coopération décentralisée entre le Grand Lyon et la commune de Tinca en Roumanie.
Sur plus de 1 500 Roms présents à Lyon en septembre 2012 d’après le Grand Lyon, près de la moitié vient de Tinca. Située au Nord-Ouest de la Roumanie, la commune compte près de 7 000 habitants dont un tiers de Roms. « Le problème c’est qu’à Lyon comme à Tinca, les Roms restent une minorité très mal intégrée, voire, ghettoisée, n’ayant accès ni au travail ni même au minimum vital » indique le vice-président du Grand Lyon chargé de la coopération décentralisée (76). C’est la raison pour laquelle le Grand Lyon a choisi d’y effectuer son premier essai de coopération décentralisée.
Les 100 000 euros débloqués par le Grand Lyon en octobre 2011 ont déjà permis de raccorder 60 foyers roms à l’électricité. Un local dont la construction a commencé en septembre servira de base aux associations de la commune voulant travailler avec les Roms. Il offrira à 500 personnes, chaque jour, un accès à l’eau potable, aux toilettes, aux douches, à des machines à laver mais aussi à des salles de crèche et de formation.
Le Grand Lyon ne compte pas s’arrêter après ces trois années. « C’est une action qui s’inscrira sur les très long terme ». Sur place, des associations continueront d’agir tous les jours avec la population. Et un contact permanent restera établi avec Tinca pour s’assurer que la démarche d’intégration et les locaux ne soient pas détournés. Le Grand Lyon compte sur le soutien économique du département de Bihor pour prendre relais dans le financement du centre multifonctionnel.
« C’est un premier message positif pour en finir avec la schizophrénie française au sujet des Roms » explique le vice-président du Grand Lyon chargé de la politique de l’habitat et du logement social (77), conscient que la démarche reste marginale. « Nous sommes tous partagés entre la révolte de voir les conditions de vie des Roms en France et la réalité. On ne peut pas leur offrir des avantages sociaux qu’on arrive plus à fournir aux Français ». Il espère que cette action servira de modèle à d’autres agglomérations et à l’Europe qui « dispose d’une enveloppe de 23 milliards d’euros pour la question qui n’est encore investie nulle part ».
V. INVITER LES ÉTATS MEMBRES DE L’UNION EUROPÉENNE À METTRE EN œUVRE DES MESURES EFFICACES
L’intégration des Roms est dans l’intérêt des États membres, surtout de ceux ayant une forte minorité rom présente sur leur territoire. Les Roms constituent une part importante et croissante de la population en âge d’être scolarisée et de la main d’œuvre future. Dans des pays tels que la Bulgarie et la Roumanie, 20 % à 25 % des nouveaux entrants sur le marché du travail sont Roms. Des politiques efficaces d’activation de l’emploi et des services de soutien individualisés et accessibles à l’intention des demandeurs d’emploi roms sont indispensables pour permettre à ces derniers de développer tout leur potentiel et de participer activement et sur un pied d’égalité à la société.
Dans son rapport 2012, la Commission européenne invitait les États membres de l’Union européenne à mettre en œuvre leurs stratégies nationales pour améliorer l’intégration économique et sociale des Roms en Europe. Les États membres ont mis ces programmes au point pour faire suite au cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms, adopté le 5 avril 2011 par la Commission et avalisé au mois de juin 2011 par les dirigeants des États membres de l’Union européenne.
Les Fonds structurels de l’Union, à savoir le Fonds social européen (FSE) et le Fonds européen de développement régional (FEDER), ainsi que le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) sont mobilisés pour accroître les efforts déployés par les États membres et constituent, parallèlement aux budgets nationaux, un important levier financier pour que les stratégies nationales pour l’intégration des Roms conduisent à une réelle inclusion socioéconomique de ces derniers. Or bien que ces trois fonds totalisent 50 milliards d’euros annuels, les personnes défavorisées, y compris les Roms, n’en bénéficient pas suffisamment.
B. La proposition de recommandation (78)
Le 27 juin 2013, la Commission européenne a présenté sa proposition de recommandation du Conseil, relative à des mesures efficace d’intégration des Roms dans les États membres, lors de la réunion de la plateforme européenne pour l’inclusion des Roms, portant cette année essentiellement sur l’urgence d’améliorer la situation des enfants et des jeunes d’origine rom.
La proposition de recommandation du Conseil, présentée par la Commission, est le premier instrument juridique de l’Union européenne relatif à l’inclusion des Roms. Elle recommande aux États membres de prendre des mesures d’action positive pour combler les écarts entre les Roms et le reste de la population.
Cet acte renforce le cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms, approuvé en 2011 par l’ensemble des États membres, en définissant les conditions d’une inclusion effective et efficace des populations roms dans les États membres.
S’appuyant sur des communications antérieures, la proposition de recommandation porte plus particulièrement sur les quatre domaines dans lesquels les dirigeants des États membres ont souscrit, au titre du cadre de l’Union européenne, à des objectifs communs en matière d’intégration des Roms : l’accès à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé et au logement.
La recommandation prévoit en particulier :
- une action ciblée spécifique, reposant sur de bonnes pratiques, pour accroître l’intégration des Roms, dans le strict respect du principe de subsidiarité et sans reproduire la législation de l’Union déjà en vigueur. Elle concerne l’éducation, l’emploi, la santé et le logement ;
- des thèmes horizontaux qui sont essentiels pour mettre en pratique les politiques d’intégration des Roms et pour en assurer la pérennité. Il s’agit notamment de lutter contre les discriminations et les stéréotypes, de protéger les femmes et les enfants, d’adopter une stratégie d’investissements sociaux, de recueillir des informations sur la situation des Roms pour contrôler les effets des mesures, de traduire les engagements nationaux en action locale, de soutenir l’action des organismes qui œuvrent en faveur de l’égalité de traitement pour les Roms, d’accroître les ressources et les capacités des points de contact nationaux pour les Roms, et de développer la coopération transnationale ;
- des principes généraux exigeant que l’allocation de fonds (non seulement européens mais également nationaux et locaux) destinés à l’inclusion des Roms soit transparente et appropriée. Les recommandations générales concernant les financements de l’Union européenne sont basées sur l’expérience acquise pendant l’actuelle période de programmation et sur la proposition de règlement instituant des dispositions communes pour le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen, le Fonds de cohésion, le Fonds européen agricole pour le développement rural et le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche.
Même si la responsabilité première de l’intégration sociale et économique des Roms incombe aux autorités publiques, cette action n’en demeure pas moins un défi puisqu’elle est un processus bidirectionnel qui nécessite un changement de mentalité dans la population majoritaire comme chez les membres des communautés roms.
En vue de la réalisation des actions ciblées, la proposition de recommandation demande aux États membres d’allouer non seulement des fonds européens mais également des ressources nationales, privées et associatives à l’inclusion des Roms, un facteur déterminant mentionné par la Commission dans son évaluation des stratégies nationales des États membres, l’année dernière.
Elle donne, en outre, des orientations aux États membres pour les aider à élaborer, à partir de thèmes horizontaux, des actions d’intégration des Roms (par exemple, assurer le caractère local des stratégies, faire respecter les règles de lutte contre les discriminations, protéger les femmes et les enfants roms et s’attaquer à la pauvreté).
La proposition de recommandation suggère aux États membres d’allouer suffisamment de fonds à leurs stratégies et plans d’action nationaux et locaux en matière d’inclusion des Roms, en les prélevant sur toutes les sources de financement disponibles. Cette mesure devrait être facilitée par l’affectation d’une part suffisante des ressources de la politique de cohésion de l’Union européenne à des investissements dans l’humain, via le FSE, et par l’allocation d’au moins 20 % de ce montant, dans chaque État membre, en faveur de l’inclusion sociale.
La proposition de recommandation suggère également que l’intégration des Roms figure dans les accords de partenariat des États membres concernés. Afin d’assurer une mise en œuvre efficace des stratégies nationales d’intégration des Roms, il conviendrait de renforcer les capacités des autorités locales et des organisations de la société civile.
Pour entrer en vigueur, la proposition de recommandation du Conseil devra être, en premier lieu, adoptée à l’unanimité des États membres au sein du Conseil, puis approuvée par le Parlement européen.
Ce texte affermira les engagements politiques déjà pris par les États membres. Ces derniers auront deux ans pour mettre en pratique les mesures nécessaires en vue de se conformer à la recommandation. Chaque année, ils devront informer la Commission des modalités d’application de cet acte. La Commission, quant à elle, continuera d’évaluer, dans le cadre de ses propres rapports annuels de suivi concernant les Roms, publiés chaque printemps, les progrès que les États membres auront accomplis.
La proposition de recommandation constituant un instrument juridique non contraignant, son efficacité dépendra, en tout état de cause, de la volonté politique des États et de l’Union européenne à sa mise en œuvre.
La situation des Roms préoccupe toute l’Union européenne. Cependant, malgré la volonté de la Commission européenne de favoriser l’intégration des Roms dans leur pays d’origine comme dans leur pays d’accueil, aucune contrainte n’est imposée aux États membres.
Les enjeux auxquels il convient de répondre à l’avenir sont notamment les suivants (79) :
- améliorer la coopération entre les acteurs européens, nationaux et internationaux ainsi que les représentants des communautés roms, en s’appuyant sur l’engagement en faveur de l’intégration des Roms qui a pris corps au cours des cinq à dix dernières années ;
- traduire cet engagement et cette coopération en changements positifs au niveau local. Cette démarche doit être complétée par une plus grande responsabilisation et un renforcement des capacités des administrations locales, de la société civile et des Roms eux-mêmes à l’égard de l’élaboration et de la mise en œuvre de projets, programmes et politiques ;
- améliorer l’efficacité de la communication sur les avantages de l’intégration des Roms pour le développement économique et social à l’échelon local et national (80). L’intégration sociale et économique des Roms est un processus bidirectionnel qui nécessite un changement de mentalité dans la population majoritaire comme chez les membres des communautés roms et leurs dirigeants ;
- encourager l’utilisation intégrée des fonds de l’Union pour répondre à la problématique protéiforme de l’exclusion des Roms ;
- élaborer des politiques de déségrégation explicites, notamment dans l’éducation et le logement, avec l’aide des fonds structurels ;
- mettre un accent particulier sur les microrégions les plus défavorisées ;
- inclure les questions liées à l’intégration des Roms dans les politiques plus générales consacrées à l’éducation, l’emploi, la santé publique, les infrastructures et la planification urbaine ainsi que le développement économique et territorial, plutôt que de les traiter dans le cadre d’une politique distincte. Les bonnes pratiques et les modèles qui ont fait leurs preuves doivent être mieux diffusés et devenir une composante à part entière de l’action politique.
Par conséquent, la Commission européenne, les États membres et les autres acteurs de premier plan doivent concentrer leurs efforts sur ces enjeux en renforçant l’efficacité de leur action, tant du point de vue du contenu que des processus mis en œuvre.
Une approche intégrée doit être associée à une prise en compte multidimensionnelle.
Bien que les conditions de vie de nombreuses communautés roms soient caractérisées par des problèmes multiples qui se renforcent mutuellement, les mesures censées résoudre ces problèmes sont trop souvent déconnectées des politiques générales en matière d’éducation, d’emploi, de santé publique ou de réhabilitation urbaine. La tendance est encore à des solutions simples, comme des actions en faveur de l’emploi des Roms ou la rénovation des campements, mises en œuvre au moyen de projets et de programmes à court terme, sans dimension durable.
Comme l’a noté le Comité économique et social européen en 2008 (81), la prise en compte de la problématique des Roms dans toutes les politiques européennes et nationales pertinentes est la voie la plus prometteuse vers l’intégration.
Un réel changement ne peut découler que d’une application efficace des politiques. Des politiques efficaces nécessitent quant à elles une planification cohérente qui exige elle-même la participation de toutes les parties concernées, un appui politique et l’allocation, aux différents niveaux de décision, des ressources nécessaires. Ces considérations, conjuguées à l’analyse des enjeux à venir, montrent qu’il y a lieu d’accroître l’ampleur et l’efficacité de la coordination, ainsi que de concentrer les moyens.
Dans tous ces types de communautés, les femmes et les enfants sont exposés à des risques particulièrement élevés.
Les aspects socioéconomiques fondamentaux, comme l’accès au marché du travail et à l’emploi non salarié, ainsi qu’à une éducation, un logement et des soins de santé de qualité et sans ségrégation aucune, sont déterminants pour l’intégration de tous les Roms (de même que pour tout autre individu). D’autres aspects, comme l’absence de titres de propriété foncière ou de pièces d’identité, sont toutefois plus pertinents pour certains types de communautés que pour d’autres.
Les pouvoirs publics doivent également tenir compte des caractéristiques de l’environnement urbain ou rural dans lequel vivent les communautés, ainsi que du statut juridique des membres de celles-ci. L’amélioration de la scolarisation des enfants roms dans des écoles ordinaires (éducation et soins de la petite enfance) peut nécessiter, selon le cas, l’apport de ressources supplémentaires à certains établissements, la modification des procédures d’admission ou des districts scolaires, la mise en place de transports publics, l’émission de pièces d’identité pour les parents ou encore l’intervention de médiateurs interculturels.
À cet égard, s’il est souhaitable que la proposition de recommandation européenne relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres soit adoptée, celle-ci ne constitue qu’une étape clef qui s’inscrit dans un long processus, dont l’aboutissement dépendra de la volonté politique de l’Union européenne et de ses États membres.
La Commission s’est réunie le 18 septembre 2013, sous la présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente, pour examiner le présent rapport d’information.
« M. Didier Quentin, co-rapporteur. Avec mon collègue Jérôme Lambert, nous avions été chargés, lors de la précédente législature, d’un rapport d’information sur l’intégration de la Roumanie et de la Bulgarie au sein de l’espace Schengen, et déjà la question des Roms était au centre des débats. Je rappelle aussi qu’au mois de mars dernier la Roumanie et la Bulgarie se sont vues refuser leur entrée dans l’espace Schengen, notamment au regard de la situation des Roms dans ces deux États. Les vingt-deux Etats membres de l’espace Schengen doivent, de nouveau, se prononcer à l’unanimité d’ici à la fin de cette année sur l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à cet espace de libre circulation, à laquelle le groupe UMP est opposé, si des progrès très sérieux n’ont pas été réalisés d’ici là sur l’intégration des Roms dans ces deux pays. Des sommes considérables sont d’ailleurs versées à la Roumanie et à la Bulgarie, et force est de constater qu’il n’y a aucun progrès.
La situation des Roms préoccupe toute l'Union européenne. Je précise qu’il importe de ne pas faire d’amalgame entre les Roms, issus majoritairement de Roumanie et de Bulgarie, et dont la population est estimée à quelques 20 000 personnes sur notre territoire, et les Gens du voyage qui sont plus de 400 000, mais qui sont pour la plupart des citoyens français et auxquels s’applique la loi Besson du 5 juillet 2000, relative à l’accueil et à l’habitat des Gens du voyage.
À cet égard, vous me permettrez de faire une petite parenthèse, car les problématiques sont différentes entre ces deux populations. Avec nos collègues Dominique Raimbourg et Charles de La Verpillière, nous avions présenté devant la Commission des Lois, en 2011, un rapport visant à faire le bilan de l’application de la loi Besson.
Sur les bases de ce rapport, j’ai déposé et défendu en séance publique, en décembre 2012, une proposition de loi visant notamment à régler la question des « grands passages », en demandant à l’Etat de mobiliser des terrains militaires désaffectés ou domaniaux et de prendre la responsabilité de l’organisation de ces « grands passages ». Celle-ci a été rejetée par nos collègues de la majorité, au motif qu’elle ne couvrait pas l’intégralité des problèmes se posant aux Gens du voyage.
Nous sommes donc dans l’attente d’un texte plus ambitieux, qui a été annoncé et confié à notre collègue Dominique Raimbourg, reprenant l’essentiel des conclusions du rapport du Préfet Derrache.
Pour en revenir aux Roms proprement dits, ils sont - selon des estimations moyennes du Conseil de l’Europe - environ 11 millions dans toute l’Europe, au sens de l’espace géographique couvert par le Conseil de l’Europe, soit environ 6 millions au sein des vingt-sept États membres de l’Union européenne – le tableau détaillé figure en annexe 2 de notre rapport. Les estimations chiffrées pour toute l’Europe varient de 8 à 15 millions. Le Conseil de l’Europe estime que la formulation « de 10 à 12 millions » est la plus adaptée. De son côté, l'historienne Claire Auzias, spécialiste des Roms, estime, pour sa part, qu'il y a « un maximum de 2,5 millions Roms en Roumanie, entre 700 000 et 800 000 en Bulgarie, et entre 500 000 et 1 millions en Hongrie ». Ce qui fait au total un maximum de 4,3 millions Roms dans ces trois pays.
La grande majorité des Roms en Europe (80 % à 85 %) sont aujourd’hui sédentaires. Ceux qui conservent un mode de vie itinérante ne se trouvent plus guère qu’en France, au Benelux, en Suisse, en Irlande et au Royaume-Uni. Beaucoup sont déjà en voie de sédentarisation.
La Commission européenne a souligné, dans une communication du 7 avril 2010 portant sur « l'intégration sociale et économique des Roms en Europe », que les communautés roms dans l'Union européenne des Vingt-sept, ainsi que dans les pays candidats et candidats potentiels, ne forment pas une population homogène. Du fait de cette hétérogénéité, il ne peut y avoir une seule stratégie ; il convient, au contraire, d'élaborer des méthodes différenciées qui tiennent compte du contexte géographique, économique, social, culturel, juridique, et sans doute aussi historique.
Bien que chaque contexte soit unique, elle propose d’établir une subdivision en quatre grands types :
- les communautés roms qui vivent dans des zones urbaines ou périurbaines densément peuplées, éventuellement à proximité d'autres minorités ethniques et de groupes défavorisés de la population majoritaire ;
- les communautés qui vivent dans les quartiers défavorisés de petites villes ou de villages en zone rurale, ou dans des campements ségrégués en zone rurale, à l'écart des agglomérations ;
- les communautés roms nomades ayant la nationalité d'un État membre de l'Union européenne ;
- les communautés roms nomades ou sédentaires dont les membres sont des ressortissants de pays tiers, des réfugiés, des apatrides ou des demandeurs d'asile.
Le Conseil de l'Europe considère, quant à lui, que son objectif principal est de promouvoir une approche globale des questions roms par les États membres. À cet effet, il s'est fixé trois priorités essentielles :
- la protection des minorités ;
- la lutte contre le racisme, l'antitsiganisme et l'intolérance ;
- le combat contre l'exclusion sociale.
Pour parvenir à un progrès durable, les actions du Conseil de l’Europe sont basées sur le principe de la participation des communautés concernées, par le biais des représentants des associations de Roms.
L’amélioration de la coopération entre les acteurs européens, nationaux et internationaux, ainsi qu’avec les représentants des communautés roms, représente en effet un enjeu essentiel.
Lorsque tel n’est pas le cas, il faudra faire en sorte que les populations roms organisent leur représentation en mode associatif, de façon à constituer des interlocuteurs identifiés par les autorités publiques.
S’agissant du financement des programmes à leur destination, l’absence des Roms dans les débats sur le cadre de référence stratégique national et les programmes opérationnels risque également de porter préjudice aux projets par la suite. Leur participation à la programmation est donc très importante.
J’ajouterai sur le point du financement, qu’il est bien évidemment également très souhaitable que la Roumanie et la Bulgarie, compte tenu des fonds considérables versés par l’Union européenne, mettent en œuvre une politique d’intégration plus efficace de leurs populations roms. Je rappelle que sur la période 2007-2013, quelques 17,5 milliards d'euros ont été affectés dans douze États membres - et particulièrement en Roumanie et en Bulgarie - à des mesures en faveur des Roms et des autres populations défavorisées, avec des résultats plus que mitigés au regard de l'ampleur de l'effort demandé aux fonds communautaires (Fonds social européen, Fonds agricole pour le développement rural, Fonds de développement régional).
Selon une analyse interne de la Commission européenne, la Roumanie n'aurait pour sa part budgété que 38 millions d'euros pour des programmes visant spécifiquement cette minorité, alors que les montants prévus au titre du Fonds social européen atteignent 2,2 milliards d'euros. En Pologne, les sommes prévues uniquement pour les Roms sont de 22 millions, alors que les fonds européens dépassent 1,7 milliard…
La Commission européenne a donc fixé un « cadre de l'Union européenne » pour les stratégies nationales d'intégration des Roms, pour la période allant jusqu'à 2020, dans sa communication du 5 avril 2011 au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions fixant un cadre de l'Union européenne pour les stratégies nationales d'intégration des Roms pour la période allant jusqu'à 2020.
S’agissant de l’accès au logement en général, et des campements illégaux en particulier, elle souligne que les quartiers roms isolés, qui ne sont pas inscrits dans les plans d’urbanisme et ne disposent pas d’infrastructures adéquates, constituent l’un des problèmes socio-économiques les plus importants des communautés roms et, en retour, des collectivités où ils s’installent.
La présence sur le territoire national français de ressortissants communautaires, issus des minorités roms, et vivant dans des conditions de très grande précarité, est ainsi une question récurrente pour les pouvoirs publics.
Cette question n’est pas récente, puisque la migration des populations d’origine rom dans les pays européens commence à apparaître au tournant des années 1990, au moment où la construction européenne prend une dimension nouvelle, avec le principe de la libre circulation des personnes et où le démantèlement de l’ancien « bloc communiste » ouvre les frontières à l’Est.
L’adhésion ultérieure à l’Union européenne de certains de ces pays ne s’est pas traduite par des mouvements de population massifs. Cependant, elle a été perçue par des minorités, comme une opportunité d’améliorer des conditions d’existence particulièrement difficiles.
Cela a été le cas pour des groupes ou des familles roms, issus principalement de Roumanie et, dans une moindre mesure, de Bulgarie.
Ces personnes se sont installées en France, de façon plus ou moins durable, dans des conditions précaires, qu’il s’agisse de campements illicites ou de squats, en se concentrant majoritairement dans une quinzaine de départements, de Paris et de la région parisienne, et de la province, en périphérie des grandes agglomérations ou dans les villes-centres (Lille, Marseille, Nantes, Toulouse, Grenoble, etc.). Cette population est évaluée, après un questionnaire adressé aux préfets de département, à environ 20 000 personnes, un chiffre qui semble relativement bas.
L’occupation illicite des terrains et des squats conduit, après décision de justice, à l’évacuation des lieux. La prise en charge des populations est rendue difficile par le nombre d’occupants des sites et la composition des familles, souvent intergénérationnelle.
À travers la circulaire du 26 août 2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites, le gouvernement actuel a précisé les lignes directrices à suivre par les préfets pour administrer ces situations. Une mission interministérielle que le Premier ministre a confiée à l’inspection générale de l’administration (IGA), l’inspection générale des affaires sociales (IGAS), au conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et à l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR) a eu pour mandat d’évaluer les conditions de mise en œuvre de ces instructions et de proposer des modalités d’évolution et d’amélioration, notamment à partir des bonnes pratiques et des expérimentations conduites localement. Vous trouverez tous ces éléments détaillés dans notre rapport.
Je dirai en terminant qu’il s’agit là d’un problème très complexe qui doit être abordé de manière humaine - et même humaniste -, mais en étant bien conscient des risques qu’entrainent certains comportements de ces populations, parfois rétives à l’intégration. Sont de notoriété publique les trafics – traite des êtres humains, trafics de stupéfiants, sans parler des vols avec violence – auxquels certains s’adonnent, au sein même de cette population. Il convient donc de ne pas céder à je ne sais quelle stigmatisation, mais il ne faut pas non plus faire preuve d’angélisme.
Mme Marietta Karamanli, co-rapporteure. Notre commission a jugé utile de faire un rapport portant sur l’intégration des Roms, s’appuyant sur les débats conduits au niveau de l’Union européenne. Nous sommes restés dans ce cadre. Vous ne trouverez donc pas dans ce rapport de critiques - qu’elles soient positives ou négatives - relatives aux stratégies nationales.
Les Roms sont très généralement méconnus, et les attitudes adoptées à leur égard, ou les décisions politiques prises à leur encontre, ont été, au fil des siècles, davantage inspirées par les préjugés que par la connaissance des réalités historiques ou culturelles. La prise en compte de la problématique des Roms dans toutes les politiques européennes et nationales pertinentes est donc la voie la plus prometteuse vers l'intégration.
Le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe l’a rappelé : « les Roms - qu'ils soient citoyens du pays dans lequel ils vivent, déplacés ou migrants - sont plus défavorisés que tout autre groupe en Europe dans les domaines de l'éducation, de la santé, de l'emploi, du logement et de la participation politique. Les Roms continuent de souffrir d’une discrimination et d’un antitsiganisme de grande ampleur, qui les enferme dans une situation défavorisée, caractérisée par l’exclusion, la ségrégation et la marginalisation ».
Les États doivent ainsi par exemple « prendre des mesures énergiques pour mettre fin à la ségrégation scolaire des Roms. Pour faire évoluer la situation de cette population, il est indispensable de veiller à ce que les enfants roms aient accès au système éducatif ordinaire et y mènent leur scolarité à terme ». La ségrégation coûte cher aux États membres et c’est l’une des pires formes de discrimination à l’encontre des Roms, qui perpétue leur marginalisation.
Il incombe donc aux États - mais aussi à l’Union européenne qui doit donner l’impulsion nécessaire - de se préoccuper de combattre le racisme et la discrimination à l’encontre des Roms, et de mettre en œuvre des stratégies d’intégration qui répondent aux besoins de cette population notamment en matière de logement.
Si les axes pour l’intégration des Roms sont parfaitement identifiés, ils sont cependant beaucoup plus difficiles à mettre en œuvre. Les objectifs de l'Union européenne pour l'intégration des Roms doivent couvrir, en fonction de la taille des populations roms, quatre domaines essentiels : l'accès à l'éducation, l'emploi, les soins de santé, le logement.
A ces quatre axes, il faut en ajouter un cinquième - et non des moindres - : la lutte contre les discriminations.
L’Union européenne considère que les institutions européennes et les États membres ont une responsabilité conjointe en termes d'amélioration de l'intégration et de l'inclusion sociales des Roms. À cette fin, ils sont tenus de faire usage de tous les instruments et de toutes les politiques relevant de leur compétence. Il est important également que l’Union européenne aide les États à réaliser ces objectifs, afin d’atteindre les objectifs généraux de la stratégie Europe 2020.
Comme l’a indiqué notre collègue Didier Quentin, la Commission européenne a en effet fixé un « cadre de l'Union européenne » pour les stratégies nationales d'intégration des Roms pour la période allant jusqu'à 2020. Elle y souligne la nécessité d'une approche ciblée.
Selon elle, les stratégies nationales d'intégration des Roms requièrent un engagement politique clair de la part des États membres. À cet égard, le rapport de suivi de la Commission européenne publié le 26 juin 2013 souligne que les États membres doivent mieux mettre en œuvre les stratégies nationales d’intégration des Roms qu’ils ont présentées au titre du cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms.
Une difficulté non négligeable rend cependant difficile la réalisation de ces objectifs : les circuits de financements mobilisables pour les Roms sont complexes et relativement peu efficaces.
Or, la mise en œuvre et la réussite des stratégies nationales d'intégration des Roms passent nécessairement par une allocation efficace et suffisante des ressources.
Il existe toutefois à l'heure actuelle une programmation de 26,5 milliards d'euros de concours financier de l'Union européenne pour soutenir les efforts d’ensemble des États membres dans le domaine de l'intégration sociale. Ces fonds comprennent ceux mobilisables y compris pour l'aide à la population rom ; mais cette dernière en direction de cette partie de la population est loin d’être intégralement mobilisée.
En matière de financement, de nouveaux outils sont aussi à développer. Les partenariats sont nécessaires et doivent impliquer les autorités nationales, régionales et locales, les représentants d’entreprises, de la société civile et des communautés roms. C’est pourquoi il est souhaitable de mobiliser les outils qui ont fait leurs preuves, par exemple en développant les « bonnes pratiques ».
Cependant, malgré la volonté de la Commission européenne de favoriser l'intégration des Roms dans leur pays d'origine comme dans leur pays d'accueil, aucune incitation ou contrainte n'est imposée aux États membres. Or, un réel changement ne peut découler que d'une application efficace des politiques.
Le 27 juin 2013, la Commission européenne a présenté une proposition de recommandation du Conseil, relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres, lors de la réunion de la plateforme européenne pour l’inclusion des Roms, portant cette année essentiellement sur l’urgence d’améliorer la situation des enfants et des jeunes d’origine rom.
La proposition de recommandation du Conseil, présentée par la Commission, est le premier instrument juridique de l’Union européenne relatif à l’inclusion des Roms. Elle recommande aux États membres de prendre des mesures d’action positive pour combler les écarts entre les Roms et le reste de la population.
Cet acte renforce le cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms, approuvé en 2011 par l’ensemble des États membres, en définissant les conditions d’une inclusion effective et efficace des populations roms dans les États membres.
S’appuyant sur des communications antérieures, la proposition de recommandation porte plus particulièrement sur les quatre domaines dans lesquels les dirigeants des États membres ont souscrit, au titre du cadre de l’Union européenne, à des objectifs communs en matière d’intégration des Roms : l’accès à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé et au logement.
La recommandation prévoit en particulier :
- une action ciblée spécifique, reposant sur de bonnes pratiques, pour accroître l’intégration des Roms, dans le strict respect du principe de subsidiarité et sans reproduire la législation de l’Union déjà en vigueur. Elle concerne l’éducation, l’emploi, la santé et le logement ;
- des thèmes horizontaux qui sont essentiels pour mettre en pratique les politiques d’intégration des Roms et pour en assurer la pérennité. Il s’agit notamment de lutter contre les discriminations et les stéréotypes, de protéger les femmes et les enfants, d’adopter une stratégie d’investissements sociaux, de recueillir des informations sur la situation des Roms pour contrôler les effets des mesures, de traduire les engagements nationaux en action locale, de soutenir l’action des organismes qui œuvrent en faveur de l’égalité de traitement pour les Roms, d’accroître les ressources et les capacités des points de contact nationaux pour les Roms, et de développer la coopération transnationale ;
- des principes généraux exigeant que l’allocation de fonds (non seulement européens mais également nationaux et locaux) destinés à l’inclusion des Roms soit transparente et appropriée.
Pour entrer en vigueur, la proposition de recommandation du Conseil devra être, en premier lieu, adoptée à l’unanimité des États membres au sein du Conseil, puis approuvée par le Parlement européen. Ce texte affermira les engagements politiques déjà pris par les États membres. Ces derniers auront deux ans pour mettre en pratique les mesures nécessaires en vue de se conformer à la recommandation. Chaque année, ils devront informer la Commission des modalités d’application de cet acte. La proposition de recommandation constituant un instrument juridique non contraignant, son efficacité dépendra, en tout état de cause, de la volonté politique des États et de l’Union européenne à sa mise en œuvre.
Il est donc indispensable que cette proposition de recommandation européenne relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres soit adoptée. Celle-ci ne constitue en effet qu’une étape clef qui s’inscrit dans un long processus, dont l’aboutissement dépendra de la volonté politique de l’Union européenne et de ses États membres.
À la suite du rapport, prenant en compte les constats et les suggestions des nombreux acteurs publics, y compris les élus locaux et associatifs que nous avons rencontré au long de l’élaboration du rapport, plusieurs propositions sont faites. Elles visent à simplifier et contrôler efficacement les mesures à mettre en œuvre, à responsabiliser l’Union européenne et les États, y compris ceux où vivent en nombre les populations concernées et leurs communautés, à faire émerger des priorités et à capitaliser pratiques les plus efficaces et les plus « efficientes ».
Compte tenu de tous les éléments que nous venons de développer brièvement, et que vous trouverez de manière détaillée dans notre rapport, nous vous proposons d’adopter sept propositions de conclusions.
M. Pierre Lequiller. C’est en effet un sujet très important, sur lequel nous avions beaucoup travaillé pendant la précédente législature, et j’avais effectué à ce propos une mission à Bucarest. Cela nous avait d’ailleurs conduit à quelques conclusions que je regrette de ne pas retrouver dans l’approche retenue par l’actuelle majorité. Pour résumer, je dirais qu’il est affaire ici de volonté politique. Volonté politique pour avoir le courage de dire que les États d’origine, en particulier la Roumanie et la Bulgarie, n’utilisent qu’une fraction dérisoire des sommes consenties par l’Europe pour l’intégration des populations Roms, alors que les besoins, en particulier en matière de scolarisation, sont criants. Et volonté politique pour en tirer les conclusions qui s’imposent. Nous avons assumé de nous opposer fermement à l’entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dans l’Espace de Schengen tant que ces États ne se conformaient à leurs obligations pour intégrer dignement les Roms. Je n’entends pas un signal aussi clair venant de la majorité.
Mme Marie-Louise Fort. Les problématiques induites par ce sujet sont en effet nombreuses et polymorphes. À cet égard, je souhaiterais interroger les rapporteurs sur deux aspects qu’ils n’ont guère eu le temps de mentionner. En premier lieu, il serait intéressant d’étudier la diversité des réponses apportées aux difficultés migratoires posées par les populations Roms, qui diffèrent fortement selon les États membres. En second lieu, je crois essentiel d’aborder de front la question, douloureuse, des trafics et des réseaux, notamment de prostitution et de mendicité, qui contraignent les plus vulnérables à un esclavage révoltant.
M. Joaquim Pueyo. C’est en effet un sujet brûlant, qui nous préoccupe tous, quelles que soient nos sensibilités politiques. Et c’est bien le moins que l’Union s’en occupe, puisque c’est avant tout un problème européen, qui concerne tous les États membres. Il faut en effet souligner un aspect souvent méconnu par nos citoyens : les Roms sont des citoyens européens. Ils ont donc parfaitement le droit, comme tous les Européens, de séjourner moins de trois mois dans n’importe quel État membre. Les difficultés apparaissent évidemment ensuite, lorsqu’ils ne respectent pas, le cas échéant, leurs obligations de retour dans leur État d’origine. Voilà pourquoi l’Europe est interpelée au premier chef. Ensuite, j’approuve l’insistance des rapporteurs sur le caractère fondamental de la scolarisation, défi décisif mais si difficile à appliquer concrètement. Car réside ici une des problématiques les plus complexes : quels objectifs poursuivons-nous ? Est-ce d’intégrer ces populations ? De les sédentariser ? De favoriser leur intégration dans leur pays d’origine ? Une action efficace suppose que l’on soit parfaitement au clair sur nos ambitions. Enfin, je souhaiterais des précisions sur la portée de la formulation proposée dans les conclusions, qui condamnent les « expulsions forcées ».
M. Jacques Myard. Je suis très mal à l’aise avec ce rapport, qui m’apparaît exclusivement sociologique. Je ne connais pas, juridiquement, de « populations Roms ». Je connais, en droit, des ressortissants roumains ou bulgares. Or, le droit est révélateur d’une situation de fond. Les obligations incombent d’abord et avant tout aux États dont sont originaires les personnes dont vous parlez. C’est à eux d’intégrer leurs citoyens, et, après tout, des moyens doivent bien exister puisque 85% des onze millions de Roms sont aujourd’hui intégrés dans leurs pays d’origine, ou au moins sédentarisés. L’Europe doit plutôt se concentrer sur sa tâche : puisqu’elle est la cause de la liberté de circulation, qu’à tout le moins elle laisse aux États les moyens d’en garantir et d’en contrôler la bonne application et d’en prévenir les abus, dans le respect des règles communes.
Mme Audrey Linkenheld. Nous sommes tous d’accord pour dire qu’il y a là un enjeu prégnant et douloureux, que, comme nombre d’entre vous, je perçois quotidiennement sur le terrain. Car, sur les six communes principales de ma circonscription, il existe quatre villages d’insertion, qui fonctionnent bien, mais aussi de nombreux campements illicites, souvent d’ailleurs au plus près des quartiers populaires, qui posent de redoutables difficultés s’agissant tant de l’indignité des conditions de vie des populations concernées que des tensions de voisinage qu’impose inéluctablement une telle présence. Or, je crois que ces situations font beaucoup de mal à l’Europe, qui apparaît à nos concitoyens se défausser de sujets qui sont pourtant si manifestement lié à elle, puisque c’est parce que les Roms sont des citoyens de l’Union qu’ils peuvent aisément venir sur notre territoire. A tout le moins, il serait utile que Bruxelles mette en place un lieu ou forum de retours d’expérience, tant sont nombreux les acteurs publics des différents États membres qui sont confrontés à la question de l’intégration des populations Roms. Je me souviens ainsi d’un « working paper » émanant de certaines villes allemandes qui comportait des enseignements très intéressants dont nous pourrions tous bénéficier. Dans la même logique, je voudrais dire avec force que les solutions ne sauraient être stéréotypées, car le problème ne concerne en rien tous les territoires de la même manière. En France par exemple, la lucidité commande de voir que certaines Régions – je pense en particulier au Nord, à l’Île-de-France et à Rhône-Alpes – sont beaucoup plus touchées que d’autres, et que les difficultés et les solutions, par exemple s’agissant du logement et de la scolarisation, dépendent étroitement de la qualité et de la nature du tissu préexistant.
M. Jean-Louis Roumegas. Il faut d’abord à mes yeux apporter une précision fondamentale. Le problème auquel nous sommes confronté est nouveau, et il n’est pas celui de l’intégration des Gens du voyage, que notre pays traite d’ailleurs plutôt moins mal que les autres. Il est celui de l’intégration dans l’Union de pays dans lesquels une forte minorité Roms souffre de discriminations inacceptables, n’est absolument pas intégrée et par conséquent tend à profiter de la libre-circulation pour rallier des pays plus riches dans lesquels elle demeure illégalement. Je crois qu’éviter des amalgames fâcheux et trompeurs entre Roms et Gens du voyage est un premier pas décisif vers un traitement plus efficace du sujet.
M. Christophe Caresche. Ici réside en effet le cœur de la question. Ce qui est interrogé, c’est la libre circulation, qui est à l’origine des difficultés observées. Et pour parler franchement, je crois que l’Union européenne, et singulièrement la Commission, en laissant les États membres se débrouiller seuls, font preuve de faiblesse, je dirais même de lâcheté, car elles compromettent l’un des piliers de la construction européenne. La Commission est la garante de la liberté fondamentale qu’est la libre-circulation des personnes. Cela implique de faire preuve de fermeté et de courage dans son application. Sans cela, le risque est fort que nos concitoyens se détournent d’un des fondements de notre Union. Je propose que nos conclusions signalent que la question des populations Roms est le miroir de celle de la libre circulation, et qu’une mauvaise gestion de la première fait courir le risque d’abîmer irrémédiablement la seconde.
M. Pierre Lequiller. C’est précisément pourquoi je faisais tout à l’heure le lien avec l’espace de Schengen.
La Présidente Danielle Auroi. Je veux préciser, d’abord, que les difficultés d’intégration dans les pays d’origine ne se limitent pas à la Roumanie et à la Bulgarie. Je pense notamment à la République tchèque, à la Hongrie ou la Serbie, dans lesquelles vivent d’importantes minorités Roms. C’est pourquoi je vous propose que nous modifiions les propositions de conclusions en retirant les mentions spécifiques des premiers États, pour adresser nos recommandations à l’ensemble des pays concernés. Et je suggère que nous étendions nos demandes en invitant aussi ces États à s’acquitter de leurs obligations communautaires, en particulier s’agissant de l’application des mesures antidiscriminatoires. De même, je vous propose que l’on fasse une référence directe à la nécessité pour les États de soutenir pleinement l’action des points de contact nationaux et à diffuser les bonnes pratiques au cœur des administrations et des territoires.
S’agissant cette fois des seuls deux pays mentionnés, il est vrai que la problématique de leur entrée dans Schengen mérite que nous poursuivions les travaux engagés durant la précédente législature.
Concernant les responsabilités de l’Union, il faut aussi reconnaître que les États membres rechignent à lui accorder des compétences dans les domaines dont nous parlons aujourd’hui, le logement, l’éducation, l’action sociale. On ne peut donc lui reprocher de ne pas agir là où les traités lui interdisent de le faire. A l’inverse, je pense qu’il serait utile que nous mentionnions le travail décisif assumé par les nombreuses associations de la société civile sur le terrain.
M. Didier Quentin. Beaucoup de réponses ont été apportées dans les questions elles-mêmes. Je ne peux que souscrire ainsi à la conviction unanime que la scolarisation est au cœur des réponses à apporter, et que me féliciter que nous soyons tous d’accord pour nous garder des écueils également dangereux de la stigmatisation et de l'angélisme. Je me contenterais d’apporter à ce stade quelques précisions sémantiques. D’abord, la sédentarisation ne signifie pas toujours l’intégration. L’Histoire illustre à satiété le sort peu enviable des minorités « sédentarisées » dans des ghettos. Ensuite, nous parlons dans le projet de conclusion d’« expulsions forcées » pour viser des expulsions forcées dans les pays d’origine, et certainement pas les légitimes interruptions de l’occupation illicite du domaine public ou privé dans nos pays d’accueil. Enfin, je suis assez ouvert à l’idée de durcir nos recommandations en direction des États d’origine des populations Roms qui ne respectent manifestement pas leurs obligations minimales d’intégration.
Mme Marietta Karamanli. Gardons-nous toutefois de nous ériger en donneur de leçon. Le cadre que nous avons retenu est l’Union européenne. Et la position la plus équilibrée et la plus efficace me semble être celle que nous vous proposons, qui suit ce raisonnement logique : puisque l’Europe donne des sommes très importantes aux États d’origine pour intégrer leurs minorités, il me semble cohérent qu’elle puisse en contrepartie exiger des résultats et de contrôler que les crédits soient affectés – et même dépensés – au profit de cet objectif. Car force est de constater que cela n’est pas suffisamment fait aujourd’hui.
A cet égard, je ne peux que regretter que les services de la Commission européenne n’ait pas donné suite à ce jour à nos questions concernant la répartition précise et l’état de consommation des 26,5 milliards d’euros de crédits affectés par l’Union à cette question.
La question dépasse aussi largement cet aspect. Je pense que cette problématique interroge aussi les moyens dont l’Europe et les États se dotent pour assurer, en sus du contrôle des frontières, des politiques d’asile, d’immigration légale, d’accueil cohérente et digne. Et cela exige sans doute un débat sur l’équilibre actuel des compétences.
S’agissant des trafics, je veux souligner combien l’actuelle majorité est déterminée à agir avec force et sévérité, comme le montre de nombreuses initiatives législatives récentes et la ratification de nombreux instruments internationaux intégrant mieux dans notre droit les délits et crimes concernés. Nous sommes désormais mieux armés pour y faire face.
L’étude des bonnes pratiques est en effet décisive, et nous y consacrons une partie importante de notre rapport. Je pense par exemple au succès des maîtrises d’œuvre urbaines et sociales et à la place décisive de l’école et du logement. M. Didier Quentin, co-rapporteur. Avec mon collègue Jérôme Lambert, nous avions été chargés, lors de la précédente législature, d’un rapport d’information sur l’intégration de la Roumanie et de la Bulgarie au sein de l’espace Schengen, et déjà la question des Roms était au centre des débats. Je rappelle aussi qu’au mois de mars dernier la Roumanie et la Bulgarie se sont vues refuser leur entrée dans l’espace Schengen, notamment au regard de la situation des Roms dans ces deux États. Les vingt-deux Etats membres de l’espace Schengen doivent, de nouveau, se prononcer à l’unanimité d’ici à la fin de cette année sur l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à cet espace de libre circulation, à laquelle le groupe UMP est opposé, si des progrès très sérieux n’ont pas été réalisés d’ici là sur l’intégration des Roms dans ces deux pays. Des sommes considérables sont d’ailleurs versées à la Roumanie et à la Bulgarie, et force est de constater qu’il n’y a aucun progrès.
La situation des Roms préoccupe toute l'Union européenne. Je précise qu’il importe de ne pas faire d’amalgame entre les Roms, issus majoritairement de Roumanie et de Bulgarie, et dont la population est estimée à quelques 20 000 personnes sur notre territoire, et les Gens du voyage qui sont plus de 400 000, mais qui sont pour la plupart des citoyens français et auxquels s’applique la loi Besson du 5 juillet 2000, relative à l’accueil et à l’habitat des Gens du voyage.
À cet égard, vous me permettrez de faire une petite parenthèse, car les problématiques sont différentes entre ces deux populations. Avec nos collègues Dominique Raimbourg et Charles de La Verpillière, nous avions présenté devant la Commission des Lois, en 2011, un rapport visant à faire le bilan de l’application de la loi Besson.
Sur les bases de ce rapport, j’ai déposé et défendu en séance publique, en décembre 2012, une proposition de loi visant notamment à régler la question des « grands passages », en demandant à l’Etat de mobiliser des terrains militaires désaffectés ou domaniaux et de prendre la responsabilité de l’organisation de ces « grands passages ». Celle-ci a été rejetée par nos collègues de la majorité, au motif qu’elle ne couvrait pas l’intégralité des problèmes se posant aux Gens du voyage.
Nous sommes donc dans l’attente d’un texte plus ambitieux, qui a été annoncé et confié à notre collègue Dominique Raimbourg, reprenant l’essentiel des conclusions du rapport du Préfet Derrache.
Pour en revenir aux Roms proprement dits, ils sont - selon des estimations moyennes du Conseil de l’Europe - environ 11 millions dans toute l’Europe, au sens de l’espace géographique couvert par le Conseil de l’Europe, soit environ 6 millions au sein des vingt-sept États membres de l’Union européenne – le tableau détaillé figure en annexe 2 de notre rapport. Les estimations chiffrées pour toute l’Europe varient de 8 à 15 millions. Le Conseil de l’Europe estime que la formulation « de 10 à 12 millions » est la plus adaptée. De son côté, l'historienne Claire Auzias, spécialiste des Roms, estime, pour sa part, qu'il y a « un maximum de 2,5 millions Roms en Roumanie, entre 700 000 et 800 000 en Bulgarie, et entre 500 000 et 1 millions en Hongrie ». Ce qui fait au total un maximum de 4,3 millions Roms dans ces trois pays.
La grande majorité des Roms en Europe (80 % à 85 %) sont aujourd’hui sédentaires. Ceux qui conservent un mode de vie itinérante ne se trouvent plus guère qu’en France, au Benelux, en Suisse, en Irlande et au Royaume-Uni. Beaucoup sont déjà en voie de sédentarisation.
La Commission européenne a souligné, dans une communication du 7 avril 2010 portant sur « l'intégration sociale et économique des Roms en Europe », que les communautés roms dans l'Union européenne des Vingt-sept, ainsi que dans les pays candidats et candidats potentiels, ne forment pas une population homogène. Du fait de cette hétérogénéité, il ne peut y avoir une seule stratégie ; il convient, au contraire, d'élaborer des méthodes différenciées qui tiennent compte du contexte géographique, économique, social, culturel, juridique, et sans doute aussi historique.
Bien que chaque contexte soit unique, elle propose d’établir une subdivision en quatre grands types :
- les communautés roms qui vivent dans des zones urbaines ou périurbaines densément peuplées, éventuellement à proximité d'autres minorités ethniques et de groupes défavorisés de la population majoritaire ;
- les communautés qui vivent dans les quartiers défavorisés de petites villes ou de villages en zone rurale, ou dans des campements ségrégués en zone rurale, à l'écart des agglomérations ;
- les communautés roms nomades ayant la nationalité d'un État membre de l'Union européenne ;
- les communautés roms nomades ou sédentaires dont les membres sont des ressortissants de pays tiers, des réfugiés, des apatrides ou des demandeurs d'asile.
Le Conseil de l'Europe considère, quant à lui, que son objectif principal est de promouvoir une approche globale des questions roms par les États membres. À cet effet, il s'est fixé trois priorités essentielles :
- la protection des minorités ;
- la lutte contre le racisme, l'antitsiganisme et l'intolérance ;
- le combat contre l'exclusion sociale.
Pour parvenir à un progrès durable, les actions du Conseil de l’Europe sont basées sur le principe de la participation des communautés concernées, par le biais des représentants des associations de Roms.
L’amélioration de la coopération entre les acteurs européens, nationaux et internationaux, ainsi qu’avec les représentants des communautés roms, représente en effet un enjeu essentiel.
Lorsque tel n’est pas le cas, il faudra faire en sorte que les populations roms organisent leur représentation en mode associatif, de façon à constituer des interlocuteurs identifiés par les autorités publiques.
S’agissant du financement des programmes à leur destination, l’absence des Roms dans les débats sur le cadre de référence stratégique national et les programmes opérationnels risque également de porter préjudice aux projets par la suite. Leur participation à la programmation est donc très importante.
J’ajouterai sur le point du financement, qu’il est bien évidemment également très souhaitable que la Roumanie et la Bulgarie, compte tenu des fonds considérables versés par l’Union européenne, mettent en œuvre une politique d’intégration plus efficace de leurs populations roms. Je rappelle que sur la période 2007-2013, quelques 17,5 milliards d'euros ont été affectés dans douze États membres - et particulièrement en Roumanie et en Bulgarie - à des mesures en faveur des Roms et des autres populations défavorisées, avec des résultats plus que mitigés au regard de l'ampleur de l'effort demandé aux fonds communautaires (Fonds social européen, Fonds agricole pour le développement rural, Fonds de développement régional).
Selon une analyse interne de la Commission européenne, la Roumanie n'aurait pour sa part budgété que 38 millions d'euros pour des programmes visant spécifiquement cette minorité, alors que les montants prévus au titre du Fonds social européen atteignent 2,2 milliards d'euros. En Pologne, les sommes prévues uniquement pour les Roms sont de 22 millions, alors que les fonds européens dépassent 1,7 milliard…
La Commission européenne a donc fixé un « cadre de l'Union européenne » pour les stratégies nationales d'intégration des Roms, pour la période allant jusqu'à 2020, dans sa communication du 5 avril 2011 au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions fixant un cadre de l'Union européenne pour les stratégies nationales d'intégration des Roms pour la période allant jusqu'à 2020.
S’agissant de l’accès au logement en général, et des campements illégaux en particulier, elle souligne que les quartiers roms isolés, qui ne sont pas inscrits dans les plans d’urbanisme et ne disposent pas d’infrastructures adéquates, constituent l’un des problèmes socio-économiques les plus importants des communautés roms et, en retour, des collectivités où ils s’installent.
La présence sur le territoire national français de ressortissants communautaires, issus des minorités roms, et vivant dans des conditions de très grande précarité, est ainsi une question récurrente pour les pouvoirs publics.
Cette question n’est pas récente, puisque la migration des populations d’origine rom dans les pays européens commence à apparaître au tournant des années 1990, au moment où la construction européenne prend une dimension nouvelle, avec le principe de la libre circulation des personnes et où le démantèlement de l’ancien « bloc communiste » ouvre les frontières à l’Est.
L’adhésion ultérieure à l’Union européenne de certains de ces pays ne s’est pas traduite par des mouvements de population massifs. Cependant, elle a été perçue par des minorités, comme une opportunité d’améliorer des conditions d’existence particulièrement difficiles.
Cela a été le cas pour des groupes ou des familles roms, issus principalement de Roumanie et, dans une moindre mesure, de Bulgarie.
Ces personnes se sont installées en France, de façon plus ou moins durable, dans des conditions précaires, qu’il s’agisse de campements illicites ou de squats, en se concentrant majoritairement dans une quinzaine de départements, de Paris et de la région parisienne, et de la province, en périphérie des grandes agglomérations ou dans les villes-centres (Lille, Marseille, Nantes, Toulouse, Grenoble, etc.). Cette population est évaluée, après un questionnaire adressé aux préfets de département, à environ 20 000 personnes, un chiffre qui semble relativement bas.
L’occupation illicite des terrains et des squats conduit, après décision de justice, à l’évacuation des lieux. La prise en charge des populations est rendue difficile par le nombre d’occupants des sites et la composition des familles, souvent intergénérationnelle.
À travers la circulaire du 26 août 2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites, le gouvernement actuel a précisé les lignes directrices à suivre par les préfets pour administrer ces situations. Une mission interministérielle que le Premier ministre a confiée à l’inspection générale de l’administration (IGA), l’inspection générale des affaires sociales (IGAS), au conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et à l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR) a eu pour mandat d’évaluer les conditions de mise en œuvre de ces instructions et de proposer des modalités d’évolution et d’amélioration, notamment à partir des bonnes pratiques et des expérimentations conduites localement. Vous trouverez tous ces éléments détaillés dans notre rapport.
Je dirai en terminant qu’il s’agit là d’un problème très complexe qui doit être abordé de manière humaine - et même humaniste -, mais en étant bien conscient des risques qu’entrainent certains comportements de ces populations, parfois rétives à l’intégration. Sont de notoriété publique les trafics – traite des êtres humains, trafics de stupéfiants, sans parler des vols avec violence – auxquels certains s’adonnent, au sein même de cette population. Il convient donc de ne pas céder à je ne sais quelle stigmatisation, mais il ne faut pas non plus faire preuve d’angélisme.
Mme Marietta Karamanli, co-rapporteure. Notre commission a jugé utile de faire un rapport portant sur l’intégration des Roms, s’appuyant sur les débats conduits au niveau de l’Union européenne. Nous sommes restés dans ce cadre. Vous ne trouverez donc pas dans ce rapport de critiques - qu’elles soient positives ou négatives - relatives aux stratégies nationales.
Les Roms sont très généralement méconnus, et les attitudes adoptées à leur égard, ou les décisions politiques prises à leur encontre, ont été, au fil des siècles, davantage inspirées par les préjugés que par la connaissance des réalités historiques ou culturelles. La prise en compte de la problématique des Roms dans toutes les politiques européennes et nationales pertinentes est donc la voie la plus prometteuse vers l'intégration.
Le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe l’a rappelé : « les Roms - qu'ils soient citoyens du pays dans lequel ils vivent, déplacés ou migrants - sont plus défavorisés que tout autre groupe en Europe dans les domaines de l'éducation, de la santé, de l'emploi, du logement et de la participation politique. Les Roms continuent de souffrir d’une discrimination et d’un antitsiganisme de grande ampleur, qui les enferme dans une situation défavorisée, caractérisée par l’exclusion, la ségrégation et la marginalisation ».
Les États doivent ainsi par exemple « prendre des mesures énergiques pour mettre fin à la ségrégation scolaire des Roms. Pour faire évoluer la situation de cette population, il est indispensable de veiller à ce que les enfants roms aient accès au système éducatif ordinaire et y mènent leur scolarité à terme ». La ségrégation coûte cher aux États membres et c’est l’une des pires formes de discrimination à l’encontre des Roms, qui perpétue leur marginalisation.
Il incombe donc aux États - mais aussi à l’Union européenne qui doit donner l’impulsion nécessaire - de se préoccuper de combattre le racisme et la discrimination à l’encontre des Roms, et de mettre en œuvre des stratégies d’intégration qui répondent aux besoins de cette population notamment en matière de logement.
Si les axes pour l’intégration des Roms sont parfaitement identifiés, ils sont cependant beaucoup plus difficiles à mettre en œuvre. Les objectifs de l'Union européenne pour l'intégration des Roms doivent couvrir, en fonction de la taille des populations roms, quatre domaines essentiels : l'accès à l'éducation, l'emploi, les soins de santé, le logement.
A ces quatre axes, il faut en ajouter un cinquième - et non des moindres - : la lutte contre les discriminations.
L’Union européenne considère que les institutions européennes et les États membres ont une responsabilité conjointe en termes d'amélioration de l'intégration et de l'inclusion sociales des Roms. À cette fin, ils sont tenus de faire usage de tous les instruments et de toutes les politiques relevant de leur compétence. Il est important également que l’Union européenne aide les États à réaliser ces objectifs, afin d’atteindre les objectifs généraux de la stratégie Europe 2020.
Comme l’a indiqué notre collègue Didier Quentin, la Commission européenne a en effet fixé un « cadre de l'Union européenne » pour les stratégies nationales d'intégration des Roms pour la période allant jusqu'à 2020. Elle y souligne la nécessité d'une approche ciblée.
Selon elle, les stratégies nationales d'intégration des Roms requièrent un engagement politique clair de la part des États membres. À cet égard, le rapport de suivi de la Commission européenne publié le 26 juin 2013 souligne que les États membres doivent mieux mettre en œuvre les stratégies nationales d’intégration des Roms qu’ils ont présentées au titre du cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms.
Une difficulté non négligeable rend cependant difficile la réalisation de ces objectifs : les circuits de financements mobilisables pour les Roms sont complexes et relativement peu efficaces.
Or, la mise en œuvre et la réussite des stratégies nationales d'intégration des Roms passent nécessairement par une allocation efficace et suffisante des ressources.
Il existe toutefois à l'heure actuelle une programmation de 26,5 milliards d'euros de concours financier de l'Union européenne pour soutenir les efforts d’ensemble des États membres dans le domaine de l'intégration sociale. Ces fonds comprennent ceux mobilisables y compris pour l'aide à la population rom ; mais cette dernière en direction de cette partie de la population est loin d’être intégralement mobilisée.
En matière de financement, de nouveaux outils sont aussi à développer. Les partenariats sont nécessaires et doivent impliquer les autorités nationales, régionales et locales, les représentants d’entreprises, de la société civile et des communautés roms. C’est pourquoi il est souhaitable de mobiliser les outils qui ont fait leurs preuves, par exemple en développant les « bonnes pratiques ».
Cependant, malgré la volonté de la Commission européenne de favoriser l'intégration des Roms dans leur pays d'origine comme dans leur pays d'accueil, aucune incitation ou contrainte n'est imposée aux États membres. Or, un réel changement ne peut découler que d'une application efficace des politiques.
Le 27 juin 2013, la Commission européenne a présenté une proposition de recommandation du Conseil, relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres, lors de la réunion de la plateforme européenne pour l’inclusion des Roms, portant cette année essentiellement sur l’urgence d’améliorer la situation des enfants et des jeunes d’origine rom.
La proposition de recommandation du Conseil, présentée par la Commission, est le premier instrument juridique de l’Union européenne relatif à l’inclusion des Roms. Elle recommande aux États membres de prendre des mesures d’action positive pour combler les écarts entre les Roms et le reste de la population.
Cet acte renforce le cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms, approuvé en 2011 par l’ensemble des États membres, en définissant les conditions d’une inclusion effective et efficace des populations roms dans les États membres.
S’appuyant sur des communications antérieures, la proposition de recommandation porte plus particulièrement sur les quatre domaines dans lesquels les dirigeants des États membres ont souscrit, au titre du cadre de l’Union européenne, à des objectifs communs en matière d’intégration des Roms : l’accès à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé et au logement.
La recommandation prévoit en particulier :
- une action ciblée spécifique, reposant sur de bonnes pratiques, pour accroître l’intégration des Roms, dans le strict respect du principe de subsidiarité et sans reproduire la législation de l’Union déjà en vigueur. Elle concerne l’éducation, l’emploi, la santé et le logement ;
- des thèmes horizontaux qui sont essentiels pour mettre en pratique les politiques d’intégration des Roms et pour en assurer la pérennité. Il s’agit notamment de lutter contre les discriminations et les stéréotypes, de protéger les femmes et les enfants, d’adopter une stratégie d’investissements sociaux, de recueillir des informations sur la situation des Roms pour contrôler les effets des mesures, de traduire les engagements nationaux en action locale, de soutenir l’action des organismes qui œuvrent en faveur de l’égalité de traitement pour les Roms, d’accroître les ressources et les capacités des points de contact nationaux pour les Roms, et de développer la coopération transnationale ;
- des principes généraux exigeant que l’allocation de fonds (non seulement européens mais également nationaux et locaux) destinés à l’inclusion des Roms soit transparente et appropriée.
Pour entrer en vigueur, la proposition de recommandation du Conseil devra être, en premier lieu, adoptée à l’unanimité des États membres au sein du Conseil, puis approuvée par le Parlement européen. Ce texte affermira les engagements politiques déjà pris par les États membres. Ces derniers auront deux ans pour mettre en pratique les mesures nécessaires en vue de se conformer à la recommandation. Chaque année, ils devront informer la Commission des modalités d’application de cet acte. La proposition de recommandation constituant un instrument juridique non contraignant, son efficacité dépendra, en tout état de cause, de la volonté politique des États et de l’Union européenne à sa mise en œuvre.
Il est donc indispensable que cette proposition de recommandation européenne relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres soit adoptée. Celle-ci ne constitue en effet qu’une étape clef qui s’inscrit dans un long processus, dont l’aboutissement dépendra de la volonté politique de l’Union européenne et de ses États membres.
À la suite du rapport, prenant en compte les constats et les suggestions des nombreux acteurs publics, y compris les élus locaux et associatifs que nous avons rencontré au long de l’élaboration du rapport, plusieurs propositions sont faites. Elles visent à simplifier et contrôler efficacement les mesures à mettre en œuvre, à responsabiliser l’Union européenne et les États, y compris ceux où vivent en nombre les populations concernées et leurs communautés, à faire émerger des priorités et à capitaliser pratiques les plus efficaces et les plus « efficientes ».
Compte tenu de tous les éléments que nous venons de développer brièvement, et que vous trouverez de manière détaillée dans notre rapport, nous vous proposons d’adopter sept propositions de conclusions.
M. Pierre Lequiller. C’est en effet un sujet très important, sur lequel nous avions beaucoup travaillé pendant la précédente législature, et j’avais effectué à ce propos une mission à Bucarest. Cela nous avait d’ailleurs conduit à quelques conclusions que je regrette de ne pas retrouver dans l’approche retenue par l’actuelle majorité. Pour résumer, je dirais qu’il est affaire ici de volonté politique. Volonté politique pour avoir le courage de dire que les États d’origine, en particulier la Roumanie et la Bulgarie, n’utilisent qu’une fraction dérisoire des sommes consenties par l’Europe pour l’intégration des populations Roms, alors que les besoins, en particulier en matière de scolarisation, sont criants. Et volonté politique pour en tirer les conclusions qui s’imposent. Nous avons assumé de nous opposer fermement à l’entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dans l’Espace de Schengen tant que ces États ne se conformaient à leurs obligations pour intégrer dignement les Roms. Je n’entends pas un signal aussi clair venant de la majorité.
Mme Marie-Louise Fort. Les problématiques induites par ce sujet sont en effet nombreuses et polymorphes. À cet égard, je souhaiterais interroger les rapporteurs sur deux aspects qu’ils n’ont guère eu le temps de mentionner. En premier lieu, il serait intéressant d’étudier la diversité des réponses apportées aux difficultés migratoires posées par les populations Roms, qui diffèrent fortement selon les États membres. En second lieu, je crois essentiel d’aborder de front la question, douloureuse, des trafics et des réseaux, notamment de prostitution et de mendicité, qui contraignent les plus vulnérables à un esclavage révoltant.
M. Joaquim Pueyo. C’est en effet un sujet brûlant, qui nous préoccupe tous, quelles que soient nos sensibilités politiques. Et c’est bien le moins que l’Union s’en occupe, puisque c’est avant tout un problème européen, qui concerne tous les États membres. Il faut en effet souligner un aspect souvent méconnu par nos citoyens : les Roms sont des citoyens européens. Ils ont donc parfaitement le droit, comme tous les Européens, de séjourner moins de trois mois dans n’importe quel État membre. Les difficultés apparaissent évidemment ensuite, lorsqu’ils ne respectent pas, le cas échéant, leurs obligations de retour dans leur État d’origine. Voilà pourquoi l’Europe est interpelée au premier chef. Ensuite, j’approuve l’insistance des rapporteurs sur le caractère fondamental de la scolarisation, défi décisif mais si difficile à appliquer concrètement. Car réside ici une des problématiques les plus complexes : quels objectifs poursuivons-nous ? Est-ce d’intégrer ces populations ? De les sédentariser ? De favoriser leur intégration dans leur pays d’origine ? Une action efficace suppose que l’on soit parfaitement au clair sur nos ambitions. Enfin, je souhaiterais des précisions sur la portée de la formulation proposée dans les conclusions, qui condamnent les « expulsions forcées ».
M. Jacques Myard. Je suis très mal à l’aise avec ce rapport, qui m’apparaît exclusivement sociologique. Je ne connais pas, juridiquement, de « populations Roms ». Je connais, en droit, des ressortissants roumains ou bulgares. Or, le droit est révélateur d’une situation de fond. Les obligations incombent d’abord et avant tout aux États dont sont originaires les personnes dont vous parlez. C’est à eux d’intégrer leurs citoyens, et, après tout, des moyens doivent bien exister puisque 85% des onze millions de Roms sont aujourd’hui intégrés dans leurs pays d’origine, ou au moins sédentarisés. L’Europe doit plutôt se concentrer sur sa tâche : puisqu’elle est la cause de la liberté de circulation, qu’à tout le moins elle laisse aux États les moyens d’en garantir et d’en contrôler la bonne application et d’en prévenir les abus, dans le respect des règles communes.
Mme Audrey Linkenheld. Nous sommes tous d’accord pour dire qu’il y a là un enjeu prégnant et douloureux, que, comme nombre d’entre vous, je perçois quotidiennement sur le terrain. Car, sur les six communes principales de ma circonscription, il existe quatre villages d’insertion, qui fonctionnent bien, mais aussi de nombreux campements illicites, souvent d’ailleurs au plus près des quartiers populaires, qui posent de redoutables difficultés s’agissant tant de l’indignité des conditions de vie des populations concernées que des tensions de voisinage qu’impose inéluctablement une telle présence. Or, je crois que ces situations font beaucoup de mal à l’Europe, qui apparaît à nos concitoyens se défausser de sujets qui sont pourtant si manifestement lié à elle, puisque c’est parce que les Roms sont des citoyens de l’Union qu’ils peuvent aisément venir sur notre territoire. A tout le moins, il serait utile que Bruxelles mette en place un lieu ou forum de retours d’expérience, tant sont nombreux les acteurs publics des différents États membres qui sont confrontés à la question de l’intégration des populations Roms. Je me souviens ainsi d’un « working paper » émanant de certaines villes allemandes qui comportait des enseignements très intéressants dont nous pourrions tous bénéficier. Dans la même logique, je voudrais dire avec force que les solutions ne sauraient être stéréotypées, car le problème ne concerne en rien tous les territoires de la même manière. En France par exemple, la lucidité commande de voir que certaines Régions – je pense en particulier au Nord, à l’Île-de-France et à Rhône-Alpes – sont beaucoup plus touchées que d’autres, et que les difficultés et les solutions, par exemple s’agissant du logement et de la scolarisation, dépendent étroitement de la qualité et de la nature du tissu préexistant.
M. Jean-Louis Roumegas. Il faut d’abord à mes yeux apporter une précision fondamentale. Le problème auquel nous sommes confronté est nouveau, et il n’est pas celui de l’intégration des Gens du voyage, que notre pays traite d’ailleurs plutôt moins mal que les autres. Il est celui de l’intégration dans l’Union de pays dans lesquels une forte minorité Roms souffre de discriminations inacceptables, n’est absolument pas intégrée et par conséquent tend à profiter de la libre-circulation pour rallier des pays plus riches dans lesquels elle demeure illégalement. Je crois qu’éviter des amalgames fâcheux et trompeurs entre Roms et Gens du voyage est un premier pas décisif vers un traitement plus efficace du sujet.
M. Christophe Caresche. Ici réside en effet le cœur de la question. Ce qui est interrogé, c’est la libre circulation, qui est à l’origine des difficultés observées. Et pour parler franchement, je crois que l’Union européenne, et singulièrement la Commission, en laissant les États membres se débrouiller seuls, font preuve de faiblesse, je dirais même de lâcheté, car elles compromettent l’un des piliers de la construction européenne. La Commission est la garante de la liberté fondamentale qu’est la libre-circulation des personnes. Cela implique de faire preuve de fermeté et de courage dans son application. Sans cela, le risque est fort que nos concitoyens se détournent d’un des fondements de notre Union. Je propose que nos conclusions signalent que la question des populations Roms est le miroir de celle de la libre circulation, et qu’une mauvaise gestion de la première fait courir le risque d’abîmer irrémédiablement la seconde.
M. Pierre Lequiller. C’est précisément pourquoi je faisais tout à l’heure le lien avec l’espace de Schengen.
La Présidente Danielle Auroi. Je veux préciser, d’abord, que les difficultés d’intégration dans les pays d’origine ne se limitent pas à la Roumanie et à la Bulgarie. Je pense notamment à la République tchèque, à la Hongrie ou la Serbie, dans lesquelles vivent d’importantes minorités Roms. C’est pourquoi je vous propose que nous modifiions les propositions de conclusions en retirant les mentions spécifiques des premiers États, pour adresser nos recommandations à l’ensemble des pays concernés. Et je suggère que nous étendions nos demandes en invitant aussi ces États à s’acquitter de leurs obligations communautaires, en particulier s’agissant de l’application des mesures antidiscriminatoires. De même, je vous propose que l’on fasse une référence directe à la nécessité pour les États de soutenir pleinement l’action des points de contact nationaux et à diffuser les bonnes pratiques au cœur des administrations et des territoires.
S’agissant cette fois des seuls deux pays mentionnés, il est vrai que la problématique de leur entrée dans Schengen mérite que nous poursuivions les travaux engagés durant la précédente législature.
Concernant les responsabilités de l’Union, il faut aussi reconnaître que les États membres rechignent à lui accorder des compétences dans les domaines dont nous parlons aujourd’hui, le logement, l’éducation, l’action sociale. On ne peut donc lui reprocher de ne pas agir là où les traités lui interdisent de le faire. A l’inverse, je pense qu’il serait utile que nous mentionnions le travail décisif assumé par les nombreuses associations de la société civile sur le terrain.
M. Didier Quentin. Beaucoup de réponses ont été apportées dans les questions elles-mêmes. Je ne peux que souscrire ainsi à la conviction unanime que la scolarisation est au cœur des réponses à apporter, et que me féliciter que nous soyons tous d’accord pour nous garder des écueils également dangereux de la stigmatisation et de l'angélisme. Je me contenterais d’apporter à ce stade quelques précisions sémantiques. D’abord, la sédentarisation ne signifie pas toujours l’intégration. L’Histoire illustre à satiété le sort peu enviable des minorités « sédentarisées » dans des ghettos. Ensuite, nous parlons dans le projet de conclusion d’« expulsions forcées » pour viser des expulsions forcées dans les pays d’origine, et certainement pas les légitimes interruptions de l’occupation illicite du domaine public ou privé dans nos pays d’accueil. Enfin, je suis assez ouvert à l’idée de durcir nos recommandations en direction des États d’origine des populations Roms qui ne respectent manifestement pas leurs obligations minimales d’intégration.
Mme Marietta Karamanli. Gardons-nous toutefois de nous ériger en donneur de leçon. Le cadre que nous avons retenu est l’Union européenne. Et la position la plus équilibrée et la plus efficace me semble être celle que nous vous proposons, qui suit ce raisonnement logique : puisque l’Europe donne des sommes très importantes aux États d’origine pour intégrer leurs minorités, il me semble cohérent qu’elle puisse en contrepartie exiger des résultats et de contrôler que les crédits soient affectés – et même dépensés – au profit de cet objectif. Car force est de constater que cela n’est pas suffisamment fait aujourd’hui.
A cet égard, je ne peux que regretter que les services de la Commission européenne n’ait pas donné suite à ce jour à nos questions concernant la répartition précise et l’état de consommation des 26,5 milliards d’euros de crédits affectés par l’Union à cette question.
La question dépasse aussi largement cet aspect. Je pense que cette problématique interroge aussi les moyens dont l’Europe et les États se dotent pour assurer, en sus du contrôle des frontières, des politiques d’asile, d’immigration légale, d’accueil cohérente et digne. Et cela exige sans doute un débat sur l’équilibre actuel des compétences.
S’agissant des trafics, je veux souligner combien l’actuelle majorité est déterminée à agir avec force et sévérité, comme le montre de nombreuses initiatives législatives récentes et la ratification de nombreux instruments internationaux intégrant mieux dans notre droit les délits et crimes concernés. Nous sommes désormais mieux armés pour y faire face.
L’étude des bonnes pratiques est en effet décisive, et nous y consacrons une partie importante de notre rapport. Je pense par exemple au succès des maîtrises d’œuvre urbaines et sociales et à la place décisive de l’école et du logement. M. Didier Quentin, co-rapporteur. Avec mon collègue Jérôme Lambert, nous avions été chargés, lors de la précédente législature, d’un rapport d’information sur l’intégration de la Roumanie et de la Bulgarie au sein de l’espace Schengen, et déjà la question des Roms était au centre des débats. Je rappelle aussi qu’au mois de mars dernier la Roumanie et la Bulgarie se sont vues refuser leur entrée dans l’espace Schengen, notamment au regard de la situation des Roms dans ces deux États. Les vingt-deux Etats membres de l’espace Schengen doivent, de nouveau, se prononcer à l’unanimité d’ici à la fin de cette année sur l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à cet espace de libre circulation, à laquelle le groupe UMP est opposé, si des progrès très sérieux n’ont pas été réalisés d’ici là sur l’intégration des Roms dans ces deux pays. Des sommes considérables sont d’ailleurs versées à la Roumanie et à la Bulgarie, et force est de constater qu’il n’y a aucun progrès.
La situation des Roms préoccupe toute l'Union européenne. Je précise qu’il importe de ne pas faire d’amalgame entre les Roms, issus majoritairement de Roumanie et de Bulgarie, et dont la population est estimée à quelques 20 000 personnes sur notre territoire, et les Gens du voyage qui sont plus de 400 000, mais qui sont pour la plupart des citoyens français et auxquels s’applique la loi Besson du 5 juillet 2000, relative à l’accueil et à l’habitat des Gens du voyage.
À cet égard, vous me permettrez de faire une petite parenthèse, car les problématiques sont différentes entre ces deux populations. Avec nos collègues Dominique Raimbourg et Charles de La Verpillière, nous avions présenté devant la Commission des Lois, en 2011, un rapport visant à faire le bilan de l’application de la loi Besson.
Sur les bases de ce rapport, j’ai déposé et défendu en séance publique, en décembre 2012, une proposition de loi visant notamment à régler la question des « grands passages », en demandant à l’Etat de mobiliser des terrains militaires désaffectés ou domaniaux et de prendre la responsabilité de l’organisation de ces « grands passages ». Celle-ci a été rejetée par nos collègues de la majorité, au motif qu’elle ne couvrait pas l’intégralité des problèmes se posant aux Gens du voyage.
Nous sommes donc dans l’attente d’un texte plus ambitieux, qui a été annoncé et confié à notre collègue Dominique Raimbourg, reprenant l’essentiel des conclusions du rapport du Préfet Derrache.
Pour en revenir aux Roms proprement dits, ils sont - selon des estimations moyennes du Conseil de l’Europe - environ 11 millions dans toute l’Europe, au sens de l’espace géographique couvert par le Conseil de l’Europe, soit environ 6 millions au sein des vingt-sept États membres de l’Union européenne – le tableau détaillé figure en annexe 2 de notre rapport. Les estimations chiffrées pour toute l’Europe varient de 8 à 15 millions. Le Conseil de l’Europe estime que la formulation « de 10 à 12 millions » est la plus adaptée. De son côté, l'historienne Claire Auzias, spécialiste des Roms, estime, pour sa part, qu'il y a « un maximum de 2,5 millions Roms en Roumanie, entre 700 000 et 800 000 en Bulgarie, et entre 500 000 et 1 millions en Hongrie ». Ce qui fait au total un maximum de 4,3 millions Roms dans ces trois pays.
La grande majorité des Roms en Europe (80 % à 85 %) sont aujourd’hui sédentaires. Ceux qui conservent un mode de vie itinérante ne se trouvent plus guère qu’en France, au Benelux, en Suisse, en Irlande et au Royaume-Uni. Beaucoup sont déjà en voie de sédentarisation.
La Commission européenne a souligné, dans une communication du 7 avril 2010 portant sur « l'intégration sociale et économique des Roms en Europe », que les communautés roms dans l'Union européenne des Vingt-sept, ainsi que dans les pays candidats et candidats potentiels, ne forment pas une population homogène. Du fait de cette hétérogénéité, il ne peut y avoir une seule stratégie ; il convient, au contraire, d'élaborer des méthodes différenciées qui tiennent compte du contexte géographique, économique, social, culturel, juridique, et sans doute aussi historique.
Bien que chaque contexte soit unique, elle propose d’établir une subdivision en quatre grands types :
- les communautés roms qui vivent dans des zones urbaines ou périurbaines densément peuplées, éventuellement à proximité d'autres minorités ethniques et de groupes défavorisés de la population majoritaire ;
- les communautés qui vivent dans les quartiers défavorisés de petites villes ou de villages en zone rurale, ou dans des campements ségrégués en zone rurale, à l'écart des agglomérations ;
- les communautés roms nomades ayant la nationalité d'un État membre de l'Union européenne ;
- les communautés roms nomades ou sédentaires dont les membres sont des ressortissants de pays tiers, des réfugiés, des apatrides ou des demandeurs d'asile.
Le Conseil de l'Europe considère, quant à lui, que son objectif principal est de promouvoir une approche globale des questions roms par les États membres. À cet effet, il s'est fixé trois priorités essentielles :
- la protection des minorités ;
- la lutte contre le racisme, l'antitsiganisme et l'intolérance ;
- le combat contre l'exclusion sociale.
Pour parvenir à un progrès durable, les actions du Conseil de l’Europe sont basées sur le principe de la participation des communautés concernées, par le biais des représentants des associations de Roms.
L’amélioration de la coopération entre les acteurs européens, nationaux et internationaux, ainsi qu’avec les représentants des communautés roms, représente en effet un enjeu essentiel.
Lorsque tel n’est pas le cas, il faudra faire en sorte que les populations roms organisent leur représentation en mode associatif, de façon à constituer des interlocuteurs identifiés par les autorités publiques.
S’agissant du financement des programmes à leur destination, l’absence des Roms dans les débats sur le cadre de référence stratégique national et les programmes opérationnels risque également de porter préjudice aux projets par la suite. Leur participation à la programmation est donc très importante.
J’ajouterai sur le point du financement, qu’il est bien évidemment également très souhaitable que la Roumanie et la Bulgarie, compte tenu des fonds considérables versés par l’Union européenne, mettent en œuvre une politique d’intégration plus efficace de leurs populations roms. Je rappelle que sur la période 2007-2013, quelques 17,5 milliards d'euros ont été affectés dans douze États membres - et particulièrement en Roumanie et en Bulgarie - à des mesures en faveur des Roms et des autres populations défavorisées, avec des résultats plus que mitigés au regard de l'ampleur de l'effort demandé aux fonds communautaires (Fonds social européen, Fonds agricole pour le développement rural, Fonds de développement régional).
Selon une analyse interne de la Commission européenne, la Roumanie n'aurait pour sa part budgété que 38 millions d'euros pour des programmes visant spécifiquement cette minorité, alors que les montants prévus au titre du Fonds social européen atteignent 2,2 milliards d'euros. En Pologne, les sommes prévues uniquement pour les Roms sont de 22 millions, alors que les fonds européens dépassent 1,7 milliard…
La Commission européenne a donc fixé un « cadre de l'Union européenne » pour les stratégies nationales d'intégration des Roms, pour la période allant jusqu'à 2020, dans sa communication du 5 avril 2011 au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions fixant un cadre de l'Union européenne pour les stratégies nationales d'intégration des Roms pour la période allant jusqu'à 2020.
S’agissant de l’accès au logement en général, et des campements illégaux en particulier, elle souligne que les quartiers roms isolés, qui ne sont pas inscrits dans les plans d’urbanisme et ne disposent pas d’infrastructures adéquates, constituent l’un des problèmes socio-économiques les plus importants des communautés roms et, en retour, des collectivités où ils s’installent.
La présence sur le territoire national français de ressortissants communautaires, issus des minorités roms, et vivant dans des conditions de très grande précarité, est ainsi une question récurrente pour les pouvoirs publics.
Cette question n’est pas récente, puisque la migration des populations d’origine rom dans les pays européens commence à apparaître au tournant des années 1990, au moment où la construction européenne prend une dimension nouvelle, avec le principe de la libre circulation des personnes et où le démantèlement de l’ancien « bloc communiste » ouvre les frontières à l’Est.
L’adhésion ultérieure à l’Union européenne de certains de ces pays ne s’est pas traduite par des mouvements de population massifs. Cependant, elle a été perçue par des minorités, comme une opportunité d’améliorer des conditions d’existence particulièrement difficiles.
Cela a été le cas pour des groupes ou des familles roms, issus principalement de Roumanie et, dans une moindre mesure, de Bulgarie.
Ces personnes se sont installées en France, de façon plus ou moins durable, dans des conditions précaires, qu’il s’agisse de campements illicites ou de squats, en se concentrant majoritairement dans une quinzaine de départements, de Paris et de la région parisienne, et de la province, en périphérie des grandes agglomérations ou dans les villes-centres (Lille, Marseille, Nantes, Toulouse, Grenoble, etc.). Cette population est évaluée, après un questionnaire adressé aux préfets de département, à environ 20 000 personnes, un chiffre qui semble relativement bas.
L’occupation illicite des terrains et des squats conduit, après décision de justice, à l’évacuation des lieux. La prise en charge des populations est rendue difficile par le nombre d’occupants des sites et la composition des familles, souvent intergénérationnelle.
À travers la circulaire du 26 août 2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites, le gouvernement actuel a précisé les lignes directrices à suivre par les préfets pour administrer ces situations. Une mission interministérielle que le Premier ministre a confiée à l’inspection générale de l’administration (IGA), l’inspection générale des affaires sociales (IGAS), au conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et à l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR) a eu pour mandat d’évaluer les conditions de mise en œuvre de ces instructions et de proposer des modalités d’évolution et d’amélioration, notamment à partir des bonnes pratiques et des expérimentations conduites localement. Vous trouverez tous ces éléments détaillés dans notre rapport.
Je dirai en terminant qu’il s’agit là d’un problème très complexe qui doit être abordé de manière humaine - et même humaniste -, mais en étant bien conscient des risques qu’entrainent certains comportements de ces populations, parfois rétives à l’intégration. Sont de notoriété publique les trafics – traite des êtres humains, trafics de stupéfiants, sans parler des vols avec violence – auxquels certains s’adonnent, au sein même de cette population. Il convient donc de ne pas céder à je ne sais quelle stigmatisation, mais il ne faut pas non plus faire preuve d’angélisme.
Mme Marietta Karamanli, co-rapporteure. Notre commission a jugé utile de faire un rapport portant sur l’intégration des Roms, s’appuyant sur les débats conduits au niveau de l’Union européenne. Nous sommes restés dans ce cadre. Vous ne trouverez donc pas dans ce rapport de critiques - qu’elles soient positives ou négatives - relatives aux stratégies nationales.
Les Roms sont très généralement méconnus, et les attitudes adoptées à leur égard, ou les décisions politiques prises à leur encontre, ont été, au fil des siècles, davantage inspirées par les préjugés que par la connaissance des réalités historiques ou culturelles. La prise en compte de la problématique des Roms dans toutes les politiques européennes et nationales pertinentes est donc la voie la plus prometteuse vers l'intégration.
Le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe l’a rappelé : « les Roms - qu'ils soient citoyens du pays dans lequel ils vivent, déplacés ou migrants - sont plus défavorisés que tout autre groupe en Europe dans les domaines de l'éducation, de la santé, de l'emploi, du logement et de la participation politique. Les Roms continuent de souffrir d’une discrimination et d’un antitsiganisme de grande ampleur, qui les enferme dans une situation défavorisée, caractérisée par l’exclusion, la ségrégation et la marginalisation ».
Les États doivent ainsi par exemple « prendre des mesures énergiques pour mettre fin à la ségrégation scolaire des Roms. Pour faire évoluer la situation de cette population, il est indispensable de veiller à ce que les enfants roms aient accès au système éducatif ordinaire et y mènent leur scolarité à terme ». La ségrégation coûte cher aux États membres et c’est l’une des pires formes de discrimination à l’encontre des Roms, qui perpétue leur marginalisation.
Il incombe donc aux États - mais aussi à l’Union européenne qui doit donner l’impulsion nécessaire - de se préoccuper de combattre le racisme et la discrimination à l’encontre des Roms, et de mettre en œuvre des stratégies d’intégration qui répondent aux besoins de cette population notamment en matière de logement.
Si les axes pour l’intégration des Roms sont parfaitement identifiés, ils sont cependant beaucoup plus difficiles à mettre en œuvre. Les objectifs de l'Union européenne pour l'intégration des Roms doivent couvrir, en fonction de la taille des populations roms, quatre domaines essentiels : l'accès à l'éducation, l'emploi, les soins de santé, le logement.
A ces quatre axes, il faut en ajouter un cinquième - et non des moindres - : la lutte contre les discriminations.
L’Union européenne considère que les institutions européennes et les États membres ont une responsabilité conjointe en termes d'amélioration de l'intégration et de l'inclusion sociales des Roms. À cette fin, ils sont tenus de faire usage de tous les instruments et de toutes les politiques relevant de leur compétence. Il est important également que l’Union européenne aide les États à réaliser ces objectifs, afin d’atteindre les objectifs généraux de la stratégie Europe 2020.
Comme l’a indiqué notre collègue Didier Quentin, la Commission européenne a en effet fixé un « cadre de l'Union européenne » pour les stratégies nationales d'intégration des Roms pour la période allant jusqu'à 2020. Elle y souligne la nécessité d'une approche ciblée.
Selon elle, les stratégies nationales d'intégration des Roms requièrent un engagement politique clair de la part des États membres. À cet égard, le rapport de suivi de la Commission européenne publié le 26 juin 2013 souligne que les États membres doivent mieux mettre en œuvre les stratégies nationales d’intégration des Roms qu’ils ont présentées au titre du cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms.
Une difficulté non négligeable rend cependant difficile la réalisation de ces objectifs : les circuits de financements mobilisables pour les Roms sont complexes et relativement peu efficaces.
Or, la mise en œuvre et la réussite des stratégies nationales d'intégration des Roms passent nécessairement par une allocation efficace et suffisante des ressources.
Il existe toutefois à l'heure actuelle une programmation de 26,5 milliards d'euros de concours financier de l'Union européenne pour soutenir les efforts d’ensemble des États membres dans le domaine de l'intégration sociale. Ces fonds comprennent ceux mobilisables y compris pour l'aide à la population rom ; mais cette dernière en direction de cette partie de la population est loin d’être intégralement mobilisée.
En matière de financement, de nouveaux outils sont aussi à développer. Les partenariats sont nécessaires et doivent impliquer les autorités nationales, régionales et locales, les représentants d’entreprises, de la société civile et des communautés roms. C’est pourquoi il est souhaitable de mobiliser les outils qui ont fait leurs preuves, par exemple en développant les « bonnes pratiques ».
Cependant, malgré la volonté de la Commission européenne de favoriser l'intégration des Roms dans leur pays d'origine comme dans leur pays d'accueil, aucune incitation ou contrainte n'est imposée aux États membres. Or, un réel changement ne peut découler que d'une application efficace des politiques.
Le 27 juin 2013, la Commission européenne a présenté une proposition de recommandation du Conseil, relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres, lors de la réunion de la plateforme européenne pour l’inclusion des Roms, portant cette année essentiellement sur l’urgence d’améliorer la situation des enfants et des jeunes d’origine rom.
La proposition de recommandation du Conseil, présentée par la Commission, est le premier instrument juridique de l’Union européenne relatif à l’inclusion des Roms. Elle recommande aux États membres de prendre des mesures d’action positive pour combler les écarts entre les Roms et le reste de la population.
Cet acte renforce le cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms, approuvé en 2011 par l’ensemble des États membres, en définissant les conditions d’une inclusion effective et efficace des populations roms dans les États membres.
S’appuyant sur des communications antérieures, la proposition de recommandation porte plus particulièrement sur les quatre domaines dans lesquels les dirigeants des États membres ont souscrit, au titre du cadre de l’Union européenne, à des objectifs communs en matière d’intégration des Roms : l’accès à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé et au logement.
La recommandation prévoit en particulier :
- une action ciblée spécifique, reposant sur de bonnes pratiques, pour accroître l’intégration des Roms, dans le strict respect du principe de subsidiarité et sans reproduire la législation de l’Union déjà en vigueur. Elle concerne l’éducation, l’emploi, la santé et le logement ;
- des thèmes horizontaux qui sont essentiels pour mettre en pratique les politiques d’intégration des Roms et pour en assurer la pérennité. Il s’agit notamment de lutter contre les discriminations et les stéréotypes, de protéger les femmes et les enfants, d’adopter une stratégie d’investissements sociaux, de recueillir des informations sur la situation des Roms pour contrôler les effets des mesures, de traduire les engagements nationaux en action locale, de soutenir l’action des organismes qui œuvrent en faveur de l’égalité de traitement pour les Roms, d’accroître les ressources et les capacités des points de contact nationaux pour les Roms, et de développer la coopération transnationale ;
- des principes généraux exigeant que l’allocation de fonds (non seulement européens mais également nationaux et locaux) destinés à l’inclusion des Roms soit transparente et appropriée.
Pour entrer en vigueur, la proposition de recommandation du Conseil devra être, en premier lieu, adoptée à l’unanimité des États membres au sein du Conseil, puis approuvée par le Parlement européen. Ce texte affermira les engagements politiques déjà pris par les États membres. Ces derniers auront deux ans pour mettre en pratique les mesures nécessaires en vue de se conformer à la recommandation. Chaque année, ils devront informer la Commission des modalités d’application de cet acte. La proposition de recommandation constituant un instrument juridique non contraignant, son efficacité dépendra, en tout état de cause, de la volonté politique des États et de l’Union européenne à sa mise en œuvre.
Il est donc indispensable que cette proposition de recommandation européenne relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres soit adoptée. Celle-ci ne constitue en effet qu’une étape clef qui s’inscrit dans un long processus, dont l’aboutissement dépendra de la volonté politique de l’Union européenne et de ses États membres.
À la suite du rapport, prenant en compte les constats et les suggestions des nombreux acteurs publics, y compris les élus locaux et associatifs que nous avons rencontré au long de l’élaboration du rapport, plusieurs propositions sont faites. Elles visent à simplifier et contrôler efficacement les mesures à mettre en œuvre, à responsabiliser l’Union européenne et les États, y compris ceux où vivent en nombre les populations concernées et leurs communautés, à faire émerger des priorités et à capitaliser pratiques les plus efficaces et les plus « efficientes ».
Compte tenu de tous les éléments que nous venons de développer brièvement, et que vous trouverez de manière détaillée dans notre rapport, nous vous proposons d’adopter sept propositions de conclusions.
M. Pierre Lequiller. C’est en effet un sujet très important, sur lequel nous avions beaucoup travaillé pendant la précédente législature, et j’avais effectué à ce propos une mission à Bucarest. Cela nous avait d’ailleurs conduit à quelques conclusions que je regrette de ne pas retrouver dans l’approche retenue par l’actuelle majorité. Pour résumer, je dirais qu’il est affaire ici de volonté politique. Volonté politique pour avoir le courage de dire que les États d’origine, en particulier la Roumanie et la Bulgarie, n’utilisent qu’une fraction dérisoire des sommes consenties par l’Europe pour l’intégration des populations Roms, alors que les besoins, en particulier en matière de scolarisation, sont criants. Et volonté politique pour en tirer les conclusions qui s’imposent. Nous avons assumé de nous opposer fermement à l’entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dans l’Espace de Schengen tant que ces États ne se conformaient à leurs obligations pour intégrer dignement les Roms. Je n’entends pas un signal aussi clair venant de la majorité.
Mme Marie-Louise Fort. Les problématiques induites par ce sujet sont en effet nombreuses et polymorphes. À cet égard, je souhaiterais interroger les rapporteurs sur deux aspects qu’ils n’ont guère eu le temps de mentionner. En premier lieu, il serait intéressant d’étudier la diversité des réponses apportées aux difficultés migratoires posées par les populations Roms, qui diffèrent fortement selon les États membres. En second lieu, je crois essentiel d’aborder de front la question, douloureuse, des trafics et des réseaux, notamment de prostitution et de mendicité, qui contraignent les plus vulnérables à un esclavage révoltant.
M. Joaquim Pueyo. C’est en effet un sujet brûlant, qui nous préoccupe tous, quelles que soient nos sensibilités politiques. Et c’est bien le moins que l’Union s’en occupe, puisque c’est avant tout un problème européen, qui concerne tous les États membres. Il faut en effet souligner un aspect souvent méconnu par nos citoyens : les Roms sont des citoyens européens. Ils ont donc parfaitement le droit, comme tous les Européens, de séjourner moins de trois mois dans n’importe quel État membre. Les difficultés apparaissent évidemment ensuite, lorsqu’ils ne respectent pas, le cas échéant, leurs obligations de retour dans leur État d’origine. Voilà pourquoi l’Europe est interpelée au premier chef. Ensuite, j’approuve l’insistance des rapporteurs sur le caractère fondamental de la scolarisation, défi décisif mais si difficile à appliquer concrètement. Car réside ici une des problématiques les plus complexes : quels objectifs poursuivons-nous ? Est-ce d’intégrer ces populations ? De les sédentariser ? De favoriser leur intégration dans leur pays d’origine ? Une action efficace suppose que l’on soit parfaitement au clair sur nos ambitions. Enfin, je souhaiterais des précisions sur la portée de la formulation proposée dans les conclusions, qui condamnent les « expulsions forcées ».
M. Jacques Myard. Je suis très mal à l’aise avec ce rapport, qui m’apparaît exclusivement sociologique. Je ne connais pas, juridiquement, de « populations Roms ». Je connais, en droit, des ressortissants roumains ou bulgares. Or, le droit est révélateur d’une situation de fond. Les obligations incombent d’abord et avant tout aux États dont sont originaires les personnes dont vous parlez. C’est à eux d’intégrer leurs citoyens, et, après tout, des moyens doivent bien exister puisque 85% des onze millions de Roms sont aujourd’hui intégrés dans leurs pays d’origine, ou au moins sédentarisés. L’Europe doit plutôt se concentrer sur sa tâche : puisqu’elle est la cause de la liberté de circulation, qu’à tout le moins elle laisse aux États les moyens d’en garantir et d’en contrôler la bonne application et d’en prévenir les abus, dans le respect des règles communes.
Mme Audrey Linkenheld. Nous sommes tous d’accord pour dire qu’il y a là un enjeu prégnant et douloureux, que, comme nombre d’entre vous, je perçois quotidiennement sur le terrain. Car, sur les six communes principales de ma circonscription, il existe quatre villages d’insertion, qui fonctionnent bien, mais aussi de nombreux campements illicites, souvent d’ailleurs au plus près des quartiers populaires, qui posent de redoutables difficultés s’agissant tant de l’indignité des conditions de vie des populations concernées que des tensions de voisinage qu’impose inéluctablement une telle présence. Or, je crois que ces situations font beaucoup de mal à l’Europe, qui apparaît à nos concitoyens se défausser de sujets qui sont pourtant si manifestement lié à elle, puisque c’est parce que les Roms sont des citoyens de l’Union qu’ils peuvent aisément venir sur notre territoire. A tout le moins, il serait utile que Bruxelles mette en place un lieu ou forum de retours d’expérience, tant sont nombreux les acteurs publics des différents États membres qui sont confrontés à la question de l’intégration des populations Roms. Je me souviens ainsi d’un « working paper » émanant de certaines villes allemandes qui comportait des enseignements très intéressants dont nous pourrions tous bénéficier. Dans la même logique, je voudrais dire avec force que les solutions ne sauraient être stéréotypées, car le problème ne concerne en rien tous les territoires de la même manière. En France par exemple, la lucidité commande de voir que certaines Régions – je pense en particulier au Nord, à l’Île-de-France et à Rhône-Alpes – sont beaucoup plus touchées que d’autres, et que les difficultés et les solutions, par exemple s’agissant du logement et de la scolarisation, dépendent étroitement de la qualité et de la nature du tissu préexistant.
M. Jean-Louis Roumegas. Il faut d’abord à mes yeux apporter une précision fondamentale. Le problème auquel nous sommes confronté est nouveau, et il n’est pas celui de l’intégration des Gens du voyage, que notre pays traite d’ailleurs plutôt moins mal que les autres. Il est celui de l’intégration dans l’Union de pays dans lesquels une forte minorité Roms souffre de discriminations inacceptables, n’est absolument pas intégrée et par conséquent tend à profiter de la libre-circulation pour rallier des pays plus riches dans lesquels elle demeure illégalement. Je crois qu’éviter des amalgames fâcheux et trompeurs entre Roms et Gens du voyage est un premier pas décisif vers un traitement plus efficace du sujet.
M. Christophe Caresche. Ici réside en effet le cœur de la question. Ce qui est interrogé, c’est la libre circulation, qui est à l’origine des difficultés observées. Et pour parler franchement, je crois que l’Union européenne, et singulièrement la Commission, en laissant les États membres se débrouiller seuls, font preuve de faiblesse, je dirais même de lâcheté, car elles compromettent l’un des piliers de la construction européenne. La Commission est la garante de la liberté fondamentale qu’est la libre-circulation des personnes. Cela implique de faire preuve de fermeté et de courage dans son application. Sans cela, le risque est fort que nos concitoyens se détournent d’un des fondements de notre Union. Je propose que nos conclusions signalent que la question des populations Roms est le miroir de celle de la libre circulation, et qu’une mauvaise gestion de la première fait courir le risque d’abîmer irrémédiablement la seconde.
M. Pierre Lequiller. C’est précisément pourquoi je faisais tout à l’heure le lien avec l’espace de Schengen.
La Présidente Danielle Auroi. Je veux préciser, d’abord, que les difficultés d’intégration dans les pays d’origine ne se limitent pas à la Roumanie et à la Bulgarie. Je pense notamment à la République tchèque, à la Hongrie ou la Serbie, dans lesquelles vivent d’importantes minorités Roms. C’est pourquoi je vous propose que nous modifiions les propositions de conclusions en retirant les mentions spécifiques des premiers États, pour adresser nos recommandations à l’ensemble des pays concernés. Et je suggère que nous étendions nos demandes en invitant aussi ces États à s’acquitter de leurs obligations communautaires, en particulier s’agissant de l’application des mesures antidiscriminatoires. De même, je vous propose que l’on fasse une référence directe à la nécessité pour les États de soutenir pleinement l’action des points de contact nationaux et à diffuser les bonnes pratiques au cœur des administrations et des territoires.
S’agissant cette fois des seuls deux pays mentionnés, il est vrai que la problématique de leur entrée dans Schengen mérite que nous poursuivions les travaux engagés durant la précédente législature.
Concernant les responsabilités de l’Union, il faut aussi reconnaître que les États membres rechignent à lui accorder des compétences dans les domaines dont nous parlons aujourd’hui, le logement, l’éducation, l’action sociale. On ne peut donc lui reprocher de ne pas agir là où les traités lui interdisent de le faire. A l’inverse, je pense qu’il serait utile que nous mentionnions le travail décisif assumé par les nombreuses associations de la société civile sur le terrain.
M. Didier Quentin. Beaucoup de réponses ont été apportées dans les questions elles-mêmes. Je ne peux que souscrire ainsi à la conviction unanime que la scolarisation est au cœur des réponses à apporter, et que me féliciter que nous soyons tous d’accord pour nous garder des écueils également dangereux de la stigmatisation et de l'angélisme. Je me contenterais d’apporter à ce stade quelques précisions sémantiques. D’abord, la sédentarisation ne signifie pas toujours l’intégration. L’Histoire illustre à satiété le sort peu enviable des minorités « sédentarisées » dans des ghettos. Ensuite, nous parlons dans le projet de conclusion d’« expulsions forcées » pour viser des expulsions forcées dans les pays d’origine, et certainement pas les légitimes interruptions de l’occupation illicite du domaine public ou privé dans nos pays d’accueil. Enfin, je suis assez ouvert à l’idée de durcir nos recommandations en direction des États d’origine des populations Roms qui ne respectent manifestement pas leurs obligations minimales d’intégration.
Mme Marietta Karamanli. Gardons-nous toutefois de nous ériger en donneur de leçon. Le cadre que nous avons retenu est l’Union européenne. Et la position la plus équilibrée et la plus efficace me semble être celle que nous vous proposons, qui suit ce raisonnement logique : puisque l’Europe donne des sommes très importantes aux États d’origine pour intégrer leurs minorités, il me semble cohérent qu’elle puisse en contrepartie exiger des résultats et de contrôler que les crédits soient affectés – et même dépensés – au profit de cet objectif. Car force est de constater que cela n’est pas suffisamment fait aujourd’hui.
A cet égard, je ne peux que regretter que les services de la Commission européenne n’ait pas donné suite à ce jour à nos questions concernant la répartition précise et l’état de consommation des 26,5 milliards d’euros de crédits affectés par l’Union à cette question.
La question dépasse aussi largement cet aspect. Je pense que cette problématique interroge aussi les moyens dont l’Europe et les États se dotent pour assurer, en sus du contrôle des frontières, des politiques d’asile, d’immigration légale, d’accueil cohérente et digne. Et cela exige sans doute un débat sur l’équilibre actuel des compétences.
S’agissant des trafics, je veux souligner combien l’actuelle majorité est déterminée à agir avec force et sévérité, comme le montre de nombreuses initiatives législatives récentes et la ratification de nombreux instruments internationaux intégrant mieux dans notre droit les délits et crimes concernés. Nous sommes désormais mieux armés pour y faire face.
L’étude des bonnes pratiques est en effet décisive, et nous y consacrons une partie importante de notre rapport. Je pense par exemple au succès des maîtrises d’œuvre urbaines et sociales et à la place décisive de l’école et du logement. M. Didier Quentin, co-rapporteur. Avec mon collègue Jérôme Lambert, nous avions été chargés, lors de la précédente législature, d’un rapport d’information sur l’intégration de la Roumanie et de la Bulgarie au sein de l’espace Schengen, et déjà la question des Roms était au centre des débats. Je rappelle aussi qu’au mois de mars dernier la Roumanie et la Bulgarie se sont vues refuser leur entrée dans l’espace Schengen, notamment au regard de la situation des Roms dans ces deux États. Les vingt-deux Etats membres de l’espace Schengen doivent, de nouveau, se prononcer à l’unanimité d’ici à la fin de cette année sur l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à cet espace de libre circulation, à laquelle le groupe UMP est opposé, si des progrès très sérieux n’ont pas été réalisés d’ici là sur l’intégration des Roms dans ces deux pays. Des sommes considérables sont d’ailleurs versées à la Roumanie et à la Bulgarie, et force est de constater qu’il n’y a aucun progrès.
La situation des Roms préoccupe toute l'Union européenne. Je précise qu’il importe de ne pas faire d’amalgame entre les Roms, issus majoritairement de Roumanie et de Bulgarie, et dont la population est estimée à quelques 20 000 personnes sur notre territoire, et les Gens du voyage qui sont plus de 400 000, mais qui sont pour la plupart des citoyens français et auxquels s’applique la loi Besson du 5 juillet 2000, relative à l’accueil et à l’habitat des Gens du voyage.
À cet égard, vous me permettrez de faire une petite parenthèse, car les problématiques sont différentes entre ces deux populations. Avec nos collègues Dominique Raimbourg et Charles de La Verpillière, nous avions présenté devant la Commission des Lois, en 2011, un rapport visant à faire le bilan de l’application de la loi Besson.
Sur les bases de ce rapport, j’ai déposé et défendu en séance publique, en décembre 2012, une proposition de loi visant notamment à régler la question des « grands passages », en demandant à l’Etat de mobiliser des terrains militaires désaffectés ou domaniaux et de prendre la responsabilité de l’organisation de ces « grands passages ». Celle-ci a été rejetée par nos collègues de la majorité, au motif qu’elle ne couvrait pas l’intégralité des problèmes se posant aux Gens du voyage.
Nous sommes donc dans l’attente d’un texte plus ambitieux, qui a été annoncé et confié à notre collègue Dominique Raimbourg, reprenant l’essentiel des conclusions du rapport du Préfet Derrache.
Pour en revenir aux Roms proprement dits, ils sont - selon des estimations moyennes du Conseil de l’Europe - environ 11 millions dans toute l’Europe, au sens de l’espace géographique couvert par le Conseil de l’Europe, soit environ 6 millions au sein des vingt-sept États membres de l’Union européenne – le tableau détaillé figure en annexe 2 de notre rapport. Les estimations chiffrées pour toute l’Europe varient de 8 à 15 millions. Le Conseil de l’Europe estime que la formulation « de 10 à 12 millions » est la plus adaptée. De son côté, l'historienne Claire Auzias, spécialiste des Roms, estime, pour sa part, qu'il y a « un maximum de 2,5 millions Roms en Roumanie, entre 700 000 et 800 000 en Bulgarie, et entre 500 000 et 1 millions en Hongrie ». Ce qui fait au total un maximum de 4,3 millions Roms dans ces trois pays.
La grande majorité des Roms en Europe (80 % à 85 %) sont aujourd’hui sédentaires. Ceux qui conservent un mode de vie itinérante ne se trouvent plus guère qu’en France, au Benelux, en Suisse, en Irlande et au Royaume-Uni. Beaucoup sont déjà en voie de sédentarisation.
La Commission européenne a souligné, dans une communication du 7 avril 2010 portant sur « l'intégration sociale et économique des Roms en Europe », que les communautés roms dans l'Union européenne des Vingt-sept, ainsi que dans les pays candidats et candidats potentiels, ne forment pas une population homogène. Du fait de cette hétérogénéité, il ne peut y avoir une seule stratégie ; il convient, au contraire, d'élaborer des méthodes différenciées qui tiennent compte du contexte géographique, économique, social, culturel, juridique, et sans doute aussi historique.
Bien que chaque contexte soit unique, elle propose d’établir une subdivision en quatre grands types :
- les communautés roms qui vivent dans des zones urbaines ou périurbaines densément peuplées, éventuellement à proximité d'autres minorités ethniques et de groupes défavorisés de la population majoritaire ;
- les communautés qui vivent dans les quartiers défavorisés de petites villes ou de villages en zone rurale, ou dans des campements ségrégués en zone rurale, à l'écart des agglomérations ;
- les communautés roms nomades ayant la nationalité d'un État membre de l'Union européenne ;
- les communautés roms nomades ou sédentaires dont les membres sont des ressortissants de pays tiers, des réfugiés, des apatrides ou des demandeurs d'asile.
Le Conseil de l'Europe considère, quant à lui, que son objectif principal est de promouvoir une approche globale des questions roms par les États membres. À cet effet, il s'est fixé trois priorités essentielles :
- la protection des minorités ;
- la lutte contre le racisme, l'antitsiganisme et l'intolérance ;
- le combat contre l'exclusion sociale.
Pour parvenir à un progrès durable, les actions du Conseil de l’Europe sont basées sur le principe de la participation des communautés concernées, par le biais des représentants des associations de Roms.
L’amélioration de la coopération entre les acteurs européens, nationaux et internationaux, ainsi qu’avec les représentants des communautés roms, représente en effet un enjeu essentiel.
Lorsque tel n’est pas le cas, il faudra faire en sorte que les populations roms organisent leur représentation en mode associatif, de façon à constituer des interlocuteurs identifiés par les autorités publiques.
S’agissant du financement des programmes à leur destination, l’absence des Roms dans les débats sur le cadre de référence stratégique national et les programmes opérationnels risque également de porter préjudice aux projets par la suite. Leur participation à la programmation est donc très importante.
J’ajouterai sur le point du financement, qu’il est bien évidemment également très souhaitable que la Roumanie et la Bulgarie, compte tenu des fonds considérables versés par l’Union européenne, mettent en œuvre une politique d’intégration plus efficace de leurs populations roms. Je rappelle que sur la période 2007-2013, quelques 17,5 milliards d'euros ont été affectés dans douze États membres - et particulièrement en Roumanie et en Bulgarie - à des mesures en faveur des Roms et des autres populations défavorisées, avec des résultats plus que mitigés au regard de l'ampleur de l'effort demandé aux fonds communautaires (Fonds social européen, Fonds agricole pour le développement rural, Fonds de développement régional).
Selon une analyse interne de la Commission européenne, la Roumanie n'aurait pour sa part budgété que 38 millions d'euros pour des programmes visant spécifiquement cette minorité, alors que les montants prévus au titre du Fonds social européen atteignent 2,2 milliards d'euros. En Pologne, les sommes prévues uniquement pour les Roms sont de 22 millions, alors que les fonds européens dépassent 1,7 milliard…
La Commission européenne a donc fixé un « cadre de l'Union européenne » pour les stratégies nationales d'intégration des Roms, pour la période allant jusqu'à 2020, dans sa communication du 5 avril 2011 au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions fixant un cadre de l'Union européenne pour les stratégies nationales d'intégration des Roms pour la période allant jusqu'à 2020.
S’agissant de l’accès au logement en général, et des campements illégaux en particulier, elle souligne que les quartiers roms isolés, qui ne sont pas inscrits dans les plans d’urbanisme et ne disposent pas d’infrastructures adéquates, constituent l’un des problèmes socio-économiques les plus importants des communautés roms et, en retour, des collectivités où ils s’installent.
La présence sur le territoire national français de ressortissants communautaires, issus des minorités roms, et vivant dans des conditions de très grande précarité, est ainsi une question récurrente pour les pouvoirs publics.
Cette question n’est pas récente, puisque la migration des populations d’origine rom dans les pays européens commence à apparaître au tournant des années 1990, au moment où la construction européenne prend une dimension nouvelle, avec le principe de la libre circulation des personnes et où le démantèlement de l’ancien « bloc communiste » ouvre les frontières à l’Est.
L’adhésion ultérieure à l’Union européenne de certains de ces pays ne s’est pas traduite par des mouvements de population massifs. Cependant, elle a été perçue par des minorités, comme une opportunité d’améliorer des conditions d’existence particulièrement difficiles.
Cela a été le cas pour des groupes ou des familles roms, issus principalement de Roumanie et, dans une moindre mesure, de Bulgarie.
Ces personnes se sont installées en France, de façon plus ou moins durable, dans des conditions précaires, qu’il s’agisse de campements illicites ou de squats, en se concentrant majoritairement dans une quinzaine de départements, de Paris et de la région parisienne, et de la province, en périphérie des grandes agglomérations ou dans les villes-centres (Lille, Marseille, Nantes, Toulouse, Grenoble, etc.). Cette population est évaluée, après un questionnaire adressé aux préfets de département, à environ 20 000 personnes, un chiffre qui semble relativement bas.
L’occupation illicite des terrains et des squats conduit, après décision de justice, à l’évacuation des lieux. La prise en charge des populations est rendue difficile par le nombre d’occupants des sites et la composition des familles, souvent intergénérationnelle.
À travers la circulaire du 26 août 2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites, le gouvernement actuel a précisé les lignes directrices à suivre par les préfets pour administrer ces situations. Une mission interministérielle que le Premier ministre a confiée à l’inspection générale de l’administration (IGA), l’inspection générale des affaires sociales (IGAS), au conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et à l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR) a eu pour mandat d’évaluer les conditions de mise en œuvre de ces instructions et de proposer des modalités d’évolution et d’amélioration, notamment à partir des bonnes pratiques et des expérimentations conduites localement. Vous trouverez tous ces éléments détaillés dans notre rapport.
Je dirai en terminant qu’il s’agit là d’un problème très complexe qui doit être abordé de manière humaine - et même humaniste -, mais en étant bien conscient des risques qu’entrainent certains comportements de ces populations, parfois rétives à l’intégration. Sont de notoriété publique les trafics – traite des êtres humains, trafics de stupéfiants, sans parler des vols avec violence – auxquels certains s’adonnent, au sein même de cette population. Il convient donc de ne pas céder à je ne sais quelle stigmatisation, mais il ne faut pas non plus faire preuve d’angélisme.
Mme Marietta Karamanli, co-rapporteure. Notre commission a jugé utile de faire un rapport portant sur l’intégration des Roms, s’appuyant sur les débats conduits au niveau de l’Union européenne. Nous sommes restés dans ce cadre. Vous ne trouverez donc pas dans ce rapport de critiques - qu’elles soient positives ou négatives - relatives aux stratégies nationales.
Les Roms sont très généralement méconnus, et les attitudes adoptées à leur égard, ou les décisions politiques prises à leur encontre, ont été, au fil des siècles, davantage inspirées par les préjugés que par la connaissance des réalités historiques ou culturelles. La prise en compte de la problématique des Roms dans toutes les politiques européennes et nationales pertinentes est donc la voie la plus prometteuse vers l'intégration.
Le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe l’a rappelé : « les Roms - qu'ils soient citoyens du pays dans lequel ils vivent, déplacés ou migrants - sont plus défavorisés que tout autre groupe en Europe dans les domaines de l'éducation, de la santé, de l'emploi, du logement et de la participation politique. Les Roms continuent de souffrir d’une discrimination et d’un antitsiganisme de grande ampleur, qui les enferme dans une situation défavorisée, caractérisée par l’exclusion, la ségrégation et la marginalisation ».
Les États doivent ainsi par exemple « prendre des mesures énergiques pour mettre fin à la ségrégation scolaire des Roms. Pour faire évoluer la situation de cette population, il est indispensable de veiller à ce que les enfants roms aient accès au système éducatif ordinaire et y mènent leur scolarité à terme ». La ségrégation coûte cher aux États membres et c’est l’une des pires formes de discrimination à l’encontre des Roms, qui perpétue leur marginalisation.
Il incombe donc aux États - mais aussi à l’Union européenne qui doit donner l’impulsion nécessaire - de se préoccuper de combattre le racisme et la discrimination à l’encontre des Roms, et de mettre en œuvre des stratégies d’intégration qui répondent aux besoins de cette population notamment en matière de logement.
Si les axes pour l’intégration des Roms sont parfaitement identifiés, ils sont cependant beaucoup plus difficiles à mettre en œuvre. Les objectifs de l'Union européenne pour l'intégration des Roms doivent couvrir, en fonction de la taille des populations roms, quatre domaines essentiels : l'accès à l'éducation, l'emploi, les soins de santé, le logement.
A ces quatre axes, il faut en ajouter un cinquième - et non des moindres - : la lutte contre les discriminations.
L’Union européenne considère que les institutions européennes et les États membres ont une responsabilité conjointe en termes d'amélioration de l'intégration et de l'inclusion sociales des Roms. À cette fin, ils sont tenus de faire usage de tous les instruments et de toutes les politiques relevant de leur compétence. Il est important également que l’Union européenne aide les États à réaliser ces objectifs, afin d’atteindre les objectifs généraux de la stratégie Europe 2020.
Comme l’a indiqué notre collègue Didier Quentin, la Commission européenne a en effet fixé un « cadre de l'Union européenne » pour les stratégies nationales d'intégration des Roms pour la période allant jusqu'à 2020. Elle y souligne la nécessité d'une approche ciblée.
Selon elle, les stratégies nationales d'intégration des Roms requièrent un engagement politique clair de la part des États membres. À cet égard, le rapport de suivi de la Commission européenne publié le 26 juin 2013 souligne que les États membres doivent mieux mettre en œuvre les stratégies nationales d’intégration des Roms qu’ils ont présentées au titre du cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms.
Une difficulté non négligeable rend cependant difficile la réalisation de ces objectifs : les circuits de financements mobilisables pour les Roms sont complexes et relativement peu efficaces.
Or, la mise en œuvre et la réussite des stratégies nationales d'intégration des Roms passent nécessairement par une allocation efficace et suffisante des ressources.
Il existe toutefois à l'heure actuelle une programmation de 26,5 milliards d'euros de concours financier de l'Union européenne pour soutenir les efforts d’ensemble des États membres dans le domaine de l'intégration sociale. Ces fonds comprennent ceux mobilisables y compris pour l'aide à la population rom ; mais cette dernière en direction de cette partie de la population est loin d’être intégralement mobilisée.
En matière de financement, de nouveaux outils sont aussi à développer. Les partenariats sont nécessaires et doivent impliquer les autorités nationales, régionales et locales, les représentants d’entreprises, de la société civile et des communautés roms. C’est pourquoi il est souhaitable de mobiliser les outils qui ont fait leurs preuves, par exemple en développant les « bonnes pratiques ».
Cependant, malgré la volonté de la Commission européenne de favoriser l'intégration des Roms dans leur pays d'origine comme dans leur pays d'accueil, aucune incitation ou contrainte n'est imposée aux États membres. Or, un réel changement ne peut découler que d'une application efficace des politiques.
Le 27 juin 2013, la Commission européenne a présenté une proposition de recommandation du Conseil, relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres, lors de la réunion de la plateforme européenne pour l’inclusion des Roms, portant cette année essentiellement sur l’urgence d’améliorer la situation des enfants et des jeunes d’origine rom.
La proposition de recommandation du Conseil, présentée par la Commission, est le premier instrument juridique de l’Union européenne relatif à l’inclusion des Roms. Elle recommande aux États membres de prendre des mesures d’action positive pour combler les écarts entre les Roms et le reste de la population.
Cet acte renforce le cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms, approuvé en 2011 par l’ensemble des États membres, en définissant les conditions d’une inclusion effective et efficace des populations roms dans les États membres.
S’appuyant sur des communications antérieures, la proposition de recommandation porte plus particulièrement sur les quatre domaines dans lesquels les dirigeants des États membres ont souscrit, au titre du cadre de l’Union européenne, à des objectifs communs en matière d’intégration des Roms : l’accès à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé et au logement.
La recommandation prévoit en particulier :
- une action ciblée spécifique, reposant sur de bonnes pratiques, pour accroître l’intégration des Roms, dans le strict respect du principe de subsidiarité et sans reproduire la législation de l’Union déjà en vigueur. Elle concerne l’éducation, l’emploi, la santé et le logement ;
- des thèmes horizontaux qui sont essentiels pour mettre en pratique les politiques d’intégration des Roms et pour en assurer la pérennité. Il s’agit notamment de lutter contre les discriminations et les stéréotypes, de protéger les femmes et les enfants, d’adopter une stratégie d’investissements sociaux, de recueillir des informations sur la situation des Roms pour contrôler les effets des mesures, de traduire les engagements nationaux en action locale, de soutenir l’action des organismes qui œuvrent en faveur de l’égalité de traitement pour les Roms, d’accroître les ressources et les capacités des points de contact nationaux pour les Roms, et de développer la coopération transnationale ;
- des principes généraux exigeant que l’allocation de fonds (non seulement européens mais également nationaux et locaux) destinés à l’inclusion des Roms soit transparente et appropriée.
Pour entrer en vigueur, la proposition de recommandation du Conseil devra être, en premier lieu, adoptée à l’unanimité des États membres au sein du Conseil, puis approuvée par le Parlement européen. Ce texte affermira les engagements politiques déjà pris par les États membres. Ces derniers auront deux ans pour mettre en pratique les mesures nécessaires en vue de se conformer à la recommandation. Chaque année, ils devront informer la Commission des modalités d’application de cet acte. La proposition de recommandation constituant un instrument juridique non contraignant, son efficacité dépendra, en tout état de cause, de la volonté politique des États et de l’Union européenne à sa mise en œuvre.
Il est donc indispensable que cette proposition de recommandation européenne relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres soit adoptée. Celle-ci ne constitue en effet qu’une étape clef qui s’inscrit dans un long processus, dont l’aboutissement dépendra de la volonté politique de l’Union européenne et de ses États membres.
À la suite du rapport, prenant en compte les constats et les suggestions des nombreux acteurs publics, y compris les élus locaux et associatifs que nous avons rencontré au long de l’élaboration du rapport, plusieurs propositions sont faites. Elles visent à simplifier et contrôler efficacement les mesures à mettre en œuvre, à responsabiliser l’Union européenne et les États, y compris ceux où vivent en nombre les populations concernées et leurs communautés, à faire émerger des priorités et à capitaliser pratiques les plus efficaces et les plus « efficientes ».
Compte tenu de tous les éléments que nous venons de développer brièvement, et que vous trouverez de manière détaillée dans notre rapport, nous vous proposons d’adopter sept propositions de conclusions.
M. Pierre Lequiller. C’est en effet un sujet très important, sur lequel nous avions beaucoup travaillé pendant la précédente législature, et j’avais effectué à ce propos une mission à Bucarest. Cela nous avait d’ailleurs conduit à quelques conclusions que je regrette de ne pas retrouver dans l’approche retenue par l’actuelle majorité. Pour résumer, je dirais qu’il est affaire ici de volonté politique. Volonté politique pour avoir le courage de dire que les États d’origine, en particulier la Roumanie et la Bulgarie, n’utilisent qu’une fraction dérisoire des sommes consenties par l’Europe pour l’intégration des populations Roms, alors que les besoins, en particulier en matière de scolarisation, sont criants. Et volonté politique pour en tirer les conclusions qui s’imposent. Nous avons assumé de nous opposer fermement à l’entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dans l’Espace de Schengen tant que ces États ne se conformaient à leurs obligations pour intégrer dignement les Roms. Je n’entends pas un signal aussi clair venant de la majorité.
Mme Marie-Louise Fort. Les problématiques induites par ce sujet sont en effet nombreuses et polymorphes. À cet égard, je souhaiterais interroger les rapporteurs sur deux aspects qu’ils n’ont guère eu le temps de mentionner. En premier lieu, il serait intéressant d’étudier la diversité des réponses apportées aux difficultés migratoires posées par les populations Roms, qui diffèrent fortement selon les États membres. En second lieu, je crois essentiel d’aborder de front la question, douloureuse, des trafics et des réseaux, notamment de prostitution et de mendicité, qui contraignent les plus vulnérables à un esclavage révoltant.
M. Joaquim Pueyo. C’est en effet un sujet brûlant, qui nous préoccupe tous, quelles que soient nos sensibilités politiques. Et c’est bien le moins que l’Union s’en occupe, puisque c’est avant tout un problème européen, qui concerne tous les États membres. Il faut en effet souligner un aspect souvent méconnu par nos citoyens : les Roms sont des citoyens européens. Ils ont donc parfaitement le droit, comme tous les Européens, de séjourner moins de trois mois dans n’importe quel État membre. Les difficultés apparaissent évidemment ensuite, lorsqu’ils ne respectent pas, le cas échéant, leurs obligations de retour dans leur État d’origine. Voilà pourquoi l’Europe est interpelée au premier chef. Ensuite, j’approuve l’insistance des rapporteurs sur le caractère fondamental de la scolarisation, défi décisif mais si difficile à appliquer concrètement. Car réside ici une des problématiques les plus complexes : quels objectifs poursuivons-nous ? Est-ce d’intégrer ces populations ? De les sédentariser ? De favoriser leur intégration dans leur pays d’origine ? Une action efficace suppose que l’on soit parfaitement au clair sur nos ambitions. Enfin, je souhaiterais des précisions sur la portée de la formulation proposée dans les conclusions, qui condamnent les « expulsions forcées ».
M. Jacques Myard. Je suis très mal à l’aise avec ce rapport, qui m’apparaît exclusivement sociologique. Je ne connais pas, juridiquement, de « populations Roms ». Je connais, en droit, des ressortissants roumains ou bulgares. Or, le droit est révélateur d’une situation de fond. Les obligations incombent d’abord et avant tout aux États dont sont originaires les personnes dont vous parlez. C’est à eux d’intégrer leurs citoyens, et, après tout, des moyens doivent bien exister puisque 85% des onze millions de Roms sont aujourd’hui intégrés dans leurs pays d’origine, ou au moins sédentarisés. L’Europe doit plutôt se concentrer sur sa tâche : puisqu’elle est la cause de la liberté de circulation, qu’à tout le moins elle laisse aux États les moyens d’en garantir et d’en contrôler la bonne application et d’en prévenir les abus, dans le respect des règles communes.
Mme Audrey Linkenheld. Nous sommes tous d’accord pour dire qu’il y a là un enjeu prégnant et douloureux, que, comme nombre d’entre vous, je perçois quotidiennement sur le terrain. Car, sur les six communes principales de ma circonscription, il existe quatre villages d’insertion, qui fonctionnent bien, mais aussi de nombreux campements illicites, souvent d’ailleurs au plus près des quartiers populaires, qui posent de redoutables difficultés s’agissant tant de l’indignité des conditions de vie des populations concernées que des tensions de voisinage qu’impose inéluctablement une telle présence. Or, je crois que ces situations font beaucoup de mal à l’Europe, qui apparaît à nos concitoyens se défausser de sujets qui sont pourtant si manifestement lié à elle, puisque c’est parce que les Roms sont des citoyens de l’Union qu’ils peuvent aisément venir sur notre territoire. A tout le moins, il serait utile que Bruxelles mette en place un lieu ou forum de retours d’expérience, tant sont nombreux les acteurs publics des différents États membres qui sont confrontés à la question de l’intégration des populations Roms. Je me souviens ainsi d’un « working paper » émanant de certaines villes allemandes qui comportait des enseignements très intéressants dont nous pourrions tous bénéficier. Dans la même logique, je voudrais dire avec force que les solutions ne sauraient être stéréotypées, car le problème ne concerne en rien tous les territoires de la même manière. En France par exemple, la lucidité commande de voir que certaines Régions – je pense en particulier au Nord, à l’Île-de-France et à Rhône-Alpes – sont beaucoup plus touchées que d’autres, et que les difficultés et les solutions, par exemple s’agissant du logement et de la scolarisation, dépendent étroitement de la qualité et de la nature du tissu préexistant.
M. Jean-Louis Roumegas. Il faut d’abord à mes yeux apporter une précision fondamentale. Le problème auquel nous sommes confronté est nouveau, et il n’est pas celui de l’intégration des Gens du voyage, que notre pays traite d’ailleurs plutôt moins mal que les autres. Il est celui de l’intégration dans l’Union de pays dans lesquels une forte minorité Roms souffre de discriminations inacceptables, n’est absolument pas intégrée et par conséquent tend à profiter de la libre-circulation pour rallier des pays plus riches dans lesquels elle demeure illégalement. Je crois qu’éviter des amalgames fâcheux et trompeurs entre Roms et Gens du voyage est un premier pas décisif vers un traitement plus efficace du sujet.
M. Christophe Caresche. Ici réside en effet le cœur de la question. Ce qui est interrogé, c’est la libre circulation, qui est à l’origine des difficultés observées. Et pour parler franchement, je crois que l’Union européenne, et singulièrement la Commission, en laissant les États membres se débrouiller seuls, font preuve de faiblesse, je dirais même de lâcheté, car elles compromettent l’un des piliers de la construction européenne. La Commission est la garante de la liberté fondamentale qu’est la libre-circulation des personnes. Cela implique de faire preuve de fermeté et de courage dans son application. Sans cela, le risque est fort que nos concitoyens se détournent d’un des fondements de notre Union. Je propose que nos conclusions signalent que la question des populations Roms est le miroir de celle de la libre circulation, et qu’une mauvaise gestion de la première fait courir le risque d’abîmer irrémédiablement la seconde.
M. Pierre Lequiller. C’est précisément pourquoi je faisais tout à l’heure le lien avec l’espace de Schengen.
La Présidente Danielle Auroi. Je veux préciser, d’abord, que les difficultés d’intégration dans les pays d’origine ne se limitent pas à la Roumanie et à la Bulgarie. Je pense notamment à la République tchèque, à la Hongrie ou la Serbie, dans lesquelles vivent d’importantes minorités Roms. C’est pourquoi je vous propose que nous modifiions les propositions de conclusions en retirant les mentions spécifiques des premiers États, pour adresser nos recommandations à l’ensemble des pays concernés. Et je suggère que nous étendions nos demandes en invitant aussi ces États à s’acquitter de leurs obligations communautaires, en particulier s’agissant de l’application des mesures antidiscriminatoires. De même, je vous propose que l’on fasse une référence directe à la nécessité pour les États de soutenir pleinement l’action des points de contact nationaux et à diffuser les bonnes pratiques au cœur des administrations et des territoires.
S’agissant cette fois des seuls deux pays mentionnés, il est vrai que la problématique de leur entrée dans Schengen mérite que nous poursuivions les travaux engagés durant la précédente législature.
Concernant les responsabilités de l’Union, il faut aussi reconnaître que les États membres rechignent à lui accorder des compétences dans les domaines dont nous parlons aujourd’hui, le logement, l’éducation, l’action sociale. On ne peut donc lui reprocher de ne pas agir là où les traités lui interdisent de le faire. A l’inverse, je pense qu’il serait utile que nous mentionnions le travail décisif assumé par les nombreuses associations de la société civile sur le terrain.
M. Didier Quentin. Beaucoup de réponses ont été apportées dans les questions elles-mêmes. Je ne peux que souscrire ainsi à la conviction unanime que la scolarisation est au cœur des réponses à apporter, et que me féliciter que nous soyons tous d’accord pour nous garder des écueils également dangereux de la stigmatisation et de l'angélisme. Je me contenterais d’apporter à ce stade quelques précisions sémantiques. D’abord, la sédentarisation ne signifie pas toujours l’intégration. L’Histoire illustre à satiété le sort peu enviable des minorités « sédentarisées » dans des ghettos. Ensuite, nous parlons dans le projet de conclusion d’« expulsions forcées » pour viser des expulsions forcées dans les pays d’origine, et certainement pas les légitimes interruptions de l’occupation illicite du domaine public ou privé dans nos pays d’accueil. Enfin, je suis assez ouvert à l’idée de durcir nos recommandations en direction des États d’origine des populations Roms qui ne respectent manifestement pas leurs obligations minimales d’intégration.
Mme Marietta Karamanli. Gardons-nous toutefois de nous ériger en donneur de leçon. Le cadre que nous avons retenu est l’Union européenne. Et la position la plus équilibrée et la plus efficace me semble être celle que nous vous proposons, qui suit ce raisonnement logique : puisque l’Europe donne des sommes très importantes aux États d’origine pour intégrer leurs minorités, il me semble cohérent qu’elle puisse en contrepartie exiger des résultats et de contrôler que les crédits soient affectés – et même dépensés – au profit de cet objectif. Car force est de constater que cela n’est pas suffisamment fait aujourd’hui.
A cet égard, je ne peux que regretter que les services de la Commission européenne n’ait pas donné suite à ce jour à nos questions concernant la répartition précise et l’état de consommation des 26,5 milliards d’euros de crédits affectés par l’Union à cette question.
La question dépasse aussi largement cet aspect. Je pense que cette problématique interroge aussi les moyens dont l’Europe et les États se dotent pour assurer, en sus du contrôle des frontières, des politiques d’asile, d’immigration légale, d’accueil cohérente et digne. Et cela exige sans doute un débat sur l’équilibre actuel des compétences.
S’agissant des trafics, je veux souligner combien l’actuelle majorité est déterminée à agir avec force et sévérité, comme le montre de nombreuses initiatives législatives récentes et la ratification de nombreux instruments internationaux intégrant mieux dans notre droit les délits et crimes concernés. Nous sommes désormais mieux armés pour y faire face.
L’étude des bonnes pratiques est en effet décisive, et nous y consacrons une partie importante de notre rapport. Je pense par exemple au succès des maîtrises d’œuvre urbaines et sociales et à la place décisive de l’école et du logement. »
La Commission a adopté les conclusions dont le texte figure ci-après.
CONCLUSIONS ADOPTÉES PAR LA COMMISSION
La Commission,
Vu l’article 88-4 de la Constitution,
Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), et notamment son article 19, paragraphe 1, et son article 292,
Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, instaurant le cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020 du 5 avril 2011, COM(2011) 173 final,
Vu les conclusions du Conseil du 19 mai 2011 relatives à un Cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms,
Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, relative aux « stratégies nationales d’intégration des Roms : un premier pas dans la mise en œuvre du Cadre de l’Union européenne », du 21 mai 2012, COM(2012) 226 final,
Vu la proposition de recommandation du Conseil relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres, COM(2013) 460 final, du 26 juin 2013,
Considérant que la proposition de recommandation européenne relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres constitue une étape clef qui s’inscrit dans un long processus, dont l’aboutissement dépendra de la volonté politique de l’Union européenne et de ses États membres,
Considérant que les objectifs de l’Union européenne, mais aussi de tous les États nationaux, pour l’intégration des Roms doivent couvrir, en fonction de la taille des populations roms, les quatre domaines essentiels que sont l’accès à l’éducation, l’emploi, les soins de santé, le logement, auxquels il convient d’ajouter la lutte contre les discriminations,
Considérant l’enjeu que représente l’amélioration de la coopération entre les acteurs européens, nationaux et internationaux, le monde associatif ainsi que les représentants des communautés roms,
Considérant que la prise en compte de la problématique des Roms dans toutes les politiques européennes et nationales pertinentes est la voie la plus prometteuse vers l’intégration,
Considérant que des politiques efficaces nécessitent une planification cohérente qui exige elle-même la participation de toutes les parties concernées, un appui politique et l’allocation, aux différents niveaux de décision, des ressources nécessaires,
Considérant que la mise en œuvre et la réussite des stratégies nationales d’intégration des Roms passent nécessairement par une allocation efficace et suffisante de ressources européennes et nationales,
Considérant qu’il y a lieu d’accroître l’ampleur et l’efficacité de la coordination, ainsi que de concentrer les moyens,
Considérant que l’allocation de fonds (non seulement européens mais également nationaux et locaux) destinés à l’inclusion des Roms doit être transparente et appropriée,
Considérant que seule une partie minime de l’aide européenne est mobilisée et dépensée dans les pays dont les Roms sont originaires,
Considérant en particulier que certaines initiatives ou projets devraient bénéficier à titre principal de financements européens, notamment lorsqu’il s’agit d’amorcer les projets, d’expérimenter des méthodes et de transférer de l’ingéniérie publique, associative ou solidaire en direction d’autres États,
Considérant que des partenariats efficaces sont également nécessaires, devant impliquer les autorités nationales, régionales et locales et les représentants d’entreprises, de la société civile et des communautés roms,
Considérant que la mise en œuvre des programmes européens d’inclusion destinés aux minorités Roms dans leur pays d’origine doit être effective, afin de les intégrer pleinement,
Considérant la nécessité d’une plus grande responsabilisation et d’un renforcement des capacités des administrations locales, de la société civile et des Roms eux-mêmes à l’égard de l’élaboration et de la mise en œuvre de projets, programmes et politiques,
1. Invite fermement les États membres à adopter la proposition de recommandation européenne du Conseil relative à des mesures efficaces d’intégration des Roms dans les États membres ;
2. Souhaite que soient simplifiées les procédures et demandes de financement relatives à l’intégration des Roms, dans la mesure où celles-ci souffrent de trop de lourdeur et complexité ;
3. Souhaite que les crédits destinés à l’intégration des Roms soient rendus plus accessibles, quitte à renforcer les contrôles sur les actions menées, en cours et a posteriori ;
4. Demande que l’Union Européenne prenne l’initiative, soutienne et engage des actions prioritaires d’amélioration des conditions de vie des Roms dans les pays dont ils sont originaires, en relation directe avec les États concernés ;
5. Incite en particulier certains États membres, compte tenu des fonds qui leur sont versés par l’Union européenne, à mettre en œuvre une politique d’intégration plus efficace de leurs populations roms, et à en réaliser l’évaluation en lien avec l’Union européenne ;
6. Invite les populations roms à organiser leur représentation en mode associatif, de façon à constituer des interlocuteurs identifiés pour les autorités publiques ;
7. Demande que soit donnée la priorité à une démarche fondée sur des conventions pluripartites, associant l’Union européenne, les États, les collectivités locales, les associations et les représentants des populations concernées, portant sur des engagements objectivés et évalués, et mettant en avant l’engagement volontaire et contractuel des acteurs.
ANNEXE 1 : LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LES RAPPORTEURS
Les rapporteurs tiennent à témoigner leur gratitude à l’ensemble des personnalités avec lesquelles ils se sont entretenus dans le cadre de la préparation de ce rapport d’information.
- M. Christophe AUGER, Délégué Général de l’Association Logement Jeune 93 (ALJ93) ;
- M. Michel BILLOUT, Sénateur de Seine et Marne ;
- M. Jean-François BOURDAIS, responsable du secteur Travail, emploi, politique sociale, santé, éducation, culture, audiovisuel, sport (TESC) du SGAE (Secrétariat général des affaires européennes) ;
- M. Antoine DECOURCELLE (La CIMADE) ; M. Jean-François PLOQUIN, directeur général, accompagné de Mme Claire SALIGNAT (Forum réfugiés) ; M. Matthieu TARDIS (France Terre d’asile) ;
- M. Manuel DEMOUGEOT, directeur de cabinet de M. Le Préfet Alain REGNIER, Délégué interministériel pour l’hébergement et l’accès au logement des personnes sans abri ou mal logées (DIHAL) ;
- Mme Dominique DEVIN-MAUZRAD, directrice du pôle « développement de projets territoriaux » à la DIHAL (Direction interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement) ;
- Mme Hélène FLAUTRE, membre du Parlement européen ;
- Monsieur Guy HENGEN, collaborateur d’Alexandra SIARRI, Adjointe au Maire chargée des Nouvelles Précarités à BORDEAUX.
- M. Hubert JULIEN-LAFERRIÈRE, Vice-président du GRAND-LYON ;
- M. Christophe LAPLACE-CLAVERIE, chargé de mission solidarité à la mairie d’AUBERVILLIERS ;
- S. Exc. M. Bogdan MAZURU, Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de ROUMANIE en République française ;
- Mme Marie Louise MOUKET, chef de projet de l’Association Logement Jeune 93 (ALJ93) ;
- Mme Christine RATZEL TOGO, Maire-Adjointe d’AUBERVILLIERS à l’économie solidaire - commerce équitable - coopération décentralisée ;
- M. le Préfet Alain REGNIER, Délégué interministériel pour l’hébergement et l’accès au logement des personnes sans abri ou mal logées DIHAL (Direction interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement) ;
- M. Vincent RICHEZ, Conseiller pour les affaires sociales, représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne ;
- M. Jacques SALVATOR, Maire d’AUBERVILLIERS ;
- M. Louis SOUCHAL, Directeur général délégué à la Cohésion Sociale et aux territoires de la Ville de NANTES.
ANNEXE 2 : TABLEAU SUR LES POPULATIONS ROMS ÉLABORÉ À PARTIR DES DONNÉES DU CONSEIL DE L’EUROPE
*Résolution no 1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies
ANNEXE 3 : DOCUMENT DE SYNTHÈSE SUR LES DROITS DE L’HOMME DES ROMS, PAR LE COMMISSAIRE AUX DROITS DE L’HOMME DU CONSEIL DE L’EUROPE
Le 15 septembre 2010
Ce document présente la position du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe sur les droits des Roms. Il résume brièvement les constats du Commissaire qui figurent dans les rapports de ses visites de pays, dans ses documents thématiques et dans ses recommandations, avis et points de vue. En rassemblant ces constats issus de ses différentes activités, le Commissaire propose une synthèse de ses conclusions et recommandations concernant les droits des Roms. La présente position sera régulièrement mise à jour, en fonction des nouveaux éléments réunis par le Commissaire.
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Concernant les droits de l’homme des Roms, le défaut de mise en œuvre est honteux. La question est traitée par toutes les grandes organisations internationales et par les gouvernements de tous les pays d’Europe, qui ont notamment établi des plans d’action nationaux, mais ces initiatives n’ont encore guère donné de résultats.
Les Roms - qu’ils soient citoyens du pays dans lequel ils vivent, déplacés ou migrants - sont plus défavorisés que tout autre groupe en Europe dans les domaines de l’éducation, de la santé, de l’emploi, du logement et de la participation politique. Les Roms continuent de souffrir d’une discrimination et d’un antitsiganisme de grande ampleur, qui les enferme dans une situation défavorisée, caractérisée par l’exclusion, la ségrégation et la marginalisation.
Dans nombre de pays, les Roms sont la cible d’un discours de haine, de harcèlements et de violences, y compris d’exactions de la part des forces de l’ordre, qui atteignent des niveaux très préoccupants. Ces dernières années, la migration de Roms de certains États membres du Conseil de l’Europe vers d’autres a fait augmenter l’antitsiganisme et la discrimination dans les pays d’accueil1.
Une approche globale fondée sur les droits de l’homme
Le discours d’aujourd’hui contre les Roms est tout à fait semblable à celui qu’employaient les nazis et les fascistes avant que ne commence l’extermination de masse dans les années 1930 et 1940. On prétend à nouveau que les Roms sont une menace pour la sécurité et la santé publique. Aucune distinction n’est faite entre une poignée de délinquants et la majorité écrasante de la population rom. C’est une attitude honteuse et dangereuse.
Pour améliorer la situation des Roms, il est nécessaire de mettre en place un programme cohérent, global et doté d’un financement suffisant, qui permette de s’attaquer simultanément aux problèmes qui se posent dans différents domaines. L’expérience montre la nécessité absolue d’intervenir en amont des problèmes. Il ne suffit pas d’ouvrir des portes trop longtemps fermées, encore faut-il compenser des siècles d’exclusion et de marginalisation par des actions positives.
Il est essentiel d’adopter une approche globale, car les différents problèmes que rencontrent les Roms sont intimement liés. Ainsi, l’éducation conditionne l’accès à l’emploi, dont dépendent les conditions de logement, qui à leur tour influent sur la santé.
Une telle approche serait conforme aux principes de la Recommandation CM/Rec(2008)5 sur les politiques concernant les Roms et/ou les Gens du voyage en Europe, adoptée par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe. Il importe que les États membres s’inspirent de cette recommandation et la mettent en œuvre rapidement.
Les stratégies globales doivent comporter des plans d’action à court et à long termes, des objectifs et des indicateurs, nécessaires à la mise en œuvre des politiques. Elles doivent traiter les problèmes sous l’angle social, culturel et économique, mais aussi combattre la discrimination et l’antitsiganisme.
Ces stratégies ne seront efficaces que si les Roms eux-mêmes sont pleinement associés à leur conception, à leur mise en œuvre et à leur évaluation. Il importe également qu’elles soient élaborées et appliquées en étroite collaboration avec les collectivités locales et régionales. En effet, c’est de l’action ou de l’inaction de ces collectivités que dépendent souvent des aspects très concrets de la vie quotidienne des Roms. Il faut aussi que la mise en œuvre des stratégies fasse l’objet d’une évaluation et d’un suivi réguliers.
Les États membres doivent en outre ancrer solidement les changements en s’employant rapidement à combler les graves lacunes de l’actuel dispositif censé protéger les droits de l’homme des Roms. Il s’agit notamment d’adopter une législation antidiscriminatoire complète et de la mettre en œuvre, et de ratifier le Protocole no 12 à la Convention européenne des droits de l’homme. Autre nécessité : que les États membres se dotent de lois contre la violence à caractère raciste et le discours de haine. Il est essentiel que ces lois soient pleinement appliquées et ouvrent des voies de recours effectives et accessibles aux Roms qui s’estiment victimes de violations de leurs droits de l’homme. Un bon moyen d’améliorer l’accès des Roms à la justice est de créer des organes de plaintes faciles d’accès, tels que des médiateurs spécialisés et des commissions de lutte contre la discrimination. Les États membres devraient aussi signer et ratifier la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales et reconnaître les Roms en tant que membres d’une minorité nationale, habilités à exercer, individuellement ou collectivement, les droits garantis par la Convention-cadre.
Participation des Roms à la prise de décisions
Il faut considérer les Roms comme des partenaires essentiels et faire en sorte qu’ils soient en mesure de définir et d’appliquer eux-mêmes le dispositif de protection de leurs droits. Il arrive trop souvent que les Roms soient exclus du processus de réflexion sur la manière d’améliorer leur situation. Parmi les experts consultés devraient toujours figurer des personnes d’origine rom. Dans la mesure du possible, il faut associer à toute décision les personnes directement concernées, quel que soit leur niveau de responsabilité. De plus, il est essentiel de prendre toute une série de mesures pour garantir aux Roms le droit de participer à la gestion des affaires publiques, au même titre que le reste de la population, que ce soit comme élus ou comme fonctionnaires.
Les gouvernements devraient abroger l’ensemble des lois et règlements qui établissent une discrimination directe ou indirecte à l’encontre des Roms en matière de participation politique, notamment les dispositions discriminatoires relatives à l’inscription sur les listes électorales. Il faut aussi résoudre en priorité d’autres problèmes, tels que la fréquente absence de documents d’identité. En allant davantage à la rencontre des Roms, il est possible de les encourager à s’inscrire sur les listes électorales. Par ailleurs, les acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux devraient promouvoir activement l’éducation civique des communautés roms par le biais de programmes portant sur les droits de l’homme et les aspects pratiques du système électoral et judiciaire.
En outre, il est nécessaire de prendre des mesures positives pour promouvoir les candidats roms au sein des partis politiques et leur accession à des mandats électifs européens, nationaux ou locaux, par exemple en réservant des sièges aux représentants roms dans les assemblées. Il serait aussi possible de promouvoir l’emploi des Roms dans la fonction publique en appliquant des mesures positives de ce type, qui pourraient consister à fixer des quotas d’employés roms dans les administrations, à mettre sur pied des programmes de formation théorique ou pratique destinés spécialement aux Roms et à encourager les Roms à postuler. Il faut veiller à ce que les femmes roms bénéficient aussi de ces mesures.
Il convient également d’établir, aux niveaux européen, national et local, des mécanismes permettant de consulter les représentants et les communautés roms de manière directe et franche et de dialoguer d’égal à égal. La création d’organes consultatifs, spécialisés dans l’intégration des Roms ou l’égalité, par exemple, serait un moyen de garantir la continuité de ces consultations et de conforter la légitimité des représentants roms. Il est toutefois nécessaire d’avoir aussi d’autres interlocuteurs que ces organes consultatifs permanents et de consulter les différentes composantes des communautés roms ; ainsi, au sujet du logement ou d’autres questions concrètes, un dialogue devrait s’établir entre les collectivités locales et la population rom. Il faut éviter que les consultations concernent uniquement une poignée de représentants. L’objectif doit être de permettre l’expression de la grande diversité d’intérêts et d’identités qui coexistent au sein des communautés roms, en donnant notamment la parole aux femmes et aux jeunes. Il importe également que les résultats de ces consultations soient réellement pris en compte. Toute mesure purement symbolique produira des effets contraires à ceux escomptés.
Les organisations non gouvernementales roms doivent être respectées par les autorités et soutenues dans leurs activités. Ces organisations sont une forme importante de participation des Roms et un moyen essentiel de favoriser la participation politique et le renforcement des capacités des représentants roms.
Apatridie
Les États membres doivent s’employer plus énergiquement à donner une nationalité aux dizaines de milliers de Roms vivant en Europe qui sont actuellement apatrides. Il incombe aux États d’éviter l’apatridie, y compris dans le cas d’une succession d’États (c’est-à-dire lors de la création de nouveaux États). La Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques disposent tous deux que les enfants ont le droit d’acquérir une nationalité. Autrement dit, le pays d’accueil est tenu de ne pas laisser les enfants sans nationalité et ne peut se soustraire à cette obligation sous prétexte que les parents sont apatrides.
Accès aux documents de base
Il est urgent que les autorités prennent des mesures pour fournir aux Roms qui n’en ont pas les documents officiels dont ils ont besoin : certificat de naissance, pièce d’identité, attestation de résidence ou document ouvrant droit à des prestations sanitaires et sociales, par exemple. Il faut lever les obstacles administratifs et financiers qui empêchent les Roms d’obtenir ces documents essentiels et mener des actions de sensibilisation visant à informer les Roms des procédures à suivre. Une attention particulière doit être accordée à la situation difficile que connaissent des milliers de familles roms contraintes de quitter le territoire de l’ancienne Yougoslavie, ou de rejoindre une autre partie de ce territoire, qui restent depuis des années des « fantômes juridiques » dans leur pays d’accueil.
Soins de santé et sécurité sociale
En réglant les problèmes de documents, on améliore aussi l’accès aux soins de santé et aux services sociaux. Depuis de nombreuses années, il est préconisé de prendre sans tarder des mesures en la matière. Dans le domaine de la santé, l’accès aux soins d’urgence est certes vital, mais il faudrait aussi assurer le suivi sanitaire, notamment les soins préventifs et les vaccinations. La législation antidiscriminatoire doit permettre d’empêcher des médecins ou des hôpitaux de refuser de traiter les patients d’origine rom ; il convient aussi de prendre les mesures nécessaires pour combattre les pratiques discriminatoires du personnel soignant et des agents des services sociaux. Dans ce contexte, les États membres devraient également garantir aux Roms un accès effectif à l’aide juridique.
Une éducation inclusive et de qualité
Les enfants roms doivent bénéficier d’une éducation inclusive et non ségrégative. Il faut mettre fin à la pratique courante – et persistante – consistant à les scolariser dans des classes ou des écoles réservées aux Roms. Il convient de prendre tout un ensemble de mesures pour accroître la fréquentation des établissements d’enseignement ordinaires par les enfants roms et prévenir l’abandon scolaire. Une attention particulière doit être accordée à l’éducation des filles roms, qui souffrent d’une double discrimination, en tant que Roms et en tant que personnes de sexe féminin.
Il importe notamment de reconnaître l’utilité de l’éducation préscolaire ; entrer plus tôt à l’école permet en effet aux enfants qui viennent d’un milieu où l’on n’a pas l’habitude de faire des études de se familiariser avec l’institution scolaire. L’éducation préscolaire peut aussi contribuer dans une large mesure à supprimer la barrière de la langue, à laquelle les enfants roms risquent de se heurter.
A tous les niveaux du système éducatif, il est essentiel de prendre des mesures pour lever les obstacles à la scolarisation des enfants d’origine rom. Il faudrait notamment :
- veiller à ce que la fréquentation scolaire ne soit pas compromise par des considérations financières, en assurant la gratuité de l’enseignement, en subventionnant l’achat des fournitures et des manuels scolaires et en versant des allocations aux parents ;
- lever les obstacles juridiques et administratifs à la fréquentation scolaire, tels que le fait de ne pas avoir de pièce d’identité ni de permis de séjour ;
- veiller à ce que les enfants roms disposent d’un moyen de transport pour se rendre à l’école ;
- imposer aux établissements scolaires l’obligation d’inscrire les enfants, quelle que soit leur situation administrative ;
- prendre des mesures énergiques pour lutter contre le harcèlement des enfants roms dans les écoles.
Ces dernières années, toute une série de mesures destinées à améliorer la scolarisation des Roms et leurs chances de réussite ont été expérimentées en différents lieux. Certaines ont donné de bons résultats, dont celles-ci :
- une formation spéciale préparant les enseignants à s’occuper de classes composées d’élèves de différentes origines ;
- des enseignants et des aides-éducateurs apportant un soutien pédagogique aux enfants roms et aux autres élèves qui rencontrent des difficultés scolaires particulières ;
- des assistants d’éducation roms présents dans les écoles ;
- des médiateurs roms chargés de faciliter les relations entre les enseignants, les établissements scolaires et les familles roms ;
- des matériels pédagogiques dans la langue maternelle des enfants roms.
Les enseignants roms restent rares. Il est pourtant essentiel que leur nombre augmente. Il faudrait aussi prendre des dispositions pour favoriser le recrutement de personnel non enseignant d’origine rom dans les établissements scolaires. De plus, dans certaines communautés roms, il convient de sensibiliser les parents – qui n’ont peut-être pas eu la possibilité d’aller à l’école – à la nécessité et aux avantages d’un bon niveau d’instruction. Il est fondamental, pour les établissements scolaires, d’établir et de garder le contact avec les parents d’élèves roms. Or, la situation laisse encore beaucoup à désirer dans ce domaine, d’où la nécessité de redoubler d’efforts. Le système éducatif doit aussi être ouvert aux adultes, à qui il faut donner la possibilité de suivre un enseignement élémentaire s’ils le souhaitent.
Les formes d’éducation ségrégative qui perdurent doivent être remplacées par une éducation intégrée, dans les établissements ordinaires, et, au besoin, être interdites par la législation. Il est essentiel d’accompagner la déségrégation de mesures visant à aider les enfants roms à s’intégrer dans des classes ordinaires. Des classes ou des programmes spéciaux pour les Roms sont parfois présentés comme un moyen de supprimer la barrière de la langue ou de remédier à l’absence de préscolarisation des enfants roms. Il faut certes vaincre ces difficultés, mais pas en plaçant systématiquement les enfants roms dans des classes où est enseigné un programme simplifié ou un programme spécial en langue romani. Il est nécessaire de mettre fin à cette pratique, qui isole les enfants roms des autres élèves. Les classes spéciales – si et quand elles sont nécessaires – ne doivent jamais devenir un outil de ségrégation. Ce qui importe, c’est de consacrer les ressources nécessaires au soutien scolaire des enfants les plus défavorisés pour que cesse cette discrimination flagrante.
Il faut aussi mettre fin immédiatement à la pratique consistant à placer indûment les enfants roms dans des établissements ou des classes spécialisés, prévus pour les élèves présentant des déficiences intellectuelles. Des tests doivent permettre de déterminer si un enfant est atteint d’une déficience intellectuelle ou s’il est tout à fait capable mais que l’acquisition de connaissances requises par l’école a été retardée par son environnement.. Tout placement d’un enfant dans une classe spéciale doit être précédé de véritables mesures de soutien et d’évaluation à caractère pédagogique et psychologique.
Accès à un logement convenable
Des efforts concertés et soutenus sont nécessaires, aux niveaux local, national et paneuropéen, pour mettre fin à la crise du logement qui frappe les Roms. Il faut garantir aux Roms le droit de vivre dans un logement convenable, conformément aux normes juridiques internationales. Les quartiers roms doivent bénéficier de tous les services collectifs : distribution d’eau et d’électricité, ramassage des ordures et entretien des routes d’accès. Il faut aussi garantir la sécurité d’occupation des logements et veiller à ce que les conditions de vie respectent la dignité des habitants.
Il faut que cessent les expulsions forcées qui sont pratiquées au mépris des normes relatives aux droits de l’homme et des garanties de procédure. Il découle de ces normes que les expulsions forcées ne peuvent être pratiquées que dans des circonstances exceptionnelles et de manière raisonnable. Toute personne concernée doit pouvoir demander à la justice de contrôler la légalité d’expulsions prévues (avant qu’il soit procédé aux expulsions), ce qui suppose de disposer à la fois de voies de recours et de possibilités d’aide juridique. Il convient de rechercher des solutions qui permettent d’éviter les expulsions, dans le cadre d’une véritable consultation des personnes concernées. Si des expulsions doivent malgré tout avoir lieu, il faut proposer une indemnisation et une réinstallation adéquate. Ces normes s’imposent aussi aux collectivités locales. Même si des décisions abusives sont parfois prises au niveau local, cela n’exempte pas pour autant le gouvernement central de sa responsabilité au titre de ses obligations internationales. L’État doit en effet surveiller – et, si nécessaire, réguler – l’action locale. Il faut aussi que les États mettent leur protection juridique contre les expulsions forcées en conformité avec le droit international, et notamment avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et du Comité européen des droits sociaux. En outre, les États sont encouragés à appliquer les « principes de base et directives concernant les expulsions et les déplacements liés au développement », élaborés par le Rapporteur spécial sous l’égide du Conseil des droits de l’homme de l’ONU.2
Dans les pays qui comptent des Gens du voyage, la législation devrait imposer aux collectivités locales l’obligation de mettre à la disposition de cette population des aires d’accueil, prévues pour le stationnement des caravanes durant une période plus ou moins longue. Ces aires doivent être équipées des infrastructures permettant d’assurer des conditions de vie décentes. Les collectivités locales devraient recevoir une aide financière pour créer ou équiper ces aires. L’aménagement de « sites de halte » pour les Gens du voyage n’est pas suffisant. Les plans d’urbanisme devraient prévoir des possibilités, pour ces personnes, d’habiter dans une caravane installée sur un terrain privé ; il conviendra de veiller à ce que les Gens du voyage puissent réellement le faire en pratique.
Accès à l’emploi
Des mesures sont nécessaires pour combattre la discrimination dont les Roms sont victimes en matière d’accès à l’emploi. A cette fin, il convient notamment de se doter d’une législation antidiscriminatoire efficace, de recenser et de supprimer les dispositions à caractère discriminatoire (les contraintes qui pèsent de manière disproportionnée sur les entreprises roms, par exemple) et d’accorder des aides financières ciblées. Des fonds pourraient être consacrés à la mise en place de programmes et de divers types d’aide visant à encourager la création d’entreprises et le recrutement de Roms dans les secteurs public et privé, ainsi qu’à l’organisation de programmes de formation spécifiques.
Il est également urgent d’augmenter le nombre, et d’améliorer la qualité, des programmes publics de formation professionnelle destinés aux Roms. En outre, il est nécessaire de faciliter l’obtention de prêts par les Roms, par exemple en leur permettant de bénéficier d’une aide financière directe et/ou en prévoyant que l’Etat apporte des garanties couvrant en partie les emprunts contractés par des entreprises roms auprès d’établissements bancaires. Il serait aussi envisageable d’accorder des réductions d’impôts aux chefs d’entreprise qui emploient des Roms.
Harcèlement et autres exactions policières à l’encontre des Roms
Il est nécessaire de prendre des mesures énergiques pour faire cesser toutes les formes de violences et d’exactions commises par la police à l’encontre de Roms : descentes de police injustifiées, usage disproportionné de la force physique lors des interrogatoires, insultes, passages à tabac et usage disproportionné d’armes à feu. Tous ces agissements doivent faire l’objet d’enquêtes effectives et être formellement interdits, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Si des policiers commettent des infractions pénales, il faut faire toute la lumière sur ces affaires, engager des poursuites et imposer des sanctions. Il importe de veiller à ce que les enquêtes soient menées par des organes indépendants et impartiaux. De plus, les officiers de police de grade supérieur devraient indiquer clairement que les pratiques discriminatoires et les exactions ne seront pas tolérées. Il faudrait donner aux policiers une formation qui les aide à exercer leurs activités de manière non discriminatoire et à accomplir leur mission dans une société plurielle. Des membres des communautés roms devraient être recrutés dans la police.
Les Roms ne doivent être soumis à aucune forme de surveillance policière qui ne s’appliquerait pas aussi au reste de la population.
Violence raciale
Dans sa jurisprudence, la Cour européenne des droits de l’homme affirme : « La violence raciale constitue une atteinte particulière à la dignité humaine et, compte tenu de ses conséquences dangereuses, elle exige une vigilance spéciale et une réaction vigoureuse de la part des autorités. »3 Les responsables politiques doivent condamner publiquement et sans équivoque toutes les formes de violence à l’encontre des Roms. Il faudrait ériger la violence raciale en infraction pénale pour donner plus de poids aux dispositions légales pertinentes et pour adresser un signal fort aux personnes tentées de commettre des violences raciales. La motivation raciale devrait aussi être considérée comme une circonstance aggravante lors de la fixation de la peine. En pratique, les allégations de violence raciale à l’encontre de Roms doivent donner lieu à des enquêtes approfondies et systématiques et, le cas échéant, à des poursuites. Par ailleurs, il faudrait prendre des mesures en amont pour que les victimes n’hésitent pas à signaler les cas de violence raciale.
Discours de haine et antitsiganisme
Il est indispensable de lutter contre l’antitsiganisme.
Sans une évolution des mentalités dans la population majoritaire, toutes les initiatives visant à améliorer la situation des Roms sont vouées à l’échec. D’où l’importance de faire connaître au grand public l’histoire des Roms et la diversité de leurs identités. Il faudrait aussi éviter que les sévices et le génocide dont les Roms ont été victimes ne tombent dans l’oubli.4 Ces questions devraient faire partie des programmes scolaires.
Discours de haine et infractions inspirées par la haine sont intimement liés. Le discours de certains responsables politiques et des médias xénophobes ravive les stéréotypes séculaires au sujet des Roms, ce qui, à son tour, « légitime » les actions, parfois violentes, menées contre des membres de cette communauté. Les professionnels des médias devraient veiller tout particulièrement à ne pas véhiculer de stéréotypes négatifs sur les Roms et à présenter les informations d’une manière impartiale et équilibrée, qui contribue à créer un climat dans lequel la diversité est considérée comme une richesse.
Il faut en finir avec l’incitation à la haine et les stéréotypes négatifs sur les Roms. Les principaux responsables politiques et autres leaders d’opinion doivent absolument s’abstenir de tout discours anti-rom et, au contraire, défendre les principes de non-discrimination, de tolérance et de respect envers les personnes d’origine différente. Il serait possible d’améliorer la situation en engageant des processus de réconciliation et en présentant des excuses pour l’exclusion et les persécutions dont a souffert la population rom.
RECOMMANDATIONS
Les États membres du Conseil de l’Europe devraient adopter des stratégies globales, cohérentes et dotées d’un financement suffisant pour améliorer la situation des Roms. Elles devraient comporter des mesures positives et combattre la discrimination et l’antitsiganisme. Il faudrait aussi que les États membres ancrent solidement les changements en adoptant et en appliquant pleinement une législation antidiscriminatoire complète et des lois sanctionnant l’incitation à la haine et la violence motivée par le racisme.
Il faut veiller à ce que les Roms soient des acteurs centraux de la mise en œuvre de leurs droits et puissent participer véritablement à la gestion des affaires publiques. Il importe aussi de promouvoir la participation politique, l’inscription sur les listes électorales et l’éducation civique, ainsi que d’établir, aux niveaux européen, national et local, des mécanismes permettant de consulter les représentants et les communautés roms de manière directe et franche et de dialoguer d’égal à égal.
Les États membres doivent prendre des dispositions pour mettre un terme au problème d’apatridie de jure ou de facto que connaissent toujours de nombreux Roms.
Les autorités doivent s’employer d’urgence à fournir des documents de base aux Roms qui n’en ont pas et à leur garantir un accès effectif aux soins de santé et à la protection sociale. A cet égard, il importe également de veiller à ce que les Roms puissent bénéficier de l’aide juridique.
Les enfants roms devraient bénéficier d’une éducation inclusive et non ségrégative ; cela implique de prendre des dispositions pour accroître la fréquentation des établissements d’enseignement ordinaires par les enfants roms et prévenir l’abandon scolaire. Une attention particulière devrait être accordée à la promotion de l’éducation des filles d’origine rom. Il faudrait encourager l’éducation préscolaire et lever les obstacles à la scolarisation. Il est également nécessaire de prendre une série de mesures positives destinées à apporter une aide supplémentaire aux Roms et aux enseignants et à améliorer la communication mutuelle.
Les autorités doivent garantir aux Roms le droit de vivre dans un logement convenable, dans des conditions qui respectent leur dignité, ce qui implique notamment de faire en sorte qu’ils bénéficient de tous les services collectifs. Il faut aussi garantir la sécurité d’occupation des logements et mettre un terme aux expulsions forcées qui sont pratiquées au mépris des droits de l’homme et des garanties de procédure.
Il faudrait veiller à ce que les Gens du voyage disposent de suffisamment d’aires d’accueil pour le stationnement des caravanes, durant une période plus ou moins longue, et qui garantissent des conditions de vie décentes ; les Gens du voyage devraient aussi avoir la possibilité d’habiter dans une caravane installée sur un terrain privé.
Les États devraient faciliter l’accès des Roms à l’emploi en se dotant d’une législation antidiscriminatoire effective, en recensant et en supprimant les dispositions à caractère discriminatoire et en prévoyant des aides financières ciblées, notamment des réductions d’impôts. Il importe aussi de continuer à développer la formation professionnelle.
Les États doivent prendre des mesures énergiques pour combattre toutes les formes de violences et d’exactions policières à l’encontre des Roms ; il importe notamment que ces agissements donnent lieu à des enquêtes et à des sanctions adéquates. La formation des policiers devrait les aider à exercer leurs activités de manière non discriminatoire. En outre, des membres des communautés roms devraient être recrutés dans la police.
Il est nécessaire de combattre avec détermination la violence motivée par le racisme qui est dirigée contre les Roms. Il faut notamment que cette violence soit condamnée sans équivoque par les responsables politiques et qu’elle soit sanctionnée, que toutes les infractions de ce type donnent systématiquement lieu à des enquêtes et à des poursuites, et que les victimes soient encouragées à signaler les cas de violence raciale.
Il faut s’employer sans relâche à éliminer les stéréotypes négatifs sur les Roms dans le discours politique et dans les médias et faire passer un message de non-discrimination, de tolérance et de respect des personnes d’origine différente. Il est essentiel de faire connaître au public l’histoire des Roms et la diversité de leurs identités, ainsi que les persécutions et le génocide qu’ils ont subis.
1 C. Cahn, E. Guild, Etude sur les migrations récentes des Roms en Europe, réalisée à la demande du Haut-Commissaire de l’OSCE pour les minorités nationales et du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, 10/12/2008, disponible (en anglais) à l’adresse suivante : http://www.coe.int/t/commissioner/Activities/themes/RomaMigration_2009_en.pdf
2 Annexe 1 du Rapport du Rapporteur spécial sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant, A/HRC/4/18.
3 Natchova et autres c. Bulgarie, Grande Chambre (6 juillet 2005).
4 Les fiches d’information sur l’histoire des Roms élaborées par le Conseil de l’Europe peuvent être très utiles dans ce contexte.
ANNEXE 4 : CIRCULAIRE INTERMINISTERIELLE DU 26 AOÛT 2012 RELATIVE À L’ANTICIPATION ET À L’ACCOMPAGNEMENT DES OPÉRATIONS D’ÉVACUATION DES CAMPEMENTS ILLICITES
Le Ministre de l’éducation nationale, la Ministre des affaires sociales et de la santé, la Ministre de l’égalité des territoires et du logement, le Ministre de l’intérieur, le Ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, la Ministre déléguée auprès du ministre de l’éducation nationale, chargée de la réussite éducative, la Ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion,
à Messieurs les Préfets de région, Mesdames et messieurs les Préfets
Résumé : La présente circulaire précise le cadre de l’action de l’État dans le cas d’évacuations de campements illicites, ainsi que le dispositif de coordination des acteurs locaux à mettre en œuvre autour du Préfet. L’action de l’État relative aux campements illicites s’inscrit dans le respect des principes fondateurs de la République. En premier lieu le respect des décisions de justice ne saurait être mis en question. Il revient au préfet d’exécuter celles-ci, lorsqu’il est ordonné par le juge qu’il soit mis fin, au besoin avec le concours de la force publique, aux occupations illicites de terrains. Lorsque la sécurité des personnes est mise en cause, cette action doit être immédiate. Dans les deux situations, au-delà de la responsabilité de l’État, il en va des fondements même du contrat social dans notre Nation Il convient également, au regard de ces principes, d’assurer un traitement égal et digne de toute personne en situation de détresse sociale. Il vous incombe donc, en initiant le travail le plus en amont de la décision de justice qu’il est possible, de proposer des solutions d’accompagnement en mobilisant prioritairement les moyens de droit commun de chacun des partenaires. Cela suppose, dans une logique d’anticipation et d’individualisation, l’établissement, chaque fois que possible, d’un diagnostic et la recherche de solutions d’accompagnement, dans les différents domaines concourant à l’insertion des personnes (scolarisation, santé, emploi, logement/mise à l’abri...). |
Vous pouvez être amenés à intervenir dans des situations d’installations de personnes, réalisées sans droit ni titre, sur des propriétés publiques ou privées, pour y constituer des campements illégaux. La présente circulaire, qui sera votre cadre de référence, a pour objectif de guider votre action. Les dispositions qu’elle recense constituent votre guide de référence. Votre responsabilité est d’apprécier les situations locales pour mettre en œuvre les principes de dignité et d’humanité en les partageant avec les partenaires.
Il est rappelé au préalable que, dans certains cas, la situation au regard de la sécurité des personnes, y compris d’un point de vue sanitaire, peut imposer une action immédiate. Plus fréquemment, lorsque le propriétaire a obtenu une décision de justice prononçant l’expulsion des occupants sans titre, il vous appartient, lorsque cela est nécessaire, d’accorder le concours de la force publique en vue de l’exécution de cette décision juridictionnelle. De même, s’il apparaît à l’occasion de ces opérations que certaines personnes ne se trouvent pas dans une situation régulière au regard des règles régissant le droit de séjour en France, il vous appartient d’en tirer toutes les conséquences, selon le droit commun. Enfin, le présent cadre de référence ne peut en aucune manière être interprété comme faisant obstacle à l’application de la loi pénale.
Il appartient à l’ensemble des pouvoirs publics, et en particulier à l’État, de se mobiliser de manière ciblée et efficace pour que la réponse la plus adaptée soit apportée aux situations humaines souvent très difficiles qui se retrouvent dans ces campements.
Les différents services placés sous votre autorité doivent pour cela anticiper les éventuelles évacuations et mobiliser l’ensemble de leurs partenaires, collectivités territoriales et associations. Les difficultés sociales, sanitaires, scolaires, ou liées au logement doivent être systématiquement examinées le plus en amont possible et des solutions, temporaires ou durables, doivent être recherchées, selon les modalités explicitées dans le présent texte et dans le respect du droit commun.
1. Mobiliser les services de l’État et les acteurs locaux concernés
Dans les situations dans lesquelles une évacuation d’urgence n’est pas engagée, le délai entre l’installation des personnes, la décision de justice et l’octroi du concours de la force publique doit être mis à profit, pour engager, dès l’installation du campement, et chaque fois que les circonstances locales le permettent, un travail coopératif afin de dégager pour les personnes présentes dans ces campements des solutions alternatives.
Dès que vous aurez connaissance de l’installation d’un campement, vous procèderez à une première évaluation de la situation au regard de la sécurité des personnes et mettrez en place avec le concours des partenaires un suivi des personnes présentes sur le campement.
A cette fin, vous mobiliserez les services de l’État et de ses opérateurs.
Vous veillerez également à associer étroitement les collectivités territoriales concernées (communes, intercommunalités, conseil général et conseil régional), ainsi que les associations susceptibles d’apporter un concours de toute nature dans l’accompagnement des personnes, les bailleurs sociaux et tout autre opérateur dont la participation vous semblera pertinente.
Vous pourrez mettre en place un comité de suivi associant notamment les collectivités territoriales concernées ainsi que les associations engagées dans les actions d’insertion.
Vous serez également vigilant au dialogue, avec les personnes présentes dans le campement comme avec les riverains du camp, et plus généralement à l’information du public sur les mesures mises en place.
2. Établir un diagnostic
Vous veillerez à faire établir aussi rapidement que possible un diagnostic de la situation de chacune des familles ou personnes isolées. Il devra être global pour prendre en compte l’ensemble des problématiques (situation administrative, état de santé, logement, emploi, scolarisation,...) et individualisé afin de prendre en compte les spécificités de chacune des familles et de leur projet.
Une attention particulière devra être apportée au repérage des personnes les plus fragiles (personnes malades, jeunes enfants, ...).
Pour établir ce diagnostic, vous vous appuierez sur les services de l’État et de ses opérateurs et rechercherez, en fonction des besoins et du contexte local, le concours des services de collectivités territoriales (conseil général, centre communal d’action social -CCAS-, aide sociale à l’enfance -ASE...). Ce diagnostic pourra également être confié à une association.
Lorsque ce diagnostic permettra d’envisager pour certains étrangers une aide au retour volontaire, vous vous appuierez sur l’office français de l’immigration et de l’intégration (OFII), ainsi que sur les projets d’insertion existants dans le pays d’origine.
3. Mettre en place un accompagnement
Après l’établissement du diagnostic, qui pourra être plus ou moins complet en fonction du temps et des ressources disponibles, vous identifierez les dispositifs d’insertion à organiser, en mobilisant prioritairement les moyens de droit commun. Vous veillerez également à la continuité de l’accès aux droits des personnes, notamment en matière de prise en charge scolaire et de parcours de soins, afin de maintenir, autant que possible, un suivi des actions collectives et individuelles d’insertion des personnes.
En matière de scolarisation, le principe de l’obligation scolaire s’applique. Sa mise en œuvre repose à la fois sur les maires, l’État et les familles. En relation avec les maires et les associations, les services de l’Éducation nationale, plus particulièrement ceux chargés de la scolarisation des nouveaux arrivants et des enfants du voyage, conduiront les actions permettant de prendre en charge sans délai et avec un souci de continuité les enfants présents dans les campements.
Dans ce cadre, vous veillerez également à prévoir des actions portant sur les conditions matérielles de scolarisation dans la mesure où elles ont une incidence forte sur la fréquentation scolaire (à titre d’illustration, le transport, la cantine, les fournitures scolaires).
En matière sanitaire, vous vous appuierez sur les agences régionales de santé (ARS), chargées de mettre en place les actions permettant de favoriser l’accès aux droits, à la prévention et aux soins, avec une vigilance particulière concernant l’accès à la vaccination et à la santé materno-infantile. Les ARS solliciteront, à cette fin, le concours des services des collectivités territoriales, notamment des CCAS et des services de protection maternelle et infantile, et assureront le lien avec les associations susceptibles d’intervenir auprès de ces populations en matière de santé.
En matière d’hébergement et d’accueil, les solutions doivent être envisagées sur la base des situations particulières des personnes concernées, constatées au moment du diagnostic. Ces situations pouvant être très différentes, l’ensemble des dispositifs mobilisables par les partenaires publics doit être considéré. Il s’agit d’abord de rechercher des réponses aux urgences que vous avez constatées. Il s’agit ensuite de favoriser les parcours d’insertion qui, pour être efficaces, doivent être présentés et expliqués aux intéressés puis, nécessitent que les ménages adhérent pleinement à ce type de projet et qu’ils soient stabilisés dans des conditions décentes, et accompagnés sur une période temporelle compatible avec l’accès à l’emploi et, in fine, à un logement pérenne.
A court terme donc, préalablement à l’évacuation, le recours à l’hébergement d’urgence doit être recherché lorsque cela est nécessaire, adapté aux situations personnelles et possibles en fonction des disponibilités de places que vous recenserez. Une attention particulière doit être portée aux personnes les plus vulnérables.
Dans une action plus suivie, l’aménagement d’un site d’accueil provisoire ou d’autres solutions d’hébergement adapté peuvent être envisagés dans certains cas, dans l’objectif de stabiliser transitoirement les personnes concernées pour favoriser leur insertion. Des solutions de ce type ne peuvent se concevoir que dans un partenariat étroit entre l’État et les collectivités territoriales.
Lorsque le partenariat local est suffisamment construit, il peut être utile de recourir à la mise en place d’une maîtrise d’œuvre urbaine et sociale (MOUS) pour déterminer et mettre en oeuvre les solutions appropriées en matière d’habitat.
Enfin, il est utile de signaler que certains bailleurs sociaux ont pu porter des initiatives adaptées aux personnes concernées par des évacuations de campement, en lien avec des associations.
En matière d’insertion professionnelle, vous disposez désormais d’un nouveau cadre.
Le Gouvernement a, en effet, décidé de faciliter les conditions d’accès au marché de l’emploi pour les ressortissants roumains et bulgares, pour les rapprocher des conditions applicables à l’ensemble des ressortissants communautaires.
Ainsi, pour les personnes présentes dans les campements qui relèveraient de ces deux nationalités, la liste des métiers qui leur sont ouverts sans que la situation de l’emploi ne leur soit opposable sera prochainement élargie, après mise en œuvre des procédures de consultation des partenaires sociaux.
Les taxes dues par l’employeur et le ressortissant lui-même à l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) lors de la délivrance du titre de séjour ou de son renouvellement sont supprimées. Vous recevrez très prochainement une instruction conjointe du ministre de l’intérieur et du ministre délégué chargé du budget en ce sens. Toutefois il sera fait application dès maintenant de ces nouvelles dispositions. L’entrée en vigueur de cette mesure est, en effet, immédiate.
En dehors de ces dispositions nouvelles, qui concernent les seuls ressortissants roumains et bulgares, votre action doit s’inscrire dans les mesures engagées par le service public de l’emploi.
Elle nécessite au préalable une analyse qualitative de la situation des personnes concernées afin de déterminer leur distance à l’emploi et au marché du travail. Cette analyse sera conduite par Pôle emploi, et l’unité territoriale de la DIRECCTE, avec l’appui des autres administrations compétentes et des autres partenaires, notamment des collectivités territoriales. Cette phase a aussi pour objet d’informer les personnes sans emploi qui entendent se mettre en situation active d’en rechercher, de s’inscrire à Pôle emploi.
Les mesures de droit commun de l’emploi peuvent être engagées pour les personnes éloignées de l’emploi : formations, orientation vers les structures d’insertion par l’économique comme des chantiers d’insertion, contrats aidés et notamment le contrat d’accès à l’emploi (CAE).
Vous vous appuierez sur les prestations de Pôle emploi prévues pour une démarche d’accompagnement personnalisé vers l’emploi, renforcé en fonction des situations.
Pour certaines personnes, la question de la maîtrise du français et des savoirs de base pourra se poser. A ce titre, il conviendra d’associer Pôle Emploi, les services et les opérateurs en charge de la mise en œuvre du dispositif des « compétences-clés » et de l’apprentissage des savoirs de base afin de proposer une formule adaptée aux besoins des personnes.
Pour les ressortissants étrangers accédant à l’emploi, vous veillerez à ce que l’instruction des demandes d’autorisation de travail soit menée par les unités territoriales des DIRECCTE dans les délais les plus courts possibles, afin de donner à ce dispositif d’appui à l’insertion professionnelle sa pleine dynamique.
4. Mobiliser les moyens disponibles
Le dispositif mis en place vise à mobiliser les moyens humains et financiers disponibles, en veillant à la coopération des différents partenaires et en utilisant prioritairement les moyens de droit commun, qui, pour l’État, sont les crédits affectés aux politiques d’hébergement et de logement, de l’immigration (dispositif du Fond européen d’intégration), les mesures des politiques de l’emploi et de l’éducation nationale, et celles en faveur de l’accompagnement sanitaire et social.
En complément, une attention particulière devra être portée à la mobilisation des fonds européens (FEDER et FSE), dans la mesure de l’état actuel des programmations et des consommations. Pour ce qui relève du financement des opérations d’investissement (structures d’hébergement notamment), il est rappelé que les mesures des Programmes opérationnels régionaux FEDER prévues en faveur des communautés marginalisées sont mobilisables.
La mise en place des mesures d’accompagnement, d’insertion et d’hébergement doit conduire à faire participer largement les acteurs locaux, au premier rang desquels les collectivités territoriales, sans lesquelles aucune solution efficace ne peut être construite.
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Bien évidemment, l’action qui vous est demandée au profit de populations qui n’ont pas, naguère, bénéficié du respect républicain, prend place, avec ses spécificités, dans l’ensemble des politiques que vous conduisez pour les différentes catégories de populations en situation de fragilité. Les partenaires, les personnels mobilisés doivent être bien informés qu’il s’agit là de l’application légitime du principe d’égalité républicaine et non d’une discrimination, fût-elle positive. Nous vous demandons donc d’accompagner d’ores et déjà cette mobilisation de l’assurance, pour les structures et fonctionnaires qui y concourent, de la pleine reconnaissance de l’effort demandé et de l’engagement qui en résulte pour eux. Vous veillerez à la communication sur ces divers aspects.
Par ailleurs, cette indispensable mobilisation a un coût budgétaire et en ressources humaines. Vos rapports en suite des présentes instructions, les évalueront avec réalisme. Vous ferez connaître sans retard les éventuelles difficultés administratives qui apparaîtraient.
Pour faciliter vos contacts avec les collectivités territoriales et les grandes associations, le gouvernement sensibilisera les structures qui les représentent ou les regroupent au niveau national, pour obtenir un engagement en commun sur le terrain où il vous est demandé de développer votre action.
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Afin de vous assister dans la mise en œuvre des actions mentionnées dans la présente instruction et d’animer au niveau central les travaux interministériels, une mission spécifique est confiée au Préfet Alain Régnier, délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement (DIHAL). Il sera chargé de vous fournir un appui méthodologique et, plus largement, de diffuser différents éléments utiles à la progression des actions engagées. Il sera également attentif aux réalités locales que vous pourrez porter à sa connaissance, notamment en vue des éventuelles évolutions des textes et dispositifs nationaux, auxquelles il contribuera.
Par ailleurs, une mission va être confiée à plusieurs inspections générales pour évaluer les dispositifs d’insertion et d’accompagnement des personnes présentes dans ces campements. Elles seront chargées de procéder à l’état des lieux des dispositifs existants et au recensement des expérimentations en cours et des bonnes pratiques. Vous serez tenus informés du mandat et des travaux de cette mission qui pourront donner lieu, en fonction des initiatives relevées, à une évolution des dispositifs.
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C’est la mobilisation de l’ensemble des partenaires, et des moyens de chacun, intervenant le plus en amont possible, qui permettra d’identifier et de mettre en œuvre les solutions d’insertion les plus adéquates, dans un double objectif de fermeté en matière de sécurité et d’humanité dans la prise en charge des personnes. »
ANNEXE 5 : DÉCLARATION DE STRASBOURG DU CONSEIL DE L’EUROPE SUR LES ROMS DU 20 OCTOBRE 2010
(1) Les Roms (82) continuent d’être marginalisés socialement et économiquement dans de nombreuses régions d’Europe, ce qui met en cause le respect des droits de l’homme, empêche leur pleine participation dans la société et l’exercice effectif des responsabilités civiques et nourrit la diffusion de préjugés.
(2) Toute réponse efficace à cette situation doit combiner intégration sociale et économique dans la société et la protection effective des droits de l’homme. La société tout entière doit s’approprier et soutenir ce processus. La participation effective et réelle de nos compatriotes européens issus du milieu des Roms est une condition du succès.
(3) Si la responsabilité première de promouvoir l’intégration incombe aux États membres dont les Roms sont ressortissants ou dans lesquels ils résident durablement et légalement, les développements récents concernant les Roms en Europe ont montré que certains des défis auxquels nous sommes confrontés ont des implications transfrontalières et appellent par conséquent une réponse paneuropéenne.
(4) Il convient de tenir compte du fait que les situations diffèrent d’un pays à l’autre et que le rôle des organisations internationales devrait avant tout consister à soutenir et faciliter les efforts réalisés aux niveaux national, régional et en particulier local.
(5) Partant, les États membres du Conseil de l’Europe ont adopté la présente « Déclaration de Strasbourg » :
(6) Réaffirmant que tous les êtres humains sont nés libres et égaux en dignité et en droits ;
(7) Réaffirmant leur attachement à la dignité humaine et à la protection des droits de l’homme pour toute personne ;
(8) Rappelant les valeurs fondamentales, les normes et standards de la démocratie, des droits de l’homme et de l’état de droit que partagent les États membres du Conseil de l’Europe et qui doivent guider l’action à tous les niveaux ;
(9) Confirmant leur engagement à promouvoir l’inclusion sociale et à créer les conditions permettant à chaque individu d’exercer effectivement ses droits et responsabilités civiques ;
(10) Rappelant que la participation active des Roms est essentielle pour assurer leur insertion sociale et pour les encourager à participer à la recherche de solutions aux problèmes, entre autres, des niveaux d’instruction et d’emploi relativement faibles ;
(11) Gardant à l’esprit que le processus d’inclusion des Roms contribue à la cohésion sociale, la stabilité démocratique et à l’acceptation de la diversité ;
(12) Rappelant que dans l’exercice de ses droits et libertés, toute personne doit respecter la législation nationale et les droits d’autrui ;
(13) Condamnant catégoriquement le racisme, la stigmatisation et le discours de haine à l’encontre des Roms, en particulier dans les discours politiques et publics ;
(14) Rappelant les obligations des États Parties en vertu de tous les instruments juridiques pertinents du Conseil de l’Europe qu’ils ont ratifiés, en particulier la Convention européenne des droits de l’homme et ses Protocoles et, le cas échéant, la Charte sociale européenne et la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales et la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires ;
(15) Recommandant que les États Parties tiennent pleinement compte des arrêts pertinents de la Cour européenne des droits de l’homme et des décisions pertinentes du Comité européen des droits sociaux, dans l’élaboration de leurs politiques concernant les Roms ;
(16) Rappelant leur engagement en faveur des principes de tolérance et de non-discrimination, tels que contenus dans le statut de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) ;
(17) S’appuyant sur les initiatives, activités et programmes déjà développés et menés par les États membres en vue de la pleine intégration des Roms ;
(18) Les États membres du Conseil de l’Europe s’accordent sur la liste non exhaustive de priorités qui suit, qui devrait servir à orienter les efforts vers des démarches plus ciblées et plus cohérentes à tous les niveaux, y compris à travers la participation active des Roms :
Non-discrimination et citoyenneté
Non-discrimination
(19) Adopter et mettre en œuvre de manière effective une législation en matière de lutte contre la discrimination, y compris en matière d’emploi, d’accès à la justice, de fourniture de biens et de services, y compris l’accès au logement et aux services publics clés, tels que la santé et l’éducation.
Législation pénale
(20) Adopter et mettre en œuvre de manière effective une législation pénale contre les infractions à caractère raciste.
Citoyenneté
(21) Prendre des mesures effectives afin d’éviter l’apatridie conformément à la législation et à la politique nationales et d’accorder aux Roms résidant de manière légale sur leur territoire national l’accès à des documents d’identité.
Droits des femmes et égalité des genres
(22) Mettre en place des mesures efficaces pour respecter, protéger et promouvoir l’égalité des filles et femmes issues du milieu des Roms au sein de leurs communautés et dans la société en général.
(23) Mettre en place des mesures efficaces pour abolir, là où elles sont toujours utilisées, les pratiques nuisibles en matière de droits reproductifs des femmes issues du milieu des Roms, au premier chef la stérilisation forcée.
Droits de l’enfant
(24) Promouvoir par le biais de mesures efficaces l’égalité de traitement et les droits des enfants des Roms, en particulier le droit à l’éducation et les protéger contre la violence, y compris les abus sexuels et l’exploitation par le travail, conformément aux traités internationaux.
Autonomisation
(25) Promouvoir la participation effective des Roms dans la vie sociale, politique et civique, y compris la participation active de représentants des Roms dans les mécanismes de prise de décisions les concernant et la coopération avec des autorités indépendantes, telles que l’Ombudsman dans le domaine de la protection des droits de l’homme.
Accès à la justice
(26) Garantir un accès égal et effectif au système judiciaire, y compris le cas échéant par le biais de services d’aide judiciaire abordables.
(27) Assurer des enquêtes effectives en temps opportun et recourir aux procédures judiciaires qui s’imposent dans les cas de violence ou autres infractions à l’encontre des Roms.
(28) Fournir une formation adéquate et ciblée aux services de justice et de police.
Lutte contre la traite
(29) Considérant que les enfants et les femmes roms sont souvent victimes de traite et d’exploitation, consacrer l’attention et les ressources voulues à la lutte contre ces phénomènes dans le cadre des mesures générales visant à endiguer la traite des êtres humains et la criminalité organisée, et, dans les cas appropriés, délivrer des permis de séjour aux victimes.
Combattre la stigmatisation et le discours de haine
(30) Renforcer les efforts visant à combattre le discours de haine. Encourager les médias à traiter des sujets relatifs aux Roms de manière responsable et équitable et à s’abstenir de tous stéréotypes négatifs et de toute stigmatisation.
(31) Rappeler aux autorités publiques aux niveaux national, régional et local la responsabilité particulière qui leur incombe de s’abstenir de faire des déclarations, en particulier à travers les médias, pouvant raisonnablement être prises pour un discours de haine ou un discours pouvant faire l’effet d’accréditer, de propager ou de promouvoir la haine raciale, la xénophobie ou d’autres formes de discrimination ou de haine fondées sur l’intolérance.
(32) Envisager de participer à la campagne du Conseil de l’Europe et de la Commission européenne « Dosta ! Dépassons les préjugés, allons à la rencontre des Roms ! » et intensifier les activités dans ce cadre.
Inclusion sociale
Éducation
(33) Garantir l’accès effectif et égal au système éducatif, y compris préscolaire, de tous les enfants de Roms et les moyens d’assurer leur présence, y compris, par exemple, en faisant appel à des auxiliaires pédagogiques et à des médiateurs. Dispenser, le cas échéant, une formation continue aux enseignants et aux personnels éducatifs.
Emploi
(34) Garantir l’égalité d’accès des Roms à l’emploi et à la formation professionnelle conformément au droit international et national, y compris, le cas échéant, en utilisant des médiateurs dans les services d’emploi. Donner aux Roms, le cas échéant, la possibilité de valider les savoir-faire et compétences qu’ils ont acquis dans un cadre informel.
Soins de santé
(35) Garantir l’égalité d’accès de tous les Roms aux services de santé, par exemple, en faisant appel à des médiateurs de santé et en dispensant des formations aux facilitateurs existants.
Logement
(36) Prendre des mesures appropriées pour améliorer les conditions de vie des Roms.
(37) Assurer aux Roms un accès égal aux services de logement et d’hébergement.
(38) Prévoir une notification raisonnable et appropriée et un accès effectif aux voies de recours judiciaires en cas d’expulsions, tout en assurant le plein respect du principe de la prééminence du droit.
(39) En consultation avec toutes les parties concernées et en conformité avec la législation et la politique nationales, prévoir des hébergements appropriés pour les Roms itinérants ou semi itinérants.
Culture et langue
(40) S’il y a lieu, prendre des mesures pour améliorer la connaissance de la culture, l’histoire et les langues des Roms et la compréhension de celles-ci.
Coopération internationale
(41) Assurer une coopération ciblée, soutenue et efficace au sujet des Roms, au niveau paneuropéen, entre États membres, régions, autorités locales et organisations européennes, en s’inspirant des nombreux exemples de bonnes pratiques qui existent aux niveaux européen, national, régional et local. En particulier, encourager la coopération avec l’Union européenne, y compris par le biais de programmes conjoints tels que les « Cités interculturelles », ainsi qu’avec l’OSCE ;
(42) Assurer une coopération étroite avec les communautés des Roms à tous les niveaux, paneuropéen, national, régional et local, dans la mise en œuvre de ces engagements ;
(43) Reconnaissant la nécessité de contribuer à la mise en œuvre de ces priorités en utilisant les bonnes pratiques, l’expertise et les ressources financières disponibles aux niveaux européen, national et local, les États membres du Conseil de l’Europe :
(44) se félicitent de la décision du Secrétaire Général de réorganiser de manière transversale les ressources au sein du Secrétariat du Conseil de l’Europe chargées de développer davantage la coopération avec les autorités nationales, régionales et locales et les organisations internationales en matière de collecte, d’analyse, d’échange et de dissémination d’informations sur les politiques et les bonnes pratiques concernant les Roms, de fournir des conseils et un soutien à la demande des autorités nationales, régionales et locales ainsi qu’une assistance pratique dans la mise en œuvre de nouvelles initiatives politiques, tout particulièrement à l’échelle locale, et de donner accès à la formation, au renforcement de capacités et à du matériel éducatif ;
(45) encouragent une étroite coopération avec les États membres, d’autres institutions du Conseil de l’Europe, d’autres organisations internationales, en particulier l’Union européenne et l’OSCE, ainsi que la société civile, y compris des associations de Roms et des organisations non gouvernementales concernées, afin que ses travaux complètent ceux des autres organismes, plutôt que de les dupliquer ;
(46) conviennent de créer un Programme de formation européen pour les médiateurs issus des Roms en vue de rationaliser, codifier et consolider les programmes de formation existants pour et à propos des médiateurs pour les Roms, à travers l’utilisation la plus efficace des ressources, standards, méthodologies, réseaux et infrastructures existants du Conseil de l’Europe, notamment les centres européen de la jeunesse à Strasbourg et à Budapest, en étroite coopération avec les autorités locales et nationales ;
(47) encouragent les États membres à adopter une approche interinstitutionnelle coordonnée pour traiter des questions concernant les Roms ;
(48) prennent note de la liste de bonnes pratiques élaborée par le Secrétaire Général, dénommée « les initiatives de Strasbourg », pour lesquelles il demande un soutien. Ce catalogue ouvert de projets ayant un impact immédiat et mesurable pourra servir de catalyseur à l’action future ;
(49) invitent le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe à présenter un premier rapport d’étape sur la mise en œuvre de la « Déclaration de Strasbourg » à la session ministérielle du Conseil de l’Europe à Istanbul en mai 2011.
ANNEXE 6 : PROPOSITION DE RECOMMANDATION DU CONSEIL RELATIVE À DES MESURES EFFICACES D’INTÉGRATION DES ROMS DANS LES ÉTATS MEMBRES
LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,
vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), et notamment son article 19, paragraphe 1, et son article 292,
vu la proposition de la Commission européenne,
considérant ce qui suit :
(1) Les articles 2 et 3 du traité sur l’Union européenne (TUE) consacrent le droit à l’égalité ainsi que la lutte contre l’exclusion sociale et les discriminations en tant que valeurs et objectifs fondamentaux de l’Union européenne.
(2) L’article 10 du TFUE dispose que « dans la définition et la mise en œuvre de ses politiques et actions, l’Union cherche à combattre toute discrimination fondée sur […] la race ou l’origine ethnique […] ».
(3) L’article 19, paragraphe 1, du TFUE prévoit l’adoption de mesures pour combattre toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l’origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle.
(4) L’article 21, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne oblige les institutions, organes, offices et agences de l’Union ainsi que les États membres, lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union, à respecter l’interdiction des discriminations fondées sur tout motif, tel que la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, ou l’appartenance à une minorité nationale, et à promouvoir son application conformément à leurs compétences.
(5) La directive 2000/43/CE83 du Conseil établit un cadre contraignant qui interdit, dans toute l’Union, les discriminations fondées sur la race ou l’origine ethnique dans les domaines de l’emploi et de la formation, de l’éducation, de la protection sociale (y compris la sécurité sociale et les soins de santé), des avantages sociaux et de l’accès aux biens et aux services (y compris le logement).
(6) Le terme « Roms » est utilisé, tout comme dans d’autres documents politiques du Parlement européen et du Conseil européen, comme un terme générique qui inclut des groupes de personnes ayant des caractéristiques culturelles plus ou moins similaires, tels que les Sinti, les Kalés, les Gens du voyage, etc., qu’ils soient sédentaires ou non84.
(7) Nombre de Roms vivant dans l’Union se trouvent dans une situation socioéconomique plus dramatique que l’ensemble de la population et bénéficient moins que les autres groupes défavorisés des mesures générales d’inclusion sociale. Ils ont, dès lors, besoin de mesures supplémentaires et plus ambitieuses, adaptées à leur situation et à leurs besoins. Les Roms étant fréquemment confrontés aux discriminations, à l’exclusion sociale et à une grande pauvreté, ils sont considérés comme vulnérables et courant davantage le risque d’être victimes de la traite des êtres humains.
(8) Les Roms qui sont des ressortissants de pays tiers en séjour régulier dans les États membres sont particulièrement vulnérables car ils partagent les mêmes conditions de vie dramatiques que de nombreux citoyens de l’Union d’origine rom, tout en rencontrant les difficultés que connaissent les migrants originaires des pays n’appartenant pas à l’UE.
(9) Dans le contexte de la libre circulation et de la mobilité à l’intérieur de l’Union, il convient que le plein exercice des droits liés à la libre circulation s’accompagne d’une amélioration des conditions de vie des Roms ainsi que de leur intégration économique et sociale tant dans les États membres d’origine que dans les États membres de résidence.
(10) Les résolutions du Parlement européen sur la situation des Roms en Europe (9 septembre 2010) et sur la stratégie européenne pour l’intégration des Roms (9 mars 2011) appelaient la Commission et les États membres à mobiliser les stratégies et instruments de l’Union existants pour assurer l’inclusion socioéconomique des Roms.
(11) La communication publiée en 2011 par la Commission, intitulée « Un cadre de l’UE pour les stratégies nationales d’intégration des Roms »85, invitait les États membres à adopter ou à élargir une approche globale de l’intégration des Roms et à approuver plusieurs objectifs communs en matière d’éducation, d’emploi, de santé et de logement, afin d’accélérer l’intégration de cette communauté.
(12) Le 19 mai 2011, le Conseil avait adopté des conclusions86 relatives au cadre de l’UE pour les stratégies nationales d’intégration des Roms, dans lesquelles il exprimait l’engagement des États membres de faire progresser l’inclusion sociale et économique des Roms.
(13) Les conclusions du Conseil européen des 23 et 24 juin 2011 appelaient à mettre rapidement en œuvre les conclusions du Conseil du 19 mai, notamment pour ce qui était d’élaborer, d’actualiser ou d’étoffer les stratégies nationales d’intégration des Roms ou les ensembles intégrés de mesures visant à améliorer la situation de cette communauté.
(14) La communication de la Commission intitulée « Stratégies nationales d’intégration des Roms : un premier pas dans la mise en œuvre du cadre de l’UE »87, publiée en 2012, et le document de travail des services de la Commission88 qui l’accompagnait ont donné les résultats de la première évaluation de toutes les stratégies nationales d’intégration des Roms et invité les États membres à envisager un certain nombre d’adaptations pour progresser sur cette voie.
(15) La Commission a intensifié son dialogue avec les États membres sur cette intégration, notamment en créant, en octobre 2012, le réseau des points de contact nationaux pour les Roms, en vue d’examiner les solutions à apporter aux problèmes recensés. En novembre et décembre 2012, un groupe de points de contact nationaux pour les Roms a poursuivi la discussion sur les moyens d’accroître l’efficacité des mesures visant à réussir l’intégration des Roms dans les États membres, et a ensuite fait rapport à l’ensemble du réseau.
(16) Dans sa communication de 2013 sur les avancées réalisées dans la mise en œuvre des stratégies nationales d’intégration des Roms, la Commission souligne la nécessité de poursuivre l’action pour créer les conditions préalables indispensables au succès des mesures destinées à accélérer l’intégration des Roms, dès que possible.
(17) La stratégie Europe 2020 a donné un nouvel élan à la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale en fixant un objectif européen commun pour réduire le nombre de personnes menacées par ces deux fléaux, pour diminuer le taux de décrochage scolaire et pour augmenter les niveaux de scolarisation et d’emploi. L’inclusion des Roms est un volet essentiel des efforts convergents déployés par l’Union et les États membres à cet égard. Dans ce contexte, la gouvernance dans le cadre du semestre européen encourage l’application des recommandations par pays correspondantes, et le train de mesures sur les investissements sociaux89 offre des orientations supplémentaires sur les actions à entreprendre pour assurer une croissance inclusive.
(18) Compte tenu de ce qui vient d’être exposé et des lacunes mises en lumière, il est impératif d’améliorer l’efficacité des mesures d’intégration des Roms, tout en respectant pleinement le principe de subsidiarité et la responsabilité première des États membres dans ce domaine.
(19) La présente recommandation s’inscrit dans le prolongement des recommandations formulées dans les communications de la Commission, les résolutions du Parlement européen et les conclusions du Conseil sur l’inclusion des Roms et elle vise à compléter la législation antidiscrimination de l’Union en vigueur et à rendre son application et le contrôle de celle-ci plus efficaces.
(20) La présente recommandation n’aborde pas les différences de traitement fondées sur la nationalité et n’affecte pas les dispositions et conditions relatives au statut juridique des Roms prévues par le droit national et le droit de l’Union, ni les effets juridiques de ce statut.
(21) En 2011, la Commission avait suggéré, dans sa proposition de règlement instituant des dispositions communes90, que les États membres définissent une approche intégrée pour répondre aux besoins spécifiques des zones géographiques les plus touchées par la pauvreté ou des groupes cibles les plus exposés au risque de discrimination ou d’exclusion, notamment les communautés marginalisées. En complément des autres Fonds structurels et d’investissement européens, elle avait également proposé, dans le projet de règlement relatif au Fonds social européen91 pour la période de programmation 2014-2020, de soutenir à titre de priorité d’investissement l’intégration des communautés marginalisées telles que les Roms.
RECOMMANDE :
1. OBJET
1.1. La présente recommandation a pour objet de fournir des orientations aux États membres pour accroître l’efficacité de leurs mesures d’intégration des Roms et soutenir la mise en œuvre de leurs stratégies nationales d’intégration de cette communauté ou de leurs ensembles de mesures destinées à améliorer la situation des Roms.
2. QUESTIONS DE FOND
Mesures d’action ciblées
2.1. Afin d’assurer une complète égalité en pratique, il convient que les États membres prennent des mesures ciblées pour garantir l’égalité de traitement et le respect des droits fondamentaux, notamment l’égalité d’accès des Roms à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé, au logement et aux réseaux publics. Cela devrait comprendre, conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, des mesures spécifiques pour prévenir ou compenser des désavantages liés à la race ou à l’origine ethnique.
2.2. Les mesures à adopter devraient être basées sur des indicateurs socioéconomiques ou géographiques, tels qu’un fort taux de chômage de longue durée, le faible niveau d’instruction ou des zones défavorisées et/ou isolées.
Accès à l’éducation
2.3. Il convient que les États membres prennent des mesures spécifiques pour assurer aux Roms une égalité de traitement et le plein accès au système d’enseignement général, de qualité, afin de combler l’écart qui existe entre les Roms et les autres élèves et de faire en sorte que tous les élèves roms accomplissent au moins la scolarité obligatoire, notamment le cycle d’enseignement primaire. Cet objectif devrait être atteint par les moyens suivants :
(a) suppression de la ségrégation scolaire, notamment en mettant fin au placement inapproprié des élèves roms dans des établissements spécialisés ;
(b) réduction de l’abandon scolaire92 tout au long du parcours éducatif, y compris au niveau secondaire, en privilégiant les filières professionnelles ;
(c) amélioration de l’accès aux structures d’accueil et d’éducation de la petite enfance, y compris au soutien spécialisé, si nécessaire ;
(d) application de méthodes d’enseignement et d’apprentissage personnalisées et inclusives, y compris le soutien pédagogique pour les enfants en difficulté d’apprentissage, et lutte contre l’analphabétisme ;
(e) encouragement des parents à s’impliquer davantage et soutien aux familles par des médiateurs scolaires spécialement formés pour travailler avec la communauté rom ;
(f) amélioration de la formation des enseignants et de la médiation scolaire à l’intention des Roms ;
(g) élargissement de l’accès à l’enseignement de la deuxième chance, aide à la transition entre les niveaux d’enseignement, et garantie que les Roms acquièrent un ensemble de compétences qui les aidera à entrer sur le marché du travail.
2.4. Il convient que les États membres prennent des mesures spécifiques pour encourager les Roms à intégrer l’enseignement secondaire et supérieur.
Accès à l’emploi
2.5. Outre les mesures ciblées que les États membres peuvent prendre, ceux-ci devraient assurer l’égalité de traitement entre les Roms et les autres travailleurs et combler l’écart qui existe entre les deux groupes, de façon à améliorer la situation des Roms en matière d’emploi dans le cadre des politiques générales nationales dans ce domaine. Cet objectif devrait être atteint par les moyens suivants :
(a) soutien au premier emploi, à la formation en cours d’emploi, à l’apprentissage tout au long de la vie et au développement des compétences ;
(b) soutien au travail indépendant et à l’entreprenariat ;
(c) égalité d’accès aux services publics de l’emploi, en plus de services spécifiques et individualisés pour demandeurs d’emploi roms, et encouragement du recrutement de fonctionnaires roms qualifiés ;
(d) formation et recrutement de médiateurs roms qualifiés, chargés de dispenser des conseils sur les possibilités de carrière ;
(e) suppression des obstacles, y compris les discriminations, à l’entrée (ou au retour) sur le marché libre du travail.
Accès aux soins de santé
2.6. Les États membres devraient prendre des mesures spécifiques pour assurer l’égalité de traitement entre les Roms et les autres patients et combler l’écart qui existe entre les deux groupes, de façon à améliorer l’accès des Roms, à égalité avec les autres, aux services de soins de santé préventifs, primaires, spécialisés et d’urgence. Cet objectif devrait être atteint par les moyens suivants :
(a) fourniture aux Roms de la couverture de sécurité sociale de base et de services de santé complets ;
(b) offre d’examens médicaux réguliers, de soins pré- et postnataux, et du planning familial ;
(c) programmes de vaccination gratuite ciblant, en particulier, les personnes vivant dans des zones marginalisées et éloignées ;
(d) formation de médiateurs de santé roms qualifiés.
Accès au logement
2.7. Les États membres devraient prendre des mesures spécifiques pour assurer l’égalité de traitement entre les Roms et le reste de la population et pour combler l’écart qui existe entre les deux groupes, de façon à étendre aux Roms leur politiques et mesures en matière de logement. Cet objectif devrait être atteint par les moyens suivants :
(a) suppression de la ségrégation spatiale et promotion de la déségrégation ;
(b) promotion de l’accès non discriminatoire au logement social, y compris en ce qui concerne la qualité des logements sociaux proposés aux Roms et la disposition d’aires d’accueil pour les gens du voyage/Roms non sédentaires ;
(c) formation de médiateurs roms qualifiés pour encourager tous les Roms à habiter des logements sociaux, à utiliser les infrastructures et réseaux publics.
2.8. Les États membres devraient veiller à ce que les demandes des autorités locales concernant des projets de régénération urbaine comprennent, lorsque c’est pertinent, des interventions intégrées dans le domaine du logement en faveur des communautés marginalisées. Ils devraient également promouvoir le développement local mené par les acteurs locaux et les investissements territoriaux intégrés, financés par les Fonds structurels et d’investissement européens93.
Financement
2.9. Il convient que les États membres allouent suffisamment de fonds à leurs stratégies et plans d’action nationaux et locaux, prélevés sur toutes les sources de financement disponibles (locales, nationales, européennes et internationales), pour atteindre les objectifs concernant l’inclusion des Roms. Cette mesure devrait être facilitée par l’affectation d’une part suffisante des ressources de la politique de cohésion de l’UE à des investissements dans l’humain, via le FSE, et par l’allocation d’au moins 20 % de ce montant, dans chaque État membre, en faveur de l’inclusion sociale.
2.10. Les États membres devraient veiller à ce que des mesures appropriées soient prises pour que l’intégration des Roms figure parmi les priorités dans les accords de partenariat sur le recours aux Fonds structurels et d’investissement européens (ESI)94 durant la période 2014-2020, compte étant tenu de la taille et du taux de pauvreté des communautés roms et de l’écart existant entre Roms et non-Roms, ainsi que des problèmes recensés par le semestre européen pour la plupart des États membres concernés.
2.11. Il convient que les États membres améliorent leurs capacités de gestion, de suivi et d’évaluation grâce à l’assistance technique des Fonds ESI.
2.12. Les États membres devraient, en outre, aider à renforcer les capacités des autorités locales et des organisations de la société civile, en recourant à des financements nationaux et de l’Union, pour qu’elles puissent mener les projets à bien.
2.13. L’allocation de fonds publics aux fins de mise en œuvre des stratégies nationales d’intégration des Roms ou des ensembles intégrés de mesures devrait suivre une approche ciblée sur les besoins spécifiques des zones géographiques ou groupes cibles les plus touchés par la pauvreté ou l’exclusion sociale, tels que les Roms.
3. MESURES HORIZONTALES
Lutte contre les discriminations
3.1. Il convient que les États membres veillent à l’application pratique effective de la directive 2000/43/CE sur le terrain, notamment en passant au crible leurs règles et pratiques administratives nationales, régionales et locales pour déceler et abroger toute mesure discriminatoire ou ségrégationniste. La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme en la matière devrait servir de référence supplémentaire pour détecter les dispositions ou pratiques illégales.
3.2. Il convient que les États membres appliquent, aux niveaux régional et local, des mesures de déségrégation en faveur des Roms. Il y a lieu d’accompagner les politiques et mesures de lutte contre la ségrégation de programmes d’information et de formations appropriés destinés aux fonctionnaires locaux, aux représentants de la société civile et aux Roms eux-mêmes.
3.3. Il convient également que les États membres veillent à ce que, en cas d’expulsion, outre l’acquis de l’Union, les obligations internationales en matière de droits de l’homme, notamment celles prévues par la convention européenne des droits de l’homme, soient pleinement respectées.
3.4. Il convient que les États membres appliquent des mesures pour lutter contre les discriminations à l’égard des Roms dans la société, notamment en :
(a) informant les communautés roms et le grand public sur les avantages que présente l’intégration des Roms ;
(b) sensibilisant le grand public à la nature multiculturelle des sociétés et en incluant ces aspects dans les programmes scolaires et le matériel pédagogique, lorsque c’est pertinent.
Protection des femmes et des enfants roms
3.5. Il convient que les États membres combattent les discriminations subies par les femmes et les enfants roms, y compris les discriminations multiples, en faisant respecter la législation encadrant le mariage des mineurs, en luttant contre les mariages forcés et en interdisant la mendicité faisant intervenir des enfants. Les États membres devraient également faire participer à cette lutte tous les acteurs concernés, tels que les inspecteurs de la santé et du travail, les services de police, les experts en éducation, les magistrats et les représentants de la société civile.
Réduction de la pauvreté et inclusion sociale
3.6. Il convient que les États membres luttent contre la pauvreté et l’exclusion sociale qui touchent la population rom en investissant dans le capital humain et dans les politiques de cohésion sociale, notamment :
a) en permettant la mise en œuvre des politiques d’inclusion des Roms grâce à des programmes de soutien ciblés et conditionnels, prévoyant des allocations et des services aidant à entrer (ou à retourner) sur le marché du travail ; en promouvant les marchés du travail qui favorisent l’insertion et en fournissant des aides au revenu adaptées ;
b) en rendant les aides financières et services offerts aux Roms plus pérennes et plus adaptés grâce à un meilleur ciblage, à une simplification des procédures, à la lutte contre les fraudes et les erreurs, à une plus large perception des programmes d’assistance sociale, et en créant des incitations à convertir un travail non déclaré en un emploi officiel.
3.7. Il convient que les États membres, prenant en considération la taille de leur population rom, fassent de l’intégration de cette dernière l’un des volets majeurs de leurs programmes nationaux de réforme dans le contexte de la stratégie Europe 2020.
Autonomisation des Roms
3.8. Il convient que les États membres aident les Roms à se prendre en charge et leur apportent un soutien à tous les stades de leur vie, et qu’ils investissent dans des programmes ciblés de garantie pour la jeunesse, dans l’apprentissage tout au long de la vie et dans des programmes en faveur du vieillissement actif.
3.9. Les États membres devraient organiser des campagnes d’information pour faire mieux connaître aux Roms leurs droits (notamment en ce qui concerne les discriminations et les voies de recours possibles) et leurs obligations.
4. MESURES STRUCTURELLES
Action locale
4.1. Il convient que les États membres, tout en respectant l’autonomie des autorités locales et régionales, encouragent les plans ou stratégies d’action locale qui comprennent des données de départ, des points de référence et des objectifs mesurables pour l’inclusion des Roms ainsi que des financements appropriés.
4.2. Ils devraient faire participer les régions, les autorités locales et la société civile locale au réexamen, à la gestion, à la mise en œuvre et au suivi de leurs stratégies nationales. Les parties prenantes concernées devraient participer aux accords de partenariat et aux programmes opérationnels cofinancés par les Fonds structurels et d’investissement européens. Les autorités centrales et locales devraient coopérer en permanence à la mise en œuvre de ces stratégies. À cet effet, il convient que les États membres allouent des ressources suffisantes aux autorités publiques locales, pour faciliter la mise en œuvre, au niveau local, des ensembles de mesures ciblées.
Mesures de suivi et d’évaluation
4.3. Il convient que les États membres contrôlent l’efficacité de leurs stratégies nationales ou de leurs ensembles intégrés de mesures ainsi que les résultats des plans, programmes ou stratégies d’action locale. À cet effet, ils devraient accroître la collecte de données qualitatives et quantitatives sur l’intégration des Roms et sur les progrès réalisés grâce aux stratégies ou aux mesures susmentionnées. Il y a lieu d’évaluer la mise en œuvre des stratégies et de la comparer aux données de départ pour apprécier la pertinence, l’efficacité, la pérennité et la coordination des stratégies.
4.4. Avec le soutien de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, et dans le respect du droit national et du droit de l’Union applicables, il convient que les États membres définissent des indicateurs de référence et des modes de collecte des données permettant de mesurer régulièrement les progrès, en particulier au niveau local, ce qui permettra d’établir des rapports et des comparaisons fiables au sujet de la situation des Roms et celle des non-Roms dans les États membres et entre ces derniers. Ils devraient également définir des données de départ et des objectifs mesurables pour leurs stratégies et plans d’action.
Organismes œuvrant en faveur de l’égalité de traitement
4.5. Il convient que les États membres soutiennent l’action et les capacités institutionnelles des organismes œuvrant en faveur de l’égalité de traitement en leur accordant des ressources suffisantes pour qu’ils puissent véritablement fournir aide et soutien d’ordre juridique et judiciaire aux Roms victimes de discriminations.
4.6. Ils devraient assurer un dialogue régulier entre leurs points de contact nationaux pour les Roms et les organismes nationaux œuvrant en faveur de l’égalité de traitement.
Points de contact nationaux pour l’intégration des Roms
4.7. Il convient que les États membres dotent les points de contact nationaux pour l’intégration des Roms d’attributions, de moyens financiers et de ressources humaines suffisants pour qu’ils puissent coordonner efficacement l’application horizontale et le suivi des politiques d’intégration des Roms aux niveaux national et local. Ils devraient veiller à ce que ces points de contact soient consultés au cours des procédures décisionnelles relatives à la définition, au financement et à la mise en œuvre des politiques concernées. Les points de contact nationaux pour l’intégration des Roms devraient favoriser la participation et l’engagement de la société civile rom dans la mise en œuvre des stratégies nationales d’intégration des Roms et des plans d’action locale.
Coopération transnationale
4.8. Outre les mesures prises au sein du cadre de l’UE pour les stratégies nationales d’intégration des Roms, il convient que les États membres développent et participent à des formes transnationales de coopération nationale, régionale ou locale, par le biais d’initiatives, à des projets spécifiques et à des accords bilatéraux ou multilatéraux, afin :
a) d’apporter des solutions aux problèmes liés à la mobilité transfrontière des Roms à l’intérieur de l’Union européenne ;
b) d’encourager un apprentissage mutuel et la multiplication des bonnes pratiques, par exemple une coopération entre les autorités gérant les fonds structurels, de façon à concevoir des interventions efficaces en matière d’inclusion des Roms.
5. RAPPORTS ET SUIVI
5.1. Il convient que les États membres adoptent les mesures nécessaires à l’application de la présente recommandation au plus tard le [AJOUTER la date - 24 mois à compter de la publication] et qu’ils notifient à la Commission toutes mesures prises, conformément à la présente recommandation, jusqu’à cette date.
5.2. Ensuite, il convient que les États membres communiquent annuellement à la Commission toutes les nouvelles mesures adoptées, à la fin de chaque année.
5.3. Les informations fournies par les États membres serviront à préparer les rapports annuels de la Commission, à l’intention du Parlement européen et du Conseil, sur la mise en œuvre des stratégies nationales d’intégration de Roms, ainsi qu’à établir le semestre européen de la stratégie Europe 2020, par la formulation des recommandations spécifiques par pays.
5.4. La Commission suivra ainsi la situation de près et elle examinera, trois ans après l’adoption de la présente recommandation, si celle-ci doit être revue et actualisée.
1 () La composition de cette Commission figure au verso de la présente page.
2 () Communication de la Commission au Parlement européen, au conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions : cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020 ; 5 avril 2011 ; COM(2011) 173 final.
3 () Communication de la commission au Parlement européen, au conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions fixant un cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020.
4 () Avis exploratoire, « L’intégration des minorités – Les Roms », SOC(263), EESC 1207/2008, paragraphe 5.3.
5 ) Communication from the Commission to the European Parliament, the Council, the European Economic and Social Committee and the Committee of the Regions : An EU Framework for National Roma Integration Strategies up to 2020 ; 5 April 2011 ; COM(2011) 173 final.
6 Communication from the Commission to the European Parliament, the Council, the European Economic and Social Committee and the Committee of the Regions : An EU Framework for National Roma Integration Strategies up to 2020
7 Exploratory Opinion, The Integration of Ethnic Minorities/Roma SOC(263), EESC 1207/2008, paragraph 5.3.
8 () Pour davantage de détails, se référer au tableau sur les populations Roms élaboré à partir des données du Conseil de l’Europe, reproduit en annexe 2 du présent rapport.
9 () Communication du 7 avril 2010 de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, portant sur « l’intégration sociale et économique des Roms en Europe » ; COM(2010)133 final.
10 () Document de synthèse du 15 septembre 2010 sur les droits de l’homme des Roms, par le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, reproduit en annexe 3 du présent rapport.
11 () 4e rapport trimestriel d’activité 2012 de Nils Muižnieks, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe ; 1er octobre – 31 décembre 2012.
12 () Communication de la Commission au Parlement européen, au conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions : cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020 ; 5 avril 2011 ; COM(2011) 173 final.
13 () Directive 2000/43/CE du Conseil.
14 () Par exemple, les services britanniques locaux dénommés TESS (« Traveller Education Support Services ») sont des services adaptés visant à instaurer l’accès à l’éducation et à la réussite scolaire de manière égalitaire pour les enfants des gens du voyage et des Roms. Un autre exemple est celui du projet « Des emplois pour les Roms » en Bulgarie, qui offre une assistance aux Roms sans emploi et un appui aux chefs d’entreprises. Il est possible de trouver d’autres exemples dans le rapport de la Commission intitulé « Améliorer les outils pour l’inclusion sociale et la non-discrimination des Roms dans l’UE », 2010. Voir également « Perspectives internationales sur les mesures d’action positive », Commission européenne, 2009.
15 () COM(2011) 11, Examen annuel de la croissance : avancer dans la réponse globale apportée par l’Union européenne à la crise.
16 () Sur sept initiatives phares, les plus pertinentes dans ce contexte sont : « Une plateforme européenne contre la pauvreté et l’exclusion sociale », « Une stratégie pour les nouvelles compétences et les nouveaux emplois » et « Une Union pour l’innovation ».
17 () Communication de la Commission au Parlement européen, au conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions : cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020 ; 5 avril 2011 ; COM(2011) 173 final.
18 () Quant à l’éducation secondaire, elle est suivie par environ 10 % des Roms, selon une estimation fondée sur l’enquête de l’Open Society Institute (OSI) de 2008 (données disponibles pour sept États membres).
19 () Enquête sur les forces de travail – 2009.
20 () Open Society Institute, « International Comparative Data Set on Roma Education » [Série de données comparatives internationales sur l’éducation des Roms], 2008. Les données relatives à l’éducation primaire sont disponibles pour six États membres : Bulgarie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Roumanie et Slovaquie. La moyenne pondérée est de 42 % pour ces États membres.
21 () COM(2011) 66.
22 () Projet pilote : « A Good Start : scaling-up access to quality services for young Roma children » [Un bon départ : faire progresser l’accès à des services de qualité pour les enfants roms].
23 () Dans ce contexte, il convient d’étudier activement la possibilité d’utiliser des approches innovantes comme l’accès à l’apprentissage et l’acquisition de compétences fondés sur les TIC.
24 () Source : Amnesty International ; Avril 2013 : « Ici et maintenant droits humains pour les roms un coup de semonce pour l’union européenne »
25 () Communication de la Commission au Parlement européen, au conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions : cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020 ; 5 avril 2011 ; COM(2011) 173 final.
26 () COM(2011) 11, Annexe 3 - Projet de rapport conjoint sur l’emploi. Voir également l’Enquête sur les forces de travail, 2009 : pour 2009, le taux d’emploi était de 62,5 % pour les femmes et de 75,8 % pour les hommes.
27 () Agence des droits fondamentaux, « European Union Minorities and Discrimination Survey, Main Results Report » [Enquête de l’Union européenne sur les minorités et la discrimination – Principaux résultats], 2009.
28 () La circulaire interministerielle NOR INTK1233053C du 26/08/2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites est reproduite en annexe 4 du présent rapport.
29 () Source : CNDH (Collectif National Droits de l’Homme Romeurope)
30 () Communication de la commission au Parlement européen, au conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions fixant un cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020.
31 () Données Eurostat 2002 - http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/8-21032006-AP/EN/8-21032006-AP-EN.PDF.
32 () Agence des droits fondamentaux, « Housing conditions of Roma and Travellers in the European Union, Comparative Report » [Conditions de logement des Roms et des Gens du voyage dans l’Union européenne - Rapport comparatif], 2009.
33 () Communication de la commission au Parlement européen, au conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions fixant un cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020.
34 () http://epp.eurostat.ec.europa.eu/portal/page/portal/product_details/dataset ?p_product_code=TSDPH100
35 () COM(2009) 567, Solidarité en matière de santé : réduction des inégalités de santé dans l’Union européenne. Voir également la Fundación Secretariado Gitano, op cit., et K. Sepkowitz, « Health of the World’s Roma population » [Santé de la population rom mondiale], 2006, partant de la situation observée en République tchèque, en Irlande, en Slovaquie et en Bulgarie.
36 () Rapport entre le nombre de décès d’enfants âgés de moins d’un an au cours de l’année et le nombre de naissances vivantes au cours de la même année. Eurostat, 2009 -
http://appsso.eurostat.ec.europa.eu/nui/show.do ?dataset=demo_minfind&lang=en.
37 () Agence des droits fondamentaux, « European Union Minorities and Discrimination Survey, Main Results Report », 2009.
38 () Fundación Secretariado Gitano, op.cit. Voir également « The Health Status of Gypsies and Travellers in England » [La santé des gitans et des gens du voyage en Angleterre], 2004, université de Sheffield.
39 () « Arrêtons de chasser les Roms, passons à l’intégration », le 22 novembre 2012.
40 () Rapport annuel d’activités 2011 de Thomas Hammarberg, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe
41 () « Les responsables politiques qui tiennent des propos anti-Roms alimentent la haine » ; 28 juin 2011.
42 () « Médias européens et stéréotypes antitsiganes » ; 7 juillet 2011.
43 () « Des centaines de milliers d’apatrides en Europe ont besoin d’une protection supplémentaire » ; 2 août 2011.
44 () « Le droit de quitter son pays doit s’appliquer sans discrimination » ; 22 novembre 2011.
45 () La Déclaration de Strasbourg du Conseil de l’Europe adoptée le 20 octobre 2010 est reproduite en annexe 5 du présent rapport.
46 () Recommandation 2003 (2012) de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe sur les migrants Roms en Europe.
47 () Communication de la commission au Parlement européen, au conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions fixant un cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020.
48 () La Décennie de l’inclusion des Roms 2005-2015 est une initiative internationale qui réunit des gouvernements, des organisations internationales partenaires et la société civile, afin d’accélérer le processus d’intégration des Roms et d’évaluer cette évolution de manière transparente et quantifiable. Les douze pays qui participent actuellement à la Décennie sont la Bulgarie, la République tchèque, la Hongrie, la Roumanie, la Slovaquie, l’Espagne, ainsi que l’Albanie, la Bosnie-et-Herzégovine, la Croatie, l’ARYM, le Monténégro et la Serbie. La Slovénie a un statut d’observateur. Les organisations internationales partenaires de la Décennie sont la Banque mondiale, l’OSI, le PNUD, le Conseil de l’Europe, la Banque de développement du Conseil de l’Europe, l’OSCE, l’ERIO (Bureau d’Information européen sur les Roms), l’ERTF (Forum européen des Roms et des Gens du voyage), le CEDR (Centre européen des droits des Roms), le programme ONU-Habitat, le HCR, et l’UNICEF.
49 () Voir les estimations du Conseil de l’Europe à l’adresse http://www.coe.int/t/dg3/romatravellers/default_EN.asp, qui sont jointes dans l’annexe de la présente communication.
50 () Les dix Principes fondamentaux communs en matière d’intégration des Roms ont été présentés lors de la première réunion de la plateforme le 24 avril 2009. Ils ont été joints en annexe aux conclusions du Conseil du 8 juin 2009. En résumé : 1) politiques constructives, pragmatiques et non discriminatoires ; 2) ciblage spécifique mais non exclusif ; 3) approche interculturelle ; 4) démarginaliser les Roms ; 5) sensibilisation à la dimension hommes-femmes ; 6) transfert de politiques fondées sur des données probantes ; 7) recours aux instruments communautaires ; 8) participation des collectivités régionales et locales ; 9) participation de la société civile ; 10) participation active des Roms.
51 () Cf 3e partie, point V
52 () Mme Viviane Reding
53 () M. László Andor
54 () Stratégie du gouvernement français pour l’inclusion des Roms dans le cadre de la communication de la Commission du 5 avril 2011 et des conclusions du Conseil du 19 mai 2011
55 () Rapport Héran, Inégalités et discriminations, Pour un usage critique et responsable de l’outil statistique, 5 février 2010.
56 () En 2007, un amendement a été proposé au projet de loi immigration par deux députés afin de compléter l’article 25 de la loi de 78 pour prévoir un nouveau cas de dérogation pour les « études sur la mesure de la diversité des origines et sous réserve d’une autorisation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la réalisation de traitements de données à caractère personnel faisant « apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques » ». Dans sa décision no 2007-557 DC du 15 novembre 2007, le Conseil constitutionnel a censuré cette disposition en ce qu’elle constitue un cavalier législatif. A travers un obiter dictum (point 29), il a par ailleurs établi le cadre constitutionnel applicable à la collecte de données ethniques en France : « Considérant que, si les traitements nécessaires à la conduite d’études sur la mesure de la diversité des origines des personnes, de la discrimination et de l’intégration peuvent porter sur des données objectives, ils ne sauraient, sans méconnaître le principe énoncé par l’article 1er de la Constitution, reposer sur l’origine ethnique ou la race ».
57 () À deux reprises, en 2005 et en 2007, la CNIL a publié des « recommandations sur la mesure de la diversité et la protection des données personnelles ». Dans le domaine de l’emploi, la CNIL a rappelé que les données de type ethno-racial ne peuvent figurer dans les fichiers de gestion des employeurs. Concernant les enquêtes, qu’elle distingue soigneusement des fichiers de gestion, elle souligne les garanties qui doivent les entourer au sein des entreprises et ne peuvent aboutir qu’à croiser les données sur différentes sources de discrimination. Dans les autres domaines, la CNIL a encouragé à « développer des études sur le « ressenti » des discriminations, incluant le recueil de données sur l’apparence physique des personnes ». Elle a « admis, sous certaines conditions, l’analyse des prénoms et des patronymes pour détecter d’éventuelles pratiques discriminatoires ». Mais elle a également « refusé en l’état la création d’un référentiel national « ethno-racial ».
58 () Communication de la Commission au Parlement européen, au conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions : cadre de l’Union européenne pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020 ; 5 avril 2011 ; COM(2011) 173 final.
59 () Pour le Fonds social européen, 9,6 milliards d’EUR ont été alloués pour la période 2007-2013 aux mesures d’intégration socioéconomique des personnes défavorisées - et parmi elles, les Roms marginalisés – et 172 millions d’EUR ont été explicitement alloués à des actions visant à intégrer les Roms. Dans le cas du Fonds européen de développement régional (FEDER), plus de 16,8 milliards d’EUR sont prévus pour les infrastructures sociales.
60 () COM(2010) 133.
61 () Conclusions du Conseil du 7 juin 2010, 10058/10+COR1.
62 () Règlement (UE, Euratom) no 437/2010 du Parlement européen et du Conseil (JO L 132 du 29.5.2010). Le 9 février 2011, la Commission a adopté une note d’orientation relative à la mise en œuvre des interventions dans le domaine du logement en faveur des Communautés marginalisées dans le cadre du FEDER, approuvée par le comité de coordination des Fonds.
63 () COM(2010) 110, Politique de cohésion : le rapport stratégique 2010 sur la mise en œuvre des programmes 2007-2013, et SEC(2010) 360, indiquent que les États membres n’ont utilisé en moyenne que 31 % de leurs allocations pour soutenir l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi de la politique de cohésion.
64 () Conformément au règlement no 1083/2006 du Conseil, articles 42 et 43 concernant les subventions globales (JO L 210 du 31.7.2006).
65 () Le Comité économique et social européen dispose d’un réseau de points de contacts nationaux dans la société civile, par l’intermédiaire des comités économiques et sociaux nationaux et d’organisations similaires.
66 () Décision no 283/2010/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 mars 2010.
67 () La Commission soutient déjà, par exemple, le Kiútprogram, un petit projet pilote ciblé sur la communauté rom de Hongrie, qui fournit des microcrédits relativement faibles.
68 () Les lignes directrices intégrées pour les politiques économiques et de l’emploi (no 10) font explicitement référence aux Roms. En outre, l’initiative phare « Plateforme pour la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale » décrit les modalités d’intégration des Roms dans le contexte de la politique globale de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale. D’autres lignes directrices pour les politiques de l’emploi encouragent l’insertion professionnelle d’une manière qui favorise l’intégration socioéconomique des Roms.
69 () COM(2010) 700, Le réexamen du budget de l’Union européenne.
70 () Communication de la Commission au conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 7 avril 2010 : « L’intégration sociale et économique des Roms en Europe » ; COM(2010)133 final
71 () Règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil, et notamment son article 16.
72 () Stratégie du gouvernement français pour l’inclusion des Roms
73 () Stratégie du gouvernement français pour l’inclusion des Roms
74 () La circulaire interministérielle NOR INTK1233053C du 26/08/2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites est reproduite en annexe 4 du présent rapport.
75 () FUNDACION SECRETARIADO GITANO
76 () Hubert Julien-Laferrière
77 () Olivier Brachet
78 () Cf. Annexe 6
79 () Communication de la commission au conseil, au parlement européen, au comité économique et social européen et au comité des régions du 7 avril 2010 : « L’intégration sociale et économique des Roms en Europe » ; COM(2010)133 final.
80 () La Commission utilise le message clé « Les Roms en Europe : favoriser l’intégration pour le bénéfice de tous » pour des publications et des réalisations audiovisuelles spécifiques.
81 () Avis exploratoire, « L’intégration des minorités – Les Roms », SOC(263), EESC 1207/2008, paragraphe 5.3.
82 () L’expression « Roms » utilisée dans l’ensemble du présent texte désigne les Roms, les Sintés, les Kalés, les Gens du voyage et les groupes de population apparentés en Europe, et vise à englober la grande diversité des groupes concernés, y compris les personnes qui s’auto-identifient comme « Gypsies ».
83 JO L 180 du 19.7.2000, p. 22.
84 (SEC(2010)400).
85 COM(2011) 173 final.
86 Conclusions du Conseil relatives à un cadre de l’UE pour les stratégies nationales d’intégration des Roms pour la période allant jusqu’à 2020, document 10665/11 du 19 mai 2011.
87 COM(2012) 226 final.
88 SWD(2012) 133 final.
89 Communication intitulée « Investir dans le domaine social en faveur de la croissance et de la cohésion, notamment par l’intermédiaire du Fonds social européen, au cours de la période 2014-2020 », COM(2013) 83 final.
90 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche relevant du Cadre stratégique commun, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen et au Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil - COM(2011) 615.
91 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds social européen et abrogeant le règlement (CE) no 1081/2006 - COM(2011) 607.
92 Recommandation du Conseil du 28 juin 2011 concernant les politiques de réduction de l’abandon scolaire, JO C 191 du 1.7.2011. L’un des objectifs phares de la stratégie Europe 2020 approuvés par le Conseil européen est de réduire le taux d’abandon scolaire à moins de 10 % et de garantir qu’au moins 40 % de la jeune génération dispose d’un diplôme de l’enseignement supérieur ou d’un équivalent.
93 Fonds social européen (FSE), Fonds européen de développement régional (FEDER), Fonds de cohésion (FC), Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) et Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP).
94 Le FEDER peut financer des infrastructures dans les secteurs de la santé, de l’éducation et du logement.