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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 février 2014
RAPPORT D’INFORMATION
DÉPOSÉ
PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES
portant observations sur la proposition de loi tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires
ET PRÉSENTÉ
PAR M. Philip Cordery
Député
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La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Danielle AUROI, présidente ; Mmes Annick GIRARDIN, Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Pierre LEQUILLER, vice-présidents ; MM. Christophe CARESCHE, Philip CORDERY, Mme Estelle GRELIER, M. André SCHNEIDER, secrétaires ; MM. Ibrahim ABOUBACAR, Jean-Luc BLEUNVEN, Alain BOCQUET, Jean-Jacques BRIDEY, Mmes Isabelle BRUNEAU, Nathalie CHABANNE, M. Jacques CRESTA, Mme Seybah DAGOMA, MM. Yves DANIEL, Bernard DEFLESSELLES, Mme Sandrine DOUCET, M. William DUMAS, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FROMION, Hervé GAYMARD, Jean-Patrick GILLE, Mme Chantal GUITTET, MM. Razzy HAMMADI, Michel HERBILLON, Laurent KALINOWSKI, Marc LAFFINEUR, Charles de LA VERPILLIÈRE, Mme Axelle LEMAIRE, MM. Christophe LÉONARD, Jean LEONETTI, Arnaud LEROY, Mme Audrey LINKENHELD, MM. Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Jean-Claude MIGNON, Jacques MYARD, Michel PIRON, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Arnaud RICHARD, Mme Sophie ROHFRITSCH, MM. Jean-Louis ROUMEGAS, Rudy SALLES, Gilles SAVARY.
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Pages
I. LE STAGE, OUTIL DE FORMATION ET D’ACCÈS AU MARCHÉ DU TRAVAIL… 7
A. LE STAGE : UN VOCABLE UNIQUE QUI DÉSIGNE DES RÉALITÉS DIVERSES 7
1. Un vocable ancien dont la signification a peu changé… 7
2. …mais qui recoupe des réalités diverses tant au plan national qu’européen 7
B. LE STAGE, ÉTAPE DU CURSUS D’ÉTUDE ET DE FORMATION INDISPENSABLE ET FORTEMENT DÉVELOPPÉE 9
II. …MALHEUREUSEMENT TROP SOUVENT DÉVOYÉ 10
A. L’USAGE ABUSIF DU STAGE EN ENTREPRISE : UNE PRATIQUE FRANÇAISE ET EUROPÉENNE… 10
1. La réalité des abus dans la pratique des stages en France… 10
2. ...fait écho à la même réalité au niveau de l’Union européenne 10
B. …QUI S’EXPLIQUE NOTAMMENT PAR LES LACUNES DE LA RÉGLEMENTATION, QUE CE SOIT AU NIVEAU NATIONAL OU EUROPÉEN 11
1. La réglementation française des stages : une avant-garde toujours perfectible 11
2. Une réglementation européenne en construction qui demeure décevante à plusieurs égards… 13
3. ...mais qui est le signe de la volonté de doter l’Union d’une réglementation sur les stages qui favorise les conditions d’une saine mobilité des stagiaires 16
DEUXIÈME PARTIE : LA PROPOSITION DE LOI « SUR LES STAGES » : UNE AMÉLIORATION LEGISLATIVE IMPORTANTE À COMPLÉTER SUR LA QUESTION DE LA MOBILITÉ INTERNATIONALE DES STAGIAIRES 19
I. UNE PROPOSITION DE LOI QUI COMPORTE DES AVANCEES IMPORTANTES ET EN COHÉRENCE AVEC LES OBJECTIFS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE 19
A. DES OBJECTIFS EN COHÉRENCE AVEC CEUX DE LA COMMISSION EUROPÉENNE 19
B. UN DISPOSITIF IMPORTANT D’ENCADREMENT DE LA PRATIQUE DES STAGES ET DE PROTECTION DES STAGIAIRES 20
1. Les missions de l’établissement d’enseignement clarifiées 20
2. Un renforcement de la limitation de la durée des stages 20
3. L’interdiction de la substitution d’un stage à un emploi 20
4. La limitation du nombre de stagiaires 20
5. L’amélioration des droits des stagiaires 20
6. Le renforcement du rôle de l’Inspection du travail 21
7. Des gratifications exonérées d’impôt sur le revenu 21
II. DES COMPLEMENTS DEMEURENT POSSIBLES AFIN DE FAVORISER LA MOBILITÉ DES JEUNES STAGIAIRES FRANÇAIS AU SEIN DE L’UNION EUROPÉENNE 21
A. LE STAGE À L’ÉTRANGER : UNE OPPORTUNITÉ QUI SE HEURTE SOUVENT UNE BARRIÈRE ECONOMIQUE 21
1. Le stage à l’étranger : une opportunité incontestable pour les étudiants… 21
2. …qui se heurte souvent à une barrière économique 22
B. COMPLETER LE TEXTE ACTUEL DE LA PROPOSITION DE LOI POUR PERMETTRE LA DEMOCRATISATION DE L’ACCÈS AUX STAGES À L’ETRANGER 22
1. Encadrer les stages effectués à l’étranger 23
2. Améliorer l’information des stagiaires 23
3. Accompagner la mobilité 23
Mesdames, Messieurs,
Nos collègues Bruno Le Roux, Chaynesse Khirouni et les membres du groupe socialiste, républicain et citoyen et apparentés ont déposé sur le Bureau de l’Assemblée nationale le 14 janvier 2014 une proposition de loi tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires.
Celle-ci entre en résonnance avec le travail qui a été confié à votre rapporteur par votre commission sur la question de l’emploi des jeunes en Europe, travail qui aboutira à la publication d’un rapport d’ici quelques temps ; c’est pourquoi il était important que notre commission se saisisse pour observations de ce texte, en application de l’article 151-1-1 du règlement de l’Assemblée nationale.
La situation de l’emploi des jeunes est inquiétante dans l’ensemble de l’Europe, y compris dans les pays que l’on peut qualifier de « meilleurs élèves », puisque partout les jeunes ont des taux de chômage deux fois supérieurs aux taux de chômage moyens.
Cette situation s’explique en grande partie par une inadéquation des formations aux besoins du marché de l’emploi, et donc par la difficulté d’insertion des jeunes dans le marché du travail. Cela est d’autant plus paradoxal que plusieurs secteurs connaissent des pénuries de main-d’œuvre, comme par exemple l’hôtellerie et la restauration, qui embauchent des jeunes étrangers par manque de main-d’œuvre française qualifiée en langues étrangères.
Le stage fait partie, avec la formation en alternance, des outils qui permettent d’affiner la formation des élèves et des étudiants et de leur permettre de mieux « coller » aux besoins des employeurs. À cet égard, le stage est un élément décisif de formation.
La présente proposition répond à un triple objectif, comme l’indique son exposé des motifs : favoriser le développement des stages de qualité, éviter que les stages se substituent à des emplois, et protéger les droits des stagiaires et améliorer leur statut.
Ces trois objectifs rejoignent ceux de la Commission européenne, qui a présenté le 4 décembre 2013 une proposition de recommandation du Conseil relative à un cadre de qualité pour les stages (1)
Soulignons à cet égard que la France n’a pas à rougir face à ses partenaires européens, puisque nous disposons d’ores-et-déjà d’un des dispositifs législatifs les plus protecteurs, ce qui n’exclut pas, bien entendu, de travailler à son amélioration.
Ce texte est le fruit d’un travail approfondi de la part du groupe de travail qui en est à l’origine, travail qui a permis de présenter un texte équilibré qui répond pleinement aux enjeux actuels en matière de réglementation des stages et d’amélioration du statut des stagiaires en France, mais peut néanmoins être encore complété pour favoriser la mobilité des stagiaires français à l’étranger.
PREMIÈRE PARTIE : LE STAGE, UN OUTIL DE FORMATION SOUVENT DEVOYÉ
Le vocable « stage » apparaît dès le XVIIème siècle, il est alors utilisé pour désigner le séjour qu'un nouveau chanoine doit faire pendant un temps minimum dans le lieu de son église pour pouvoir jouir des honneurs et des revenus de sa prébende. Il est intéressant de noter que dès cette période, le mot « stage » sert à définir une période transitoire de formation et de probation en vue de l’exercice d’une fonction. Le stage répond de fait à l’heure actuelle aux mêmes préoccupations, puisqu’il s’agit d’une période de plus ou moins longue durée accomplie par des élèves ou des étudiants dans le cadre de leur cursus scolaire ou universitaire comme prolongement de l’enseignement théorique reçu au lycée, à l’école ou à l’université.
Aujourd’hui, le stage recoupe en France des réalités diverses, puisqu’un même vocable désigne tant les stages d’observation en entreprise d’une semaine des élèves de troisième que les stages pendant la période de formation. Il peut s’adresser en outre indifféremment à des collégiens, des étudiants ou même des adultes dans le cadre de la formation professionnelle. Le stage peut être exigé par l’établissement de formation – et être ainsi un passage obligé pour l’obtention d’un diplôme – ou être entrepris à la propre initiative de l’étudiant.
Au niveau européen, la notion de stage n’a pas forcément la même signification qu’en France. La notion de stage diffère en effet d’un pays à l’autre, tout comme l’encadrement légal. Par exemple, en Grande-Bretagne, le stage peut correspondre à un internship, un work placement ou un work experience, mais cette pratique est peu répandue. En Allemagne, à l’inverse, la pratique du stage est ancienne et répandue.
Selon la Commission européenne, les stages font actuellement l’objet de réglementations très diverses dans l’Union. D’un côté, lorsque la réglementation existe, elle prescrit des éléments qualitatifs et des modalités d’application différents ; de l’autre, les stages sont encore largement non règlementés dans certains États membres et secteurs d’activité.
De fait, la définition légale du stage en France ne recoupe pas la définition du stage telle qu’elle résulte de la communication de la Commission européenne sur le cadre de qualité pour les stages2.
En droit français, aux termes de l’article L. 612-8 du code de l’éducation modifié par la loi n°2013-660 du 22 juillet 2013, le stage correspond à une période temporaire de mise en situation en milieu professionnel au cours de laquelle l'étudiant acquiert des compétences professionnelles qui mettent en œuvre les acquis de sa formation en vue de l'obtention d'un diplôme ou d'une certification. Le stagiaire se voit confier une ou des missions conformes au projet pédagogique défini par son établissement d'enseignement et approuvées par l'organisme d'accueil. Le stage est donc en droit français conçu comme faisant partie d’un cursus d’étude. Il ne saurait être postérieur à la formation. Il fait nécessairement l’objet d’une convention de stage entre l’organisme de formation et l’organisme d’accueil.
La définition retenue par la Commission européenne est beaucoup plus large ; celle-ci entend également en effet par « stage » une période de travail d’une durée limitée que des jeunes venant de terminer leurs études passent dans une entreprise, un organisme public ou une organisation sans but lucratif en vue d’acquérir une expérience professionnelle sur le terrain avant d’occuper un emploi régulier. Le stage est ainsi conçu comme « une période de pratique professionnelle limitée dans le temps, convenue entre un stagiaire et un fournisseur de stage sans intervention d’une tierce partie, comportant une dimension pédagogique et visant à permettre au stagiaire d’acquérir une expérience professionnelle avant d’assumer un emploi à part entière. » Ce ne sont en effet que ces stages « en marché libre » que la proposition de la Commission propose d’encadrer.
Si l’objectif est similaire – acquérir une expérience professionnelle – le champ d’application et les modalités des stages au sens du droit français et tels que résultant de la communication de la Commission européenne sont très différents.
Pour la Commission européenne, un stagiaire peut être un étudiant ou un jeune diplômé, tandis qu’en droit français, le statut de stagiaire ne concerne que les étudiants en cours de formation.
L’objet est lui aussi différent ; il s’agit en droit français d’une « mise en situation », alors que la Commission européenne semble considérer l’activité de stage comme un « travail ». Ceci est cohérent avec le fait qu’en droit français, le stage a pour but de valider des acquis et d’obtenir un diplôme ; le stage s’inscrit donc dans le cadre du projet pédagogique de l’étudiant, tandis qu’au sens de la Commission européenne, le stage se situe à la fin des études et représente une étape préliminaire avant l’insertion dans le marché du travail.
Les stages sont un complément de la formation théorique dans les cursus d’étude à tous niveaux, et peuvent avoir des objectifs et durées variables. Au collège, le stage d’observation est la première occasion de rentrer en contact avec l’entreprise ; par la suite, le stage permet de parfaire ses connaissances théoriques en les éprouvant dans les milieux professionnels et ainsi d’améliorer ses chances d’insertion professionnelle.
La pratique des stages est fortement développée mais difficile à quantifier. En 2006, on estimait qu’un étudiant sur deux avait effectué au moins un stage au cours de son cursus de formation.
Selon le ministère de l'Enseignement supérieur, 28 % des étudiants français à l'université ont effectué un stage en 2008-2009. Ce chiffre relativement faible s’explique par le fait que les étudiants effectuent rarement un stage jusqu’à la licence. En effet, pour cette même année universitaire, seuls 11 % des étudiants inscrits en licence avaient effectué un stage ; c’était le cas de 39 % des étudiants inscrits en master.
Seulement 42 % des stages effectués sur cette période ont été rémunérés, et plus de deux tiers des stages ont eu une durée inférieure à un trimestre.
Aujourd’hui, selon le collectif Génération Précaire, on compterait en France 1,6 million de stagiaires, chiffre qui se serait élevé à 600 000 en 2006, à 800 000 en 2013 et à 1,2 million en 2008.
Au niveau européen, la pratique des stages est aussi fortement développée. Selon l’enquête Eurobaromètre, menée en mai 2013 auprès de 12 921 personnes âgées de 18 à 35 ans dans tous les pays de l’Union et en Croatie (3), près d’un jeune Européen sur deux (46 %) a déjà effectué un ou plusieurs stages. Par ailleurs, un quart des stages a été jugé insatisfaisant sur le plan des conditions de travail, 18 % des stages l’ont été sur le plan du contenu de l’apprentissage. La Commission européenne a de plus relevé la faiblesse des stages transnationaux (9 % de l’ensemble des stages), qui s’explique notamment par le manque d’information : 38 % des personnes qui auraient été intéressées par ce type d’expérience ont déclaré avoir disposé de trop peu d’informations sur la réglementation en matière de stages dans les autres États membres.
Que ce soit au niveau national ou à l’échelle de l’Union, le stage est un outil malheureusement trop souvent dévoyé.
Au niveau national, on assiste au développement d’abus de stages en entreprise. Ces abus consistent le plus souvent à affecter des stagiaires, moins couteux que des salariés – ceux-ci reçoivent une gratification de 436,05 euros ne donnant pas lieu à versement de cotisations sociales (4) – à de véritables postes de travail. Le stage est alors détourné de sa vocation, qui est d'être un élément de la formation des étudiants, et se substitue à des emplois qui devraient être occupés par de jeunes diplômés.
Il arrive parfois que les stagiaires se succèdent indéfiniment sur un même poste, le stagiaire qui s'apprête à quitter l'entreprise étant alors chargé de former celui qui va le remplacer… Or, le fait que dans de nombreux cursus de formation la validation du stage soit nécessaire à l’obtention du diplôme explique que les étudiants puissent difficilement dénoncer ces abus. En outre, il n’est pas rare que, pour répondre à la pénurie d’offre d’emploi, les étudiants diplômés, qui disposent de la formation requise pour occuper un poste de travail déterminé, s'inscrivent à l'université simplement pour pouvoir être recrutés ensuite comme stagiaires. Ils se font alors concurrence à eux-mêmes, au bénéfice des entreprises.
Les stages les mieux rémunérés peuvent parfois être en fait des emplois déguisés, et sont alors fréquemment requalifiés en contrats lorsque les stagiaires saisissent les juridictions prud’homales.
Mais les abus concernent aussi les conditions d’emploi du stagiaire, ceux-ci ne bénéficiant pas, contrairement aux salariés, des dispositions légales relatives à la durée du travail, aux autorisations d’absence ou aux congés légaux.
Au niveau européen, le constat est identique. Selon l’enquête Eurobaromètre précitée, près de 25 % des stagiaires sondés ont déclaré que leurs conditions de travail étaient différentes de celles des salariés de plein droit, tandis que 20 % estiment ne rien avoir appris d'utile sur le plan professionnel.
Par ailleurs, près de six stagiaires sur dix (59 %) n'ont eu droit à aucune indemnité lors de leur dernier stage. Et parmi ceux qui étaient rémunérés, moins de la moitié considèrent que les sommes versées suffisaient à couvrir leurs frais de subsistance. Enfin, quatre stagiaires sur dix n'avaient pas passé de convention ou de contrat de stage sous forme écrite avec l'organisation ou l'entreprise d'accueil.
La Commission européenne s’inquiète en outre, à raison, de la qualité des stages. Elle relève que plusieurs études et enquêtes ont permis de déterminer qu’un grand nombre de stages présentaient des problèmes de qualité. Beaucoup de stagiaires se voient confier des tâches subalternes et au contenu d’apprentissage insuffisant. Or, pour qu’un stage soit utile, celui-ci doit comporter un contenu d’apprentissage solide, incluant notamment la définition des compétences spécifiques à acquérir, la supervision et le parrainage du stagiaire et le suivi de la progression. Ceci est d’autant plus dommageable qu’une analyse fondée sur les résultats de l'enquête Eurobaromètre a fait apparaître une corrélation étroite entre la qualité des stages et les débouchés professionnels : les personnes qui effectuent un stage « bas de gamme » ont considérablement moins de chances de trouver un emploi par la suite.
La Commission relève enfin les nombreux problèmes liés à la substitution des stages aux emplois pérennes ainsi que l’absence de conditions de travail correctes.
B. …QUI S’EXPLIQUE NOTAMMENT PAR LES LACUNES DE LA RÉGLEMENTATION, QUE CE SOIT AU NIVEAU NATIONAL OU EUROPÉEN
Ces abus sont rendus possibles par le caractère encore lacunaire de la réglementation des stages en entreprise, en France, mais surtout au niveau de l’Union.
Le dispositif français d’encadrement des stages, fait déjà figure d’avant-garde au sein de l’Union européenne.
À l’heure actuelle, tout stage doit être obligatoirement intégré à un cursus pédagogique et faire l'objet d'une convention de stage et le stage ne peut avoir pour objet l'exécution d'une tâche régulière correspondant à un poste permanent dans l'entreprise.
L'accueil successif de stagiaires pour un même poste n'est plus possible, car la loi impose un délai de carence fixé au tiers de la durée du stage précédent. La durée du ou des stages d'un stagiaire dans la même entreprise ne peut dépasser six mois par année d'enseignement, sauf périodes dites de « césure ».
Une gratification minimale doit être versée au stagiaire dès que la durée du stage dépasse deux mois consécutifs ou non au sein de la même entreprise dans la même année scolaire. Cette gratification minimale est fixée à 12,5 % du plafond horaire de la Sécurité sociale, soit actuellement 436,05 euros par mois. Quand la gratification ne dépasse pas la limite de 12,5 % évoquée ci-dessus, elle est totalement exonérée de charges sociales, tant pour l'entreprise que pour le stagiaire.
Si le stagiaire est embauché dans les trois mois qui suivent la fin d'un stage intégré au cursus pédagogique de sa dernière année d'études, la durée du stage est déduite de la période d'essai, sans qu'il soit possible de la réduire de plus de la moitié. Si l'emploi correspond aux activités qui avaient été confiées au stagiaire, la durée du stage est alors entièrement déduite de la période d'essai.
L'employeur doit tenir à jour un registre des stages et informer le comité d'entreprise sur le nombre et les conditions d'accueil des stagiaires.
Pour autant, ce dispositif demeure perfectible, notamment sur la question de la qualité des stages, sur celle de l’amélioration du statut du stagiaire, ainsi que sur la lutte contre la substitution des stages aux emplois. C’est l’objet de la proposition de loi qui fait l’objet de ce rapport.
Quelle rémunération pour les stagiaires en France ?
Lorsque la durée de stage au sein d’une même entreprise (ou au sein de tout autre organisme d’accueil) est supérieure à deux mois consécutifs ou, au cours d’une même année scolaire ou universitaire, à deux mois consécutifs ou non, le ou les stages font l’objet d’une gratification (versement d’une somme d’argent) dont le montant peut être fixé par convention de branche ou par accord professionnel étendu. À défaut, le montant horaire de cette gratification est fixé à 12,5 % du plafond horaire de la sécurité sociale (plafond horaire égal, en 2014 à 23 €). Ainsi, par exemple, pour un mois complet à 151,67 heures (soit 35 heures par semaine), la gratification sera égale, en 2014, à 436,05 €.
La durée de stage permettant de déterminer le droit du stagiaire à cette gratification s’apprécie compte tenu de la convention de stage et des éventuels avenants qui ont pour effet de prolonger le stage.
Lorsqu’elle est due, la gratification de stage est versée mensuellement au stagiaire ; elle est due au stagiaire à compter du premier jour du premier mois de stage. .En cas de suspension ou de résiliation de la convention de stage, le montant de la gratification due au stagiaire est proratisé en fonction de la durée de stage effectuée.
La gratification est due au stagiaire sans préjudice du remboursement des frais engagés pour effectuer le stage et des avantages offerts, le cas échéant, pour la restauration, l’hébergement et le transport. Concernant les incidences sur la franchise de la fourniture du repas à la cantine moyennant une participation du stagiaire, ou de l’attribution de titres restaurant, on se reportera aux précisions figurant sur le site de l’Urssaf.
Cette gratification n’a pas le caractère d’un salaire. Pour les stages qui ne remplissent pas la condition de durée mentionnée ci-dessus, le versement d’une gratification est facultatif et relève de la « négociation » entre le stagiaire et l’entreprise qui l’accueille. Aucune cotisation et contribution de sécurité sociale n’est due, ni par l’entreprise d’accueil, ni par le stagiaire lorsque les sommes versées par l’employeur (gratification) restent inférieures ou égales à 12,5 % du plafond horaire de la sécurité sociale (23 € pour l’année 2014), c’est-à-dire 436,05 € par mois en 2014 pour une durée de présence dans l’entreprise égale à la durée légale du travail (35 heures, soit 151,67 heures par mois).
Source : www.travail-emploi.gouv
L’Union européenne ne dispose pas pour l’instant de réglementation sur les stages. La « Charte de qualité pour les stages » présentée par la Commission européenne le 4 décembre 2013 est à cet égard un premier pas encourageant quoiqu’insuffisant.
La jeunesse et sa situation sur le marché du travail est pourtant au centre des préoccupations européennes depuis le début des années 2000 et d’autant plus depuis la crise de 2008.
Dans le cadre de la révision à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne par l’Union européenne, la France et l’Allemagne, avec la Suède et l’Espagne, ont proposé un Pacte européen pour la jeunesse qui a été adopté par le Conseil européen des 22 et 23 mars 2005. Ce pacte prévoyait de placer les jeunes au cœur des politiques de l’Union européenne, en particulier dans les domaines suivants : emploi, intégration et promotion sociale ; éducation, formation et mobilité ; conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale.
En 2007, la Commission a élaboré un document de travail sur l’emploi des jeunes dans l’Union. C’est principalement dans le cadre de la stratégie Europe 2020 que les questions de l’encadrement et de la qualité des stages furent abordées. Dans la droite ligne de cette stratégie, la Commission a lancé en 2010 l’initiative « Jeunesse en mouvement », qui constitue un ensemble d’initiatives destinées aux jeunes de l’Union. Au même moment, le Parlement européen a adopté un Rapport d’initiative sur la promotion de l’accès des jeunes au marché du travail, le renforcement du statut des stagiaires, du stage et de l’apprenti en mars 2010.
Suite à ces deux actes, la Commission annonce qu’elle proposera un cadre de qualité pour les stages.
Dans sa résolution de mai 2011 relative au dialogue structuré sur l’emploi des jeunes, le Conseil a affirmé qu’il était « souhaitable d’établir un cadre de qualité pour les stages afin de garantir la valeur éducative de ce type d’expérience. » Les conclusions du Conseil de juin 2011, intitulées « Promouvoir l’emploi des jeunes pour atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020 » invitaient la Commission à proposer des orientations concernant les conditions de nature à garantie la qualité élevée des stages au moyen d’un cadre de qualité pour les stages.
En décembre 2011, la Commission a lancé « l’initiative sur les perspectives d’emploi des jeunes » dans laquelle elle recommandait aux États membres d’utiliser les moyens financiers mis à disposition afin d’accroitre l’offre de stage, et a réaffirmé sa volonté de présenter un cadre de qualité pour les stages d’ici 2012.
En juin 2012, dans sa résolution intitulée « Vers une reprise riche en emplois », le Parlement européen a invité la Commission à soumettre dans les plus brefs délais une « proposition de recommandation du Conseil sur un cadre de qualité pour les stages » et à « définir des règles minimales pour l’offre et l’accomplissement des stages de qualité ».
Des consultations publiques ont alors été réalisées entre avril et juillet 2012 avec les syndicats, les ONG, les mouvements de jeunesse, établissements d’enseignement et des particuliers. En octobre 2012 et février 2013, des consultations officielles ont été menées auprès des partenaires sociaux plus particulièrement, conformément aux articles 154 et 155 du TFUE. Ils ont alors réaffirmé le même point de vue que lors des consultations publiques : les syndicats ont plaidé pour une initiative plus ferme, tandis que les représentants des employeurs se sont dits préoccupés par le manque de souplesse et les contraintes imposées aux entreprises.
Le cadre de qualité pour les stages est alors devenu l’une des initiatives annoncées dans le cadre du « Paquet emploi jeunes » de décembre 2012, mais cette initiative est restée en deçà de ce que la Commission aurait souhaité.
Après que le Conseil européen ait annoncé dans ses conclusions de juin 2013 que le cadre de qualité pour les stages serait mis en place pour 2014, et en réaction au fort taux de chômage des jeunes dans plusieurs des États membres de l’Union, la Commission a proposé une proposition de recommandation du Conseil sur les stages avec pour objectif de garantir que les stages facilitent efficacement le passage du système éducatif au monde du travail et contribuent ainsi à une plus grande employabilité des jeunes. Cette proposition a tracé des lignes directrices susceptibles de garantir un contenu d’apprentissage de haute qualité et de conditions de travail correctes. Elle a également décrit de quelle manière la Commission soutiendra l’action des États membres, au moyen du cadre de financement de l’Union et par un échange de bonnes pratiques et des mesures de suivi.
La Commission a en outre invité les États membres à veiller à ce que les législations ou pratiques nationales respectent les principes énoncés dans les lignes directrices et, le cas échéant, à adapter leur législation. Ces dernières portent sur la conclusion d’une convention de stage, la reconnaissance du stage, des exigences de transparence et la participation des partenaires sociaux. Elles promeuvent également les stages transnationaux et l’utilisation des fonds structurels et d’investissement.
La Commission a de plus demandé aux États membres de veiller à ce que les principes énoncés dans les lignes directrices soient respectés dans le droit national et la pratique, et d’adapter leur législation si nécessaire. La Commission a aussi proposé que tous les stages d’apprentissage reposent dorénavant sur une convention écrite signée à l’avance par le stagiaire et le fournisseur de stage, ce document devant notamment préciser les droits et les obligations des parties, y compris les limites applicables en matière de temps de travail, la couverture sociale (accident, maladie, etc.)
La Commission a enfin estimé que le stage d’apprentissage ne devrait pas durer plus de 6 mois, à moins que des périodes plus longues soient justifiées (programme de formation en interne effectué dans un autre État membre dans des perspectives d’embauche ou d’apprentissage), et considéré que les deux parties devraient avoir la possibilité de mettre fin au stage moyennant une notification écrite effectuée deux semaines avant la fin.
Bien que représentant une avancée incontestable, cette proposition est cependant en-deçà des besoins réels et est en retrait par rapport aux propositions du Parlement européen qui, en 2010, avait adopté une résolution sur la promotion de l'accès des jeunes au marché du travail, le renforcement du statut des stagiaires, du stage et de l’apprenti. Ce rapport d’initiative demandait en effet à la Commission européenne, détentrice du monopole de l’initiative d'élaborer une charte européenne de qualité en matière de stages établissant au niveau européen de normes minimales : description de l'emploi ou des qualifications à acquérir, indication de la durée maximale des stages, indemnités minimum basées sur le coût de la vie du lieu où se déroule le stage conformément aux usages nationaux, assurance sur le lieu de travail, prestations de sécurité sociale selon les normes locales.
Ce recul par rapport à ce qui avait été envisagé, espéré même, s’explique par le blocage des partenaires sociaux représentants le patronat.
Le texte proposé par la Commission européenne apparaît donc problématique à plusieurs égards.
D’une part, il ne concerne pas les stages qui s’inscrivent dans une cursus universitaire ou une filière professionnelle, ni ceux qui relèvent de la formation professionnelle obligatoire, et ne s’applique qu’aux stages effectués dans ce que la Commission qualifie de « marché libre », c'est-à-dire sans intervention d’une tierce partie, le plus souvent au sortir des études et dans le contexte d’une recherche d’emploi. Or, ces stages hors du cursus d’études sont interdits en France par la loi ; on bute ainsi sur un problème de définition des stages, les stages ne recoupant pas la même réalité pour la Commission européenne et la législation française.
D’autre part, il ne comporte aucune mention concernant la rémunération des stages, cette question n’étant pas même abordée. Il s’agit pourtant là d’un point crucial.
Enfin, il n’est pas contraignant, la recommandation n’ayant qu’une portée indicative et aucune valeur juridique impérative.
3. ...mais qui est le signe de la volonté de doter l’Union d’une réglementation sur les stages qui favorise les conditions d’une saine mobilité des stagiaires
Bien que peu de chiffres consolidés soient disponibles, il apparaît évident que la mobilité des stagiaires se développe au niveau européen. Effectuer un stage dans un autre pays de l’Union est un atout pour les jeunes, et nous devons favoriser et encourager cette mobilité.
La recommandation de la Commission européenne, malgré les imperfections que nous avons évoquées, demeure un premier pas positif, et ce sur plusieurs points qui visent à offrir une plus grande transparence par rapport au contenu d’apprentissage et aux conditions de travail offertes aux stagiaires, afin que les stages facilitent efficacement le passage du système éducatif au monde du travail et contribuent ainsi à une plus grande employabilité des jeunes. La Commission recommande notamment aux États membres :
– la conclusion d’une convention de stage écrite qui définisse les obligations réciproques du stagiaire et du fournisseur de stage ;
– la définition des objectifs d’apprentissage et la désignation d’un tuteur pour le stagiaire ;
– le respect des droits des stagiaires, notamment en termes d’horaires de travail et de congés et d’assurance sociale ;
– de veiller à ce que les stages aient une durée raisonnable ne dépassant pas six mois (sauf cas justifiés) ;
– de préciser dans quelles circonstances et conditions un stage peut être renouvelé.
Sur tous ces points, la recommandation de la Commission est en accord avec les objectifs de la proposition de loi que nous étudions.
En outre, et c’est un point très important, la Commission invite les États membres à favoriser la mobilité transfrontalière des stagiaires, notamment dans l’Union, en clarifiant le cadre juridique national applicable aux stages sur le marché libre, en définissant des règles claires concernant l’accueil des stagiaires nationaux vers d’autres États membres et en allégeant les formalités administratives.
Elle souhaite aussi que soit encouragé le recours au réseau élargi EURES et l’échange d’informations sur les stages via ce portail, et que les services publics soient incités à l’utiliser.
Le Forum européen pour la Jeunesse5, regrettant que la Commission n’ait pas exposé une position plus ferme sur la question de la rémunération des stages, s’est toutefois réjoui que la proposition de la Commission comprenne de solides critères de qualité, qui correspondent leur « Charte européenne pour la Qualité des Stages et des Apprentissages. »
DEUXIÈME PARTIE : LA PROPOSITION DE LOI « SUR LES STAGES » : UNE AMÉLIORATION LEGISLATIVE IMPORTANTE À COMPLÉTER SUR LA QUESTION DE LA MOBILITÉ INTERNATIONALE DES STAGIAIRES
I. UNE PROPOSITION DE LOI QUI COMPORTE DES AVANCEES IMPORTANTES ET EN COHÉRENCE AVEC LES OBJECTIFS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE
Constatant le développement récent des stages et l’opportunité que ceux-ci représentent aussi pour les entreprises, en constituant un vivier de recrutements potentiels et en leur permettant de bénéficier de compétences éventuelles, les auteurs de la proposition de loi rappellent que la « situation actuelle du marché du travail conduit certains jeunes ayant terminé leur formation à accepter des stages, faute de trouver un premier emploi. Force est de constater, qu’aujourd’hui, une grande partie des diplômés doit enchainer, pendant des années, des périodes de stages avant de décrocher un emploi en CDD et, enfin, un CDI. »
De plus, ils soulignent que « dans certains cas, le stage peut être détourné de sa vocation première, qui est d’être un élément de la formation des étudiants, et se substituer à des emplois qui devraient être occupés par des jeunes diplômés. En effet, certaines entreprises ont parfois un recours abusif aux stages en utilisant des stagiaires en substitution à des salariés ou en leur imposant des conditions d’activité défavorables par rapport à celles exercées par les salariés, en termes de durée de présence notamment. »
Afin que le stage ne soit pas une fin en soi et demeure un outil au service du cursus de formation, la proposition de loi poursuit un triple objectif :
– favoriser le développement des stages de qualité ;
– éviter que les stages ne se substituent à des emplois ;
– et, enfin, protéger les droits et améliorer le statut des stagiaires.
Il convient de rappeler que ces trois objectifs sont en parfaite cohérence avec ceux présentés le 4 décembre dernier par la Commission européenne.
L’article 1er précise les missions de l’établissement d’enseignement ; celui-ci est chargé d’appuyer l’élève ou l’étudiant dans sa recherche de période de formation en milieu professionnel ou de stage, de définir, en lien avec l’organisme d’accueil et le stagiaire, les compétences à acquérir ou à développer durant le stage, et de désigner un enseignant référent pour assurer le suivi du stage.
Il est ainsi proposé d’ajouter un chapitre IV intitulé : « Chapitre IV : Stages et périodes de formation en milieu professionnel » au titre II du livre Ier de la première partie du code de l’Éducation ; cette recodification des dispositions applicables aux stages a pour objectif d’en améliorer la lisibilité et d’en clarifier le champ d’application.
Cet article formalise également le fait que l’organisme d’accueil doit désigner un tuteur pour le stagiaire, responsable de son suivi pédagogique. Le nombre maximum de stagiaires pouvant être encadrés par un même tuteur sera fixé par décret en Conseil d’État.
L’article 1er renforce également la limitation de la durée des stages, qui ne peuvent pas excéder 6 mois. Les formations comportant des stages plus longs ont en effet vocation à évoluer vers des formations en alternance. Un délai d’adaptation de deux ans est prévu afin de laisser aux établissements d’enseignement concernés le temps d’adapter les formations.
Ce même article 1er clarifie le fait qu’aucun stage ne peut se substituer à un emploi, qu’il s’agisse d’un emploi permanent ou d’un cas légal de recours à un emploi temporaire.
Afin d’empêcher les abus les plus manifestes, cet article pose le principe d’une limitation du nombre de stagiaires rapporté aux effectifs de l’entreprise. Une amende est prévue en cas d’infraction.
L’article 1er améliore les conditions d’accueil et les droits des stagiaires en leur appliquant les dispositions du code du travail relatives aux autorisations d’absence en cas de grossesse, de paternité ou d’adoption et les protections relatives aux durées maximales de présence et aux périodes de repos.
Enfin, cet article introduit une souplesse opérationnelle en prévoyant des cas d’interruption du stage dans lesquels l’établissement d’enseignement peut choisir de valider le stage ou la période de formation professionnelle, même s’il n’a pas atteint la durée prévue dans le cursus.
L’article 2 prévoit en outre l’inscription des stagiaires dans le registre unique du personnel – dans une partie spécifique, pour éviter toute confusion avec les salariés de l’entreprise– afin de mieux tracer leur présence.
L’article 4 complète les missions confiées à l’Inspection du travail afin qu’elle puisse contrôler expressément certaines dispositions prévues par le texte.
L’article 5 vise à favoriser l’effectivité des suites des contrôles de l’Inspection du travail. Il crée donc une procédure particulière par laquelle l’inspecteur du travail informe l’établissement d’enseignement et les institutions représentatives du personnel des infractions éventuellement constatées, afin de leur permettre d’agir pour y mettre un terme.
L’article 6 prévoit que les gratifications versées aux stagiaires sont exonérées d’impôt sur le revenu, comme c’est déjà le cas pour les salaires perçus par les apprentis.
II. DES COMPLEMENTS DEMEURENT POSSIBLES AFIN DE FAVORISER LA MOBILITÉ DES JEUNES STAGIAIRES FRANÇAIS AU SEIN DE L’UNION EUROPÉENNE
Effectuer un stage à l’étranger représente une opportunité pour les étudiants. Ils peuvent ainsi acquérir une expérience internationale, favoriser leur adaptabilité – qualité essentielle s’il en est dans le monde actuel – apprendre de nouvelles méthodes de travail, développer des qualités interculturelles et améliorer leurs connaissances linguistiques. Une telle ouverture au monde représente un atout auprès des employeurs.
Pour la France, ces étudiants sont aussi des vecteurs de l’influence française, à l’heure où le ministère des Affaires étrangères a fait de la diplomatie économique et culturelle une priorité.
Enfin, ces étudiants sont aussi des vecteurs de diffusion de la citoyenneté européenne, qui se construit avant tout par la mobilité de la jeunesse.
Cependant, cette opportunité, du fait de la barrière économique qui peut se dresser pour bon nombre d’étudiants, n’est pas offerte de la même manière à tous les étudiants, y compris à talents égal.
Par nature, le stage à l’étranger est plus coûteux que le stage effectué dans la ville où l’étudiant effectue son cursus, puisqu’il implique des coûts de transport et de logement supplémentaire.
En outre, les stages à l’étranger, s’ils ne sont pas réalisés avec des entreprises, associations ou administrations régies par le droit du travail français, ne tombent pas sous le coup de la loi qui impose aux employeurs de stagiaires un certain nombre d’obligations6, dont celle de gratifier les stagiaires, telle que régie par l’article L. 612-11 du code de l’éducation.
En outre, les étudiants lorsqu’ils partent effectuer un stage à l’étranger doivent renoncer à un certain nombre d’aides sociales auquel ils pourraient prétendre en France (APL, bourses…).
Au total, le stage effectué à l’étranger est infiniment plus coûteux que le stage effectué sur place. Ainsi, il n’est pas douteux que seuls les étudiants les plus favorisés socialement y aient réellement accès, ce qui n’est pas conforme à l’objectif d’équité entre les jeunes qui doit être le nôtre.
B. COMPLETER LE TEXTE ACTUEL DE LA PROPOSITION DE LOI POUR PERMETTRE LA DEMOCRATISATION DE L’ACCÈS AUX STAGES À L’ETRANGER
La proposition de loi relative aux stages devrait proposer un encadrement des stages effectués l’étranger. Le but est d’encourager les stages à l’étranger en démocratisant leur accès, en mettant un terme aux barrières économiques qui empêchent les étudiants de partir faute de moyens. À l’absence de gratification se cumulent aussi la perte d’aides dont ils peuvent bénéficier en France, comme par exemple l’aide au logement.
La proposition de loi, on l’a vu, vise à mettre en place un certain nombre d’obligations entre établissements scolaires et universités, d’une part, et organismes d’accueil, d’autre part. Ces dispositions pourraient être utilement étendues aux stages effectués à l’étranger.
En attendant un cadre européen permettant d'encadrer efficacement les stages effectués au sein de l'Union européenne, il conviendra d’encadrer de la manière la plus efficace possible les stages effectués dans un pays tiers.
Une convention de stage, un accord entre l’établissement d’enseignement et l’organisme d’accueil, voire un accord entre États, a vocation à aménager les modalités du stage. Il existe, en France un modèle national de convention de stage, disponible en plusieurs langues, qui prévoit l’application du droit français conventionnellement. L’application du droit français permet de couvrir tous les étudiants pour le régime accident du travail notamment, avec un régime de protection favorable. Elle peut constituer une base de référence proposée aux organismes d’accueil situés à l’étranger, sans pouvoir être imposée de fait.
Tout doit reposer sur les échanges entre organisme d’accueil, étudiant et établissement pour élaborer la convention de stage. Il est important de généraliser les échanges préalables entre l’établissement d’enseignement français et l’organisme d’accueil à l’étranger, afin de promouvoir l’encadrement des stages en proposant notamment une convention-type basée sur les dispositions françaises.
Comme l’a indiqué dans sa communication la Commission européenne, le manque d’information est le premier frein à la mobilité des jeunes.
Les élèves ou les étudiants qui partent effectuer un stage à l’étranger renoncent à certains de leurs droits (tels que l’aide au logement personnalisé par exemple), et ignorent les droits auxquels ils pourraient prétendre à l’étranger. Par ailleurs, ils méconnaissent parfois leurs obligations à l’étranger vis-à-vis des autorités consulaires françaises mais aussi de l’administration du pays d’accueil.
Une bonne information des stagiaires, avant leur départ, de leurs droits et devoirs dans le pays d’accueil est importante. Une fiche d’information pourrait ainsi être utilement annexée à leur convention de stage.
Le coût d’un stage à l’étranger peut représenter un obstacle car les stagiaires perdent un certain nombre d’avantages dont ils pouvaient bénéficier en France, tel que le bénéfice de l’aide pour le logement. Un certain nombre de mesures pourraient permettre aux étudiants les moins fortunés de financer leurs stages à l’étranger :
– la création, au sein des universités françaises, d’un fonds de solidarité qui permettrait d’accompagner la mobilité en offrant une bourse sur critères sociaux aux stagiaires à l’étranger ;
– l’utilisation des fonds du programme européen « Erasmus pour tous » pour offrir une bourse sur critères sociaux aux stagiaires à l’étranger ;
– le développement des aides offertes par les régions pourrait être encouragé.
L’apport d’Erasmus + concernant les stages
Des ressources augmentées
Le nouveau programme de l’Union Européenne « Erasmus + » est doté d’un budget de 14,7 milliards d’euros pour la période 2014-2020, soit 40 % d’augmentation par rapport aux programmes précédents. Il bénéficie à plus de 4 millions de personnes, dont 450 000 stagiaires (ils étaient environ 330 000 en 2009).
Les aides individuelles ont été adaptées en fonction des écarts de niveau de vie entre les différents pays. En effet, elles sont calculées en fonction du pays d’origine de l’étudiant- stagiaire et du pays de destination. Les étudiants-stagiaires issus de régions ultrapériphériques ou éloignées et de certains pays tels que Malte bénéficient d’une aide plus importante – d’un minimum de 650 euros – en plus d’une aide couvrant leurs frais de transport – qui s’élève par exemple à 180 euros si l’étudiant parcourt un distance de 100 à 499 kilomètres). Enfin, les étudiants participant au programme dans le cadre d’une mobilité de stage obtiendront une aide supplémentaire allant de 100 à 200 euros.
L’élargissement des publics bénéficiaires
Dorénavant, les jeunes diplômés peuvent bénéficier du programme de mobilité afin d’effectuer un stage à l’étranger. Les jeunes diplômés de l’enseignement supérieur peuvent effectuer une mobilité de stage jusqu’à un an après l’obtention du diplôme. Afin de faciliter l’organisation de la mobilité, une structure tierce à l’établissement d’enseignement supérieur peut prendre en charge les démarches. Pour ce qui est des jeunes diplômés de la formation professionnelle, les améliorations sont similaires, et une structure autre que l’établissement scolaire peut également organiser la mobilité (comme par exemple, le Pôle emploi ou la Mission locale).
Plus de destinations
Avec Erasmus +, les destinations qui s’offrent aux étudiants stagiaires ont été élargies. En plus des 28 États membres de l’Union européenne, les stagiaires peuvent se rendre dorénavant en Islande, au Liechtenstein, en Norvège, en Suisse, en Turquie et enfin en Macédoine.
Le renforcement du soutien pédagogique
Grâce au programme, les étudiants bénéficieront d’un soutien renforcé en termes de contenu. En effet, des mesures seront progressivement mises en place afin de les aider à renforcer et à améliorer leurs compétences linguistiques avant et pendant leur séjour à l’étranger. Un portail européen en ligne sera mis progressivement en place, et ce, dès 2014. Avec ce dispositif, l’étudiant pourra renforcer les connaissances linguistiques nécessaires pour travailler dans le pays, et suivre des cours de langue en ligne.
Des expériences professionnelles diversifiées
Enfin, l’étudiant-stagiaire pourra être accueilli par davantage de structures telles que les ONG ou les administrations publiques.
Au-delà des différences de définition sur la nature des stages, la présente proposition de loi s’inscrit pleinement dans les objectifs de la Commission européenne, à savoir un meilleur encadrement des stages pour qu’ils soient utiles, efficaces, et non dévoyés de leur fonction première.
Notre commission ne peut que soutenir un texte qui va en ce sens.
Il conviendra cependant de veiller à ce que la dimension internationale des stages, pour l’instant absente de la proposition, soit bien prise en compte lors de la discussion sur ce texte.
La Commission s’est réunie le 11 février 2014, sous la présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente, pour examiner le présent rapport d’information.
M. Philip Cordery, rapporteur. Madame la Présidente, mes chers collègues, notre Commission m’a chargé d’un rapport sur l’emploi des jeunes en Europe. La situation de l’emploi des jeunes est inquiétante dans l’ensemble de l’Europe, y compris dans les pays que l’on peut qualifier de « meilleurs élèves », puisque partout les jeunes ont des taux de chômage deux fois supérieurs aux taux de chômage moyens. Cette situation s’explique en grande partie par une inadéquation des formations aux besoins du marché de l’emploi, et donc par la difficulté d’insertion des jeunes dans le marché du travail. Cela est d’autant plus paradoxal que plusieurs secteurs connaissent des pénuries de main-d’œuvre, comme par exemple l’hôtellerie et la restauration, qui embauchent de nombreux jeunes étrangers par manque de main-d’œuvre qualifiée en langues étrangères.
Le stage fait partie, avec la formation en alternance, des outils qui permettent d’affiner la formation des élèves et des étudiants et de leur permettre de mieux « coller » aux besoins des employeurs. À cet égard, le stage est un élément décisif de formation.
Malheureusement, la crise est telle que les employeurs sont extrêmement réticents à embaucher, de manière générale, et des jeunes en particulier, et que l’on voit se développer tant les différentes formes d’emploi précaires que la diffusion de stages abusifs, dont l’objet n’est pas de parfaire la formation de l’étudiant mais de pourvoir à très faible coût des emplois permanents.
Ce constat est partagé tant par la Commission européenne, qui a publié le 4 décembre dernier une proposition pour un « Cadre de qualité des stages », que par la proposition de loi déposée par notre collègue Mme Chaynesse Khirouni, et les membres du groupe SRC, tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires, dont nous sommes saisis aujourd’hui pour observations, conformément à l’article 151-1-1 du règlement de l’Assemblée nationale.
Je me réjouis à cet égard de cette procédure. Je pense qu’il serait utile tant pour notre commission que pour les commissions permanentes saisies au fond que nous puissions, autant que faire se peut, nous saisir pour observations des textes qui ont une dimension européenne, et apporter ainsi notre éclairage à des problèmes qui sont parfois traités de manière trop « franco-française ».
Le vocable « stage » est employé pour désigner des réalités très diverses, allant des stages d’observation en entreprise d’une semaine des élèves de troisième aux stages pendant la période de formation.
Au niveau européen, la notion de stage n’a pas forcément la même signification qu’en France et la notion de stage diffère en effet d’un pays à l’autre, tout comme l’encadrement légal.
En droit français, aux termes de l’article L. 612-8 du code de l’éducation, le stage correspond à une période temporaire de mise en situation en milieu professionnel au cours de laquelle l'étudiant acquiert des compétences professionnelles qui mettent en œuvre les acquis de sa formation en vue de l'obtention d'un diplôme ou d'une certification. Le stage est donc en droit français conçu comme faisant partie d’un cursus d’étude. Il ne saurait être postérieur à la formation. Il fait nécessairement l’objet d’une convention de stage entre l’organisme de formation et l’organisme d’accueil.
La définition retenue par la Commission européenne est beaucoup plus large ; celle-ci entend également en effet par « stage » une période de travail d’une durée limitée que des jeunes venant de terminer leurs études passent dans une entreprise, un organisme public ou une organisation sans but lucratif en vue d’acquérir une expérience professionnelle sur le terrain avant d’occuper un emploi régulier. Ce ne sont en effet que ces stages « en marché libre » que la proposition de la Commission propose d’encadrer.
Partout en Europe, la pratique des stages est fortement développée mais difficile à quantifier.
Au niveau européen, la pratique des stages est aussi fortement développée. Selon l’enquête Eurobaromètre, menée en mai 2013 près d’un jeune Européen sur deux (46 %) a déjà effectué un ou plusieurs stages. La Commission européenne a par contre relevé la faiblesse des stages transnationaux (9 % de l’ensemble des stages), qui s’explique notamment par le manque d’information : 38 % des personnes qui auraient été intéressées par ce type d’expérience ont déclaré avoir disposé de trop peu d’informations sur la réglementation en matière de stages dans les autres États membres.
Le dispositif actuel d’encadrement français des stages développé fait déjà figure d’avant-garde au sein de l’Union européenne. Comme nous l’avons vu, tout stage doit être obligatoirement intégré à un cursus pédagogique et faire l'objet d'une convention de stage et le stage ne peut avoir pour objet l'exécution d'une tâche régulière correspondant à un poste permanent dans l'entreprise.
Des dispositifs existent également concernant la durée des stages et la gratification minimale – 436 euros par mois après deux mois consécutifs.
Néanmoins, que ce soit au niveau national ou à l’échelle de l’Union, le stage est partout un outil malheureusement trop souvent dévoyé.
Les abus consistent en effet le plus souvent à affecter des stagiaires, moins couteux que des salariés à de véritables postes de travail. Le stage est alors détourné de sa vocation, qui est d'être un élément de la formation des étudiants, et se substitue à des emplois qui devraient être occupés par de jeunes diplômés. La pratique des « fausses » inscriptions à l’université est de plus en plus répandue et demeure souvent la seule possibilité pour les jeunes de toucher une rémunération. Les témoignages livrés par Génération Précaire sont à cet égard particulièrement effrayants.
Mais les abus concernent aussi les conditions d’emploi du stagiaire, ceux-ci ne bénéficiant pas, contrairement aux salariés, des dispositions légales relatives à la durée du travail, aux autorisations d’absence ou aux congés légaux.
Au niveau européen, le constat est identique. Selon l’enquête Eurobaromètre précitée, près de 25 % des stagiaires sondés ont déclaré que leurs conditions de travail étaient différentes de celles des salariés de plein droit, tandis que 20 % estiment ne rien avoir appris d'utile sur le plan professionnel.
Par ailleurs, près de six stagiaires sur dix – 59 % – n'ont eu droit à aucune indemnité lors de leur dernier stage. Et parmi ceux qui étaient rémunérés, moins de la moitié considèrent que les sommes versées suffisaient à couvrir leurs frais de subsistance. Enfin, quatre stagiaires sur dix n'avaient pas passé de convention ou de contrat de stage sous forme écrite avec l'organisation ou l'entreprise d'accueil.
Ces abus sont rendus possibles par le caractère encore lacunaire de la réglementation des stages en entreprise au niveau de l’Union.
L’Union européenne ne dispose pas pour l’instant de réglementation sur les stages. Les négociations sur ce sujet ont eu du mal à aboutir, notamment du fait du refus des représentants des entreprises au niveau européen. De ce fait, bien que représentant une avancée incontestable à plusieurs égards, la proposition de la Commission européenne est en-deçà des besoins réels et est en retrait par rapport aux propositions du Parlement européen qui, en 2010, avait adopté une résolution sur la promotion de l'accès des jeunes au marché du travail, le renforcement du statut des stagiaires, du stage et de l’apprenti.
Le texte proposé par la Commission européenne apparaît donc problématique à plusieurs égards.
D’une part, il ne concerne pas les stages qui s’inscrivent dans un cursus universitaire ou une filière professionnelle, ni ceux qui relèvent de la formation professionnelle obligatoire, et ne s’applique qu’aux stages effectués dans ce que la Commission qualifie de « marché libre ».
D’autre part, il ne comporte aucune mention concernant la rémunération des stages, cette question n’étant pas même abordée. Il s’agit pourtant là d’un point crucial.
Enfin, il n’est pas contraignant, la recommandation n’ayant qu’une portée indicative et aucune valeur juridique impérative.
La recommandation de la Commission européenne, malgré ces imperfections, demeure toutefois un premier pas positif, et ce sur plusieurs points qui visent à offrir une plus grande transparence par rapport au contenu d’apprentissage et aux conditions de travail offertes aux stagiaires : la conclusion d’une convention de stage écrite qui définisse les obligations réciproques du stagiaire et du fournisseur de stage ; la définition des objectifs d’apprentissage et la désignation d’un tuteur pour le stagiaire ; le respect des droits des stagiaires ; enfin, les précisions sur les circonstances et conditions dans lesquelles un stage peut être renouvelé.
Nous y reviendrons en détail quand nous examinerons le rapport sur l’emploi des jeunes que je vous présenterai prochainement.
La proposition de loi que nous examinons comporte des avancées importantes et en cohérence avec les objectifs de la Commission européenne. Elle met ainsi en place un dispositif important d’encadrement de la pratique des stages et de protection des stagiaires.
D’une part, les missions de l’établissement d’enseignement sont clarifiées ; celui-ci est notamment chargé de définir, en lien avec l’organisme d’accueil et le stagiaire, les compétences à acquérir ou à développer durant le stage, et de désigner un enseignant référent pour assurer le suivi du stage.
La proposition renforce également la limitation de la durée des stages, qui ne peuvent pas excéder 6 mois, et clarifie le fait qu’aucun stage ne peut se substituer à un emploi. Afin d’empêcher les abus les plus manifestes, elle pose en outre le principe d’une limitation du nombre de stagiaires rapporté aux effectifs de l’entreprise. Une amende est prévue en cas d’infraction.
Elle améliore en outre les dispositions relatives aux droits des stagiaires.
Des compléments au texte demeurent possibles afin de favoriser la mobilité des jeunes stagiaires français au sein de l’Union européenne.
Effectuer un stage à l’étranger représente une opportunité pour les étudiants mais aussi pour notre pays, puisque ces étudiants sont aussi des vecteurs de l’influence française et de diffusion de la citoyenneté européenne.
Cependant, cette opportunité, du fait de la barrière économique qui peut se dresser pour bon nombre d’étudiants, n’est pas offerte de la même manière à tous les étudiants, y compris à talent égal, et ce d’autant plus que les étudiants lorsqu’ils partent effectuer un stage à l’étranger doivent renoncer à un certain nombre d’aides sociales auquel ils pourraient prétendre en France – aides pour le logement, bourses… Il convient donc d’améliorer le cadre légal des stages effectués à l’étranger.
Pour cela il convient d’encadrer les stages effectués à l’étranger. La proposition de loi, on l’a vu, vise à mettre en place un certain nombre d’obligations entre établissements scolaires et universités d’une part et organismes d’accueil d’autre part, qui pourraient être utilement étendues aux stages effectués à l’étranger.
Les obligations pour les établissements scolaires et universitaires qui sont des entités de droits français peuvent facilement être mises en œuvre. Elles concernent notamment la signature d’une convention de stage, la définition des compétences à acquérir ou la désignation d’un enseignant référent parmi les équipes pédagogiques.
Pour ce qui concerne les obligations pour les organismes d’accueil, qui sont des entités juridiques étrangères, la loi française ne peut rien réglementer. Les conventions peuvent par contre inciter au respect d’un certain nombre de règles concernant les conditions de travail ou la gratification.
Il convient en outre d’améliorer l’information des stagiaires. Comme l’a indiqué dans sa communication la Commission européenne, le manque d’information est le premier frein à la mobilité des jeunes. Les stagiaires devraient ainsi être, avant leur départ, informés de leurs droits de la réglementation relative aux stages en vigueur dans le pays où ils partent effectuer leur stage. Une fiche d’information pourrait par exemple être annexée à la convention de stage.
Il convient enfin d’accompagner la mobilité. Le coût d’un stage à l’étranger peut représenter un obstacle car les stagiaires perdent un certain nombre d’avantages dont ils pouvaient bénéficier en France, tel que le bénéfice de l’aide pour le logement. Un certain nombre de mesures pourraient permettre aux étudiants les moins fortunés de financer leurs stages à l’étranger : la création, au sein des universités françaises, d’un fonds de solidarité qui permettrait d’accompagner la mobilité en offrant une bourse sur critères sociaux aux stagiaires à l’étranger ; l’utilisation des fonds du programme européen « Erasmus pour tous » pour offrir une bourse sur critères sociaux aux stagiaires à l’étranger ; le développement des aides offertes par les régions pourrait être encouragé.
Je vous propose ainsi d’adopter les conclusions ci-après.
M. Jerôme Lambert, président. Merci beaucoup pour ce travail de qualité effectué sur un sujet d’importance, tant il est vrai que la mobilité concerne à présent de plus en plus de jeunes Français et de jeunes Européens, et notamment par le biais de stages. Je propose que nous adoptions ces conclusions.
La Commission des affaires européennes,
Vu l’article 151-1-1 du règlement de l’Assemblée nationale ;
Vu la proposition de loi tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires ;
Vu la communication de la Commission européenne « Vers un cadre de qualité pour les stages » COM(2012) 728 final ;
Considérant que les stages sont une pratique de plus en plus développée mais qui n’est pas toujours conforme aux objectifs d’un stage, à savoir l’amélioration des compétences du stagiaire dans le cadre de sa formation ;
Considérant qu’il est ainsi nécessaire de développer des stages de qualité ;
Considérant que l’on assiste au développement d’abus de stages, qui visent à remplacer des emplois pérennes par des stages, infiniment moins coûteux ;
Considérant qu’il est ainsi nécessaire de lutter contre ces « faux stages » ;
Considérant qu’il est nécessaire de protéger les droits des stagiaires et d’améliorer leur statut ;
Considérant que la France possède au sein de l’Union européenne la législation la plus avancée en matière de stage mais que celle-ci peut encore être améliorée ;
Considérant que la mobilité des stagiaires au sein de l’Union européenne doit être favorisée, eu égard à l’atout qu’elle représente tant pour les stagiaires que pour les États et l’Union, dans la construction d’une citoyenneté européenne ;
Se félicite que la présente proposition de loi améliore encore l’encadrement législatif des stages ;
Approuve les dispositions visant à clarifier les missions de l’établissement d’enseignement ;
Approuve le renforcement de la limitation de la durée des stages, du nombre des stagiaires, et l’interdiction de la substitution d’un stage à un emploi ;
Approuve les dispositions relatives à l’amélioration des droits des stagiaires ;
Estime nécessaire de compléter le texte pour favoriser la mobilité des jeunes stagiaires français au sein de l’Union européenne ;
Estime ainsi nécessaire de mieux encadrer les stages effectués à l’étranger ;
Estime indispensable de mieux informer les stagiaires sur la réglementation en vigueur dans les pays d’accueil ;
Estime enfin nécessaire de développer des programmes d’accompagnement de la mobilité, financés par un fonds de solidarité ad hoc, des aides régionales, et les fonds d’Erasmus + .
1 () Com(2013) 857 final.
2 Communication de la Commission européenne « Vers un cadre de qualité pour les stages » COM (2012) 728 final.
3 () Source : Commission européenne, Proposition de recommandation du Conseil relative à un cadre de qualité pour les stages, COM(2013) 857 final.
4 () Source : ministère du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle et du dialogue social
5 Youth European Forum.
6 Articles L. 612-8 à 612-14 du code de l’éducation.