N° 1889 - Rapport d'information de Mme Marietta Karamanli déposé par la commission des affaires européennes sur la proposition de règlement relatif à l'Agence de l'Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust)




N° 1889

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 avril 2014

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

sur la proposition de règlement relatif à l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust)

ET PRÉSENTÉ

PAR MM. Marietta KARAMANLI

Députée

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La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Danielle AUROI, présidente ; Mmes Annick GIRARDIN, Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Pierre LEQUILLER, vice-présidents ; MM. Christophe CARESCHE, Philip CORDERY, Mme Estelle GRELIER, M. André SCHNEIDER, secrétaires ; MM. Ibrahim ABOUBACAR, Jean-Luc BLEUNVEN, Alain BOCQUET, Jean-Jacques BRIDEY, Mmes Isabelle BRUNEAU, Nathalie CHABANNE, M. Jacques CRESTA, Mme Seybah DAGOMA, MM. Yves DANIEL, Bernard DEFLESSELLES, Mme Sandrine DOUCET, M. William DUMAS, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FROMION, Hervé GAYMARD, Jean-Patrick GILLE, M. Joël GIRAUD, Mme Chantal GUITTET, MM. Razzy HAMMADI, Michel HERBILLON, Laurent KALINOWSKI, Marc LAFFINEUR, Charles de LA VERPILLIÈRE, Mme Axelle LEMAIRE, MM. Christophe LÉONARD, Jean LEONETTI, Arnaud LEROY, Mme Audrey LINKENHELD, MM. Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Jean-Claude MIGNON, Jacques MYARD, Michel PIRON, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Arnaud RICHARD, Mme Sophie ROHFRITSCH, MM. Jean-Louis ROUMEGAS, Rudy SALLES, Gilles SAVARY.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

PREMIÈRE PARTIE 7

I. LES MODIFICATIONS APPORTÉES À LA DÉCISION EUROJUST 7

A. UNE GOUVERNANCE RÉNOVÉE 7

B. LES POUVOIRS D’EUROJUST 9

C. L’ARTICULATION AVEC LE PARQUET EUROPÉEN 12

D. LA PROTECTION DES DONNÉES PERSONNELLES 13

II. L’ÉVALUATION PARLEMENTAIRE D’EUROJUST 17

A. LA PROPOSITION DE RÈGLEMENT EST INSUFFISANTE 17

B. LA CRÉATION D’UNE CELLULE PARLEMENTAIRE D’ÉVALUATION 18

CONCLUSION 21

TRAVAUX DE LA COMMISSION 23

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE 25

ANNEXE  : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS 27

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La Commission européenne a déposé le 17 juillet 2013, en même temps que la proposition de règlement créant le parquet européen, une proposition de règlement relative à l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust).

L’unité de coopération judiciaire de l’Union européenne Eurojust a pour mission de promouvoir et de renforcer la coordination et la coopération entre les autorités nationales dans la lutte contre la criminalité transfrontalière grave. Les représentants des États membres à Eurojust coordonnent les autorités nationales à chacune des étapes d’une enquête criminelle ou de poursuites judiciaires, et résolvent les difficultés et problèmes pratiques générés par les divergences entre les systèmes juridiques nationaux. Son activité n’a cessé de croître depuis sa création : alors qu’en 2002, Eurojust avait traité 202 affaires, elle a traité 1 576 affaires en 2013, soit une multiplication par plus de sept des dossiers traités.

Elle a été instituée par la décision du Conseil 2002/187/JAI du 28 février 2002 (1), puis renforcée par la décision du Conseil 2009/426/JAI du 16 décembre 2008 (2). Or, l’article 85 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) dispose qu’Eurojust doit être régie par des règlements adoptés conformément à la procédure législative ordinaire. Ces règlements doivent notamment fixer les modalités de l’association du Parlement européen et des parlements nationaux à l’évaluation des activités d’Eurojust.

C’est dans ce cadre que s’inscrit la proposition de règlement examinée dans ce rapport, qui transforme Eurojust en une agence de l’Union européenne. Elle dote Eurojust d’une nouvelle structure de gouvernance, créant un conseil exécutif et une formation du collège dédiée aux questions de gestion. Elle apporte également des modifications importantes aux prérogatives des membres nationaux d’Eurojust.

Toutefois, comme l’a déjà souligné votre rapporteure dans son rapport relatif à la proposition de règlement du Conseil portant création du parquet européen, cette proposition est peu ambitieuse. En effet, toutes les possibilités juridiques offertes par l’article 85 du TFUE n’ont pas été exploitées, notamment la faculté de déclencher des enquêtes pénales et de trancher les conflits de compétence.

La proposition de règlement définit également les modalités de l’évaluation parlementaire d’Eurojust prévue par le traité de Lisbonne. Les parlements nationaux doivent se saisir de ce pouvoir d’évaluation et s’assurer que les moyens nécessaires à l’exercice de ce pouvoir soient garantis. Il convient donc de prendre position sur cet aspect de la proposition, tout comme sur les principales modifications apportées au fonctionnement d’Eurojust.

PREMIÈRE PARTIE

Actuellement, Eurojust est organisée autour d’un collège réunissant tous ses membres nationaux, responsable de l’organisation et du fonctionnement d’Eurojust. Parallèlement, un directeur administratif est nommé à l’unanimité par ce collège.

Le deuxième chapitre de la proposition de règlement prévoit la création de deux nouvelles instances : une formation du collège dédiée aux fonctions de gestion et un conseil exécutif.

Cette proposition s’appuie sur la déclaration commune du Parlement européen, du Conseil de l’Union européenne et de la Commission européenne du 12 juin 2012 sur les agences décentralisées. Cette déclaration commune prévoit notamment la mise en place d’une structure de gouvernance à deux niveaux pour les agences de l’Union européenne, faisant coexister un conseil d’administration, chargé des orientations générales des activités de l’agence, et un conseil exécutif de taille réduite, chargé de la gestion administrative et budgétaire.

Dans cette perspective, l’ article 16 de la proposition de règlement créé un conseil exécutif assistant le collège d’Eurojust. Ce conseil exécutif sera chargé :

– « de préparer les décisions que le collège doit prendre dans sa formation de gestion ;

– d’adopter une stratégie antifraude proportionnée aux risques de fraude, compte tenu du rapport coûts-avantages des mesures à mettre en œuvre ;

– de l’application du statut des fonctionnaires et du régime applicable aux autres agents ;

– d’assurer le suivi des recommandations découlant des différents rapports d’audit et évaluations internes et externes ;

– de prendre toutes les décisions relatives à la création de structures administratives internes. »

La proposition de règlement prévoit également qu’il « prend toute autre décision qui n’est pas expressément attribuée au collège ou de la responsabilité du directeur administratif ». Les attributions de ce conseil exécutif sont donc relativement étendues mais définies de manière peu précise.

Ce conseil exécutif serait composé du président et des vice-présidents du collège, d’un représentant de la Commission européenne et d’un autre membre du collège.

La proposition de règlement distingue également deux compositions du collège, selon que celui-ci exerce des fonctions opérationnelles ou de gestion.

Si les fonctions opérationnelles du collège correspondent aux missions premières d’Eurojust, les fonctions de gestion recouvrent notamment l’adoption des documents de programmation et du rapport d’activité annuel, l’adoption du budget annuel, la programmation des ressources humaines, la définition de règles de prévention et de gestion des conflits d’intérêts, la nomination du directeur administratif, du comptable et du délégué à la protection des données (article 14).

Alors que le collège est uniquement composé des membres nationaux lorsqu’il exerce ses fonctions opérationnelles, il serait composé des membres nationaux et de deux représentants de la Commission européenne dans le cadre de ses fonctions de gestion (article 10), comme prévu par la déclaration commune sur les agences.

La création de ces deux nouvelles structures d’Eurojust vise à alléger les tâches administratives du collège. Toutefois, il est nécessaire de s’assurer que la création d’une nouvelle structure n’entraîne pas un alourdissement du processus de décision, en clarifiant notamment la répartition des compétences entre chaque organe. Par ailleurs, le rôle du collège dans la définition des orientations stratégiques d’Eurojust doit impérativement être préservé. Or, les questions de gestion peuvent avoir un impact majeur sur les fonctions opérationnelles d’Eurojust.

Cette nouvelle gouvernance renforce sensiblement les pouvoirs de la Commission européenne. La création d’un conseil exécutif et d’une formation du collège spécifique à la gestion permettrait en effet à la Commission européenne d’être représentée au sein des instances décisionnelles d’Eurojust. Celle-ci aurait également un pouvoir de convocation du collège supérieur à celui des membres nationaux d’Eurojust puisque l’ article 12 de la proposition prévoit que le collège se réunisse à l’initiative de son président, à la demande de la Commission européenne ou à la demande d’au moins un tiers de ses membres. Par ailleurs, si le directeur administratif reste nommé in fine par le collège, ce serait désormais la Commission européenne qui proposerait une liste de candidats à ce poste. Enfin, comme prévu par la déclaration commune de juin 2012 sur les agences, l’ article 15 de la proposition dispose que la programmation annuelle et pluriannuelle doit tenir compte de l’avis de la Commission européenne.

Il est nécessaire de rappeler qu’Eurojust n’est pas une agence de l’Union européenne comme une autre et que les spécificités de la coopération en matière pénale doivent impérativement être respectées. Pour votre rapporteure, « l’agenciarisation » ne doit pas constituer un objectif en soi ; or, dans la proposition de la Commission européenne, la transformation institutionnelle semble primer sur la plus-value matérielle apportée à Eurojust en termes de compétences et d’activités.

L’augmentation des pouvoirs de la Commission européenne semble excessive au vu de la faible évolution des attributions d’Eurojust. Elle ne doit en aucun cas remettre en cause l’indépendance d’Eurojust à l’égard des institutions européennes, en particulier dans la détermination de ses objectifs stratégiques.

L’ article 85 du TFUE stipule que » la mission d’Eurojust est d’appuyer et de renforcer la coordination et la coopération entre les autorités nationales chargées des enquêtes et des poursuites relatives à la criminalité grave affectant deux ou plusieurs États membres ou exigeant une poursuite sur des bases communes, sur la base des opérations effectuées et des informations fournies par les autorités des États membres et par Europol. ». Ses tâches peuvent notamment comprendre

a) « le déclenchement d’enquêtes pénales ainsi que la proposition de déclenchement de poursuites conduites par les autorités nationales compétentes, en particulier celles relatives à des infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union ;

b) la coordination des enquêtes et poursuites visées au point a) ;

c) le renforcement de la coopération judiciaire, y compris par la résolution de conflits de compétences et par une coopération étroite avec le Réseau judiciaire européen. »

La présente proposition de règlement ne reprend pas ces dernières possibilités offertes par le traité.

En revanche, l’ article 2 de la proposition de règlement consacre le fait qu’Eurojust exerce ses missions à la demande des autorités compétentes des États membres mais également « de sa propre initiative ».

Surtout, la principale innovation de cette proposition de règlement réside dans le renforcement des compétences des membres nationaux.

Ce renforcement avait déjà été amorcé par la décision de 2009, qui avait renforcé le droit d’accès du membre national aux informations nécessaires à l’accomplissement de sa mission et figurant dans les fichiers nationaux mis en œuvre dans son État membre et prévu que celui-ci puisse » à la demande ou avec l’accord des autorités judiciaires compétentes » :

– « exécuter dans son État membre des demandes de coopération judiciaire et des décisions dans ce domaine, relatives notamment à des instruments donnant effet au principe de reconnaissance mutuelle » ;

– « ordonner dans son État membre des mesures d’enquête jugées nécessaires lors d’une réunion de coordination organisée par Eurojust pour fournir une aide aux autorités nationales compétentes concernées par une enquête, à laquelle les autorités nationales compétentes sont invitées à participer » ;

– « autoriser et coordonner des livraisons contrôlées dans son État membre ».

L’ article 9 sexies de la décision de 2009 prévoit une dérogation permettant de n’attribuer au membre national qu’un pouvoir de proposition de ces mesures à l’autorité compétente, et non pas un pouvoir décisionnel, lorsque l’attribution de ces pouvoirs à un membre national apparaît contraire aux règles constitutionnelles ou à des aspects fondamentaux du système de justice pénale de l’État membre concerné.

Le premier paragraphe de l’article 8 de la présente proposition de règlement prévoit que les membres nationaux puissent directement exécuter des demandes d’entraide judiciaire ou de reconnaissance mutuelle sans que ce pouvoir soit conditionné à l’accord de l’autorité nationale compétente ou à sa demande. Il supprime également la dérogation prévue à l’ article 9 sexies de la décision de 2009.

Le deuxième paragraphe de l’ article 8 prévoit qu’avec l’accord de l’autorité nationale compétente, les membres nationaux puissent ordonner des mesures d’enquête, mais également autoriser et coordonner des livraisons surveillées (« contrôlées ») dans leur État membre.

Votre rapporteure est favorable à ce renforcement des pouvoirs du membre national d’Eurojust.

En effet, lors de l’examen du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l’Union européenne et des engagements internationaux de la France, votre rapporteure s’était prononcée contre la transposition a minima de la décision de 2009 et le recours à la dérogation prévue à l’article 9 sexies.

L’amendement au projet de loi proposé par votre rapporteure et adopté par la commission des lois permettait au membre national d’Eurojust de procéder lui-même aux actes mentionnés par la décision de 2009 sur demande ou avec l’autorisation de l’autorité judiciaire compétente, au lieu de ne lui conférer qu’un simple pouvoir de proposition au procureur général ou au procureur de la République (3). Maintenu en séance publique contre l’avis du Gouvernement, cet amendement avait été supprimé au Sénat.

Au cours des négociations, la France s’est montrée globalement favorable au renforcement des pouvoirs opérationnels d’Eurojust, mais a souligné que ce renforcement ne devait pas se faire au détriment de la confiance nécessaire entre membres nationaux et autorités compétentes. Les personnes auditionnées par votre rapporteure ont en effet souligné qu’il pouvait être délicat pour un membre national d’exercer ses pouvoirs en ayant une connaissance parfois partielle du dossier, et ainsi de prendre le risque d’adopter des actes d’enquête contraires aux stratégies d'enquêtes décidées par les autorités compétentes au niveau national (juges d'instruction, procureurs).

De nombreux États membres se sont opposés à ces dispositions. L’Allemagne a notamment soulevé les difficultés d’ordre constitutionnel qu’elles posent au regard de la compétence des Landers.

L’article 8, paragraphe 3 de la proposition de règlement prévoit qu’ « en cas d’urgence, lorsqu’un accord ne peut être trouvé en temps utile », les membres nationaux puissent ordonner des mesures d’enquêtes et autoriser des livraisons surveillées dans l’État membre sans accord de l’autorité nationale compétente. Il convient de préciser cette disposition qui reste pour le moment trop floue. Si de telles mesures doivent pouvoir être autorisées dans le cas où les membres nationaux ne peuvent pas contacter l’autorité nationale compétente en temps voulu, cette disposition ne doit pas permettre aux membres nationaux d’aller à l’encontre de la volonté des autorités nationales compétentes.

Afin de mettre en œuvre ces dispositions, la question du statut du membre national d’Eurojust pourrait faire l’objet d’une expertise approfondie par la chancellerie.

Des divergences existent en effet sur ce statut.

Ainsi, la Commission des lois du Sénat avait considéré dans son rapport sur le projet de loi précité (4) que si le membre français d’Eurojust est bien un magistrat, il est placé » hors hiérarchie » et n’est pas membre du parquet au sens du statut de la magistrature, affirmant qu’ « il serait inhabituel qu’un magistrat placé hors de la « pyramide » hiérarchique judiciaire puisse directement ordonner, depuis La Haye, des mesures d’enquêtes à des officiers de police judiciaire en n’importe quel point du territoire français ».

Ce rapport avait également souligné qu’il découle de l’article 66 de la Constitution que le membre français d’Eurojust doit être considéré comme faisant partie de l’autorité judiciaire afin de pouvoir prendre les mesures privatives ou restrictives de liberté que pourraient impliquer l’exécution des demandes de coopération judiciaire tendant à l’exécution d’une condamnation à une peine privative de liberté prononcée par la juridiction d’un autre État membre ou à l’arrestation d’une personne faisant l’objet d’un mandat d’arrêt européen.

Votre rapporteure avait fait valoir dans son rapport précité que le membre national d’Eurojust – qui est un magistrat hors hiérarchie mis à disposition de l’unité Eurojust – fait partie de l’autorité judiciaire au sens de l’article 66 de la Constitution, dès lors qu’il est soumis, en application de l’article 695-8 du code de procédure pénale, au pouvoir d’instruction qu’exerce le ministre de la Justice à l’égard des magistrats du ministère public dans les conditions fixées par l’article 30 du code de procédure pénale.

Il convient de souligner que le contrôle juridictionnel des actes pris sur le fondement des nouveaux pouvoirs qui pourraient être accordés au membre national d’Eurojust devrait apporter les mêmes garanties que ce qui existe déjà dans le droit national.

L’article 86 du TFUE dispose que « pour combattre les infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, le Conseil, statuant par voie de règlements conformément à une procédure législative spéciale, peut instituer un Parquet européen à partir d’Eurojust ».

La question de l’articulation entre Eurojust et un futur parquet européen est donc logiquement prise en compte dans la proposition de règlement.

L’article 3 de la proposition de règlement relatif à la compétence d’Eurojust prévoit que celle-ci ne comprend pas les infractions pour lesquelles le Parquet européen est compétent. Cependant, puisque l’ensemble des États membres ne participeront pas au parquet européen, une telle disposition ne semble pas pouvoir être maintenue. Lors des discussions dans le cadre du groupe coopération judiciaire en matière pénale, toutes les délégations se sont prononcées contre cette disposition.

L’article 41 de la proposition de règlement prévoit qu’Eurojust « établit et entretient une relation privilégiée avec le Parquet européen, fondée sur une coopération étroite et sur le développement de liens sur les plans opérationnels, administratifs et de la gestion » et que le procureur européen et le président d’Eurojust » se réunissent régulièrement pour examiner des questions d’intérêt commun ». Eurojust devrait traiter toute demande d’assistance émanant du parquet européen dans les meilleurs délais et de la même manière que si elle émanait de la coopération judiciaire entre États membres.

L’article 41 de la proposition dispose que le soutien par Eurojust du Parquet européen comprend :

« a) un soutien technique à l’élaboration du budget annuel, du document de programmation contenant la programmation annuelle et pluriannuelle et du plan de gestion ;

b) un soutien technique au recrutement du personnel et à la gestion des carrières ;

c) des services de sécurité ;

d) des services informatiques ;

e) des services de gestion financière, de comptabilité et d’audit ;

f) tout autre service d’intérêt commun. »

Un mécanisme de contrôle croisé automatique des données dans le système de gestion des dossiers d’Eurojust serait mis en œuvre  : à chaque fois que se produirait une concordance entre les données introduites par le parquet européen dans le système de gestion de dossiers Eurojust et celles introduites par Eurojust, les deux institutions en seraient informées.

L’article 57 de la proposition de règlement relative à l’institution du parquet européen dispose de manière symétrique que le parquet européen entretient une relation privilégiée avec Eurojust. Les mêmes services que ceux visés dans la proposition de règlement relative à Eurojust sont mentionnés comme devant être fournis par l’administration d’Eurojust.

Ces dispositions demeurent imprécises. Par ailleurs, les interlocuteurs auditionnés par votre rapporteure ont souligné le manque de crédibilité de l’approche envisagée par la Commission européenne, selon laquelle ce soutien d’Eurojust au Parquet européen n’aurait pas d’incidence financière.

Alors que la décision Eurojust avait mis en place un organe de contrôle commun indépendant contrôlant de manière collégiale la protection des données par Eurojust, la proposition de règlement prévoit que le Contrôleur européen de la protection des données soit en charge de ce contrôle, assisté par les autorités nationales de protection des données.

L’Allemagne et la France ont pour le moment souligné leur préférence pour le maintien d’une structure de contrôle ad hoc, justifiée par la spécificité des données personnelles en matière pénale. Cette position a été largement soutenue par les autres États membres.

La mise en place d’une autorité de contrôle commune à Europol, à Eurojust et au futur parquet européen pourrait également être envisagée. Cette solution permettrait de mieux respecter la spécificité des données personnelles en matière pénale tout en réalisant des économies d’échelles.

La proposition de règlement prévoit également que le règlement n° 45/2001 (5) s’applique au traitement des données personnelles (article 27, paragraphe 5), spécifié et complété par les dispositions du règlement. Dans la pratique, peu de modifications sont apportées en matière de durée de conservations des données, de droit d’accès aux données, de droit de rectification et d’effacement des données, d’autant plus que l’article 20 du règlement de 2001, auquel renvoie la proposition de règlement, prévoit des dérogations afin d’assurer » la prévention, la recherche, la détection et la poursuite d’infractions pénales ».

Toutefois, le principe même de l’application du règlement de 2001 pour toutes les données personnelles traitées par Eurojust apparaît problématique au vu de la spécificité des données traitées par Eurojust, et la plupart des États membres ont demandé à ce que, de la même manière que pour Europol, les données administratives (relatives aux agents) soient distinguées des données opérationnelles (judiciaires). Dans son avis du 5 mars 2014 (6), le Contrôleur européen s’est également prononcé en faveur d’une meilleure distinction entre ces deux types de données.

L’article 27 de la proposition de règlement établit des règles spécifiques pour la protection des données des victimes et des mineurs de moins de 18 ans, pour lesquels la liste des données pouvant être traitées est plus restrictive que pour les personnes soupçonnées. Si un traitement spécifique peut être mis en place pour les données personnelles des mineurs soupçonnés, il n’est pas pertinent de leur appliquer les mêmes dispositions qu’aux données personnelles des victimes et des témoins, qui doivent être le plus protectrices possibles.

La proposition de règlement règlemente également les transferts de données à caractère personnel à des pays tiers ou des organisations internationales. Si des garde-fous existent pour ces transferts, ceux-ci apparaissent largement insuffisants.

En effet, alors que l’article 27 de la décision Eurojust précédente prévoyait que » le membre national de l’État membre qui a soumis les informations donne son accord au transfert de celles-ci », en consultant si nécessaire les autorités compétentes des États membres, la proposition de règlement prévoit que ces transferts de données personnelles à des pays tiers, des organisations internationales ou Interpol sont possibles lorsque cela est nécessaire pour combattre la criminalité relevant de la compétence d’Eurojust (article 38, paragraphe 4). Si les données à transférer ont été fournies par un État membre, Eurojust doit obtenir le consentement de celui-ci, mais l’autorisation de l’État membre pourrait être réputée acquise si ce dernier n’a pas expressément limité la possibilité d’effectuer des transferts ultérieurs ou s’il a donné son accord préalable en des termes généraux.

Ces dispositions ne sont pas suffisamment protectrices : l’autorisation d’un État membre ne doit pas être réputée acquise mais expressément donnée.

Comme pour Europol, le transfert des données personnelles vers des États tiers ou des organisations internationales serait possible si certaines conditions sont réunies (décision de la Commission européenne sur le niveau de protection des données adéquat, accord international entre l’Union et le pays tiers, accord de coopération relevant de la décision actuelle). Toutefois, de larges exceptions à ces prérequis sont prévues, qui permettraient à Eurojust d’autoriser, au cas par cas, le transfert de données personnelles vers un pays tiers ou une organisation internationale (si le transfert est absolument essentiel à la sauvegarde des intérêts essentiels d’un État membre, à la prévention d’un danger imminent, pour des motifs d’intérêt public importants, à la sauvegarde des intérêts vitaux de la personne concernée ou d’une autre personne). Le collège pourrait également autoriser une série de transferts pour une période maximale d’un an. Le contrôleur européen devrait alors donner son accord.

Ces dispositions sont alignées sur les règles prévues par la proposition de règlement relative à Europol. Il convient donc de rappeler que la résolution proposée par votre rapporteure et adoptée par l’Assemblée nationale relative à Europol (7) :

– soulignait certaines insuffisances de la proposition de règlement relatif à Europol en matière de protection des données, s’agissant de la possibilité de présumer de l’accord d’un État membre pour un transfert de données à caractère personnel vers des organes de l’Union, des pays tiers et des organisations internationales ;

– attirait l’attention sur le risque que le contrôle de la protection des données, n’étant plus confié au niveau européen à une structure dédiée au contrôle d’Europol, puisse être moins spécifique, ainsi que sur la coordination nécessairement étroite entre les autorités nationales et européenne de protection des données qui doit être garantie.

Il convient de réaffirmer cette position dans le cadre d’Eurojust.

L’article 12 c) du traité sur l’Union européenne prévoit que « les parlements nationaux contribuent activement au bon fonctionnement de l’Union en participant, dans le cadre de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, aux mécanismes d’évaluation de la mise en œuvre des politiques de l’Union dans cet espace, conformément à l’article 70 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et en étant associés au contrôle politique d’Europol et à l’évaluation des activités d’Eurojust, conformément aux articles 88 et 85 dudit traité ».

L’article 85 du TFUE prévoit que les règlements régissant Eurojust fixent « les modalités de l’association du Parlement européen et des parlements nationaux à l’évaluation des activités d’Eurojust ».

Pour se conformer aux dispositions du traité, la proposition de règlement prévoit en effet des dispositions relatives à la participation du Parlement européen et des parlements nationaux.

Son article 55 dispose qu’Eurojust transmet son rapport annuel au Parlement européen, qui peut présenter des observations et des conclusions. Le président du collège doit se présenter devant le Parlement européen à la demande de celui-ci pour examiner des questions relatives à Eurojust et en particulier pour présenter ses rapports annuels, dans le respect des obligations de réserve et de confidentialité. Les discussions ne peuvent cependant pas se rapporter directement ou indirectement à des actions concrètes en rapport avec des dossiers opérationnels spécifiques.

Eurojust doit également transmettre au Parlement européen les résultats d’études et de projets stratégiques élaborés ou commandés par Eurojust, les arrangements pratiques conclus avec des tiers et le rapport annuel du Contrôleur européen de la protection des données.

Elle doit transmettre les mêmes documents ainsi que son rapport annuel aux parlements nationaux.

Ces dispositions apparaissent insuffisantes.

Le Parlement européen ne s’est pas encore prononcé sur ce texte. La commission Libertés civiles, justice et affaires intérieures (LIBE) a été saisie au fond, avec M. Axel Voss pour rapporteur.

Dans la résolution relative à Europol précitée, l’Assemblée nationale s’est prononcée en faveur de la création d’une commission mixte composée de représentants du Parlement européen et des parlements nationaux, pouvant notamment avoir accès à des informations classifiées et à des informations sensibles non classifiées traitées directement par Europol ou par son intermédiaire.

Parallèlement, les travaux menés au Parlement européen au sein de la commission LIBE puis en plénière ont abouti à un texte, qui doit encore être négocié avec le Conseil. Le contrôle des activités d’Europol se ferait par l’intermédiaire du « groupe de contrôle parlementaire conjoint » (commission mixte), constitué des membres titulaires de la commission compétente du Parlement européen ainsi que d’un membre de la commission compétente du parlement national de chaque État membre et un suppléant. Les États membres dont le système parlementaire est bicaméral seraient représentés par un représentant de chaque chambre. Le groupe de contrôle parlementaire conjoint serait toujours convoqué dans les locaux du Parlement européen par le président de la commission compétente du Parlement européen. Les réunions seraient coprésidées par le président de la commission compétente du Parlement européen et le représentant du parlement national de l’État membre qui assure la présidence tournante du Conseil.

Ce groupe de contrôle pourrait notamment auditionner le directeur exécutif d’Eurojust et le contrôleur européen de la protection des données, et pourrait demander tout document utile nécessaire à l’accomplissement de ses tâches.

Toutefois, si le traité prévoit le contrôle d’Europol par les parlements européens et nationaux, il prévoit seulement l’évaluation d’Eurojust par ceux-ci. Cette distinction est inhérente à la nature judiciaire d’Eurojust : la séparation des pouvoirs et le secret de l’instruction doivent être respectés. Contrairement à Europol, un accès aux documents classifiés n’est donc pas envisageable.

Il est toutefois nécessaire de définir des modalités d’évaluation plus ambitieuses que celles proposées actuellement par la proposition de règlement. Une commission mixte parlementaire d’évaluation doit donc être mise en place sur le modèle de ce qui est proposé pour Europol. Cette commission mixte serait coprésidée par le président de la commission LIBE, ainsi que par le représentant du parlement national de l’État membre assurant la présidence tournante du Conseil. Elle serait convoquée par ses deux coprésidents.

Elle aurait le pouvoir d’entendre, à sa demande, le président et les vice-présidents d’Eurojust.

Eurojust devrait transmettre à cette commission mixte tous les documents prévus à l’actuel article 55 de la proposition de règlement, ainsi que les documents de programmation annuels et pluriannuels prévus à l’article 15 de la proposition de règlement, ainsi que les documents budgétaires relatifs à Eurojust.

Par ailleurs, les parlements nationaux doivent pouvoir continuer à évaluer Eurojust de manière unilatérale. L’article 55 devrait donc être complété par une disposition indiquant que les nouveaux pouvoirs dévolus aux parlements doivent s’entendre « sans préjudice des modalités d’évaluation parlementaire telles qu’ elles sont prévues dans les États membres ».

CONCLUSION

En conclusion, il convient de rappeler que le projet de règlement, s’il ne peut pas être considéré comme ambitieux, propose néanmoins des modifications importantes à la gouvernance et au fonctionnement d’Eurojust. Il contient également des dispositions relatives à son évaluation parlementaire.

Ce dernier aspect en particulier nécessite une prise de position de la part du Parlement européen mais également des parlements nationaux, qui doivent se saisir des pouvoirs dévolus par le traité de Lisbonne.

Si certains éléments du texte constituent des progrès, d’autres éléments appellent des observations et des réserves. C’est dans cette perspective que s’inscrit la résolution proposée par votre rapporteure.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie le 16 avril 2014, sous la présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente, pour examiner le présent rapport d’information.

L’exposé du rapporteur a été suivi d’un débat.

M. Michel Piron. Je tiens à vous remercier, non seulement pour le contenu de ce rapport, mais également d’avoir mis ce sujet à l’ordre du jour à ce moment précis, dans le cadre de réflexion plus large des élections européennes.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Certaines questions peuvent ne pas nous mettre d’accord. Toutefois, il me semble que quand nous sommes en capacité, en tant que parlement national, de proposer et parfois de faire adopter au niveau européen des mesures de contrôle parlementaire, comme nous avons pu le faire avec la résolution sur Europol, et c’est ici le sens de cette résolution Eurojust, ce sont de petits pas qui permettent de renforcer la démocratie et le contrôle par les parlements, qui sont de plus en plus associés. Pour moi, c’est une façon de construire l’Europe de demain.

La Commission a ensuite adopté la proposition de résolution dont le texte figure ci-après.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu l’article 12 du traité sur l’Union européenne,

Vu l’article 85 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu la décision du Conseil 2002/187/JAI du 28 février 2002 instituant Eurojust afin de renforcer la lutte contre les formes graves de criminalité,

Vu la décision du Conseil 2009/426/JAI du 16 décembre 2008 sur le renforcement d’Eurojust,

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust) (COM [2013] 535 final),

1. Rappelle les pouvoirs d’évaluation des activités d’Eurojust conférés au Parlement européen et aux parlements nationaux par le traité sur l’Union européenne et le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ;

2. Estime que les dispositions de la proposition de règlement précitée relatives à l’évaluation d’Eurojust par les parlements nationaux sont insuffisantes ;

3. Souligne que le règlement ne doit en aucun cas restreindre les pouvoirs d’évaluation des activités d’Eurojust que les parlements nationaux exercent en application des législations des États membres ;

4. Est favorable à la création d’une commission mixte d’évaluation composée, d’une part, de représentants du Parlement européen, membres de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures, et d’autre part, d’un représentant de chaque parlement national, membre de la commission compétente en matière de justice et d’un suppléant. Les États membres dont le système parlementaire est bicaméral seraient représentés par un représentant de chaque chambre. Elle se réunirait au Parlement européen, et serait coprésidée par le président de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures du Parlement européen et un membre d’un parlement national. Elle serait convoquée par ses deux co-présidents ;

5. Souhaite que la commission mixte ait le pouvoir d’entendre, à sa demande, le président et les vice-présidents d’Eurojust, et reçoive tous les documents prévus à l’article 55 de la proposition de règlement précitée, ainsi que les documents de programmation annuelle et pluriannuelle prévus à l’article 15 de la proposition de règlement et tous les documents budgétaires relatifs à Eurojust ;

6. Juge injustifiées les évolutions proposées s’agissant du rôle de la Commission européenne dans le cadre de la nouvelle gouvernance d’Eurojust, au sein du conseil exécutif, du collège dans sa formation de gestion et dans le processus de nomination du directeur administratif ;

7. Souligne certaines insuffisances de la proposition de règlement précitée en matière de protection des données, s’agissant notamment de la possibilité de présumer de l’accord d’un État membre pour un transfert de données à caractère personnel vers des organes de l’Union, des pays tiers et des organisations internationales  ;

8. Attire l’attention sur le risque que le contrôle de la protection des données, n’étant plus confié au niveau européen à une structure dédiée au contrôle d’Eurojust, puisse être moins spécifique, et donc moins efficace.

ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS

- M. Michaël Gihr, ministère de la justice, chargé de mission pour les négociations et la transposition des normes pénales européennes et internationales ;

- Mme Aurélia Schaff, ministère de la justice, chargée de mission pour les négociations et la transposition des normes pénales européennes et internationales ;

- Mme Isabelle Jegouzo, secrétariat général des affaires européennes, secrétaire générale adjointe ;

- M. Alexandre LY, secrétariat général des affaires européennes, adjoint au secteur espace judiciaire européen.

1 () Décision du Conseil 2002/187/JAI du 28 février 2002 instituant Eurojust afin de renforcer la lutte contre les formes graves de criminalité

2 () Décision du Conseil 2009/426/JAI du 16 décembre 2008 sur le renforcement d’Eurojust et modifiant la décision 2002/187/JAI instituant Eurojust afin de renforcer la lutte contre les formes graves de criminalité

3 () Rapport n° 840 du 27 mars 2013 fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, sur le projet de loi (n° 736 rectifié) portant diverses dispositions d’adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l’Union européenne et des engagements internationaux de la France.

4 () Rapport n  596 de M. Alain RICHARD, fait au nom de la commission des lois du Sénat, déposé le 22 mai 2013.

5 () Règlement (CE) n° 45/2001 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2000 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes de la Communauté et la libre circulation de ces données.

6 () EDPS Opinion on the package of legislative measures reforming Eurojust and setting up the European Public Prosecutor's Office ('EPPO').

7 () Résolution sur Europol du 20 décembre 2013, TA n° 272.