N° 1064 - Proposition de loi de M. Dino Cinieri tendant à instituer un certificat délivré par un expert en automobile lors de la vente d'un véhicule d'occasion de plus de cinq ans ayant subi un accident de la circulation affectant un ou plusieurs éléments de sécurité



N° 1064

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 mai 2013.

PROPOSITION DE LOI

tendant à instituer un certificat délivré par un expert en automobile lors de la vente d’un véhicule d’occasion de plus de cinq ans ayant subi un accident de la circulation affectant un ou plusieurs éléments de sécurité,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Dino CINIERI, Jean-Pierre DECOOL, Alain CHRÉTIEN, Marc LE FUR, Bérengère POLETTI, Sophie ROHFRITSCH, Alain MOYNE-BRESSAND, Michel HERBILLON, Guy TEISSIER, Stéphane DEMILLY, Dominique LE MÈNER, Rémi DELATTE, Jean-Pierre VIGIER, Alain MARTY, Patrick HETZEL, François ROCHEBLOINE, Jean-Marie SERMIER, Jean-Luc REITZER, Jérôme CHARTIER et Éric STRAUMANN,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La grande majorité des ventes de voitures en France concerne des véhicules d’occasion : elles représentent 3 fois plus de transactions que les automobiles neuves. De janvier à fin octobre 2012, on a ainsi dénombré 4,5 millions d’immatriculations pour les ventes de véhicules d’occasion, contre 1,59 million pour les ventes de véhicules neufs. Un décalage historiquement élevé, puisqu’il faut remonter à 2006 pour retrouver des niveaux similaires (le marché de l’occasion avait alors pesé 2,75 fois plus que le marché du neuf), et à la fin des années 1990 pour retrouver un ratio supérieur.

Ce décalage, qui est la conséquence directe de l’effondrement actuel du marché de l’automobile, reflète également la bonne tenue du marché de l’occasion.

En effet, pour vendre leurs véhicules d’occasion, les Français utilisent tous les moyens mis à leur disposition : le « bouche à oreille », la petite affichette sur la vitre arrière, ou encore la presse locale, sans oublier Internet qui occupe une place de plus en plus importante (deux millions d’annonces sont ainsi publiées en ligne, dont 500 000 par des vendeurs professionnels).

Il convient en outre de préciser que 63 % des véhicules d’occasion vendus en 2012 étaient âgés de plus de cinq ans.

Or, dans les faits, les litiges consécutifs à la vente de véhicules d’occasion – en particulier à cause des vices cachés du véhicule – sont nombreux. Les procédures judiciaires sont portées devant les tribunaux d’instance ou de grande instance selon la valeur – inférieure ou supérieure à 10 000 euros – du véhicule.

Dans ce contexte, de quelles garanties juridiques dispose aujourd’hui l’acheteur d’un véhicule d’occasion ?

Selon le code civil, tout vendeur de biens est tenu envers l’acheteur d’une garantie légale contre les vices cachés. À cette obligation légale, un vendeur professionnel peut quant à lui proposer à l’acquéreur sa propre garantie dite « garantie conventionnelle » (garantie du vendeur), voire même une garantie du constructeur ou une garantie commerciale. Enfin, les articles 1641 à 1649 du code civil garantissent l’acheteur contre les défauts de la chose vendue.

Lorsque le vendeur d’un véhicule d’occasion est un professionnel, l’acheteur peut donc faire jouer soit la garantie légale de conformité (code de la consommation), soit la garantie légale contre les vices cachés (code civil).

En revanche, lorsque la transaction a lieu entre deux personnes physiques, dans le cadre d’une vente de gré à gré, l’acheteur ne peut compter que sur la garantie légale relative aux vices cachés, même s’il peut également, dans certains cas, intenter une action civile pour dol
– notamment dans le cas où le vice caché aurait été délibérément dissimulé par le vendeur. Cependant, le dol ne se présume pas, et doit être prouvé.

Aujourd’hui, tout vendeur d’un véhicule d’occasion est tenu de remettre à l’acquéreur les documents suivants :

– l’ancien titre de circulation ;

– le premier exemplaire de la déclaration de cession remplie. Dans le cas d’une vente, l’encadré « certificat de vente » doit être signé par l’ancien propriétaire et le nouvel acquéreur du véhicule ;

– un certificat de situation administrative datant de moins de 15 jours ;

– si le véhicule a plus de quatre ans, la preuve du contrôle technique datant de moins de six mois ou de moins de deux mois si une contre-visite a été prescrite.

Cependant, en dehors de la procédure prévue pour les véhicules dits « gravement endommagés », il n’existe aucun document faisant état des éventuels dégâts qu’aurait subi un véhicule d’occasion cédé par un particulier. Mise en place par décret en date du 12 avril 2009, cette procédure permet à un expert en automobile de retirer temporairement de la circulation tout véhicule ayant été endommagé suite à un accident et présentant un danger immédiat.

Dès lors, et afin de contribuer à une meilleure protection de l’acquéreur et renforcer la sécurité routière, il conviendrait d’instituer à la charge du vendeur un certificat délivré par un expert en automobile inscrit sur la liste prévue à l’article L. 326-3 du code de la route, pour toute vente de gré à gré entre personnes physiques d’un véhicule d’occasion âgé de plus de cinq ans, et ayant subi un accident de la circulation (au sens de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 – dite « Loi Badinter » – tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation) impactant un ou plusieurs éléments de sécurité.

Il convient d’entendre par « éléments de sécurité » d’un véhicule ceux figurant à l’annexe 1 de l’arrêté du 29 avril 2009 fixant les modalités d’application des dispositions du code de la route relatives aux véhicules endommagés pour les voitures particulières et les camionnettes, à savoir :

– tous les éléments de liaison au sol (pneumatiques, roues), de suspension, de direction, de freinage et leurs organes de commande ;

– les fixations et les articulations des sièges ;

– les coussins gonflables, prétensionneurs, ceintures de sécurité et leurs éléments périphériques de fonctionnement ;

– la coque et le châssis.

En délivrant son certificat, l’expert en automobile engagera évidemment sa responsabilité, qui sera couverte par le contrat d’assurance – éventuellement révisé – prévu par l’article L. 326-7 du code de la route.

En exigeant du particulier vendeur d’un véhicule d’occasion âgé de plus de cinq ans et ayant subi un accident de la circulation ayant impacté un ou plusieurs éléments de sécurité, qu’il remette à l’acquéreur (en sus des documents obligatoires) un certificat établi par un expert en automobile attestant que le véhicule est en état de circuler, la réforme envisagée apportera une protection précieuse aux acquéreurs.

Tel est le sens de la proposition de loi, que nous vous demandons, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

L’article L. 322-2 du code de la route est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque la vente concerne un véhicule d’occasion, mis en circulation depuis au moins cinq ans et ayant subi un accident de la circulation affectant un ou plusieurs de ses éléments de sécurité, le propriétaire est tenu de remettre à l’acquéreur un certificat établi par un expert automobile depuis moins de trois mois et attestant de l’état du véhicule.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de fonctionnement du dispositif prévu au précédent alinéa, la nature et le périmètre des contrôles et investigations qui seront effectués par l’expert ainsi que les conséquences de ceux-ci. »


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