N° 2198
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 septembre 2014.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
relative à la gestation pour autrui (GPA), suite à la décision
de la Cour européenne des droits de l’Homme du 26 juin 2014,
présentée par Mesdames et Messieurs
Pierre LELLOUCHE, Damien ABAD, Bernard ACCOYER, Yves ALBARELLO, Julien AUBERT, Olivier AUDIBERT-TROIN, Patrick BALKANY, Jean-Pierre BARBIER, Étienne BLANC, Marc-Philippe DAUBRESSE, Jean-Pierre DECOOL, Nicolas DHUICQ, Virginie DUBY-MULLER, Arlette GROSSKOST, Patrick HETZEL, Christian JACOB, Jacques LAMBLIN, Charles de LA VERPILLIÈRE, Bruno LE MAIRE, Lionnel LUCA, Patrice MARTIN-LALANDE, Jean-Claude MATHIS, Bernard PERRUT, Didier QUENTIN, Jean-Marie SERMIER, Fernand SIRÉ, Thierry SOLÈRE, Éric STRAUMANN, Claude STURNI, Michel TERROT, Dominique TIAN, Jean-Sébastien VIALATTE et Éric WOERTH,
députés.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La question de la gestation pour autrui (GPA) est d’une actualité urgente, puisque le 26 septembre prochain, expire le délai légal de 3 mois, au terme duquel la France n’aura plus le droit d’interjeter appel des arrêts en date du 26 juin 2014 de la Cour européenne des droits de l’Homme (Mennesson contre France et Labassee contre France).
La GPA est interdite en France, notre droit est fondé sur la dignité de la personne et l’indisponibilité du corps humain.
Le corps humain est en effet ni susceptible d’être vendu, acheté ou loué, ce que confirme l’article 16-7 du code civil, qui dispose que « toute convention portant sur la procréation la gestation pour le compte d’autrui est nulle ». Cette disposition est d’ailleurs d’ordre public au terme de l’article 16-9 du même code. Cette interdiction, introduite dans le code civil par la loi du 29 juillet 1994 relative au respect (indisponibilité) du corps humain et directement issue de la jurisprudence de la Cour de cassation qui dans un arrêt du 31 mai 1991 (numéro 90-20.105), disposait que « une convention par laquelle une femme s’engage, fût-ce à titre gratuit à concevoir et à porter un enfant pour l’abandonner à sa naissance, contrevient tant au principe d’ordre public de l’indisponibilité du corps humain, qu’à celui de l’indisponibilité de l’état des personnes ».
Les arrêts de la CEDH, s’ils ne remettent pas en cause cette interdiction d’ordre public, et reconnaissent même « que la gestation pour autrui suscite de délicates interrogations d’ordre éthique » justifiant « que les États doivent se voir accorder une ample marge d’appréciation, s’agissant de la décision d’autoriser ou non ce mode de procréation » aboutit en fait au résultat exactement inverse, en considérant que le refus de la transcription de l’acte de naissance, établi en exécution d’une décision étrangère dans le cadre d’une GPA constituait une ingérence dans le droit à l’identité des enfants. Si bien qu’au nom du droit du respect à la vie privée et familiale (article 8 de la convention des droits de l’homme) et de l’intérêt de l’enfant, l’État français se verra donc obligé de transcrire sur le registre français d’état civil un tel acte de naissance, jusqu’ici interdit et même considéré comme une fraude à la loi française.
Après la circulaire de Mme la garde des Sceaux de janvier 2013, rédigée afin de faciliter la délivrance de certificats de nationalité française aux enfants conçus par GPA à l’étranger, la décision de la CEDH organise une sorte de régularisation de l’état civil de tous les enfants nés à l’étranger par ce biais. Un tel détournement est inacceptable, non seulement parce qu’il vient contredire le droit et la jurisprudence française, mais parce qu’il risque d’ouvrir un véritable commerce de la GPA au moyen d’entremetteurs et autres officines étrangères qui recherchent en France des parents en mal de ce mode de procréation.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
L’Assemblée nationale,
Vu l’article 34-1 de la Constitution,
Vu l’article 136 de son Règlement,
Considérant les arrêts Mennesson c. France et Labassee c. France rendus le 26 juin 2014 par la cinquième section de la Cour européenne des droits de l’Homme (requêtes nos 65192/11 et 65941/11),
Souhaite que la France réaffirme le principe d’interdiction de la gestation pour autrui qui est d’ordre public en droit français,
Souhaite que la France interdise à toutes les parties contractantes à ce type de convention illicite le droit d’adopter l’enfant conçu puis vendu ou donné par la technique de la gestation pour autrui,
Souhaite que la France interjette appel des arrêts précités.
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