N° 2283 - Proposition de loi de M. Jean-Pierre Decool visant à rendre obligatoire, pour les structures gérant l'accueil de mineurs, la consultation du "système d'information relatif aux accueils de mineurs" (SIAM), listant les auteurs d'agressions sexuelles ou violentes



N° 2283

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2014.

PROPOSITION DE LOI

visant à rendre obligatoire, pour les structures
gérant l’accueil de mineurs, la consultation du
« système d’information relatif aux accueils de mineurs » (SIAM), listant les auteurs d’agressions sexuelles ou violentes,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à d
éfaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Jean-Pierre DECOOL, Damien ABAD, Yves ALBARELLO, Patrick BALKANY, Sylvain BERRIOS, Véronique BESSE, Dino CINIERI, Marie-Christine DALLOZ, Marc-Philippe DAUBRESSE, Dominique DORD, Nicolas DHUICQ, Nicolas DUPONT-AIGNAN, Christian ESTROSI, Daniel FASQUELLE, Marie-Louise FORT, Laurent FURST, Bernard GÉRARD, Arlette GROSSKOST, Jean-Claude GUIBAL, Michel HERBILLON, Patrick HETZEL, Valérie LACROUTE, Jean LASSALLE, Michel LEFAIT, Lionnel LUCA, Alain MARSAUD, Patrice MARTIN-LALANDE, Alain MARTY, Damien MESLOT, Philippe MEUNIER, Yannick MOREAU, Alain MOYNE-BRESSAND, Jacques MYARD, Jacques PÉLISSARD, Josette PONS, Didier QUENTIN, Frédéric REISS, Jean-Luc REITZER, Paul SALEN, Claudine SCHMID, Fernand SIRÉ, Éric STRAUMANN, Claude STURNI, Jean-Charles TAUGOURDEAU, Lionel TARDY, Guy TEISSIER, Philippe VITEL, Michel VOISIN et Marie-Jo ZIMMERMANN,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Chaque année, des milliers d’enfants et adolescents sont victimes d’agressions sexuelles dans notre pays. Les enfants, dont nous nous devons de protéger la fragilité, sont des proies permanentes pour des prédateurs sexuels, et ce particulièrement dans le milieu associatif.

Ce constat, alarmant, fut notamment mis en exergue dans le milieu sportif par une étude menée par l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Choquet, Bourdessol, Arvers, Guilberg & De Peretti, 2001), révélant que les jeunes membres d’une association sportive témoignent d’un risque d’exposition à la violence sexuelle bien plus important que les autres (7 % versus 5 % chez les filles ; 3 % versus 2 % chez les garçons). Dans une enquête du même ordre (Jolly & Descamps, 2006), 8 % des jeunes en études Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives (STAPS) interrogés ont déclaré avoir subi des agressions sexuelles dans le milieu du sport au cours de leur existence.

Face à cette réalité sordide, les Gouvernements successifs ont tenté d’endiguer cette plaie sociale au travers de différentes mesures. Ainsi, la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 (dite loi Perben II) a mis en place la création et l’utilisation du « fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes », afin de recenser toute personne sujet à une mesure ou à une décision judiciaire pour avoir commis une infraction à caractère sexuel. Cette création fut renforcée par « l’arrêté du 19 avril 2012 portant création d’un traitement automatisé de données à caractère personnel relatif à la gestion des accueils collectifs de mineurs à caractère éducatif dénommé Système d’Information relatif aux Accueils de Mineurs (SIAM) », mettant ce fichier en relation avec le casier judiciaire national et le fichier national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes. En parallèle, le Ministère en charge des Sports a lancé le 20 juillet 2007 une large campagne contre le harcèlement et les violences sexuelles dans le domaine du sport, et a abouti en 2008 à l’établissement d’une Charte relative à la prévention des violences sexuelles dans le sport, en collaboration avec le Comité National Olympique et Sportif Français.

Cependant, ces efforts ne permettent pas de prévenir de manière optimale le renouvellement des infractions de nature sexuelle ou de grande violence ainsi que la localisation de leurs auteurs ; seules quelques autorités, citées dans l’article 706-53-7 du code de procédure pénale, sont habilités à consulter directement ce fichier, à savoir les autorités judiciaires, la police et la gendarmerie, les préfets et administrations de l’État, ou encore les agents de greffes spécialement habilités par les chefs d’établissements pénitentiaires, mais dont la consultation semble rester facultative. De même, depuis l’application de la loi n° 2008-174 relative à la rétention de sûreté, les dirigeants de collectivités territoriales (maires, présidents de conseils généraux et régionaux) peuvent, via le préfet, accéder aux informations contenues sur ce fichier. Bien que cette législation ait été modifiée par l’arrêté du 19 avril 2012 évoqué précédemment, il demeure un certain vide juridique. En effet, si la consultation de ce fichier est devenue systématique pour chaque personne faisant partie d’une équipe d’encadrement déclarée d’un « accueil collectif de mineurs », cette automaticité de contrôle de protection n’inscrit pas toutes les organisations existantes dans cette procédure. Pour certaines organisations, telles que les associations qui ne bénéficient pas de délégation de mission de service public (n’étant donc pas sous la tutelle du Ministère de la Jeunesse et des Sports), ainsi que des structures d’encadrement de mineurs saisonnières, aucune procédure de consultation n’est prévue, et aucun contrôle n’est possible ni organisé.

Il est question ici de la sécurité des mineurs. Les instruments législatifs ne permettent pas à ce jour d’assurer la sécurité optimale des enfants de notre pays. Dans ces conditions, il semble impératif de rendre cette consultation obligatoire du SIAM via les préfets pour une organisation dont l’activité implique l’encadrement de mineurs avant de confier la responsabilité de ces derniers à une personne, bénévole ou non, qui intervient auprès d’eux. Cette mesure permettrait de s’assurer qu’un potentiel membre encadrant de mineurs ne figure pas sur le fichier. Les modalités d’application de cette consultation obligatoire du SIAM seront fixées par décret.

La République se doit de protéger les enfants contre le traumatisme et la violence que représentent des agressions sexuelles sur leur développement. Un contrôle plus accru au regard de l’encadrement des mineurs est nécessaire pour accomplir ce devoir absolu de protection de l’enfance.

Telles sont les dispositions de la proposition de loi que nous vous demandons d’adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Toute organisation, impliquant l’encadrement de mineurs par des animateurs professionnels ou bénévoles, doit se soumettre à la procédure de vérification du fichier : « système d’information relatif aux accueils de mineurs » (SIAM).

Article 2

La procédure de demande de vérification auprès du fichier « système d’information relatif aux accueils de mineurs », pouvant être mis en relation avec le casier judiciaire national d’un individu et le fichier national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes, intervient au préalable de toute procédure d’embauche de professionnels ou d’accueil de bénévoles, remplissant une mission d’encadrement, au sein d’une structure gérant l’accueil de mineurs.

Article 3

La procédure de demande de vérification est obligatoire, et doit être transmise au préfet par l’organisation concernée, en soumettant les coordonnées de l’encadrant.

Article 4

Le fichier « système d’information relatif aux accueils de mineurs » n’a pas vocation à être divulgué, et nul ne peut posséder ni avoir accès à l’intégralité de ce fichier en nom propre. Toute consultation et communication relative à ce fichier demeure à la discrétion de l’autorité préfectorale.

Article 5

L’autorité préfectorale dispose d’un délai, dont la durée sera fixée par décret, pour confirmer la présence d’un individu dans le fichier « système d’information relatif aux accueils de mineurs ». Si, à l’issue de ce délai, la structure ne reçoit aucune réponse de la part du préfet, elle peut procéder à l’embauche ou à l’accueil de l’individu.


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