N° 3315 - Proposition de résolution de M. Yves Foulon tendant à la création d'une commission d'enquête sur le coût et l'utilité des commissions et instances consultatives, dites "comités Théodule"



N° 3315

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 décembre 2015

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire,
à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Yves FOULON, Laurence ARRIBAGÉ, Julien AUBERT, Olivier AUDIBERT TROIN, Jean-Pierre BARBIER, Sylvain BERRIOS, Jean-Claude BOUCHET, Xavier BRETON, Philippe BRIAND, Bernard BROCHAND, Guillaume CHEVROLLIER, Alain CHRÉTIEN, Dino CINIERI, Philippe COCHET, Jean-Michel COUVE, Marie-Christine DALLOZ, Marc-Philippe DAUBRESSE, Jean-Pierre DECOOL, Nicolas DHUICQ, Dominique DORD, Virginie DUBY-MULLER, Daniel FASQUELLE, Philippe FOLLIOT, Marie-Louise FORT, Marc FRANCINA, Yves FROMION, Laurent FURST, Annie GENEVARD, Bernard GÉRARD, Jean-Pierre GORGES, Arlette GROSSKOST, Jean-Claude GUIBAL, Michel HEINRICH, Michel HERBILLON, Marc LAFFINEUR, Thierry LAZARO, Isabelle LE CALLENNEC, Marc LE FUR, Lionnel LUCA, Franck MARLIN, François de MAZIÈRES, Damien MESLOT, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Yves NICOLIN, Bérengère POLETTI, Axel PONIATOWSKI, Didier QUENTIN, Jean-Luc REITZER, Fernand SIRÉ, Claude STURNI, Jean-Charles TAUGOURDEAU, Guy TEISSIER, François VANNSON, Jean-Pierre VIGIER, Michel VOISIN, Jean-Luc WARSMANN et Marie-Jo ZIMMERMANN,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Nous avons en France une grande spécialité : la multiplication des « comités Théodule ». Dès qu’une difficulté ou un problème se présente, on crée volontiers des commissions et autres instances consultatives, communément appelées « comités Théodule ».

Sur les 800 comités Théodule décomptés en 2008, on en dénombrerait, aujourd’hui encore, près de 600, notamment grâce aux 225 suppressions décidées en 2009 par le gouvernement Fillon. Mais depuis 2012, des comités aux contours très flous sont encore régulièrement créés.

Alors que Jean-Marc Ayrault avait réussi à réduire le nombre de comités Théodule de 700 à 500 en moins d’un an, le Président de la République a décidé, lors de la conférence sociale du 7 juillet 2014, d’en créer 3 nouveaux : un « groupe d’évaluation des négociations » du pacte de responsabilité, qui s’ajoute ainsi à l’inutile « observatoire des contreparties » du pacte en faveur des entreprises lancé en janvier  2014, ainsi qu’un « comité d’évaluation des aides publiques » au patronat, et un « observatoire des rémunérations ».

À l’époque, le Premier ministre avait décrété que la création de tout nouveau comité Théodule devait s’accompagner de la suppression d’un ancien. Pour ce faire, il avait créé un nouveau comité Théodule, la Cimap (Commission interministérielle pour la modernisation de l’action publique). La Cimap avait permis de supprimer la « Commission consultative relative à la réception des betteraves dans les sucreries et distilleries », l’« Observatoire des distorsions entre prix agricoles », ainsi que l’« Observatoire national des abattoirs ».

Le Président de la République s’est fait le promoteur du très attendu choc de simplification et, pourtant, sa créativité dans le domaine des instances consultatives n’a jamais été aussi productive. Quelques exemples :

– Commissariat général à l’égalité des territoires ;

– Commissariat à la stratégie et à la prospective ;

– Haut Conseil des finances publiques ;

– Haute Autorité de la transparence de la vie politique ;

– Haut Conseil du financement de la protection sociale ;

– Conseil national économie éducation ;

– Conseil supérieur des programmes scolaires ;

– Conseil de l’innovation pour la réussite éducative ;

– Observatoire national du suicide.

Et, à en juger par les données budgétaires actuelles, on peut s’interroger sur l’efficacité du comité Théodule de la dépense publique créé en janvier 2014.

Combien coûtent les comités de l’État et autres instances consultatives ? Quelle est leur utilité ? Nul ne le sait : un document annexe au projet de loi de finances, le « Jaune budgétaire » les recense, mais le budget total qui leur est alloué n’est pas connu.

Pourtant, leur coût n’est pas neutre :

Conseil d’analyse de la société :

– Mission : « Éclairer les choix politiques du Gouvernement par l’analyse et la confrontation des points de vues » ;

– Composition : trente-deux personnes ;

– Production : Difficile à évaluer ;

– Budget : 280 000 euros par an.

Conseil d’orientation pour l’emploi :

– Mission : « Formuler un diagnostic sur les causes du chômage, émettre des propositions pour lever les obstacles à la création d’emplois, etc. » ;

– Composition : plusieurs représentants de la société civile ;

– Production : 2 rapports par an ;

– Budget : 275 000 euros par an ;

Centre d’analyse stratégique :

– Mission : « Éclairer le Gouvernement dans la définition et la mise en œuvre de ses orientations stratégiques en matière économique, sociale, environnementale ou technologique » ;

– Composition : Un directeur général, un secrétaire général et environ deux cents 200 salariés ;

– Production : 2 réunions par an et une dizaine de rapports ;

– Budget : 28 millions d’euros.

Haut Conseil à l’intégration :

– Mission : « Donner son avis et faire toute proposition utile à la demande du Premier ministre sur les questions relatives à l’intégration » ;

– Composition : vingt membres ;

– Production : Aucun rapport en 2010, 2 en 2011 et 3 avis en 2012 ;

– Budget : 95 000 euros par an pour le président, plusieurs salariés à plein temps.

Conseil d’analyse économique :

– Mission : « Éclairer le Gouvernement sur les problèmes et les choix économiques du pays » ;

– Composition : vingt-huit économistes et un secrétariat ;

– Production : treize réunions en 2012 et un rapport ;

– Budget : 860 000 euros par an.

Dans ces conditions, il paraît souhaitable de faire toute la lumière sur cette question. Par ses pouvoirs d’investigation, la Commission d’enquête sera notamment à même d’obtenir des principaux acteurs concernés et de toutes les administrations, les informations qu’elles n’ont pas, ou que partiellement, communiquées jusqu’alors et ainsi de reconstituer la réalité du phénomène, d’en évaluer le coût et l’utilité des instances visées et d’appréhender les moyens d’y mettre un terme.

Aussi, nous vous demandons, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter la proposition de résolution suivante.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

En application des articles 138 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, est créée une commission d’enquête de trente membres chargée :

– d’établir le nombre précis des comités, commissions et instances consultatives existants ;

– d’évaluer le coût et l’utilité de chacune de ces instances ;

– et de proposer des mesures permettant de rationnaliser ce phénomène et d’en diminuer significativement le coût pour les finances publiques.


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