N° 3439 - Proposition de loi de M. Joël Giraud relative à la rémunération du capital des sociétés coopératives



N° 3439

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 janvier 2016.

PROPOSITION DE LOI

relative à la rémunération du capital des sociétés coopératives,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale

dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Joël GIRAUD, Roger-Gérard SCHWARTZENBERG, Paul GIACOBBI, Jean-Noël CARPENTIER, Ary CHALUS, Gérard CHARASSE, Stéphane CLAIREAUX, Jeanine DUBIÉ, Olivier FALORNI, Gilda HOBERT, Jacques KRABAL, Jérôme LAMBERT, Jean-Pierre MAGGI, Jacques MOIGNARD, Dominique ORLIAC, Thierry ROBERT, Stéphane SAINT-ANDRÉ et Alain TOURRET,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le mouvement coopératif français est une référence internationale. La France est le deuxième pays coopératif au monde. Les sociétés coopératives y représentent un poids considérable avec plus d’un million de salariés dans tous les secteurs d’activité, 26 millions de sociétaires, 23 000 entreprises et 307 milliards d’euros de chiffre d’affaires cumulé, filiales comprises, en 2014. 73 % des sièges sociaux des grandes coopératives, par leur implantation, contribuent au maillage de notre territoire.

Les sociétaires de coopératives sont détenteurs du capital de la société. Les « parts sociales » font en effet de leur possédant un copropriétaire de l’entreprise avec le droit et le devoir de participer à sa gouvernance. Ces « parts sociales »– sachant qu’un faible nombre de « parts sociales » est généralement détenu par sociétaire – sont rémunérées selon les dispositions de l’article 14 de la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération. Celles-ci disposent que la rémunération des « parts sociales » de l’ensemble des coopératives ne peut excéder le Taux moyen de rendement des obligations (TMO) des sociétés privées publié par le ministre chargé de l’économie.

Toutefois, la réalité actuelle de l’environnement des taux, particulièrement bas pour les obligations d’État, éloigne l’application de la loi du 10 septembre 1947 de son esprit.

En effet, depuis une quinzaine d’année, du fait d’un assèchement des émissions obligataires de sociétés privées, le calcul du TMO correspond au Taux de l’échéance constante (TEC) 10 ans + 0,25 %. Ce TEC 10 est un indice quotidien des rendements des emprunts d’État à long terme correspondant au taux de rendement actuariel d’une obligation du Trésor fictive dont la durée serait de 10 ans. Néanmoins, cet écart de 0,25 % qui correspondait au spread constaté en 2001 ne correspond plus à la réalité actuelle du marché.

Avec l’environnement des taux bas, l’intérêt versé aux « parts sociales » des sociétés coopératives a notoirement baissé au cours des deux dernières années. Ainsi, cette méthode de calcul pose désormais question dans la mesure où le TMO ne cesse de décroître et ne permet plus, par exemple, de rémunérer les « parts sociales » qu’à un maximum de 1,89 % au titre de l’année 2014. Cette tendance doit encore se renforcer en 2015 du fait de la chute des taux des emprunts d’État avec un TMO qui est passé nettement sous la barre des 1 % à 0,91 %.

De surcroît, il faut noter que ce taux d’intérêt servi est brut et qu’il supporte ensuite 15,5 % de contribution sociale généralisée-contribution pour le remboursement de la dette sociale. En outre, 60 % de son montant est imposable à l’impôt sur le revenu.

Dès lors, si la règle de plafonnement est maintenue, la rémunération nette des « parts sociales » n’apparaît plus guère attractive – sans parler d’en faire un placement financier avantageux – notamment par rapport aux produits d’épargne réglementée défiscalisés et liquides tels le Livret A ou le Livret de développement durable. Il en résulte un risque fort d’abandon par les sociétaires de leurs « parts sociales » au profit de produits de placement plus rémunérateurs voire défiscalisés. Ceci d’autant plus que les « parts sociales » sont un instrument de capital pour lequel la rémunération de l’investisseur doit être adaptée aux risques inhérents à sa détention. Cette situation est préoccupante car elle est rencontrée par l’ensemble des sociétés coopératives.

Ainsi, cette proposition de loi vise à redéfinir le calcul de la rémunération des « parts sociales » des sociétaires permettant avant tout de stabiliser le capital des coopératives, ainsi que de soutenir l’activité et le développement des coopératives de France. Cela augmentera par ailleurs en proportion les recettes de l’État.

C’est pourquoi il est proposé dans cette proposition de loi que les coopératives ne pourront servir à leur capital qu’un intérêt dont le taux est, au plus, égal à la moyenne du Taux moyen de rendement des obligations du secteur privé publié par le ministre chargé de l’économie sur les trois années civiles précédant la date de leur assemblée générale, avec une majoration de rémunération pouvant aller jusqu’à deux points, la fixation du plafond par référence à la moyenne sur les trois précédentes années permettant de lisser les évolutions des intérêts versés aux « parts sociales ».

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Après le mot : « taux » la fin de l’article 14 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération est ainsi rédigée : « est au plus égal à la moyenne du taux moyen des obligations du secteur privé publié par le ministre chargé de l’économie sur les trois années civiles précédant la date de leur assemblée générale, majorée d’une rémunération de deux points. »


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